SYNTHESE
La chambre a examiné, dans le cadre d’une enquête nationale menée par les juridictions financières, la politique d’accueil des jeunes enfants de la commune d’Evry, entre 2008 et 2012.
Cette politique peut être définie comme l’ensemble des dispositifs visant à faire coïncider offre et demande de garde des enfants âgés de moins de trois ans. Elle vise à permettre aux parents de concilier vie familiale et professionnelle, à favoriser la socialisation de l’enfant et, finalement, à favoriser le dynamisme démographique et le taux d’emploi des femmes. Elle comporte principalement deux types d’accueil : la garde des enfants par des assistants maternels (AM) agréés, à leur domicile, et l’accueil des enfants au sein de structures collectives, crèches ou haltes-garderies, l’accueil pouvant être régulier ou occasionnel. Enfin, les crèches familiales se situent à mi-chemin entre ces deux modèles : les enfants sont accueillis au domicile des assistants maternels, mais se retrouvent au sein de structures collectives pour des activités de groupe.
Trois constats se dégagent :
1/ La commune dispose d’une offre d’accueil des jeunes enfants nettement inférieure à la moyenne départementale, cet écart étant plus réduit par rapport à la moyenne nationale
Il existe des écarts méthodologiques significatifs dans la manière de mesurer l’offre d’accueil, les chiffres recensés par la caisse d’allocations familiales (Caf) de l’Essonne conduisant, pour plusieurs raisons, à surestimer l’offre disponible à Evry.
Ainsi, en 2011, la commune estime offrir 41,4 places de garde ou de préscolarisation pour 100 enfants âgés de moins de trois ans. En revanche, la Caf de l’Essonne, dont les chiffres, bien que surestimés, sont les seuls à pouvoir faire l’objet d’une comparaison fiable avec le reste du territoire national, situe l’offre d’accueil à 49,5 places pour 100 enfants de moins de trois ans. Ce dernier taux est inférieur de 18,5 points à la moyenne du département de l’Essonne, mais comparable à la moyenne nationale, soit 49,9 places en 2010.
L’écart par rapport au département s’explique par deux facteurs : un nombre de places offertes au sein des établissements accueillant des jeunes enfants (EAJE) inférieur de 4,5 points à la moyenne départementale et un nombre inférieur de places chez les assistants maternels indépendants par rapport à la moyenne départementale, malgré la forte croissance enregistrée ces dernières années.
Evry, comme l’Essonne en général, pâtit d’un très faible taux d’enfants âgés de deux à trois ans scolarisés en école maternelle. En 2010, l’écart est de 2,7 points par rapport à la moyenne nationale, ce qui correspond à un déficit de 91 places en maternelle pour ces enfants.
En 2011, 24,5 % des enfants de moins de trois ans sont accueillis en EAJE, de manière régulière ou occasionnelle, tandis que 21,1 % sont accueillis chez des assistants maternels indépendants. Si l’on ajoute les enfants préscolarisés, on peut estimer que 47,5 % des enfants de moins de trois ans ont bénéficié au moins une fois, en 2011, de modes de garde formels ou d’une préscolarisation.
Ces chiffres, inférieurs à la moyenne départementale, sont à mettre en relation avec le faible taux d’activité de la population et un taux de chômage supérieur, en 2009, de 71 % à la moyenne départementale (15,4 % à Evry, contre 9 %). En outre, la faiblesse du revenu moyen des habitants et, à l’inverse, le taux élevé d’habitants bénéficiant des minimas sociaux (11,5 % en 2009), conduisent nombre de parents à ne pas recourir à des modes de garde payants, bien que les tarifs moyens, établis à partir de barèmes nationaux prenant en compte le quotient familial, soient peu élevés.
2/ Disposant de marges financières limitées, la commune développe une stratégie visant à transformer ses équipements pour mieux satisfaire les demandes d’accueil occasionnel et à développer le soutien apporté aux assistants maternels indépendants
La commune a constaté que l’entrée en vigueur de la prestation de service unique (PSU), en 2006, a eu pour effet de faire fortement diminuer la durée moyenne de réservation quotidienne pour les places d’accueil régulier en EAJE, évolution venant contrecarrer l’objectif d’amélioration des taux d’occupation fixés à la commune par la Caf de l’Essonne. C’est pourquoi elle s’est engagée dans un programme de transformation de ses équipements d’accueil régulier en centres de multi-accueil, mieux adaptés à la demande d’accueil occasionnel des parents et à la réalisation des objectifs en matière de taux d’occupation. Par ailleurs, constatant le taux élevé de refus des parents en ce qui concerne les places proposées en crèche familiale, la commune a réduit l’offre de ce mode de garde.
Par ailleurs, la commune a pris en compte l’inadéquation entre l’offre d’accueil chez les assistants maternels et la demande des parents, ceux-ci souhaitant, dans leur grande majorité, un accueil collectif pour leur enfant. En 2011, 39,5 % des places offertes par les assistants maternels sont ainsi vacantes. Ne disposant pas de leviers d’action en ce qui concerne la délivrance des agréments et la formation des assistants, la commune axe son action sur le développement d’un réseau de relais assistants maternels (Ram), destiné à favoriser les échanges de bonnes pratiques et à permettre l’organisation d’activités de groupe.
Enfin, la commune ne dispose d’aucun levier pour jouer sur le taux de préscolarisation des enfants dont la faiblesse offrirait, à l’évidence, des marges de manœuvre.
3/ Trois évolutions sont souhaitables pour l’avenir
1) Bien que dotée d’un système d’information cohérent et bien connu des parents (1 157 demandes d’information, en 2011, pour 1 185 naissances recensées), le suivi statistique de l’accueil des jeunes enfants doit être amélioré, en consolidant dans un tableau unique la totalité des demandes satisfaites ou non par type de garde. Cela permettrait de mesurer de manière fiable le taux de satisfaction des demandes déposées par les parents, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
2) L’attribution des places est fondée sur des critères simples et largement accessibles aux parents. Ils correspondent toutefois à une situation où la demande en accueil collectif régulier est structurellement supérieure à l’offre disponible, de sorte que seulement une demande des parents sur trois, en moyenne, est satisfaite.
Ces critères, fondés sur l’activité des parents, conduisent à réserver les places en accueil collectif régulier aux familles dont le(s) parent(s) travaille(nt), alors que les familles dont l’un des deux parents est inactif se voient proposer un accueil occasionnel, entre six et 12 heures par semaine. Ils devront vraisemblablement être réexaminés pour se conformer aux règles d’attribution de la prestation de service unique. Par ailleurs, la commune envisage de revoir les critères d’accueil collectif régulier, pour le réserver aux enfants âgés de plus de 12 mois, critère dont la régularité, au regard des règles nationales, n’est pas établie. Dans ce contexte, la commune doit continuer à attribuer les places disponibles selon des critères objectifs et transparents pour les parents et se rapprocher de la Caf pour s’assurer que les nouveaux critères qu’elle souhaite suivre soient compatibles avec les règles de la PSU.
3) Enfin, la commune doit encore affiner sa stratégie d’accueil du jeune enfant, notamment en fixant pour chaque nouvel équipement ou service projeté des objectifs financiers et opérationnels précis, compatibles avec le plan pluriannuel d’investissement. Par ailleurs, cette stratégie, jusqu’ici élaborée en interne, gagnerait à être également concertée avec les partenaires financiers de la politique communale d’accueil du jeune enfant.