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Chambre territoriale des comptes
de la Polynésie française
______
Le Président
______
Par porteur avec A.R.
N° 2012-052
Papeete, le
13 février 2012
Réf :
ma lettre n° 2011-737 du 23 décembre 2011.
P.J. :
1
Monsieur le Président,
Par lettre citée en référence, je vous ai communiqué le rapport
d’observations définitives de la chambre comptes concernant la gestion des
finances de la Polynésie française pour les exercices 2005 à 2010. Ce rapport a
également été communiqué, pour ce qui les concerne, à vos prédécesseurs.
En l’absence de réponse écrite dans le délai d’un mois fixé par
l’article L. 272-48 du code des juridictions financières, je vous notifie à nouveau
ce rapport.
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 1 sur 84
CHAMBRE TERRITORIALE DES COMPTES
DE LA POLYNESIE FRANCAISE
RAPPORT D’OBSERVATIONS
DEFINITIVES
COLLECTIVITE DE LA POLYNESIE FRANCAISE
FINANCES
Exercices 2005 à 2010
RAPPEL DE LA PROCEDURE
La chambre territoriale des comptes de la Polynésie française a procédé, dans le cadre de
son programme de travail, à l’examen de la gestion des finances de la collectivité de la Polynésie
française pour les exercices 2005 à 2010, en application de l’article LO.272-12 du code des
juridictions financières.
Le président de la Polynésie française en fonctions au moment de l’ouverture du contrôle,
M. Gaston TONG SANG, ainsi que ses prédécesseurs, MM. Gaston FLOSSE et Oscar TEMARU,
en ont été informés par courriers du 15 septembre 2010.
L’entretien préalable prévu par l’article L.272-45 du code des juridictions financières a eu
lieu le 19 mai 2011 avec M. Oscar TEMARU, président en exercice, et les 18 et 25 mai 2011 avec
MM. Gaston TONG SANG et Gaston FLOSSE, anciens présidents.
Lors de ses séances des 27 juin, puis 11 et 12 juillet 2011, la chambre avait formulé des
observations provisoires qui ont été envoyées le 14 octobre 2011 à M. Oscar TEMARU, président
en fonctions. Des extraits ont été adressés à la même date aux anciens ordonnateurs, au Haut-
commissaire et à des tiers mis en cause, pour les observations les concernant. Trois réponses sont
parvenues à la chambre dans le délai imparti de deux mois. Après avoir examiné ces réponses
écrites, la chambre, lors de sa séance du 22 décembre 2011, a arrêté les observations définitives
reproduites ci-après.
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 2 sur 84
SYNTHESE
Le présent rapport, qui porte sur le programme « finances » de la collectivité d’outre-mer,
est principalement consacré à l’évolution de la situation budgétaire et financière de la Polynésie
française au cours des années 2005-2010 ainsi qu’aux réformes qu’elle rend aujourd’hui essentiel
d’adopter. La troisième partie du rapport traite spécifiquement du dispositif de défiscalisation
locale, dont un premier examen critique est conduit, quinze ans après sa création.
1. - La situation budgétaire et financière s’est considérablement dégradée au
cours de la période contrôlée
Les comptes de la Polynésie française comportaient en 2010 144,44 milliards de F CFP
(1,21 milliard d’€) de recettes réelles pour 135,34 milliards de F CFP (1,13 milliard d’€) de
dépenses réelles, après avoir connu une croissance d’environ 8 % sur la période 2004-2010. Les
opérations retracées en section de fonctionnement représentent une masse financière quatre fois plus
importante que celles de la section d’investissement.
1.1. – La maîtrise de la section de fonctionnement s’est altérée
La crise a avivé la fragilité des éléments qui concouraient antérieurement aux équilibres
budgétaires et financiers de la collectivité de la Polynésie française.
Ceux-ci, jusqu’en 2007, reposaient pour l’essentiel sur la plus forte croissance des
prélèvements fiscaux par rapport aux dépenses courantes, l’écart permettant de dégager de
nouvelles capacités de financement.
Toutefois, ce modèle comportait une faiblesse structurelle en présentant l’inconvénient de
donner la priorité à la progression continue des recettes fiscales sur la maîtrise des dépenses de
fonctionnement, alors que le rendement fiscal dépendait exclusivement du dynamisme ou de
l’atonie de l’économie. La diminution des produits fiscaux liée aux premières manifestations de la
crise économique en 2008 a logiquement déstabilisé ce modèle budgétaire, et a plongé la
collectivité dans de graves difficultés.
Sur la période 2004-2010, les dépenses réelles de fonctionnement ont ainsi connu une
croissance plus forte (+ 15 %) que les recettes réelles de fonctionnement (+ 13,5 %).
Conséquence de l’effet de ciseaux résultant de ce différentiel de croissance, l’épargne nette
disponible pour financer des investissements nouveaux est devenue négative en 2008 et ne s’est
rétablie en 2010 que grâce à des recettes exceptionnelles. L’épargne de gestion, qui ne prend pas en
compte les résultats exceptionnels, continue de décroître.
En 2010, cette dégradation n’était toujours pas jugulée, et la collectivité ne s’était toujours
pas extirpée de la spirale non vertueuse qui fragilise sa situation et réduit sensiblement ses
investissements dans l’économie. La collectivité, en dépit de ses efforts pour maintenir ses dépenses
de fonctionnement, n’était plus en mesure d’exécuter le budget voté, sans retenir des mandats pour
ménager sa trésorerie exsangue, ou sans différer des investissements, faute de disponibilités et de
prêteurs consentants.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 3 sur 84
Cette situation est d’autant plus sérieuse qu’elle a longtemps été partiellement occultée par
des comptes entachés d’insincérités importantes qui n’ont donné lieu qu’à des réactions tardives. Le
défaut de sincérité n’a été l’objet des premières mesures correctives significatives qu’en 2010 alors
qu’il avait été relevé en 2006 dans le précédent rapport de la Chambre consacré aux finances de la
collectivité.
Cette question, au surplus, avait été évoquée dans le Rapport Public de la Cour des comptes
en 2007, puis, une nouvelle fois, en 2009 pour déplorer la faiblesse des progrès constatés, même si
plusieurs chantiers avaient été ouverts par la collectivité. N’étaient pratiqués, ni les amortissements
techniques, ni les provisions couvrant les risques contentieux, ni le rattachement régulier de la
comptabilité des receveurs particuliers (impôts, conservation des hypothèques), le compte de
gestion ne retraçant toujours pas la totalité des créances de la collectivité.
1.2. – La section d’investissement a été peu dynamique
Dans ce contexte, le financement des investissements est devenu plus difficile. Aussi, les
conditions dans lesquelles la collectivité est parvenue à maintenir un niveau de dépenses de l’ordre
de 30 milliards par an se sont-elles détériorées.
Cette situation est particulièrement critique puisqu’elle équivaut pour la collectivité à une
amputation de sa capacité à décider de ses investissements. En effet, dans ce contexte déprimé, les
dépenses d’investissement de la collectivité sont financées dès le premier franc par des subventions
reçues et par des emprunts. Au demeurant, cette dernière possibilité s’avère de plus en plus
problématique, la disparition de l’épargne nette agissant comme un signal de défiance pour les
prêteurs. En 2010, ces difficultés se sont traduites par un décrochage du niveau des dépenses
d’équipement par rapport aux années précédentes. Or, financer dans les meilleures conditions
possibles les dépenses d’équipement a toujours figuré parmi les objectifs prioritaires des stratégies
budgétaires et financières de la collectivité de la Polynésie française qui manque toujours
d’équipements structurants.
Pour combler l’absence d’autofinancement, le recours à l’endettement s’est rapidement
accru, l’encours de dette entre ayant progressé de 60 % en 6 ans. Des prises de risques croissants
ont accompagné la gestion de l’encours dont 14 % est composé de prêts structurés particulièrement
volatils, exposant la collectivité au risque latent de taux d’intérêt très élevés.
Mais plus que le niveau de l’encours, c’est la vitesse de sa progression qui est apparue
inquiétante, d’autant que la dette représente déjà 74 % du total du budget. La collectivité a dû
restreindre depuis 2009 ses campagnes d’emprunt, se heurtant en outre, de plus en plus à des
conditions de prêt dégradées par rapport aux périodes précédentes.
Ces difficultés budgétaires ont naturellement retenti sur la trésorerie de la collectivité, qui
depuis 2008, est confrontée à de vives tensions chroniques.
2. - Le redressement budgétaire et financier passe par des réformes de
structure
La crise a joué le rôle de catalyseur des difficultés budgétaires et financières de la
collectivité, mais leur origine est antérieure. Elle dépend très largement de facteurs structurels.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 4 sur 84
2.1. - Les difficultés actuelles sont plus structurelles que conjoncturelles
Les effets dépressifs de la mauvaise conjoncture économique qui frappent la Polynésie
française depuis 2008, se sont ajoutés aux effets propres à la structure des dépenses et des recettes
budgétaires de la collectivité.
Par rapport à la situation budgétaire antérieure à l’apparition de la crise, celle-ci a eu pour
effet d’accélérer les processus en cours sans en changer fondamentalement la nature. Le phénomène
d’accélération des dégradations budgétaires et financières a été ressenti aussi bien du côté des
recettes que des dépenses. Pour les premières, la crise a impacté négativement les produits fiscaux
et douaniers. La chute des recettes a été directement liée à la conjoncture défavorable. Entre 2007 et
2009, environ 11 milliards de F CFP de rendement fiscal net ont ainsi été détruits par la crise
économique qui s’est installée en Polynésie française à partir de 2007.
La crise a aussi augmenté les dépenses de transfert. Les soutiens aux satellites, confrontés
aux difficultés conjoncturelles du marché, et les dépenses d’interventions sociales ont connu une
hausse significative. Indirectement, la crise a contribué aussi à réaliser les risques latents des prêts
toxiques contenus dans l’encours.
Mais l’origine profonde des difficultés budgétaires est bien structurelle. Dans son rapport
précédent, la Chambre avait décelé les signes avant-coureurs de difficultés, notamment l’absence de
marge de manoeuvre sur le fonctionnement en raison de l’extrême rigidité des dépenses compte tenu
notamment du poids des dépenses de personnel.
La détérioration des finances est donc antérieure à la crise économique. Cette détérioration
avait été en partie masquée par les insincérités comptables, mais aussi par l’utilisation abusive en
fonctionnement de l’aide à l’investissement qu’était la DGDE pour financer des régimes d’aide à
l’emploi.
2.2. – Des réformes portant sur la dépense publique et la fiscalité sont
indispensables
Le niveau des dépenses de fonctionnement atteint en 2008 était insoutenable à terme
Le format de l’administration apparaît disproportionné et mal adapté aux missions de la
collectivité. En 2004, il y avait 5.322 agents, toutes catégories confondues. En 2010, il y en avait
455 de plus, mais avec un ratio d’encadrement toujours aussi faible.
La multiplicité des structures et le morcellement des missions a eu un coût budgétaire très
lourd pour des résultats médiocres. De nombreux doublons existent encore dans les services et les
organismes périphériques de la Polynésie française qui interviennent parfois dans des secteurs
concurrentiels où l’administration et ses satellites n’ont pas leur place. La collectivité n’a pas traité
ce problème avant la survenance de la crise. Mais la solution qui sera trouvée pour mettre fin à
l’hypertrophie de l’administration par rapport aux possibilités financières de la collectivité est une
des clés du redressement.
La définition de politiques publiques adaptées, clairement déclinées et périodiquement
évaluées est indispensable. La multiplication des interventions publiques sans plan stratégique sans
vision d’ensemble a coûté très cher à la collectivité de la Polynésie française, comme l’ont déjà
souligné plusieurs rapports de la Chambre.
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Par ailleurs, le système fiscal et douanier est trop sensible aux effets de conjoncture car il
repose essentiellement sur des impôts indirects et des taxes (72% de la fiscalité et en 2010) qui
affectent essentiellement les consommateurs. Il doit donc être rééquilibré pour être plus efficace et
plus équitable.
Le développement de la fiscalité directe doit être envisagé pour permettre de réguler le
niveau des recettes fiscales quand la conjoncture économique pèse sur le montant des impôts
indirect et des taxes. Toutefois la collectivité doit procéder avec méthode, afin de préserver le
niveau des recettes fiscales et autofinancer la réforme. C’est ainsi que la diminution de la fiscalité
indirecte ne peut être envisagée qu’à mesure que les dépenses budgétaires inutiles seront éliminées
ou qu’une fiscalité directe rénovée, sur le modèle de la CST cédulaire ou, mieux encore, d’impôts
assis sur le patrimoine (fiscalité immobilière, droits de transmission) sera définie.
Il n’existe pas d’impôt sur le revenu. S’en rapproche le prélèvement à la source au profit du
régime de solidarité du système de protection sociale. Cet impôt, dit contribution de solidarité
territoriale (CST), ne transite pas par le budget mais est directement versé au régime social. C’est
une contribution due par les salariés et les professions et activités non salariées (commerçant,
professions libérales, agriculteurs). Il existe aussi une CST sur les capitaux mobiliers (IRCM).
Enfin, la mise en oeuvre d’une politique fiscale rénovée requiert l’allocation de moyens
supplémentaires afin d’améliorer les rendements fiscaux et la connaissance des bases. Les taux de
recouvrement sont en moyenne inférieurs de deux points aux taux métropolitains. Par ailleurs, les
revenus des ménages, notamment les revenus non salariaux, sont peu connus, de même que les
bases foncières. Or, l’administration des impôts a un format trop réduit, notamment en ce qui
concerne les agents de catégorie A, pour mener à bien toutes ses tâches. Des missions sont, dès lors,
sacrifiées, faute de moyens et de formation professionnelle organisée et performante. C’est ainsi
que le contrôle fiscal n’a jusqu’à présent pas été exécuté avec des moyens suffisants. (5 agents de
catégories A).
Les grands chantiers qui constituent la réorganisation de l’administration sur un nouveau
format et la réforme fiscale, doivent être conduits en respectant un calendrier resserré et précis.
3. - La défiscalisation locale : un dispositif à reconsidérer
3.1. - Les dispositifs de défiscalisation se sont révélés coûteux pour la collectivité et
très avantageux pour certains contribuables et investisseurs
La dépense fiscale induite par les mécanismes de défiscalisation locale est lourde. Depuis
1995, le dispositif défiscalisant dit de « la loi Flosse » a coûté 108 milliards de F CFP (0,9 milliard
d’€) au budget de la Polynésie française. Les crédits d’impôt ainsi obtenu ont représenté en
moyenne sur la période le tiers du produit de l’impôt sur les sociétés.
A ces montants, il conviendrait d’ajouter les interventions complémentaires instituées afin
d’aider les entreprises réalisant en Polynésie française des investissements productifs dans les
secteurs éligibles au dispositif de défiscalisation locale. C’est ainsi que l’aide fiscale à l’exploitation
(AFE) a représenté, une dépense supplémentaire estimée à 9 milliards de F CFP. Aussi, le coût
véritable de la défiscalisation locale depuis sa création serait au total de 117 milliards de F CFP
(0,98 milliard d’€), soit approximativement le produit de cinq années de fiscalité directe.
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Le paramétrage du dispositif a avantagé l’investisseur sans imposer de contreparties à la
hauteur de l’effort fiscal consenti par la Polynésie française.
Les investisseurs fiscaux ont tiré un avantage particulier du dispositif en obtenant depuis
l’instauration de ce système en 1995, 40 % de l’avantage fiscal (crédit d’impôt) pour les portages
financiers qu’ils ont réalisés, les porteurs de projet en ayant conservé 60 %.
Certains investisseurs, appartenant à des groupes locaux, ont bénéficié du système
d’incitation fiscale pour les mêmes opérations, à la fois en qualité de porteur de projet et
d’investisseur fiscal.
Des secteurs, comme le commerce de grande distribution, ont pu bénéficier du système alors
que leurs caractéristiques économiques les écartent du dispositif de défiscalisation national (loi
Girardin).
L’incitation fiscale dans le cadre de la double défiscalisation (nationale et locale) est
particulièrement puissante puisqu’elle peut actuellement atteindre, en cumulant les aides fiscales, 70
% du coût du projet. Le taux d’aide pouvait, avant la réforme issue de la loi du pays du 1
er
avril
2009, atteindre même 90%. Avec de tels paramètres, l’intérêt fiscal a naturellement supplanté
l’intérêt économique des projets.
3.2. - Les retombées économiques et sociales de la défiscalisation s’avèrent
limitées
L’effet le moins contestable de la défiscalisation en termes de développement économique a
été un impact positif, du moins jusqu’en 2004, sur le secteur du BTP et du logement.
Le secteur du BTP a été soutenu par les constructions d’hôtels aussi bien que par les
constructions d’immeubles. Le ralentissement du courant d’affaires lié aux premières difficultés de
financement de la demande publique et de la défiscalisation en 2004 et 2005 s’est immédiatement
répercuté sur le secteur du BTP qui, depuis 2009, est en crise.
La défiscalisation locale a conduit à des surinvestissements, notamment dans le domaine de
la construction hôtelière. Ce secteur a été le premier bénéficiaire du dispositif de défiscalisation
locale. La Polynésie française s’est ainsi spécialisée dans le tourisme de luxe qui représente
désormais 60 % de l’offre hôtelière.
Alors que le secteur touristique polynésien est en crise depuis 2001, les investissements
défiscalisés ont continué jusqu’en 2009. Il en a résulté un renforcement de la concurrence par les
prix, d’abord entre hôtels de luxe, puis entre ceux-ci et les hôtels de catégorie inférieure et les
pensions de famille, dans un contexte global de stagnation, voire de diminution de la clientèle. Le
surinvestissement, facilité par les mécanismes défiscalisants, a ainsi conduit à des effets pervers, les
nouveaux hôtels captant la clientèle des hôtels précédemment installés et précipitant leur faillite ou
leur fermeture. De ce fait, de nombreux hôtels défiscalisés ont dû réduire leur activité, être
reconvertis, ou même fermés, avec des pertes d’emploi pour le secteur.
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3.3. - Une reconsidération globale est nécessaire
Les réformes débutées en 2004, puis consolidées en 2009 par la loi du pays précitée, sont
encore insuffisantes.
Certes, le coût budgétaire de la défiscalisation a été ramené à 4 milliards par an au lieu des 7
dépensés antérieurement. Une logique d’aménagement du territoire a été introduite dans le
dispositif existant, grâce à la majoration du taux de crédit d’impôt pour des localisations
géographiques sélectionnées en dehors de TAHITI et de BORA BORA, qui, jusqu’à présent,
concentrent la grande majorité des projets.
La durée minimale de portage a été fixée à 12 mois, ce qui théoriquement supprime les
possibilités de placements de courte durée qui étaient jusque là possibles. Le taux de crédit d’impôt
pour l’hôtellerie de luxe, cible principale du dispositif, a été ramené de 60 à 40 %. Un suivi des
opérateurs et des projets est désormais organisé et placé sous la responsabilité du service des
contributions afin d’être en mesure à l’avenir de documenter les retombées économiques et sociales
de la défiscalisation locale avec des statistiques précises.
Toutefois, les moyens nécessaires à l’administration de ce dispositif n’ont pas été renforcés
de manière pérenne. Par ailleurs, un dispositif sans avis de la commission d’agrément a été instauré
pour les projets de défiscalisation de moins de 100 MF CFP. Ces projets ont été placés sans
adjonction des moyens techniques correspondants sous le seul contrôle de la commission de
contrôle budgétaire de l’Assemblée de la Polynésie française dans le cadre de la supervision (avis
consultatif) qu’elle doit exercer sur les concours financiers accordés par la Polynésie française.
L’encadrement de la double défiscalisation est toujours inexistant, alors que les aides
fiscales obtenues dans ce contexte sont très puissantes, puisqu’elles peuvent atteindre 70 % du coût
du projet.
En raison de ses excès, de son coût et de ses résultats peu probants, la redéfinition de cette
politique fiscale paraît devoir figurer en bonne place dans la réforme fiscale globale qui est
annoncée par la collectivité de la Polynésie française.
En outre, son cadre macroéconomique doit être mieux défini afin d’éviter les effets de
saturation de l’offre dont souffre aujourd’hui le secteur de l’hôtellerie de luxe.
Si le principe de la défiscalisation n’est pas remis en cause par la collectivité, il conviendrait
sûrement d’en limiter le périmètre d’intervention aux secteurs où son apport est économiquement
déterminant.
Une approche recentrée de la défiscalisation pourrait conduire à réduire le montant des
crédits d’impôt. Cette nouvelle stratégie doit cependant tenir le plus grand compte des
caractéristiques de l’économie polynésienne, qui est une économie de transferts publics et de
services, qui, à eux seuls, représentent 53,5 % de la valeur ajoutée des services marchands (hors
commerce). La crise qu’elle traverse depuis 2008 provient principalement d’une insuffisance
globale de la demande (stagnation du pouvoir d’achat, diminution de la clientèle touristique, etc...).
Cette conjoncture rend provisoirement inadaptée la défiscalisation locale, qui, par définition, est une
action sur l’offre productive.
En termes de développement économique, la comparaison de la défiscalisation avec d’autres
moyens d’intervention publique, tels le prêt participatif ou la subvention, devrait être encouragée.
Compte tenu des observations qu’elle a formulées dans le cadre du présent rapport, la
chambre territoriale des comptes adresse à la collectivité diverses recommandations qui figurent en
conclusion.
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SOMMAIRE
1 – La situation budgétaire et financière s’est considérablement dégradée au
cours de la période contrôlée
.....................................................................................
11
1.1. - La maîtrise de la section de fonctionnement s’est altérée
................................................
11
1.1.1. - La progression des dépenses de fonctionnement n’a pas été ralentie avant 2008
....................
11
1.1.1.1. - Malgré leur niveau élevé, les dépenses ont continué à progresser
........................................................
11
1.1.1.1.1 – Une inflexion à la baisse très tardive et non pérenne
.............................................................................
11
1.1.1.1.2. - Le poids élevé des dépenses de transfert
................................................................................................
12
1.1.1.1.3. - Le niveau élevé des dépenses de personnel
............................................................................................
13
1.1.1.2 - Le niveau atteint par les dépenses contraintes réduit considérablement les marges de manoeuvre de la
collectivité
..............................................................................................................................................
14
1.1.2. - La croissance des recettes de fonctionnement a été interrompue de 2007 à 2009
....................
15
1.1.2.1. - L’érosion des recettes fiscales et douanières
.........................................................................................
16
1.1.2.2. – L’évolution erratique des concours de l’Etat à la section de fonctionnement
......................................
16
1.1.3. - L’évolution des montants d’épargne est préoccupante
..............................................................
17
1.1.3.1. – La dégradation des montants d’épargne de la collectivité
....................................................................
18
1.1.3.1.1. - L’évolution de l’épargne brute et de l’épargne nette
.............................................................................
18
1.1.3.1.2. - L’évolution de l’épargne de gestion
.......................................................................................................
19
1.1.3.2. - Un effet de ciseaux non jugulé
..............................................................................................................
19
1.1.4 - De nombreuses insincérités budgétaires et comptables ont retardé la mise en oeuvre des
mesures de redressement
.................................................................................................
20
1.2. – La section d’investissement a été peu dynamique
............................................................
22
1.2.1. – La stagnation voire la réduction des dépenses d’investissement (hors remboursements
d’emprunts)
......................................................................................................................
22
1.2.2. – Les capacités de financement de la section d’investissement se sont amenuisées
....................
23
1.2.2.1. – La réduction des ressources propres annuelles d’investissement et des concours de l’Etat
.................
23
1.2.2.2. – La collectivité a largement utilisé ses réserves pour compenser la faiblesse de l’épargne
...................
24
1.2.2.3. - Le recours à l’emprunt, de plus en plus sollicité, est devenu problématique
........................................
25
1.2.2.3.1. - La gestion de la section d’investissement a conduit à une augmentation de l’encours de la dette
.........
25
1.2.2.3.2. - La gestion de l’encours a conduit à des prises de risques latents sur une partie de la dette
..................
26
1.2.2.3.3. - La Polynésie française tend à devenir une collectivité à risque pour les prêteurs
.................................
29
1.3. - La situation financière de la collectivité est devenue instable et risquée
.....................................
32
1.3.1. - La trésorerie connaît des tensions chroniques
..........................................................................................
32
1.3.2. - Les risques d’insolvabilité ont considérablement augmenté
....................................................................
33
2 – Le redressement budgétaire et financier passe par d’urgentes réformes de
structure
......................................................................................................................
34
2.1. - Les difficultés actuelles sont plus structurelles que conjoncturelles
...............................
34
2.1.1. - La crise a joué un rôle de catalyseur
..........................................................................................
34
2.1.2. - Les difficultés budgétaires et financières de la Polynésie française s’expliquent aussi par des
causes structurelles
..........................................................................................................
35
2.1.2.1. – L’accroissement du poids des dépenses de fonctionnement, insoutenable à terme, est antérieur à la
crise et étroitement lié à la mauvaise organisation de la collectivité
......................................................
35
2.1.2.2. - Le système fiscal et douanier est trop sensible aux effets de conjoncture
.............................................
37
2.1.2.2.1. - La fiscalité repose essentiellement sur des impôts indirects et des taxes
...............................................
38
2.1.2.2.2. - La fiscalité indirecte et les recettes douanières surréagissent à la conjoncture économique
.................
38
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2.2. - Des réformes portant sur la dépense publique et la fiscalité sont indispensables
.........
39
2.2.1. – Une diminution progressive des dépenses de fonctionnement
..................................................
39
2.2.1.1. – Réorganiser les moyens pour parvenir à un nouveau format d’administration
.....................................
40
2.2.1.2. – Revoir les relations financières avec les communes
.............................................................................
40
2.2.2. - La mise en oeuvre d’une réforme fiscale globale pour optimiser les prélèvements publics
......
41
2.2.2.1. - Une modification progressive de la structure fiscale est indispensable
.................................................
41
2.2.2.1.1. - Pour aller vers plus d’efficacité
.............................................................................................................
41
2.2.2.1.2. - Pour aller vers plus d’équité
..................................................................................................................
44
2.2.2.2. – L’augmentation des moyens de l’administration fiscale doit être envisagée
........................................
45
2.2.2.2.1. – Des moyens doivent être alloués en vue de réaliser les préalables techniques de toute réforme
...........
45
2.2.2.2.2. - Renforcer les services fiscaux
................................................................................................................
46
3 - La défiscalisation locale : un dispositif à reconsidérer au regard des objectifs
visés et des contraintes actuelles
...............................................................................
47
3.1 - Les dispositifs de défiscalisation se sont révélés coûteux pour la collectivité et très
avantageux pour certains contribuables et investisseurs
..........................................................
49
3.1.1 - Une dépense fiscale très lourde
....................................................................................................
49
3.1.2 - Les incitations fiscales ont été très avantageuses pour certains contribuables et investisseurs 51
3.1.2.1. - Le paramétrage du dispositif a avantagé l’investisseur sans imposer des contreparties à la hauteur de
l’effort fiscal consenti
............................................................................................................................
51
3.1.2.1.1. - Les taux de crédits d’impôt
....................................................................................................................
52
3.1.2.1.2. – L’utilisation des crédits d’impôt
............................................................................................................
53
3.1.2.1.3. – La définition des bases éligibles et des contrôles
..................................................................................
54
3.1.2.1.4. - Les conditions offertes aux investisseurs fiscaux
....................................................................................
55
3.1.2.2. - Les secteurs bénéficiaires des aides fiscales les plus importantes
.........................................................
57
3.1.2.2.1. - La construction hôtelière de luxe et de logements intermédiaires
..........................................................
58
3.1.2.2.2. - Des effets d’aubaine pour la grande distribution et la restauration
.......................................................
58
3.2. - Les retombées économiques et sociales de la défiscalisation s’avèrent limitées
.............
59
3.2.1 – L’absence de véritable évaluation
...............................................................................................
59
3.2.2 - Une mobilisation de l’épargne privée et du secteur de la construction immobilière dont les
effets ont été limités dans le temps
...................................................................................
60
3.2.2.1- La mobilisation des capitaux privés
........................................................................................................
61
3.2.2.2 - Le soutien du secteur de la construction immobilière
............................................................................
61
3.2.3. – Des valeurs ajoutées et des retombées en matière d’emploi peu significatives sur le long
terme
.................................................................................................................................
62
3.2.3.1. - Des surinvestissements dans le secteur de la construction hôtelière de luxe
.........................................
62
3.2.3.2. - Des structures hôtelières très peu rentables
...........................................................................................
63
3.2.3.3. - Des effets sur l’emploi non pérennes
....................................................................................................
64
3.3 - Une reconsidération globale est nécessaire
.........................................................................
65
3.3.1. - Les réformes du dispositif sont encore insuffisantes
..................................................................
65
3.3.1.1. - Les précisions apportées au dispositif fiscal demandent à être complétées
..........................................
66
3.3.1.1.1. - La demande d’agrément
.........................................................................................................................
66
3.3.1.1.2. - Les procédures d’agrément
....................................................................................................................
67
3.3.1.1.3. - Les obligations de l’investisseur
............................................................................................................
69
3.3.1.2. - Les méthodes doivent être renouvelées pour assurer l’efficacité de la dépense fiscale
........................
70
3.3.2. - Une redéfinition de la politique fiscale paraît indispensable
.....................................................
71
3.3.2.1. - Le dispositif conserve encore trop de souplesses pour être complètement maîtrisable pour les finances
publiques
................................................................................................................................................
71
3.3.2.1.1. - L’agrément dérogatoire
.........................................................................................................................
72
3.3.2.1.2. - Le droit applicable
.................................................................................................................................
73
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 10 sur 84
3.3.1.2.3. - La double défiscalisation n’est pas encadrée
.........................................................................................
73
3.3.2.2. - La comparaison avec d’autres moyens d’intervention publique plus efficients doit être
systématiquement opérée
.......................................................................................................................
74
3.3.2.2.1. - L’étroitesse des marges de manoeuvre de la collectivité plaide pour un recadrage de la mesure
fiscale
.......................................................................................................................................................................
74
3.3.2.2.2. - Le recours à d’autres moyens alternatifs doit être étudié
......................................................................
74
Conclusion générale et recommandations
...............................................................
76
ANNEXE 1 :
Situation financière de la Polynésie française : 2004 – 2010
.......................................
78
ANNEXE 2 :
Produits de la fiscalité directe 2004-2010
......................................................................
79
ANNEXE 3 :
Produits de la fiscalité indirecte 2004 -2010
...................................................................
80
ANNEXE 4 : Evolution des résultats cumulés de 2004 à 2010 (budget principal)
...............................
81
ANNEXE 5 :
Dépenses réelles d’investissement hors remboursement de la dette (prévisions
budgétaires et réalisations)
..............................................................................................
82
ANNEXE 6 :
Répartition de l’encours de la dette de la collectivité de Polynésie française, par
bailleurs de fonds
.............................................................................................................
83
ANNEXE 7 :
Tableau récapitulatif du montant des crédits d’impôt imputés de 1996 à 2010
............
84
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 11 sur 84
1 – La situation budgétaire et financière s’est considérablement dégradée au
cours de la période contrôlée
Les comptes de la Polynésie française comportaient en 2010 144,44 milliards de F CFP
(1,21 milliard d’€) de recettes réelles pour 135,34 milliards de F CFP (1,13 milliard d’€) de
dépenses réelles, après avoir connu une croissance d’environ 8 % sur la période 2004-2010. Les
opérations retracées en section de fonctionnement représentent une masse financière quatre fois plus
importante que celles de la section d’investissement.
1.1. - La maîtrise de la section de fonctionnement s’est altérée
Durant la période examinée, les dépenses réelles de fonctionnement ont connu une
croissance plus forte (+ 15 %) que les recettes réelles de fonctionnement (+ 13,5 %). Cette situation
a été à l’origine de difficultés budgétaires qui menacent encore la Polynésie française. L’effet de
ciseaux résultant de ce différentiel de croissance, amorcé en 2004, n’était toujours pas jugulé en
2010 (annexe 1). L’ampleur de cette dégradation aurait même pu être accentuée si plusieurs
insincérités budgétaires et comptables, dûment signalées dès 2005-2006, avaient été entièrement
corrigées.
1.1.1. - La progression des dépenses de fonctionnement n’a pas été ralentie avant
2008
Ce n’est qu’en 2008, deux ans après le début de la contraction des recettes de
fonctionnement, qu’une action de freinage des dépenses a été mise en oeuvre. Toutefois, même
après avoir obtenu une diminution du montant des dépenses en 2009, l’intensité de l’effort accompli
est restée insuffisante pour permettre à la collectivité de sortir de l’effet de ciseaux auquel elle est
restée confrontée jusqu’en 2010.
1.1.1.1. - Malgré leur niveau élevé, les dépenses ont continué à progresser
Après avoir crû de plus de 7 % par an au cours des quatre années précédentes, les dépenses
réelles de fonctionnement avaient atteint en 2004 un niveau déjà élevé de 92 ,7 milliards de F CFP,
ce qui représentait environ 18 % du PIB
1
. En 2010, malgré leur rythme de croissance plus modéré
(+ 2,4 %), leur poids dans le PIB
2
s’est encore accru (20 %).
1.1.1.1.1 – Une inflexion à la baisse très tardive et non pérenne
Les dépenses réelles de fonctionnement par habitant ont continué d’évoluer à la hausse
jusqu’en 2008, atteignant 422 425 F CFP. Ce n’est qu’en 2009 qu’une légère inflexion apparaît, la
dépense moyenne par habitant baissant de 7,2 % par rapport à l’année précédente avant de remonter
légèrement en 2010, de + 1,9 % (source : rapport d’information financière 2011, Direction du
Budget).
1
511,9 milliards de F CFP (Direction du Budget).
2
Chiffres provisoires : 533,9 milliards de F CFP (Direction du Budget).
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 12 sur 84
Le niveau des dépenses réelles de fonctionnement par habitant est donc passé entre 2004 et
2008, de 366 663 F CFP à 422 425 F CFP, avant d’amorcer un léger repli à 399 440 F CFP en 2010.
Le niveau, de progression de ces dépenses n’a pas été assez rapidement infléchi après 2005,
alors que les recettes de fonctionnement stagnaient.
Leur progression s’est poursuivie jusqu’en 2008 sur un rythme élevé : + 3 % en 2006, + 7 %
en 2007, + 4 % en 2008. Ce n’est qu’en 2009, que la courbe s’est inversée, les dépenses réelles de
fonctionnement ayant baissé de 5 %, ce qui a correspondu à une diminution de 5,4 milliards de
F CFP.
Jusqu’en 2008, l’évolution des dépenses réelles de fonctionnement a donc suivi la lancée de
la période précédente, période au cours de laquelle les dépenses de personnel, de fonctionnement
courant et de transferts continuaient de croître à un rythme soutenu. Toutefois, l’évolution des
recettes de fonctionnement n’était plus aussi dynamique que sur la période antérieure, sous l’effet
notamment de la crise économique. Après, des efforts d’économie devenus inévitables, les dépenses
de personnel ont été contenues à partir de 2009 au niveau élevé où elles étaient parvenues
(32 milliards de F CFP). Les dépenses de transfert et de fonctionnement courant ont amorcé, la
même année, une décrue de l’ordre de 5 milliards.
Cette baisse n’a été pas poursuivie en 2010, la hausse des dépenses de fonctionnement ayant
repris sur un rythme de 2 %. La reprise de la progression est en partie due aux crédits pour la
première fois consacrés aux admissions en non valeur (2 milliards de F CFP), qui vont dans le sens
d’une amélioration de la sincérité des comptes, alors que l’effort d’économie sur le fonctionnement
courant a été légèrement poursuivi (0,5 milliards de F CFP). En revanche, la baisse qu’enregistrent
les dépenses de transfert en 2010, résulte de modalités de calcul du fonds intercommunal de
péréquation qui sont contestables.
1.1.1.1.2. - Le poids élevé des dépenses de transfert
Les dépenses de transfert constituent toujours la première dépense de fonctionnement de la
collectivité de la Polynésie française. Ce poste correspond aux interventions économiques et
sociales de la collectivité.
En 2010, les subventions et participations courantes ou exceptionnelles représentaient
46,9 % des dépenses réelles de fonctionnement, en augmentation de 15,7 % par rapport à 2004.
Jusqu’à l’inflexion de 2009, ces subventions et participations n’avaient cessé de croître à mesure
que les interventions économiques de la collectivité de la Polynésie française se multipliaient. En
2008, elles ont représenté le poids maximal de 52,6 % des dépenses réelles de fonctionnement.
La collectivité a augmenté son soutien à ses « satellites » confrontés à des difficultés
économiques et financières (ATN, TNR, TNTV, GIE TAHITI Tourisme
) et aux fonds
d’intervention par lesquels elle administre les prix de plusieurs produits sensibles (denrées
alimentaires de base, essence).
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 13 sur 84
Depuis 2004, l’augmentation des dépenses de transfert a été le marqueur des difficultés de
nombreux organismes périphériques mis en place au début des années 2000, dont plusieurs rapports
de la chambre ont analysé les difficultés et les échecs
3
. En 2009, 12 milliards de F CFP ont ainsi été
versés à ces organismes, 1,9 milliard de F CFP à d’autres entreprises et associations. Ces montants
avaient continué de progresser par rapport à 2008 où ils s’étaient élevés à 11,7 milliards de F CFP et
encore plus par rapport à 2007, où le versement n’avait été que 9,7 milliards de F CFP.
Par ailleurs, les subventions au régime de solidarité ont atteint 12,9 milliards de F CFP en
2009, en retrait par rapport à 2007 où elles s’élevaient à 15,7 milliards de F CFP, et 10 milliards de
F CFP pour les aides diverses à caractère économique (emploi, formation, revalorisation du SMIG,
versement aux fonds de soutien et de régulation).
Enfin, la chambre relève que la collectivité a appliqué d’office, de façon contestable, de
nouvelles modalités de calcul du Fonds Intercommunal de péréquation (FIP). La Polynésie
française a considéré que les recettes entrant dans l’assiette de calcul du FIP correspondaient aux
recettes effectivement encaissées par la collectivité, et non plus aux recettes inscrites à son budget
primitif. L’économie ainsi réalisée a été relativement substantielle puisqu’au lieu de 14,5 milliards
de F CFP, le versement aux communes s’est seulement élevé à 13,2 milliards de F CFP.
L’interprétation de l’article 52 de la loi organique à laquelle se livre la collectivité de la
Polynésie française est très contestable. Le Tribunal administratif de Papeete, saisi pour avis par le
Haut commissaire de la République le 28 septembre 2010, a confirmé que rien ne permettait dans la
rédaction actuelle de l’article 52 de calculer le montant du FIP en fonction des recouvrements
d’impôts intervenus.
1.1.1.1.3. - Le niveau élevé des dépenses de personnel
Par ordre d’importance, les frais de personnel restent le deuxième poste de dépenses de
fonctionnement de la Polynésie française.
Le poids des charges de personnel dans l’ensemble des dépenses réelles de fonctionnement
était de 28,3 % en 2004. Malgré le niveau élevé alors atteint, ces dépenses n’ont pas baissé et
représentaient, en 2010, 30 % des dépenses réelles de fonctionnement.
En 2006, la hausse des dépenses de personnel a dépassé 11 %. Depuis 2007, leur
progression annuelle a fortement ralenti : 2,3 % en 2007, avant de se stabiliser, la progression
n’étant plus que de 0,03 % en 2008, 3,8 % en 2009.
En 2010 les dépenses de personnel enregistrent pour la première fois une baisse, de près de
1 % (300 millions de F CFP), notamment sous l’effet du gel des embauches.
Le poids important des dépenses du personnel s’explique en effet d’abord par le nombre
d’agents rémunérés par la collectivité.
En décembre 2004, ce nombre, était déjà très important (5322 agents). Il a continué de
progresser jusqu’en 2009.
3
Rapports Chambre territoriale des comptes sur ATN, TNR, TNTV.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 14 sur 84
Entre 2004 et 2010, toutes catégories confondues, l’effectif a crû de 405 agents.
L’augmentation la plus forte a eu lieu en 2006, l’effectif total ayant atteint 6 106 agents après les
intégrations « sans concours » des ex-agents du GIP et le reclassement des bénéficiaires d’emplois
de cabinet dans les services.
Ce n’est qu’en 2007 que l’effectif a amorcé une légère décroissance, suivie d’une hausse
modérée en 2009. Cette stabilisation n’a pas correspondu immédiatement à celle de la masse
salariale, en raison de la politique de titularisation qui s’est intensifiée durant cette période. Depuis
2004, le nombre de titulaires a doublé passant de 1 985 à 3 230 agents. Cette modification de la
proportion d’agents titulaires s’est traduite par une diminution de la flexibilité de la masse salariale
qui constitue à présent un facteur d’inertie compliquant le retour à un niveau optimal de dépenses.
L’évolution du montant moyen des salaires et traitements versés n’intervient qu’en second
rang dans l’explication de la hausse des dépenses du personnel.
Une politique de modération de la masse salariale a été amorcée en 2009. Cette politique
s’est traduite par un gel des embauches ainsi que par le maintien du gel du point d’indice à sa valeur
2008
4
. Les charges de personnel ont ainsi été contenues à 32 milliards de F CFP, soit à leur niveau
de 2009. La suspension des droits aux congés administratifs et la réduction de 10 % du montant de
certaines indemnités, décidées en 2011, ne produiront leurs effets qu’à partir de cette année.
1.1.1.2 - Le niveau atteint par les dépenses contraintes réduit considérablement les
marges de manoeuvre de la collectivité
Dans le rapport de la Chambre du 31 janvier 2006 sur les finances de la Polynésie française,
l’excessive rigidité des dépenses avaient été relevée : «
Sur la période 1998/2003, les dépenses de
personnel et les dépenses relatives aux subventions et allocations représentent entre 80 et 85 % des
dépenses réelles de fonctionnement. Les dépenses relatives au fonctionnement des services sont
quasiment stables sur les trois derniers exercices et représentent environ 10 % des dépenses. Ces
trois postes constituent environ 90 % des dépenses de fonctionnement et révèlent une forte rigidité
desdites dépenses.
».
Cette caractéristique négative ne s’est pas estompée depuis 2004, le niveau des dépenses de
fonctionnement continuant d’être fortement conditionné par les engagements antérieurs de la
collectivité.
Pour prendre l’exacte mesure des contraintes qui pèsent sur la section de fonctionnement du
budget de la Polynésie française, il conviendrait d’ajouter aux dépenses de personnel et de transfert,
les charges financières ainsi que les dépenses résultant des marchés et des conventions passées par
la collectivité.
Ces dépenses agissent comme des contraintes sur le niveau des charges de la collectivité qui
ne peut s’en dispenser sans précaution, sauf, très souvent, à courir des risques juridiques importants.
4
Arrêté n° 1799/CM du 21/12/2007 : valeur du point d’indice = 995 F CFP à compter du 01/01/2008.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 15 sur 84
Ce volume de dépenses obligatoires n’a cessé de croître au cours des dix dernières années. Il
en est résulté une dépense budgétaire contrainte qui obère actuellement plus de 90 %
5
du budget de
fonctionnement, réduisant les marges de manoeuvre immédiates de la collectivité à néant.
Le desserrement progressif de ces contraintes constitue l’un des axes forts des
recommandations de la mission d’assistance de novembre 2010. C’est aussi la direction stratégique
préconisée par la Chambre territoriale des comptes.
Bien que la rigidité des dépenses rende la gestion budgétaire plus difficile à conduire, elle
n’interdit pas pour autant toute diminution des charges. La stabilisation qui a été engagée entre 2008
et 2010 s’est appuyée sur un programme d’économies visant le fonctionnement courant et la masse
salariale. Il doit être suivi d’une politique de réduction progressive, mais déterminée, des dépenses
de fonctionnement. Le profil particulier de la Polynésie française, avec de fortes contraintes en
matière de dépenses, justifie qu’il soit nécessaire de programmer sur plusieurs années les économies
indispensables et les redéploiements utiles.
1.1.2. - La croissance des recettes de fonctionnement a été interrompue de 2007 à
2009
Depuis 2004, les recettes réelles de fonctionnement n’ont connu qu’une faible progression :
+ 14 milliards en 6 ans, soit une augmentation moyenne d’environ 2 milliards de F CFP par an.
Les recettes réelles de fonctionnement, qui avaient connu une forte croissance annuelle de
1998 à 2003 (+ 34 % soit + 6 % par an), ont peu progressé sur la période 2004 à 2010 (+ 13,5 %
soit 2,2 % par an), seule l’année 2010 marquant une reprise (+ 6 %). A partir de 2006, les recettes
ont soit stagné, comme en 2007, soit régressé comme en 2008 et 2009. Cette évolution à la baisse a
d’ailleurs été atténuée par des recettes ponctuelles et par la réintégration de certaines taxes dans le
budget général. A cet égard, le recours en 2009 à de substantiels produits exceptionnels pour
maintenir coûte que coûte le niveau des recettes n’a estompé qu’en partie la tendance baissière.
C’est ainsi que les redevances pour l’exploitation des réseaux téléphoniques (3,7 milliards de
F CFP), le reversement des fonds libres du compte spécial CAVC (1,2 milliards de F CFP), d’une
partie de l’excédent disponible de l’Assemblée de la Polynésie française (400 millions de F CFP)
ont contribué à ralentir la dégradation des recettes. De même, en 2010, l’augmentation enregistrée
repose essentiellement sur l’intégration des recettes des receveurs particuliers (3,5 milliards de
F CFP nets des admissions en non valeur). Cette régularisation, qui découlait d’une observation
faite par la chambre dans son rapport de 2006
6
, ne saurait pour cette raison, être considérée comme
l’amorce d’un rétablissement.
Par ailleurs, pour compenser la baisse de ses recettes fiscales, la collectivité a procédé en
2010 à la réintégration au budget général des taxes antérieurement affectées à des établissements
publics (EAD, FDA, EPAP, ISPF) pour un montant supérieur à 1,6 milliard de F CFP. Mais ces
réintégrations n’ont pas été suffisantes pour renouer avec la croissance des produits de
fonctionnement.
5
Le rapport de la mission d’assistance à la Polynésie française (dit rapport BOLLIET) évaluait ces dépenses contraintes à un
minimum de 92 % du total des dépenses réelles en 2009.
6
Rapport du 31 janvier 2006 (Ministère des Finances) § 2.1.5.
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 16 sur 84
Les deux facteurs qui ont le plus contribué à la stagnation voire à la baisse des recettes de la
collectivité depuis 2007 sont l’érosion des recettes fiscales et douanières et l’évolution irrégulière
des concours de l’Etat affectés au fonctionnement de la collectivité.
1.1.2.1. - L’érosion des recettes fiscales et douanières
Les recettes fiscales et douanières représentent en 2010 près de 80 % des recettes réelles de
fonctionnement. Les tableaux en annexe 2 et 3 en présentent le détail.
Les produits fiscaux ont subi dans un premier temps une érosion de leur taux de croissance
entre 2004 et 2008, avant de connaître une récession en 2009 et 2010.
Le produit de la taxe à la valeur ajoutée, qui est le principal impôt de la Polynésie française,
est ainsi passé de 38,9 milliards de F CFP en 2004 à un maximum de 43,5 milliards de F CFP en
2008, avant de régresser à 39,5 milliards de F CFP en 2009, puis 38,3 milliards de F CFP en 2010.
Dans le même temps, les recettes douanières, sont passées de 26 milliards de F CFP en 2004
à 29,3 milliards de F CFP en 2006, avant de décroître de 2,5 milliards de F CFP dès 2007. Leur
baisse a ensuite été de 0,5 milliard en 2008, puis s’est accentuée en 2009 pour atteindre
3,9 milliards et 1,5 milliard de F CFP en 2010.
La fiscalité directe, pour sa part, a connu une évolution erratique : une première baisse en
2007, peu importante (280 millions de F CFP), suivie d’une hausse en 2008, une nouvelle baisse
plus marquée en 2009 (2,3 milliards de F CFP), à nouveau suivie d’une hausse en 2010.
Globalement, les recettes fiscales et douanières ont chuté en 2009 de 11 milliards de F CFP,
ce qui représente une baisse de 11 % d’une année sur l’autre. En 2010, l’érosion fiscale et douanière
s’est poursuivie, mais de manière moins accentuée, les recettes passant de 93,7 milliards de F CFP à
92,1 milliards de F CFP, grâce notamment à la reprise de la progression de 1,7 milliard de F CFP
des impôts directs, due à un freinage des dépenses fiscales liées aux dégrèvements et aux crédits
d’impôt pour la défiscalisation. Les autres impôts ont cependant continué leur recul, les produits de
la TVA et des taxes diverses régressant respectivement de 3 % et 9 % et celui des recettes
douanières de 6,6%.
1.1.2.2. – L’évolution erratique des concours de l’Etat à la section de fonctionnement
L’Etat n’intervient dans le financement de la Polynésie française que dans un cadre
partenarial et de solidarité. Les deux conventions au titre desquelles l’essentiel de ses financements
était assuré sont arrivées à leur terme entre 2004 et 2010.
Sur la période contrôlée, les conventions santé solidarité ont permis à la Polynésie française
de bénéficier de plus de 2 milliards de F CFP par an entre 2004 et 2007, mais ont cessé de produire
leurs effets en 2008. Cette année là, l’Etat a mis fin au concours financier au régime de solidarité
7
.
Cette décision, prise après la reconduction par avenants de la contribution depuis 2004, a privé la
collectivité de ces contributions qu’elle a dû compenser à partir 2008.
7
Rapport de la CTC du 6 octobre 2011 (Collectivité de la Polynésie française – Affaires sociales et solidarité : 2000-2009).
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Séance du 22 décembre 2011 - page 17 sur 84
La dotation globale pour le développement économique (DGDE), qui était initialement une
subvention d’investissement libre d’emploi, a été, à compter de 2005, employée en fonctionnement
dans des conditions non conformes à la convention de 2002. Des avenants ont permis par la suite de
revenir progressivement à une utilisation conforme, mais avec des conséquences sur le niveau des
ressources ainsi affectées à la section de fonctionnement.
En 2005, l’imputation de presque la moitié de la DGDE en section de fonctionnement avait
notamment permis de financer le secteur social (2 milliards de F CFP) et les actions d’aide à
l’emploi (4,712 milliards de F CFP).
Dans un avis budgétaire sur le déséquilibre du budget 2006, la chambre territoriale des
comptes avait réaffirmé que la DGDE devait être réservée à la section d’investissement. Une
modification du budget avait alors été effectuée, après signature d’un avenant permettant le retour
progressif de la DGDE à sa vocation initiale. Cet avenant a autorisé le financement des actions pour
l’emploi et pour la formation professionnelle, sous réserve d’une imputation dégressive de la
dotation à la section de fonctionnement : 35 % en 2006, 30 % en 2007, 20 % à partir de 2008.
Un autre avenant a permis l’utilisation de la DGDE en 2009 pour financer les dépenses de
fonctionnement relatives à la promotion de la Polynésie française et de ses produits, dans une limite
maximale de 8,38 millions d’euros et les actions de sauvegarde et de création de l’emploi
(IME et CRE) dans une limite maximale de 16,76 millions d’euros.
Dans ce cadre, entre 2003 et 2005, les concours de fonctionnement de l’Etat ont été
multipliés par deux pour atteindre 12 milliards de F CFP en 2005. A partir de 2006, ces concours au
fonctionnement ont nettement régressé jusqu’en 2008 : 5,6 milliards de F CFP en 2008. Après cette
chute de plus 6 milliards de F CFP, les concours de l’Etat à la section de fonctionnement ont été
augmentés à 8,4 milliards de F CFP en 2009 et 8,5 milliards de F CFP en 2010.
A compter de 2011, la nouvelle dotation globale d’autonomie (DGA), qui remplace
partiellement la DGDE, est affectée au fonctionnement, ce qui devrait permettre de stabiliser les
concours de l’Etat à cette section, tout en garantissant le maintien de son aide au financement des
investissements en Polynésie française dans le cadre de deux autres instruments financiers.
1.1.3. - L’évolution des montants d’épargne est préoccupante
La section de fonctionnement dégage trois soldes significatifs : l’épargne de gestion, qui
correspond à la différence entre les recettes et les dépenses réelles de fonctionnement, hors soldes
financiers et exceptionnels ; l’épargne brute, qui est calculée en intégrant les charges financières et
exceptionnelles aux dépenses et les produits financiers et exceptionnels aux recettes, et l’épargne
nette, qui correspond à l’épargne brute diminuée de l’annuité en capital des emprunts.
Sur la période contrôlée, l’évolution des soldes d’épargne résulte des difficultés éprouvées
par la collectivité pour maîtriser ses dépenses de fonctionnement dans un contexte économique
défavorable qui a considérablement érodé ses ressources fiscales depuis 2008.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 18 sur 84
1.1.3.1. – La dégradation des montants d’épargne de la collectivité
En millions de F CFP
En M F CFP
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Epargne de gestion
15 586
23 715
22 417
20 007
15 862
12 846
11 262
Epargne brute
11 364
21 303
19 188
11 984
6 366
7 146
11 487
Epargne nette
3 114
13 392
11 434
5 173
- 903
- 349
3 835
1.1.3.1.1. - L’évolution de l’épargne brute et de l’épargne nette
A partir de 2005, l’épargne brute et l’épargne nette n’ont cessé de diminuer. L’épargne brute
a décru à partir d’un maximum de 21 milliards de F CFP et l’épargne nette à partir d’un maximum
de 13,4 milliards de F CFP.
La baisse de l’épargne a été très régulière de 2006 à 2008. Cette dernière année, l’épargne
brute atteignait son plus bas niveau, avec seulement 6,3 milliards de F CFP. L’épargne nette était
devenue négative sous l’effet de la progression de l’annuité de la dette en capital.
Le faible niveau de l’épargne brute pour un service de la dette s’élevant en moyenne à
11 milliards de F CFP a conduit la collectivité à l’impossibilité de financer des investissements
nouveaux depuis 2008.
En 2009, l’épargne brute s’est légèrement redressée en progressant de 800 millions de
F CFP ; cette inflexion a toutefois été insuffisante pour couvrir l’annuité de dette de l’année
(8,1 milliards de F CFP). L’épargne nette est donc restée négative :- 349 millions de F CFP.
En 2010, l’épargne brute a confirmé son redressement, retrouvant son niveau de 2007, et
l’épargne nette est redevenue positive : 3,8 milliards de F CFP.
L’épargne brute n’a toutefois été améliorée que grâce à des recettes exceptionnelles, l’action
engagée sur les dépenses n’ayant pas permis de les réduire globalement.
Les dépenses de personnel, le levier le plus efficace, n’ont été que très légèrement
diminuées. L’effort a porté sur le maintien du niveau de la charge salariale pour le personnel
titulaire, et une légère baisse pour les charges relatives aux non titulaires.
Par ailleurs, des économies ont été réalisées sur le fonctionnement courant de
l’administration : 6,8 milliards de F CFP contre 7,1 milliards de F CFP en 2009 pour les contrats
«
services extérieurs
».
En revanche, les autres dépenses de fonctionnement, notamment les dépenses de transfert,
après avoir baissé de 2,8 milliards en 2009 (48,8 MF CFP), ont de nouveau augmenté de 2 milliards
de F CFP en 2010. Ces mouvements erratiques sont le résultat indirect de la désaffectation des taxes
de certains établissements publics, qui a nécessité une augmentation corrélative des subventions qui
leur sont versées. Cette tendance a toutes les chances de se prolonger tant qu’une décision
stratégique ne sera pas intervenue pour fixer le périmètre de l’administration et des organismes
périphériques de la collectivité.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 19 sur 84
1.1.3.1.2. - L’évolution de l’épargne de gestion
L’évolution de l’épargne de gestion, qui ne tient pas compte des éléments exceptionnels,
rend mieux compte de la fragilité du redressement de 2010.
L’amélioration de l’épargne brute étant essentiellement due à la multiplication par cinq des
recettes exceptionnelles
8
, par nature non récurrentes, l’épargne de gestion dégagée par la section de
fonctionnement, hors éléments exceptionnels, a continué à diminuer. En 2010, sa baisse par rapport
à 2009 s’élève à 1,6 milliard de F CFP.
2007
2008
2009
2010
Epargne brute
11 984
6 366
7 146
11 487
Solde des opérations financières
-1 143
-1 915
-1 639
843
Solde des opérations exceptionnelles
-6 880
- 7 581
- 4 061
-618
Epargne de gestion
20 007
15 862
12 846
11 262
La tendance n’est donc pas inversée. A la différence des soldes d’épargne brute et nette,
l’épargne de gestion n’a pas cessé de diminuer depuis 2004. Entre 2007 et 2010, elle a été divisée
par deux en trois ans, passant de 20 milliards de F CFP à 11,3 milliards de F CFP.
Cette évolution montre que les dépenses de fonctionnement, malgré le coup de frein
enregistré en 2009, ont poursuivi leur progression à un rythme supérieur à celui des recettes
récurrentes et qu’en définitive, l’épargne brute reste d’un niveau trop bas pour couvrir le service de
la dette (11 milliards en moyenne) tout en dégageant un solde disponible significatif pour
l’investissement.
En 2010, la collectivité n’avait pas encore reconstitué ses marges de manoeuvre. Avec une
épargne, certes en amélioration, mais qui restait toujours 7 à 8 points en-dessous du niveau
souhaitable, les soldes étaient encore trop étroits pour dégager une capacité d’autofinancement
significative.
La tendance à la détérioration semblait marquer le pas, sans qu’il soit toutefois possible
d’assurer qu’il s’agissait d’une inversion durable de la tendance, en raison du caractère non
récurrent de certaines recettes.
1.1.3.2. - Un effet de ciseaux non jugulé
La croissance des dépenses de fonctionnement, plus rapide que celle des recettes, est à
l’origine des difficultés budgétaires de la collectivité. La persistance de cette situation doit être
considérée comme préoccupante car, à un terme plus ou moins rapproché, elle conduit à la
disparition de l’épargne.
En 2004, les recettes réelles de fonctionnement s’élevaient à 104 milliards de F CFP pour
des dépenses réelles de 92,7 milliards de F CFP.
8
L’intégration des restes à recouvrer pour 7,7 milliards.
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Mais entre 2004 et 2008, cet écart entre les recettes et les dépenses s’est réduit. Le rythme
moyen de croissance annuelle des recettes a été de 2,8 % alors que celui des dépenses se maintenait
à 4,4 %
En 2009, après avoir accusé une forte baisse (- 4 %), les recettes ne s’élevaient plus qu’à
111,8 milliards de F CFP. Si elles ont à nouveau progressé de près de 6 % en 2010, elles ne le
doivent qu’à des recettes exceptionnelles, par définition non récurrentes.
En
effet,
en
2010,
la
section
de
fonctionnement
dégage
un
excédent
de
11,5 milliards de F CFP, en progression de 60% par rapport à 2009, grâce à l’intégration des restes
à recouvrer des receveurs particuliers (+ 7,7 milliards de F CFP) qui ne garantit pas pour les
prochains exercices, le maintien d’un tel niveau de recettes.
La tendance au redressement demande donc à être confirmée sur les gestions suivantes,
notamment en 2011 et 2012 par l’engagement de réformes d’envergure, permettant notamment des
économies durables.
1.1.4 - De nombreuses insincérités budgétaires et comptables ont retardé la mise en
oeuvre des mesures de redressement
Sur le plan de l’exécution budgétaire, les difficultés rencontrées par la Polynésie française
ne se sont pas traduites par une dégradation de ses résultats de fonctionnement (annexe 4). Ceux-ci
ont été particulièrement élevés entre 2007 et 2010, entre 6 et 12 milliards de F CFP.
L’ampleur de la dégradation observée sur la période contrôlée a en effet été masquée par des
insincérités budgétaires et comptables qui ont en eu pour effet de retarder la mise en oeuvre des
mesures de redressement qui apparaissent aujourd’hui indispensables.
L’omission de dépenses d’ordre budgétaires, notamment la sous-estimation des provisions,
en particulier pour les risques relatifs aux emprunts garantis (15,32 milliards de F CFP, dont
3,6 milliards de F CFP sur Air Tahiti Nui), aux contentieux (créances d’électricité de Tahiti pour
1,9 milliard de F CFP) ou découlant des prises de participations dans des sociétés déficitaires (TNR,
ATN) ou encore l’absence d’amortissements techniques, a considérablement altéré la signification
des résultats comptables.
Cette situation avait été dénoncée par la Chambre, dans son rapport de 2006 sur les finances
de la Polynésie française, et a fait l’objet de mentions spéciales dans les Rapports publics 2007 et
2009 de la Cour des comptes.
Ces pratiques irrégulières ont conduit à minorer, les dépenses de fonctionnement de la
collectivité d’environ 3,5 milliards de F CFP par an. Ce montant reste une estimation qui ne tient
pas compte des ajustements d’amortissement du patrimoine après réalisation complète de
l’actualisation de l’inventaire physique des biens amortissables. Selon le rapport de la mission
d’assistance à la Polynésie française le montant total des dépenses annuelles d’apurement des
comptes devrait atteindre 27,9 milliards de F CFP en intégrant les régularisations d’amortissement
et paraît donc irréalisable en l’état actuel des finances de la collectivité.
L’effet de ces omissions sur le solde de la section de fonctionnement est particulièrement
sensible. L’inscription de ces dépenses d’ordre budgétaires aurait fortement réduit voire annulé les
résultats de fonctionnement positifs de la collectivité.
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L’amélioration de la fiabilité des comptes n’a été amorcée qu’à partir de 2010. Afin d’aider
la collectivité, un chiffrage des crédits absolument nécessaires à la sincérité des comptes a été
adressé par le haut commissaire le 30 janvier 2010 au président de la Polynésie française.
Finalement, le budget 2010 a été voté, en dépenses avec des dotations aux amortissements et
provisions, et, en contrepartie, des recettes exceptionnelles liées à l’intégration des restes à
recouvrer des receveurs particuliers, jamais budgétisés auparavant.
Cette dernière opération s’est accompagnée d’une régularisation de la situation des
receveurs particuliers de la Polynésie française. La délibération n° 2009-87 APF du 15 décembre
2009 a, avec beaucoup de retard, pris en compte les observations de la chambre formulées en 2006,
en modifiant les articles 132-1 à 132-8 de la délibération n°95-205 AT du 23 novembre 1995. Les
ambiguïtés qui subsistaient quant au régime de ces comptables ont ainsi été dissipées sur le plan
juridique. Les receveurs particuliers ont désormais la qualité de comptables secondaires, et doivent
à ce titre intégrer leurs opérations dans les comptes de la Polynésie française, sous le contrôle et la
responsabilité du payeur territorial. Ils sont tenus d’agir à l’égard du payeur comme des comptables
publics régisseurs selon l’article L 132-8, dernier aliéna du code des impôts, en émettant notamment
un titre pour les créances non recouvrées avant le terme de l’année durant laquelle elles sont nées.
Les receveurs sont tenus de présenter à la clôture de chaque exercice
,
un état des restes à recouvrer
au payeur de la Polynésie française, qui l’annexe au compte de gestion.
Les remises de service des deux receveurs particuliers ont finalement été réalisées, le
30 novembre 2010 pour la recette des impôts, et le 27 décembre 2010 pour la conservation des
hypothèques. Au budget 2010, les recettes exceptionnelles provenant de restes à recouvrer des
receveurs particuliers jusqu’alors non budgétisés avaient été prévues pour 6,6 milliards de F CFP
pour les titres provenant de la recette des impôts et pour 1,07 milliard de F CFP en provenance de la
conservation des hypothèques
9
. D’après les procès-verbaux, les intégrations se sont finalement
élevées
10
à 466 millions de F CFP pour la Conservation des hypothèques et à 7,656 milliards de
F CFP pour la recette des impôts, après admission de certaines cotes en non valeur (1,1 milliards de
F CFP).
La chambre déplore cependant qu’il ait fallu près de cinq ans après ses observations pour
parvenir à un fonctionnement régulier et contrôlé de la comptabilité des receveurs particuliers de la
collectivité de la Polynésie française. Cette situation ambiguë s’est soldée par des pertes budgétaires
importantes pour la collectivité qui a dû admettre 1,1 milliard de titres de recettes en non valeur,
dont 95 % provenaient de la Conservation des hypothèques.
Avec des comptes plus sincères, reflétant plus fidèlement la situation réelle des finances, la
collectivité aurait été contrainte, non seulement d’agir pour respecter les règles d’équilibre, mais
aussi à engager plus tôt les réformes de fond indispensables.
Sans réformes structurelles pour inverser les tendances lourdes qui détériorent ses équilibres
budgétaires et financiers, la collectivité ne parviendra pas à restaurer ses capacités de financement.
Cette action, dans le contexte économique et financier de la Polynésie française, est fondamentale
au regard de la place et du rôle du budget de la collectivité d’outre-mer dans l’économie
polynésienne
.
9
Un communiqué de novembre 2010 de la présidence mentionnait 7,7 milliards de F CFP, au titre des « restes à recouvrer ».
10
Sans préjuger de la régularité de cette intégration comptable qui sera examinée lors du jugement des comptes de la Polynésie
française.
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1.2. – La section d’investissement a été peu dynamique
Sur la période contrôlée, les dépenses et recettes réelles d’investissement ont été
sensiblement équivalentes, voire inférieures, à celle des dernières années de la période précédente.
Elles ont eu une tendance à régresser (2004, 2006, 2008, 2010) ou à stagner (2005, 2009), sans
jamais dépasser le niveau atteint en 2003, la diminution des capacités de financement de la section
d’investissement expliquant en grande partie ce manque de dynamisme.
1.2.1. – La stagnation voire la réduction des dépenses d’investissement (hors
remboursements d’emprunts)
Alors que les dépenses réelles d’investissement (hors remboursement de la dette) avaient
atteint 33,5 milliards de F CFP en 2003, elles n’ont représenté en moyenne que 30,2 milliards de F
CFP par an sur la période 2004-2010. En 2006 et 2010 le montant des dépenses d’investissement a
même été très inférieur à cette moyenne.
En 2006, les dépenses ont diminué de 19 % par rapport à 2005, passant de 32 milliards à
25,8 milliards de F CFP. En 2010, elles ont encore baissé de 7,4 %, soit de 30,9 milliards de F CFP
en 2009 à 28,7 en 2010.
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
INVESTISSEMENTS REELS.
32 325
31 993
-1%
25 795
-19%
31 800
23%
30 606
-4%
30 978
1%
28 688
-7%
dt subv. d'investissement versées
(c/130 – M51 et 204 – M52)
6 533
7 897
21%
7 087
-10%
6 410
-10%
7 826
22%
6 479
-17%
5 442
-16%
dt immo. Corpo et incorpo (c/132
- M51, 203, 205 et 208 – M52)
24 398
23 789
-2%
18 591
-22%
24 092
30%
17 468
-27%
21 990
26%
20 129
- 18%
dt participations, avances aux
tiers
205
130
-37%
62
-52%
2 120
3319%
5 620
165%
2 417
-57%
1 117
-54%
dt opérations de crédits vendeurs
sur acquisition immobilière
656
travaux en régie
1 202
1 276
6%
1 442
13%
1 393
-3%
1 007
-28%
1148
14%
1029
-10%
Cependant entre 2004 et 2010, la structure des dépenses d’investissement a changé.
Une diminution des dépenses annuelles d’équipement (immobilisations corporelles et
incorporelles) n’a pas pu être évitée : de l’ordre de
22 à 23 milliards de F CFP entre 2004 et 2007,
elles sont tombées à moins de 20 milliards de F CFP en moyenne de 2008 à 2010.
A l’inverse, le compte des participations et des avances en compte courant d’associés a
connu une forte augmentation. Leur montant représentait une charge quasi nulle de 2004 à 2006,
avant de croître très fortement à partir de 2007. Depuis, elles se sont élevées à 2,1 milliards de
F CFP
11
en 2007, 5,6 milliards
12
en 2008, 2,4
13
en 2009 et 1,1 milliard
14
de F CFP en 2010.
Les subventions d’investissement versées aux organismes publics et privés n’ont pas connu
une forte variation durant la période. Elles se sont situées entre 6,8 à 7,8 milliards, sauf en 2009 et
2010 où elles ont connu leur
première baisse significative (-17% par rapport à l’année précédente).
11
1,5 milliards de F CFP et 0,5 milliard de F CFP pour ATN ; 100 et 20 MF CPF pour Bora-Bora Cruises.
12
2,5 milliards de F CFP et 3 milliards de F CFP pour ATN ; 119 MF CFP pour la SAGEP.
13
1,5 milliards de F CFP et 1 milliard de F CFP pour ATN.
14
Dont 0,5 milliard de F CFP pour ATN.
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Ces dépenses d’interventions ont correspondu aux soutiens budgétaires qui ont été accordés
aux satellites de la collectivité. Ces organismes, qui avaient bénéficié d’abondantes ressources
publiques pour leur lancement et leurs premières années d’exploitation
15
, ont représenté une charge
lourde pour le budget car leur financement s’est souvent effectué au détriment des dépenses
d’équipement.
La fin du chantier de l’hôpital du TAAONE en 2010, qui avait soutenu le montant des
investissements annuels pendant une dizaine d’années, se traduit par une diminution sensible du
volume des investissements au cours de cette dernière année. Les subventions d’équipement versées
tendent également à diminuer en fin de période (2009 et 2010).
L’évolution du taux d’exécution budgétaire des dépenses d’investissement (annexe 5) révèle
d’ailleurs que cette tendance à la compression des dépenses apparaît dès le stade de la prévision et
de l’ouverture des crédits budgétaires. Les crédits de paiements inscrits au budget sont ainsi passés
de 78,3 milliards de F CFP en 2004 à 57 milliards de F CFP en 2010, au terme d’une évolution à la
baisse presque continue. Cette évolution a certes permis d’améliorer légèrement le taux d’exécution
des dépenses ( de 40 à 50 %), même si le résultat final est encore loin d’être satisfaisant. Mais elle
révèle aussi la difficulté pour la collectivité d’assumer l’exécution de programmes d’investissement
trop ambitieux compte tenu de sa capacité à pouvoir les mettre en oeuvre.
1.2.2. – Les capacités de financement de la section d’investissement se sont
amenuisées
Au cours de la période contrôlée, la collectivité a dû faire face à la réduction progressive de
ses ressources propres annuelles d’investissement. Elle a dû puiser sur ses réserves pour faire face
au financement de ses investissements et n’a pu éviter le recours accru à l’emprunt auquel elle
n’accède plus aussi facilement que dans le passé. Cette évolution est lourde de conséquence pour la
collectivité qui voit des marges de manoeuvre se réduire.
1.2.2.1. – La réduction des ressources propres annuelles d’investissement et des
concours de l’Etat
La réduction des ressources propres de la collectivité devant financer la section
d’investissement a été concomitante avec la stagnation, voire la diminution, des concours de l’Etat
destinés au financement de cette même section.
En MF CFP
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
RECETTES
REELLES INVEST.
29 273
100
%
18 478
100 %
23 511
100 %
25 247
100 %
26 529
100 %
29 598
100 %
26 303
100 %
dt part. de l'Etat
15 072
51 %
11 150
60 %
13 394
57 %
13 445
53 %
14 551
53 %
12 112
41 %
12 617
48 %
dt emprunts
11 438
39 %
7 200
39 %
10 000
42 %
11 153
44 %
11 767
44 %
17 387
59 %
13 544
51 %
15
Quelques uns d’entre eux avaient fait l’objet de rapports de la Chambre dans lesquels la collectivité était invitée à réviser les
stratégies et la gouvernance qui, manifestement, ne fonctionnaient pas. Les réactions ont tardé entraînant un alourdissement des
charges publiques qui aurait pu être allégé par des décisions plus rapides.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 24 sur 84
Depuis toujours, le financement des investissements de la Polynésie française reposait
principalement sur des subventions de l’Etat. Ces financements ont gardé une place prépondérante
dans les recettes d’investissement jusqu’en 2008.
En 2005, la baisse de 4 milliards de F CFP était due à l’imputation de la moitié de la DGDE
en section de fonctionnement. Une subvention pour l’acquisition du terrain et des bâtiments de
l’hôpital Jean Prince (subvention de 2,6 milliards de F CFP du ministère de la Défense) avait
néanmoins permis d’amortir la baisse du niveau des financements de l’Etat imputés à la section
d’investissement.
Pour les années suivantes, bien que les modifications des dispositions de la convention
relative à la DGDE aient autorisé des imputations partielles de la DGDE en section de
fonctionnement le niveau des participations de l’Etat a pu se maintenir au dessus du niveau atteint
en 2005 grâce au versement du reliquat FREPF
16
.
En 2009, les dotations d’investissement de l’Etat ont toutefois diminué sensiblement en
raison de la dernière modification de la convention DGDE, qui autorisait un prélèvement au profit
de la section de fonctionnement supérieur aux 20 % prévus initialement, pour financer les mesures
de relance de la collectivité (3 milliards de F CFP).
1.2.2.2. – La collectivité a largement utilisé ses réserves pour compenser la faiblesse de
l’épargne
La mission d’assistance à la Polynésie française relevait dans son rapport de septembre
2010 : «
La collectivité ne parvient plus à financer ses projets d'investissement depuis 2005 : il
manquait ainsi au Pays pour financer ses investissements, après prise en compte des dotations de
l'Etat et des emprunts, 4 milliards F CFP (34 millions €) en 2008 et 1,4 milliard F CFP
(12 millions €) en 2009, la différence étant couverte par un prélèvement sur les réserves
».
Plus loin, le rapport précisait que : «
De fait depuis 2007, l’excédent dégagé en section de
fonctionnement ne suffit plus à financer le déséquilibre structurel de la section d’investissement du
budget général
»
17
.
De ce fait, la collectivité a dû largement faire appel à ses réserves pour compenser la
faiblesse de l’épargne.
Pour maintenir sa politique d’investissement et apporter une part d’autofinancement aux
projets d’équipement, la collectivité de la Polynésie française a donc été contrainte de
« ponctionner » sur ses excédents reportés.
Au 31 décembre, le résultat global cumulé est ainsi passé de 19,5 milliards de F CFP en
2006 à 18,2 milliards de F CFP en 2007, à 11,4 milliards de F CFP en 2009 et environ 13 milliards
de F CFP en 2010 (annexe 4).
16
Article 9 de la convention DGDE du 4 octobre 2002 (3,705 milliards de F CFP chaque année, jusqu’en 2010).
17
Rapport de la mission d’assistance à la Polynésie française (annexe 1 – page 5).
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Séance du 22 décembre 2011 - page 25 sur 84
Les
fonds utilisables
18
ont fortement diminué depuis 2006, même si en 2010, grâce à une
meilleure épargne brute, obtenue par des recettes exceptionnelles (11,4 milliards au lieu de
7,1 milliards de F CFP), les réserves se sont légèrement reconstituées à près de 13 milliards de
F CFP.
Les conditions dans lesquelles la collectivité est parvenue à maintenir un niveau de dépenses
d’investissement, hors remboursement d’emprunt, de l’ordre de 30 milliards par an se sont toutefois
détériorées puisque pour pallier la faiblesse de l’épargne, la collectivité a largement utilisé ses
réserves.
1.2.2.3. - Le recours à l’emprunt, de plus en plus sollicité, est devenu problématique
Malgré la baisse ou la stagnation du montant des investissements réels, la collectivité a eu
davantage recours à l’emprunt. Mais ce mode de financement s’avère de plus en plus difficile à
utiliser, la disparition de l’épargne nette constituant un signal de défiance pour les prêteurs.
1.2.2.3.1. - La gestion de la section d’investissement a conduit à une augmentation
de l’encours de la dette.
Depuis 2009, pour faire face aux divers besoins de financement, la part de l’emprunt dans le
financement de la section d’investissement est devenue prépondérante : 12 milliards de F CFP de
subventions d’investissement contre 17 milliards de F CFP d’emprunt.
La progression de l’encours a été de plus de 35 % depuis 2005. A partir de 2007, l’encours
de la dette a fortement progressé pour maintenir le niveau des investissements.
La dette, qui ne s’élevait au 31 décembre 2005 qu’à 67,3 milliards de F CFP, atteignait
84,3 milliards de F CFP au 31 décembre 2009. En 2010, l’encours était de 90,7 milliards de
F CFP
19
.
Cette situation ne prend pas en compte les garanties accordées par la Polynésie française.
L’encours garanti s’élevait en 2010 à 9,8 milliards de F CFP, dont les principaux bénéficiaires
étaient ATN pour 3,36 milliards et l’OPH pour 5,3 milliards.
18
Depuis la mise en place de l’affectation du résultat (1
ère
fois en 2008, avec le résultat 2007), les excédents sont comptabilisés au
compte 1068.
19
Budget général + comptes spéciaux (CAVC).
Situation de l’encours et des charges financières de 2000 au 31 décembre 2010
La dette par rapport aux recettes réelles de fonctionnement a progressé de 17,5 points depuis
2005 : 57 % en 2005, 74, 5 % en 2010. Cette rapide progression s’est traduite par une détérioration
rapide du ratio relatif à la capacité de remboursement, indicateur-clé pour les bailleurs de fonds.
En 2005, ce ratio était de 2,7 ans. En 5 ans, il a été multiplié par 4 pour atteindre 11, 3 ans
en 2009 ; en 2010, grâce à une amélioration de l’épargne brute et une progression de l’encours
modéré de 6,63 milliards de F CFP, le ratio de désendettement était redescendu à 7, 5 ans
20
.
Depuis 2004, la mobilisation annuelle d’emprunt a d’abord varié jusqu’en 2008 autour
d’une moyenne de 11 milliards de F CFP (sauf en 2005), puis, s’est brusquement accélérée pour
atteindre 17 milliards de F CFP en 2009, avant de décroître à 13,5 milliards de F CFP en 2010.
1.2.2.3.2. - La gestion de l’encours a conduit à des prises de risques latents sur une
partie de la dette
L’objectif assigné à la gestion de l’encours a été de minimiser les dépenses d’intérêt afin
d’alléger les dépenses de fonctionnement. Cette gestion technique a été bien exécutée. En raison
d’un contexte de taux d’intérêt favorables, les charges financières ont constamment été inférieures à
3% des recettes réelles de fonctionnement (2,38 % en 2010).
Catégorie
%
Encours au 31 décembre 2010
en millions F CFP
Dette totale
100%
90 765
Type de taux
%
Fixe
(y compris produits structurés, les 1ères périodes)
67,96%
61 684
Indexé
32,04%
29 081
Tranches de taux
%
6.00% < taux <= 8.00%
0,08%
77
4.00% < taux <= 6.00%
19,85%
18 016
3.00% < taux <= 4.00%
44,42%
40 315
taux <= 3.00%
35,65%
32 357
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Séance du 22 décembre 2011 - page 26 sur 84
20
La zone dangereuse est généralement estimée à 14/15 ans.
Les charges financières supportées au titre des intérêts de la dette n’ont jamais égalé, sur la
période contrôlée, le niveau atteint en 2001.
Evolution des intérêts de la dette
Toutefois, l’économie sur les charges d’intérêt a été obtenue en consentant des prises de
risques croissants sur une partie de l’encours.
1.2.2.3.2.1. - Une partie de l’encours est composée d’emprunts à haute
volatilité potentielle
La gestion de la dette a conduit à contracter des prêts à taux variables aux index de plus en
plus complexes, et de plus en plus potentiellement volatils.
L’encours de la dette par bailleurs de fonds au 31 décembre 2010 (voir annexe 6) était
principalement détenu par DEXIA, qui est le premier prêteur de la Polynésie française avec 43 % de
l’encours total. L’AFD en détenait 26 %, la CNCEP (+ Banque de Tahiti) 14 %, la Banque de
Financement et Trésorerie 7,6 %. Les banques locales sont peu présentes dans cet encours.
La majorité de l’encours apparaît comme étant à taux fixe : 67,96 %. Mais en réalité, sont
comptés avec les taux fixes, des emprunts structurés qui comportent effectivement une première
tranche à taux fixe à durée variable, suivie d’une tranche à taux indexés dès qu’une « barrière » est
actionnée.
L’encours est composé de trois types de produit. Des produits classiques qui sont des
produits bancaires à taux préfixés. Les produits mixtes qui associent des lignes de trésorerie et des
crédits bancaires classiques avec lesquels la collectivité gère sa trésorerie. Enfin des produits
structurés qui combinent un produit bancaire classique et un ou plusieurs produits dérivés (vente
d’options).
Montant au
30/09/2010
%
Produits classiques
36 942 010 352
40,28 %
Produits structurés
31 551 836 718
34,40 %
Produits mixtes (crédits revolving)
23 215 292 837
25,31 %
Total de l'encours de la dette
91 709 139 907
100,00 %
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Les produits structurés sont d’un maniement délicat. Ils servent à la gestion du risque
économique et financier. Ils sont souvent opaques. Leur complexité est réelle car le taux d’intérêt de
seconde période est conditionné par un index non standard, dit «
exotique
», qui est soit la pente de
la courbe de taux de maturité différente, soit l’évolution comparée de devises ou du cours des
matières premières.
Ces produits ont l’inconvénient d’entraîner la collectivité dans une gestion risquée de son
encours, sous couvert d’économies budgétaires sur les intérêts qui sont servis durant la première
période de prêt (taux fixe bonifié).
Pour la collectivité, la contrepartie des économies budgétaires réalisées dans les premières
périodes de l’emprunt se traduit par une exposition à un risque élevé de pertes exponentielles à
terme, dont elle ne peut estimer à l’avance le vrai coût.
D’une manière générale, une collectivité ne peut pas maîtriser tous les paramètres
nécessaires à la gestion de ces emprunts. En contracter est donc une pratique en soi risquée qui doit
être évitée
21
.
1.2.2.3.2.2. - Une gestion délicate et risquée des emprunts toxiques
La Polynésie française a contracté plusieurs produits structurés à partir de 2003, dont
plusieurs s’avèrent particulièrement risqués.
Ces produits sont construits avec un risque important de volatilité du taux en deuxième
partie de l’emprunt qui est activé par le franchissement d’une barrière. Le taux d’intérêt est alors
déterminé, selon les emprunts, par l’écart des cours de change du dollar US, du franc suisse ou du
yen, assorti d’un coefficient multiplicateur.
Ces formules de calcul permettent de classer ces emprunts dans la catégorie des «
prêts
toxiques
», car ils peuvent exposer la collectivité à des taux d’intérêt très élevés, dépassant parfois
les 30 %. Ces emprunts représentaient 14 % de l’encours en 2010
22
, alors que les produits
structurés, moins dangereux en raison d’un adossement sur des index moins volatils (Euribor),
représentaient 35 % de l’encours.
Période taux
fixe
Conditions 2ème phase
Vérification
Fixia : Dual
USD/YEN
DEXIA Mai
2007
3,70 %
jusqu’au
1
er
octobre 2010
Si cours USD/YEN est supérieur ou égal à
90 :
5,2%+49%( (90/ (USD/YEN))-1
En continu
HELVETIX
BPCE
3,12 %
jusqu’au
25 juin 2012
Si cours USD/CHF < 1 :
3,12 % + 50% (1-USD/CHF)/ (USD/CHF))
Une fois par
an
CORIALYS-
DUALIS
DEXIA Juin
2006
1er août 2011
Si cours EUR/CHF supérieur ou égal à
EUR/ USD :
3,4% + 38% (EUR/USD- EUR/CHF)
Au 1er
septembre
21
La chambre se réserve d’analyser lors de son prochain contrôle les conséquences financières exactes de ces emprunts.
22
Il s’agit des prêts FIXIA (DEXIA), HELVETIX (BPCE) ou CORIALYS-DUALIS (DEXIA).
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Pour éviter l’envolée du taux d’intérêt en deuxième période de prêt, la Polynésie française
est contrainte de renégocier en permanence cet encours avant que les produits sur écart de taux, ou
les produits de pente qu’elle a contractés, ne s’activent. Pour y parvenir la collectivité s’efforce de
suivre au mieux l’évolution des index et la courbe des taux. Sur la base des informations obtenues
de la BFT, de NATIXIS et de DEXIA, la stratégie qu’elle utilise, est la suivante : les prêts dont la
première phase arrive à échéance sont mis sous surveillance l’année précédant ce terme, afin de
demander, à temps, aux banques le réaménagement de ces emprunts.
Cette méthode a donné lieu à plusieurs opérations de réaménagement avant activation des
barrières. Les premières ont commencé en 2006.
Le contrat FIXIA (4,4 milliards de F CFP), qui figure actuellement dans l’encours, procède
de plusieurs réaménagements menés avec DEXIA. Depuis que la collectivité s’est engagée dans
cette gestion de prêts structurés, en 2003, le contrat le plus volatil qui a figuré dans l’encours, a été
le contrat MPH 985551 FIXIA WIBOR. L’index était le WIBOR, c’est-à-dire l’index des taux
interbancaire de la bourse de Varsovie, assorti d’un coefficient multiplicateur de 5, activable en
seconde tranche quelques mois après la signature du prêt.
Les réaménagements avec DEXIA ont conduit la collectivité de la Polynésie française à
contracter, dès 2006, des produits structurés à coefficient. Les écarts (spreads) utilisés pour le
déclenchement des barrières sont devenus de plus en plus exotiques : du CMS au WIBOR ou à la
variation comparée du dollar et du yen, ou du franc suisse.
Sur un autre contrat (HELVETIX), dont l’index de seconde partie est la comparaison des
cours du dollar américain et du franc suisse, la banque prêteuse se disait prête en 2010 à accepter un
nouvel aménagement, mais cette fois en allongeant la durée du prêt.
Les évolutions, de plus en plus erratiques des marchés financiers depuis 2008, ont multiplié
les risques latents sur cette partie de l’encours.
1.2.2.3.3. - La Polynésie française tend à devenir une collectivité à risque pour les
prêteurs
1.2.2.3.3.1. - A partir de 2010, la collectivité a été classée par l’agence de
notation Standards and Poor’s en « qualité moyenne inférieure » à la limite de
la catégorie des risques spéculatifs
Avec la montée des difficultés budgétaires depuis 2008, les conditions d’une détérioration
de la confiance des prêteurs se sont installées. L’évolution négative du coefficient de
désendettement jusqu’en 2009, la présence d’emprunts risqués (emprunts toxiques), qui a obligé à
des renégociations incessantes sous pression à partir de 2005, a conduit aux premières
interrogations des bailleurs de fonds sur la capacité de remboursement de la dette.
Le modèle budgétaire sur lequel s’est appuyé la Polynésie française a périclité. En dépit
d’une gestion financière de l’endettement et de la trésorerie accomplie, cette stratégie a conduit à
une impasse.
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Cette impasse est d’abord financière. La collectivité de la Polynésie française, pour financer
ses emprunts annuels, a besoin de la confiance des prêteurs. Ces derniers, dans leur analyse,
calibrant leur financement en se fondant essentiellement sur la capacité de remboursement à long
terme de la collectivité, se sont interrogés lorsque la capacité de remboursement s’est détériorée.
Le rapport de la mission d’assistance à la Polynésie française avait noté également en
septembre 2010 :
« Le recours à l'emprunt est de plus en plus difficile : d'une part, l'endettement est
devenu rapidement très important. Il a augmenté de 60 % en dix ans, passant de 53 à 84 milliards F
FCP (404 à 707 millions €) entre le 31 décembre 2000 et le 31 décembre 2009. Pour 2010, la
prévision s'établit à 98 milliards F CFP (824 millions €). Le nombre d'années d'autofinancement
nécessaires au remboursement de la dette s'est ainsi très rapidement dégradé passant de 3 en 2005
à près de 12 ans en 2009 ; d'autre part, la notation de la Polynésie française par Standard and
Poor's s'est progressivement dégradée, passant à BBB + avec surveillance négative le 25 novembre
2009, puis à BBB - le 24 avril 2010 en raison notamment de la crise de trésorerie, de la
dégradation des comptes et de l'instabilité politique ».
Dans ce contexte dépressif, l’agence de notation Standard and Poor’s a annoncé, en avril
2011, qu’elle s’apprêtait à abaisser à nouveau la note de la Polynésie française en BB+ stable, soit
dans la catégorie des risques spéculatifs pour le prêteur.
1.2.2.3.3.2. - Les conditions des emprunts ont été durcies
En quelques années, la collectivité de la Polynésie française est devenue un « mauvais
emprunteur ». En 2009, la collectivité n'a pu obtenir que les 2/3 des emprunts demandés, soit
17,4 milliards F CFP au lieu de 28,9 milliards F CFP.
Pour 2010, dans le cadre du plan de relance économique, 19,5 milliards de F CFP ont été
votés. Mais, les offres des banques n’ont pas dépassé 13,5 milliards de F CFP, pour certaines à des
conditions assez contraignantes. Ainsi, la CNCEP conditionnait son offre de 3,6 milliards de F CFP
à la renégociation de deux de ses prêts structurés à des conditions durcies (indemnité actuarielle,
allongement de la durée). D’autres banques n’ont fait aucune offre (comme la Banque de
Polynésie), ou bien se sont rétractées (Crédit Mutuel, pour 1,8 milliards F CFP).
En 2010, la campagne d’emprunt concernant pourtant des montants moins importants, a
connu les mêmes difficultés. La conditionnalité des prêts s’était notablement durcie : le prêt AFD de
5 milliards de F CFP avait pour contrepartie la mise en oeuvre des recommandations de la mission
d’assistance
.
Les conditions du prêt ont été jugées inacceptables par le Président de la Polynésie
française
23
: respect des préconisations du rapport de la mission d’assistance, budget 2011 présenté
selon la lettre de cadrage du Président, vote conforme de l’Assemblée de la Polynésie française,
versement en deux ou trois fractions selon la réalisation de ces préconisations.
23
M. Gaston TONG SANG.
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1.2.2.3.3.3. - Un retour sur le marché obligataire qui n’a pas abouti
Le 28 octobre 2010, la demande de prêt auprès de l’AFD a été ajournée. Dès lors, seule
l’option obligataire, plus onéreuse, est apparue envisageable, pour la totalité des prêts restants à
souscrire. La Polynésie française a alors tenté de se porter sur le marché obligataire comme elle
l’avait fait avec succès avec un emprunt obligataire arrangé par NATIXIS de 2,4 milliards de
F CFP
24
. La banque DEXIA s’est proposée comme arrangeur : 11,4 milliards de F CFP devaient
être souscrits sur le marché obligataire. DEXIA a prospecté auprès des compagnies d’assurances
pour leur demander de participer à cet emprunt obligataire. Mais finalement, dans un contexte de
crise de l’euro (Grèce), le marché n’a pas été réceptif aux propositions de la Polynésie française, qui
venait d’être déclassée par son agence de notation. Dans ces conditions, DEXIA a conseillé de
différer le lancement de cet emprunt obligataire.
In fine, l’emprunt AFD a été de nouveau sollicité pour boucler en urgence le financement
des dépenses reportées d’investissement. L’accord a été signé par le président de la Polynésie
française, M. Oscar TEMARU, nouvellement élu. Ce prêt est assorti d’un protocole Etat-Polynésie
française daté du 30 avril 2011.
Dans ce document, l’Etat conditionne le prêt AFD à des engagements de redressement dans
la durée de la situation financière, inspirés des recommandations de la mission d’assistance,
notamment au retour d’excédents de fonctionnement et à une plus grande sincérité des comptes
(dépenses d’ordre), afin de financer à terme davantage d’investissements publics. A court terme, il
s’agit d’une part de réduire les dépenses, notamment de personnel, le nombre des ministères, de
réintégrer les taxes affectées et de vendre les actifs non essentiels : Hôtel Rocklands, flottille
administrative, avion présidentiel, immeuble du boulevard Saint-Germain. D’autre part, d’améliorer
les recettes fiscales par un moratoire sur la défiscalisation locale et un meilleur recouvrement. Il
s’agissait enfin de présenter un budget primitif 2011 qui intègre les orientations budgétaires
mentionnées dans la lettre du président de la Polynésie française du 26 juillet 2010. De plus, le
gouvernement doit s’engager à instaurer un plafond de rémunération en cas de cumul des mandats,
à apurer les non-valeurs et à élaborer un plan de redressement (avec un système de gouvernance
propre) au plus tard le 30 juin 2011, afin de le mettre en oeuvre dès le second semestre.
Ce plan de redressement devra reprendre les mesures préconisées par le rapport de la
mission d’assistance : limiter l’intervention de la collectivité dans l’économie ; élaborer un schéma
d’aménagement (SAGE) ; actualiser le cadre juridique ; améliorer la sincérité des comptes
(admissions en non-valeurs et dotations aux amortissements, provisions) ; élaborer un plan à 5 ans
d’optimisation des recettes fiscales comportant une amélioration du recouvrement et du contrôle
fiscal ; préparer des outils nécessaires à une imposition globale des revenus.
La mise en place du prêt (1
ère
tranche), qui est intervenue au premier semestre 2011, était
conditionnée par la réception par « les tutelles » de la liste des réalisations, dressée par le haut
commissaire. La seconde tranche est conditionnée à l’adoption par le gouvernement d’un plan de
redressement précis prévoyant un calendrier de mise en oeuvre
25
, et à sa transmission à l’Assemblée
de la Polynésie française.
24
Avec remboursement in fine, A ce titre, la collectivité provisionne chaque année 239 millions de F CFP : remboursement du
capital en 2012 : 2,4 milliards de F CFP.
25
Le calendrier et le plan de redressement de la collectivité ont été adoptés par l’Assemblée le 18 août 2011. La seconde tranche du
prêt a été débloquée le 2 décembre 2011.
1.3. - La situation financière de la collectivité est devenue instable et risquée
1.3.1. - La trésorerie connaît des tensions chroniques
En application des recommandations de la Chambre, la collectivité a considérablement
amélioré la gestion technique de sa trésorerie.
Une liaison efficace a été établie avec les services du Payeur qui permet la mobilisation à
bonne date des fonds nécessaires aux décaissements, et l’utilisation maîtrisée des crédits revolving
qui permettent, par des remboursements infra annuels, de reconstituer les réserves de retirage.
Mais, en raison de la baisse des recettes fiscales pour couvrir les dépenses particulièrement
rigides de la collectivité et de la diminution forcée du recours à l’emprunt, la trésorerie de la
Polynésie française a connu des tensions très vives à partir de 2008, qui sont devenues chroniques.
Pour faire face à ses échéances, la collectivité gère au jour le jour des priorités de dépenses.
La situation est devenue très tendue au cours de l’exercice 2009, lorsque les réserves de tirage ont
commencé à devenir moins abondantes. Elles ont atteint leur plus bas niveau le 25 novembre 2009,
le solde n’étant plus que de 87 931 F CFP. Au 18 mai 2011, les réserves de retirage étaient de
6 256 955 472 F CFP. Mais au 13 septembre 2011, elles avaient chuté à 3 milliards de F CFP.
Réserve de retirage disponible
(en milliards de F CFP)
19,125
21,722
12,184
2,8
11,019
0,5
6,054
8,9
0,0009
5,033
0,23
13,6
7,5
1,3
8,6
2,2
8,1
13,8
7,8
10,5
5,1
10
4,598
0,8
3,5
0
5
10
15
20
25
01/01/07
01/01/08
01/01/09
01/01/10
01/01/11
Plusieurs causes expliquent la tension progressive de la trésorerie, dont trois ont eu un
impact décisif : les retards de versement par l’Etat de la DGDE en 2009 (les arriérés DGDE) qui,
finalement, seront soldés en 2010 ; la chute des recettes fiscales, en lien avec la crise économique,
qui a privé subitement la collectivité de 11 milliards de F CFP entre 2008 et 2009, enfin, le maintien
jusqu’en 2008 d’un niveau de dépenses trop élevé, dû à leur trop forte inertie.
Depuis, la collectivité a tenté de répondre à la tension de la trésorerie par une gestion plus
serrée des délégations de crédits, en instaurant une délégation par douzièmes à compter du second
semestre 2009. Des priorités de dépenses ont été mises en place. Certains choix, comme le décalage
du versement du FIP, d’abord de 15 jours en 2010, puis de quatre mois en 2011, ont pénalisé les
communes. Le versement retardé de trois jours des salaires, et du paiement des factures a également
été utilisé pour pallier les difficultés de trésorerie.
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Fin 2010, la situation était toujours aussi tendue. Elle ne s’améliorera significativement que
lorsque les difficultés budgétaires auront été surmontées. Il est probable que sans amélioration
budgétaire notable en 2011, en particulier sans une exécution très rigoureuse du budget voté, la
trésorerie risque de connaître d’ici la fin de cet exercice, notamment sur le dernier trimestre, une
tension extrême.
1.3.2. - Les risques d’insolvabilité ont considérablement augmenté
En dépit d’une gestion attentive de la trésorerie, les risques d’insolvabilité de la collectivité
d’outre-mer se sont accrus depuis 2009. Les réserves de trésorerie constituées par les lignes de
retirage ont diminué, à mesure de la consolidation en emprunts.
La chute des recettes depuis 2009 n’a pas été compensée, soit par des recettes nouvelles,
l’Assemblée de la Polynésie française ayant refusé par deux fois d’accroître les impôts en votant
des motions de défiance
26
, soit par des diminutions de dépenses suffisantes.
Même si les soldes d’épargne ont connu une légère amélioration, partiellement artificielle,
les dépenses réelles n’ont été diminuées que de 5 milliards en 2009, et ont progressé de 1,6 milliard
de F CFP en 2010.
Au surplus, les prêts toxiques présents dans l’encours de la dette font courir en cette période
d’instabilité des marchés financiers des risques très élevés de payer des surcoûts importants par
rapport à des produits plus classiques.
Depuis 2010, les négociations d’emprunts sont devenues beaucoup plus ardues : les
réaménagements comportent maintenant le paiement immédiat des indemnités actuarielles et la
recomposition dans le taux est beaucoup plus difficile à obtenir qu’auparavant
27
.
A ce risque purement bancaire, s’ajoute un risque de déséquilibre budgétaire qui peut
réapparaître si le plan et le calendrier des réformes n’est pas bien calibré puis suivi. De la qualité et
de l’ampleur des réformes, qui ont aussi un coût, dépend la réussite du redressement budgétaire et
financier de la collectivité.
Les difficultés éprouvées par la collectivité pour se doter d’un budget 2011 en droite ligne
avec les recommandations de la mission d’assistance et des principaux bailleurs de fonds, qui ont
débuté en novembre 2010 pour s’achever en avril 2011, n’ont, semble-t-il, pas permis de démontrer
la détermination de la collectivité à mettre en oeuvre les réformes d’envergure que requiert la
situation.
L’exécution du budget 2011, les axes de réforme et les réalisations effectives qui seront
constatées au 31 décembre 2011 seront à cet égard un indicateur précieux de la capacité de la
collectivité à surmonter durablement ses difficultés financières.
26
Contre le gouvernement d’Oscar TEMARU en novembre 2009, puis contre le gouvernement de Gaston TONG SANG en avril
2011.
27
En 2011, le réaménagement avec la BPCE a donné lieu à un allongement de la durée du prêt, ce qui équivaut à un renchérissement
de l’emprunt.
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2 – Le redressement budgétaire et financier passe par d’urgentes réformes de
structure
2.1. - Les difficultés actuelles sont plus structurelles que conjoncturelles
La crise économique qui touche la Polynésie française depuis 2008 n’explique qu’en partie
les difficultés budgétaires.
La Polynésie française a connu entre 1996 et 2006 un taux de croissance annuel moyen de
son PIB d’environ 3,4 %, tendant à se réduire en fin de période
28
. Entre 2006 et 2007, ce taux
n’était plus que de 2,4 %. Depuis, le Pays est entré dans une période de décroissance qui n’est pas
terminée. Le taux de la contraction a été estimé
29
à 1 % en 2008 puis 2,2 % en 2009 et pourrait se
poursuivre en 2010.
Entre 2007 et 2010, selon les statistiques officielles, il y a eu 5000 pertes d’emplois salariés
déclarées alors que les besoins en emplois nouveaux pour absorber les nouveaux entrants ont été
estimés à 7 500.
En 2010, l’IEOM notait que l’activité des banques était marquée par l’insuffisance de la
collecte des dépôts, la progression des créances douteuses, qui est désormais de 11%, ce qui
représente un doublement par rapport à 2006.
Cette mauvaise conjoncture a sérieusement impacté le budget de la Polynésie française,
mais n’est toutefois pas la seule cause des difficultés budgétaires actuelles, dont l’origine est plus
ancienne et touche aux structures de la dépense et de la fiscalité.
2.1.1. - La crise a joué un rôle de catalyseur
Par rapport à la situation budgétaire antérieure à l’apparition de la crise, celle-ci a eu pour
effet d’accélérer les processus en cours sans en changer fondamentalement la nature.
Les dépenses ont continué à s’accroître. Le soutien aux organismes périphériques,
notamment ATN, confrontée aux difficultés conjoncturelles du marché, ainsi que le financement de
la solidarité ont été plus importants avec la crise.
Le phénomène d’accélération a été surtout ressenti en matière de recettes. Entre 2007 et
2009, environ 11 milliards de F CFP de rendement fiscal net ont été détruits par la crise économique
qui s’est installée en Polynésie française.
La chute des recettes provenant des produits fiscaux et douaniers a été directement liée à la
conjoncture défavorable.
28
Rapport annuel de l’IEOM (2010).
29
Le PIB n’est plus publié officiellement depuis 2006. La seule publication indiquant la valeur estimée du PIB est le rapport
d’information financière de la Direction du Budget. Pour 2010, le rapport reprend exactement le montant de 2009, sans doute à
défaut d’information précise sur l’évolution récente du PIB.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 35 sur 84
Indirectement, la crise a contribué aussi à révéler les risques latents des prêts toxiques
contenus dans l’encours de sa dette.
2.1.2. - Les difficultés budgétaires et financières de la Polynésie française
s’expliquent aussi par des causes structurelles
Les difficultés budgétaires et financières que rencontre la Polynésie française ne sont pas
exclusivement dues à la conjoncture. La grave détérioration des finances de la collectivité d’outre-
mer a des origines qui sont antérieures à la crise.
L’une d’elles réside dans le niveau trop élevé des dépenses de fonctionnement. Cette
situation avait été constatée bien avant l’apparition des premières manifestations de la crise
économique. Une autre origine de ces difficultés est à rechercher dans l’inadaptation du système
fiscal, déséquilibré dans sa structure et trop sensible à la conjoncture économique.
2.1.2.1. – L’accroissement du poids des dépenses de fonctionnement, insoutenable à
terme, est antérieur à la crise et étroitement lié à la mauvaise organisation de la
collectivité.
Dans son rapport précédent, la Chambre avait signalé que derrière les équilibres budgétaires
se profilaient les signes avant-coureurs de difficultés, révélés notamment par l’absence de marge de
manoeuvre sur le fonctionnement en raison de l’extrême rigidité des dépenses.
Le poids très important et croissant des dépenses de personnel et des dépenses de transfert
avait
déjà été relevé.
A terme, toute inflexion durable nécessite la mise en oeuvre de réformes touchant au format
même de l’administration et à son périmètre d’intervention.
Le format de l’administration est disproportionné par rapport aux missions essentielles de la
collectivité. Il crée des dépenses de fonctionnement qui sont insoutenables à terme.
En 2004, il y avait 5.322 agents, toutes catégories confondues. En 2010, il y en avait 455 de
plus
30
.
De surcroît, la composition de l’effectif est très peu adaptée à une administration moderne :
les cadres ne représentent que 12 % de l’effectif contre 60 % pour les personnels d’exécution.
30
Malgré la suppression de 289 postes budgétaires vacants.
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Cadres
563
603
614
640
630
638
686
% par rapport au total des
effectifs
10,58%
10,67%
10,06%
10,69%
10,64%
10,70%
11,98%
Cadres moyens
1 039
1 111
1 268
1 237
1 283
1 342
1 291
% par rapport au total des
effectifs
19,52%
19,66%
20,77%
20,65%
21,66%
22,50%
22,54%
Personnel d'exécution
dont dockers,
dont personnel maritime
3 371
122
138
3 356
121
155
3 628
115
138
3 618
120
152
3 594
114
147
3 595
118
151
3 455
114
148
% par rapport au total des
effectifs
63,34%
59,39%
59,43%
60,41%
60,68%
60,28%
60,33%
Total des effectifs
5 322
5 651
6 105
5 989
5 923
5 964
5 727
Le manque de qualification du personnel (faible nombre de catégorie A) et le nombre très
élevé d’emplois « occupationnels » ne permettent pas à la collectivité de s’adapter rapidement aux
critères d’une administration moderne.
De trop nombreux emplois sans valeur ajoutée pour la collectivité obèrent ses marges de
manoeuvre pour promouvoir efficacement le développement économique et social de la Polynésie
française.
La collectivité n’a pas traité ce problème avant la survenance de la crise. Mais la solution
qui sera trouvée pour mettre fin à l’hypertrophie de l’administration par rapport aux possibilités
financières de la Polynésie française est une des clés du redressement.
En effet, comme par le passé, l’immobilisme aurait pour conséquence une élévation
permanente du niveau d’imposition.
La multiplication des services au sein de l’administration de la Polynésie française ou des
organismes dotés de la personnalité morale en périphérie de la collectivité (établissements publics,
sociétés d’économie mixte…) a abouti mécaniquement à une augmentation des charges de
structures et à un accroissement des risques de la collectivité. Plusieurs de ces services ou
organismes interviennent dans des domaines qui ne peuvent être considérés comme prioritaires,
ainsi que relevait le rapport de la mission d’assistance.
Certains services de la collectivité constituent parfois
«
un doublon de services externalisés
au sein
[de]
GIE ou d’établissements publics »
. Des organismes périphériques subventionnés par la
Polynésie française ou bénéficiant de l’affectation de certaines ressources fiscales, au risque de
disperser les ressources publiques, entrent en concurrence entre eux pour des missions très proches.
Ces organismes s’investissent quelquefois dans des domaines concurrentiels n’ayant qu’un lien ténu
avec l’objet pour lequel ils ont été créés.
L’exemple de l’aménagement-construction et du logement social, qui ont fait l’objet de
plusieurs rapports de la Chambre (FDA, EAD, SAGEP, OPH …) est particulièrement édifiant. La
multiplicité des structures et le morcellement des missions pour des résultats, de l’aveu de tous,
médiocres, ont eu un coût budgétaire très lourd pour la collectivité.
Ces organismes périphériques concourent ainsi à la rigidité des dépenses de la collectivité
qui n’exerce qu’un contrôle minimal sur leur activité et leurs résultats. La Polynésie française ne
dispose pas de services de contrôle de ces structures et d’outils de consolidation des comptes qui lui
permettraient d’apprécier les risques, notamment financiers, qu’ils peuvent entraîner pour elle.
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La multiplication des interventions publiques, sans plan stratégique et sans vision
d’ensemble, a coûté très cher à la collectivité de la Polynésie française.
La chambre a particulièrement insisté dans ses différents rapports d’observations relatifs aux
politiques conduites par la Polynésie française sur les conséquences dommageables de l’absence
d’évaluation.
L’évaluation systématique des politiques publiques constitueraient une aide à la cohérence
des actions menées. Elle permettrait d’infléchir les dispositifs mis en oeuvre, tout en contribuant à la
transparence de la gestion publique et au débat démocratique au sein de l’assemblée délibérante.
En ne se dotant pas d’un service et d’outils d’évaluation, la collectivité se prive
d’informations indispensables à l’amélioration de sa gestion.
En février 2009, procédant à l’examen des suites qui avaient été données par la collectivité
aux observations du Rapport public 2007, la Cour des comptes avait relevé qu’en matière
d’évaluation, la collectivité en était restée au stade d’une réflexion sur la mise en place d’indicateurs
de performance. Le seul progrès obtenu dans ce domaine était imputable à l’action de l’Etat dans le
cadre du contrat de projet 2008-2013 (dispositif de suivi et d’évaluation des volets du contrat de
projet).
A ce jour, la Polynésie française ne paraît toujours pas disposer d’un véritable dispositif
d’évaluation des politiques publiques.
De même, les modalités de financement des communes par le FIP et diverses subventions
ont représenté une charge annuelle de près de 20 milliards de F CFP, sans que soit organisée de
manière pérenne l’évolution des règles de financement des communes. La définition de nouvelles
modalités de financement de ces collectivités par la voie fiscale ou par celle de dotations stabilisées
et garanties n’a pas été traitée alors que le code général des collectivités territoriales leur impose de
nouvelles contraintes budgétaires dans un calendrier pré-établi.
Enfin, dans un autre secteur, concernant lui aussi les dépenses de transfert, le projet de
redéfinition d’une politique de protection sociale et de solidarité, faisant évoluer la PSG et ses
modalités de financement n’a pas avancé, alors que les problèmes financiers des régimes sociaux
s’aggravent.
2.1.2.2. - Le système fiscal et douanier est trop sensible aux effets de conjoncture
La structure du système fiscal rend la collectivité particulièrement vulnérable aux effets de
conjoncture. En période de haute conjoncture, le niveau élevé des recettes fiscales incite à négliger
la recherche d’une gestion plus économique et plus efficiente, alors qu’en période de ralentissement
économique les recettes se creusent rapidement, au point de conduire à l’impasse budgétaire.
Depuis la crise de 2008, les recettes douanières et fiscales ont fortement chuté. Le produit
des impôts et taxes indirects est en effet étroitement lié au niveau de l’activité économique, au
volume des importations et de la consommation.
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2.1.2.2.1. - La fiscalité repose essentiellement sur des impôts indirects et des taxes
La fiscalité indirecte représentait respectivement, en 2004 et en 2010, 78 % et 72 % des
ressources fiscales. La part de la fiscalité indirecte dans la fiscalité générale a augmenté jusqu’en
2006
31
. Elle a ensuite diminué en 2007, cette baisse s’étant accentuée entre 2008 et 2010. La perte
fiscale a atteint cette dernière année environ 12 milliards de F CFP par rapport à 2008.
(cf. annexe 3).
Le poids de la fiscalité indirecte n’a, pour autant, pas cessé d’être nettement prépondérant
dans la fiscalité polynésienne.
En 2004, son poids était de 72 % au niveau des prélèvements bruts, mais il représentait 85 %
des prélèvements nets. En 2007, la proportion est devenue de 73 % pour les prélèvements bruts,
mais seulement 78 % pour les prélèvements nets. En 2009, malgré la crise, la fiscalité indirecte
représentait encore 67
% des prélèvements bruts et 75 % des prélèvements nets.
2.1.2.2.2. - La fiscalité indirecte et les recettes douanières surréagissent à la
conjoncture économique
En période de croissance soutenue, ces recettes ont augmenté de manière continue depuis
1995, mais elles ont commencé à régresser en 2008 lorsque la crise a affecté la Polynésie française
(voir annexe 3).
C’est particulièrement le cas des produits nets de la TVA
32
, qui étaient de 38,9 milliards en
2004, qui ont culminé à 43,6 milliards de F CFP en 2008, avant de chuter à 39,5 milliards de F CFP
en 2009 et à 38,3 milliards en 2010 (voir annexe 3). Les droits sur les produits importés (droits de
douanes, hydrocarbures, tabac) ont suivi la même évolution. Ils ont passés de 24,3 milliards de
F CFP en 2004, ont plafonné entre 26 et 27 milliards de 2005 à 2008, puis ont chuté de 4 milliards
en 2009. Ils se situaient en 2010 à 21 milliards de F CFP.
Les effets de la mauvaise conjoncture économique ont ainsi impacté le budget de la
collectivité par le biais de deux principales ressources fiscales et douanières. Mais, la fiscalité
indirecte étant assise essentiellement sur la consommation, les autres taxes qui alimentent le budget
ont connu, avec plus de modération, la même inversion de tendance.
S’est ajouté à cet effet direct l’incidence de la politique fiscale qui a consisté durant cette
période de ralentissement économique à recourir à la taxation pour répondre aux besoins
budgétaires tout en soutenant l’activité économique par des exonérations et des dégrèvements.
31
Rapport CTC de 2006 sur le ministère des finances : « Globalement, les recettes de la fiscalité indirecte connaissent une
progression constante. Le taux moyen d’augmentation annuelle est de 9 % depuis 1995, en raison de l’évolution de l’activité
économique, donc des importations, mais également à de nouvelles taxes et à l’élargissement de l’assiette fiscale (la TVA est assise
sur les prestations commerciales et de service). »
32
Produits bruts – remboursements de TVA.
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C’est ainsi qu’en 2006
,
on constate une augmentation importante des recettes brutes, alors
que les recettes nettes sont stables. De nouvelles recettes fiscales brutes, provenant de la création
d’une nouvelle taxe ou de l’affectation au budget général de la Polynésie française de taxes jusqu’à
alors affectées à des établissements publics (EPAP, EGT), ont été en partie neutralisées par
l’augmentation des exonérations (+ 1 900 MF CFP) et des remboursements de crédits de TVA
(+ 700 MF CFP).
En 2008, la création de taxes a été suspendue pour soutenir l’activité.
A ce jour, la récession économique s’est traduite en définitive par une baisse par rapport aux
recettes 2007-2008, de 5 milliards au titre de la TVA, de 6 milliards au titre des droits à
l’importation, de 1,2 milliard au titre des droits intérieurs de consommation, de 700 millions au titre
des droits de timbre et d’enregistrement.
2.2. - Des réformes portant sur la dépense publique et la fiscalité sont
indispensables
L’autonomie de la collectivité de la Polynésie française au sein de la République se
manifeste par une liberté d’organisation des services administratifs, dans le respect de la loi
organique statutaire, et, en matière de fiscalité, par la faculté qui lui est reconnue de choisir
librement le système fiscal applicable à son territoire.
Cette dernière compétence de principe est très ancienne puisqu’elle remonte au XIXe siècle
et a été confirmée depuis par tous les statuts du territoire
33
. La Polynésie française est donc
compétente pour organiser ses services et réglementer son régime fiscal et douanier, pour lesquels
l’Etat n’a reçu du législateur aucune compétence d’attribution.
Pour faire face avec pertinence aux difficultés budgétaires du moment, compte tenu de leur
origine, il ne s’agit plus d’adapter le budget à une conjoncture défavorable, mais bien de réformer
en profondeur la collectivité et son système fiscal, ce qui exclut les mesures fragmentaires qui ne
s’inscriraient pas dans une stratégie générale permettant à la collectivité de retrouver au plus vite le
rôle majeur qui doit être le sien dans l’économie polynésienne.
2.2.1. – Une diminution progressive des dépenses de fonctionnement
L’augmentation
systématique
des
dépenses
de
fonctionnement,
financées
par
l’alourdissement des prélèvements obligatoires dans le cadre de l’autonomie fiscale, a montré ses
limites. Elle est directement responsable de la situation fragile et préoccupante dans laquelle se
trouve la collectivité, sans réelles marges de manoeuvre.
33
Pour ce qui est de la « Polynésie française », proprement dite, la « souveraineté fiscale » remonte à la loi n°56-619 du
23 juin 1956 et à l’article 46 du décret n°57-812 du 22 juillet 1957.
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2.2.1.1. – Réorganiser les moyens pour parvenir à un nouveau format d’administration
Le plan de redressement adopté par la collectivité a proposé plusieurs regroupements de
services et la fusion ou la suppression de plusieurs établissements publics. Il doit être étalé dans le
temps. Mais son but est de réduire la dépense publique en rendant chaque franc dépensé plus
efficace lorsqu’il sera utilisé dans cette nouvelle configuration.
Ces restructurations doivent être accompagnées par une politique de soutien qui ne
reconduise pas les errements passés. Dans plusieurs rapports de la Chambre sur les instruments de
développement de la Polynésie française a été soulignée la nécessité de rédiger des conventions
d’objectifs et de moyens avec les organismes périphériques (établissements publics, sociétés
d’économie mixte, GIE) et autres partenaires de la collectivité.
Ces conventions d’objectifs et de moyens devraient permettre à la collectivité de fixer des
buts clairs à l’organisme, d’évaluer à terme ses résultats et d’en déduire des actions correctrices
pour améliorer sa performance.
Cette révision du périmètre d’intervention de la collectivité doit nécessairement conduire à
des économies budgétaires. Les suppressions d’organismes ne doivent pas aboutir, comme en 2006,
à grossir l’effectif des agents de la collectivité avec des personnels surnuméraires.
La question des sureffectifs doit être posée. Les rapports de la chambre territoriale des
comptes, comme le rapport de la mission d’assistance, en ont identifié quelques uns, dont les plus
importants se situent aux ministères de l’agriculture (SDR) et de l’équipement.
Avant que ne s’engagent les premières restructurations, la chambre précise qu’à son estime
il ne saurait y avoir de réintégration systématique dans une administration à l’effectif déjà très
important.
Il convient de mettre en place, parallèlement aux restructurations, des mesures
d’accompagnement finançables par la collectivité de la Polynésie française, sans compromettre sa
capacité à investir, pour se doter des équipements structurants qui lui font encore défaut.
Il serait tout aussi indispensable d’augmenter la productivité de l’administration en
améliorant le ratio d’encadrement par des actions de formation bien ciblées. Ce type de dépenses a
été d’un niveau trop faible au cours des années écoulées eu égard aux besoins.
L’appareil administratif reste à ce jour inadapté. Le manque de cadres, en nombre et en
qualité suffisante, handicape la collectivité qui éprouve des difficultés certaines à traiter des dossiers
complexes en temps compté et à conduire de grands projets.
Une mise à niveau de la réglementation doit être envisagée afin de conférer cohérence et
méthode au processus entrepris.
2.2.1.2. – Revoir les relations financières avec les communes
De même, le financement des communes, pour soutenir les missions qu’elles exercent dans
le cadre défini par la loi organique statutaire, doit être stabilisé.
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La collectivité de la Polynésie française reverse aux communes une partie des impôts et des
taxes prélevés sur les contribuables en abondant le fonds intercommunal de péréquation (FIP).
Par ailleurs, elle leur alloue des subventions d’investissement par l’intermédiaire de la
délégation aux communes (DDC).
Le FIP, défini par l’article 52 de la loi organique du 23 février 2004 modifiée, a pour assiette
diverses ressources fiscales et douanières de la Polynésie française, notamment les droits de
douanes, les taxes sur les hydrocarbures, sur les tabacs, la TVA à l’importation et sur le régime
intérieur, le versement forfaitaire CEA-CEP
34
, l’impôt sur les sociétés et les crédits d’impôt à la
défiscalisation locale, qui, à l’exception du versement forfaitaire CEA-CEP, sont tous, à des degrés
divers, sensibles à la conjoncture.
Pour cette raison, les montants versés au FIP sont en forte régression depuis l’aggravation de
la crise économique :
En MF CFP
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
FIP
13 894
13 336
15 644
17 206
17 813
14 542
13 500
La fiscalité « résiduelle et archaïque » (contribution des licences, impôt foncier sur les
propriétés bâties, contribution des patentes), qui est également partagée avec les communes au
moyen de centimes additionnels, a subi elle aussi, dans une moindre mesure, les effets de la crise
économique.
La fiscalité communale mériterait donc d’être révisée afin que soit stabilisé le financement
des collectivités dans des conditions soutenables par la Polynésie française. Une telle réforme doit
reposer avant tout sur des mesures de rendement à fiscalité constante avant d’envisager la création
d’impôts nouveaux. Par ailleurs, les mécanismes de péréquation pour les communes organisés dans
le cadre le FIP doivent être préservés, compte tenu des grandes disparités existant entre ces
collectivités.
2.2.2. - La mise en oeuvre d’une réforme fiscale globale pour optimiser les
prélèvements publics
2.2.2.1. - Une modification progressive de la structure fiscale est indispensable
2.2.2.1.1. - Pour aller vers plus d’efficacité
La structure de la fiscalité polynésienne ne la dispose pas à absorber au mieux les aléas de
conjoncture. Elle rapproche la Polynésie française des pays, généralement jeunes, où l’essentiel des
produits fiscaux et douaniers est perçu au franchissement de la frontière. Le poids particulier de la
fiscalité indirecte l’éloigne des structures des pays développés où fiscalités directe et indirecte
s’équilibrent. Les impôts directs, qui frappent la détention de la matière imposable, revenu ou
propriété sont peu développés.
34
Terminé en 2011.
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Dans le rapport précédent de la chambre, le faible niveau de la fiscalité directe avait été
relevé et considéré comme un handicap
:
« La fiscalité directe représente en 2003, 21% des recettes
réelles de fonctionnement».
De 2004 à 2010, son poids n’a guère varié.
Les impôts qui développent des effets compensant la sensibilité des impôts et taxes indirects
à la conjoncture économique sont très peu nombreux dans la fiscalité polynésienne. Lorsqu’ils sont
suffisamment développés, ces impôts permettent de maintenir le niveau des recettes fiscales quand
les impôts indirects subissent les effets dépressifs de la crise. En Polynésie française, le rôle de
régulateur des recettes fiscales n’est tenu par aucun impôt important.
Actuellement, le système fiscal polynésien ne comporte pas d’impositions destinées au
budget de la collectivité d’outre-mer, insensibles à la conjoncture économique.
Il n’existe pas d’impôt sur le revenu. S’en rapproche le prélèvement à la source au profit du
régime de solidarité du système de protection sociale. Cet impôt, la Contribution de solidarité
territoriale (CST) ne transite pas par le budget de la collectivité d’outre-mer mais est directement
versé au régime social. C’est une contribution due par les salariés et les professions et activités non
salariées (commerçant, professions libérales, agriculteurs). Il existe aussi désormais une CST sur les
capitaux mobiliers (IRCM).
Cette imposition est moderne : prélèvement à la source, contribution universelle, taux
progressif par tranche sans plafond pour la dernière tranche (+ de 700 000 F CFP). C’est un impôt
payé au premier franc imposable qui frappe surtout par les salariés (73% de la collecte). Comme le
notait, à juste titre, la mission d’assistance, l’absence de familiarisation pénalise le couple de
salariés avec enfant, la CST n’étant pas modulée par la composition du foyer fiscal, notion qui
n’existe pas dans le droit fiscal polynésien.
La question de l’intégration de la CST dans le budget général peut être intéressante à poser.
En effet, cet impôt, qui pourrait être développé, est relativement peu sensible aux effets de la
conjoncture et permettrait de rééquilibrer la structure fiscale. Mais cette question ne peut être
utilement étudiée que dans le cadre de la réforme globale des prélèvements obligatoires, de la
protection sociale généralisée (PSG) et de son financement.
Par conséquent, l’impôt sur les sociétés (IS) continue de représenter à lui seul plus de la
moitié des recettes fiscales directes brutes. Cette proportion était encore plus élevée en 2004 : 72%.
En 2008, les recettes d’IS ont été à leur niveau maximum
35
car les impôts de l’année sont assis sur
les résultats de l’année précédente. Cette particularité permet de développer un léger contre-effet à
la chute des recettes indirectes.
Le produit de l’IS n’a fléchit qu’en 2009 : - 2,3 milliards de F CFP. Ce fléchissement est
imputable pour 1,6 milliard au rendement de l’impôt et pour le reste à l’augmentation des crédits de
d’impôt liés aux opérations de défiscalisation locale. Le produit fléchit à nouveau, en 2010
(- 1,7 milliard de F CFP), mais une gestion plus resserrée des crédits d’impôt de défiscalisation
locale (- 2,6 milliards de F CFP), en atténue l’effet.
35
Des évolutions semblables ont affecté l’impôt sur les transactions.
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Enfin, il n’y pas assez d’imposition du capital et du patrimoine. L’intérêt économique de la
taxation du patrimoine présente plusieurs avantages. C’est un impôt à assiette large qui n’a pas
besoin de taux élevé pour avoir un bon rendement. Ensuite, c’est un impôt assis sur une grandeur
économique qui n’est pas sensible aux effets de conjoncture. Ces impôts permettent de lisser dans le
temps les rendements fiscaux.
Or le système fiscal ne comporte pas suffisamment d’impôts assis sur la détention d’un
capital immobilier ou sur le foncier. Il existe bien un impôt sur le revenu des capitaux mobiliers
(actions, parts sociales, jetons de présence, obligations etc..) mais celui-ci rapporte peu, (1,6
milliard de F CFP en moyenne). Il existe aussi un impôt sur le foncier bâti qui rapporte en moyenne
la même recette. Son rendement est notoirement faible, car le cadastre n’est pas à jour
36
: il
manquerait environ 26 000 habitations. Les bases locatives datent de 1950, date de la création de
l’impôt. Il y a 36 000 contribuables alors qu’il y a, par exemple 80 000 compteurs électriques et
76 000 habitations déclarées.
La réponse est assurément dans le rééquilibrage progressif du système fiscal.
Auparavant, la réforme fiscale doit trancher plusieurs questions fondamentales pour le
budget de la Polynésie française.
La collectivité doit procéder avec méthode, afin de préserver le niveau des recettes fiscales
et autofinancer la réforme. C’est ainsi que la diminution de la fiscalité indirecte (taxes) ne peut être
envisagée qu’à mesure que les dépenses budgétaires inutiles sont éliminées ou qu’une fiscalité
directe rénovée, sur le modèle de la CST cédulaire ou, mieux encore, d’impôts assis sur le
patrimoine (fiscalité immobilière, droits de transmission), est mise en place.
Des modalités sont à retenir pour coordonner, dans le temps et dans l’espace, le calendrier
des modifications de la structure fiscale. Dans ce cadre, le niveau de dépenses fiscales supportable
pour les finances publiques doit être réajusté.
Il conviendrait aussi de développer les techniques et les moyens consacrés au recouvrement
de l’impôt. Les mesures de rendement qui sont attendues doivent conforter le niveau des recettes
existantes.
Une action doit être engagée pour lutter contre le comportement fiscal de fuite devant
l’impôt qui s’est développé. Par exemple, les impôts sur l’entreprise sont déclaratifs. Ils reposent
donc sur le civisme fiscal des citoyens mais aussi sur la qualité du contrôle fiscal. L’un et l’autre
ont, semble-t-il, fait défaut jusqu’à présent. Sur les 26 217 entreprises, le service des contributions
n’avait trace dans ses fichiers que de 2 800 entreprises imposables à l’IS et 18 581 imposables à
l’IT. Il est estimé par les services fiscaux que, depuis 2004, les déclarations à l’IS ne dépassent pas
80 % et à IT, 75 %. Des incohérences grossières dans les déclarations des assujettis ont été décelées
par le service des contributions
37
qui, à ce titre, a constaté entre 2001 et 2007 une évolution
contradictoire du chiffre d’affaires réel et du chiffre d’affaires imposable
38
. La raison identifiée de
cette anomalie était une utilisation abusive des provisions, poste qui n’était pas contrôlé, faute de
moyens de contrôle fiscal.
36
L’assujettissement des archipels éloignés où cet impôt n’est pas mis en recouvrement, a été prévu par une loi du pays, confirmée
par un arrêt du Conseil d’Etat du 30 juin 2010, à compter du 1
er
janvier 2014.
37
Etude d’octobre 2009.
38
Entre 2001 et 2007, les chiffres d’affaires ont augmenté de + 225 milliards de F CFP et les provisions de 194 milliards de F CFP,
ce qui a eu pour effet de minorer le produit de l’IS.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 44 sur 84
2.2.2.1.2. - Pour aller vers plus d’équité
Le système fiscal polynésien a souvent été décrit comme injuste. La prépondérance marquée
de la fiscalité indirecte, qui repose en grande partie sur la consommation des ménages, et l’absence
d’impôt sur les revenus
« qui appréhende globalement, à un taux progressif, l’ensemble des
revenus »
des foyers fiscaux, rend le système fiscal particulièrement inéquitable, comme l’a
souligné le rapport de la mission d’assistance en septembre 2010. Entre 1995 et 2006, les impôts
des ménages sont passés, avec notamment l’introduction de la TVA en 1998, de 3,8 milliards de
F CFP à 48,8 milliards de F CFP, tandis que ceux des entreprises progressaient de 51,5 à
58,5 milliards de F CFP
39
.
Par ailleurs, la fiscalité en Polynésie française est dans un état proche de celle décrite en
1960, dans le rapport Rueff-Armand consacré à l’examen des obstacles à l’expansion économique
française. Le système fiscal polynésien apparaît
« ravagé par les exonérations et les régimes
particuliers »
. Ceci confère très souvent au système un haut degré d’iniquité parce que le nombre
élevé de taxes et de droits auxquels chacun est assujetti, est compensé pour certains agents
économiques, par un ensemble très développé d’exonérations et de dégrèvements qui réduisent
considérablement leurs charges fiscales.
Actuellement, le système fiscal direct (IS et IT)
repose essentiellement sur les entreprises.
Les taux d’impositions des entreprises sont élevés
40
. Il existe en plus une contribution spéciale pour
les bénéfices imposables supérieurs à 100 MF CFP (la contribution supplémentaire à l’IS) qui varie,
selon le bénéfice imposable, de 7 à 15 %. D’après les dispositions légales, le taux d’imposition
pourrait atteindre 57,5 % au maximum. On dénombrait, en 2010, 26 217 entreprises dont seulement
11 000 étaient assujetties à la TVA. Les cent premières acquittent 80 % de l’IS. Mais c’est aussi aux
mêmes contribuables que plus de 70 % des crédits d’impôt de défiscalisation locale sont accordés.
Les Etats généraux de l’outre-mer avaient montré en 2009, à l’aide de statistiques fiscales,
que le taux d’effort fiscal le plus élevé reposait sur les très petites entreprises (TPE) et les petits
patentés. Les constats décrits dans la partie consacrée à la défiscalisation du rapport confirment cet
état de fait. Grâce aux mécanismes défiscalisants, les banques et les grandes entreprises
polynésiennes optimisent très largement leurs impôts. Certaines ont pu être amenées à ne régler que
l’impôt minimum de 4 millions de F CFP.
Les exonérations sont organisées par le code des impôts sous forme de déductions d’assiette
ou d’avoir fiscal pour les capitaux mobiliers, ou sous la forme de coefficients modérateurs de 50 %
pour 40 assujettis à l’IT
41
. Au total, les déductions sur l’impôt dû par les entreprises ont représenté,
45 %
42
de l’assiette déclarée en 2004 et 32 % en 2008.
Les dégrèvements sur l’impôt dû sont élevés. Ils ont atteint un maximum de 6,5 milliards de
F CFP en 2005 pour se stabiliser, par la suite, à 2,2 milliards de F CFP. Cette procédure relève de
décisions discrétionnaires du président de la Polynésie française.
39
Source : Comptes économiques.
40
Ils varient de 32,5% à 42,5%.
41
LP 184-4 : armateur, artisan, loueur en meublé, garagiste, restaurateur, etc…
42
Total des déductions / Produit brut IS et IT + déduction d’assiette (hors crédit d’impôt).
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Séance du 22 décembre 2011 - page 45 sur 84
De très nombreuses exonérations douanières amputent les recettes de la collectivité. Le code
des douanes prévoit une longue liste d’exonération de taxes et de droits d’entrée en fonction des
produits et des denrées. Parmi celles-ci plusieurs ont un impact budgétaire très fort. En premier lieu,
la détaxation des produits pétroliers
43
, qui fait perdre chaque année à la collectivité de la Polynésie
française une somme qui a été estimée à 3,9 milliards de F CFP en 2009.
Le maquis des exonérations douanières est coûteux. Ces exonérations ont en effet représenté
en moyenne une dépense fiscale de 3,8 milliards de F CFP par an de 2006 à 2009. Cette dernière
année, la dépense avait été de 4,3 milliards de F CFP. Parmi les plus fortes exonérations, figurent
celles pour les avions de transport international, qui sont exonérés de droits de douane et de TVA,
ce qui représente un coût de l’ordre de 500 MF CFP par an. Les paquebots de croisière sont, pour
leur part, exonérés de tous droits et taxes, ce qui a coûté de 230 MF CFP à 150 MF par an. Les
matières premières (agro-alimentaire, BTP, plastique, imprimerie) sont exonérées de droits de
douane, ce qui
a coûté de l’ordre de 240 MF CFP par an. Les objets d’art sont exonérés de toutes
taxes sauf de la TDL.
Ce coût élevé pour la collectivité renforce le plus souvent des positions monopolistiques au
détriment du libre jeu de la concurrence.
2.2.2.2. – L’augmentation des moyens de l’administration fiscale doit être envisagée
2.2.2.2.1. – Des moyens doivent être alloués en vue de réaliser les préalables
techniques de toute réforme
La réforme fiscale doit, en réponse aux problèmes posés, permettre de lisser les recettes par
une augmentation progressive des impôts directs et le développement de l’imposition des stocks
(patrimoine), de préférence à l’imposition traditionnelle des flux (revenus) et augmenter les
assiettes taxables par la suppression raisonnée des exonérations et dégrèvements inéquitables.
Pour y parvenir dans de bonnes conditions, des préalables techniques sont nombreux. A cet
égard, l’amélioration du cadastre, dont les imperfections avaient été soulignées dans un rapport de
la Chambre consacré à la gestion foncière
44
, est indispensable à la généralisation d’un impôt assis
sur le patrimoine foncier. D’une manière générale, la connaissance des revenus autres que salariés
doit impérativement progresser avant l’alourdissement de la fiscalité pour laquelle ils serviraient
d’assiette. Par exemple, l’augmentation des taux de CST, à laquelle la collectivité de la Polynésie
française fait périodiquement appel, pratiquée dans des conditions où la connaissance de tous les
revenus n’aurait pas été améliorée, aboutirait à renforcer les situations d’inégalité devant l’impôt
entre les salariés et les non salariés.
Le système fiscal polynésien n’est pas suffisamment organisé pour que soient encouragés les
comportements civiques que suppose son système déclaratif. L’administration de l’impôt joue, dans
un tel système, un rôle capital : en précisant les règles, en les adaptant au contexte économique, et
en assurant un contrôle fiscal de qualité.
43
La mission d’assistance s’est longuement penchée sur les moyens de mieux contrôler la détaxation de carburant (coloration). Elle
en a déduit qu’il était possible d’en réduire le coût de 20 % (900 MF CFP).
44
Rapport d’observations définitives du 4 novembre 2008 (Polynésie française – Affaires foncières).
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Aussi, le cadre comptable a-t-il besoin d’être stabilisé. Une délibération n° 85-1001 du
10 janvier 1985 a introduit le plan comptable 1982, sans en préciser la contexture exacte, créant
ainsi une insécurité juridique quant à l’application de ses règles.
Le plan comptable n’est pas opposable à tous les contribuables. La révision
45
de 1999 n’a
pas été transposée. L’adoption d’une norme comptable réglementaire
46
paraît indispensable pour
améliorer l’administration de l’impôt et le contrôle. De même, les « professions du chiffre »,
comptables et experts-comptables, ne sont pas régies par un texte réglementaire mais par une voie
conventionnelle : une association fait office d’ordre.
Des imprécisions dans le droit applicable laissent des pans entiers de la vie économique sans
normes réglementaires. Par exemple, le code de commerce s’applique, dans ses articles L-123-12 à
L-123-23, mais ne concerne que les commerçants, et pas les sociétés civiles et les professions
libérales.
La commission des impôts (article 431-2) a besoin d’évoluer dans sa composition, car elle
ne compte aucun membre délibérant du service des contributions, et dans son fonctionnement, car
celui-ci ne garantit pas un exercice satisfaisant du droit de recours. Seules les questions de fait
peuvent être évoquées devant elle, et son avis n’est que consultatif. L’interposition d’un arbitrage
présidentiel dans la procédure de l’impôt n’offre, pas toutes les garanties d’impartialité qu’est en
droit d’attendre tout contribuable d’autant que cette procédure prétorienne génère des retards
importants dans le traitement des affaires. Par exemple, une affaire de redressement dont la
commission a été saisie en février 2009, et dont l’arbitrage du président a été demandé en juin 2009,
n’est toujours pas résolue alors que le montant des droits à notifier est d’un milliard de F CFP.
A l’instar de la mission d’assistance, la Chambre territoriale des comptes recommande la
suppression de l’arbitrage présidentiel et la transmission rapide au juge de l’impôt lorsque le
précontentieux a échoué.
2.2.2.2.2. - Renforcer les services fiscaux
Une des raisons pour lesquelles, le système fiscal souffre de rendements fiscaux insuffisants
est à rechercher dans le dimensionnement trop réduit de l’administration fiscale par rapport aux
enjeux.
La mise en oeuvre d’une politique fiscale rénovée requiert l’allocation de moyens
supplémentaires afin d’améliorer les rendements fiscaux. Le taux de recouvrement en 2009 était de
93,72% alors qu’il était de 95,8 % en 2005. Mais ces
taux sont en moyenne inférieurs de 2 points
aux taux métropolitains.
Les recouvrements d’impôts ne sont pas uniformes. Le taux de recouvrement à échéance est
de 40% pour l’IS, de 38% pour l’IT, et seulement de 5,8% pour la contribution des patentes.
L’impôt foncier a un taux de recouvrement de 45%. La CST salarié a un taux de recouvrement pour
la partie déclarative de 71% et de 0,8% pour les non-salariés. La TVA (régime intérieur) a un taux
de recouvrement de 94%.
45
Il y en a eu 16.
46
Le plan de redressement adopté par la collectivité de la Polynésie française mentionne qu’un nouveau plan comptable a été publié.
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A titre indicatif, il restait 9 milliards de F CFP en restes à recouvrer sur les rôles émis de
2004 à 2009 pour 191 milliards de F CFP.
L’administration de l’impôt a un format très restreint. Elle compte 84 agents, dont 23 de
catégorie A. Le nombre trop réduit d’agents de cette catégorie, en dépit de leur qualité, ne permet
pas une administration des impôts accomplie.
Des missions sont de fait sacrifiées, faute de moyens
et de formation professionnelle organisée et performante.
C’est ainsi que le contrôle fiscal a été une mission qui n’a pas été exécutée avec des moyens
suffisants. Avec seulement 5 agents de catégorie A, la cellule de contrôle fiscal externe ne peut pas
remplir la totalité de ses misions.
Ainsi, depuis 2004, les statistiques du Contrôle Fiscal Externe (CFE) traduisent la faiblesse
des moyens consacrés au contrôle. En 2009, un renforcement des moyens, notamment sur le plan
qualitatif (détachement d’un inspecteur principal de la direction générale des finances publiques)
s’est aussitôt traduit par une forte augmentation des pénalités sur rappelés
47
.
Contrôle Fiscal Externe (CFE) de 2006 à 2010
2006
2007
2008
2009
2010
2011(avril)
CFE engagés
28
33
26
45
33
8
CFE clôturés
39
33
26
31
39
14
Droits
rappelés
353 892 864
231 218 692
169 063 931
736 811 531
1 409 643 025
2 034 683 547
Moyenne des
droits
9 074 176
7 006 627
6 502 458
23 768 113
36 144 692
145 334 539
Pénalités sur
rappelés
87 014 522
72 459 425
52 494 884
394 095 424
1 062 763 159
817 857 539
3 - La défiscalisation locale : un dispositif à reconsidérer au regard des
objectifs visés et des contraintes actuelles
Les
dispositifs
de
défiscalisation
outre-mer
sont
des
mesures
d’aide
fiscale
à
l’investissement qui offrent l’opportunité aux contribuables de réduire le montant de leurs impôts,
s’ils consentent à investir dans un secteur considéré par les pouvoirs publics comme déterminant
pour le développement économique et social du territoire.
Apparues en France pour la première fois en 1952, ces mesures ont été puissamment
renforcées par la loi Pons du 11 juillet 1986, puis « normalisées » par la loi Paul du 13 décembre
2000 et la Loi Girardin du 21 juillet 2003.
Le dispositif national, sous les différentes modalités qu’il a connues depuis 1986, n’avait pas
rencontré, dix ans après son lancement, le succès escompté dans les collectivités dotées de
l’autonomie fiscale, comparativement aux autres collectivités d’outre-mer soumises à une fiscalité
de droit commun.
47
Le contrôle fiscal va bénéficier en juillet 2011 d’un renfort temporaire : 4 vérificateurs et un inspecteur principal pour améliorer les
techniques de contrôle fiscal.
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De fait, en Polynésie française, l’absence d’impôts nationaux rendait partiellement
inopérante l’une des modalités du dispositif national, la défiscalisation directe, les investisseurs
locaux ne pouvant utiliser de crédits d’impôt. L’autre modalité, la défiscalisation externalisée,
n’avait pas été beaucoup utilisée en Polynésie française, les investisseurs métropolitains se
concentrant sur des projets d’investissements moins lointains.
Pour surmonter ces difficultés, la collectivité de la Polynésie française s’est dotée d’un
dispositif complémentaire, juxtaposé au dispositif national de soutien à l’investissement, utilisant la
marge d’initiative que lui confère son régime d’autonomie fiscale.
Cette création a aussi été justifiée par ses promoteurs par son inscription opportune dans le
contexte volontariste de la période qui a suivi la fermeture du Centre d’Expérimentation du
Pacifique (CEP). Pour s’affranchir du modèle de développement antérieur, qui reposait trop
exclusivement sur les transferts publics
48
, la collectivité de la Polynésie française et l’Etat, dans le
cadre d’un Pacte de progrès économique, social et culturel signé le 27 janvier 1993 et d’une loi
d’orientation sur le développement de la Polynésie française adoptée le 5 février 1994, ont décidé
d’encourager le développement des ressources propres
49
de la Polynésie française. Dans ce nouveau
cadre, le levier fiscal est apparu particulièrement adapté pour mobiliser l’épargne locale privée,
jusqu’alors récalcitrante pour financer des investissements productifs en Polynésie française.
Le premier objectif fixé au levier fiscal était de soutenir prioritairement « la construction
immobilière à vocation touristique ».
Le mécanisme fiscal, dans ses principes, est resté inchangé depuis l’origine. Le projet
défiscalisé ouvre droit à un crédit d’impôt aux personnes morales soumises à l’impôt sur les
sociétés (IS) et aux personnes physiques soumises à l’impôt sur les transactions (IT), dès lors
qu’elles financent le projet sous la forme de prises de parts sociales ou d’actions de la société qui
investit, d’apports de terrain ou de prêts en compte courant d’associés non rémunérés.
Un premier régime spécifique de défiscalisation dit « dispositif FLOSSE » a été créé par une
délibération n°95-55 AT du 24 mars 1995, votée par l’Assemblée de la Polynésie française. En
cohérence avec le projet de développement qu’elle venait d’adopter, la collectivité de la Polynésie
française a décidé d’orienter le dispositif incitatif en priorité vers la
« construction immobilière, à
vocation touristique ».
Plusieurs modifications significatives ont par la suite été apportées au dispositif initial, en
2004 puis en 2009, sans que ces ajustements en modifient le principe.
A titre d’exemple, un projet d’hôtel agréé en 2008 de 10 milliards de F CFP donnait lieu à
une dépense fiscale de 6 milliards (crédit d’impôts) dont la répartition était la suivante : 4 milliards
restaient au projet et 2 milliards constituaient la rémunération de l’investisseur fiscal qui, le cas
échéant, rétribuait le cabinet de défiscalisation chargé de monter le dossier (environ 0,5 milliard).
48
Les crédits de la Défense nationale (CEA-CEP).
49
Tourisme, pêche hauturière, perliculture.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 49 sur 84
En termes de développement économique et social, le bilan de la défiscalisation locale après
quinze ans de mise en oeuvre n’est pas totalement convaincant. Si les réalisations n’ont pas manqué,
en particulier dans la construction hôtelière, les effets du dispositif sur le développement
économique et social restent incertains. Le levier fiscal a conduit à des surinvestissements notoires
dans les secteurs sur lesquels était censé s’appuyer le développement économique de la Polynésie
française : l’hôtellerie, le transport aérien et la pêche hauturière. A l’inverse, la réalisation
d’équipements structurants grâce à la défiscalisation locale est restée rare.
Plusieurs déficiences méthodologiques ont été directement à l’origine de ces résultats
mitigés. En particulier, le contrôle des projets, l’évaluation des réalisations, l’expertise du coût des
projets, n’ont pas été à la hauteur des enjeux, qu’ils aient été financiers ou économiques. Au
surplus, le paramétrage des incitations fiscales a été mal ajusté, entraînant une dépense fiscale de
108 milliards de F CFP depuis 1995 qui s’est avérée insoutenable dans la durée pour les ressources
de la Polynésie française.
La défiscalisation locale se révèle coûteuse pour le budget de la collectivité d’outre-mer sans
que ses retombées économiques et sociales aient profité durablement au développement du
territoire. Le dispositif mérite a minima d’être recadré tant en termes d’objectifs que de moyens
alloués, et sans que soit a priori exclu un abandon pur et simple de cette dépense fiscale au profit du
subventionnement direct, s’il s’avérait plus efficace.
3.1 - Les dispositifs de défiscalisation se sont révélés coûteux pour la
collectivité et très avantageux pour certains contribuables et investisseurs
En quinze ans, la collectivité de la Polynésie française, au travers les dispositifs de
défiscalisation dont elle s’est dotée, a abandonné 108 milliards de F CFP de recettes fiscales soit
environ 7,2 milliards par an, de 1996 à 2010.
Cette politique de défiscalisation locale a conduit la collectivité à se priver chaque année
d’environ un tiers du produit de l’impôt sur les transactions et de l’impôt sur les sociétés.
Le paramétrage du dispositif s’est révélé très avantageux pour certains contribuables et
investisseurs en leur offrant de bonnes opportunités d’optimisation fiscale sans exiger de fortes
contreparties en retour.
3.1.1 - Une dépense fiscale très lourde
Par définition, une dépense fiscale, quel que soit son motif, ne peut pas faire l’objet d’une
limitation a priori du montant des crédits d’impôts annuellement allouables. Le raisonnement par
enveloppe fermée est proscrit en matière fiscale pour placer tout bénéficiaire potentiel dans une
situation de stricte égalité devant l’impôt.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 50 sur 84
Cette
contrainte
rendait
donc
l’introduction
de
dispositifs
défiscalisants
délicate
particulièrement pour une collectivité dotée de l’autonomie fiscale qui ne bénéficiait pas de recettes
directes très abondantes
50
et qui, sur le plan technique, ne disposait pas d’une véritable imposition
sur le revenu
51
sur laquelle les crédits d’impôt de la défiscalisation auraient été susceptibles de
s’imputer.
En 1996, la dépense fiscale a représenté d’emblée un effort budgétaire de 2,3 milliards de
F CFP, puis s’est stabilisée autour de 5,3 milliards de F CFP en moyenne jusqu’en 2000
(cf. annexe 7).
Elle a franchi un nouveau palier entre 2001 et 2005, période durant laquelle elle a
globalement plus que doublé par rapport au niveau atteint en 2000 : 9,4 milliards en 2001,
12,2 milliards en 2002, 13,4 milliards en 2003, 8,8 milliards en 2004 et 9,7 milliards de F CFP en
2005.
De 2006 à 2008, la dépense s’est légèrement repliée en se maintenant cependant en
moyenne à plus de 7 milliards de F CFP. Ce n’est qu’en 2009, puis encore plus nettement en 2010
que, contrainte par des difficultés budgétaires, la dépense fiscale a diminué d’environ 2,5 milliards
d’une année sur l’autre, s’établissant d’abord à 4,6 milliards de F CFP en 2009 puis, à 4,3 milliards
en 2010.
L’abandon de recettes fiscales auquel a donné lieu la défiscalisation locale a représenté un
effort substantiel pour les finances polynésiennes. Rapportée aux impôts sur le bénéfice des sociétés
et sur les transactions qu’elle affectait, la dépense fiscale, à la fin des années quatre-vingt dix,
correspondait à environ 30% des produits bruts. En 2002 et 2003, lorsque la mesure a connu son
apogée, elle a représenté la moitié du produit brut fiscal. A partir de 2004, la perte volontaire de
recettes fiscales s’est progressivement réduite. Elle représentait encore 40 % des produits bruts en
2004 et 2005, avant de se stabiliser entre 2006 et 2009 à environ 30 % des produits bruts. En 2010,
alors qu’elle était en net repli, elle correspondait encore à un abandon de 24% des recettes fiscales.
Cet effort budgétaire direct a été en outre augmenté par des dispositions fiscales spéciales
qui, pour remédier aux difficultés d’exploitation des projets défiscalisés, ont mis en place des aides
fiscales et admis des dégrèvements d’impôt.
La forme la plus aboutie de cette intervention complémentaire a été le dispositif d’aide
fiscale à l’exploitation (AFE), instauré en 2004, lorsque les premières défaillances des entreprises
hôtelières qui avaient bénéficié de crédits d’impôts, ont commencé à se manifester.
Cette mesure a été adoptée par délibération n°2004-33 du 12 avril 2004. Elle était instituée
afin d’aider
« toutes entreprises réalisant en Polynésie française, pour les besoins de leur activité,
un investissement productif dans un secteur éligible au dispositif de défiscalisation
locale ».
50
Les recettes fiscales représentaient moins de 25% des produits de fonctionnement en moyenne
sur la période 1996-2010 pour la
Polynésie française.
51
Les revenus subissent à la place un prélèvement au profit du système de protection sociale, affecté au financement du régime de
solidarité (Contribution sociale territoriale).
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Entre 2004 et 2009, année de l’abrogation de cette disposition, a donc été couplée, de
manière quasi systématique, au dispositif de défiscalisation locale une aide complémentaire servie
sous forme d’exonérations fiscales d’un montant qui pouvait atteindre par projet 30 % de
l’investissement hors taxes. En outre, ce dispositif prévoyait une aide financière aux projets agréés à
l’AFE d’un montant maximum de 450 MF CFP, pour le financement, durant une période limitée à
7 ans, de dépenses immobilières, de dépenses d’infrastructure, d’honoraires d’architecte ou de
maîtrise d’oeuvre, de dépenses de formation, de dépenses de location d’aéronefs ou de navires.
L’aide complémentaire au dispositif de défiscalisation locale était accordée de manière
discrétionnaire par le président de la Polynésie française
52
. L’accès à cette aide complémentaire
était très large. Tous les secteurs éligibles au moment de la création de l’aide y ouvraient droit. Elle
était non seulement ouverte aux sociétés
53
qui réalisaient l’investissement productif, mais aussi à
celles qui simplement participaient au projet. Etaient ainsi concernés tous les investisseurs dans les
secteurs de l’élevage, l’agriculture, l’industrie agroalimentaire, les énergies renouvelables, les
transports, la production, la pêche industrielle, les activités portuaires et aéroportuaires,
l’environnement, la construction d’hôtel, de golf, la pisciculture et l’aquaculture.
Cette aide fiscale à l’exploitation a représenté, d’après la direction des contributions
publiques de la Polynésie française, une dépense fiscale supplémentaire estimée à 9 milliards de
F CFP
54
. Cette dépense serait à ajouter au coût estimé de la dépense fiscale résultant directement de
la défiscalisation locale pour chiffrer le coût global du dispositif. Ainsi chiffré, le coût véritable de
la défiscalisation locale depuis sa création serait de 117 milliards de F CFP, soit près du produit de
5 années de fiscalité directe.
3.1.2 - Les incitations fiscales ont été très avantageuses pour certains contribuables
et investisseurs
La défiscalisation locale est un moyen d’intervention publique qui repose sur une incitation
fiscale pour aider les investissements productifs outre-mer. La collectivité publique qui accorde des
crédits d’impôt doit veiller à ce que les avantages fiscaux ne soient pas disproportionnés par rapport
à l’objectif poursuivi. Les dispositions techniques doivent viser à maintenir un équilibre raisonnable
entre l’intérêt général et les intérêts respectifs de l’entrepreneur et de l’investisseur fiscal.
Le dispositif polynésien, par les paramètres qui ont été retenus dès l’origine, a été trop
orienté vers la satisfaction de l’intérêt de l’entrepreneur et surtout de l’investisseur fiscal, l’intérêt
général n’étant que secondairement pris en compte.
3.1.2.1. - Le paramétrage du dispositif a avantagé l’investisseur sans imposer des
contreparties à la hauteur de l’effort fiscal consenti
L’investisseur, en particulier, l’investisseur fiscal, qui n’intervient que pour des actions de
portages financiers, ont bénéficié d’avantages substantiels, sans être soumis en contrepartie aux
contrôles et aux obligations qui auraient été nécessaires pour préserver les intérêts publics.
52
Après avis consultatif de la commission des agréments présidée par le vice-président de la Polynésie française.
53
Y compris aux SEM et aux EPIC.
54
En 2005, 7,5 milliards de F CFP ont été agréés cette seule année (transport aérien).
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3.1.2.1.1. - Les taux de crédits d’impôt
La fixation de taux de crédits d’impôt à un niveau élevé a considérablement avantagé les
investisseurs sans leurs imposer des obligations.
La raison avancée par les autorités polynésiennes pour justifier ces taux élevés est qu’il
s’agissait d’investissements dans des secteurs prioritaires pour lesquels les apporteurs de capitaux
restaient réticents. Il importait avant tout de doter rapidement la Polynésie française d’un parc
hôtelier de luxe en lien avec la stratégie de niche choisie comme vecteur de son développement
économique. En termes quantitatifs, il s’agissait d’atteindre 350 000 touristes en 2005 et de
construire en dix ans les réceptifs en rapport.
Le dispositif fiscal reposait sur l’idée que plus le taux de crédit d’impôt était élevé, plus
forte était l’incitation fiscale, et, plus important serait le nombre des investissements. Par ailleurs, la
fixation de seuils d’éligibilité élevés, notamment pour la construction hôtelière, a conduit à
privilégier le financement de grands projets
55
.
Le maintien d’un taux de crédit d’impôt très élevé pour le secteur de l’hôtellerie et du
tourisme de 1995 à 2009 a effectivement permis de développer de nombreux hôtels internationaux
grâce à la baisse considérable de leur coût d’acquisition. Ce secteur, à lui seul, a donné lieu à
environ 70 milliards de F CFP de crédits d’impôt sur les 108 milliards de F CFP octroyés depuis
1995.
L’abaissement du coût d’acquisition a été d’autant plus fort qu’au taux élevé de crédit
d’impôt de 60%
56
de la défiscalisation locale s’est ajouté le taux de crédit d’impôt de 50 % de la
défiscalisation nationale. Ces mesures ont eu pour effet, dans le cas d’une double défiscalisation
57
,
de permettre au promoteur d’un projet hôtelier de recevoir une aide de 70 % du coût de son
investissement.
Le lancement de projets hôteliers est ainsi devenu possible avec un apport en fonds propres
ou en emprunts de l’investisseur réduit à 30 % du coût de l’investissement. Dans ces conditions, les
considérations habituelles d’un entrepreneur soucieux de la viabilité future de son investissement
couraient le risque évident d’être reléguées au second plan, notamment si aucune forte
conditionnalité n’était mise à l’octroi de ces avantages.
En 2004, le service du plan et de la prévision économique (SPPE) de l’administration
polynésienne avait conclu pour la construction hôtelière que ces taux étaient trop avantageux pour
les investisseurs locaux, et qu’ils perturbaient le calcul économique de l’entrepreneur. En 2006, le
rapport précédent de la Chambre territoriale des comptes consacré aux finances de la Polynésie
française avait mis en exergue le niveau élevé des taux de crédits d’impôts dans le secteur hôtelier,
alors que commençaient à se manifester les signes avant-coureurs d’une désaffection de la
destination et d’une chute de la fréquentation hôtelière.
De ce fait, la collectivité de la Polynésie française disposait d’un levier d’action important
pour diminuer le coût budgétaire de la défiscalisation par l’abaissement du taux de crédit d’impôt
dans le secteur hôtelier où se concentraient près des trois quarts de la dépense fiscale. Les taux de
crédits d’impôt dans la construction hôtelière ne seront abaissés qu’en 2009, laissant perdurer
durant trois ans une situation où, manifestement, l’avantage fiscal était globalement mal ajusté.
55
Le seuil d’éligibilité a été initialement fixé à 200 MF CFP hors foncier, puis entre 2004 et 2009 à un milliard de F CFP, avant
d’être ramené à 500 MF CFP sur l’île de Tahiti et 250 MF CFP hors Tahiti.
56
A l’origine, ce taux était de 50% avec une possibilité d’extension à 60 %, valable jusqu’au 31 décembre 1996. Elle a été
reconduite, année après année, jusqu’en 2002, puis pérennisée.
57
Expression signifiant que le cumul des deux dispositifs est possible.
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 53 sur 84
3.1.2.1.2. – L’utilisation des crédits d’impôt
En Polynésie française, les crédits d’impôt ont été accordés avant que la réalisation complète
des projets ait été constatée. Les crédits d’impôt ne sont pas, comme dans le dispositif national de
défiscalisation, accordés en fin de programme, à l’achèvement des travaux. Ils sont utilisables avant
la réalisation complète des projets.
Jusqu’en 2004, les dispositions de la délibération n° 95-55 AT n’exigeaient qu’un minimum
de pièces pour bénéficier de crédits d’impôt. Il suffisait de produire d’un récépissé de dépôt de la
demande et une estimation du coût du projet sur papier libre pour que, sur décision du président,
formalisée par un arrêté, l’ouverture des droits à réduction fiscale soit réalisée. Le fait générateur de
l’ouverture des crédits d’impôt a été, dans ce dispositif, l’arrêté du président, contrairement à ce qui
se pratique dans le dispositif national qui n’ouvre le droit aux crédits d’impôt qu’à l’achèvement du
projet.
Il n’est, dès lors, pas étonnant que les situations les plus surprenantes aient pu être
rencontrées en Polynésie française. Ainsi, parfois, des opérations ont reçu des crédits d’impôt alors
que le chantier avait débuté depuis plusieurs années. D’autres ont bénéficié de crédits d’impôt alors
que le chantier n’était qu’au stade initial. En dépit des améliorations apportées de manière
significative par la loi du pays du 1
er
avril 2009, des situations semblables perdurent par le jeu des
dérogations
58
accordées initialement par le président, et depuis 2009 par le conseil des ministres.
Ces dérogations consistent à repousser la date de fin de chantier
59
figurant sur l’arrêté d’agrément,
ce qui permet de bénéficier d’un agrément aux conditions qui étaient en vigueur à la date de l’arrêté.
A titre illustratif, un projet de construction d’un hôtel de luxe dans l’archipel des Îles-du-
Vent a obtenu le bénéfice de la défiscalisation locale pour une base éligible de 9 milliards de F CFP
ouvrant droit à 5,4 milliards de F CFP de crédits d’impôt en 2004. La date du dépôt de la demande
remonte à décembre 2002. Le permis de construire a été obtenu le 22 février 2005.
Ce programme a bénéficié de trois prorogations
60
du délai de présentation du certificat de
conformité, amenant le délai de 42 mois à 106 mois
61
, après validation par le conseil des ministres
de l’argumentation de la société qui a fait valoir les contraintes particulières du projet (délais
d’instruction du dossier, utilisation des énergies renouvelables, pression médiatique, manque
d’encadrement sur place, aléas climatiques).
La réglementation locale a permis cependant que soit octroyée la totalité des crédits d’impôt
prévus, soit 5,4 milliards de F CFP. Le chantier a débuté en mai 2009 mais bénéficie du régime
antérieur, à savoir un taux de crédit d’impôt à 60% au lieu des 40% actuels, instaurés en avril 2009,
car la date du dépôt de la demande remonte à décembre 2002, et la société a jusqu’au 31 décembre
2013 pour présenter son certificat de conformité.
58
Les articles 374-1 et 375-1 organisent une prorogation pour cas de force majeure, ou difficulté liées à l’obtention de
la défiscalisation nationale.
59
Au terme de la réglementation, le défiscalisant dispose de 42 mois pour présenter un certificat de conformité.
60
Arrêté n°1484 du 31 octobre 2007 (31 décembre 2011) ; arrêté n°1621 du 23 septembre 2010 (31 décembre 2013).
61
Arrêté n°1484 du 31 octobre 2007 (31décembre 2011) ; arrêté n°1621 du 23 septembre 2010 (31 décembre 2013).
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Séance du 22 décembre 2011 - page 54 sur 84
3.1.2.1.3. – La définition des bases éligibles et des contrôles
La base défiscalisable à partir de laquelle sont déterminés les crédits d’impôt, n’a reçu une
définition précise qu’en 2009, soit quatorze ans après le lancement de la mesure. C’est ainsi qu’il a
fallu attendre 2004 pour que les frais de montage ne soient pas inclus dans la base défiscalisable.
Dans ces conditions, on ne s’étonnera pas que les frais de montage aient eu tendance à être
particulièrement élevés, puisque pour 60 % d’entre eux ils ouvraient droit à des réductions fiscales a
due concurrence.
Ces imprécisions ont permis pour le même projet des modifications très importantes de la base
défiscalisable.
Le projet de construction d’un hôtel de luxe, dans le cadre des dispositions existantes, a ainsi,
pu bénéficier d’un doublement de la base éligible. Celle-ci, lors de l’agrément initial, était de 4,45
milliards de F CFP en 2002. Elle est actuellement de 9 milliards de F CFP depuis 2009. Une
dernière demande (juillet 2009) pour une base éligible à 10,4 milliards de F CFP (prise en compte
des travaux préparatoires au chantier) est actuellement à l’étude.
Les investissements ont été aidés sans qu’aucun référentiel, ni coût plafond, n’ait été au
préalable fixé par la collectivité de la Polynésie française, contrairement aux conditions en vigueur
dans le dispositif national. Ces conditions, qui peuvent être qualifiées d’extrêmement souples, mais
qui ne peuvent être reprochées aux bénéficiaires, ont sans aucun doute contribué à l’absence de
maîtrise de la dépense fiscale entraînée par les projets hôteliers.
C’est en particulier le cas des investissements hôteliers qui n’ont été limités dans leur montant
que très tardivement, et à un niveau élevé
62
. Ces investissements, qui ont représenté l’essentiel des
opérations de défiscalisation, ont ainsi connu depuis quinze ans une forte augmentation du coût de
construction du « bungalow sur l’eau »
63
.
Dans les principaux projets hôteliers défiscalisés, le coût par chambre ou bungalow n’a cessé
de croître, passant de 12 500 000 F CFP en 1998 , pour un hôtel de luxe à BORA BORA, à
41 043 062 F CFP pour un hôtel de la côte OUEST de TAHITI en 2009. Depuis 1995, le coût par
chambre, en moyenne, a plus que triplé.
La légèreté des contrôles a aussi participé au déséquilibre constaté entre les avantages fiscaux,
considérables, et les contreparties, relativement faibles. Les projets qui ont bénéficié des crédits
d’impôt de la défiscalisation locale ont été soumis à peu de contrôle de la part des services de la
collectivité territoriale. Aucune reprise fiscale importante n’a, à ce jour, été menée à son terme.
62
La base éligible a été plafonnée en 2009 à 5 milliards de F CFP sauf dans le secteur touristique (hôtels) où elle a été fixée à
8 milliards de F CFP.
63
Ce phénomène a été accentué depuis 2005 par une réglementation imposant aux nouveaux hôtels de Bora Bora souhaitant se
positionner en cinq étoiles, une surface intérieure minimale par bungalow de 65m².
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Cette situation s’explique largement par le fait que lorsque la défiscalisation locale a été
décidée en 1995, et jusqu’à présent, aucun moyen d’administration supplémentaire n’a été consacré
à cette mesure. Il n’y a pas eu une allocation de moyens à la hauteur des enjeux. Le contrôle des
opérations défiscalisées n’a pas fait l’objet d’un traitement spécifique. Il n’a pas été différencié des
vérifications et diligences normales du contrôle fiscal. Le contrôle sur place des opérations
défiscalisées n’a jamais été distingué des procédures du contrôle fiscal. Aucun moyen spécifique. Il
n’a été dédié au contrôle sur place des réalisations.
En n’allouant pas au contrôle des opérations défiscalisées des moyens suffisants, le risque a
été pris que certaines de ces opérations recèlent des irrégularités qui auraient autorisé des reprises
fiscales et des poursuites, et ce, d’autant plus que le contrôle fiscal en Polynésie française était
connu pour être notoirement insuffisant : la fréquence d’occurrence d’un contrôle sur place a été
estimée
64
dix fois moins élevé qu’en métropole.
Ainsi, pour contrôler les montages complexes auxquels nécessairement les dispositions
particulières de la défiscalisation conduisaient, les moyens du contrôle fiscal n’ont pas été
renforcés. De même, lorsqu’en 2004 des procédures d’agrément plus élaborées se sont mises en
place, le secrétariat de la commission a été assuré, à moyens constants
65
par le service des
contributions.
De plus, l’efficacité de ces contrôles a été altérée par les moyens juridiques très limités dont
disposent les agents des impôts. Il n’y a toujours pas de texte spécifique habilitant ces agents à
effectuer des contrôles sur place, en dehors des procédures du contrôle fiscal externe (CFE). Jusqu’à
la loi du pays du 1
er
avril 2009, le droit de communication ne leur était pas ouvert.
3.1.2.1.4. - Les conditions offertes aux investisseurs fiscaux
Les conditions offertes aux apporteurs de capitaux, les investisseurs fiscaux, ont été
particulièrement avantageuses. En effet, les conditions d’apport en compte courant d’associés
(CCA) non rémunérés n’ont été assorties d’aucune contrainte forte.
Dans le cadre du dispositif de défiscalisation locale, les investisseurs, contribuables
domiciliés fiscalement en Polynésie française, ont la possibilité de concrétiser leur investissement
par un apport en compte courant d’associé
66
. Ces investisseurs, le plus souvent, effectuent une
opération de portage, qui limite leur intervention au financement de la construction ou de
l’acquisition du bien d’exploitation, sans être impliqués dans la couverture des risques
d’exploitation du projet défiscalisé. L’apport en CCA, lorsqu’il est repris par l’investisseur fiscal,
est généralement remplacé par un emprunt bancaire classique contracté par le porteur du projet.
64
Par les services fiscaux polynésiens (Rapport de la mission d’assistance septembre 2010).
65
Les agents du contrôle fiscal.
66
Il n’existe pas de définition légale des comptes courants d’associés. Seule une réponse ministérielle en précise le sens :
«L’apport
en compte courant d’associé consiste pour l’associé à consentir des avances ou des prêts en versant directement des fonds ou en
laissant à sa disposition des sommes qu’il renonce provisoirement à percevoir».
Ce compte courant d’associé doit s’analyser comme
un prêt.
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Le code des impôts polynésien considère le CCA comme un financement éligible au
dispositif de défiscalisation, contrairement aux possibilités offertes dans le cadre national. : «
Sont
considérés comme financements au sens de l’article 378-1 les souscriptions de parts en numéraire
ou apports de terrain, effectués lors de la constitution ou d’une augmentation de capital, ainsi que
les apports en compte courant non rémunérés dans ladite société. Dans ce dernier cas, la société
est tenue de produire chaque année un extrait du Grand Livre relatifs à ces comptes courants,
annexé à sa déclaration de résultats.
Le financement étant réputé effectué à la date du versement
effectif des fonds
».
Mais, le CCA a été assorti d’obligations de durée qui ont permis des allers et retours très
rentables pour les activités de portage. L’article LP 916-21 qui organise la durée de détention des
financements éligibles, dans sa première version de 1995, fixait avec un minimum de contraintes, la
dernière limite pour apporter les capitaux ouvrant droit à l’aide fiscale à un mois avant la date
d’achèvement du programme d’investissement
67
. Depuis les modifications intervenues en 2004, les
fonds devaient être bloqués 18 mois. Depuis la loi du pays du 1
er
avril 2009, la durée a été
raccourcie : le financement doit être apporté au plus tard douze mois avant la date d’achèvement du
programme si celui-ci est égal à la quote-part de la base éligible.
Avant ces modifications, c’est-à-dire durant les dix premières années du dispositif, il a été
possible d’apporter des financements pour des durées relativement courtes et bénéficier de plein
droit des avantages fiscaux.
Par exemple, pour un projet immobilier sis à TAHITI, les sociétés d’un grand groupe
polynésien ont apporté leurs financements le 24 octobre 2005, quelques jours avant le certificat de
conformité obtenu le 28 octobre 2005 ; cette opération a permis aux sociétés de bénéficier de
116 millions de F CFP de crédits d’impôt. Dans un autre projet, le même groupe a apporté 400 MF
CFP à l’opérateur, le 10 mai 2004, le certificat de conformité ayant été délivré le 29 décembre
2004 : cette opération a rapporté à l’investisseur fiscal 240 MF CFP de crédits d’impôt. Dans un
autre cas, une banque locale a apporté 150 MF CFP à un projet hôtelier des Îles Sous-le-Vent le 25
juin 2002, le certificat de conformité ayant été délivré le 28 juin 2002.
La rentabilité intrinsèque de ces opérations rémunérées par des crédits d’impôt est, par
construction, particulièrement élevée. Elles ont, en quelque sorte, permis de rémunérer un prêt
d’argent à court terme par des crédits d’impôt.
Depuis l’origine, pour les plus gros investisseurs, ces opérations ont ainsi permis d’annuler
25,5 milliards d’impôt pour 46 milliards de F CFP de financements apportés par les banques
locales, 7 milliards d’impôts pour 15 milliards de F CFP d’apport pour les distributeurs d’énergie
(pétrole et électricité) et pour le secteur des télécommunications. Des crédits d’impôt de
4,6 milliards de F CFP ont été accordés au secteur de la grande distribution pour 8 milliards de
participation. Le secteur de l’automobile a bénéficié de 3,6 milliards de F CFP de crédits d’impôts
pour des participations qui se sont élevées à 6,8 milliards de F CFP. Ensemble, ces investisseurs ont
reçu plus de la moitié des crédits d’impôt accordés depuis 1996.
67
Par une attestation d’achèvement établie par l’investisseur dans les trois mois du délai imparti pour réaliser le programme.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 57 sur 84
rédits
d’impôt.
fortement crû et représenté depuis 1996, un coût estimé à
environ 7 % des recettes budgétaires.
pte ces aspects, notamment dans le secteur phare de la construction
hôtelière.
besoins à satisfaire, n’a jamais
été à la hauteur de la bonification pour la construction hôtelière.
cial (location-vente). Les parkings ont bénéficié
d’un taux à 40 % en aérien, 60 % en souterrain.
e française accuse
toujours un retard considérable, notamment en
matière de logement social.
3.1.2.2. - Les secteurs bénéficiaires des aides fiscales les plus importantes
Il est intéressant de noter que si les banques sont les premières bénéficiaires des crédits
d’impôt, elles ne possèdent en direct aucun hôtel. Dans le cas des banques, dont le métier est
précisément de financer l’économie, cette économie d’impôt a confiné à l’effet d’aubaine.
En définitive, la défiscalisation locale a profité à tous les intervenants : les investisseurs
exploitants, les investisseurs fiscaux et les cabinets de défiscalisation
68
. Le gain fiscal élevé a
profité non seulement aux investisseurs mais également aux cabinets spécialisés en défiscalisation
(experts-comptables, notaires, établissements spécialisés), dont les frais bénéficiaient, jusqu’en
2004, d’une réduction fiscale implicite en étant incorporables dans l’assiette éligible aux c
Tous les acteurs économiques avaient intérêt à une inflation des projets afin de récupérer
soit, des crédits d’impôts, soit des rémunérations, les plus importantes possibles. Il n’est donc pas
étonnant que
la dépense fiscale ait
En face de ces demandes, la collectivité de la Polynésie française n’est pas parvenue à
concilier au mieux les intérêts, différents, des investisseurs exploitants et des investisseurs fiscaux.
Les premiers comme les seconds sont sensibles au niveau du taux de crédit d’impôt. Mais les
investisseurs fiscaux privilégient la garantie de récupérer leurs fonds en fin d’opération, après
déduction de la quote-part rétrocédée. La conciliation a été obtenue par un maintien à un niveau très
élevé du taux de crédit d’impôt jusqu’en 2009, permettant à chaque partie de sauvegarder au mieux
ses intérêts. Mais, en qualité de puissance publique, la collectivité de la Polynésie française devait
avant tout veiller aux intérêts économiques du projet, à sa viabilité et à son apport réel au
développement de la Polynésie française. Les nombreux échecs économiques du système
défiscalisant local démontreraient plutôt que la collectivité de la Polynésie française n’a pas
suffisamment pris en com
A contrario, dans un autre secteur, alors que les besoins en logements et sociaux étaient très
élevés, la fixation des taux de crédit d’impôt a été moins favorable à l’investisseur. La bonification
pour le logement social, qui aurait dû être maximale au regard des
Depuis 1995, le secteur immobilier a bénéficié d’un taux de 30 % en résidentiel, 45 % en
logement intermédiaire, 55 % pour le logement so
A ce jour, la Polynési
Le dispositif fiscal a privilégié, depuis l’origine, le développement du tourisme de luxe et
accessoirement, la construction résidentielle. Les aides fiscales ont surtout bénéficié au secteur de la
construction d’hôtels de luxe et de logements intermédiaires. Elles ont aussi créé des effets
68
Qui se rémunèrent d’un pourcentage négocié sur le crédit d’impôt obtenu.
En Polynésie française, la majorité des montages en
défiscalisation locale sont toutefois effectués directement par les directions financières et juridiques des investisseurs fiscaux ou du
groupe qui réalise le projet.
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d’aubaine dans les secteurs comme la grande distribution ou la restauration rapide, pour lesquels il
est difficile de déceler les objectifs d’intérêt général que poursuivait la collectivité.
fiscale. La défiscalisation locale a ainsi surtout bénéficié
au secteur de la construction hôtelière et plus précisément à l’hôtellerie de luxe, plutôt qu’aux
activité
en lien avec le tourisme (navires de croisière ou golf). Seules, deux
sociétés n’appartenaient pas au secteur touristique, mais à celui de la construction immobilière
(logem
s les plus importants ont atteint plus de
64 milliards de F CFP. Depuis 1996, une société a ainsi reçu plus de 14 milliards de F CFP de
crédits
vation hôtelière, la construction de logements
n’a pas rencontré un aussi grand succès. Les deux principales sociétés immobilières ont cependant
reçu un soutien significatif de 1,2 milliard de F CFP.
’aubaine. Parmi celles-ci
figurent l’existence d’autres aides publiques bénéficiant au commerce (aides à l’export,
infrastr
ial n’étaient pas exclus. Puis, la loi
du pays n° 2005-01 du 7 février 2005 a confirmé cette orientation en substituant à la précédente une
nouvelle dénomination : «
Autres constructions immobilières ».
3.1.2.2.1. - La construction hôtelière de luxe et de logements intermédiaires
Depuis 1995, le soutien fiscal accordé aux investissements dans le secteur touristique a
abouti à une forte concentration de l’aide
s touristiques dans leur ensemble.
Le secteur de la construction hôtelière de luxe a concentré environ 70 % des crédits d’impôt.
Entre 1996 et 2010, sur les 20 projets les plus aidés, 18 étaient liés à la construction
hôtelière ou aux activités
ent intermédiaire).
En cumul, les aides accordées aux 20 projet
d’impôts.
Par rapport au secteur de la construction-réno
3.1.2.2.2. - Des effets d’aubaine pour la grande distribution et la restauration
D’autres secteurs bénéficiaires de la défiscalisation sont plus inattendus. En général, dans les
dispositifs de défiscalisation, le commerce et la grande distribution sont exclus des secteurs
éligibles. C’est ainsi que le commerce n’est pas éligible à la défiscalisation métropolitaine. Cette
exclusion répond à plusieurs considérations afin d’éviter tout effet d
uctures etc.) et le niveau relativement bas des seuils de rentabilité.
La Polynésie française a fait un choix différent, prenant le risque évident d’offrir aux
investisseurs de certains secteurs de substantiels effets d’aubaine puisque le taux de crédit d’impôt
dont ils bénéficient atteint 30 %. Cette ouverture s’est opérée graduellement. D’abord, une première
délibération du 1
er
février 2004 a élargi l’éligibilité à la défiscalisation locale à la « construction
d’immeubles à usage mixte
69
», dont les locaux à usage commerc
69
Ces constructions sont définies comme ayant vocation à comprendre 20 % de logements dans le coût du projet.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 59 sur 84
L’agrément du secteur commercial a été sollicité pour la construction à FAA’A d’un centre
commercial par deux sociétés
70
, en dépit des réserves exprimées par le service des contributions en
2008 (lettre du 18 juin 2008). Un arrêté du 25 septembre 2008
71
a accordé une aide fiscale de 475
millions de F CFP a un projet d’hypermarché dont la réalisation doit être achevée avant le 25
septembre 2013, pour un coût de 1,6 milliard de F CFP. Un projet connexe de 9 milliards de F CFP
pour le centre commercial (galerie marchande et parkings) est en cours d’examen.
Cette éligibilité au secteur du commerce a conduit la collectivité de la Polynésie française à
aider aussi fiscalement l’implantation de restaurants de restauration rapide. En 2008
72
, un crédit
d’impôt de 107 millions de F CFP a été accordé à un premier projet. En 2010, un autre projet a été
déposé. Il est, à ce jour, en instance de décision pour un montant de crédits d’impôt de 167 millions
de F CFP.
3.2. - Les retombées économiques et sociales de la défiscalisation s’avèrent
limitées
L’objectif général du développement économique par le tourisme grâce à la défiscalisation,
qui n’a jamais cessé d’être affirmé par les autorités polynésiennes, ne saurait suffire à conférer une
efficacité opérationnelle à ce dispositif.
En réalité, la politique de défiscalisation est restée peu définie dans ses objectifs et, en outre,
n’a jamais été officiellement évaluée, même si plusieurs indicateurs invitent à douter de son
efficacité et, en tout état de cause, de son efficience.
3.2.1 – L’absence de véritable évaluation
Quinze ans après le lancement de la mesure, aucune évaluation en termes d’emploi ou de
valeur ajoutée n’a été réalisée pour le compte de la Polynésie française. Par exemple, s’agissant des
investissements dans le secteur immobilier résidentiel, les liens, supposés ou réels, entre la
défiscalisation locale et la hausse rapide des prix immobiliers n’ont jamais été expertisés.
Lorsqu’est abordée la question des retombées économiques et sociales de la défiscalisation,
qui pourtant sont les véritables justifications des efforts fiscaux consentis par la collectivité, il est
très vite avancé par les autorités locales qu’il est hasardeux de conclure sur l’efficacité ou
l’inefficacité de cette mesure fiscale car le dispositif n’a jamais été officiellement évalué.
Cet argument, qui prend appui sur l’une des failles du système pour justifier son maintien,
repose sur un paradoxe qui ne saurait cependant interdire d’établir le bilan de la défiscalisation
locale, quinze ans après son lancement.
70
Sociétés qui appartiennent à un groupe qui possède déjà des centres commerciaux dans l’agglomération de Papeete.
71
Modifié par l’arrêté du 15 juillet 2010.
72
Arrêté d’agrément du 11 août 2008.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 60 sur 84
Le fait qu’aucun cadrage macroéconomique n’ait accompagné la mise en oeuvre de la
mesure fiscale ne saurait dispenser par avance d’un bilan de l’impact réel de dispositif sur le
développement économique et social, qui justifie in fine une dépense fiscale aussi forte. Ce bilan
permettrait de savoir si l’aide fiscale massive apportée à la construction hôtelière et au tourisme de
croisière, et plus secondairement à la construction résidentielle, a eu les retombées escomptées en
termes de développement économique et social.
Des études économiques menées par des universitaires grâce aux financements de l’agence
française pour le développement (AFD)
73
, ont fortement mis en doute en 2008 l’efficacité
économique de la défiscalisation locale dans le domaine hôtelier. L’étude démontrait que l’aide
fiscale agissait avec efficacité sur l’offre, mais n’avait qu’un effet insignifiant sur la demande : «
La
demande hôtelière ne varie quasiment pas à une variation du prix (élasticité-prix de la demande
74
très faible) ».
La raison tenait aux caractéristiques de l’offre hôtelière de luxe qui a été développée en
Polynésie française : la diminution du coût d’une nuitée (prix) à laquelle concourt l’aide fiscale ne
peut avoir qu’une efficacité limitée en raison de la faible sensibilité de la demande aux prix. L’étude
concluait que
« la défiscalisation locale ne paraît pas pouvoir être considérée comme un instrument
efficace de développement du secteur hôtelier
»
.
Poursuivant ces analyses, les services de la
Polynésie française
75
ont lancé une autre étude économique avec le concours d’un cabinet
spécialisé. Cette étude visait cette fois à déterminer le montant de la valeur ajoutée induite par les
projets défiscalisés. D’après les calculs effectués, l’investissement pour la collectivité n’est pas
rentable : «
Le coût pour la collectivité est de 5 milliards de F CFP par an
76
. Selon toute
vraisemblance, la valeur ajoutée induite (directement ou indirectement) par la défiscalisation serait
inférieure à ce montant. La perte oscillerait entre 1 et 3 milliards de F CFP par an
».
Si ce constat mérite d’être encore affiné
77
, il est toutefois peu contestable au regard des
résultats de l’économie polynésienne que le levier fiscal n’a pas eu l’impact économique et social
positif qui était attendu. La réponse requiert néanmoins plus de nuances car elle varie en réalité
selon l’horizon choisi. A court terme, la défiscalisation locale a, mécaniquement, agi avec efficacité
sur l’offre, mais, à moyen-long terme, ses effets se sont révélés très limités, en raison de leur
manque d’effectivité sur la demande.
3.2.2 - Une mobilisation de l’épargne privée et du secteur de la construction
immobilière dont les effets ont été limités dans le temps
Si, incontestablement l’épargne locale, dans le cadre des dispositifs défiscalisants, s’est
investie dans l’économie du pays, et plus précisément dans l’industrie touristique, les retombées
économiques et sociales ont surtout eu un effet quantitatif de court terme en favorisant la
construction immobilière, en particulier hôtelière.
73
Comment évaluer les effets de la défiscalisation (Gaëlle Ferrant, Valérie Reboud, Christian Montet, Davis
Andiamboavonzy) Décembre 2008.
74
Variation de la demande en fonction d’une baisse du prix.
75
Service du plan et de la prévision économique, avec le concours scientifique du cabinet DME.
76
La mission d’assistance BOLLIET a retenu 7 à 8 milliards par an.
77
L’AFD procède actuellement à une modélisation de l’économie polynésienne qui permettra d’affiner les constats.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 61 sur 84
3.2.2.1- La mobilisation des capitaux privés
Comparée aux investissements classiques de la collectivité d’outre-mer, la défiscalisation a
l’avantage de mobiliser des capitaux privés pour le développement de secteurs prioritaires.
Par ce levier fiscal, les capitaux investis viennent s’ajouter à ceux qui peuvent être consacrés
par la collectivité au soutien direct de l’économie. La capacité de financement des entreprises et des
établissements bancaires est ainsi sollicitée. Les emplois locaux de la capacité de financement de
l’économie sont stimulés pour éviter le placement à l’extérieur.
La mobilisation des capitaux privés a été réussie en Polynésie française puisque depuis 1996, ce
sont, d’après les statistiques fiscales, environ 215 milliards de F CFP d’épargne qui ont été investis
dans l’économie polynésienne, principalement sous forme d’investissement hôtelier et immobilier.
3.2.2.2 - Le soutien du secteur de la construction immobilière
L’effet le moins contestable de la défiscalisation locale a été l’impact positif sur le secteur
de la construction et du logement. Ce secteur a bénéficié de la défiscalisation qui, par ses avantages
spécifiques, a considérablement abaissé le coût de la construction pour les promoteurs.
Ce mécanisme fiscal a ainsi permis la construction d’hôtels, ou la rénovation
d’établissements existants, dans les standards de l’hôtellerie de luxe. Ce choix délibéré de
l’hôtellerie de luxe
78
a été le point d’appui principal de la stratégie de développement de la
Polynésie française.
Grâce à cette impulsion fiscale, le parc hôtelier s’est, transformé. Il était majoritairement
constitué d’établissements de moyenne gamme avant l’adoption de cette mesure. L’offre hôtelière
est devenue en quinze ans presqu’exclusivement constituée d’hôtels de luxe. Cette montée en
gamme ne s’est pas accompagnée d’une extension des capacités d’accueil.
Les données fournies par l’institut de la statistique de la Polynésie française (ISPF) montrent
en effet que, de 1996 à 2010, les capacités hôtelières n’ont pratiquement pas augmenté, passant de
3 044 chambres à 3 355 chambres, après un maximum atteint en 1999 à 3 396 chambres. Le nombre
d’hôtels a eu tendance à légèrement régresser : 53 en 1996, 47 en 2009. L’évolution a surtout été
qualitative puisque la totalité des hôtels sont maintenant classés en catégorie luxe alors que ce
n’était le cas que de la moitié auparavant.
Ces constructions ont contribué à la progression du secteur du BTP depuis 1995. Cette
progression s’est poursuivie jusqu’en 2004. Par la suite, le ralentissement du courant d’affaires, lié
aux premières difficultés de financement de la défiscalisation, s’est immédiatement répercuté sur le
secteur du BTP qui est en crise depuis 2009 avec l’approfondissement des difficultés économiques
et budgétaires.
L’effet d’entraînement de la défiscalisation sur le secteur du BTP a été aussi le fait du
lancement de programmes de construction d’immeubles résidentiels. Cet effet positif n’a cependant
pas été uniforme selon le type de logement réalisé.
78
Ou à haute contribution.
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D’une manière générale, la défiscalisation locale a rencontré un succès lorsque jusqu’en
2005, une demande solvable a répondu à l’offre de logements défiscalisés. D’après les statistiques
fiscales, le rythme de construction a fléchi après 2005. De
648 logements construits grâce à la
défiscalisation locale, le chiffre est tombé à seulement 219 en 2006, puis 77 en 2007, 158 en 2008 et
depuis, plus aucun.
Dans le domaine du logement social où par définition la problématique est différente, les
résultats ont été constamment médiocres.
La mesure en faveur du logement social a d’ailleurs connu une évolution contrastée.
Instaurée en 1995 dans le cadre du premier dispositif défiscalisant, la mesure a été une première fois
supprimée en 2004 au motif qu’il n’y avait pas de projets. Elle a ensuite été rétablie en 2009, mais
avec des taux de crédit d’impôt plus réduits qu’en 1995 : 45 % en zone urbaine et 40 % en zone non
urbaine. La mesure ne semble pas trouver plus de faveur auprès des investisseurs locaux
puisqu’actuellement, il n’y a qu’un projet de 30 logements qui est en cours d’agrément.
3.2.3. – Des valeurs ajoutées et des retombées en matière d’emploi peu significatives
sur le long terme
La principale cible de la défiscalisation locale a été le développement du tourisme de luxe.
Sur ce secteur, ont été concentré près des trois quarts des crédits d’impôt. Dès lors, de sa réussite ou
de son échec dépend en grande partie l’appréciation que l’on peut porter sur l’efficacité économique
et sociale de la défiscalisation locale.
S’il est manifeste que la défiscalisation a permis de doter rapidement la Polynésie française
d’une hôtellerie de luxe, ce succès n’a pas entraîné d’effets positifs durables sur la croissance de la
Polynésie française et sur son développement. L’évolution à la baisse des recettes touristiques
depuis 2000 est, à cet égard, révélatrice. L’accroissement du produit intérieur brut (PIB) qui était
attendu de la défiscalisation locale n’a pas été obtenu. Sous l’effet de la crise, il a même baissé
après une période de quasi stagnation depuis 2000.
Des surcapacités sont apparues dès 2001 par rapport aux possibilités réelles du marché
touristique. Les fortes incitations fiscales ont, malgré les premiers signes d’essoufflement, continué
à drainer les investissements dans ce secteur.
En définitive, cette dépense fiscale a malencontreusement entraîné des surinvestissements
dans le secteur hôtelier alors qu’en termes d’intérêt général, les équipements structurants font
encore défaut à la Polynésie française. En outre, les effets sur l’emploi de la défiscalisation ont été
très contrastés.
3.2.3.1. - Des surinvestissements dans le secteur de la construction hôtelière de luxe
L’effet de la défiscalisation locale sur l’offre a été immédiat. La capacité hôtelière a crû
fortement entre 1996 et 1999 (de 3044 à 3396 chambres). Les quantités offertes sur le marché ont
augmenté et sont montées en gamme. En revanche, la mesure fiscale est restée sans effet sur la
demande. Il en a résulté des surcapacités par rapport au marché solvable.
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La Polynésie française s’est spécialisée dans le tourisme de luxe qui représente désormais
60 % de l’offre hôtelière
Entre 1995 et 2010, le nombre d’hôtels à BORA-BORA a triplé. Ils sont à présent au
nombre de 14. L’hôtellerie de luxe y est surreprésentée après avoir bénéficié de l’aide fiscale. Un
des derniers hôtels construits a donné lieu à un crédit d’impôt de 6,2 milliards de F CFP pour un
coût de 10,4 milliards de F CFP.
Les investissements ont été effectués sans que les possibilités réelles du marché aient été
traduites dans les calculs prévisionnels de rentabilité. Après une période de croissance, au
démarrage de la mesure, le secteur touristique polynésien est en crise depuis 2001, comme le
montre la baisse tendancielle des recettes de ce secteur. Il représente actuellement environ 12 % du
PIB, après avoir culminé à 16% en 2000. De 32,6 milliards de F CFP en 1995, les recettes du
secteur ont d’abord progressé jusqu’en 2000, où elles ont culminé à 49,9 milliards de F CFP, puis
elles se sont progressivement érodées pour atteindre en 2009, 37,7 milliards de F CFP, rendant les
structures hôtelières peu rentables.
Malgré ce contexte de crise, les constructions hôtelières se sont poursuivies à un rythme
soutenu grâce aux dispositifs de défiscalisation. Les investissements défiscalisés ont continué à
croître jusqu’en 2009.
C’est ainsi qu’entre 2006 et 2009, sur l’île de TAHITI et aux Iles Sous-le-Vent, six hôtels de
classe internationale se sont ouverts alors que la clientèle touristique ne cessait de chuter (- 80 000
environ).
A ce jour, alors que la crise sévit, et que les exploitations des structures hôtelières souffrent,
des projets continuent à éclore. Un projet de villas de luxe de plus de 11 milliards de F CFP est en
cours de travaux. Un autre, associé à un golf, pour lequel un agrément de 5 milliards de F CFP a été
accordé, est en cours de lancement.
Dans une étude consacrée à l’économie polynésienne post CEP (1995-2003), l’Institut de la
statistique de Polynésie française partageait cette analyse : «
En définitive, l’effort important
consenti par le Pays, en particulier en matière de défiscalisation, ne s’est pas traduit par une
évolution du volume de touristes. La baisse de fréquentation coïncide avec l’octroi des plus
importantes enveloppes de défiscalisation
».
3.2.3.2. - Des structures hôtelières très peu rentables
Les taux de remplissage n’ont pas permis de rentabiliser l’exploitation des établissements
hôteliers. Ces difficultés montrent que l’action sur l’offre, aussi efficace qu’elle a pu l’être, s’est
avérée relativement limitée pour assurer, seule, un développement du secteur.
Quinze ans après le recours à la défiscalisation locale, en complément du dispositif national,
les hôtels de luxe qu’elle a contribué à construire et à rénover sont généralement mis en vente dès
leur sortie de la période de défiscalisation (7 ans). D’autres structures, confrontées à des pertes
d’exploitation récurrentes, tentent de modifier l’activité dès que l’opportunité se présente.
C’est ainsi qu’un hôtel de la côte Est de TAHITI (170 chambres et suites), qui a bénéficié de
2 milliards de F CFP de crédits d’impôt entre 2001 et 2006, a reconverti une partie de ses
installations en résidence.
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Le manque de rentabilité est aussi à l’origine d’un autre effet pervers de la défiscalisation
locale : l’effet d’éviction.
Depuis le début des années 2000, l’ouverture des hôtels défiscalisés s’accompagne de la
fermeture ou la réduction d’activité des hôtels précédemment installés. Dans un marché stable,
voire en diminution depuis 2001, ces nouveaux hôtels captent la clientèle des hôtels en service et
entraînent leur disparition du marché.
Un hôtel de la côte Ouest de TAHITI a ainsi été fermé le 31 mai 2010, après une période de
réduction d’activité qui a coïncidé avec à l’ouverture d’un autre hôtel dans le même secteur en
octobre 2009. La construction du premier hôtel cité avait bénéficié de 3,6 milliards de F CFP de
crédits d’impôt.
L’ouverture d’un hôtel de luxe à BORA BORA, en août 2008, a provoqué quelques mois
plus tard la fermeture d’hôtels défiscalisés plus anciens, l’un en octobre 2008 et l’autre, en février
2010.
De nombreux hôtels défiscalisés soit sont actuellement en activité réduite, soit ont dû fermer
ou être reconvertis. Ceci explique que l’offre en nombre de chambres se soit finalement réduite
entre 1999 et 2009 (de 3396 à 3355).
Pour maintenir sur le marché les structures défiscalisées, la collectivité de la Polynésie
française a considéré qu’il était légitime d’accorder des aides à l’exploitation, à l’emploi ou des
dégrèvements d’impôt. La forme la plus aboutie a été l’aide fiscale à l’exploitation (AFE) qui, entre
2004 et 2009, a été systématiquement couplée aux crédits d’impôt liés à l’agrément fiscal.
Dans le cadre de la révision du dispositif, un régime d’aide à l’exploitation, le régime dit des
investissements directs, a été substitué à l’ancienne (AFE). C’est bien la preuve que les projets
défiscalisés connaissent des problèmes de rentabilité persistants.
Enfin, le soutien fiscal à l’hôtellerie de luxe a aussi eu l’effet non désiré de concurrencer par
les prix la petite hôtellerie et les pensions de famille, pour se partager un nombre de touristes en
déclin.
3.2.3.3. - Des effets sur l’emploi non pérennes
Les effets sur l’emploi de la défiscalisation sont étroitement liés au fonctionnement du
dispositif. La défiscalisation a incontestablement permis de soutenir l’emploi dans le secteur du
BTP. Toutefois, elle ne permet pas d’assurer le développement durable de ce secteur, sauf à
accroître sans cesse le courant d’affaires défiscalisées. Le ralentissement du courant d’affaires, lié
aux premières difficultés de financement de la dépense publique et de la défiscalisation en 2004 et
2005, s’est immédiatement répercuté sur le secteur du BTP qui, depuis 2009, est en crise.
Après avoir soutenu l’emploi dans le BTP, la défiscalisation a permis de nombreuses
créations d’emploi dans le secteur hôtelier. En 1995, le nombre d’emploi dans l’hôtellerie était de
2 806. Il était en 2009 de 4 317, d’après l’enquête tourisme de l’ISPF. Il est toutefois difficile
d’avoir un décompte précis du nombre d’emplois créés ou induits spécifiquement par le dispositif,
faute d’étude approfondie sur les effets de la défiscalisation. De plus, ces créations d’emplois ne
sont pas pérennes. Le niveau de l’emploi dans l’hôtellerie a été affecté, tant par la crise économique
que par la surcapacité hôtelière créée par le dispositif.
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Par exemple, un hôtel de la côte Est de TAHITI, qui employait environ 200 personnes
lorsqu’il fonctionnait selon les standards de l’hôtellerie de luxe, n’emploie plus que 120 personnes
depuis qu’il a pu réduire son activité hôtelière. La fermeture d’un hôtel sur la côte Ouest de TAHITI
en 2010 a entraîné une perte sèche d’emplois d’environ 200 personnes. A BORA BORA, la
réduction d’activité d’un hôtel (120 chambres et bungalows) a réduit ses emplois salariés en 2008 et
2009 de 200 à 10 personnes.
En définitive, le secteur touristique, après plus de quinze ans d’aides économiques et fiscales
renforcées, ne représente que 15 % des emplois
79
, soit environ 10 000, dont 4 173 pour l’hôtellerie
et les services d’hébergement.
3.3 - Une reconsidération globale est nécessaire
Le bilan de la défiscalisation locale ne peut être que mitigé au regard des résultats. Le levier
fiscal qui a été choisi par le gouvernement FLOSSE, puis reconduit par ses successeurs, a certes
permis aux capitaux de s’investir en Polynésie française mais au prix d’une bonification publique
très lourde et pour des résultats qui restent difficilement mesurable et incertains.
Ce levier fiscal a été concentré sur la construction hôtelière, secteur qui totalise plus de 70 %
des projets aidés. La défiscalisation locale n’a donc pas permis d’aider la construction des
équipements structurants qui font encore défaut à l’économie polynésienne. Par ailleurs,
l’abaissement du coût du capital pour l’investisseur, auquel aboutit la défiscalisation, a finalement
relégué, sauf exception, la démarche entrepreneuriale au second plan, laissant l’optimisation fiscale
dicter sa loi. L’utilisation qui en a été faite en Polynésie française influence forcément l’opinion à
l’égard de la mesure elle-même.
Pour une part importante, les insuffisances constatées tiennent dans la combinaison efficace
des puissantes incitations fiscales qui avaient été décidées avec un encadrement réglementaire et
administratif peu rigoureux, trop souple à l’origine.
Le resserrement du dispositif fiscal opéré depuis 2006 reste insuffisant puisqu’il n’a pas
permis d’éliminer toutes les difficultés de pilotage.
La collectivité, déjà alertée par la mission d’assistance
80
en septembre 2010, aurait intérêt à
poursuivre sans tarder la révision des règles de défiscalisation sans éluder la redéfinition même de
cette politique, qui s’impose si l’on souhaite maintenir ce dispositif.
3.3.1. - Les réformes du dispositif sont encore insuffisantes
Le dispositif initial de 1995
81
avait confié au seul président de la Polynésie française les
décisions en matière de défiscalisation locale. Les projets étaient éligibles dès lors qu’ils
intervenaient dans un secteur éligible et qu’ils étaient agréés par le président. Le dispositif mis en
place n’a pas comporté de procédure d’agrément généralisé jusqu’en 2004. Les projets étaient
agréés par le président, seul.
79
Chiffres ISPF.
80
Le rapport BOLLIET avait préconisé un moratoire pour la défiscalisation locale.
81
La délibération n° 95-55 AT du 24 mars 1995 (JOPF du 5 avril 1995).
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Ce dispositif avait été d’emblée considéré comme cumulable avec la défiscalisation des lois
PONS et PAUL. Son objectif principal était la construction immobilière. Le levier fiscal était très
puissant : des taux de crédits d’impôt allant jusqu’à 60 % pour la construction hôtelière étaient
proposés
82
. Mais les obligations qui étaient mises à la charge du défiscalisant étaient très légères. A
titre illustratif, les conditions de reprise fiscale étaient réduites à la non-présentation du certificat de
conformité à l’issue du 30
ème
mois suivant la délivrance du permis de construire. Aucun objectif
précis en termes d’emplois ou de développement économique n’était fixé aux investisseurs
Ce système très souple a duré dans ses lignes directrices jusqu’en 2004.
En quinze ans, le dispositif a migré de l’accès quasi automatique du dispositif initial, placé
sous le seul contrôle du président de la Polynésie française, à un dispositif comportant un agrément
préalable et des taux de crédits d’impôt revus à la baisse, sans pour autant offrir la garantie d’une
exacte adéquation de la dépense fiscale aux besoins de l’économie.
3.3.1.1. - Les précisions apportées au dispositif fiscal demandent à être complétées
En dépit des nombreuses modifications
83
qu’a connues le dispositif depuis 1995, les
procédures d’accès à la défiscalisation sont restées très peu contraignantes. Toutefois, la sélection
des projets défiscalisés est devenue plus collégiale et plus transparente.
3.3.1.1.1. - La demande d’agrément
La demande d’agrément a dû, à partir de 2004, être déposée préalablement à l’achèvement
de l’opération qui la motivait alors que dans le dispositif précédent, l’agrément était possible pour
des demandes postérieures à l’achèvement de l’opération.
Le dossier de demande, très peu formalisé jusqu’à cette date, doit dorénavant fournir un
descriptif des financements dans lequel doit apparaître la part des crédits d’impôt et le prix de
revient de l’opération.
Toutefois, dans ce dispositif, le dépôt de la demande d’agrément reste possible sur la
production d’une simple demande de permis de construire. Le dossier est déposé au secrétariat de la
commission des agréments fiscaux.
La contexture des dossiers a été redéfinie en 2006. Le dossier comprend une attestation de
financement et, pour la première fois, des demandes précises de renseignements : sur le projet,
notamment la faisabilité économique, son intérêt économique en termes de valeur ajoutée et
d’emplois induits ; sur les avantages Girardin parallèlement sollicités ; sur le coût global du projet ;
sur l’engagement de maintenir en exploitation le bien défiscalisé durant une durée variable.
82
Les taux de crédits d’impôt étaient très élevés : de 40 à 20% pour la construction immobilière, de 50 % pour les projets hôteliers,
avec un régime dérogatoire à 60 % (PC déposé dans l’année). Cette dérogation pour un taux à 60% sera plusieurs fois reconduite de
1996 à 2002.
83
26 délibérations et 5 lois du pays.
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La base défiscalisable est restée longtemps mal définie. Encore à ce jour, en dépit des coûts
croissants constatés dans les projets défiscalisés, notamment le coût du bungalow ou de la chambre
d’hôtel, les assiettes défiscalisables n’ont pas été limitées dans leur montant. A la différence du
régime des investissements en loi Girardin,
aucune norme chiffrée ne limite le coût d’une chambre
d’hôtel ou d’un bungalow ou celui de sa rénovation.
La décision d’agrément fait l’objet d’un arrêté du président, elle fixe l’assiette défiscalisable
et le montant global des crédits d’impôt. En cas de rejet, elle est notifiée à la société demanderesse.
3.3.1.1.2. - Les procédures d’agrément
Pour la première fois en 1999, pour tenter de freiner la progression du coût de la dépense
fiscale, l’aide fiscale en faveur de la construction de logements intermédiaires a été conditionnée à
l’aval du ministre des finances. Celui-ci était chargé de contrôler le respect des engagements du
bénéficiaire de l’avantage fiscal en matière de vente ou de location. Cette première tentative ne
touchait pas la construction hôtelière et ses effets sont restés très limités.
Ce n’est qu’à partir de 2004 que les dispositifs défiscalisants ont évolué vers plus
d’encadrement.
Initialement, le président donnait, seul, les agréments après avis d’une commission
consultative des agréments fiscaux lorsqu’il s’agissait de construction immobilière, sans avis
consultatif lorsqu’il s’agissait de construction hôtelière. Cette commission était composée de
ministres et présidée par le président.
En 2004, quelques précisions ont été données sur le cadre de référence que devait utiliser la
commission. Il lui était recommandé de «
prendre en considération les avantages et les
inconvénients de l’investissement proposé, en matière d’emploi, de développement durable,
d’environnement et d’opportunité économique
». La présidence de cette commission était confiée
au vice-président. Le secrétariat de la commission a été transféré du secrétariat du président au
service des contributions publiques.
Un premier recadrage a été opéré par l’arrêté n°687 CM du 11 juillet 2006 qui a défini avec
plus de précision les modalités de fonctionnement de la commission consultative des agréments.
Les séances sont à l’initiative du vice-président. Le rôle du service des contributions est
renforcé. Ce service est désormais habilité à demander tous compléments d’informations ou pièces
manquantes aux requérants. Il constitue un dossier de présentation pour chaque dossier de demande
examiné en commission.
Le fonctionnement de la commission a été à nouveau amélioré dans le cadre de la loi du
pays n° 2009-7 APF du 1
er
avril 2009. Le recueil des avis circonstancié des ministres membres de la
commission ne peut désormais dépasser un mois après notification de la demande d’avis. Les
ministres du secteur concerné par le dossier mis en délibéré n’ont plus voix délibérative lors de
l’examen de l’avis.
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Le rôle du secrétariat, confié au service des contributions, a été encore renforcé par l’arrêté
n° 606 CM du 13 mai 2009. Le secrétariat peut décider de l’irrecevabilité d’un dossier s’il constate
qu’il est incomplet. Les méthodes de travail de la commission dans son examen des dossiers ont
aussi été précisées par un arrêté spécial n° 770 CM du 3 juin 2009. Ces lignes directives ont, pour la
première fois, défini la manière d’apprécier les retombées sociales et économiques des projets
défiscalisés. L’analyse repose sur 5 fiches détaillées qui sont obligatoirement remplies par le
bénéficiaire de l’avantage fiscal : une balance fiscale prévisionnelle en période de construction ou
d’investissement ;
une
balance
sociale
prévisionnelle
en
période
de
construction
ou
d’investissement ; une balance sociale en période d’exploitation (à joindre à la liasse fiscale) ; une
balance fiscale prévisionnelle en période d’exploitation (à joindre à la liasse fiscale) ; une balance
économique prévisionnelle en période d’exploitation (à joindre à la liasse fiscale).
En outre, le service des contributions peut, à tout moment, procéder à des vérifications sur
place dans le cadre de l’article L.412-1 applicable pour les vérifications de comptabilité.
L’avis de la commission des agents fiscaux est obligatoirement joint au dossier de demande.
Le conseil des ministres devient l’instance de décision à la place du président de la Polynésie
française, mettant fin à une prérogative discrétionnaire remontant à la création de la mesure fiscale.
Sur ces questions techniques, les ministres de la commission ont la faculté de recourir aux
collaborateurs de leur choix. Le fonctionnement interne de la commission consultative des
agréments fiscaux, à travers les comptes-rendus de séances de 2005 à 2009, a montré, très
fréquemment, les divergences d’optique qui existaient entre les avis techniques et juridiques du
service des contributions et ceux plus généraux des membres de la commission qui ont éprouvé des
difficultés à réunir des avis techniques de qualité, souvent faute de normes et de références
préétablies.
Pour ces raisons, la composition de la commission des agréments fiscaux demanderait sans
doute à être revue.
Un autre équilibre entre les membres du gouvernement et les techniciens de la fiscalité et du
développement économique serait à trouver afin de rendre plus effectif le filtre sélectif que doit
constituer la commission des agréments.
L’activité depuis 2004 montre en effet que les rejets ont été peu nombreux,
sauf en 2005
84
,
où systématiquement les dossiers présentés par le gouvernement précédent ont été rejetés, et en
2009, lorsque les conditions ont été durcies pour raisons budgétaires.
Nombre d’agréments
Année
Nombre de
dossiers déposés
CCII
AFE
Nombre de
rejets
Nombre de
dossiers en
instance au 31/12
Nombre de
séances
2004
44
15
10
14
11
2005
56
26
17
17
9
14
2006
37
19
4
7
21
8
2007
48
15
6
4
52
8
2008
10
19
8
2
16
3
2009
49
2
5
15
38
4
84
2005 a été une année de changement de majorité politique.
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La Chambre a bien noté que la récente évolution vers plus de rigueur dans le traitement des
dossiers d’agrément, par la responsabilisation croissante du service des contributions publiques, a
été remise en cause par une loi du pays n°2010-1 du 25 janvier 2010 qui a transféré le secrétariat de
la commission des agréments de ce service à la délégation pour la promotion des investissements
fiscaux (DPI), alors qu’elle ne compte que deux agents, de surcroît inexpérimentés en matière
fiscale.
Cette nouvelle organisation a compliqué inutilement l’examen des dossiers et a contrarié le
mouvement amorcé depuis 2009 vers la professionnalisation du traitement de ces dossiers
complexes.
3.3.1.1.3. - Les obligations de l’investisseur
Dans le dispositif initial, les obligations de l’investisseur étaient réduites au minimum : une
durée minimale d’exploitation pour l’investisseur exploitant, qui variait selon les secteurs éligibles,
un financement à apporter avant la délivrance du certificat de conformité pour l’investisseur fiscal.
Les obligations de l’investisseur fiscal n’ont été renforcées que par une loi du pays n°2006-
11 du 12 avril 2006 où une première durée minimale de 18 mois de mise à disposition des
financements a été introduite. Cette durée pouvait cependant être réduite lorsque la date de
délivrance du certificat de conformité
85
était antérieure à l’expiration du délai de 18 mois. Une
nouvelle modification, introduite par la loi du pays n°2009-7 du 1
er
avril 2009, a supprimé cette
option, mais a réduit la durée minimale de mise à disposition des fonds à 12 mois
86
.
Auparavant, les bénéficiaires du crédit d’impôt pour un projet hôtelier
87
devaient, sous peine
de reprise fiscale, satisfaire deux obligations. Pour l’investisseur fiscal, il devait initialement
conserver les parts, actions ou dépôts sur compte courant d’associé pour une période qui n’était pas
définie jusqu’en 2009. Pour l’investisseur exploitant, il devait maintenir l’immeuble à sa
« destination hôtelière » pendant les cinq années qui suivaient l’année de mise en exploitation. Mais
la part de l’avantage fiscal rétrocédé au projet de l’exploitant n’était pas fixée par le code des
impôts. Elle était fonction de la négociation entre les parties.
Ce n’est que par la loi du pays du 12 avril 2006 qu’a été mis fin au système de la libre
négociation entre les exploitants et les investisseurs fiscaux de la part rétrocédée au projet. Par ce
texte, la part rétrocédée au projet par les investisseurs fiscaux a, d’abord, été fixée à 60 % de
l’avantage procuré. La loi du pays du 1
er
avril 2009 a modulé cette obligation de rétrocession en
imposant un taux d’au moins 70 % lorsque l’apport en capital se limite à l’avantage financé, et un
taux de 60 % lorsqu’il correspond à l’intégralité du financement apporté.
En contrepartie, cette dernière loi du pays à renforcé les obligations d’information de
l’investisseur exploitant.
85
Article L 914-4.
86
Article L 916-21 : le financement doit intervenir au plus tard douze mois avant la date d’achèvement du programme
d’investissement.
87
Le cas le plus fréquent.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 70 sur 84
Il est ainsi tenu de fournir un compte rendu d’exécution, qui atteste de la conformité du
programme à l’arrêté d’agrément. Il doit satisfaire à une reddition des comptes qui arrête le coût
final du programme. Ces documents sont adressés dans les 12 mois après l’achèvement du
programme. De même, un nouvel article du code des impôts (LP 917-2) oblige l’investisseur
exploitant à fournir en janvier N+2 après l’achèvement, tout document justifiant les emplois liés à
l’exploitation des investissements agréés.
Malgré ces améliorations, les obligations des investisseurs mériteraient d’être encore
précisées afin de diminuer les aubaines fiscales auxquelles ont conduit les dispositifs défiscalisants.
Grâce à ces améliorations, les allers et retours des investisseurs fiscaux, parfois relevés dans
plusieurs programmes, sont théoriquement prohibés depuis 2006. De la même manière, depuis
2009, le suivi des projets défiscalisés a été facilité et les possibilités de contrôles étendues.
Toutefois, la défiscalisation locale reste toujours une excellente opportunité fiscale pour les
investisseurs locaux.
Jusqu’à présent, les opportunités fiscales offertes aux sociétés qui investissent dans ce cadre,
leur ont permis de minimiser à l’extrême leur impôt sur les sociétés (IS). Depuis la création du
dispositif, l’optimisation fiscale a particulièrement bien fonctionné, grâce notamment à la possibilité
pour les groupes de sociétés d’apporter des capitaux en compte courant d’associés, par
l’intermédiaire d’une société du groupe, à des projets portés par une autre société du même groupe.
Cette pratique d’optimisation fiscale, au demeurant peu complexe, a permis à plusieurs
groupes et sociétés locales de faire de substantielles économies d’impôt qui, pour certains, ont pu
représenter plus de la moitié de l’impôt dû.
3.3.1.2. - Les méthodes doivent être renouvelées pour assurer l’efficacité de la dépense
fiscale
Deux points de méthode méritent à l’expérience de ces quinze ans de mise en oeuvre de la
défiscalisation locale, d’être révisés.
Il s’agit en premier lieu du ciblage sectoriel qui, après 2004, s’est estompé au profit d’une
action
étendue aux plus grands secteurs de l’économie polynésienne, quelles qu’en soient les
caractéristiques. Initialement concentré sur le tourisme et l’hôtellerie, et sur la construction
immobilière, le dispositif fiscal s’est progressivement étendu à d’autres secteurs sans que cette
extension se soit appuyée sur des études économiques préalables probantes.
En 2004, par la délibération du 12 février 2004, les secteurs éligibles ont ainsi été étendus,
entre autres, aux projets de résidences pour personnes âgées, aux cliniques, à l’industrie
agroalimentaire et à la construction de navires de pêche.
Cette extension a conduit à des soutiens fiscaux pour lesquels les effets d’aubaine ont été
maximaux, comme par exemple pour la construction d’hypermarchés ou de galeries marchande par
le secteur de la grande distribution.
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Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 71 sur 84
Il y aurait lieu de substituer à la démarche d’extension continue des secteurs éligibles qui a
prévalu, notamment à partir de 2004, une action plus ciblée et plus sélective.
La sélection des secteurs doit, en effet être affinée pour que la mesure fiscale ait des chances
d’être efficace sur le plan du développement économique et social. Dans cette optique, depuis 2009,
la détermination des secteurs éligibles a été partiellement renouvelée. La construction hôtelière, eu
égard aux résultats, a été moins encouragée. L’aide fiscale aux secteurs des énergies renouvelables
et du logement social et au secteur primaire a été réévaluée. Cette modulation s’est aussi
accompagnée d’un encouragement fiscal aux investissements hors secteur des Iles-du-Vent et des
îles-Sous-le-Vent, témoignant d’une approche plus soucieuse de l’aménagement du territoire. La
sectorisation actuelle accorde une majoration supplémentaire de 20 points pour les investissements
dans les secteurs prioritaires.
Cette approche matricielle par zones de développement prioritaire
88
, qui valorise l’aide en
fonction de la priorité accordée au secteur et à la zone géographique, a voulu renforcer le lien entre
la mesure fiscale et le développement économique.
La nouvelle méthodologie, couplant développement économique et aménagement du
territoire, est encore trop récente pour être appréciée dans ses résultats. La Chambre a relevé qu’une
nouvelle fois cette orientation a été décidée sans que des études probantes en aient démontré la
réelle pertinence. Elle mérite toutefois d’être poursuivie car elle peut permettre une meilleure
adéquation des projets aux besoins de l’économie polynésienne, si les autorités prennent garde de
ne pas étendre à l’excès les zones prioritaires de développement éligibles à la mesure fiscale.
En définitive, le dispositif fiscal a maintenant besoin de s’appuyer sur un cadrage
macroéconomique qui, jusqu’à présent, a été très insuffisant. Au contraire, il a été imprudemment
considéré que l’abaissement du coût du capital suffisait à garantir une retombée positive dans
l’économie.
La prise en compte du constat que les effets de la défiscalisation diffèrent selon les secteurs
économiques dans lesquels ils interviennent, souligne le besoin d’un cadre macroéconomique
général. Or, cet aspect n’a jamais été suffisamment intégré à la gestion de cette politique fiscale.
La gestion de ce dispositif a besoin d’être éclairée par des études économiques et un suivi
précis des projets défiscalisés. Si les outils pour améliorer l’information chiffrée sur les projets
viennent d’être mis en place courant 2010, rien émanant de la collectivité de la Polynésie française
n’est prévu à court terme au chapitre des études économiques d’envergure qui sont pourtant
nécessaires à l’évaluation de cet ensemble de mesures.
3.3.2. - Une redéfinition de la politique fiscale paraît indispensable
3.3.2.1. - Le dispositif conserve encore trop de souplesses pour être complètement
maîtrisable pour les finances publiques.
La loi du pays du 1
er
avril 2009 a profondément révisé le dispositif d’incitation fiscale. Le
dispositif actuel a vocation à s’appliquer aux agréments délivrés au plus tard en 2017.
88
Article L.931-1 du code des impôts.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 72 sur 84
Le régime des investissements indirects est créé en substitution des anciennes
dénominations. Les crédits d’impôt sont accordés à toute entreprise ou particulier qui participe au
financement d’un programme qui se réalise dans un secteur éligible pour un montant variant de 60 à
70 % de l’avantage fiscal total. Le taux de crédit d’impôt pour le secteur de l’hôtellerie est ramené à
40 %. L’intérêt de cette opération d’investissement pour l’investisseur est de pouvoir bénéficier de
30 à 40 % de l’avantage fiscal.
Sous la dénomination de régime des investissements indirects, une nouvelle aide à
l’exploitation remplace l’AFE. C’est une aide puissante puisqu’il s’agit de 70 % du crédit d’impôt
au titre du régime des investissements indirects. Cette exonération fiscale est à valoir sur l’IS ou
l’IT accordée à toute entreprise qui investit dans son propre programme d’investissement réalisé
dans un secteur éligible, dont sont exclus le secteur de la santé, le logement et l’immobilier.
Un régime des investissements dans les fonds communs de placements
89
à risques dans les
banques et établissements financiers de la Polynésie française est créé. Ce nouveau dispositif de
défiscalisation des placements réalisés sur ces fonds (de 5 MF CFP à 200 MF CFP) oblige les
souscripteurs à détenir les fonds 5 ans contre un crédit d’impôt de 40 % du placement effectif.
3.3.2.1.1. - L’agrément dérogatoire
La loi du pays de 2009 a aussi introduit un régime d’agrément dérogatoire
90
qui consiste à
exonérer d’avis préalable, les programmes d’investissement d’un montant inférieur à 100 MF CFP,
quel que soit le secteur concerné.
La décision relève du seul président après avis de la commission de contrôle budgétaire et
financier
91
de l’Assemblée de la Polynésie française. Un arrêté n°608 CM du 13 mai 2009 a
organisé cette procédure « simplifiée ». Le ministre des finances transmet un projet de décision au
président après avis de la commission de contrôle budgétaire et financier.
Cette commission, créée par la loi organique de 2007, est donc désormais la seule instance
consultative à émettre un avis sur les dossiers de défiscalisation de moins de 100 MF CFP. Or, la
commission a pris le soin de préciser comment elle concevait son rôle :
«Le contrôle de la
commission de contrôle budgétaire et financier (CCBF) doit donc être entendu dans son sens
restreint c'est-à-dire celui d'un examen, d'une vérification ou encore d'une surveillance mais
nullement celui d'une maîtrise ».
Compte tenu du faible nombre de dossiers examinés chaque année dans le cadre de cette
procédure simplifiée (8 dossiers sur 34 en 2010), il est permis de s’interroger sur l’intérêt qu’il y
avait de se priver de l’avis technique de la commission consultative des agréments fiscaux pour ces
dossiers. Bien que la mesure soit trop récente pour que l’on puisse observer ses effets, la chambre
invite la collectivité à la plus grande vigilance pour éviter toute dérive.
89
Il n’a jusqu’à présent guère eu de succès.
90
Article LP 913-3 du code des impôts.
91
Article LO 157-2
de la loi organique du statut de la Polynésie française.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 73 sur 84
3.3.2.1.2. - Le droit applicable
La refonte du dispositif s’est accompagnée également d’une amélioration de la
détermination du droit applicable pour traiter la demande. Un nouvel article du code des impôts
(L.911-2) indique désormais que le projet d’investissement est régi par la législation en vigueur au
moment du fait générateur qui correspond à la date du dépôt de la demande d’agrément à la
commission (secrétariat). Les conditions de recevabilité du dépôt ont été précisées. Ce dépôt n’est
recevable dans les dispositions actuelles qu’associé à une demande de permis de construire ou à une
demande administrative spéciale au projet.
Toutefois cette amélioration doit être relativisée car elle est contrebalancée par une
tolérance : il est admis qu’à défaut de ces documents, une simple facture pro forma où la nature et le
coût du projet sont mentionnés, suffit pour que la demande soit enregistrée.
En outre, l’agrément fiscal est un agrément discrétionnaire
92
qui n’a pas à être motivé. La
décision ne peut, en principe, être attaquée en recours pour excès de pouvoir. C’est une différence
importante avec la défiscalisation nationale qui est une décision fiscale pour laquelle le refus
d’octroi doit être motivé.
La chambre considère que la nature discrétionnaire de la décision prive le dispositif d’un
levier par lequel la collectivité de la Polynésie française conférerait une meilleure transparence à ses
décisions en matière d’agrément.
3.3.1.2.3. - La double défiscalisation n’est pas encadrée
La double défiscalisation n’est pas suffisamment encadrée et ciblée. Actuellement, aucune
condition spéciale n’a été définie pour les opérations en double défiscalisation.
La puissance du soutien public que procurent ces mécanismes nécessiterait plus de
précautions. En matière de construction hôtelière, les taux de crédit d’impôt ont pu en théorie
atteindre 90 % de la base défiscalisable : 30 % dans le cadre national, et 60 % dans le cadre de la
défiscalisation locale. Plus communément, ils ont entraîné des défiscalisations avec des taux de
70 %.
Dans ces conditions, les intérêts purement fiscaux des investisseurs locaux ont pu largement
prospérer, sans inciter au développement de projets économiques viables et pérennes.
Il conviendrait donc de mieux encadrer ces mécanismes, dans le cadre d’accords fiscaux
passés avec le gouvernement français.
92
Article LP 913-5 du code des impôts.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 74 sur 84
3.3.2.2. - La comparaison avec d’autres moyens d’intervention publique plus efficients
doit être systématiquement opérée
Autant le bilan de quinze ans de défiscalisation, que les difficultés budgétaires actuelles de
la collectivité de la Polynésie française, plaident pour le recadrage de la défiscalisation locale et
pour que soient envisagés d’autres moyens d’intervention publique, plus sélectifs et mieux
contrôlables.
3.3.2.2.1. - L’étroitesse des marges de manoeuvre de la collectivité plaide pour un
recadrage de la mesure fiscale
Dans la gestion de la défiscalisation, la question du coût budgétaire a longtemps été trop
négligée. Or, il est maintenant avéré que la perte des recettes fiscales de 5 à 12 milliards de F CFP
par an engendrée par la défiscalisation n’a jamais été récupérée par un retour fiscal équivalent.
Au contraire, tout démontre, même en l’absence de suivi précis, que ce retour fiscal n’a non
seulement pas eu lieu mais que la dépense fiscale a généré des coûts associés importants (AFE).
La collectivité de la Polynésie française est actuellement confrontée à une situation
budgétaire très dégradée qui requiert la mise en oeuvre de profondes réformes structurelles et
fiscales.
Dans ce contexte, le recadrage de la défiscalisation sur les secteurs où son efficacité
économique et sociale peut être démontrée doit désormais être la démarche au terme de laquelle la
dépense fiscale doit être décidée.
Il s’agit donc pour la collectivité de recadrer la politique de défiscalisation, sans a priori, en
mesurant bien le risque budgétaire et financier qui est pris lorsque le soutien fiscal aboutit à mettre
sur le marché des outils non rentables qui ne peuvent ensuite se dispenser du soutien public.
Plusieurs exemples de ce type d’intervention sont encore d’actualité dans l’économie polynésienne.
A titre d’illustration, les soutiens fiscaux à la SEM TNR ont placé la collectivité de la Polynésie
française dans l’obligation de prolonger son intervention à travers la SAS AVAI’A pour un coût qui
a dépassé un milliard de F CFP
93
.
3.3.2.2.2. - Le recours à d’autres moyens alternatifs doit être étudié
Dans le rapport de la mission d’assistance, le moratoire proposé pour la défiscalisation
locale est destiné, non pas à supprimer la mesure fiscale, mais à promouvoir une approche recentrée
et plus efficace de la défiscalisation locale, qui permettra de réduire le montant des crédits d’impôt à
environ 2 milliards de F CFP.
93
Rapport de la CTC du 31 août 2007 (SEM TNR).
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Séance du 22 décembre 2011 - page 75 sur 84
Depuis quinze ans le destin des projets défiscalisés montre que l’efficacité de la dépense
fiscale est loin d’être absolue. Les difficultés de l’industrie hôtelière, développée sans référence
pertinente avec le marché touristique potentiel, ou la constitution d’une flotte aérienne
internationale sans rapport avec la clientèle potentielle, ont montré combien la défiscalisation peut
perturber le calcul de l’entrepreneur, et générer à terme de lourdes charges publiques.
Dans ces conditions, il serait justifié d’étudier d’autres moyens d’intervention publique dans
certains secteurs stratégiques du développement de la Polynésie française. Cette orientation serait
particulièrement pertinente pour les secteurs dans lesquels les projets restent peu nombreux, comme
par exemple dans le secteur du logement social. Dans ces secteurs, l’utilisation d’un système de
subventionnement classique de l’investissement serait plus adaptée à une collectivité aux moyens
fiscaux nécessairement limités.
Le subventionnement autoriserait en outre un contrôle plus aisé des fonds publics versés
Bien que l’évolution du système de défiscalisation depuis 2006 ait permis de mettre en place
un dispositif moins imprécis, le système reste peu contrôlé.
La recherche de la moralisation du dispositif passe maintenant par un renforcement des
contrôles. Le contrôle fiscal, avec ses moyens limités, a déjà décelé plusieurs cas d’utilisation
abusive de la défiscalisation locale à des fins de pure optimisation fiscale. L’un d’eux concerne une
présomption d’utilisation irrégulière des crédits d’impôt obtenu pour un programme au financement
d’un autre programme. Dans cette optique, les opérations en double défiscalisation doivent être
mieux contrôlées. Une convention fiscale avec la France a été signée le 9 décembre 2009 par les
autorités polynésiennes afin de permettre des contrôles fiscaux nationaux sur les réalisations
défiscalisées en loi GIRARDIN
94
.
Malgré ces avancées appréciables, la question du maintien de la politique de défiscalisation
locale, dans ses conditions actuelles, est posée, notamment celle de son association avec les
avantages fiscaux de la loi GIRARDIN.
En définitive, dans ce type d’intervention fiscale, la méthode et l’encadrement juridique
conditionnent l’efficacité et l’efficience de la dépense fiscale. L’équilibre entre l’intérêt économique
et social du projet et l’attractivité des avantages fiscaux pour les investisseurs locaux n’a pas encore
été trouvé de manière totalement satisfaisante.
94
La collectivité était certes liée à la France par une convention fiscale, mais uniquement en ce qui concerne certains revenus de
capitaux mobiliers (RCM), ce qui était totalement inopérant en matière de défiscalisation.
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Séance du 22 décembre 2011 - page 76 sur 84
Conclusion générale et recommandations
La Polynésie française doit se résoudre à rééquilibrer ses finances publiques pour retrouver
toutes ses capacités d’intervention et d’investissement.
La reproduction des solutions palliatives du passé (augmentation des taxes et des impôts
existants) n’est plus à la hauteur des enjeux. L’assainissement pluriannuel dans lequel est engagée
la collectivité doit être l’occasion, non seulement de conforter les équilibres fondamentaux menacés
en optant pour une modernisation fiscale significative, mais aussi de rendre la dépense publique
plus efficace pour le développement du pays grâce à la réalisation d’équipements structurants qui
lui font encore défaut. Pour cela, la collectivité doit encore réaliser des économies sur le
fonctionnement de l’administration afin de restaurer sa capacité d’autofinancement, retrouver la
confiance des prêteurs, et favoriser les conditions qui permettront l’émergence d’un partenariat
rénové avec l’Etat.
Compte tenu des observations faites dans le cadre de ce rapport, la chambre recommande :
1) de mettre en oeuvre les propositions du rapport de la mission d’assistance, déjà formulées
par la chambre dans le cadre de nombreux rapports communiqués entre 2006 et 2011 sur la
Polynésie française et ses organismes périphériques (établissements publics, SEM…), visant
notamment à :
- améliorer la sincérité des comptes ;
- développer une approche de consolidation des comptes avec les organismes
périphériques ;
- poursuivre la politique de maîtrise des dépenses de fonctionnement afin d’améliorer
le niveau de l’épargne ;
- relancer une politique d’investissements structurants ;
2) d’adopter les décisions stratégiques permettant de fixer le périmètre de l’administration et
des organismes périphériques de la collectivité ; pour ces derniers, mettre en place des
conventions d’objectifs et de moyens afin d’en contrôler les performances ;
3) d’éviter le recours aux emprunts structurés, à caractère spéculatif, qui font courir un
risque élevé de pertes exponentielles à terme, et dont la collectivité ne peut maîtriser tous les
paramètres nécessaires à leur gestion ;
4) de créer des outils de suivi et d’évaluation des politiques publiques dont l’expertise serait
confiée à un comité mis en place à cet effet, et dont les analyses seraient présentées devant
l’Assemblée de la Polynésie française ;
5) d’engager une réforme en profondeur du système fiscal ayant pour objectifs :
- d’améliorer son efficacité, notamment par un rééquilibrage entre fiscalité directe et
indirecte ;
- de rechercher une plus grande équité, en étudiant la possibilité de développer des
impôts progressifs sur les revenus (sur le modèle d’une CST rénovée) et le
patrimoine et en rationalisant les champs d’exonération et de dégrèvement de
l’impôt ;
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Séance du 22 décembre 2011 - page 77 sur 84
- de renforcer les moyens qualitatifs et quantitatifs des services fiscaux afin de
parvenir à une meilleure connaissance des bases fiscales et d’améliorer le
recouvrement et le contrôle ;
- d’assurer la stabilité et la répartition équitable des moyens de financement des
communes, par la voie fiscale ou par celle de dotations réaménagées ;
6) de procéder, en ce qui concerne les dispositifs de défiscalisation :
- à la définition d’une stratégie d’aide cohérente par filières et secteurs géographiques ;
les apports de la loi du pays du 1
er
avril 2009 méritent à cet égard d’être complétés, en
particulier par une sélection plus fine des secteurs éligibles, et au besoin, par le retrait
de certains d’entre eux lorsque l’objectif du développement économique n’a pas été
atteint ;
- à l’amélioration de la procédure d’agrément, en prévoyant notamment la motivation
des décisions et la possibilité de recours des contribuables concernés ;
- au contrôle physique de la conformité des réalisations, au suivi et à l’évaluation
périodique du dispositif, en termes de bénéfices pour le développement économique du
Pays, afin d’en rendre compte annuellement devant l’Assemblée de la Polynésie
française ;
- à la révision des paramètres des mécanismes défiscalisants, pour en réduire le coût,
notamment dans le cas de double défiscalisation.
R U B R I Q U E S (MFCFP)
2 004
2 005
% Evol.
2006
% Evol.
2007
% Evol.
2008
% Evol.
2009
% Evol.
2010
% Evol.
ITS REELS DE FONCTIONNEMENT
104 093
116 549
12,0%
117 417
0,7%
117 866
0,4%
116 492
-1,2%
111 816
-4,0%
118 137
5,7%
dt IMPOTS DIRECTS
22 024
23 561
7,0%
25 145
6,7%
24 866
-1,1%
26 948
8,4%
24 642
-8,6%
26 318
6,8%
dt IMPOTS INDIRECTS
71 257
75 607
6,1%
76 965
1,8%
78 996
2,6%
77 970
-1,3%
69 129
-11,3%
65 830
-4,8%
SES REELLES DE FONCTIONNEMENT
92 729
95 247
2,7%
98 231
3,1%
105 882
7,8%
110 126
4,0%
104 670
-5,0%
106 651
1,9%
ENSES REELLES HORS REMBT INTERETS
90 637
93 451
3,1%
96 343
3,1%
103 377
7,3%
107 621
4,1%
102 553
-4,7%
104 108
1,5%
dt PERSONNEL
26 221
27 380
4,4%
30 418
11,1%
31 125
2,3%
31 134
0,0%
32 310
3,8%
32 010
-0,9%
dt subventions et participations, courantes ou exceptionnelles[1]
43 254
51 492
19,0%
52 132
1,2%
54 652
4,8%
57 925
6,0%
52 979
-8,5%
50 062
-5,5%
EDENT BRUT DE FONCTIONNEMENT
13 456
23 098
71,7%
21 074
-8,8%
14 489
-31,2%
8 871
-38,8%
9 263
4,4%
14 029
51,5%
dt DOTATIONS.AMORT.
-
-
-
-
-
-
1 957
TE DE DETTE
10 342
9 707
-6,1%
9 643
-0,7%
9 316
-3,4%
9 774
4,9%
9 612
-1,7%
10 156
5,7%
dt INTERETS
2 092
1 796
-14,1%
1 888
5,1%
2 505
32,7%
2 505
0,0%
2 117
-15,5%
2 543
20,1%
dt CAPITAL
8 250
7 911
-4,1%
7 755
-2,0%
6 811
-12,2%
7 269
6,7%
7 495
3,1%
7 613
1,6%
FINANCEMENT BRUT (Epargne brute)
11 364
21 302
87,5%
19 187
-9,9%
11 984
-37,5%
6 366
-46,9%
7 146
12,3%
11 487
60,7%
OFINANCEMENT NET (Epargne brute - K des emprunts)
3 114
13 391
330,0%
11 433
-14,6%
5 173
-54,8%
-904
-350
3 874
TES REELLES INVEST.
29 273
18 478
-36,9%
23 511
27,2%
25 247
7,4%
26 529
5,1%
29 598
11,6%
26 303
-11,1%
STISSEMENTS REELS.
32 325
31 993
-1,0%
25 794
-19,4%
31 799
23,3%
30 605
-3,8%
30 977
1,2%
28 688
-7,4%
IN FINANCEMENT INVEST.
-3 052
-13 515
-2 283
-6 552
-4 076
-1 379
-2 385
ité nette de financement de l'investissement
62
-124
9 150
-1 379
-4 980
-1 729
1 489
EVEMENT POUR DEPENSES D'INVEST. (jusqu'en 2006)
16 131
14 349
17 745
-
-
-
-
CTATION RESULTAT 1068 (à c/ de 2007)
-
-
-
18783
15 066
9 072
9295
RUNTS ENCAISSES
11 438
7 200
10 000
11 153
11 767
17 387
13 544
OURCES EMPRUNT NETTES
3 188
-711
2 246
4 342
4 498
9 892
5 931
RS DETTE (hors CAVC)
60 205
59 495
61 741
66 083
70 580
80 472
86 402
BRE HABITANTS
245 405
245 405
245 405
259 706
259 706
259 706
259 706
2 004
2 005
2006
2007
2008
2009
2010
urs DETTE / REC.REEL.FONCT.
58%
51%
53%
56%
61%
72%
73%
urs DETTE / AUTOFINANC.BRUT
5,30
2,79
3,22
5,51
11,09
11,26
7,52
M51, comptes 64 et 65. En M52, comprend les comptes 65, à l’exception des comptes 653 (indemnités, vacations, frais mission), 654 (pertes sur créances irrécouvrables) et 658 (charges diverses de gestion courante) ; comprend également le compte 674 et le compte
elon les années.
PRODU
DEPEN
DEP
EXC
ANNUI
AUTO
AUT
RECET
INVE
BESO
Capac
PREL
AFFE
EMP
RESS
ENCOU
NOM
enco
enco
[1] En
678, s
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 78 sur 84
ANNEXE 1 :
Situation financière de la Polynésie française : 2004 – 2010
ANNEXE 2 :
Produits de la fiscalité directe 2004-2010
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
731
Impôts st taxes sur le revenu (hors défisc.)
18 482 757 671
16 508 693 459
19 894 291 485
19 905 756 002
22 337 957 909
19 916 182 415
20 391 810 693
73111
Impôt sur le bénéfice des sociétés
8 620 868 230
7 700 301 457
9 130 963 684
9 483 205 620
10 765 320 386
9 523 380 471
10 435 662 831
73112
Crédit dimpôt de défiscalisation locale IS (E/O)
10 250 252 021
8 542 503 763
7 235 059 107
7 443 189 525
7 194 683 644
7 513 447 326
4 907 041 670
73113
Contribution supplémentaire à l'IS
3 830 224 136
3 564 520 776
4 334 422 538
3 882 344 297
4 943 284 936
3 905 021 710
3 374 809 949
73114
Impôt sur les transactions
3 140 647 156
2 859 343 004
3 239 592 862
3 299 295 791
3 438 136 273
3 533 130 391
3 460 186 209
73115
Crédit d'impôt de défiscalisation locale IT (E/O)
984 770 441
1 029 956 979
841 406 348
770 492 248
885 093 392
956 073 455
486 197 718
73116
Impôt sur le revenu des capitaux mobiliers
1 415 017 850
1 117 991 140
1 755 841 023
1 790 159 000
1 680 488 234
1 567 197 644
1 702 590 562
73117
Taxe sur le produit net bancaire
445 975 240
491 568 000
501 126 280
527 886 760
524 803 880
516 709 260
516 401 560
73121
Taxe sur !es activités d'assurance
313 268 834
301 227 914
307 826 177
285 382 740
324 678 117
316 622 243
308 449 269
73122
Taxe s/les excédents de provisions techniques
10 555 480
46 965 820
11 369 656
82 529 667
27 974 261
48 282 361
73123
Impôt forfaitaire sur les sociétés civiles de participation
16 284 667
18 908 999
20 473 966
28 603 997
73124
Impôt sur les plus-values immobilières
44 905 257
46 884 548
39 372 304
51 684 145
43 967 591
32 189 469
22 393 432
73125
Taxe d'urbanisme commercial
119 422 003
162 667 390
449 490
-
-
73126
Retenue a la source des non.résidents
425 886 968
416 301 140
418 758 794
395 475 936
515 390 336
473 483 000
494 430 523
7606
Taxe additionnelle à l'IS
245 964 000
-
-
-
-
732
Droits int. de consommation s/ les véhicules
1 904 390 820
1 905 470 350
2 060 475 350
2 306 210 945
2 227 357 450
1 728 561 200
1 604 191 670
7321
Taxe de mise en circulation
1 904 390 820
1 905 470 350
1 868 125 350
2 031 575 945
1 969 562 450
1 534 531 200
1 422 496 670
7322
Taxe environnement pour le recyclage des véhicules
192 350 000
274 635 000
257 795 000
194 030 000
181 695 000
733
Impôt foncier
967 032 379
1 727 454 618
1 712 951 701
1 573 650 308
1 532 670 516
1 663 242 066
1 802 570 372
731
Impôt foncier sur les propriétés bâties
967 032 379
1 727 454 618
1 712 951 701
1 573 650 308
1 532 670 516
1 663 242 066
1 802 570 372
734
Taxes intérieures sur les bateaux de croisières
52 023 500
68 925 500
380 485 972
242 278 502
152 835 276
115 310 863
479 134 844
7342
Taxe sur les activités de croisière
52 023 500
68 925 500
380 485 972
242 278 502
152 835 276
115 310 863
107 275 467
7341
Redevance de Promotion Touristique
-
-
-
-
371 859 377
738
Autres impôts et taxes directs
617 407 316
3 349 973 085
1 096 972 473
837 538 376
697 266 177
1 218 588 862
2 040 630 029
7381
Taxes sur les licences de débits de boissons
39 375 320
39 348 825
39 301 775
37 995 658
40 180 925
40 840 279
39 947 400
7383
Taxe d'apprentissage
157 620 382
158 826 643
164 592 721
176 235 931
182 119 550
181 715 684
184 615 870
7387
Amendes et pénalités - Contributions
418 107 656
3 151 733 561
893 077 977
623 306 787
474 965 702
996 032 899
1 816 066 759
762
Patentes
2 303 958
64 056
-
-
-
-
-
22 023 611 686
23 560 517 012
25 145 176 981
24 865 434 133
26 948 087 328
24 641 885 406
26 318 337 608
88 626
93 680
98 108
95 710
103 368
94 522
98 571
Fiscalité directe par habitant
Produits de la fiscalité directe (hors défisc.)
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 79 sur 84
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Collectivité de la Polynésie Française – Finances
Séance du 22 décembre 2011 - page 80 sur 84
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
711
Taxe sur la valeur ajoutée
38 939 997 958
41 154 701 090
41 824 746 781
43 339 701 567
43 562 943 552
39 470 745 863
38 289 976 979
7111
Taxe sur la valeur ajoutée à l'importation
19 192 204 520
20 770 796 551
20 356 591 317
21 161 534 819
22 113 379 162
18 201 339 798
18 048 184 359
7112
Taxe sur la valeur ajoutée régime intérieur
19 747 793 438
20 383 904 539
21 468 155 464
22 178 166 748
21 449 564 390
21 269 406 065
20 241 792 620
712
Droits à l'limportation
24 308 756 927
26 818 626 995
26 971 889 850
26 805 738 688
26 314 036 098
22 472 611 913
20 985 299 098
71211
Taxe de consommation sur les hydrocarbures
3 511 247 715
3 657 096 673
3 482 763 770
3 521 124 798
3 501 343 469
3 513 176 659
3 531 191 215
71212
Taxe intérieure produits pétroliers
1 328 466 794
1 849 001 681
1 885 236 220
234 978 911
187 682 408
149 301 797
166 081 927
71213
Taxe spécifique except/ certains carburants
1 026 121 285
1 063 304 830
1 023 609 831
1 065 562 104
1 055 164 148
1 039 708 977
1 041 619 844
71221
Taxe supplémentaire de solidarité ad valorem
0
0
0
23 002 198
23 437 472
24 028 116
25 468 047
71222
Droit de consommation sur les autres produits
1 340 342 456
1 608 008 925
1 190 117 510
1 329 843 051
1 428 350 925
795 090 798
0
71223
Taxe spécifique sur consommation boissons
viniques
0
0
0
292 004 476
0
0
128 698 782
71224
Taxe de consommation s/autres boissons
alcoolisées
0
0
0
53 985 976
0
0
25 154 466
71225
Taxe pour le développement du sport et de la jeun.
0
0
0
0
0
172 779 813
71226
Droit spécifique spécial sur la bière
0
0
0
0
0
69 112 510
71231
Taxe supplémentaire de solidarité spécifique
82 110 292
70 295 754
65 953 998
45 558 788
46 287 716
43 749 176
41 435 784
71232
Droits de consommation tabac
3 077 768 672
3 311 159 380
3 182 446 034
3 320 556 346
3 273 305 258
2 018 775 290
0
71241
Taxe de consommation pour la prévention
0
0
193 579 752
70 631 852
0
0
215 946 799
71251
Taxe spécifique grands travaux et routes
0
0
798 680 954
1 154 180 681
1 138 880 073
836 775 147
1 144 703 059
71261
Droits de douane
4 696 161 339
5 556 525 650
5 585 890 650
5 666 987 440
5 772 019 548
4 934 759 706
5 060 404 358
71262
Taxe pour l'environnement, l'agriculture et la pêche
2 572 144 529
2 742 451 415
2 656 533 573
2 715 912 088
2 843 281 983
2 421 113 679
2 484 584 529
71263
Taxe de statistique
203 549 790
208 615 004
200 938 153
206 395 847
205 950 221
181 877 442
76 042 800
71271
Taxe forfaitaire postale
48 706 990
58 260 591
59 605 961
29 556 020
25 728 102
23 406 156
35 241 564
71272
Taxe forfaitaire voyageurs
11 885 249
11 499 939
19 629 359
67 015 470
66 319 064
58 896 327
58 390 860
71273
Taxe forfaitairelmarchandises vendues aux
enchères
1 050 981
0
0
11 847 214
187 139
0
0
71281
Taxe de développement local
1 980 592 109
2 187 026 712
2 037 921 202
1 941 863 515
1 970 731 880
1 623 332 451
1 659 986 257
71282
Versement forfaitaire CEA-CEP
4 425 589 145
4 495 380 441
4 588 982 883
4 646 868 603
4 775 366 692
4 808 620 192
4 857 474 097
71284
Taxe de consommation s/ tabacs & alcools importés
0
0
0
407 863 310
0
0
190 982 387
75010
Taxe sur l'audiovisuel
3 019 581
0
0
0
0
0
0
713
Droits intérieurs de.consommatIon
.
2 880 090 283
2 875 104 196
3 644 232 042
3 921 891 182
3 973 789 128
3 445 556 745
2 661 532 825
71311
Produits du cru
512 588 045
525 964 886
554 488 061
541 203 620
608 150 979
529 964 419
0
71321
Taxe sur la production de boissons alcoolisées et
produits sucrés
0
0
702 258 953
1 130 481 117
1 130 256 802
797 591 322
351 416 376
71322
Taxe sur la production de boissons alcoolisées
0
0
0
0
0
0
16 800 100
71381
Taxe sur les conventions d'assurance
1 033 100 948
1 070 319 785
1 115 772 931
1 176 413 257
1 172 876 798
1 152 416 735
1 204 963 038
71382
Taxe sur la publicité
287 261 490
195 813 378
165 117 731
185 145 268
155 299 074
154 371 636
140 941 039
71384
Taxe sur les jeux
1 047 133 320
1 083 006 147
1 106 594 366
888 647 920
907 205 475
811 212 633
779 909 962
71385
Taxe sur l'énergie électrique
0
0
0
0
0
0
167 502 310
7512
Droit spécifique spécial sur la bière
6 480
0
0
0
0
0
0
714
Droits à l'exportation
1 113 876 954
1 153 306 401
1 004 293 398
942 404 912
370 257 802
33 032 600
484 652 270
7141
Droit spécifique sur les perles exportées
1 113 876 954
1 153 306 401
1 004 293 398
942 404 912
370 257 802
33 032 600
484 652 270
715
Droit de timbres et d'enregistrement-
3 747 346 396
3 388 326 472
3 345 281 795
3 904 160 974
3 542 093 967
3 535 715 557
3 222 926 413
7151
Droits d'enregistrement
3 053 679 143
2 801 192 768
2 850 495 712
3 355 084 036
3 007 575 407
3 001 463 664
2 797 148 208
7152
Droits de timbre et visa
617 976 150
492 134 800
383 021 300
463 201 400
463 796 800
460 023 850
358 002 950
7153
Taxe hypothécaire
75 691 103
94 998 904
111 764 783
85 875 538
70 721 760
74 228 043
67 775 255
718
Autres Impôts et taxes-indirects
266 641 310
216 685 014
175 159 757
82 618 869
207 679 053
171 637 288
186 034 831
7181
Amendes et confiscations - Douanes
140 020 753
115 266 150
65 164 000
35 667 833
61 523 399
25 790 410
28 989 898
7182
Amendes et pénalités - DAF
21 066 823
28 668 529
24 820 589
32 843 898
23 628 555
27 270 204
26 452 248
7184
Divers régulansation de droits et taxes supprimés
0
0
7 449 850
302 894
0
0
772
Produits sur exercices antérieurs
105 553 734
72 750 335
85 175 168
6 657 288
122 224 205
118 576 674
130 592 685
71 256 709 828
75 606 750 168
76 965 603 623
78 996 516 192
77 970 799 600
69 129 299 966
65 830 422 416
286 747
300 623
302 419
306 426
298 968
261 868
246 067
Fiscalité indirecte par habitant (Nbre au 01.01.N)
Impôts indirects
Produits de la fiscalité
ANNEXE 3 :
Produits de la fiscalité indirecte 2004 -2010
ANNEXE 4 : Evolution des résultats cumulés de 2004 à 2010 (budget principal)
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ANNEXE 5 :
Dépenses réelles d’investissement hors remboursement de la dette (prévisions budgétaires et réalisations)
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Dépenses réelles d'investissement
(hors remboursement de la dette)
inscrites au budget de la collectivité
78 335 250 715
72 171 872 066
68 211 886 981
71 758 745 466
66 400 241 322
67 080 345 927
57 075 560 233
Dépenses réelles d'investissement
(hors remboursement de la dette)
exécutées
31 482 181 236
31 992 587 758
25 793 926 503
31 798 707 536
30 605 494 538
30 977 123 280
28 688 042 719
taux d'exécution budgétaire
40,19%
44,33%
37,81%
44,31%
46,09%
46,18%
50,26%
ANNEXE 6 :
Répartition de l’encours de la dette de la collectivité de Polynésie
française, par bailleurs de fonds
BAILLEURS DE FONDS
En cours au
31 décembre 2010
Groupe DEXIA
35 470 903 463
AGENCE FRANCAISE DEVELOPPEMENT
21 562 088 322
AFD (1
er
guichet - bonifiés)
4 978 375 612
AFD (2
ème
guichet – 7%)
312 852 371
AFD (Guichet unique)
16 270 860 339
Groupe CNCEP + Banque de Tahiti (BDT)
13 202 875 103
BANQUE DE FINANCEMENT ET TRESORERIE - PCTM
6 913 548 132
BANQUE DE POLYNESIE
5 151 354 184
MARCHE OBLIGATAIRE
2 386 634 845
CREDIT LYONNAIS
815 990 457
BEI - FONDS EUROPEEN DE DEVELOPPEMENT
553 290 083
CAISSE DEPOTS ET CONSIGNATIONS
357 031 104
TOTAL GENERAL
90 765 033 913
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ANNEXE 7 :
Tableau récapitulatif du montant des crédits d’impôt imputés de 1996 à
2010
ANNEE du
FINANCEMENT
Somme LEVEE de
FINANCEMENTS
Somme ENVELOPPE
1996
4 520 904 518
2 356 332 057
1997
12 506 707 855
5 637 237 132
1998
11 244 750 689
5 410 119 341
1999
11 777 340 377
4 993 029 169
2000
12 391 997 832
5 307 445 887
2001
18 080 886 744
9 400 543 040
2002
23 810 837 900
12 219 002 372
2003
27 124 630 482
13 368 569 464
2004
16 696 105 774
8 823 202 933
2005
18 540 888 474
9 742 381 345
2006
13 267 231 950
7 203 451 554
2007
13 987 560 115
7 021 788 976
2008
14 416 920 208
7 631 601 993
2009
9 011 940 225
4 634 738 500
2010
8 455 937 307
4 354 225 044
TOTAL
215 834 640 450
108 103 668 807
Cet état a été établi le 24/06/2011, soit postérieurement à l'émission des rôles
principaux d'IS et d'IT.Ces données sont susceptibles d'évoluer encore, mais de
manière assez marginale, pour tenir compte par exemple des imputations s'exerçant
sur des sociétés ayant un exercice ne correspondant pas à l'année civile.
Tableau récapitulatif du montant des crédits d'impôt
imputés de 1996 à 2010.
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