SYNTHÈSE
La société d’économie mixte locale de construction et de gestion de Midi-Pyrénées (COGEMIP) a été créée le 20 septembre 1989 par le conseil régional afin d’assurer, sous forme de mandats, la maîtrise d’ouvrage déléguée d’opérations d’investissement relatives aux lycées. La région est actionnaire majoritaire de cette société anonyme (SA) depuis sa création.
Les activités de la SEM ont connu une baisse considérable à compter de 2006, année où la société a été mise en concurrence pour l’attribution des mandats, puis à nouveau à partir de 2011, avec la création de la société publique locale Midi-Pyrénées Construction (SPL MPC) dont l’objet est la réalisation d’opérations de construction et de maintenance pour le compte de ses actionnaires.
La COGEMIP s’est alors efforcée de diversifier et d’étendre son champ d’action en recherchant des contrats vers d’autres donneurs d’ordre pour l’étude, la construction ou l’aménagement des équipements publics et privés. La réponse à des appels d’offres émanant de la région et d’autres collectivités, soumis désormais à la concurrence, intervient dans le cadre de mandats ou de prestations de services, mais le volume de ces activités reste modeste et insuffisant. La SEM essaie en outre de développer des opérations en propre dans le secteur des énergies renouvelables en participant au capital de sociétés privées spécialisées.
- Les liens entre la SEM COGEMIP et la SPL MPC
Si la COGEMIP est distincte de la SPL, les deux sociétés ont un même objectif partagé d’aider au développement des territoires de Midi-Pyrénées. Les interactions entre les deux sociétés sont fortes : elles occupent les mêmes locaux, sont dirigées par la même présidente directrice générale (PDG), assistée du même directeur, auquel sont adjoints le même directeur opérationnel et le même directeur administratif.
Les fonctions transversales communes aux deux structures (gestion administrative, comptable, juridique, ressources humaines, informatique) sont assurées par un groupement d’intérêt économique (GIE) constitué des deux sociétés dénommé « EPL régionales Midi-Pyrénées », créé au mois d’avril 2012.
Enfin une unité économique et sociale (UES) a été créée la même année entre les trois entités (SEM-SPL-GIE) afin de favoriser l’égalité de traitement entre les collaborateurs, quelle que soit la structure de rattachement, et afin d’assurer l’organisation de la représentation du personnel.
Ce montage juridique, bien qu’innovant, rend difficile la comparaison entre la situation financière de la COGEMIP en 2010 et celle de l’UES en 2014, alors que leur activité est in fine quasi équivalente.
- La vie sociale, l’exercice des missions statutaires et la gouvernance
La PDG intervient peu dans la direction quotidienne des sociétés, de fait assurée par le directeur et le directeur adjoint administratif, qui bénéficient de délégations de pouvoir très larges et quasi exhaustives.
Les différentes instances respectent leurs obligations quant à la fréquence des réunions et la production des documents obligatoires. À noter toutefois que les procès-verbaux des assemblées générales ne comportent pas le résumé des débats précédant l’adoption des résolutions des assemblées générales. Les rapports de gestion contiennent une information utile aux actionnaires mais ne présentent pas les effectifs de manière homogène avec celles des deux autres structures de l’UES. Ils ne permettent pas de connaitre simplement l’état des contrats gérés par la SEM et ne donnent pas d’informations suffisantes sur les filiales. Enfin, certaines conventions, qui ont été portées à la connaissance des instances décisionnelles, ont pu suivre un circuit d’approbation incomplet.
La vie sociale de la société se tient au niveau du conseil d’administration et non de l’assemblée générale.
- L’activité
La COGEMIP gérait au 31 décembre 2014 un portefeuille de 20 opérations dont deux en phase d’achèvement. À cette liste s’ajoute le soutien administratif à la SAS MPEI et à la SAS « Stade énergie » permettant à la SEM de réaliser globalement 390 k€ de recettes. Au regard du développement pris par ce dernier type d’activité, la SEM doit être vigilante à ce que la prise de participation dans le capital de sociétés ne devienne pas son activité principale, ce qui serait contraire à son objet social. Parmi ces opérations, celles de prises de participation en capital dans le domaine du photovoltaïque génèrent peu de recettes et peuvent constituer, en raison de l’endettement important des sociétés filiales, un risque indirect pour la COGEMIP, actionnaire principal voire exclusif.
Les recettes générées par les mandats obtenus par la SEM avant 2006 sont désormais déclinantes. Plus de la moitié des opérations ne généreront plus de recettes à partir de 2015.
La part de rémunération apportée par la région, qui reste le principal client de la COGEMIP, a baissé fortement en 2014, la SEM ayant liquidé un nombre important d’opérations. Pour autant, la part de la rémunération des autres clients augmente, mais ne progresse pas significativement en montant par rapport aux autres années. Le taux de rémunération des mandats de la COGEMIP se situe aux alentours de 1,92 % en moyenne (1,94 % en 2012), en baisse de 2,5 points depuis la fin des mandats « in house ».
Le montant des avances versées est chaque année largement supérieur à celui des dépenses réalisées pour la région. Alors que sur la période sous revue 153,4 M€ de travaux ont été réalisés par la SEM, un total de 181,7 M€ d’avances a été versé par la région, soit un écart de 28,3 M€. Ces excédents de trésorerie sont placés en produits financiers dont découlent des intérêts importants reversés à la région.
Cette pratique n’est pas conforme aux conventions particulières des opérations qui prévoient une réaffectation des intérêts à l’opération avec comme objectif de diminuer le montant des avances demandées postérieurement à la région.
Le choix de maintenir la COGEMIP et de l’orienter vers de nouvelles activités a été fait, mais ces activités restent insuffisantes en nombre et en rémunération pour permettre à la SEM d’atteindre et de conserver un équilibre financier. La société peine à se diversifier et ses opérations en nom propre, relevant du secteur des énergies renouvelables, ne sont pas rentables à court terme. Or à échéance de deux ans, la majorité des mandats « région » de la SEM sera arrivée à terme, de sorte que la viabilité de la COGEMIP n’est plus assurée, passé ce délai.
- Les moyens consacrés à l’activité
La constitution de la SPL MPC et du GIE a permis de reprendre intégralement les activités gérées auparavant par la COGEMIP, ainsi qu’une part importante de son personnel.
Au niveau global de l’UES, l’effectif moyen a augmenté de 4,6 ETP sur la période 2010 à 2014 et la masse salariale a progressé de 4,2 % en moyenne annuelle.
Les salariés bénéficient d’un accord d’entreprise avantageux qui s’appuie sur la convention nationale SYNTEC, tout en l’améliorant. Ils perçoivent également une prime contractuelle qui n’a pas été prévue par le règlement de gestion et dont les montants ne sont pas présentés en conseil d’administration. Les salaires du personnel ont été revalorisés deux années de suite de manière importante en dépit de la situation financière détériorée de la SEM, qui réalise des pertes. Le coût moyen, hors ces frais, a augmenté de 9,6 % entre 2010 et 2014 pour le personnel de l’UES, et de 11,8 % en les y incluant. Le coût moyen, hors ces frais, a augmenté de 9,6 % entre 2010 et 2014 pour le personnel de l’UES, et de 11,8 % en les y incluant.
La productivité de l’UES est pour autant inférieure à celle constatée dans des structures comparables.
- La situation financière dégradée de la COGEMIP
Le tarissement de l’activité historique de la SEM avec la région, destinée à quasiment disparaitre à l’échéance de deux ans, a des répercussions très importantes sur son activité, et en conséquence sur sa situation financière. La diversification engagée n’a pas suffi, à ce jour, pour rétablir une situation financière viable.
La COGEMIP doit faire face à une concurrence importante des autres SEM et SPL sur leurs territoires respectifs (OPPIDEA et la SPL EUROPOLIA sur la communauté urbaine du grand Toulouse, la SEM 81 sur le Tarn, la SEMATEG sur le Tarn et Garonne et les départements limitrophes, la SEM 12 sur l’Aveyron, la SEPA sur une partie des Hautes-Pyrénées, la CACG sur la région Midi-Pyrénées) ainsi qu’à celles des cabinets privés d’assistance à maîtrise d’ouvrages.
Cette situation se répercute sur le chiffre d’affaires qui, du fait de la baisse de l’activité, a connu une diminution très conséquente des deux tiers entre 2010 et 2014, plus importante que la baisse des charges d’exploitation de 60 %. Les soldes intermédiaires de gestion mettent aussi en évidence la dégradation de la santé financière de la société. La valeur ajoutée diminue sur tous les exercices, en moyenne de plus de moitié chaque année, s’établissant en 2014 à 136 k€ alors qu’elle s’élevait à 2,5 M€ en 2010. L’excédent brut d’exploitation (EBE), solde caractéristique de rentabilité, demeure déficitaire sur toute la période et à un niveau élevé depuis 2011, malgré des charges de personnel en réduction.
La capacité d’autofinancement (CAF brute) est systématiquement négative à l’exception de l’année 2010, avec un niveau moyen de - 375 k€ sur les cinq exercices. Cette tendance souligne l’incapacité de la société à dégager des marges pour soutenir son investissement ou prendre des participations dans d’autres sociétés sans soutien de la région.
Enfin, le bilan de la COGEMIP a connu une baisse de plus de la moitié de sa valeur (de 52 %) entre 2010 et 2014, traduisant la forte réduction de sa surface financière.
Tous les indicateurs financiers soulignent ainsi la situation financière très dégradée de la SEM.
- La situation financière d’ensemble
Après la création de la SPL MPC et du GIE, un équilibre global, retraité des refacturations, a été obtenu avec 5,488 M€ de chiffre d’affaires et 5,411 M€ de charges d’exploitation en 2012.
Mais depuis, si le montage continue à compenser une partie de la détérioration de la situation financière de la COGEMIP, l’activité n’a pas été suffisante pour assurer l’équilibre financier de l’UES. En effet, la situation financière s’est dégradée depuis 2012. Le chiffre d’affaires de l’UES retraité a baissé de 18 % entre 2012 et 2014, plus rapidement que ses charges (- 11 %), conduisant à un écart défavorable en 2014 entre chiffre d’affaires (4,502 M€) et charges d’exploitation (4,814 M€).
Cette baisse du chiffre d’affaires est toutefois équivalente à la baisse moyenne des chiffres d’affaires des entreprises publiques spécialisées dans l’aménagement entre 2012 et 2013. Les marges de manœuvre antérieures de la COGEMIP étant en voie de disparition avec à court terme l’extinction des reprises sur provisions et des rémunérations sur liquidations d’opérations, et les perspectives d’activité étant alarmantes, les opérations en propre de la SEM ne permettent pas d’envisager une amélioration de ses résultats.
Ainsi et malgré un chiffre d’affaires de la SPL, qui représente à lui seul 79 % du total, fortement soutenu par la région, le montage juridique et financier ayant abouti à la création de la SPL, du GIE et de l’UES n’a pas suffi à rétablir une situation financière globale équilibrée et pérenne.
Le montage mis en place ne semble pas être de nature à pouvoir perdurer sur le long terme et semble dès lors irrémédiablement condamné.
RECOMMANDATIONS
1. Compte tenu de la présence majoritaire d’actionnaire public au capital de la SEM, faire figurer dans les statuts une liste actualisée des actionnaires et du montant de leur participation.
2. S’assurer du respect de la règle de non-cumul des mandats sociaux des administrateurs.
3. Annexer le résumé des débats aux procès-verbaux des assemblées générales pour plus de transparence.
4. Présenter de manière homogène dans les rapports de gestion des trois structures les effectifs moyens permanents et citer la liste exhaustive des opérations gérées par les sociétés, leur nature et leur statut ainsi que la situation financière des filiales.
5. Présenter aux administrateurs pour validation les montants globaux des primes contractuelles et exceptionnelles.
6. Respecter la procédure d’approbation des conventions réglementées par les organes sociaux et régulariser la situation des conventions qui doivent l’être.
7. Revoir les modalités de versement des avances par la région pour en limiter le montant.
8. Mettre fin, conformément aux conventions, à la pratique de reversement à la région des intérêts du placement financier des excédents de trésorerie.