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L’aide alimentaire financée par l’État et les fonds européens

COUR DES COMPTES

L’aide alimentaire peut prendre la forme de distribution de colis, de repas ou d’accès à des denrées à un prix très réduit dans des épiceries sociales. Financée historiquement par les surplus agricoles européens puis les fonds communautaires, aux côtés de subventions de l’État et de la générosité du public, l’aide alimentaire est assurée par l’intermédiaire d’acteurs nationaux que sont la Fédération Française des Banques Alimentaires (FFBA), les Restaurants du cœur, le Secours populaire français, la Croix-Rouge française, ainsi que par un grand nombre de petites structures associatives. L’enquête clarifie le fait que l’aide alimentaire est d’abord déterminée et mise en œuvre par le tissu associatif, et n’est financée que de manière minoritaire par l’État et les fonds européens.

L’aide alimentaire, une offre majoritairement associative soutenue par l’État et les fonds européens

L’enquête sur l’aide alimentaire financée par l’État et les fonds européens (exercices 2019 et suivants) intervient à la suite d’une période marquée par les crises successives du covid et de l’inflation. 
Dans ce contexte, une hausse du recours à l’aide alimentaire a été observée et très médiatisée, ainsi que les difficultés financières induites chez certains de ces acteurs (Restos du cœur). En réponse, les crédits de l’État versés aux associations du secteur ont cru de 172 % entre 2019 et 2023 (passant de 58,7 M€ en 2019 à 160 M€ en 2023). Avec les fonds européens, les financements de l’État contribuent à financer l’offre associative, mais sans être les principaux contributeurs, au regard de ce que représentent les dons en nature et en numéraire (de l’ordre de 540 M€) et les financements des collectivités locales (de l’ordre de 260 M€ par an). Le soutien de l’État à l’aide alimentaire se justifie néanmoins pour deux principales raisons : la persistance de situations de grande détresse malgré la mise en place de prestations monétaires, notamment au regard de situations d’urgence ponctuelles ou de situations transitoires dans l’attente de l’ouverture de droits ; et le fait que les réseaux de distribution assurent, pour des bénéficiaires souvent éloignés des services sociaux, un premier accompagnement vers l’entrée dans un parcours d’insertion. Pour autant, ce sont bien les associations qui définissent, pour chacune d’elles, leur offre en termes d’implantations territoriales, de contenu alimentaire de l’aide distribuée et d’accompagnement des bénéficiaires. L’État accompagne dans les faits un mouvement dont il n’est pas à l’origine. Le montant en forte augmentation des crédits octroyés doit le conduire à mener une réflexion plus approfondie sur les principes et les modalités de son soutien, en généralisant la démarche consistant à affecter chacun de ses financements à une priorité bien identifiée.

Une amélioration du suivi des crédits européens, des crédits européens, des crédits européens et nationaux à calibrer et à répartir de manière plus objective

L’État doit être capable de mieux hiérarchiser celles-ci. En voulant assigner à l’aide alimentaire de multiples objectifs sédimentés, au sein de plans d’actions décidés dans des contextes différents, incluant des considérations sanitaires (équilibre de l’alimentation), environnementales ou agricoles (utilisation d’excédents, aide à la filière nationale), l’État a compliqué sa propre tâche d’orientation de son action et de ses crédits. Il doit en revenir à quelques principes clairs : son soutien à l’aide alimentaire se justifie d’abord pour remédier à des situations de privation, de manière aussi équitable et efficace que possible sur le territoire ; et pour atteindre des populations éloignées des administrations censées leur apporter une réponse (ouverture de droits, accompagnement vers l’insertion), et les inciter à s’en rapprocher. Dès lors, les crédits nationaux et européens qu’il octroie doivent refléter, au premier euro, ces priorités. A contrario, par exemple, il n’était pas légitime d’octroyer des budgets supplémentaires aux associations pour qu’elles améliorent l’équilibre de la nourriture proposée, puisque la loi prévoit déjà que celle-ci doit être équilibrée. Par ailleurs, l’analyse montre que les crédits doivent être répartis entre les acteurs et les territoires de manière plus lisible et plus objective.

Une stratégie d’orientation de l’aide alimentaire à poursuivre et systématiser

L’État doit pour cela s’appuyer sur des outils renouvelés de connaissance de l’offre et de la demande. Une connaissance plus fine des grands réseaux, de leurs capacités réelles à monter en charge, est aussi un prérequis pour éviter de financer excessivement des acteurs qui disposent de ressources conséquentes ou qui ne sont pas en mesure d’engager les crédits octroyés. Confronté à une situation d’urgence et faute d’indicateurs fiables, l’État a peiné à calibrer son soutien aux acteurs de l’aide alimentaire qui a très fortement augmenté. En régime de croisière, il doit se réinterroger sur l’ampleur à lui donner. L’État doit enfin s’interroger sur l’efficacité de ses modes de soutien : la commande centralisée de denrées par Franceagrimer et leur répartition dans les réseaux distributeurs n’a de sens que si les économies d’échelle induites compensent la complexité logistique afférente. Plusieurs pays européens (Espagne, Italie notamment) ont renoncé aux distributions alimentaires au bénéfice d’un chèque alimentaire, et plusieurs collectivités locales l’expérimentent ; cette option doit demeurer ouverte malgré les multiples interrogations qu’elle soulève.

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