Sous le Second Empire, l’État a fait don à la Ville de Paris de ces deux espaces largement boisés à charge pour la Ville de les entretenir et de conserver leur vocation de promenade publique. Ces deux bois sont aujourd'hui des lieux uniques où les parisiens viennent se détendre et pratiquer des activités sportives et de loisirs dans les espaces aménagés. Ces bois comportent également des installations, qui ont été concédés à des propriétaires privés.
Une coopération très perfectible avec les communes riveraines
Si la Ville a signé en 2002 avec les communes et les départements riverains de ces deux bois deux chartes prévoyant la mise en place de « modes de gestion et de gouvernance innovants » et la création de plusieurs comités associant tous les signataires, près de 15 ans après la signature de ces chartes, les objectifs initiaux n’ont pas été atteints.
La chambre recommande donc à la Ville de mettre en place l’observatoire des bois destiné à faciliter l’analyse de l’impact de la gestion sur ces milieux naturels. Elle relève que les différents comités, dont les réunions se tiennent très irrégulièrement et de manière très espacée, n’ont jamais fonctionné selon un mode collaboratif mais qu’ils ont été, tout au plus, des lieux au sein desquels la Ville de Paris délivrait de l’information à ses partenaires publics.
L’initiative de la maire de Paris de relancer la concertation avec les maires des communes riveraines au début de l’année 2016 n’a pas rencontré le succès escompté. Tous les maires des villes riveraines restent sceptiques quant à la volonté de la Ville de vraiment les associer aux réflexions préalables à la mise en œuvre des projets à enjeux pour ces espaces.
Des conventions d’occupation du domaine public et délégations de service public à mieux contrôler et surveiller
Soixante-quatre conventions d’occupation du domaine public et 3 délégations de service public ont été recensées dans les bois de Boulogne (35) et Vincennes (32). Ces concessions intéressent principalement l’exploitation d’installations sportives (23), de restaurants (18) et d’espaces réservés à la culture et aux loisirs. Elles ont rapporté en 2013 près de 28,2 M€ de recettes, soit 11 % de toutes les redevances domaniales perçues par la Ville.
Mais plusieurs exemples montrent que la Ville ne s’est pas donné pas les moyens de vérifier que les engagements pris par les gestionnaires privés choisis après appel à la concurrence étaient respectés.
La plupart des conventions, à l’image de celle de la concession du Polo de Bagatelle attribuée au vu d’une liste de travaux évalués à 14 M€, n’organisent aucun contrôle des investissements prévus. Elles laissent toute latitude au titulaire de les réaliser ou non.
La chambre recommande donc à la Ville de Paris de prévoir systématiquement à l’avenir une clause stipulant que le concessionnaire sera tenu au versement d’une redevance complémentaire égale au montant des travaux non réalisés.
Pour l’attribution des concessions sportives, le premier critère de jugement des offres était la qualité du projet des candidats, appréciée à l’aune de l’engagement du club candidat d’organiser dans ses locaux des écoles municipales des sports (EMS) ou à accueillir des enfants des écoles de Paris.
Or, d’une part, les conventions ne prévoient en général ni obligation de réalisation ni sanction en cas de non réalisation et, d’autre part, une analyse réalisée pour la Ville est venue montrer l’absence d’intérêt qu’il y a à déplacer les élèves sur le lieu des concessions lorsque que le sport proposé est accessible dans les installations sportives de la Ville. La Ville a, d’ailleurs, renoncé à la plupart des stages EMS.
En 1960 l’exploitation du site dit du Tir aux Pigeons avait été confiée à l’Association sportive du Cercle du Bois de Boulogne (ASCBB) par un contrat de concession arrivé à échéance le 31 décembre 2005. Ce site a accueilli pendant plus d’un siècle l’activité de tir aux pigeons qui a provoqué la dissémination et l’accumulation de grenaille de plomb dans les sols et les lacs, contaminant ainsi les sols et les eaux de manière importante.
De manière à lui permettre d’effectuer la dépollution du site, la Ville a octroyé à l’ASCBB, à l’échéance de la convention de concession de 1960, six autorisations d’occupation temporaire (AOT) successives sur l’emprise polluée. Ayant constaté que l’association n’avait effectué aucune opération de traitement, la Ville a en 2012 mis fin par anticipation à la dernière AOT du 29 décembre 2011 et procédé elle-même aux travaux de dépollution dont elle a demandé le remboursement à l’ASCBB.
Le site étant classé, les travaux ne pouvaient être engagés sans l’accord des services de l’État. Or ceux-ci « ont demandé à la Ville, de restituer l’état initial du site conçu par Alphand ». Cette demande a considérablement renchéri le coût de l’opération puisqu’il fallait procéder à l’excavation des terres polluées, au transport et à leur mise en décharge et la mise en place de terre saine. Le marché signé par la Ville s’est élevé à 1 475 034 € TTC.
Toutefois, après la réalisation des travaux, la Ville et l’Association sportive du Cercle du Bois de Boulogne ont conclu une transaction, l’Association ne remboursant ainsi que la somme de 606 378 €, la Ville assumant définitivement la charge du solde, soit 653 491 €.
La Ville justifie cette prise en charge, autorisée par le Conseil de Paris, par sa volonté de restituer une partie des espaces à la promenade publique, à l’origine selon elle des surcoûts imposés par la décision du préfet.
Cet argument n’est guère recevable, car en signant la convention en 1960, l’association ne pouvait ignorer que le classement du site du bois de Boulogne entraînait des sujétions spéciales lui imposant la réalisation de travaux de complète remise en état.
C’est donc à tort que la Ville de Paris a supporté les coûts de dépollution à l’échéance de la concession du Tir aux Pigeons.