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COUR DES COMPTES
Dépôt du Rapport public annuel devant
l’Assemblée Nationale
22 février 2006
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Allocution de M. Philippe SÉGUIN,
Premier président de la Cour des comptes
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Monsieur le Président,
En application de l’article L 136-1 du code des juridictions
financières, j’ai l’honneur de déposer sur le bureau de l’Assemblée
nationale le rapport public annuel de la Cour des comptes que j’ai remis
ce matin à Monsieur le Président de la République.
Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Commission des finances,
Monsieur le Rapporteur Général,
Monsieur le Président de la Commission des affaires sociales,
Mesdames, messieurs les députés,
C’est la deuxième fois qu’il me revient de vous présenter ce
rapport annuel, dont vous savez qu’il est le fruit d’une sélection
attentive des résultats les plus marquants et les plus significatifs de nos
contrôles
Pour autant, si l’exercice est rituel, il est marqué cette année par
une innovation dont vous saurez apprécier l’importance : les 174 pages
qui constituent sa première partie, sont tout entières consacrées aux
suites données à quelques-unes des plus significatives observations
récentes de la Cour.
Et il en ira de même, désormais, dans tous les rapports annuels.
L’idée n’a, il est vrai, que trop longtemps prévalu que les
observations de la Cour n’étaient pas suivies d’effets, idée bien mal
fondée
à laquelle nous voulons tordre le cou.
La Cour elle-même a toujours systématiquement contrôlé les
conséquences de ses précédentes interventions à l’occasion de ses
contrôles périodiques. Elle n’a pas non plus manqué de revenir dans ses
publications sur les terrains sur lesquels elle avait constaté des
problèmes majeurs.
Les commissions des Finances et des affaires sociales du
Parlement, soit par les rapports qu’elles demandent à la Cour, soit par
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le biais des travaux de leurs missions d’évaluation et de contrôle, ont
elles-mêmes contribué à donner plus d’attention à ces suites.
Reste qu’il manquait un moyen de procéder à une appréciation
d’ensemble.
Ce n’est pas au demeurant
un problème nouveau.
En 1973, déjà, une commission avait été chargée par le
gouvernement de procéder à un bilan régulier de ces suites. Son échec,
rapidement constaté, avait conduit un autre gouvernement à souhaiter
constituer un comité interministériel sur ce même sujet ; force est de
constater qu’il n’a jamais été réuni.
Aujourd’hui, ces suites demeurent donc largement ignorées de
l’opinion publique, qui peut légitimement en conclure qu’il n’y en a
pas.
Aussi la Cour a-t-elle décidé de s’organiser elle-même pour
effectuer désormais un suivi systématique de l’impact de ses critiques
et recommandations les plus importantes. Cette démarche n’est pas
anodine, puisqu’il ne s’agira pas seulement d’informer sur les suites,
mais aussi et, surtout, - on l’aura compris - de veiller à ce qu’il y en ait.
Nous programmerons ainsi, chaque année, des contrôles sur les suites
qui auront été données aux insertions et aux rapports publics
thématiques antérieurs et ceci dans un délai relativement bref après la
parution. Les réponses des organismes et services concernés seront,
elles aussi, publiées avec les constats de la Cour.
C’est donc un réel droit de suite que nous commençons à mettre
en oeuvre dans ce rapport.
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Nous sommes donc revenus cette année sur 16 contrôles
antérieurs de natures et d’ampleurs diverses.
Nous avons ainsi pu constater que la Cour a généralement été
suivie
lorsqu’elle
a
dénoncé
des
irrégularités
ou
des
dysfonctionnements majeurs : la gestion de la préfecture de police ou
certains contrats de France-Télévisions en sont de bons exemples ; vous
en trouverez le détail dès les premières pages du rapport.
En revanche, d’autres insertions comme celle sur le contrôle de
la navigation aérienne offrent l’illustration des résistances qui peuvent
se faire jour lorsque nous préconisons des réformes concernant
l’organisation du temps de travail, le statut des personnels ou leur
régime indemnitaire.
Résistances que l’on a également retrouvées dans
le domaine de l’immobilier à l’occasion du contrôle de la gestion du
patrimoine au Ministère de la culture.
L’ensemble des observations témoignent néanmoins du sérieux
avec lequel les services ont su prendre nos recommandations ; je ne
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mettrai en exergue que celles qui font suite au rapport thématique sur
l’accueil des immigrants et l’intégration des populations issues de
l’immigration, publié en 2004. La Cour a noté que des textes législatifs
et réglementaires avaient été publiés, des actions entreprises, des
réorganisations engagées, allant dans le sens de plusieurs de ses
préconisations. Vous en trouverez le détail dans le rapport. Mais la
Cour a remarqué aussi que la question centrale posée par son rapport,
qui soulignait les effets négatifs de la concentration géographique,
n’avait pas encore été réellement abordée.
***
Vous trouverez par ailleurs dans ce rapport des
insertions plus
classiques. Seize, là encore. Elles vous offrent, comme à l’accoutumée,
un reflet de la diversité et de l’étendue du champ d’intervention de la
juridiction.
Nombre d’entre elles portent sur des aspects très concrets de la
vie de nos concitoyens :
- la prime pour l’emploi, qui concerne aujourd’hui un foyer
fiscal sur quatre, dont nous avons constaté les effets limités en termes
de redistribution des revenus et les conséquences incertaines en termes
de retour à l’emploi ;
- la participation des employeurs à l’effort de construction, le
fameux «1% logement ». La Cour ne pouvait que constater à cet égard
le désengagement de l’Etat de son rôle de tutelle sur les gestionnaires
des fonds et l’absence d’évaluation des différents dispositifs de
financement de plus en plus nombreux mais mal ciblés ;
- on retrouve d’ailleurs de mêmes problèmes de ciblage avec
l’Agence nationale des chèques-vacances qui s’écarte de ses missions
initiales en attribuant désormais très -et sans doute trop- largement les
chèques vacances et dont la gestion appelle par ailleurs des critiques
sévères ;
- autre sujet d’intérêt immédiat pour les citoyens : la
périnatalité. Nous constatons dans ce domaine que la mise aux normes
des maternités en ce qui concerne notamment les taux d’encadrement
ou l’activité minimum est lente et difficile ; ceci contribue sans doute à
expliquer que nos indicateurs de mortalité maternelle et infantile soient
plus mauvais que dans beaucoup de pays comparables à la France ;
- une insertion est par ailleurs consacrée au retard pris par nos
bibliothèques universitaires sur leurs voisines européennes avec par
exemple un budget d’acquisition près de 3 fois inférieur à celui des
bibliothèques allemandes. A l’heure de l’harmonisation des cursus
européens,
il
devient
urgent
de
repenser
l’organisation
des
bibliothèques sur la base d’une meilleure évaluation des besoins et
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d’une mise en réseau accrue, qui présenterait l’avantage de beaucoup
mieux mobiliser leurs moyens ;
- nous avons également contrôlé la formation des travailleurs
sociaux. La Cour a constaté à cette occasion de graves lacunes de
pilotage : dispersion de l’offre de formation, absence de suivi des
financements publics, pour, au bout du compte, un nombre de diplômés
insuffisant face à des besoins fortement croissants ;
la décentralisation,
certes, peut être une opportunité pour dynamiser cette politique ; il n’en
demeure pas moins que, dans ce domaine comme dans d’autres, il
subsiste de fortes imbrications de compétences étatiques et régionales
qui vont compliquer l’exercice des responsabilités et exiger un effort
soutenu de coordination.
Comme chaque année, nous nous sommes également penchés
sur certains aspects de la fonction publique :
- la couverture des accidents du travail et des maladies
professionnelles de plus de cinq millions de fonctionnaires, tout
d’abord. Il s’agit de régimes spécifiques,
pas aussi favorables pourtant
que l’on pourrait le croire a priori. Les procédures sont en effet lourdes
et lentes, le système souvent engorgé. La Cour recommande d’ailleurs
un rapprochement de ces régimes avec le régime général ;
- sont analysées en second lieu les fortes spécificités du système
de retraite des militaires : même après la réforme de 2003 qui avait
pourtant l’ambition d’inciter les agents publics à prolonger leur
carrière, les militaires peuvent continuer à combiner des départs
précoces avec des taux de remplacement élevés. La Cour recommande
de recourir davantage aux emplois civils lorsque cela est possible et de
procéder à un réexamen attentif de ces régimes afin d’éviter que le
poids des retraites ne vienne constituer une charge financière trop
lourde pour le budget de la Défense.
Vous verrez que la Cour poursuit par ailleurs son examen des
modes de fonctionnement des diverses administrations. Sont publiés
cette année les résultats de ces investigations sur trois institutions ou
organismes qui partagent - est-ce le hasard des contrôles ? -, la
caractéristique d’oeuvrer hors du territoire métropolitain :
- le ministère de l’Outre-Mer tout d’abord : celui-ci, faute
d’avoir opéré un choix clair entre une logique de mission et une logique
de gestion, ne garantit ni une coordination interministérielle suffisante
ni une bonne évaluation des actions en faveur de l’outre-mer. Il est à ce
titre symptomatique que le ministère peine à renseigner les indicateurs
de performance qu’il a lui-même définis dans le cadre de la LOLF ;
- la gestion du territoire des Terres australes et antartiques
françaises ne bénéficie pas d’un cadre suffisamment clair. Elle ne peut
ainsi éviter ni la dégradation de sa situation financière, ni les doublons
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avec l’Institut Paul-Emile Victor, ni quelques dérapages. Les conditions
d’utilisation du Marion Dufresne II auxquelles je vous renvoie en sont
l’illustration.
-
dernier
organisme
contrôlé
et
oeuvrant
en
Afrique
essentiellement : l’association des volontaires pour le progrès est
devenu un opérateur de l’Etat à part entière. Pourtant, son
positionnement n’est toujours pas clair aux yeux de la Cour et son coût
particulièrement élevé, surtout en regard d’une activité en déclin,
impose pour le moins un recadrage.
*
Cette présentation serait incomplète si je n’évoquais pas les
contrôles d’entreprises publiques. La Cour consacre cette année des
développements à Radio-France : là encore, elle met en avant les
risques que font peser sur la santé financière de l’entreprise des charges
de personnel en croissance continue tandis que se profilent des
investissements lourds pour la rénovation et le désamiantage du
bâtiment.
*
Comme vous le savez, ce rapport annuel est aussi le fruit des
travaux des chambres régionales et le chapitre consacré au secteur local
est toujours l’occasion d’évoquer des problèmes très divers de la vie et
de la gestion locales.
- Cette année nous abordons le cas d’une commune dont les
quelques succès en termes d’activité et d’emploi ont été acquis au prix
d’une forte dégradation de la situation financière.
- Nous revenons également sur les modalités de la restauration
collective dans les établissements scolaires et certains établissements
sociaux en Alsace après avoir examiné la situation en Ile de France et
en
Provence-Alpes-Côte-d’Azur.
Nous
mettons
en
exergue
l’insuffisance de contrôle de la prestation des fournisseurs et une
mauvaise connaissance des coûts, à l’origine d’aléas regrettables en
matière de tarifs.
- Le rapport décrit aussi un cas de superposition de syndicats de
gestion de l’eau et de l’assainissement, système qui est à l’origine non
seulement d’irrégularités mais aussi d’une certaine opacité dans la
fixation des tarifs.
- Enfin, et c’est une illustration de la préoccupation croissante
des juridictions financières au regard de la qualité des états financiers
publics, le rapport contient un exemple des défauts que peut comporter
une comptabilité patrimoniale de collectivité territoriale.
*
J’attire aussi votre attention sur deux insertions de ce rapport
qui présentent des aspects plus méconnus du travail de la Cour.
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-
le premier concerne le commissariat aux comptes de
l’ONU pour lequel nous exerçons un mandat récemment renouvelé.
Il nous a paru intéressant de montrer comment prend corps ce
mandat et surtout, d’illustrer par des exemples concrets la manière
dont l’ONU prenait en charge, après notre intervention, la mise en
oeuvre de nos recommandations ;
-
le second concerne le contrôle des organismes faisant
appel à la générosité publique.
A cette occasion, nous donnons les tout premiers constats que
nous avons effectués sur l’utilisation des dons pour l’Asie du sud-
est suite au raz de marée du 26 décembre 2004. Plus de 300 M€ ont
été collectés en France par les organismes faisant appel à la
générosité publique dont un tiers par la Croix Rouge. Cependant,
selon les premières données obtenues par la Cour pour les trois
premiers trimestres 2005, seul un tiers des fonds collectés aurait été
dépensé et si l’on exclut le comité français de l’Unicef qui transfère
les fonds à son siège, la part des dépenses tombe à moins du quart
de la collecte.
Début 2007, nous serons en mesure de publier les résultats
complets de ces contrôles et de mettre en lumière les conditions
dans lesquelles se sont déroulés les opérations de collecte,
l’affectation des dons et le choix des actions engagées par les
organismes.
Je voudrais enfin vous informer que le rapport d’activité annuel
de la Cour de discipline budgétaire et financière, juridiction
administrative spécialisée dans la répression des irrégularités en
matière de finances publiques, et institution associée à la Cour des
comptes, fait cette année l’objet d’une publication séparée et annexée.
Cette nouvelle formule du rapport de la Cour de discipline
budgétaire et financière propose désormais une présentation des arrêts
enrichie de références jurisprudentielles et doctrinales. Mais elle met
surtout l’accent sur les réformes que connaît cette juridiction. Ainsi le
décret du 17 juin 2005 a permis de premières améliorations, en
renforçant ses moyens d’instruction et de jugement. Cette réforme
réglementaire est doublée d’améliorations du fonctionnement interne à
la Cour. L’objectif doit être de permettre à la Cour de discipline
budgétaire et financière de jouer pleinement le rôle qui lui a été confié
par le législateur.
Il serait souhaitable que ces premières réformes soient
prolongées et que la CDBF voie son rôle renforcé, en raison des marges
de liberté accrues conférées aux gestionnaires dans le cadre de la
modernisation de la gestion publique, et en particulier dans le cadre de
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la LOLF. En effet, la liberté ne saurait aller sans responsabilité, surtout
lorsqu’il s’agit d’argent public. Et l’opinion publique supporte de
moins en moins que des irrégularités dans la gestion publique restent
sans sanction.
Par ailleurs, un groupe de travail va être mis en place
conjointement avec les autorités judiciaires pour réfléchir à une
meilleure articulation entre la CDBF et les juridictions pénales. Car il
est évident que la CDBF peut contribuer à limiter le risque de
pénalisation de l’action publique, à condition que son fonctionnement
soit amélioré, que ses infractions soient adaptées aux évolutions de la
gestion publique et que le champ de ses justiciables soit étendu.
***
Comme je vous l’annonçais tout à l’heure, ce rapport annuel ne
résume pas, bien sûr, l’importante activité de contrôle de la Cour, et il
convient de le resituer dans le contexte de l’ensemble de nos travaux.
Je dois ainsi rappeler que, depuis le dernier rapport annuel, nous
avons publié six rapports thématiques dont quatre ont été élaborés en
lien avec les CRC. Je voudrais revenir brièvement sur chacun d’eux car
ils apportent tous à mon sens des éléments de diagnostic nouveaux que
je crois utiles à la représentation nationale.
- un rapport sur la Banque de France dans lequel nous
soulignons le surdimensionnement de son réseau et de ses moyens au
regard de ses voisines européennes ainsi que le risque d’une
dégradation continue de la situation financière de la banque qui a connu
son premier déficit en 2003.
- une publication sur les transports publics urbains dans laquelle
nous soulignons notamment la nécessité d’une meilleure maîtrise des
coûts des opérateurs de transport privés.
- Nous avons par ailleurs publié un rapport sur la gestion de la
recherche dans les universités dans lequel nous insistons sur le besoin
de rationaliser l’évaluation et de mieux cibler les financements.
- Dans le domaine social et médico-social, nous avons analysé
les modalités de prise en charge des personnes âgées dépendantes et
déploré à cette occasion qu’on n’ait pas choisi entre une gestion par la
Sécurité sociale et une gestion décentralisée, ce qui obère fortement la
lisibilité du système et les possibilités de suivi et de contrôle.
-
Nous
avons
également
publié
un
rapport
sur
l’intercommunalité dans lequel nous recommandons clairement une
simplification de la carte administrative et une fusion de nombre
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d’établissements publics intercommunaux. Nous soulignons également
la nécessité de revoir le partage des ressources fiscales entre
intercommunalité et communes membres, en fonction de la réalité des
charges transférées.
- Plus récemment encore, nous avons présenté un rapport sur la
gestion des prisons. La Cour y constate notamment une diminution du
nombre des mesures alternatives à l’incarcération comme les travaux
d’intérêt
général
ou
le
bracelet
électronique
du
fait
d’un
accompagnement social insuffisant. Enfin, alors que le recours à des
prestataires privés pour nombre de fonctions (je pense notamment à
l’hygiène et à la restauration) se développe, force est de constater que
l’Etat est dans l’incapacité de s’assurer que ces modes de gestion sont
moins coûteux et plus efficaces qu’une gestion publique.
*
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je ne peux devant vous oublier les travaux de plus en plus
importants que nous effectuons dans le cadre de notre mission
d’assistance au Parlement.
Je pense ainsi aux deux rapports que nous avons remis cette
année à la commission des finances de votre Assemblée au titre de
l’article 58-2 consacrés respectivement à l’efficacité et l’efficience des
établissements d’enseignement supérieur et à la gestion et l’utilisation
des aides au transport aérien pour l’outre-mer, et au rapport remis au
titre de l’article 58-6 sur les décrets d’avance . Je ne m’attarderai pas
sur ces travaux qui vous sont déjà familiers.
Le concours qui vous est prêté par la Cour ne s’arrête
pas là, et
il faut encore citer notre participation aux missions d’évaluation et de
contrôle qu’ont mises en place la commission des finances et la
commission des affaires sociales.
L’importance croissante de ces diverses collaborations m’a
d’ailleurs conduit à demander à un magistrat de la Cour d’assurer des
fonctions de contact permanent avec votre Assemblée.
Je profite enfin de ma présence devant vous pour vous assurer
que la Cour sera en mesure en 2007 d’honorer les divers rendez-vous
que lui fixent les lois organiques sur les lois de finances.
Des rendez-vous dont je ne suis d’ailleurs pas assuré du bon
positionnement, puisqu’il est désormais clair qu’ils vont entrer en
collision avec d’autres rendez-vous, de nature politique ceux-là.
Les temps forts prévus fin mai-début juin vont ainsi coïncider
avec la campagne pour les élections législatives. Les problèmes de tous
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ordres que cela pose conduisent à s’interroger sur la pertinence d’un
éventuel report de l’An 1 de pleine application de la LOLF. Rien ne
serait pire, en effet, qu’un échec de cette toute première expérience.
Sans attendre cette échéance, quelle qu’elle soit, vous trouverez
dans le rapport sur l’exécution budgétaire et les résultats, que nous vous
remettrons normalement en mai prochain, des éléments sur les
missions, les programmes, les indicateurs de performance et sur les
conditions de mise en oeuvre de la LOLF dans les ministères, avant que
nous soyons en mesure dès 2007 de nous prononcer sur les premiers
rapports annuels de performance.
Dans le rapport sur les comptes, et même si la certification
proprement dite n’interviendra au plus tôt qu’en 2007, nous pourrons
nous prononcer dès cette année sur la qualité du référentiel comptable,
les procédures actuelles de comptabilisation et les dispositifs de
contrôle interne, autant d’éléments déterminants pour la certification à
venir.
Pour faire face à ces diverses missions, qui représentent autant
de responsabilités que de charges nouvelles, nous avons d’une part
réalloué des moyens et d’autre part recruté des auditeurs spécialisés
grâce aux emplois supplémentaires qui nous ont été accordés. Ceci
permettra d’assurer la certification des comptes de l’Etat.
S’agissant de la certification des comptes de la sécurité sociale
tout est différent et la vérité est que l’état actuel de nos forces, s’il
n’évoluait pas, ne nous permettrait pas d’assurer correctement cette
mission supplémentaire. Des moyens nouveaux ne manqueront pas,
j’en suis persuadé, de nous permettre de relever ce défi nouveau imposé
par les textes - comme ce fut le cas pour la certification des comptes de
l’Etat -
Je soulignerai enfin que pour vous apporter l’information que
vous êtes en droit d’attendre en matière budgétaire, notre rapport
« préliminaire » deviendra un véritable rapport annuel sur la situation
des finances publiques et leurs perspectives. Tout nous incite à réaliser
cette mutation et en particulier l’urgence de la réaction nécessaire face
à l’évolution de notre situation budgétaire.
Ce souci n’est pas totalement nouveau. Il y a cinq ans déjà,
notre rapport sur l’exécution budgétaire soulignait l’inquiétant
gonflement de la dette. L’an dernier, le premier rapport préliminaire
que nous rendions public rappelait que la dette publique représentait
l’équivalent de deux ans de salaire de l’ensemble des Français actifs,
situation d’autant plus problématique que le déficit servait à financer
des dépenses courantes.
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Alors que le déficit voté pour 2006 dépasse celui de 2005, il me
semble plus que jamais utile de rappeler ces quelques observations et
nous voulons voir dans les rapports et annonces récentes un écho aux
précédentes analyses de la Cour.
*
Tels sont, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les
députés, les quelques éléments du rapport que je souhaitais mettre en
exergue.
Tandis que la préparation du projet de loi de finances pour 2007
commence, j’espère que nos travaux,
le rapport public annuel,
aujourd’hui, les rapports thématiques à venir, les rapports sur la loi de
finances de l’Etat en mai-juin et en septembre sur la loi de financement
de la sécurité sociale vous apporteront des analyses et une expertise
utiles et éclaireront vos débats.
*
Les années qui viennent seront l’occasion de nouveaux
développements et approfondissements de relations de votre Assemblée
et de la Cour. Soyez assuré, dans cette perspective, de la volonté de
notre juridiction de vous apporter toute l’assistance que, très
légitimement, vous attendez d’elle.