Un droit dérogatoire, complexe et mal appliqué
Ainsi, le droit des agents non-titulaires parisiens se caractérise par une double complexité. La ville bénéficie tout d’abord de nombreuses dérogations au droit commun de la fonction publique territoriale aménagées par le décret du 16 mai 1994. De surcroit, elle fonde ses recrutements sur des textes parfois antérieurs à l’entrée en vigueur des statuts de la fonction publique de 1983 et 1984. Il en résulte qu’une partie des recrutements s’appuie sur un corpus juridique complexe, ne répondant plus, pour certains textes, à l’état du droit. Si la Ville a adopté en 2014 un nouveau dispositif fondé sur les délibérations « emploi » pour recruter ses agents non-titulaires, celui-ci ne répond pas aux prescriptions du statut en matière d’ouverture de postes, de définition des exigences des emplois proposés et de fixation des rémunérations. Ce nouveau dispositif n’a pas non plus formellement remplacé les anciennes mesures mises en œuvre par la Ville augmentant encore la complexité et les incohérences des règles régissant le statut de agents non-titulaires.
Par ailleurs, le contrôle a révélé que les pratiques de recrutement et de suivi des carrières des agents non-titulaires étaient contraires au droit propre à Paris, droit pourtant déjà dérogatoire. Il ressort en effet des cas analysés par la chambre que la ville s’est fréquemment affranchie des règles régissant la publication des vacances de postes, les rémunérations ou les créations d’emplois.
La situation exorbitante des collaborateurs de cabinet
Le décret du 16 décembre 1987 relatif aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ne s’applique pas à la ville de Paris. Ainsi, le conseil de Paris a pu autoriser un plafond de 135 collaborateurs de cabinet, ce plafond étant trois fois plus élevé que ce que retient le droit commun des collectivités territoriales (45 au maximum, au regard de la situation parisienne). Malgré cette exception parisienne, ce plafond de 135, pourtant voté en 2014, a été nettement dépassé. 165 collaborateurs de cabinet ont ainsi pu être recensés en se fondant seulement sur la réalité de leurs fonctions et en excluant évidemment toutes les fonctions support (notamment 56 secrétaires et assistantes).
En revanche, les règles de droit commun limitent à 81 le nombre des collaborateurs de cabinet des 20 maires d’arrondissement. Elles ont également été méconnues, la ville comptant, fin 2015, 229 collaborateurs de cabinet en poste dans les mairies d’arrondissement soit 148 de plus que le nombre prévu par la règlementation.
Les dépassements constatés posent la question de l’organisation de la gouvernance et des services de la Ville mais ont également une incidence directe sur les coûts globaux de la fonction d’appui aux élus. En effet, le total des rémunérations brutes des collaborateurs de cabinet atteignait presque 21 millions d’euros fin 2015 dont 3,1 M€ (estimation) au titre du surcoût budgétaire relatif aux dépassements du plafond légal dans les mairies d’arrondissement.
La résorption de la précarité de l’emploi
La Ville a mis en œuvre les dispositions de la loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et, dans ce cadre, a ainsi pu transformer 1000 contrats en contrats à durée indéterminée et titulariser 861 agents.
Pour autant, les agents à temps non‑complet restent globalement dans des situations de précarité. Celles-ci sont illustrées notamment par l’ancienneté dans les emplois, les quotités de travail ou les rémunérations. Les actions menées pour améliorer leur situation peuvent encore être amplifiées notamment en les pilotant en fonction d’objectifs et en les suivant par des indicateurs.
De même, la situation des agents recrutés dans le cadre de contrats d’insertion mérite également une attention particulière car les taux d’abandon et de retour à l’emploi en relativisent sérieusement les résultats.