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Rapport public thématique
« La Poste :
un service public
face à un défi sans précédent,
une mutation nécessaire »
TABLE DES MATIERES
I
Pages
Délibéré…………………………………………………………….
V
Introduction……………………………………………………..…
1
Chapitre I – Une stratégie de développement à reconstruire
……
7
I – Une modernisation, sans bouleversement……………….………
8
A – Un maillage étroit du réseau…………………………………….
………
8
B - L’industrialisation du métier historique du courrier…………………
10
C - Le développement des relais de croissance…………………….
………
12
D – La professionnalisation de la gestion…………………………….
…….
18
E – La cohésion sociale au sein de La Poste
……………………………….
21
II – Un redressement soutenu par des mesures diverses…………….
22
A -
Des comptes rétablis………………………………………………………
23
B – La contribution des mesures de rattrapage concurrentiel
……………
25
C - L’impact de mesures non reconductibles
……………………………….
28
III
- Des relais de croissance qui n’ont pas été pleinement
au rendez-vous………………………………………………………
32
A - La Banque Postale, une croissance freinée par
un agrément limité et des charges trop élevées……………………………
32
B - Le colis et l’express, des relais de croissance handicapés
par un certain nombre de faiblesses…………..…………..………………..
36
C - La contribution modeste des métiers connexes du courrier
………….
39
IV
- Les limites du développement…………………………………
41
A - Un réseau qui demeure inadapté et coûteux
……………………………
41
B - Une ambition bancaire encore inaccomplie…………………….……..
46
C - Des retards insuffisamment comblés…………………………….
………
51
D - Le maintien d’un endettement élevé…………………………….………
54
V - Le choc du courrier à compter de 2008………………………...
57
A – Le courrier, une brusque accélération de la réduction des volumes
57
B - Un repli de nature structurelle…………………………………….
……..
58
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II
COUR DES COMPTES
Pages
Chapitre II - Avec la stratégie « Ambition 2015 », La Poste vise
à répondre à des défis sans précédent ……………………………
61
I
- Des défis sans précédent………………………………………………..
62
A - La concurrence
………………………………………………………………
62
B - La rationalisation des envois et la substitution numérique…….…
....
68
C - Une réaction tardive
……………………………………………………….
69
D - Un statu quo impossible
……………………………………………………
70
II - Les réponses de La Poste à horizon 2015 :
le plan « Ambition 2015 »
…………………………………………………….
73
A - Les priorités du plan « Ambition 2015 »……………………………….
73
B - La trajectoire financière
……………………………………………………
73
III - Les conditions de la réussite du plan « Ambition 2015 »………….
75
A - Répondre aux enjeux de la qualité……………………
……………….…
76
B - Réduire les coûts ………
……………………………………………………
87
C - Faire progresser les revenus opérationnels……………………
……..…
108
IV - Les relations entre La Poste et ses actionnaires
………………
114
A - Tirer le meilleur parti possible de l’augmentation de capital……….
114
B - Organiser les synergies avec la Caisse des dépôts………………..
……
117
C - Le financement des missions de service public de La Poste…..
……..
121
Conclusion……………………………………………………..….
133
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TABLE DES MATIERES
III
Pages
Annexe 1 – Organigramme simplifié du groupe La Poste
………….
137
Annexe 2 – Glossaire………………………………………………
138
Annexe 3 – Synthèse du rapport public particulier de la Cour
des comptes publié en octobre 2003 « Les comptes et la
gestion de La Poste (1991-2002) »
………………………………….
143
Annexe 4 – Les grands conflits sociaux à La Poste
…………………
146
Annexe 5 – Comparaisons entre les opérateurs postaux européens
147
Annexe 6 – Les parts de marché des services financiers et
de La Banque Postale
……………………………………………….
150
Annexe 7 – Les étapes de la libéralisation
………………………….
151
Annexe 8 – Etat de la concurrence sur les différents segments
de marché en 2008………………………………………………….
152
Annexe 9 – Points de repère juridiques sur l’ouverture du
marché postal à la concurrence
………………………………………
153
Annexe 10 – Ménages ayant accès à internet
……………………….
155
Annexe 11 – Les objectifs de la qualité de service pour
le service universel
………………………………………………….
156
Annexe 12 – L’organisation commerciale au sein de La Banque
Postale et de l’Enseigne
…………………………………………….
157
Annexe 13 – Historique de l’évolution de l’actionnariat
de CNP Assurances
…………………………………………………
158
Réponse du Ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi
159
Réponse du Ministre chargé de l’industrie auprès du Ministre de
l’économie, de l’industrie
et de l’emploi
…………………………..
164
Réponse du Président – directeur général du Groupe La Poste
…….
166
Réponse du Gouverneur de la Banque de France…………………..
182
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IV
COUR DES COMPTES
Ont effectué la synthèse des enquêtes et la rédaction du rapport
M. Jean-Pierre Beysson, conseiller maître, responsable
du secteur « La Poste »
M. Bernard Hagelsteen, conseiller maître en service extraordinaire
Mme Catherine Julien-Hiebel, rapporteur
Ont participé aux enquêtes sectorielles :
M. Emmanuel Duret, conseiller maître
M. Jacques-André Troesch, conseiller maître
M. Jean-Pierre Beysson, conseiller maître, responsable
du secteur « La Poste »
Mme Hélène Morell, conseiller maître
M. Denis Morin, conseiller maître
Mme Martine Ulmann, conseiller maître
M. Michel Blanc, conseiller maître en service extraordinaire
M. Bernard Hagelsteen, conseiller maître en service extraordinaire
M. Emmanuel Bichot, conseiller référendaire
M. Julien Aubert, conseiller référendaire
M. Jean-Pierre Jourdain, conseiller référendaire
M. Grégoire Herbin, auditeur
M. Pierre Rolland, rapporteur
M. Christophe Sinnassamy, rapporteur
M. Jacky Marchais, rapporteur
M. François Malhomme, rapporteur
M. Pierre Jaillard, rapporteur
Mme Dominique Girard-Reydet, rapporteur
Mme Line Bonmartel-Couloume, rapporteur
Mme Catherine Julien-Hiebel, rapporteur
Mme Sophie Baboy, expert
M. Matthieu Gidelles, expert
M. Jean-Pierre Jégou, assistant
M. Lionel Marie, assistant
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DELIBERE
V
Délibéré
La Cour des comptes publie un rapport thématique intitulé
«
La Poste : un service public face à un défi sans précédent, une mutation
nécessaire
».
Conformément aux dispositions législatives et réglementaires du
code des juridictions financières, la Cour des comptes, délibérant en
chambre du conseil, a adopté le présent rapport public.
Ce texte a été arrêté au vu du projet qui avait été communiqué au
préalable, en totalité ou par extraits, aux administrations et organismes
concernés, et après avoir tenu compte, quand il y avait lieu, des réponses
fournies par ceux-ci. En application des dispositions précitées, ces
réponses sont publiées ; elles engagent la seule responsabilité de leurs
auteurs.
Etaient présents : M. Migaud, Premier président, MM. Pichon,
Babusiaux, Ruellan, Descheemaeker, Hespel, Bayle, présidents de
chambre, Mme Bazy
Malaurie, président de chambre, rapporteur général,
Mme Cornette, président de chambre maintenu en activité, MM. Mayaud,
Richard, Devaux, Rémond, Gillette, Duret, Ganser, Mme Froment-
Meurice, MM. Beysson, Gasse, Moreau, Frèches, Duchadeuil, Moulin,
Lebuy, Lefas, Durrleman, Gauron, Frangialli, Andréani, Mmes Morell,
Fradin, MM. Braunstein, Brochier, Mme Dayries, MM. Levy, Bernicot,
Phéline, Mme Ulmann, MM. Vermeulen, Tournier, Mmes Darragon,
Seyvet, MM. Bonin, Vachia, Vivet, Mme Moati, M. Cossin, Diricq,
Sabbe, Petel, Mme Camby, MM. Valdigué, Martin (Christian), Ténier,
Lair, Mme Trupin, MM. Corbin, Rabaté, Metzger, de Gaulle, Guibert,
Piolé, Uguen, Guédon, Mme Gadriot-Renard, MM. Bourlanges, Le Méné,
Castex, Sépulchre, Arnaud d’Andilly, Antoine, Mousson, Guéroult,
Mme Bouygard, M. Chouvet, Mme Démier, MM. Clément, Machard,
Mme Cordier, MM. Le Mer, conseillers maîtres, MM. Zeller, Cadet,
Schott, Cazenave, Hagelsteen, Dubois, Gros, conseillers maîtres en
service extraordinaire.
Etait présent et a participé aux débats : M. Bénard, Procureur
général, assisté de M. Maistre, premier avocat général.
Etait présente en qualité de rapporteur et n’a pas pris part aux
délibérations : Mme Julien-Hiebel, rapporteur.
Madame Mayenobe, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 6 juillet 2010.
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Introduction
Les premières bases de l’institution des postes ont été établies en
France dès le milieu du XVème siècle par Louis XI qui crée des relais de
poste et des « chevaucheurs », tenus « de monter sans délay ni
retardement les courriers […] en payant le prix raisonnable… »
1
.
Fondé sur l’acheminement des dépêches de la Couronne, cet
embryon de service postal est loin de pouvoir se comparer à l’imposante
organisation créée à la même époque par la famille autrichienne Thurn
und Taxis qui gardera pendant des siècles un monopole du service postal
sur une grande partie de l’Europe.
Après la suppression de La Ferme Générale des Postes par la
Convention
2
et l’instauration d’un monopole postal de l’Etat par le
Premier Consul en 1801, la collecte et l’acheminement du courrier,
comme les premiers services financiers postaux vont acquérir dès avant la
première guerre mondiale bien des caractéristiques qu’ils conservent
encore aujourd’hui.
Par la célèbre affaire du Courrier de Lyon de 1796, on sait que les
malles-postes servaient également au transport de fonds pour le compte
des
armées,
mais
c’est
en
1794
qu’est
mise
en
place
« la
reconnaissance », confirmée par le mandat postal en 1817, devenu
payable à domicile en 1878.
En 1881, les activités financières s’étendent à la gestion de livrets
d’épargne. La Poste, dont les 200 000 livrets recensés à la fin des années
1880 sont crédités de versements moyens cinq fois inférieurs à ceux des
banques, se présente déjà comme un organisme financier accessible aux
plus modestes. Pourtant, en raison, déjà, de l’opposition des banques,
l’institution des comptes chèques postaux, souvent envisagée, ne se
concrétisera qu’en 1918.
1) Ordonnance du 19 juin 1464 citée dans l’ouvrage de Paul Charbon, "Quelle belle
invention que La Poste ».
2) La Ferme Générale avait été créée en 1672 par Louvois, Surintendant général des
Postes. L’importance de la poste pour la société se traduit dans la décision de la
Révolution de faire élire les directeurs des 1200 bureaux de poste existant à cette
époque.
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2
COUR DES COMPTES
Dans le domaine du courrier, les grandes règles de la distribution
qui prévalent encore aujourd’hui ont été fixées dès les années 1820-1850
3
et dès le début du XXème siècle le réseau acquière une configuration
proche des 17 000 points de contacts actuels de La Poste.
Le développement des activités postales a été très fort et corrélé
étroitement à la croissance économique française jusqu’au début du
troisième millénaire. Le nombre d’objets distribués chaque année le
montre :
-
1850 : 158 millions d’objets,
-
1914 : 1,3 milliards d’objets,
-
2000 : 40 milliards d’objets.
La Poste est ainsi devenue, par son histoire, par ses missions de
service public et par son impact sur l’économie une véritable
« institution » : elle accueille chaque jour plus de 2 millions d’usagers
dans ses 17 000 bureaux de poste et elle distribue 6 jours sur 7, par
l’intermédiaire de ses 90 000 facteurs, plus de 100 millions de plis aux
45 millions de clients particuliers et 3,5 millions de clients entreprises et
professionnels. Par le biais du livret A et des produits d’assurance vie et
de capitalisation du groupe CNP Assurances dont elle est un partenaire de
poids, elle tient une place importante dans la collecte de l’épargne.
La Poste en tire sans conteste un capital de sympathie élevé. Mais
au-delà de l’image traditionnelle de la lettre et du livret, La Poste
constitue un vaste ensemble de services. Ses métiers (courrier, colis,
express et banque) sont exercés soit au sein de l’établissement public, soit
par le biais d’environ 200 filiales. Pendant longtemps, la plupart de ces
filiales ont été portées par une seule sous-holding, la société Sofipost. A
partir de 1999, le groupe La Poste a choisi de modifier sa structure, en
créant progressivement des holdings par secteur d’activité.
Aujourd’hui, La Poste est l’une des plus grandes entreprises
françaises, avec plus de 20 Md€ de chiffre d’affaires, et le deuxième
employeur du pays après l’Etat, avec plus de 287 000 agents.
Dans son rapport public sur les comptes et la gestion de La Poste
publié en 2003, la Cour des comptes constatait que La Poste était encore
en situation d’infériorité par rapport à ses concurrents dans la plupart des
domaines :
les
capacités
financières,
le
niveau
d’équipement,
l’organisation, la qualité du service rendu, les résultats (voir annexe n°3).
3) La distribution au domicile des destinataires date de 1829, la distribution est
devenue quotidienne dès 1832 et le prix unique du timbre a été imposé en 1848.
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INTRODUCTION
3
La Poste de 2010 a beaucoup changé par rapport à ce constat
sévère. L’ancienne administration des PTT est devenue une entreprise.
L’outil industriel du courrier a été profondément modernisé avec des
gains de productivité appréciables. La Poste est désormais un acteur
majeur sur l’express en Europe, avec un réseau performant. Enfin, les
services financiers des CCP sont devenus avec La Banque Postale une
banque identifiée comme telle par le grand public.
L’Etat a contribué à ce redressement en corrigeant pour l’essentiel
les handicaps concurrentiels soulignés par la Cour en 2003.
Cependant La Poste est aujourd’hui confrontée à un double choc
culturel : après deux siècles de monopole des activités postales, elle va
affronter dans quelques mois l’ouverture complète du marché à la
concurrence ; après un siècle de croissance forte et continue, elle aborde
le bouleversement de l’internet et de la dématérialisation numérique. La
Poste est certaine d’une forte diminution des envois papier dans les
années qui viennent, mais elle est dans l’incapacité, comme chacun, d’en
prévoir le point d’aboutissement à plus long terme.
Le marché postal a été ouvert à la concurrence, de façon
progressive, aux 1
er
décembre 1998, 1
er
janvier 2003 et 1
er
janvier 2006, à
la suite des directives communautaires du 15 décembre 1997 et 10 juin
2002
4
. Aujourd’hui, La Poste conserve un monopole pour les envois de
moins de 50 grammes, affranchis à un tarif inférieur à deux fois et demi le
tarif de base
5
. En application de la directive du 20 février 2008,
récemment transposée en droit français par la loi relative à l’entreprise
publique La Poste et aux activités postales du 9 février 2010, le marché
postal sera totalement ouvert à la concurrence au 1
er
janvier 2011.
Ce grand service public qui avait franchi avec une réelle réussite
des étapes significatives de sa modernisation, en s’appuyant sur un
modèle social généreux et avec l’aide de l’Etat, est à présent menacé par
un bouleversement de ses équilibres historiques. La perspective proche
d’une baisse massive des volumes du courrier le contraint à fonder ses
objectifs économiques et financiers sur le développement des autres
métiers, en particulier La Banque Postale, désormais aussi essentiels pour
les résultats du groupe que le fut longtemps le Courrier. La Poste doit se
donner toutes les chances de réussir cette mutation nécessaire.
4) Le monopole des opérateurs historiques a été limité aux envois d’un poids inférieur
à 350 grammes et d’un prix inférieur à cinq fois et demi le tarif de base à compter du
1er janvier 1998, puis à 100 grammes et trois fois le tarif de base au 1er janvier 2003,
et enfin à 50 grammes et deux fois et demi le tarif de base depuis le 1er janvier 2006.
5) Voir annexe n°7
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4
COUR DES COMPTES
Les quelques années qui viennent sont donc cruciales. Sans qu’ils
puissent suffire à relever tous les défis, le changement de statut et
l’augmentation de capital résultant de la loi du 9 février 2010 ont pour
ambition d’aider La Poste à préparer cet avenir. Mais les enjeux sont sans
commune mesure avec ceux auxquels elle était confrontée au début des
années 2000. Dans ce contexte, La Poste vient d’arrêter un nouveau plan
stratégique dénommé « Ambition 2015 ». Le présent rapport insiste sur
les conditions à réunir pour assurer la réussite de ce plan.
***
Le présent rapport constitue la synthèse de travaux conduits par la
Cour sur l’ensemble du groupe La Poste. Après le rapport sur la création
de La Banque Postale remis au Parlement en début 2008, en application
de l’article 16.2 de la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des
activités postales, un cycle de contrôles a été effectué de façon quasiment
concomitante au deuxième semestre 2008 et au cours de l’année 2009, sur
les comptes consolidés de La Poste, sur ses différentes activités, sur
l’organisation des fonctions support du groupe, la politique et la gestion
des ressources humaines et sur le réseau de l’Enseigne La Poste.
Compte tenu de l’impact des activités de La Poste pour les acteurs
économiques et les particuliers, les treize rapports d’enquête ont été
enrichis par des échanges avec des représentants d’associations d’élus
locaux, des grands clients, des concurrents français et européens de
l’exploitant
public,
des
associations
de
consommateurs
et
des
organisations syndicales de l’entreprise.
Au terme de ces travaux, la Cour dresse tout d’abord un constat
des évolutions majeures qu’a connues La Poste ces dernières années. Elle
analyse aussi les défis sans précédent que doit affronter l’exploitant
public.
La Cour s’appuie sur les grandes orientations du plan « Ambition
2015 » soumis le 15 avril dernier au conseil d’administration de La Poste
pour examiner les points clés qui doivent en assurer la réussite.
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INTRODUCTION
5
Le groupe La Poste en 2010
Le groupe La Poste est organisé autour de trois grands secteurs
d’activité : le Courrier, le Colis-Express et les Services Financiers, exercés
soit par la société anonyme elle-même, soit par l’intermédiaire de filiales
spécialisées. Ces métiers s’appuient sur les 17 000 bureaux de poste et points
de contact gérés par la direction de l’Enseigne La Poste.
Autour de l’établissement public La Poste devenu société anonyme le
1
er
mars 2010, s’est progressivement constitué un vaste ensemble d’environ
200 filiales de droit privé. En 2009, le chiffre d’affaires consolidé du groupe
s’établit à 20,53 Md€, pour une marge d’exploitation de 3,7 %.
1/ Le Courrier
6
demeure en 2009 la première activité du groupe, avec
un chiffre d’affaires consolidé de 11 Md€, dont 887 M€ réalisés par les
filiales regroupées dans la holding Sofipost. En 2008, 27 milliards de
documents ont été acheminés et distribués par La Poste, dont 18,3 milliards
de documents adressés, c'est-à-dire distribués selon une adresse postale
précise, et 8,7 milliards non adressés, c'est-à-dire déposés dans des boîtes aux
lettres.
Les principales filiales présentes dans les secteurs concurrentiels
connexes au courrier sont Mediapost (publicité non adressée), Docapost
(gestion intégrée du courrier des entreprises), STP (transport de presse) et La
Poste Global Mail (courrier international).
2/ Le Colis-Express est un secteur dans lequel le groupe La Poste se
présente comme étant le numéro un en France et le numéro deux en
Allemagne. Le chiffre d’affaires 2009 s’élève à 4,47 Md€ et recouvre deux
métiers :
- un métier « colis » exercé par une direction non filialisée de La
Poste, mais devenue indépendante du courrier en 1995, ColiPoste, dont
l’activité est principalement ciblée sur la France, et sur les livraisons en 48
heures, de l’entreprise vers les particuliers ou entre particuliers. ColiPoste a
livré 250 millions de colis en 2009 pour un chiffre d’affaires de 1,38 Md€ ;
- un métier « express » qui relève de GeoPost, société créée en 1999 et
détenue à 100 % par La Poste, qui assure des expéditions principalement
d’entreprise à entreprise. GeoPost livre 550 millions de colis par an, pour un
chiffre d’affaires 2009 de 3,09 Md€.
GeoPost bénéficie d’une forte présence en Europe à travers des filiales
bien implantées sur les marchés domestiques telles que Chronopost (France,
Portugal) et DPD (Royaume-Uni, Allemagne, Europe centrale et orientale).
6) Avec une majuscule le Courrier désigne, dans la suite du texte, la direction
éponyme et les filiales de Sofipost.
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6
COUR DES COMPTES
La société développe également sa présence hors d’Europe avec DPD et des
partenaires locaux en Asie, en Afrique et aux Etats-Unis.
3/ Les Services Financiers sont assurés par le groupe La Banque
Postale, qui a succédé en 2006 à Efiposte. La Banque Postale propose des
services dans le domaine de la banque de détail aux particuliers, et aux
personnes morales mais de façon limitée. Elle comptait en 2009 30,1 millions
de clients, dont 9,9 millions de clients actifs ; 11,3 millions de comptes
chèques postaux (CCP) et un total de 277,3 Md€ d’encours. Les filiales de La
Banque Postale se répartissent en trois grands pôles d’activités :
- la banque de détail, avec notamment La Banque Postale
Financement, filiale commune avec la Société Générale, créée en 2009 dans
le domaine du crédit à la consommation ;
- l’assurance, au sein des sociétés Sogerco, qui exerce des activités de
courtage, La Banque Postale Prévoyance, société détenue à parité avec CNP
Assurances qui propose des produits de prévoyance, et la sous-holding
Sopassure, contrôlée à 50,1 % par La Banque Postale et à 49,9 % par le
groupe BPCE et qui détient elle-même 35,48 % du groupe CNP Assurances ;
- la gestion d’actifs confiée principalement à la filiale La Banque
Postale Asset Management qui exerce une activité de création et de gestion
d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM)
commercialisés par La Banque Postale. Le pôle gestion d’actifs intègre
également l’activité de gestion sous mandat menée par La Banque Postale
Gestion privée.
En 2009, le produit net bancaire consolidé de La Banque Postale est
de 5,02 Md€.
Le groupe CNP Assurances, dont elle est à la fois distributeur et
actionnaire, est un partenaire stratégique et financier majeur pour La Banque
Postale. La consolidation de sa participation dans le capital de CNP
Assurances accroît sensiblement son résultat consolidé (à hauteur de 227 M€
en 2007, 131 M€ en 2008 et 186 M€ en 2009), soit, en 2009, près de 32 % du
résultat de La Banque Postale et 35 % du résultat global du groupe La Poste,
et son actif consolidé (à hauteur de 1,86 Md€ en 2009).
Un organigramme simplifié du groupe figure à l’annexe n°1 du
rapport.
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Chapitre I
Une stratégie de développement à
reconstruire
Jusqu’à la prise de conscience des perspectives d’effondrement
durable des activités du courrier, à la fin de 2009, la stratégie définie par
La Poste et son actionnaire l’Etat dans les plans « Performances et
convergences » pour la période 2003-2007, puis « Performances et
Confiance
7
» pour 2008-2012, reposait sur deux grandes hypothèses.
D’un côté, les volumes du courrier poursuivraient leur lent déclin
constaté depuis la fin des années 90, mais des gains de productivité et le
développement de relais de croissance dans des métiers qui lui sont liés
permettraient de maintenir le métier historique de La Poste comme le
contributeur majeur aux résultats du groupe.
De l’autre, le recul relativement modéré de ce métier serait plus
que compensé par le développement des activités dans le colis et
l’express et par la croissance des activités financières.
7) Pour 2003-2007, la stratégie a été fixée dans un contrat de plan signé avec l’Etat.
Pour la période suivante, en application de la loi NRE (nouvelles régulations
économiques), le plan « Performances et confiance » a été simplement approuvé par
le conseil d’administration de La Poste. Le contrat entre l’Etat et La Poste ne porte
plus que sur les missions de service public (contrat de service public signé le 22 juin
2008). La loi du 9 février 2010 confirme ce dispositif et confie à un
« contrat
d’entreprise » le soin de définir les missions de service public et d’intérêt général.
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8
COUR DES COMPTES
La Poste visait à l’horizon 2012 une rentabilité analogue à celle de
ses grands concurrents Deutsche Post et TNT. Jusqu’en 2007, soutenus
par la correction des handicaps concurrentiels mise en oeuvre par l’Etat,
les progrès accomplis semblaient donner crédit à cette stratégie. Mais
avec le choc du courrier à partir de 2008 et alors que les relais de
croissance n’ont pas été pleinement au rendez-vous, cette stratégie est à
reconstruire.
Face à des changements rapides de son environnement, La Poste a
pour atout de s’appuyer sur plusieurs métiers complémentaires qui
utilisent en commun un réseau de point de contact d’une densité
exceptionnelle. La nouvelle stratégie doit désormais valoriser davantage
les opportunités de ce « modèle postal » afin que la progression des
activités financières, du colis et de l’express fasse de ces métiers, à
l’instar de ce que fut le courrier pendant de longues années, les principaux
vecteurs du développement du groupe.
I
-
Une modernisation, sans bouleversement
Au début des années 2000, La Poste se trouvait dans une situation
très fragile. Confrontée à une série de handicaps majeurs relevés par la
Cour des comptes en 2003 (charges de personnel très élevées,
organisation lourde et complexe, retard dans la modernisation de ses
outils de production, réseau territorial hypertrophié), elle affichait un
retard important par rapport aux entreprises leader en Europe.
A partir de 2003, La Poste, en lien avec sa tutelle, a défini et mis
en oeuvre une stratégie qui visait à renforcer sa performance dans tous les
métiers du groupe. Les axes essentiels de cette stratégie visaient à
optimiser le réseau, industrialiser le courrier et développer des relais de
croissance. La réalisation de ces objectifs devait s’appuyer sur une
modernisation de la gestion et une politique sociale dynamique.
A - Un maillage étroit du réseau
La Cour des comptes soulignait, dans son rapport de 2003, le
handicap majeur de compétitivité qu’entraînait le maintien d’un réseau
surdimensionné de 17 000 points de contact dont la répartition sur le
territoire ne répondait plus à l’évolution des besoins.
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La Poste : un service public face à un défi sans précédent, une mutation nécessaire – juillet 2010
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
9
Depuis 2003, alors que, du fait du développement du multi canal
notamment, les services financiers et le courrier ont de moins en moins
besoin d’un réseau d’une telle densité, La Poste a conservé 17 000 points
de contact.
Les obligations de service public au titre de l’aménagement du
territoire ne lui laissaient pas une complète marge de manoeuvre. Cette
mission est ainsi définie dans la loi du 2 juillet 1990 : « Ces règles ne
peuvent autoriser que plus de 10 % de la population d’un département se
trouve éloignée de plus de cinq kilomètres, et de plus de 20 minutes de
trajet automobile, dans les conditions de circulation du territoire
concerné, des plus proches points de contact de La Poste ».
Selon les simulations de La Poste, il aurait suffi de 14 000 points
de contact environ pour satisfaire à ces critères de distance et de temps
d’accès
8
. Il en résulte une proximité territoriale du réseau sensiblement
plus dense que celle nécessaire au service universel postal (voir infra).
Sans critère de temps de trajet imposé, et avec une obligation de distance
maximale de 10 kms au lieu de 5 kms, le réseau prescrit par le service
universel communautaire n’exige qu’un peu plus de 7 300 points de
contact
9
.
La Poste n’a jamais vraiment souhaité réduire le nombre de ses
points de contact. Dans un contexte hostile au retrait des services publics
en milieu rural, elle a cantonné sa stratégie à un effort de réduction
relative des coûts en transformant des bureaux de poste traditionnels en
« agences postales communales » ou en « relais poste commerçant » tel
qu’illustré par l’encadré ci-dessous. Les agences postales et les relais
commerçants peuvent couvrir un large éventail de services postaux, y
compris les retraits d’espèces, dans la limite de 300 euros par période de
7 jours pour les agences communales et de 150 euros pour les relais
commerçants.
8) La loi de 1990 pouvait conduire à étendre le réseau au-delà des seuls critères de
distance et de temps de trajet, notamment pour prendre en compte des éléments tels
que le classement en « zone de revitalisation rurale », ou en « zone urbaine sensible ».
9) Alors que la directive du 15 décembre 1997 se limite à une orientation souple :
« Les Etats membres prennent des mesures pour que la densité des points de contact et
d’accès tienne compte des besoins des utilisateurs », la transposition française est plus
volontariste : « au moins 99 % de la population nationale et au moins 95 % de la
population de chaque département sont à moins de 10 km d’un point de contact et
toutes les communes de plus de 10 000 habitants disposent d’au moins un point de
contact par tranche de 20 000 habitants ».
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10
COUR DES COMPTES
En 2009, les 17 000 points de contact se répartissent ainsi :
- 10 574 bureaux de poste ;
- 4 600 agences postales communales ;
- 1 826 relais poste commerçants.
Ce maillage, largement plus étendu que ne le nécessitent les
besoins strictement commerciaux des métiers, peut représenter une
« charge inéquitable »
susceptible de justifier une compensation du coût
net qu’elle engendre.
La loi du 9 février 2010 vient de consacrer ces 17 000 points de
contact sans imposer cependant une norme de répartition entre les
bureaux de poste, les agences communales et les relais commerçants.
B -
L’industrialisation du métier historique du courrier
En 2003, la Cour dressait un tableau sévère des processus et des
outils de traitement du courrier, caractérisés par des réseaux logistiques
multiples et des unités de production trop nombreuses pour chacun des
maillons du processus de collecte, de tri et de distribution du courrier.
Jusqu’en 2003, le tri était calqué sur la géographie administrative,
avec plus d’un centre de tri par département, soit près de 130 au total en
incluant le réseau de « secours »
10
. La dispersion de l’outil industriel avait
pour conséquence de limiter les flux traités dans les centres de tri et d’en
restreindre les capacités d’automatisation. Cette organisation historique
conduisait à laisser aux facteurs une tâche de tri manuel importante, alors
que ce segment compte pour près du tiers dans les coûts directs de
traitement du courrier.
La Poste a lancé, bien après d’autres grands opérateurs postaux
européens, un projet d’automatisation appelé Cap Qualité Courrier
(CQC). La logique du programme était de concentrer le courrier sur un
nombre limité de centres, de manière à massifier les volumes traités et
permettre ainsi le déploiement de machines de tri automatique plus
puissantes qui accélèrent très sensiblement la vitesse de tri (en principe
10) Le réseau de secours est destiné à appuyer les centres de tri en cas d’incident
technique ou de surcharges exceptionnelles de volumes.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
11
jusqu’à 40 000 plis par heure) et accroissent de façon importante la
finesse de tri
11
.
Le programme CQC, qui aura mobilisé 3,1 Md€ sur une dizaine
d’années (2004-2015), est un projet de restructuration industrielle majeur.
Il comporte aussi de fortes dimensions territoriale et surtout sociale.
La Poste a également engagé, plus récemment, le projet « Facteur
d’avenir » afin d’adapter de manière prévisionnelle, selon les pointes
d’activité saisonnières ou conjoncturelles, les modalités de la distribution
du courrier.
La rigidité du découpage des tournées des facteurs
Une tradition très ancienne veut que chaque facteur effectue sa
tournée de distribution du courrier au sein d’un périmètre géographique
défini de façon précise et permanente. Ce périmètre est désigné par le
terme de « quartier ».
Les tournées de distribution correspondant à ces « quartiers »
peuvent être plus ou moins longues, plus ou moins éloignées du centre de
distribution, plus ou moins valorisantes etc.
Il
est
donc
considéré
que
les
facteurs
sont
quasiment
« propriétaires » de leur tournée, au point que lorsqu’une tournée doit être
réattribuée, à la suite, par exemple, d’un départ en retraite, il est procédé à
une « vente de quartier » dont les « moyens de paiement » sont
l’ancienneté, l’âge, les charges de famille …
Le programme facteur d’avenir vise à contourner la rigidité du
découpage de la distribution, en instaurant une relative mutualisation des
« quartiers » au sein d’une équipe, au travers du concept des tournées
sécables en fonction de la charge d’activité.
Les jours normaux, chaque facteur effectue sa tournée au sein du
« quartier » qui lui est affecté.
11) La vitesse permet d’accélérer les délais pour améliorer le respect de l’objectif de
distribution en J+1 (CQC visait une amélioration de 69 à 90 % du taux du courrier
remis à J+1). La finesse permet d’automatiser le tri définitif par rues et par numéros et
d’économiser ainsi le temps des facteurs consacré à la préparation de leur sacoche.
CQC vise un objectif de 80% d’automatisation complète du courrier arrivée.
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12
COUR DES COMPTES
Les jours de forte activité, un « facteur d’équipe
12
», qui ne
distribue pas habituellement de courrier parce qu’il est affecté « aux
travaux intérieurs
13
», prend en charge un
quartier
supplémentaire
délimité à l’avance. Ce « quartier » supplémentaire réduit le périmètre de
la tournée habituelle de chacun des autres facteurs de l’équipe.
Ainsi les volumes de courrier supplémentaires sont mieux répartis
au sein de l’équipe grâce à cette mutualisation relative des tournées. Cette
organisation en équipe a aussi pour objectif d’améliorer la qualité de
prestation, tandis que la création des nouveaux échelons de qualification
contribue
à
offrir
aux
facteurs
des
possibilités
d’évolution
professionnelle.
En fin 2009 ce dispositif a été très largement étendu, mais, en
demeurant basé sur le volontariat, il laisse beaucoup de marge
d’appréciation pour définir les jours de forte activité. Ses effets
structurants ne sont donc pas encore démontrés.
C - Le développement des relais de croissance
Pour compenser les baisses prévisibles sur son coeur d’activité du
courrier, La Poste a mis en oeuvre une stratégie de développement de
relais de croissance dans les domaines des services financiers, du colis et
de l’express ainsi que dans les métiers connexes du courrier.
1 -
Une mutation : des services financiers à La Banque Postale
Le rapport de la Cour constatait en 2003 que les services financiers
de La Poste n’étaient autorisés à effectuer qu’une gamme limitée
d’opérations de crédit et que ce secteur, récemment parvenu à l’équilibre,
ne dégageait que des performances faibles au regard de celles du secteur
financier concurrent.
La stratégie de La Poste a donc consisté, de manière constante, à
soutenir la création d’une banque, puis l’extension de sa gamme
d’activités autorisées afin d’en faire un véritable relais de croissance pour
le groupe.
12) Le « facteur d’équipe » est un des nouveaux échelons de la classification des
facteurs résultant de l’accord de requalification des grilles signé par La Poste. Cet
accord a également créé le « facteur qualité » qui réserve 30 % de son activité au
fonctionnement de l’organisation et à son amélioration.
13) Les « travaux intérieurs » sont les travaux autres que la tournée proprement dite
(tri définitif de la sacoche, courrier en CEDEX ou en boîtes postales par exemple).
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
13
La création de La Banque Postale a été le point d’aboutissement
d’un long processus de normalisation, les pouvoirs publics ayant
longtemps hésité face à l’opposition des autres établissements de crédit.
La loi du 2 juillet 1990 créant l’exploitant de droit public La Poste
a maintenu les services financiers au sein de l’établissement public, mais
a ouvert la voie à leur émancipation. Ainsi les fonds des comptes courants
postaux centralisés auprès du Trésor ont été progressivement transférés à
la filiale Efiposte entre 2000 et 2003
14
. De même, à compter du 1
er
janvier
2004, les services financiers de La Poste ont acquis la pleine
responsabilité de la gestion de l’épargne logement, percevant désormais
l’intégralité du résultat financier de cette activité en lieu et place des
seules commissions de collecte et de distribution versées antérieurement
par la Caisse nationale d’épargne
15
.
En dépit de ces évolutions, les services financiers de La Poste, qui
n’étaient autorisés à accorder des crédits que pour les prêts d’épargne
logement, étaient encore loin d’être une banque. Le contrat de plan 2003-
2007 évoquait le principe de la création d’un établissement bancaire, qui
pourrait octroyer des prêts immobiliers sans épargne préalable. La
création de La Banque Postale a été autorisée par la loi de régulation
postale du 20 mai 2005.
Elle a obtenu son agrément par le comité des établissements de
crédit et des entreprises d’investissement (CECEI) le 30 novembre 2005.
En parallèle, alors qu’elle était saisie de plaintes de certains
établissements bancaires, la Commission européenne a rendu, le 21
décembre 2005, une décision concluant à l’absence d’aides d’Etat au
bénéfice de La Banque Postale
16
.
La Banque Postale a modernisé ses procédures et sa gamme de
produits. Elle a, par ailleurs, complété le réseau physique de La Poste par
un dispositif multicanal de banque à distance. Depuis 2006, les anciens
CCP sont ainsi devenus une banque reconnue comme telle par le public.
14) Décret du 28 février 2000, modifiant le cahier des charges de La Poste.
15) La Caisse nationale d'épargne était une caisse d'épargne publique instituée sous la
garantie de l'Etat pour recevoir les dépôts de l’épargne réglementée. Elle a été
supprimée définitivement par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008.
16) Il n’y a plus, aujourd’hui, de recours en suspens relatifs à la création de La
Banque Postale.
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14
COUR DES COMPTES
2 -
Le redressement du colis et la création d’un réseau européen
de l’express
En 2003, la Cour des comptes avait sévèrement critiqué les retards
pris par La Poste dans le secteur du colis et de la logistique, en soulignant
notamment les pertes importantes ainsi générées entre 1998 et 2002.
Depuis, La Poste a défini une stratégie claire qui consiste, d’une
part, à limiter son offre au colis, c'est-à-dire au paquet n’excédant pas un
poids maximal de 70 livres anglaises, soit un peu plus de 30 kg, et,
d’autre part, à ne pas investir le créneau du colis express international,
livrable en tout point du globe le lendemain de sa remise à l’opérateur.
Sous réserve de cette exception, La Poste couvre toutes les
gammes du colis.
Le colis express, livrable dans le délai garanti de J+1 en France et
en Europe, est de la compétence de Chronopost, filiale de GeoPost.
Le colis rapide (J+2) et le colis standard (J+3 au moins) sont pris
en charge soit par ColiPoste, direction non filialisée de La Poste,
spécialisée dans la livraison en France des colis au domicile des
particuliers, soit par GeoPost pour l’Europe principalement.
Pendant longtemps, les paquets comme les lettres utilisaient les
mêmes filières de collecte, de traitement et de distribution. En 1995, la
spécificité du colis a été consacrée par la création de ColiPoste, direction
séparée du Courrier.
ColiPoste s’est doté depuis 2003 d’une chaîne de traitement
distincte de celle du courrier afin d’optimiser ses processus de tri et de
manutention, très différents de ceux du courrier. Il a ainsi consacré près
de 250 M€ pour créer six plateformes industrielles pouvant traiter
chacune 40 millions de colis et 70 centres de distribution spécifiques dans
les zones urbaines (Agences ColiPoste). La part des colis livrés par les
facteurs du courrier représente aujourd’hui 75 % de l’activité globale de
ColiPoste, contre 93 % en 2000.
ColiPoste a notablement amélioré sa rentabilité d’exploitation,
alors que cette activité était déficitaire dans la période 2000-2004. Cette
amélioration s’est appuyée sur une politique de montée en gamme de son
offre. Ainsi, dans le segment «particulier à particulier » (en anglais, «
C
to C
»,
Consumer to Consumer
), le tarif économique du colis standard a
été supprimé et remplacé par le Colissimo, plus cher, mais bénéficiant de
l’engagement de livraison en J+2. Dans le segment « entreprises vers les
particuliers » (en anglais, «
B to C
»,
Business to Consumers
) qui
représente 85 % de l’activité totale, malgré une baisse des volumes de 7
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15
% depuis 2005, le chiffre d’affaires de ColiPoste a augmenté de 27 %,
grâce à un transfert important des envois des entreprises vers le colis suivi
dont la part est passée de 53 % à 72% des volumes B to C.
GeoPost
GeoPost, détenue directement à 100% par La Poste, a été créée en mai
1999 en reprenant les quelques participations que Sofipost détenait dans le
domaine du colis : notamment Chronopost, créé en 1985 pour prendre pied
en France dans le secteur naissant de la distribution de documents et colis à
J+1 et une participation minoritaire dans le groupe de messagerie allemand
DPD, qui est devenu le pivot des activités de La Poste dans l’express en
Europe du nord et de l’est.
Le groupe GeoPost détient aujourd’hui une centaine de filiales, 78
étant détenues à 100%, et 18 participations étant minoritaires. Il regroupe
plus de 20 000 salariés, dont près de 6 000 en France. Son chiffre d’affaires
était en 2009 de 3,09 Md€.
Sur le marché domestique, GeoPost intervient par deux filiales :
ChronoPost pour l’express à J+1 et Exapaq pour le colis rapide à J+2
pour
les entreprises. A l’international, il est présent dans 40 pays, dont 26 dans
l’Union européenne.
GeoPost a exclu le fret (envoi de plus de 30 kg non manipulable
par une personne seule), et la logistique de son plan de développement.
Ce choix s’explique par la volonté de La Poste de ne pas s’engager dans
une diversification hasardeuse, éloignée de son métier de base. En effet,
ces activités supposent des réseaux de transport différents, des outils de
tri et de manutention distincts. N’étant pas dans le prolongement naturel
de la distribution du courrier, ces métiers, au demeurant à faible marge
compte tenu de la lourdeur des investissements qu’ils impliquent, ne sont
pas les siens. La Poste se différencie donc de ses grands concurrents
européens qui sont présents sur le marché, aussi bien pour le colis
express, que pour le fret, donc pour tout format et sans limite de poids et
sont actifs sur l’express international grâce à des flottes aériennes qu’ils
contrôlent.
La Poste n’a pas investi non plus le créneau de l’express
international. Elle a cherché à élargir son offre commerciale par des
accords avec Air France KLM, mais plutôt dans le segment du colis
rapide.
Cette faiblesse dans l’express international résulte moins d’un
choix délibéré que d’une situation qui s’est imposée à l’entreprise. Avec
le recul, on peut regretter qu’une occasion ait peut-être été manquée, si on
note que dans les années 1990 La Poste faisait quasiment jeu égal avec
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16
COUR DES COMPTES
son homologue allemande. Celle-ci a pu redresser sa situation, malgré son
échec aux Etats-Unis
17
. Elle affiche en 2009 un résultat d’exploitation,
hors élément exceptionnel, deux fois supérieur à celui de La Poste (1,47
Md€, contre 0,75 Md€).
Désormais, même si la difficulté à fournir une offre express
internationale constitue certainement un handicap (entre l’Asie et
l’Europe par exemple), le coût d’accès à ce marché est devenu
considérable (notamment pour disposer de moyens de transport aérien
dédiés) et le risque très élevé compte tenu des positions oligopolistiques
conquises par les grands « intégrateurs » mondiaux.
La Poste a donc centré ses priorités sur l’espace intra-européen qui
n’exige pas de liaisons aériennes. Elle dispose en revanche dans son
secteur d’activité du réseau de transport routier le plus dense en Europe.
GeoPost est le second opérateur pour le trafic intra-européen, derrière
DHL, mais avant les grands intégrateurs américains, GLS, filiale de la
poste britannique, et TNT.
3 -
Le développement inégal des métiers connexes du courrier
La Poste était présente de longue date, soit en direct, soit par une
filiale, dans la distribution des prospectus publicitaires et dans le transport
de la presse. Elle a développé récemment, par le biais de sa filiale
Sofiposte, des opérations plus systématiques de croissance externe pour
étendre son offre de services aux entreprises pour le traitement de leur
courrier et documents.
Jusqu’en 2006, La Poste n’a pas eu d’autres choix que de combler
les pertes récurrentes des filiales Asphéria et Dynapost du secteur
documentaire et de Mediapost pour la distribution de la publicité non
adressée. Ceci a conduit à une profonde dégradation de la situation
financière de Sofipost. Le redressement financier de la holding et de ses
filiales a nécessité des recapitalisations successives par conversion de
créances, d’un montant total de 169 M€, dont la dernière de 99 M€ en
décembre 2009.
17) Deutsche Post a connu un lourd échec aux Etats-Unis : sa filiale DHL, achetée en
2002, a été contrainte de cesser toute activité sur le marché domestique américain,
supprimant près de 15 000 des 18 500 emplois salariés, avec des pertes qui auraient
atteint 7,5 Md de dollars depuis 2002.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
17
Sofipost
Sofipost est aujourd’hui tête de groupe de l’ensemble des filiales et
sous-filiales (70 sociétés dans le périmètre de consolidation) rattachées aux
métiers du courrier. Elle en consolide les résultats, intégrés dans les comptes
de la direction Courrier.
Une réorganisation récente structure de façon plus logique les diverses
activités des filiales de Sofipost autour de quatre pôles de métiers
relativement homogènes. Chacun est piloté par une holding, elle-même filiale
de la holding Sofipost :
- Doc@Post: les services aux entreprises, couvrant 36 sociétés ;
- Publipost: la publicité non adressée (Mediapost) et la presse avec 21
sociétés ;
- La Poste Global Mail: l’international avec 15 sociétés
- Viapost, avec principalement les filiales Fret GV et Mobigreen.
Les services aux entreprises portent sur la gestion des documents et
du courrier entrant et sortant. Il peut s’agir d’opérations simples comme
la préparation des envois, ou la distribution des plis reçus, mais aussi de
tâche plus complexes comme l’envoi ou la réception électronique du
courrier ou l’édition de documents à partir de fichiers numériques
transmis par le client.
Dans ces deux segments du courrier entrant et du courrier sortant,
la stratégie de Sofipost a eu pour objectif à partir de 2006 « d’être un
acteur de référence sur le marché domestique tant dans l’entrant que dans
le sortant ».
Il en est résulté une politique relativement active de croissance
externe consistant à permettre à diverses filiales d’atteindre une taille
critique suffisante sur un marché en voie de concentration. Leurs diverses
activités sont encore insuffisamment coordonnées entre elles malgré la
création récente du pôle documentaire Doc@Post.
Dans le secteur de la publicité non adressée (PNA – cf. glossaire),
la stratégie adoptée en 2003 consistait à sauver cette activité très
déficitaire, car La Poste se refusait à laisser le champ libre à un
concurrent potentiel qui utiliserait ce créneau pour préparer son entrée
ultérieure dans le marché postal. Cette analyse s’est trouvée confirmée
dans d’autres pays européens, où la publicité non adressée a bien été le
point d’entrée des opérateurs alternatifs (voir infra).
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18
COUR DES COMPTES
Pour consolider cette activité, La Poste a transféré à sa filiale
Mediapost ses activités propres de portage de la PNA et pris le contrôle,
en 2003, d’un autre opérateur privé, la société Delta Diffusion, elle-même
déficitaire, qui appartenait à Vivendi Universal Publishing. Ce choix
stratégique a permis de redresser une situation financière structurellement
dégradée.
Certes, l’acquisition de Delta Diffusion a été coûteuse, de l’ordre
de 60 M€, du fait des indemnités de départ de près de 650 personnes et
des dispositifs de réorientation de près de 6 000 postiers qui distribuaient
auparavant la PNA en complément de leurs tournées. Mais, après une
réduction sensible de 70 à 45 % de sa part de marché, par le biais d’un
large recours à des emplois à temps partiel (80 % des 11 000
distributeurs) et des salaires alignés sur la convention collective du
secteur de la PNA (écart de l’ordre de 20 % par rapport aux personnels de
La Poste), Mediapost est redevenu rentable et majoritaire sur le marché
en termes de chiffres d’affaires.
D - La professionnalisation de la gestion
La Poste, devenue entreprise autonome en 1990, a déployé depuis
le début des années 2000 un effort soutenu pour transformer
l’administration pyramidale et centralisée qu’elle était demeurée en une
organisation comparable à celle d’un groupe industriel, en dépit du
handicap de son statut juridique d’établissement public.
La stratégie de la Poste a consisté, dans un premier temps, à
déconcentrer le pilotage opérationnel vers les métiers du groupe pour
responsabiliser davantage l’encadrement sur les objectifs et les résultats
(programme de Responsabilisation Du Management, RDM). Dans une
seconde étape, la démarche a conduit à doter les métiers de toutes les
fonctions support (ressources humaines, finances, contrôle de gestion,
qualité…)
nécessaires
à
la
pleine
maîtrise
des
responsabilités
opérationnelles qui leur étaient confiées (projet Performances des
Fonctions Transverses, PFT).
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
19
1 -
La mesure de la performance économique
Les « métiers »
18
, simples services de l’établissement public La
Poste, sans personnalité morale distincte, ne sont pas tenus de tenir une
comptabilité autonome. Toutefois, La Poste établit depuis l’exercice 2000
des comptes par métiers qui ont pour vocation de traduire la performance
économique.
Ces comptes ont sensiblement évolué. Etablis à l’origine par la
direction des comptes sociaux du groupe, ils se limitaient à un compte
d’exploitation. Depuis 2006, les métiers arrêtent un compte de résultat et
un bilan, établis selon les normes comptables françaises.
La Poste dispose à présent d’un outil de pilotage peu différent de
celui dont se doterait une entreprise si le métier était filialisé.
2 -
Les conventions de service
Les conventions de service ont été systématisées à partir de 2006
afin de définir pour une période annuelle ou plus longue les modalités des
prestations internes fournies par un métier à un autre. Le service
prestataire et le service client déterminent les volumes, les prix, les
caractéristiques
quantitatives
et
qualitatives
des
prestations,
les
procédures d’approbation, d’arbitrage, de suivi d’exécution etc.
Pour piloter ce processus, a été créée une direction de la
gouvernance des conventions de service du groupe (DGCSG) qui peut,
notamment organiser les arbitrages nécessaires en cas de désaccord entre
le prestataire et le client.
Ces procédures ont le mérite de formaliser les relations entre
services de La Poste, mais elles ne peuvent suffire par elles-mêmes à
résoudre la question souvent difficile du niveau des coûts internes par
rapport aux prix du marché et de leur impact sur la compétitivité des
services offerts à la clientèle.
18) La Poste désigne par le terme « métiers » les directions non filialisées du courrier,
de l’Enseigne et du colis.
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20
COUR DES COMPTES
3 -
La gestion par la performance
Au terme d’un processus itératif de négociations et d’arbitrages de
type budgétaire entre la direction financière du groupe et les directions
des métiers, des objectifs annuels sont fixés sous forme de plans d’action
nationaux ou de feuilles de route. Des conventions, dénommées « contrat
d’action et de progrès », fixent des objectifs de chiffre d’affaires par
produits, d’évolution des effectifs, de marge d’exploitation, de qualité etc.
Ils sont déconcentrés ensuite entre les directions et leurs responsables
territoriaux
et
opérationnels,
pouvant
aller
jusqu’au
responsable
d’établissement, tel le directeur d’une plate-forme industrielle du courrier.
Un suivi des résultats atteints est organisé mensuellement. Les
directions des métiers tiennent un tableau de bord recensant les résultats
des échelons territoriaux et comportant généralement un classement des
services sur des paramètres essentiels, comme le chiffre d’affaires, la
maîtrise des effectifs et des charges, la contribution aux résultats.
L’ensemble des données mensuelles est assorti d’une prévision
d’atterrissage en fin d’exercice.
La qualité du processus de gestion par la performance et la rigueur
qui l’accompagne dans son suivi, comme dans ses conséquences en
termes de rémunérations variables, méritent d’être soulignées. Elle
constitue un acquis pour La Poste.
4 -
La filialisation d’une fonction immobilière renforcée
Les objectifs du contrat de plan « performances et convergence »
2003-2008 avaient des implications importantes en matière immobilière
(par exemple la mise en oeuvre de CQC, ou le programme de rénovation
des bureaux de poste). Ce contrat de plan ne comportait cependant aucune
disposition à ce sujet. C’est par un échange de lettre en mars-avril 2004
que La Poste et le ministre de tutelle ont défini une nouvelle politique
immobilière. Celle-ci a connu un démarrage assez lent et ses effets
positifs n’ont
commencé à se faire sentir que depuis 2006.
Après avoir écarté la solution de cession et de relocation externes
du parc immobilier, comme France Télécom l’avait fait en son temps
pour améliorer sa solvabilité, La Poste a choisi de filialiser cette fonction
support avec la volonté de distinguer le rôle du «locataire » de celui du
« propriétaire » lequel doit en principe mettre à disposition les
installations définies par les occupants à des prix proches des loyers du
marché. Ce rôle est tenu par Poste Immo, filiale détenue à 100 %, créée
en juillet 2004. Poste Immo détient 4 169 immeubles, et gère un parc de
plus de 8 millions m².
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
21
E - La cohésion sociale au sein de La Poste
Le projet majeur de modernisation du courrier (CQC), avec un
objectif de gains de productivité très exigeant, constituait un enjeu crucial
pour La Poste. La stratégie fixée par les plans successifs, « Performance
et convergences », puis « Performance et confiance », impliquait d’autres
réorganisations importantes.
L’acceptation interne de telles évolutions nécessitait des mesures
d’accompagnement social. Au regard d’une histoire sociale riche et d’un
corps social réactif, La Poste s’est voulue exemplaire. Elle s’est affichée
comme un « employeur responsable » qui, dans un contexte de forte
réorganisation de ses activités, renforcerait cependant la stabilité de
l’emploi de ses agents, quel que soit leur statut de fonctionnaire ou de
salariés de droit privé. Elle a pris ainsi l’engagement de ne pas recourir à
des mesures de départs contraints. En un sens elle cherchait légitimement
à réussir une modernisation sans bouleversement, en faisant le pari que le
jeu des mobilités, des départs naturels non remplacés et la flexibilité des
organisations assureraient la cohérence nécessaire entre les gains de
productivité potentiels et l’affectation des effectifs.
La démarche suivie a consisté à fixer dans un accord national du
21 juin 2004, dit accords de Vaugirard, « relatifs aux principes et
méthodes du dialogue social », des principes généraux concernant la
transformation des contrats à durée déterminée en CDI, la revalorisation
des carrières, la réduction des temps partiels non choisis ou les
procédures de mobilité, et à laisser aux échelons locaux le soin d’adapter
ces
orientations
générales
aux
spécificités
propres
à
chaque
réorganisation.
Ainsi, plus de 1 000 accords sociaux ont été conclus à divers
niveaux de l’entreprise, permettant de concentrer le dialogue social sur les
modalités des réorganisations plutôt que sur des objectifs préalables, tels
les réductions d’emplois.
Cet effort d’accompagnement social a naturellement pesé sur les
charges de l’entreprise, mais il a permis beaucoup des changements qui
sont intervenus, notamment une réduction de 14 % des effectifs de la
maison mère entre 2003 et 2009, soit plus de 40 000 emplois.
Le nombre total de jours de grève par agent est passé dans le même
temps
de 1,38 à 0,87 entre 2003 et 2008, soit une diminution de 37 %.
Cette évolution traduit une diminution des conflits nationaux mais les
arrêts de travail locaux liés à des projets de réorganisation sont plus
fréquents (voir annexe n°4).
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22
COUR DES COMPTES
______________________
CONCLUSION
_____________________
La modernisation dans la continuité qui a été l’objectif de La
Poste depuis 2003 a permis de profondes transformations comme
l’industrialisation du courrier et la professionnalisation de la gestion du
groupe, devenue comparable à celle des grandes entreprises privées. Les
foyers de pertes structurelles ont été résorbés (le colis, la distribution de
la publicité non adressée et le secteur documentaire).
Même si son réseau est encore incomplet en particulier à
l’international, La Poste est devenue un acteur majeur de l'express en
Europe. Dans le domaine du colis, La Poste a pu faire progresser de
façon régulière son chiffre d’affaires, mais essentiellement par le biais
d’une montée en gamme de ses services compensant partiellement les
baisses de volumes de cette activité sur laquelle les concurrents se sont
renforcés. Enfin, les services financiers de La Poste ont connu une
mutation profonde avec la création de La Banque Postale.
L’ampleur
de
ces
évolutions
nécessitait
des
mesures
d’accompagnement social qui les rendent acceptables. Les efforts de
l’entreprise ont contribué à la nécessaire mobilisation des personnels. Ils
ont facilité les réorganisations et permis une réduction de plus 40 000
emplois de 2003 à 2009. Cette politique sociale a néanmoins créé des
rigidités qui pourraient se révéler trop fortes dans le contexte
économique nouveau.
Par ailleurs, le réseau des bureaux de poste n’a connu qu’une
adaptation limitée, illustrant la recherche prioritaire de compromis.
II
-
Un redressement soutenu par des mesures
diverses
Entre 2003 et 2007, La Poste a rétabli ses comptes et fait
progresser fortement ses résultats financiers. L’État y a contribué en
corrigeant les principaux handicaps concurrentiels qui la pénalisaient. Des
mesures non reconductibles ont pu jouer soit favorablement, soit
défavorablement. Le groupe semblait prêt de rejoindre le niveau de ses
grands concurrents lorsque le choc du courrier de 2008 et le
déclenchement de la crise économique ont montré la fragilité de ce
redressement financier.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
23
A - Des comptes rétablis
En dix ans de 1991 à 2001, La Poste n’avait dégagé pratiquement
aucun bénéfice : le cumul du résultat net consolidé ne s’était élevé qu’à
38 M€. C’est dire l’incapacité dans laquelle se trouvait l’exploitant public
d’investir, alors que dans le même temps, les grands opérateurs européens
et notamment la poste allemande, modernisaient profondément les
processus industriels et engageaient une diversification massive de leurs
activités, en tirant notamment parti de fortes hausses du prix du timbre.
Le redressement s’est amorcé en 2002 avec un résultat net
consolidé de 34 M€. Entre 2003 et 2007, le résultat net consolidé de La
Poste a plus que quadruplé, passant de 202 à 943 M€. Il en est de même
du ratio résultat net/chiffre d’affaires qui a progressé de 1,1 à 4,54, alors
qu’il n’avait à aucun moment atteint 1 % de 1991 à 2001, sauf en 1999.
Cette amélioration de la rentabilité a eu un effet appréciable sur le
renforcement des capitaux propres, permettant à La Poste d’engager,
enfin, un programme majeur d’automatisation des opérations de tri du
courrier (Cap Qualité Courrier), de développer des opérations de
croissance externe dans le secteur du colis-express et de préparer la
filialisation des services financiers au sein de La Banque Postale.
Evolution des résultats de La Poste
M€
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Produits opérationnels
18 183
18 859
19 461
20 129
20 778
20 799
20 527
Progression de N-1 à N
3,7%
3,2%
3,4%
3,2%
0,1%
-1,3%
Charges d'exploitation
17 873
18 336
18 684
19 187
19 472
19 913
19 770
Progression de N-1 à N
2,6%
1,9%
2,7%
1,5%
2,3%
-0,7%
Résultat d'exploitation
310
523
777
942
1 306
886
757
Progression de N-1 à N
68,7%
48,6%
21,2%
38,6%
-32,2%
-14,6%
Marge opérationnelle
1,72%
2,80%
4,03%
4,68%
6,29%
4,26%
3,69%
Résultat net
202
374
557
811
943
529
531
Progression de N-1 à N
85,1%
48,9%
45,6%
16,3%
-43,9%
0,4%
Source : Rapports annuels de La Poste (normes IFRS à compter de 2006)
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24
COUR DES COMPTES
1 -
L’évolution du chiffre d’affaires
Sur la période 2003-2007, le chiffre d’affaires du groupe La Poste
a enregistré, une progression modérée mais régulière de 3,4 % par an.
Alors que les volumes du courrier reculaient davantage en
Allemagne et aux Pays-Bas, la progression du chiffre d’affaires consolidé
a été plus de deux fois plus rapide pour TNT (taux de croissance annuel
moyen de 7,6 % sur la période 2004-2007) et Deutsche Post DHL (+ 7,8
% en moyenne par an) du fait des opérations de croissance externe
conduites par ces concurrents dans les domaines de l’express et de la
logistique
19
.
Le tableau ci-dessous fait apparaît les éléments essentiels suivants :
-
Un ralentissement de l’activité courrier à partir de 2005, dû
notamment à une baisse en volume des trafics, en partie
compensée par des augmentations des tarifs, permettant une
croissance du chiffre d’affaires de 8,8 % entre 2003 et 2007 ;
-
Un fort développement de l’activité colis-express dont le
chiffre d’affaires global croît de près de 40 % sur la période ;
-
Une évolution plus modérée des services financiers, sauf en
2006, notamment du fait de l’apport à La Banque Postale de
38,4 Md€ de livrets d’épargne de la Caisse nationale d’épargne.
En conséquence, à la clôture de l’exercice 2007, le Courrier
conservait un poids prépondérant dans le chiffre d’affaires du groupe,
mais déclinait de façon continue (de 65,86 % en 1998 à 55,5% en 2007).
Les
métiers du colis-express et des services financiers étaient
pratiquement à un niveau équivalent dans la répartition du chiffre
d’affaires du groupe (21,7 % et 22,7 %).
19) Avec la fermeture des activités d’express domestique de DHL aux Etats-Unis déjà
mentionnée, Deutsch Post avait subi en 2008 une perte nette de 1,7 Md€, réduisant sa
marge opérationnelle de 5% à -1 %. DP DHL qui a cédé Postbank est redevenu
profitable dès 2009, avec un bénéfice net de 644 M€ et annonce un résultat compris
entre 1,6 et 1,9 Md€ pour 2010.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
25
Répartition du chiffre d’affaire du groupe par métier
M€
1998
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Courrier
9 376
10 594
10 873
11 242
11 318
11 530
11 318
11 037
Progression
N-1 à N
2,6%
3,4%
0,7%
1,9%
-1,8%
-2,5%
Colis et
Express
1 493
3 239
3 484
3 689
4 170
4 501
4 674
4 456
Progression
N-1 à N
7,6%
5,9%
13,0%
7,9%
3,8%
-4,7%
Services
financiers
3 280
4 147
4 292
4 310
4 610
4 712
4 771
4 992
Progression
N-1 à N
3,5%
0,4%
7,0%
2,2%
1,3%
4,6%
GROUPE
14 236
18 004
18 677
19 274
20 129
20 778
20 799
20 527
Progression
N-1 à N
3,7%
3,2%
4,4%
3,2%
0,1%
-1,3%
Source : Cour des comptes, sur la base des rapports annuels de La Poste
2 -
L’évolution des résultats
Au cours de la même période, le résultat d’exploitation a progressé
fortement, passant de 310 M€ à 1 306 M€. Cette hausse résulte de la
bonne tenue du chiffre d’affaires, qui a progressé de 14,3% entre 2003 et
2007, et de la maîtrise des charges d’exploitation, en particulier des
charges salariales, qui ont progressé moins vite (+3 %). Cette progression
a porté la marge opérationnelle de 1,7 % à 6,3 % et le rapport résultat
net/chiffre d’affaires à 4,5 % en 2007 (voir annexe n°5).
Cette amélioration a permis à La Poste de verser pour la première
fois, en 2008, au titre de l’exercice 2007, un dividende à l’Etat de
141 M€.
B - La contribution des mesures de rattrapage
concurrentiel
Le contrat de plan pour 2003-2007 comportait l’engagement d’un
rattrapage tarifaire permettant de placer La Poste dans une position
comparable à celle des principaux opérateurs européens et celui de
réformer le financement des retraites des fonctionnaires pour atteindre un
niveau de charges de retraite équitables au regard de la concurrence. Dans
le même esprit, était prévue la création d’un établissement de crédit dont
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26
COUR DES COMPTES
les compétences seraient plus larges que celles des services financiers et
progressivement alignées sur celles des autres banques de détail.
1 -
Le rattrapage d’un blocage tarifaire de longue durée
Les rattrapages tarifaires ont contribué à soutenir le chiffre
d’affaire de l’activité courrier, malgré la baisse en volume des trafics.
Entre 2003 et 2007, le volume global du courrier a reculé de 0,8 %,
mais le chiffre d’affaires correspondant a progressé de 8,8 %. La
dissymétrie est encore plus forte pour le courrier des particuliers, en
baisse de 8,5 % en volume, mais en progression de 2,4 % quant au chiffre
d’affaires.
Le prix du timbre de la lettre prioritaire a augmenté de 17 %,
induisant un impact positif sur le chiffre d’affaires, évalué par exemple à
342 M€ en 2005.
Ces revalorisations ont permis de combler le retard tarifaire qui
était résulté d’un long blocage du prix du timbre. Les barèmes de La
Poste sont désormais moins décrochés qu’ils ont pu l’être dans le passé
par rapport à ses principaux concurrents. Ces revalorisations sont
néanmoins intervenues plus tard que dans d’autres pays européens
comme l’Allemagne. Deutsche Post en a tiré avantage pour se préparer à
l’ouverture du marché postal à la concurrence. Les tarifs de La Poste
demeurent cependant, de façon générale, un peu en dessous de la
moyenne européenne et dans certains cas notablement inférieurs à ceux
de Deutsche Post et TNT. Ces deux opérateurs n’ont pas, par exemple, de
tarif économique pour la lettre égrenée et appliquent des prix
sensiblement plus élevés pour les envois recommandés et pour les envois
en valeur déclarée.
Les augmentations du prix du timbre de la lettre prioritaire
égrenée
20
ont eu pour effet de reporter une partie des envois sur des tarifs
plus économiques, en particulier pour le courrier des entreprises. Ainsi,
les volumes urgents traités en J+1 et J+2 ont représenté, en 2003, 45 % du
volume tous flux confondus hors export. Ils ne représentaient plus que 36
% en 2007. Cette évolution est encore plus marquante si on ne considère
que la lettre prioritaire en J+1, dont la part a régressé de 38 % en 2003 à
29 % en 2008 et même 10,1 % pour la lettre prioritaire affranchie en
20) Le courrier « égrené » correspond à des envois de moins de 100 plis pour
un
département ou 400 plis sur diverses destinations déposés en même temps. Les envois
de quantité supérieure à ce seuil constituent
le «courrier industriel », bénéficiant de
tarifs spécifiques et souvent collecté directement chez l’émetteur par La Poste.
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27
timbre poste soumis aux hausses tarifaires. Ce constat illustre que les
marges de manoeuvre de La Poste sur les tarifs du courrier sont
probablement devenues plus étroites et le seront davantage du fait du
renforcement de la concurrence et du média électronique.
2 -
La réforme du financement des retraites des fonctionnaires de
La Poste
Avant la réforme du financement des retraites des fonctionnaires
de La Poste, cette dernière ne bénéficiait pas d’un mécanisme de
cotisation de retraite libératoire mais acquittait le montant effectif des
pensions versées à ses fonctionnaires retraités
21
. Or, l’arrêt du recrutement
des fonctionnaires se traduisait par une réduction progressive des
cotisations correspondantes, tout en maintenant à la charge de l’entreprise
le paiement des pensions. La continuation de ce mode de financement
aurait entraîné un accroissement du taux de cotisation global de La Poste,
déjà très élevé en 2005 (41,9 % de la masse salariale totale), à des
niveaux incompatibles avec la compétitivité de l’entreprise (plus de 55 %
de la masse salariale en 2015).
De plus, le passage aux normes IFRS
22
imposait à La Poste de
provisionner ses engagements au titre des retraites dues à ses
fonctionnaires, évalués à 76 Md€ au 31 décembre 2005. Cette obligation
posait une question de survie à l’entreprise.
La loi de finances rectificative pour 2006 a donc modifié le
dispositif de financement des retraites des fonctionnaires rattachés à La
Poste. Les obligations de retraite des fonctionnaires de La Poste ont été
reprises par l’établissement public national de financement des retraites
de La Poste (EPNFRP), en contrepartie d’une contribution exceptionnelle
de 2 Md€ versée par La Poste
23
.
Depuis le 1
er
janvier 2006, La Poste acquitte pour ses agents
fonctionnaires une cotisation employeur à caractère libératoire fixée selon
un principe d’équité concurrentielle en proportion des traitements soumis
à retenue pour pension. Son taux doit atteindre en 2010 un niveau
comparable à ceux des autres entreprises appartenant aux secteurs postal
et bancaire.
21) En application de l’article 30 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du
service public de la poste et des télécommunications
22) International Financial Reporting Standards
23) Dans l’attente de l’adossement prévu à la CNAV, les engagements de retraite
demeurent à ce jour pris en charge par l’Etat.
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28
COUR DES COMPTES
Cette réforme a allégé les charges patronales de retraite de La
Poste d’un montant cumulé estimé à 1,3 Md€ sur la période 2007-2009.
De même, l’extension à La Poste de l’allègement des charges
sociales sur les bas salaires, par la loi du 20 mai 2005, a réduit les charges
du groupe d’un montant cumulé de 780 M€ sur la période 2006-2009,
dont 200 M€ en 2009.
3 -
Le transfert de la Caisse nationale d’épargne
A sa création, le capital de La Banque Postale a été constitué à
partir du transfert non seulement des fonds propres des services financiers
de La Poste, mais aussi d’une quote-part de ceux de la Caisse nationale
d’Epargne (CNE). Ce dernier transfert correspond aux biens, droits et
obligations reçus de la CNE, comprenant un apport net de 999 M€ pour la
section épargne logement et de 40 M€ pour la section des plans d’épargne
populaire. Il a constitué un apport extérieur de fonds propres de 1 039
M€, soit un peu plus de 40 % des capitaux propres de La Banque Postale
(2 501 M€ au 31 décembre 2005)
24
.
La Poste a ainsi bénéficié de la part de l’Etat d’un ensemble de
décisions très significatives.
C - L’impact de mesures non reconductibles
Certaines mesures non reconductibles ont également soutenu les
résultats financiers. D’autres, qui avaient pour objectif d’assurer la
convergence vers le droit commun des conditions d’exercice des services
financiers, ont en revanche eu un impact défavorable.
1 -
Les reprises de provision épargne logement
Jusqu’à la création de La Banque Postale en 2006, les services
financiers de La Poste collectaient les fonds versés sur les comptes et
plans d’épargne logement centralisés à la Caisse nationale d’épargne
(CNE) et distribuaient également pour le compte de la CNE les prêts
d’épargne logement attachés à ces comptes et plans.
24) Cet apport de fonds propres correspondait aux obligations prudentielles du
portefeuille de crédits immobiliers (épargne logement) auparavant gérés par la CNE
puis transférés à LBP.
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29
La CNE avait constitué depuis 1998 une provision sur les dépôts
d’épargne logement. D’un montant de 611 M€ au 31 décembre 2005, elle
a été transférée à La Banque Postale lors de sa création.
Cette provision est destinée à faire face aux risques de taux liés aux
contrats d’épargne logement
25
. L’évolution des taux d’intérêt et la
substitution d’encours fortement rémunérés par des encours moins
rémunérés ont permis à LBP de reprendre 237 M€ sur cette provision au
31 décembre 2006, puis à nouveau 103 M€ au 31 décembre 2007, 25 M€
en 2008 et 25 M€ en 2009
26
.
2 -
L’externalisation du patrimoine immobilier
L’externalisation du patrimoine immobilier de La Poste dans une
foncière dédiée a contribué de manière notable à l’amélioration des
résultats du groupe.
En effet, la cession en 2004-2005 de près de 4 200 immeubles de
La Poste à des sociétés foncières a permis de réévaluer la valeur de ces
actifs. La plus value constatée sur ce patrimoine de 3 Md€ a été de 777
M€. Le montage mis en place a consisté pour La Poste à céder ses propres
immeubles à des foncières contrôlées par Poste Immo, sous-holding créée
en juillet 2004 et détenue à 100 %. Le transfert a été schématiquement
réalisé en deux étapes : en premier lieu, La Poste a fait apport des actifs
immobiliers à 12 sociétés foncières au statut de SCI en échange de titres
desdites filiales ; en second lieu, La Poste a fait apport à Poste Immo des
titres qu’elle avait reçus en rémunération des apports d’immeubles aux
SCI.
Les apports ayant été effectués au profit de sociétés qui avaient
opté pour le régime de l’intégration fiscale, l’opération a été fiscalement
neutralisée au titre de 2005, les plus-values devant cependant être
réintégrées
progressivement
dans
le
résultat
de
La
Poste
proportionnellement à la durée d’amortissement des immeubles.
Le traitement comptable consolidé en 2005 de la plus-value s’est
traduit, net d’impôt sur les sociétés, d’un côté, par une réévaluation de
l’actif immobilier de 777 M€ et de l’autre, par une augmentation des
25) L’obligation de rémunérer l’épargne à un taux fixé dès la souscription du livret et
d’octroyer ultérieurement un prêt à un taux fixé à l’origine crée un risque couvert par
cette provision.
26) Les variations des provisions sont enregistrées au compte de résultat consolidé et
entrent, en conséquence, dans la composition du PNB. La provision pour risques
épargne logement s’élevait à 221 M€ au 31/12/2009.
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30
COUR DES COMPTES
réserves de 466 M€, et une dette d’impôt différé de 311 M€. S’y ajoutent
43 M€ de gains d’impôt sur d’autres SCI ne faisant pas partie du
périmètre d’intégration fiscale.
Par ailleurs, la création de Poste Immo permet à La Poste de
récupérer la TVA grevant les investissements ou les travaux dès leur
réalisation, alors que la TVA sur les loyers n’est versée au Trésor qu’au
fur et à mesure de leur encaissement. Ce dispositif de droit commun
représente pour La Poste une avance de trésorerie d’environ 50 M€
chaque année.
3 -
L’épargne réglementée
a)
Une convergence vers le droit commun
La rémunération de La Poste au titre de la collecte du livret
d’épargne populaire (LEP) a été alignée sur le droit commun dès 2006.
Alors que les services financiers de La Poste percevaient une
rémunération égale à 1% de l’encours collecté, La Banque Postale a
perçu, à compter du 1
er
octobre 2006, 0,5% de l’encours collecté, comme
l’ensemble des établissements de crédit. Les modalités de centralisation
de l’encours du livret de développement durable (LDD) collecté par LBP
ont également été alignées sur les conditions de droit commun.
b)
Le livret A : du monopole à la banalisation de sa distribution
Jusqu’au 1er janvier 2009, La Banque Postale a bénéficié, comme
les Caisses d’Epargne et le Crédit Mutuel, du monopole de la distribution
du livret A. Ses encours s’élevaient à 59 Md€ fin 2008.
Elle percevait une commission de 1,3% de l’encours au titre de la
collecte et de la distribution du Livret A. Cette rémunération représentait
un produit annuel de l’ordre de 14% du produit net bancaire (PNB) de la
banque au cours de la période 2006-2008.
Cette rémunération était fixée par l’Etat, pour La Banque Postale, à
un niveau élevé en raison de la mission d’accessibilité bancaire confiée à
cette dernière à travers le livret A. La gestion de ces livrets à vocation
sociale représente un coût spécifique : ces 12 millions de livrets, soit 60
% du nombre total de livrets A de La Banque Postale, ne représentent que
0,7 % des encours (leur solde moyen est inférieur à 150 €), mais totalisent
44 % du total des opérations et environ 50 % des coûts de gestion.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
31
Il demeure que le livret A a pu, dans une certaine mesure, jouer un
rôle de produit d’appel, en permettant à La Poste de bâtir une relation
bancaire fidèle lui ouvrant l’opportunité de proposer d’autres produits
bancaires plus rémunérateurs.
Cet avantage concurrentiel a disparu depuis la suppression du
monopole de distribution du livret A par la loi de modernisation de
l’économie du 4 août 2008. La Banque Postale estime à – 36 M€
27
l’impact sur son PNB 2009 des nouvelles modalités de rémunération de la
collecte du livret A. Mais, comme l’ensemble des établissements de
crédit, elle continue de bénéficier d’un taux de rémunération à hauteur de
0,6 % des encours centralisés auprès de la CDC, qui représente un
avantage par rapport à la rémunération du LEP qui a été ramenée, elle, à
0,5 %.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Au cours des années 1990, La Poste se trouvait dans une situation
financière très dégradée du fait de résultats très modestes (elle avait été,
à plusieurs reprises, en déficit et n’avait dégagé, entre 1991 et 2001,
pratiquement
aucun
bénéfice).
A
compter
de
2003,
elle
a
progressivement rétabli sa situation financière et redressé sa rentabilité
pour atteindre, en 2007, un résultat d’exploitation de plus de 1,3 Md€ et
une marge opérationnelle de 6,3 %.
Ce redressement incontestable a été soutenu par des mesures
importantes, dont certaines traduisaient des engagements de l’Etat de
corriger les principaux handicaps concurrentiels de l’opérateur postal.
Ces résultats n’auront cependant pas suffi à préparer La Poste au
choc du courrier. Ce constat a d’autant plus d’importance que, dans la
période à venir, des mesures analogues seront difficiles à mobiliser, au-
delà de l’augmentation de capital. Par ailleurs, les marges de manoeuvre
sur les tarifs seront plus étroites du fait du renforcement de la
concurrence et du développement de la communication numérique.
27) Par rapport à une rémunération de 1,3% sur encours, qui était appliquée avant le
1er janvier 2009.
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32
COUR DES COMPTES
III
-
Des relais de croissance qui n’ont pas été
pleinement au rendez-vous
L’Etat, en bloquant le prix du timbre pendant près d’une décennie,
jusqu’en 2003, avait contribué au resserrement de la marge d’exploitation
de La Poste, limitant sa capacité à financer ses investissements de
modernisation et, a fortiori, ses possibilités de croissance externe en vue
de développer des relais de croissance.
De son côté, La Poste, mobilisée par la priorité accordée à la
modernisation des processus de traitement du courrier, y a investi la
majeure partie de ses moyens financiers (3,1 Md€ sur la période 2004-
2010). Cette priorité, dans un contexte de fonds propres modestes et d’un
endettement élevé, a conduit à une politique de développement des relais
de croissance sans doute moins volontariste qu’elle aurait pu l’être et, en
tout cas, bien moins ambitieuse que celle conduite par les principaux
concurrents européens de La Poste.
A - La Banque Postale, une croissance freinée par un
agrément limité et des charges trop élevées
1 -
Un champ d’activité incomplet
Après la création de la banque en 2006, l’élargissement de ses
compétences a été très progressif. Ce n’est qu’en 2007, que les pouvoirs
publics ont autorisé La Banque Postale à étendre sa gamme de produits au
crédit à la consommation et seulement en 2008, qu’ils l’ont autorisé à
étendre sa gamme de produits à l’assurance IARD (Incendie-Accident-
Risques-Divers). Ces autorisations ont été mises en oeuvre par La Banque
Postale avec délai (en avril 2010 dans le premier cas et en 2011 dans le
second), en raison pour une part de la complexité inhérente au montage
de partenariats.
2 -
Des possibilités de croissance externe contraintes
Tant
pour
des
raisons
de
compétences
professionnelles,
pratiquement inexistantes en interne sur certains créneaux, que pour
limiter le poids de ses investissements, La Banque Postale a fait le choix
des partenariats pour ses opérations de croissance externe.
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33
Le plus important des partenariats récents est celui conclu avec la
Société Générale dans le domaine du crédit à la consommation. Il s’est
concrétisé par la création d’une société commune, La Banque Postale
Financement, détenue à hauteur de 65% par LBP au titre de la
valorisation de son portefeuille clients et de l’utilisation de son réseau, et
de 35% par la Société Générale, au titre d’un apport en numéraire de 398
M€.
De nombreux autres partenariats ont été conclus, dans les
domaines de la gestion privée (avec Oddo et compagnie), des moyens de
paiement (filiale commune avec la Société Générale), du crédit
immobilier (avec la Matmut), de l’assurance de dommages (co-entreprise
avec Groupama).
Cette politique, conséquence indirecte de la priorité accordée par
La Poste aux investissements dans l’activité courrier, présente l’avantage
d’étendre la gamme d’activités de La Banque Postale sans peser trop
lourdement sur les capacités d’investissement du groupe. Elle présente, en
revanche, l’inconvénient de limiter la remontée des résultats attendus de
ces opérations de croissance externe. Pour prudent qu’il soit, ce schéma
de croissance prive La Banque Postale d’une maîtrise complète de son
développement, ce qui est sans doute regrettable dans le secteur de la
banque de détail aux particuliers et du crédit à la consommation, où
l’atout de son réseau et la proximité acquise avec sa clientèle lui
confèrent des atouts réels.
3 -
Un produit net bancaire en retrait par rapport aux prévisions
La Banque Postale a dégagé, sur la période 2006-2008, un produit
net bancaire (PNB)
28
inférieur aux prévisions qui figuraient dans le
dossier d’agrément transmis en 2005 au comité des établissements de
crédit et des entreprises d’investissement (CECEI).
Entre 2006 et 2007, dans un contexte économique qui n’était pas
encore touché par la crise, le PNB a progressé de 2,49 %, pour atteindre
4,65 Md€. Ce PNB est en retard de plus de 150 M€ par rapport au dossier
d’agrément. Le retard est d’autant plus marqué que le PNB 2007 intègre
une reprise de provision épargne logement de 102,6 M€. Le résultat
d’exploitation a progressé de 25 %, au niveau de 444 M€, mais il accuse
un écart de près de 100 M€ par rapport au dossier d’agrément.
En 2008, le retard du PNB par rapport au dossier d’agrément s’est
accentué (- 470 M€).
28) Voir glossaire
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34
COUR DES COMPTES
Au total, sur la période 2006-2008, alors que le PNB aurait dû
progresser de plus de 11%, il a quasiment stagné (0,5 %)
29
.
Le retard dans le développement du produit net bancaire (PNB) est
imputable pour partie à des éléments non prévus dans le plan d’activité
2005 : baisse du commissionnement de certains produits d’épargne
réglementée,
impact
de
la
crise
financière,
diminution
du
commissionnement interbancaire sur les échanges de chèques. Mais
comme souligné précédemment, il résulte aussi de la lenteur avec laquelle
les nouvelles compétences ont été autorisées et mises en oeuvre.
4 -
Des charges d’exploitation élevées
Les charges d’exploitation s’élevaient en 2008 à 4,3 Md€, dont 75%
(3,2 Md€) proviennent des refacturations de la maison mère au titre
principalement de l’utilisation du réseau des bureaux de poste. En dépit de
l’avantage que représente le fait de partager les coûts de l’Enseigne avec
les autres métiers, LBP supporte les charges communes d’un réseau
surdimensionné par rapport à ses propres besoins et elle ne les maîtrise que
de manière incomplète
Au total, compte tenu du retard dans le développement du PNB et
du niveau élevé des charges d’exploitation de LBP, son PNB par agent
s’élevait en 2008 à 99 500 euros, contre un ratio d’environ 140 000 et
170 000 euros/agent dans deux autres banques de détail. Ce décalage
reflète le fait que le niveau des effectifs de la banque, rapporté à son
activité, est sensiblement plus élevé que celui des autres réseaux bancaires.
5 -
Des marges de manoeuvre financières étroites
Outre un PNB inférieur aux prévisions et des charges d’exploitation
élevées, La Banque Postale a vu ses marges de manoeuvre financières
réduites par l’obligation de verser des dividendes supérieurs aux prévisions
du dossier d’agrément et par un montant de fonds propres faible en valeur
absolue.
Le montant total des dividendes distribués à sa maison-mère au titre
des exercices 2006 à 2008 a été de 531 M€, représentant 69 % du résultat
net social, soit plus du double de la prévision du dossier d’agrément.
29) Les chiffres cités dans cette partie sont en données sociales, pour permettre la
comparaison avec le dossier d’agrément transmis en 2005 au CECEI. En données
consolidées, le PNB a progressé, sur la même période, de 3,68 % contre 10,65 %
prévu.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
35
La Banque Postale dispose de fonds propres conformes aux
exigences prudentielles mais dont le montant, modeste en valeur absolue,
ne permettrait pas une opération de croissance externe structurante.
Au total, ces éléments illustrent l’une des contradictions que La
Poste doit résoudre. Face au choc économique du courrier, il est nécessaire
que les autres métiers deviennent des relais de croissance. De ce point de
vue, LBP sera nécessairement très sollicitée puisqu’elle représente en 2009
un résultat d’exploitation de 624 M€
30
, soit près de 55% du résultat
d’exploitation consolidé du groupe La Poste
31
. La Poste a récemment fixé à
45 % le niveau de remontée des résultats des filiales « centres de profit ».
Cette décision soulève la question de la capacité de développement de ces
filiales, notamment de La Banque Postale, surtout dans la perspective de
l’extension de ses activités et du renforcement des exigences prudentielles.
6 -
De bons résultats 2009
En 2003, la Cour des comptes soulignait que le produit net bancaire
par client des services financiers de La Poste était nettement inférieur à
celui de la concurrence. En 2008, le constat demeure : avec un faible PNB
par client de 162 €, La Banque Postale est toujours largement décrochée de
ses concurrents. Ce résultat est artificiellement minoré par les détenteurs de
livret A qui domicilient leurs revenus et leurs comptes bancaires dans un
autre établissement. Même en ne tenant compte que des clients détenteurs
d’un CCP, le produit bancaire par client de La Banque Postale
32
reste
néanmoins d’un niveau (367,14 €) sensiblement inférieur à celui de ses
concurrents. Cette relative faiblesse résulte pour partie des spécificités de
sa clientèle, plus âgée et plus modeste que la moyenne, cette dernière
caractéristique étant elle-même, pour partie, la conséquence de sa mission
d’intérêt général d’accessibilité bancaire à travers le Livret A.
Les résultats de l’exercice 2009 confirment cependant un potentiel
de développement : le produit net bancaire a progressé de 4,2 % par
rapport à 2008, à 5,019 Md€ et le résultat net part du groupe a cru de plus
de 94%, à 587,7 M€. Ces bons résultats reflètent une progression sensible
des résultats commerciaux (hausse des encours de crédits immobiliers, du
taux d’équipement de la clientèle de la banque en services bancaires ou
30) Le résultat d’exploitation ne comprend pas la consolidation de la participation de
LBP dans le capital du groupe CNP Assurances, qui s’élève, en 2009, à 186 M€.
31) Le résultat d’exploitation consolidé du groupe La Poste est calculé comme la
somme des résultats d’exploitation des trois métiers (courrier, colis-express et La
Banque Postale) avant imputation des charges du siège et de l’Enseigne.
32) Le produit net bancaire de LBP est calculé hors commission perçue au titre de la
collecte du livret A.
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COUR DES COMPTES
d’assurance…). L’enjeu pour La Banque Postale est de poursuivre dans
cette voie, en continuant d’exploiter le potentiel de croissance organique
dont elle dispose.
B - Le colis et l’express, des relais de croissance
handicapés par un certain nombre de faiblesses
1 -
Le colis
a)
Des résultats en ligne avec les objectifs
Les résultats de ColiPoste ont été chaque année un peu supérieurs
aux prévisions des documents stratégiques successifs depuis 2003, tant en
chiffre d’affaires qu’en résultat d’exploitation.
Sur l’ensemble de la période le chiffre d’affaires de ColiPoste a
progressé de 40 %.
Déficitaire en 2002, ColiPoste a dégagé en 2009 un résultat
d’exploitation bénéficiaire de 126 M€, pratiquement inchangé par rapport
à 2008. Ce résultat est positif car il a été atteint malgré une baisse des
volumes de 6,6%. Cette évolution révèle une certaine robustesse du
modèle économique de ColiPoste, permise par une assez forte
variabilisation des charges résultant notamment de l’externalisation d’une
partie des activités, comme celles du transport.
A la différence du courrier, le recul des volumes du colis serait
largement imputable à la conjoncture économique. Il n’en reste pas moins
que la politique d’augmentation des tarifs par le relèvement de la gamme
des services offerts décrite plus haut risque de se heurter à la vigueur
croissante de la concurrence et à la pression des vépécistes sur les marges.
b)
Un positionnement essentiellement défensif sur le marché domestique
A la suite de grèves importantes qui ont incité, au milieu des
années 90, les grandes entreprises de ventes par correspondance à créer
leur propre système de livraison, ColiPoste a vu sa part de marché reculer
sensiblement.
Par ailleurs, ColiPoste n’a pas encore bénéficié pleinement du fort
développement du commerce en ligne. Encore très dominant sur son
marché, ColiPoste connaît une progression moins rapide que celle de
certains de ses concurrents qui ont affiché des progressions de chiffre
d’affaires supérieures à 30% en 2009 grâce au développement de leur
activité avec des opérateurs comme Amazon et eBay.
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37
Ces opérateurs se sont positionnés sur de nouveaux modes de
distribution du colis, moins coûteux, telle la livraison en magasin, pour
laquelle ils se sont appuyés sur les réseaux de livraison des sociétés de
vente par correspondance, par exemple les 3 000 points du réseau
Mondial Relay du groupe Trois Suisses.
Au total, seul opérateur au début des années 90, La Poste
détiendrait, aujourd’hui, autour de 70 % du marché du colis en France. La
Redoute et les Trois Suisses, par leurs filiales spécifiques de distribution,
contrôleraient chacun de l’ordre de 6 à 8 % des volumes, et deux
opérateurs concurrents se partageraient le solde, soit environ 6 % pour le
plus ancien d’entre eux et 3 % pour le nouvel entrant.
En se cantonnant ainsi trop longtemps dans une posture
essentiellement défensive, par exemple en maintenant la livraison à
domicile par les facteurs comme le vecteur très dominant de son offre (75
% des livraisons), alors que les attentes de la clientèle sont fortes en
termes de tarifs et de qualité de service, La Poste n’a réagi que
récemment à cette demande nouvelle.
Elle a consolidé son réseau de distribution en créant des consignes
automatiques Cityssimo qui permettent le retrait des colis 24 heures sur
24. ColiPoste ne dispose cependant à ce jour que de 28 sites sur
l’ensemble du territoire national, alors que Deutsche Post dispose dès
maintenant de 2 500 « packstations » qui permettent aux entreprises de
vente à distance ou de vente en ligne, comme aux particuliers, de
bénéficier d’un service d’une grande flexibilité. Le client peut en effet
retirer ou déposer, 24 heures sur 24, dans des sortes de consignes
sécurisées électroniques, un colis à un prix plus faible que dans un bureau
de poste.
Mais il s’agit d’investissements élevés pour lesquels La Poste, du
fait de la priorité consacrée au courrier, ne dispose pas des moyens
financiers suffisants.
De même, force est de noter que le développement de l’activité de
ColiPoste dans le domaine de la livraison aux particuliers dans des pays
étrangers est demeuré des plus faibles, moins de 5 % de son chiffre
d’affaires, malgré les opportunités que semble receler le développement
du commerce électronique et des sites numériques de ventes entre
particuliers. Il se limite pratiquement à des expéditions vers des
opérateurs membres de l’Union Postale Universelle, sans que les
synergies potentielles avec le réseau de GeoPost soient recherchées.
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COUR DES COMPTES
2 -
L’express
a)
Une forte croissance externe
GeoPost a mené une politique de croissance externe très active.
Les acquisitions réalisées ont justifié une augmentation de capital de
GeoPost souscrite intégralement par La Poste en 2006 pour un montant de
233 M€. Mais, à périmètre constant, la croissance du chiffre d’affaires a
été significativement inférieure aux objectifs des plans d’affaires
successifs, essentiellement à cause des difficultés de Chronopost.
La Poste avait créé dès 1985 la filiale Chronopost pour occuper le
créneau de la livraison de plis et de colis dans un délai garanti de J+1.
Cette société avait également développé des activités en Afrique et des
entreprises de niche dans le secteur du transport de produits spéciaux ou
dans le commerce informatique. Elle a connu de 2003 à 2007 des
difficultés multiples qui ont conduit à une érosion de ses parts de marché
et à des pertes conséquentes en 2007 encore, supérieures à 34 M€. Le
resserrement de l’activité de Chronopost sur son coeur de métier
historique, la cession de certaines des activités internationales à GeoPost
intercontinental et la liquidation d’autres activités comme Taxicolis ont
permis un redressement des comptes en 2008-2009, avec un résultat
d’exploitation positif de 11,8 M€ en 2009, contre une perte de près de 2
M€ en 2008. En 2009, grâce à une relative bonne tenue du marché
français, Chronopost a enregistré une croissance de 3% des volumes.
Les résultats techniques de la filiale française demeurent en retrait
de ceux enregistrés en Allemagne par exemple où GeoPost obtient de
meilleurs résultats en termes de respect de délais d’acheminement (98 %
contre 95,4 %), ou de taux de pertes et vols (1,16 contre 1,94).
En revanche, l’acquisition d’Exapaq en 2006, spécialisé sur le
transport rapide sur le marché français, a eu dès ce premier exercice un
impact positif de 232 M€ sur le chiffre d’affaires du groupe GeoPost et de
40,6 M€ sur son résultat d’exploitation.
Au total, entre 2003 et 2009, le chiffre d’affaires du groupe
GeoPost a progressé de 33 % pour atteindre 3,09 Md€. Cette activité,
juste à l’équilibre au début des années 2000, a atteint une rentabilité
encore
modeste,
mais
relativement
robuste
grâce
à
une
forte
variabilisation des coûts de production. Ainsi, en 2009, avec une baisse
des volumes particulièrement vive en Allemagne, en Espagne et au
Royaume-Uni, conduisant à une diminution globale de l’activité de 2,1 %
le modèle économique de l’express s’est montré résistant avec une hausse
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39
du résultat d’exploitation de 3% à 198 M€, en dépit d’un effet prix négatif
de l’ordre de 2,2 %.
b)
Un réseau international qui comporte encore des lacunes
Au plan européen GeoPost couvre 90 % de l’Europe par ses
propres filiales et a des accords de partenariat avec des opérateurs de
premier plan pour le reste.
L’activité internationale de GeoPost relève d’une sous-holding
spécifique, GeoPost intercontinental SAS, qui cherche notamment à créer
un réseau d’express aérien international sur la base d’un partenariat
privilégié avec Air France-KLM.
Mais en dehors de l’Europe, l’implantation de GeoPost est faible.
Sa stratégie consiste à prendre des positions domestiques sur les
principaux marchés émergents, par le biais de « joint ventures »
faiblement capitalistiques ou de simples accords commerciaux. L’objectif
est de développer progressivement des activités domestiques sur ces
marchés et ensuite, si possible, de les étendre à l’international. Ce réseau
a commencé à s’installer en Chine, aux Etats-Unis, en Corée du Sud, en
Afrique du Sud… Il s’appuie par ailleurs sur les implantations africaines
de Chronopost.
Au total, malgré son expansion vers l’Est de l’Europe et le monde,
GeoPost reste un groupe essentiellement européen, très centré sur
l’Europe de l’Ouest. Les quatre pays principaux (Allemagne, France,
Grande-Bretagne et Espagne) contribuent au chiffre d’affaires pour 2 755
M€, le reste de l’Europe pour 422 M€ et le reste du monde pour 24 M€
seulement.
La dimension mondiale demeure un objectif dont l’atteinte paraît
lointaine et pour le moment peu réussie, malgré le soutien de La Poste,
qui a compensé par des augmentations de capital les pertes de GeoPost
Intercontinental qui ont atteint 55,5 M€ de 2006 à 2008.
C - La contribution modeste des métiers connexes du
courrier
Les
métiers
connexes
du
courrier
ont
un
potentiel
de
développement important car ils se situent sur un marché porteur. Ainsi,
le segment de l’externalisation des fonctions courrier des entreprises croît
en général de 10 % par an.
Mais leur part dans les résultats du groupe La Poste demeure, pour
l’instant, très réduite.
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COUR DES COMPTES
Le chiffre d’affaires de Sofipost a augmenté de 56 % sur la période
2003-2008 et son résultat d’exploitation a également connu un
redressement notable, de 0,55 M€ en 2003 à 30,52 M€ en 2008.
Cependant, en 2009, la contribution des filiales de Sofipost a
représenté 8 % du chiffre d’affaire du Courrier. Les métiers connexes ne
sont pas encore des relais de croissance à la mesure des enjeux
représentés par la chute du volume des correspondances. Ils sont
néanmoins très utiles, à la fois pour permettre à La Poste de disposer des
offres de service nouvelles qu’impose la société numérique et contribuer
à préserver un équilibre financier minimum de la direction Courrier.
______________________ CONCLUSION
_____________________
La Banque Postale n’a pas joué le rôle de relais de croissance à la
hauteur de ce qui était envisagé lors de son agrément. Les
caractéristiques de sa clientèle, plus âgée et plus modeste que la
moyenne, l’absence d’une offre bancaire complète qui en a freiné
l’élargissement, l’impact de la crise financière y ont certainement
contribué. LBP demeure, par ailleurs, enserrée dans des marges de
manoeuvres étroites qui limitent ses capacités de développement : fonds
propres peu importants pour des opérations de croissance et charges
d’exploitation encore trop élevées, en raison des coûts d’un réseau
surdimensionné. Les résultats de l’exercice 2009 confirment néanmoins
un réel potentiel de développement.
ColiPoste et GeoPost ont été depuis 2003 de réels relais de
croissance en faisant progresser leurs chiffres d’affaires respectivement
de 40 % (pour atteindre 1,38 Md€ en 2009) et 33 % (3,09 Md€ en 2009).
Aux déficits des années 2000 ont succédé des résultats d’exploitation
positifs de 126 M€ et 198 M€ en 2009. Leur rentabilité est cependant
encore modeste bien que relativement robuste grâce à une forte
variabilisation de leurs coûts de production.
ColiPoste a pris du retard par rapport à ses concurrents dans la
diversification des modes de livraison du colis et le développement du
commerce électronique. Il lui deviendra plus difficile de combler les
pertes des volumes captés par la concurrence par le seul relèvement de
sa gamme de prix. GeoPost a redressé Chronopost, mais son réseau hors
d’Europe demeure peu développé.
Enfin, malgré leur potentiel de développement important, la part
des métiers connexes du courrier dans les résultats du groupe La Poste
demeure, pour l’instant, très réduite.
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41
IV
-
Les limites du développement
Les
mutations
profondes
de
La
Poste
n’ont
pas
réduit
suffisamment les handicaps structurels qui étaient les siens quant au coût
de son réseau, aux performances insuffisantes de ses activités financières
et à ses retards de productivité. Son endettement reste élevé.
A - Un réseau qui demeure inadapté et coûteux
La densité du réseau de La Poste constitue un atout, mais son
organisation demeure inadaptée et coûteuse, notamment en raison de
l’importance des coûts de structure attachés aux bureaux de poste.
1 -
Une particularité française
La cohésion sociale et territoriale est un objectif stratégique de
l’Union européenne rappelé ainsi dans le considérant 5 de la directive
postale :
« les services publics postaux remplissent un rôle essentiel qui
participe aux objectifs de cohésion sociale, économique et territoriale de
l’Union »
En France, comme souligné plus haut, la mise en oeuvre de ce
concept a conduit à sur-dimensionner le réseau par rapport à celui que La
Poste aurait pu mettre en place dans un contexte purement commercial.
Au regard des 17 000 points de contact actuels, une optimisation
commerciale conduirait à un réseau d’environ 3 000 points de vente selon
les simulations de La Poste.
La Poste
a mené des efforts de rationalisation de son réseau. Elle a
choisi de laisser le nombre total de points de contact pratiquement
inchangé (+ 1 % entre 2004 et 2009) sur l’ensemble de la période. En
revanche, la structure du réseau a sensiblement évolué : le nombre de ses
bureaux gérés en propre a diminué de 23 %, du fait d’une augmentation
du nombre des partenariats, passé de 3 120 à 6 445, dont 4 600 agences
postales communales et 1 826 relais Poste commerçants.
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42
COUR DES COMPTES
Evolution du réseau des points de contact de La Poste
2004
2009
2004/2009
Bureaux de poste
13 722
10 574
-3 148
Partenariats
3 120
6 445
3 325
dont agences postales communales
1 695
4 600
2 905
dont autres agences postales
959
19
-940
dont relais Poste commerçants
466
1 826
1 360
Autres
105
87
-18
Total points de contact
16 947
17 106
159
Source : La Poste
Ces résultats doivent être évalués à la lumière des éléments
suivants :
-
Alors que l’activité des bureaux de poste a diminué, hors automates
bancaires et postaux, de 9,6 % entre 2004 et 2008, le nombre de
points de contact est demeuré pratiquement inchangé, + 1% ;
-
Les bureaux de poste gérés directement par La Poste avec ses
personnels représentent encore 60 % des points de contact. Le tiers
de ces bureaux est situé en zone rurale de moins de 2 000 habitants.
La France présente ainsi une singularité dans le paysage postal
européen : elle conserve une proportion de bureaux gérés en propre
deux fois supérieure à la moyenne européenne ;
-
L’activité d’une part notable des bureaux relève d’une sorte de
temps partiel, voire très partiel, comme le montre le tableau ci-
dessous.
Points de contacts ayant une activité inférieure à 30 minutes
et à 1 heure /jour
2009
30mn
30mn à 1h
Total inférieur
à 1 h
Total points
ou bureaux
% inférieur
à 1 h/jour
Partenariats
5 406
892
6 298
6530
96,4 %
Bureaux de
poste
399
723
1 122
10 574
10,6 %
Source : La Poste
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
43
Le tableau ci-dessus montre que la quasi-totalité des points de
contact en partenariat a une activité moyenne inférieure à une heure par
jour. Ce constat n’est ni surprenant, ni critiquable car cette faible activité
est la justification même de ces partenariats. En revanche, il est moins
acceptable que 10,6 % des bureaux de poste gérés directement par La
Poste soient également dans ce cas.
Tous points de contact confondus, le réseau postal français se
situe parmi ceux, en Europe, dont le ratio d’accessibilité est le plus élevé,
soit 2,7 points de contact pour 10 000 habitants. Ce positionnement est
d’autant plus remarquable, que la France est un pays d’une densité
moyenne, 113 habitants au km², avec des zones rurales très peu denses et
des zones de montagne importantes. Néanmoins la présence postale en
zone rurale est particulièrement forte.
2 -
Une spécificité postale : une accessibilité rurale très
performante
En dehors des écoles primaires qui constituent le premier réseau
accessible, tant en zone rurale qu’en milieu urbain, avec plus de 56 000
points et une distance moyenne de 500 mètres, le réseau postal est le plus
performant en zone rurale où 65 % de la population est à une distance de
moins de 2 000 mètres du point de contact le plus proche
33
. Distant en
moyenne de 1 800 mètres, il est plus proche des habitants que le réseau
des boulangeries qui dispose pourtant de 39 511 points de vente à
comparer aux 17 000 points de contact de La Poste. En revanche, en
milieu urbain, certains services commerciaux comme les guichets
bancaires hors Banque Postale ont une accessibilité plus proche que celle
du réseau postal. Il en est de même du réseau des papeteries et points
presse, plus développé que celui de La Poste au niveau national, mais
concentré à 89 % sur les zones urbaines.
Les 17 082 points de contact se distribuent ainsi :
Zones de moins de 2 000 habitants : 9 900 points de contact, dont
3 455 bureaux de poste et 6 445 partenariats ;
Zones entre 2 000 et 10 000 habitants : 4 065 points de contact ;
Plus de 10 000 habitants : 3 117 points de contact.
33) Etude réalisée sur 275 925 micro-zones par des économistes de La Poste et des
chercheurs de l’Institut d’Economie Industrielle (IDEI) de l’université de Toulouse.
Voir article de F. Boldron, K. Dewulf, D. Joram, C. Panet, B. Roy et O. Vialaneix
dans « Libéralisation et Services Publics » édité chez Economica.
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44
COUR DES COMPTES
Pour utile qu’elle soit, la politique de transformation des bureaux
de poste ruraux en points de contact ne peut suffire à réduire
significativement le coût du réseau commercial de La Poste, car, si les
points de contact ruraux sont d’un poids faible dans l’activité (les 30 %
des bureaux les plus petits ne pèsent que pour 1,7 % dans le chiffre
d’affaires des guichets), leur contribution aux charges du réseau est en
proportion relativement faible. Les 9 900 points de contact ruraux
représentent 15 % des charges et 10 % des effectifs.
Une vigilance s’impose donc sur l’ensemble des facteurs de coût.
De ce point de vue, les charges de structure, de support et de soutien des
guichets apparaissent encore sous une insuffisante maîtrise. Ces fonctions
étant désormais principalement localisées dans les bureaux centres, la
question de l’évolution du réseau de l’Enseigne ne se résume donc pas
aux seuls bureaux ruraux.
3 -
Des coûts de structure élevés
Le coût complet du réseau s’est élevé à 4 584 M€ en 2008. Il a
baissé de 4,6 % depuis 2005, mais dans une proportion inférieure à celle
de la baisse d’activité constatée aux guichets, soit - 9,6 %.
Cette rigidité relative des charges constitue une difficulté d’autant
plus grande pour les métiers que la réduction du coût de l’Enseigne a été
pour partie atteinte grâce à des transferts de charges, tels le basculement
en 2005-2006 de 18 000 facteurs ruraux au Courrier.
Les coûts du réseau sont répartis selon les modalités suivantes :
Les coûts dédiés aux activités d’un seul métier lui sont affectés en
propre. Ils s’élèvent en 2008 à 1 057 M€ pour les services
financiers et 648 M€ pour le Courrier ;
Les autres coûts constituent les coûts des guichets, communs à
l’ensemble des métiers. Le principe est de n’affecter aux métiers
que la part de ces coûts communs
34
qui répondent à une logique
commerciale et d’obtenir la compensation du solde au titre des
obligations de service public.
34) La répartition des coûts communs est réalisée selon la méthode de « l’utilisateur
principal » (en la circonstance La Banque Postale et le Courrier). Les deux utilisateurs
principaux supportent le coût de la fourniture isolée, c’est à la somme des coûts
variables et des coûts fixes que l’Enseigne aurait en charge si La Poste n’exerçait que
ces activités, tandis que les autres utilisateurs ne supportent que le coût incrémental,
c'est-à-dire le coût supplémentaire généré par leur propre activité.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
45
La méthode la plus couramment utilisée dans le secteur postal pour
réaliser
cette
affectation
des
coûts
est
celle
du
scénario
dit
« contrefactuel ». Elle consiste à modéliser le comportement d’un
opérateur sans contraintes imposées de l’extérieur, afin de déterminer le
coût de ces obligations imposées par différence entre le profit que cet
opérateur réaliserait en organisant son activité sur des bases purement
commerciales et le profit constaté dans la situation réelle.
Selon cette méthode, La Poste détermine, par comparaison au
réseau réel, trois réseaux théoriques :
le réseau commercial (2 728 points de contact en 2008) : réseau
dont La Poste se doterait en l’absence des obligations du service
universel postal et de l’aménagement du territoire. Ce réseau
théorique doit répondre à une logique de maximisation du résultat
économique ;
Le réseau seuil (6 457 points de contact en 2008) : réseau au-delà
duquel une réduction du nombre de points de contact entrainerait
une diminution du chiffre d’affaires ;
Le réseau accessibilité (7 329 points de contact en 2008) : réseau
qui
suffit
pour
répondre
aux
obligations
d’accessibilité
communautaire, telle que transposée en France par la loi de
régulation postale du 20 mai 2005 et son décret d’application de
2007 (95% de la population d’un département à moins de 10 km
d’un point de contact).
Le « coût net » induit par les obligations de présence territoriale
servant au calcul de la compensation est déterminé par la différence de
profit (définie par la différence entre le chiffre d’affaires et les coûts)
entre le réseau des points de contact réels et le réseau purement
commercial. Ce coût net est identifié par la « Contribution à
l’aménagement du territoire » CRAT, qui se décompose en « CRAT
accessibilité » pour ce qui relève du service universel et « CRAT
résiduelle » pour la part aménagement du territoire.
Comme le montre le tableau ci-dessous, la compensation due au
titre de l’obligation d’accessibilité est la différence entre le coût du réseau
commercial (2 Md€) et celui du réseau accessible (2,504 Md€). La
compensation due au titre de l’aménagement du territoire est la différence
entre le coût du réseau accessible (2,504 Md€) et celui du réseau réel
(2,855 Md€).
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46
COUR DES COMPTES
Coûts communs des différents réseaux en 2008
Réseau
actuel
Réseau seuil
Réseau
commercial
Réseau
accessible
Nombre de points de
contact
17 096
6 457
2 728
7 329
CA réalisé
7 118 M€
7 118 M€
6 803 M€
7 118 M€
Coût net du réseau
2 855 M€
nc
2 000 M€
2 504 M€
Source : La Poste
Les coûts communs du réseau des bureaux de poste et points de
contact sont fortement impactés par les obligations d’accessibilité (soit
855 M€). Dans la mesure où le principe est de n’affecter aux métiers que
la part de ces coûts qui correspondent à une logique commerciale et
d’obtenir la compensation du solde au titre des missions de service
public, les modalités de financement de ces missions représentent un
enjeu réel pour l’opérateur (voir infra).
Par ailleurs, La Banque Postale et le Courrier supportent les coûts
directs qui leur sont imputables, augmentés de leur quote-part des frais de
support et de structure de l’Enseigne, soit respectivement 1 057 M€ et
648 M€ en 2008. S’y ajoutent les coûts communs ci-dessus qui ont
augmenté de 23 % entre 2004 et 2008. La question de la réduction du
coût complet du réseau demeure ainsi un sujet de préoccupation.
B - Une ambition bancaire encore inaccomplie
1 -
Une structure de bilan spécifique
Du fait d’un champ de compétences longtemps limité qui exclut
encore le financement des entreprises, le bilan de l’activité de La Banque
Postale présente un excédent de ressources important : l’encours de
crédits immobiliers ne représente que 20 % des fonds déposés par la
clientèle.
Par ailleurs, pour limiter des risques que sa faible taille rendrait
trop lourds, La Banque Postale est conduite à placer prioritairement ses
ressources disponibles dans des titres non soumis à des évaluations
corrélées aux variations des marchés financiers, c'est-à-dire des titres
détenus jusqu’à leur échéance.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
47
Ces deux spécificités, liquidité et poids prépondérant des titres
détenus jusqu’à l’échéance, font de La Banque Postale un prêteur
structurel sur le marché interbancaire et limitent son exposition à la
volatilité des marchés. Elles lui ont permis de traverser la crise financière
de 2007-2008 sans être touchée par le resserrement drastique de la
liquidité interbancaire et sans subir d’impact significatif de cette crise sur
ses comptes. Elles constituent en revanche une limite au développement
de La Banque Postale dans la mesure où ces placements sont par nature
moins rémunérateurs que les crédits à la clientèle et font peser à terme un
risque de taux lors de leur renouvellement.
Cette situation est appelée à évoluer avec la montée en puissance
progressive des nouvelles compétences de la banque dans le domaine du
crédit à la consommation et leur élargissement souhaitable au
financement des entreprises. Ces extensions devraient permettre à LBP
d’atteindre un coefficient d’exploitation bancaire plus satisfaisant.
2 -
Un coefficient d’exploitation bancaire encore excessif
Le coefficient d’exploitation bancaire, c’est-à-dire le rapport entre
les charges d’exploitation et le produit net bancaire, est un indicateur
essentiel de la rentabilité bancaire. Il se situe dans une fourchette de 60 à
75 % pour les activités de banque de détail des établissements de crédit de
la place.
En 2005, l’équivalent du coefficient d’exploitation bancaire pour
les services financiers de La Poste se situait au niveau très élevé de
94,6 %. Dans le cadre de l’agrément de La Banque Postale, le CECEI
avait souligné la nécessité de faire évoluer ce coefficient vers un niveau
plus satisfaisant.
Or, en 2008, le coefficient d’exploitation de La Banque Postale
demeure beaucoup plus élevé que prévu dans le plan d’activité transmis
au CECEI (95,92 %, contre une prévision de 85,22 %)
35
.
L’écart tient pour une part à une croissance du produit net bancaire
plus faible que prévu (+ 0,50 % sur la période 2006-2008, contre + 11 %
prévu) et pour le reste à un ralentissement de la progression des charges
nettement moins fort qu’envisagé (+4,8 %, contre +1,1% prévu).
35) Les chiffres cités dans cette partie sont en données sociales, pour permettre la
comparaison avec le dossier d’agrément transmis en 2005 au CECEI. En données
consolidées, les chiffres correspondants sont de 91,70 % contre une prévision de
85,40 %.
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48
COUR DES COMPTES
La part imputable à la maîtrise des charges aurait mérité une
vigilance plus forte, car les marges de croissance du PNB étaient limitées
dans cette période par des compétences encore restreintes au crédit
immobilier et par la difficulté de prendre des parts d’un marché bancaire
mature.
En 2009, même s’il demeure encore au-dessus des prévisions du
plan d’activité 2005, le coefficient d’exploitation de La Banque Postale
s’est sensiblement amélioré (82,24 % en données sociales
36
) grâce à une
progression du produit net bancaire (+ 14 %) et un recul des charges
refacturées par La Poste
37
.
3 -
Des résultats commerciaux inégaux
a)
Evolution de la collecte nette
La collecte nette d’épargne et de dépôts à vue a presque triplé entre
2006 et 2008, la plus grande partie de cette augmentation intervenant
entre 2007 et 2008 (+ 168 %).
Evolution de la collecte nette de La Banque Postale
M€
Source : La Banque Postale
36) L’ampleur très importante de l’amélioration, en 2009 par rapport à 2008, du
coefficient d’exploitation en données sociales s’explique, pour une large part, par le
redressement des marchés financiers et les règles de comptabilisation des titres.
37) Au cours de l’exercice 2009, les charges d’exploitation ont reculé de - 2 %.
2006
2007
2008
2009
Epargne ordinaire
740
1 068
7 271
-6 133
dont Livret A
nc
959
6 021
-4 413
Epargne logement
-2 934
-2 609
-3 657
96
OPCVM (hors assurance)
-935
-593
1 420
-990
Assurance vie
4 891
4 132
4 543
4 230
Autres produits (CAT …)
104
1 205
1 219
180
Total Epargne
1 866
3 203
10 797
-2 617
Dépôts à vue (DAV)
1 755
1 024
519
2 667
Total Epargne + DAV
3 621
4 227
11 316
49
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
49
La
Banque
Postale
a
enregistré
en
2008
une
collecte
exceptionnellement élevée. Ce pic peut s’expliquer par le niveau élevé
des taux de l’épargne réglementée et par la crise financière qui a
provoqué un transfert d’épargne vers des produits liquides et sans risque.
Le pic atypique de collecte s’est
résorbé en 2009, avec notamment
une décollecte sur le livret A dont les encours ont baissé de 59 Md€ en
début d’année 2009 à 55,5 Md€ à la clôture des comptes. LBP considère
que cette décollecte nette résulte davantage de la baisse de rémunération
du livret A que de la banalisation de sa distribution
38
. Le nombre
d’ouverture de livrets A à La Banque Postale est, par ailleurs, resté
soutenu en 2009
39
et le nombre de transferts de livrets A limité
40
.
b)
Evolution des crédits immobiliers
Alors que la progression des encours de crédit immobilier de La
Banque Postale se situait en deçà de celle du marché en 2006, elle est
devenue supérieure en 2007 et surtout en 2008 (18,53 % contre 6,77 %).
Après avoir cherché en 2006 à préserver ses marges au détriment
de ses parts de marché, La Banque Postale s’est alignée en 2007 sur les
pratiques de la concurrence pour éviter de perdre du terrain.
L’augmentation très sensible de son encours de crédit immobilier
en 2008 l’a porté à 27,5 Md€ au 31/12/2008. Les difficultés de
refinancement rencontrées par une partie de ses concurrents, qui ont dû
resserrer les conditions d’accès aux crédits immobiliers, ont favorisé une
forte hausse de sa part de marché dans les crédits nouveaux. La
progression de ses encours de crédit immobilier est demeurée forte en
2009 (+ 16 %, à 32 Md€).
38) Sur la période 2006-2008, le taux du livret A a constamment augmenté, culminant
à 4 % au deuxième semestre 2008, avant d’être ramené à 2,50 % en février 2009, 1,75
% en mai 2009 puis 1,25 % en août 2009.
39) 562 000 livrets A ouverts en 2009, ce qui a permis de limiter la baisse du nombre
de livrets A sous gestion (- 2 %).
40) La Banque Postale a reçu près de 122 000 demandes de transferts en 2009. Après
traitement, et rejets de certaines demandes (pour cause, par exemple, d’anomalies de
bordereau, de renonciations par les clients, de livrets déjà clos …), plus de 95 000
livrets A ont été transférés. Certains dossiers seront dénoués début 2010.
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50
COUR DES COMPTES
c)
Des parts de marché en recul jusqu’en 2006 et seulement en partie
redressées
Les parts de marché des services financiers se sont réduites de
2003 à 2006, tant pour les encours d’épargne, que pour les dépôts à vue
(voir annexe n°6). Les résultats de 2008 ont seulement permis de
retrouver les parts de marché de 2003 pour l’épargne et de combler une
partie du recul sur les dépôts à vue. En 2009, les parts de marchés de LBP
ont stagné, voir régressé, notamment celles sur le livret A, conduisant au
total à une faible progression par rapport à 2006.
S’agissant du crédit immobilier, la part de marché de LBP en
encours est restée, en 2009, largement en deçà de sa part de marché dans
les dépôts de la clientèle (9 %), même si elle s’est néanmoins
sensiblement redressée depuis 2006, en encours, et surtout en termes de
production nouvelle.
La Banque Postale détient des parts de marché plus élevées sur
l’épargne sur livrets et l’épargne logement (12,3 %), et sur les dépôts à
vue (8,9 %). Cette situation reflète une histoire au cours de laquelle les
postiers ont donné la priorité à des produits réglementés, plus accordés à
leurs pratiques que les placements d’assurance vie et d’OPCVM. Ils sont
aussi la conséquence d’une clientèle aux revenus modestes, et donc très
attachée à la liquidité et à la minimisation du risque.
4 -
Un renouvellement de la clientèle encore partiel
En 2003, la Cour pointait la vulnérabilité à terme des services
financiers de La Poste en raison du vieillissement et du non-
renouvellement de la clientèle. Elle appelait à un élargissement de la
gamme des activités des services financiers.
a)
Evolution de « l’équipement » de la clientèle
Même si les résultats restent modestes sur certains produits
financiers, La Banque Postale a pu faire progresser sensiblement
l’équipement de sa clientèle en produits et services bancaires ou
d’assurance. La part de sa clientèle détenant une carte bancaire est passée
de 48 % en 2006 à près de 60 % en 2009. En 2009, elle gérait 4,9 millions
de conventions CCP et plus de 2 millions de contrats de prévoyance. Près
de 3,8 millions de ses clients détenaient au moins un contrat d’assurance
vie, mais 696 000 seulement un plan d’épargne en actions.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
51
b)
Evolution de la composition de la clientèle
La part de la clientèle âgée et très âgée est encore importante. La
population jeune ou en constitution de patrimoine reste sous-représentée.
Ainsi, les plus de 66 ans représentent, en 2008, 24,1 % de la clientèle
contre seulement 16,6 % dans le total de la population française. La part
des 18-35 ans est restée globalement stable depuis 2001. Elle s’établit à
22,6 % en 2008. L’âge moyen des clients progresse très légèrement
depuis 2006, passant de 48,4 à 48,7 ans.
C - Des retards insuffisamment comblés
Malgré l’importance des investissements consentis, La Poste n’a
pas encore comblé son retard de productivité dans le domaine du courrier.
L’optimisation de son parc immobilier, pourtant nécessaire, est également
demeurée partielle.
1 -
La productivité du courrier
a)
L’industrialisation du processus de production
La logique fondamentale du programme Cap Qualité Courrier
(CQC) était d’accélérer au maximum les opérations de tri, pour atteindre
un objectif de fiabilité à 90 % de la distribution à J+1, et de renforcer le
plus possible la finesse du tri automatique, dans le but de remettre à la
distribution 80 % du courrier déjà trié par « quartier » et 32 % trié dans
l’ordre même de la tournée du facteur.
Ces objectifs n’ont jamais été atteints depuis 2003 et semblent trop
ambitieux pour l’être à un terme proche, malgré l’ampleur des
investissements consentis par La Poste.
Le programme CQC, qui devait s’achever en fin 2010, à la veille
de l’ouverture complète à la concurrence du marché postal, a pris trois
ans de retard. Au regard de la complexité politique et sociale d’un projet
de cette ampleur, ce décalage de calendrier était sans doute inévitable. Il
n’a été qu’en partie compensé par une accélération récente permise par un
pilotage renforcé du projet. A fin 2009, 65 % de l’investissement
41
et
72 % de l’objectif de productivité étaient atteints.
41) En fin 2009, 26 plaques sur 45 sont opérationnelles, 80 % des nouvelles machines
de tri des PIC sont en place pour le petit format (40 000 plis à l’heure) et 69 % pour le
grand format, 100 % des nouvelles machines de préparation du tri dans les PPDC sont
installées et 90 % de celles affectées au tri automatique dans l’ordre de la tournée du
facteur sont disponibles (10 000 plis à l’heure).
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52
COUR DES COMPTES
Pour dommageable qu’il ait été, en différant les progrès de
productivité et de qualité de service, ce retard aurait pu avoir un effet
positif si La Poste l’avait mis à profit pour anticiper le fort repli du
courrier et réduit plus fortement qu’elle ne l’a fait, à la marge, la
configuration du projet. Elle aurait pu limiter le surdimensionnement des
45 plates formes industrielles du courrier (PIC).
Les PIC sont, en effet, des installations industrielles conséquentes
qui travaillent en horaire continu 24h/24, six jours sur sept, et peuvent
employer jusqu’à 800 personnes. Avec les 1 500 centres de distribution
(PDC) et les 350 plates formes de préparation (PPDC) qui leur sont
rattachées, elles structurent le territoire en 45 zones géographiques, dites
« plaques », dont la configuration a été définie, en fonction des temps de
trajet entre le centre de tri et le centre de distribution, de manière à ce que
le courrier soit mis à disposition des facteurs tôt le matin pour respecter
au
mieux les obligations du J+1.
b)
Bilan des gains de productivité à fin 2008
Selon les calculs de la Cour
42
, les effectifs pro forma de la maison-
mère du courrier sont passés de 178 243 personnes en 2003 à 161 297
personnes en 2008, soit une diminution de 9,5 % en 5 ans, soit 1,9 % par
an, inférieure à celle de l’ensemble de La Poste maison-mère.
Les gains en emplois s’établissaient donc à mi-parcours, en fin
2008, à seulement 38 % (soit 16 246 EAA) des possibilités ouvertes par
le programme d’industrialisation. Ce constat autorise deux appréciations
différentes :
-
Une, relativement optimiste, conduit à souligner que, dans le contexte
social auquel La Poste est confrontée, il est encourageant qu’un plan
de ré-industrialisation des processus aussi exigeant que CQC ait déjà
permis d’atteindre des résultats non négligeables ;
-
Une
seconde,
plus
interrogative,
constate
l’importance
des
sureffectifs comptabilisés en surnombre, la croissance de l’intérim et
les rigidités de la distribution, ce qui souligne que les enjeux à
surmonter demeurent un motif de préoccupation.
42) La Cour a recalculé les effectifs en intégrant les différents mouvements affectant
le périmètre du courrier (transfert des fonctions support vers les métiers d’une part,
création de Mediapost d’autre part).
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
53
En 2008, on dénombre 2 179 surnombres, soit plus de 1 000 agents
année après déduction des missions de renfort temporaire qui ont pu leur
être confiées. Par ailleurs, les dépenses d’intérim du Courrier, sont
passées
de 29 M€ en 2004 à 105,5 M€ en 2008, démontrant ainsi un besoin
d’adaptation d’autant plus fort que l’ensemble des composantes variables
de la force globale de travail ne représentait en fin 2009 que 5 % du total
des moyens humains.
En principe, les principaux enjeux de productivité se trouvent dans
la distribution (plus de 50 % des coûts globaux de traitement du courrier).
Dans ce domaine, le programme « Facteurs d’avenir » (FA), décrit plus
haut, a pour objectif d’adapter les moyens aux fluctuations conjoncturelles
d’activité. Fin 2008, ce programme s’appliquait en principe à la moitié des
62 000 tournées existant en France. En 2009, 87 % des tournées auraient
basculé dans ce type d’organisation, permettant un gain de productivité de
3,4 % sur les deux dernières années.
Selon La Poste, le projet Facteurs d’Avenir aurait atteint les
objectifs qui lui étaient assignés pour faciliter l’étalement des fluctuations
saisonnières ou quotidiennes du trafic et améliorer la qualité de service. Il
n’est néanmoins pas suffisant pour permettre à La Poste de tirer le plein
bénéfice des gains de temps structurels dégagés par l’automatisation du tri.
Un nouveau processus de réorganisation des tournées semble donc
s’imposer (voir infra).
c)
Des gains de productivité inégaux
Les chiffres relatifs à la productivité montrent que La Poste n’a que
faiblement progressé depuis 2003 et qu’elle demeure en retard par rapport
à ses principaux concurrents.
Tel est le cas dans le secteur de la distribution où l’on constate que,
depuis 2003, le nombre d’objets distribués par agent est la résultante quasi
mécanique de la diminution du nombre d’agents et de la réduction du
nombre d’objets à distribuer
43
. En d’autres termes les gains de productivité
ne sont qu’apparents.
En 2009, la baisse du trafic, à -5,3 %, n’est encore que partiellement
compensée par des gains de productivité, le nombre d’objets distribués par
agent diminuant de près de 2 % (au niveau de 161 000 environ). La
poursuite de cette tendance poserait un problème redoutable au courrier.
43) Objets distribués par agent + 6,8 % = Agents, - 9,5 % ; objets à distribuer, - 3,3 %.
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COUR DES COMPTES
2 -
L’optimisation partielle du parc immobilier
L’opérateur postal a hérité d’un des patrimoines immobiliers les
plus importants de France, comportant plus de 16 000 immeubles et de
l’ordre de 8 millions de mètres carrés, dont près de 5 millions de mètres
carrés en propriété. Ce parc se distinguait par une grande hétérogénéité,
allant de véritables « cathédrales postales », à de nombreux logements des
receveurs imbriqués dans des bureaux de poste ruraux.
La professionnalisation de la gestion immobilière constitue un
enjeu économique important pour La Poste, puisque les coûts du parc
immobilier représentent le 2ème poste de charges du groupe. Des progrès
ont été obtenus, mais les efforts doivent être poursuivis, y compris dans la
conduite des projets de construction ou de rénovation.
En effet, en sollicitant l’autorisation du ministre de tutelle de créer
Poste Immo, le président de La Poste, par une lettre du 18 mars 2004,
avait pris des engagements relatifs en particulier à l’amélioration du
résultat d’exploitation de la fonction immobilière, à la réduction des
surfaces utilisées et à l’effort d’investissement immobilier.
Si l’objectif de résultat d’exploitation a été légèrement dépassé
(proche de 75 M€ en 2008), le contrôle de la Cour montre que
l’optimisation des surfaces n’a été réalisée qu’à la moitié de l’objectif
(150 000 m² à la fin de 2008, à comparer à l’engagement de réduire les
surfaces utilisées de 325 000 de 2004 à 2007). Les objectifs de cession
ont été atteints en 2008 grâce au portage d’actifs industriels, évalués à
128 M€, par un organisme de placement collectif immobilier
44
géré par
BNP Paribas, dont Poste Immo détient 22 %. Enfin, le déploiement des
nouveaux centres de tri du Courrier et la rénovation des bureaux de poste
ont connu des retards, qui lui sont en partie imputables.
D - Le maintien d’un endettement élevé
Déjà en 2002, la dette de La Poste était élevée : 3 963 M€,
conduisant à un ratio d’endettement
45
anormalement haut (2,4).
L’endettement net du groupe a considérablement augmenté en 2006,
passant de 3,8 Md€ à fin 2005 à plus de 6 Md€ à fin 2006, principalement
sous l’effet de la contribution exceptionnelle de 2 Md€ versée à
44) Non prévues en 2004, ces opérations d’externalisation du patrimoine dans une
OPCI offrent l’avantage pour La Poste de renforcer sa liquidité en valorisant son
patrimoine.
45) Ratio dettes à long et moyen terme/capitaux propres.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
55
l’EPFRFP au titre de la réforme du financement des retraites des
fonctionnaires, financée à hauteur de 1,8 Md€ par une émission
obligataire.
Le ratio dette nette/capitaux propres est passé de 0,88 fin 2005 à
2,30 fin 2006 et le ratio dette nette/excédent brut d’exploitation (EBE) de
2,46 à 3,57.
Entre 2006 et 2009, ces ratios se sont améliorés, mais La Poste
reste très endettée
46
. Compte tenu des besoins d’investissement du
groupe, il n’est pas certain que l’augmentation de capital à venir de 2,7
Md€ puisse réduire cet endettement excessif.
Evolution du niveau d’endettement de La Poste
En M€ et en %
Source : Cour des comptes, sur la base des rapports annuels de La Poste
46) La situation de Deutsche Post DHL et de TNT est sensiblement plus favorable. En
février 2009, la Deutsche Post a vendu 22,9 % des actions de Postbank à la Deutsche
Bank (montant de la transaction : 4,9 Md€). Suite à cette cession, la dette nette de
Deutsche Post DHL s’est considérablement réduite (et sa liquidité nette a augmenté)
de -2 466 M€ en 2008 à +1 690 M€ en 2009. Pour TNT le ratio dette nette/EBE
s’élève en 2009 à 0.96, contre 2.96 pour La Poste.
2006
2007
2008
2009
Dette nette
6 015
5 891
5 703
5 517
Excédent Brut d'Exploitation (EBE)
1 683
2 028
1 843
1 867
Capitaux propres
2 613
3 341
3 252
4 051
Dette nette / EBE
3,57
2,90
3,09
2,96
Dette nette / Capitaux propres
2,30
1,76
1,75
1,36
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56
COUR DES COMPTES
______________________
CONCLUSION
_____________________
La Poste dispose d’atouts incontestables, comme la densité de son
réseau avec ses activités multi-métiers. A l’exception des écoles
primaires, le réseau postal est, de tous les services publics et activités de
proximité, celui dont la proximité avec les habitants est la plus forte en
zone rurale.
Mais elle doit surmonter un certain nombre de faiblesses.
Son réseau demeure coûteux. La Poste s’est efforcée d’en réduire
le coût par le biais de partenariats. Elle doit poursuivre cet effort mais
elle n’a pas mis en oeuvre une politique suffisamment active pour réduire
le coût des structures et fonctions support de l’Enseigne. Il en est résulté
depuis 2003 un effet de ciseau entre l’évolution à la baisse de l’activité
des guichets et la croissance des coûts complets du réseau, préjudiciable
à la compétitivité des métiers.
Même si La Banque Postale fait désormais partie du paysage
bancaire français, elle conserve une structure de bilan encore atypique
par rapport aux autres banques de détail (avec une forte liquidité et un
poids prépondérant des titres détenus jusqu’à l’échéance). Son coefficient
d’exploitation reste très au-dessus de celui observé pour les activités de
banque de détail des établissements de crédit de la place, témoignant
d’une
rentabilité
encore
insuffisante.
La
traduction
des
efforts
commerciaux a été progressive et le renouvellement de la clientèle
partiel.
Le courrier conserve des retards de productivité. Le programme
Cap Qualité Courrier s’est imposé comme la priorité majeure de la
modernisation de La Poste. Il a mobilisé un investissement de plus de 3
Md€. Du fait de son ampleur, ce programme a pris un retard de trois ans
qui était sans doute inévitable, mais ce retard n’a pas été mis à profit
pour reconfigurer plus fortement en 2008 une organisation industrielle
sans doute surdimensionnée aujourd’hui. Enfin, une question est encore
mal
résolue :
la
répercussion
des
économies
permises
par
la
mécanisation du tri sur l’organisation encore rigide des tournées.
En dépit de réels progrès, l’optimisation du parc immobilier de La
Poste est demeurée partielle, alors même qu’il s’agit du deuxième poste
de charges du groupe.
Enfin, La Poste reste très endettée et se trouve donc dans une
situation tendue pour accentuer sa croissance externe.
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
57
V
-
Le choc du courrier à compter de 2008
La Poste avait franchi des étapes importantes de sa modernisation et
notablement redressé sa situation financière avec le soutien de l’Etat. Mais
la rupture de 2008 a révélé les menaces qui pèsent désormais sur le courrier.
Alors que ColiPoste, GeoPost et La Banque Postale ont fait preuve
d’une relative résistance face à la crise économique et financière, le
Courrier a subi une dégradation profonde de ses résultats, affectant
l’ensemble du groupe. Il s’agit d’un repli structurel qui traduit un
changement des comportements vis-à-vis du support papier, plus profond
que la seule question du basculement vers le média électronique
A - Le courrier, une brusque accélération de la réduction
des volumes
1 -
Des résultats en fort recul
Le chiffre d’affaires du courrier a reculé de 212 M€ en 2008,
revenant ainsi à son niveau de 2006 (11 318 M€). L’effet prix dû à
l’augmentation des tarifs a compensé seulement pour moitié la baisse de
3% des volumes, baisse largement structurelle.
Dans le même temps, les charges opérationnelles ont été fortement
resserrées (+ 0,2 % en 2008), mais pas dans la proportion de la chute des
revenus opérationnels. Le résultat d’exploitation a donc fortement reculé,
de 32,5 % ; la marge d’exploitation également, à 4,5 % en 2008 (contre
6,6% en 2007).
En 2009, le chiffre d’affaires consolidé du courrier a de nouveau
reculé de 2,5 % (à 11,037 Md€) et le résultat d’exploitation consolidé s’est
établi au niveau le plus bas depuis 2003, soit 179 M €.
2 -
Un impact d’ores et déjà majeur sur les comptes de La Poste
Par voie de conséquence, les résultats du groupe se sont également
profondément dégradés en 2008. Le chiffre d’affaires consolidé n’a
progressé que de 0,1%, à 20 799 M€. Au même moment, les charges
opérationnelles ont augmenté de 2,3% (+ 441 M€, de 19 472 M€ en 2007
à 19 913 M€ en 2008) et le résultat d’exploitation a reculé de plus de
32 %. La marge d’exploitation du groupe est revenue à 4,3 % en 2008. Le
résultat net part du groupe a chuté de près de 44 % (529 M€ contre
943 M€ en 2007).
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58
COUR DES COMPTES
Les résultats consolidés de 2009 ont été meilleurs que ne le
laissaient prévoir les comptes semestriels. Le résultat net est pratiquement
identique à celui de l’année précédente, soit 531 M€, malgré un chiffre
d’affaires en diminution de 1,3 %, à 20,52 Md€. De même l’excédent brut
d’exploitation est stable, du fait, notamment, d’une bonne maîtrise des
charges, en réduction de 1,6 %. Ce résultat est largement dû à une
progression forte de celui de La Banque Postale qui représente en 2009
80% du résultat du groupe.
Cependant, après amortissements, provisions et déduction du coût
du risque, le résultat d’exploitation est en chute de 15 %, à 757 M€. La
dégradation demeure donc profonde par rapport à 2007 qui avait permis à
La Poste de dégager un résultat opérationnel pratiquement deux fois plus
élevé à 1 306 M€. La marge d’exploitation se dégrade une nouvelle fois
de 0,6 points, pour tomber à 3,7 % du chiffre d’affaires.
B - Un repli de nature structurelle
1 -
Des tendances lourdes
Les volumes du courrier ont décru de façon relativement régulière
et modérée sur la période 2003-2007 (environ - 1 % par an). Mais le recul
s’est sensiblement creusé en 2008 (- 2,6 %) et 2009 (-5,3 %). Selon les
prévisions de La Poste, un effondrement de 30 % doit être envisagé sur la
période 2008-2015.
Ces données globales recouvrent des évolutions contrastées entre
les différents segments du courrier, à savoir la correspondance grand
public, le courrier de gestion des entreprises et la publicité adressée. Le
tableau ci-dessous retrace ces évolutions.
Evolution des trafics en millions d’objets
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009*
Correspondance
11 600
11 572
11 519
11 253
11 304
10 953
10 512
Dont Particuliers
1 440
1 457
1 403
1 377
1 317
1 237
1 180
Dont Entreprises
10 160
10 295
10 116
9 876
9 987
9 716
9 332
Publicité adressée
4 562
4 754
4 796
4 816
4 730
4 666
4 325
TOTAL
16 162
16 506
16 315
16 069
16 034
15 619
14 837
*
2009 : Estimation provisoire des trafics.
Source : Cour des comptes – La Poste
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UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT A RECONSTRUIRE
59
a)
Le courrier publicitaire
Les volumes de courrier publicitaire ont mieux résisté, avec une
progression de 3,7 % jusqu’en 2007, alors que la correspondance était
déjà en baisse de 2,6 % sur cette période. En revanche, le courrier
publicitaire a enregistré une rupture à compter de 2008 (-1%) qui s’est
accentuée en 2009 (-7%).
Cette chute d’activité pourrait avoir un contenu conjoncturel plus
marqué que pour les autres types de courrier dans la mesure où le rapport
coût/efficacité de ce média publicitaire lui confère un avantage reconnu
par beaucoup d’annonceurs. Mais cette activité est néanmoins soumise à
une forte pression sur les prix du fait de la concurrence des autres médias
de marketing direct, notamment la publicité sur internet.
b)
Le courrier de gestion des entreprises
Le courrier de gestion (relevés bancaires, factures, courriers
administratifs…) a enregistré une baisse modérée entre 2003 et 2007 (-
1,7%). Mais cette baisse s’est accélérée depuis 2008 (-2,7 %) et surtout
2009 (- 4 % environ). Elle est la conséquence directe de la
dématérialisation des envois (voir infra).
Le courrier de gestion représentant plus de 70 % du chiffre
d’affaires du courrier et 62 % des volumes, cette évolution a un impact
déterminant sur les résultats de cette activité. Le courrier de gestion est
très concentré sur des opérateurs majeurs. Les 50 plus gros clients
constituent 66 % du chiffre d’affaires réalisé avec les entreprises hors
marketing direct et 46 % du chiffre d’affaires courrier hors presse,
marketing direct et international. Les 20 plus gros clients en totalisent 34
%. Facteur de productivité et, en principe, de rentabilité, cette
concentration a son revers : la perte d’un gros client, par exemple une
entreprise de vente par correspondance ou une banque, pèserait très
lourdement.
c)
La correspondance grand public
Les flux de correspondance propres aux particuliers représentent
une part beaucoup plus faible que les flux liés au courrier de gestion (12
% des volumes de correspondance et 14 % du chiffre d’affaires).
Ces flux ont connu une baisse continue entre 2003 et 2007 (- 8,6 %
sur la période), plus forte que celle du courrier de gestion. Elle s’est
brutalement accentuée en 2008 (- 6 %) et s’est poursuivie en 2009
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60
COUR DES COMPTES
(- 4,6 %). Cette tendance se prolonge jusqu’à aujourd’hui, ce qui traduit
le recul du support papier en tant que moyen de communication.
2 -
Des marges d’ajustement tarifaire plus réduites
Comme cela a déjà été souligné, l’impact de la réduction des
volumes du courrier sur le chiffre d’affaires a été atténué par les
réajustements tarifaires substantiels qui sont intervenus depuis 2003.
Mais
ces marges de manoeuvre seront, dans les années à venir,
fortement contraintes. L’impact des baisses de volume du courrier sur le
chiffre d’affaires risque donc d’être plus accentué. Déjà en 2008, la baisse
des volumes (- 3,11 %) s’est accompagnée d’une baisse du chiffre
d’affaires (- 2,6 %). En 2009, la baisse des volumes physiques (- 4,5 %)
est accentuée par un effet économique de gamme de produit (- 0,8 %) que
ne compense pas la hausse moyenne des tarifs (+ 1,3 %). Ainsi, pour la
première fois, la baisse du chiffre d’affaires est supérieure à la réduction
des volumes de trafic.
_____________________
CONCLUSION
_____________________
Jusqu’en 2008, La Poste a pensé que le Courrier demeurerait le
premier métier par sa contribution aux résultats. Même si sa stratégie
comportait le développement de relais de croissance dans le colis et
l’express et surtout dans le secteur financier, les investissements massifs
consentis pour l’industrialisation du courrier marquent clairement où se
situait, inévitablement du fait des retards pris par le passé, la première
priorité du groupe.
La Poste a beaucoup changé au cours de cette période. Grâce à
ses efforts de modernisation et avec l’appui de mesures de rattrapage
concurrentiel prises par l’Etat, elle a incontestablement redressé sa
situation financière. Mais elle est désormais dans une situation plus
difficile. Le courrier est voué à un recul profond et structurel. La Poste
dispose d’atouts incontestables et doit s’appuyer sur son « modèle
postal » pour que la progression des activités financières, du colis et de
l’express devienne désormais le principal moteur de son développement.
Pour ce faire, elle doit surmonter les faiblesses mises en évidence par la
Cour, quant au coût de son réseau, aux performances insuffisantes de ses
activités financières, à ses retards de productivité et à son endettement
élevé.
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Chapitre II
Avec la stratégie « Ambition 2015 », La
Poste vise à répondre à des défis sans
précédent
Face à de lourds enjeux, l’ouverture complète du marché postal au
1
er
janvier 2011, l’explosion de la société numérique, le renforcement de
la concurrence dans les secteurs du colis et de l’express, les nouvelles
attentes des consommateurs, La Poste vient d’arrêter un nouveau plan
stratégique dénommé « Ambition 2015 ». Ce plan identifie un certain
nombre de priorités pour la période 2010-2015 et vise à revenir
progressivement aux niveaux de rentabilité qui prévalaient avant la crise
économique.
La Cour partage les orientations générales de cette nouvelle
stratégie et examine, dans ce second chapitre, les points clés qui doivent
en assurer la réussite.
En outre, les relations entre La Poste, son nouvel actionnaire la
Caisse des dépôts et consignations et l’Etat devront être définies de
manière à accompagner le développement de cette stratégie d’avenir.
Dans ce contexte, l’augmentation de capital de 2,7 Md€ sera un
élément important, pour conforter l’unité du groupe et faciliter ses
investissements internes et externes, sans peser sur son endettement.
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62
COUR DES COMPTES
I
-
Des défis sans précédent
Jusqu’en 2008, La Poste a plutôt mieux résisté que ses grands
concurrents du nord de l’Europe à la baisse tendancielle des volumes du
courrier. Mais les conséquences de l’ouverture du marché et les effets
plus
immédiats
et
plus
massifs
des
nouvelles
technologies
de
l’information et de la communication bouleversent ses équilibres.
La Poste dispose d’un avantage. Elle est le seul opérateur
historique à avoir développé ses activités sur l’ensemble des éléments de
la chaîne de valeur du courrier et l’un des rares à bénéficier encore d’un
relais de croissance potentiellement important dans le secteur bancaire.
A - La concurrence
La concurrence sur le marché postal français est demeurée, dans
les faits, limitée jusqu’à présent mais ses perspectives d’évolution doivent
être considérées avec vigilance.
1 -
Une ouverture progressive
La directive européenne de 1997 avait engagé le processus de
libéralisation progressive du marché postal qui devait s’achever en 2009
(voir annexe n°7). Les pouvoirs publics français ont soutenu et obtenu le
report de cette échéance à 2011
47
. A la différence d’autres pays, cette
longue période transitoire n’a pas été pleinement utilisée, ni par
l’opérateur, ni par l’Etat, pour préparer cette ouverture complète du
marché.
L’ouverture des marchés postaux va intervenir dans un contexte
radicalement différent de celui qui avait prévalu lors de la libéralisation
du marché des télécoms. Ce secteur était en forte expansion, alors que le
marché du courrier est en déclin. La problématique pour les opérateurs,
les pouvoirs publics et les régulateurs est donc beaucoup plus délicate.
47) Les dix pays suivant bénéficient d’un délai supplémentaire de deux ans
: Chypre,
Hongrie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pologne, République Tchèque, Roumanie et
Slovénie.
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AVEC LA STRATEGIE « AMBITION 2015 », LA POSTE VISE A
REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
63
2 -
Une concurrence limitée
a)
Une ouverture limitée du marché de la correspondance
En théorie, la part du marché français ouvert à la concurrence n’est
pas négligeable. D’après le rapport d’activité de l’ARCEP de 2007, il
représenterait 6 à 9 Md€ de chiffre d’affaires selon que l’on inclut ou non
l’express domestique et la distribution d’imprimés sans adresse.
Mais en réalité, le marché effectivement accessible aux nouveaux
entrants est sensiblement moins important (voir annexe n°8). Selon les
estimations de ce rapport, le segment « contestable » du marché français
ne représenterait que 1 milliard de plis, soit 6% de la correspondance en
France (16 milliards d’objets)
48
.
Bien que 21 opérateurs alternatifs aient été autorisés à exercer des
prestations de services postaux relatifs aux envois de correspondance, La
Poste conservait en 2008, selon l’ARCEP, 99,8 % du marché de la
distribution des envois de correspondance en France. Sur le marché du
courrier transfrontalier sortant, libéralisé depuis la fin des années 90, la
part de marché de La Poste dépasserait toujours les 80 %.
Quelques opérateurs alternatifs avaient commencé à se positionner
comme opérateur postal hors du champ de monopole de La Poste
(courrier de plus de 50 grammes). Le principal, Adrexo
49
,
déjà concurrent
sur le segment de la distribution de prospectus, a mis un terme en 2008
aux activités de la filiale qu’il avait créée à cet effet. Un autre opérateur,
Alternative Post, a été conduit à la liquidation début 2010.
ARCEP
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des
postes (ARCEP) a été créée par la loi du 20 mai 2005, afin de concilier
l’existence et la viabilité du service universel avec l’introduction graduelle de
la concurrence sur le marché des envois de correspondance.
L’ARCEP est responsable de la régulation postale, ce qui comporte :
• La délivrance d’autorisations pour le marché des envois de
correspondance intérieure et transfrontières et la mise en oeuvre des droits et
obligations qui leur sont attachés, en particulier au regard de la concurrence ;
48) Ne serait « contestable » par la concurrence que le courrier non urgent, d’un poids
excédent 50 grammes, émis en nombre et distribué dans les zones denses.
49) Filiale du groupe Spir Communication, lui-même filiale à 64,9% du groupe de
presse Ouest France.
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64
COUR DES COMPTES
• Le contrôle de la mission du service universel de La Poste et
notamment de ses performances en matière de qualité de
service, dont les
objectifs sont fixés par arrêté du ministre chargé des postes ;
• Le contrôle tarifaire et comptable du prestataire du service universel
afin de mettre en oeuvre les principes de séparation et de transparence des
comptes pour garantir les conditions de financement de service universel.
b)
Les obstacles à l’émergence d’opérateurs alternatifs
La France a maintenu dans le périmètre du secteur réservé jusqu’au
1
er
janvier 2011 les envois publicitaires et les envois en nombre de
courrier de moins de 50 grammes.
Par ailleurs, bien que la loi de régulation postale de 2005 ait fixé le
principe d’un égal accès aux boîtes aux lettres, les opérateurs alternatifs
autorisés par l’ARCEP ont rencontré des difficultés pour accéder aux
immeubles sécurisés par des digicodes ou des interphones.
Le système d’accès par badges magnétiques, dénommé Vigik,
supervisé par l’ARCEP, ne répond pas encore aux besoins de certains des
nouveaux opérateurs. En effet, pour accéder aux codes de Vigik, modifiés
quotidiennement pour des raisons de sécurité, les opérateurs doivent
s’équiper de liaisons informatiques, de logiciels et d’équipements
coûteux, ou se déplacer quotidiennement à La Poste pour les obtenir.
La Cour recommande que le décret d’application de la loi de 2005
qui doit définir les modalités de l’accès aux boîtes aux lettres soit publié.
Des opérateurs alternatifs dénoncent également des barrières à
l’entrée dans le domaine de la publicité non adressée (PNA). Ainsi pour
préserver un espace de concurrence dans ce secteur, malgré le rachat par
Mediapost de Delta Diffusion, l’Etat avait subordonné l’autorisation de
concentration à divers engagements de La Poste, dont celui d’ouvrir son
réseau de distribution en zone rurale à tout opérateur de PNA qui en ferait
la demande. Cet accès au réseau de distribution de La Poste est lié à un
tarif dégressif en fonction des volumes. Ces conditions tarifaires sont
jugées excessives par des concurrents qui relèvent que les tarifs les plus
favorables sont liés à des seuils de volume bien supérieurs à leur propre
activité (le barème le plus avantageux suppose de confier à La Poste 1
milliard d’objets).
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
65
3 -
Les perspectives d’évolution
a)
Les expériences étrangères
Le régulateur allemand a défini un périmètre du secteur réservé
plus restreint qu’en France offrant à la concurrence une part plus large du
marché, dit « marché contestable ». Il a anticipé au 1
er
janvier 2008 la
libéralisation complète de la distribution postale. Ces éléments ont
encouragé l’émergence d’opérateurs alternatifs nombreux, parmi lesquels
une filiale de l’opérateur historique néerlandais TNT et une société de
distribution postale liée au groupe de presse Axel Springer (PIN group).
Ces concurrents se sont positionnés comme des opérateurs à bas
coûts avec des salaires sensiblement inférieurs à ceux pratiqués par
l’opérateur historique. Face à cette situation, la Deutsche Post et le
syndicat Verdi
50
ont négocié en 2007 un salaire horaire minimum de 9,80
euros. Déjà en situation difficile, Pin Group
51
a été fortement impacté par
ce salaire minimum et a été mis en liquidation. TNT pour sa part avait
annoncé son retrait du marché postal allemand. Toutefois, le salaire
minimum ayant été annulé au début de l’année 2010 par le
Bundesverwaltungsgericht (cour fédérale administrative) de Leipzig pour
des raisons de procédure, PIN a réaligné les salaires à la baisse d’un peu
plus de 13 % et TNT n’a pas encore concrétisé son retrait.
Aux Pays-Bas, les opérateurs alternatifs Sandd et Selekt Mail,
filiale de Deutsche Post DHL, ont utilisé une disposition de la loi
néerlandaise qui visait à favoriser le développement des travailleurs
indépendants ayant plusieurs contrats de travail différents (notamment
dans les domaines de l’informatique, des communications et de la
musique) pour échapper à la réglementation sur le salaire minimum.
Ces deux opérateurs alternatifs pratiquent des prix de l’ordre de 20
% moins cher que ceux de TNT. Ils représentent, ensemble, aujourd’hui
13 % de part de marché.
50) Syndicat « Vereinigte Dienstleistungsgewerkschaft » ou syndicat unifié des
services.
51) La Poste avait été en négociation avec ce groupe, ainsi qu’avec la société
hollandaise Sandd, pour prendre le contrôle de ces concurrents et se positionner sur le
marché du courrier postal en Allemagne et aux Pays-Bas. Mais La Poste a renoncé
dans le premier cas, financièrement trop dégradé, et les négociations n’ont pas abouti
dans le second.
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66
COUR DES COMPTES
Enfin, en Suède, où le marché est totalement ouvert à la
concurrence depuis 1993, l’opérateur alternatif CityMail détient une part
de marché globale de 9% mais a capté 30% des volumes dans les 3
principales agglomérations (Göteborg, Malmö, Stockholm).
b)
Scénarios envisageables après le 1
er
janvier 2011
Dans son avis du 29 octobre 2009 sur le projet de loi relatif à La
Poste, l’Autorité de la concurrence a souligné que La Poste, désignée
pour quinze ans comme opérateur du service universel, demeurerait « à
l’horizon de la prochaine décennie un acteur prépondérant, à la fois au
titre du service universel et de sa position concurrentielle sur les
marchés ».
La Poste n’en doit pas moins se préoccuper de l’impact de la
concurrence avant l’échéance de la « prochaine décennie ». En effet,
même modestes, les pertes de part de marché pèseront lourd dans
l’équation économique et financière que La Poste doit résoudre,
puisqu’un seul point de baisse des volumes du courrier représente, hors
effet prix, un recul du chiffre d’affaires de l’ordre de 100 M€. Les
nouveaux opérateurs seront, à l’évidence, très vigilants sur l’équité
concurrentielle (voir annexe n°9).
Deux scénarios peuvent s’envisager :
-
L’arrivée d’un opérateur global
Une analyse largement répandue considère qu’en France, pays le
plus étendu d’Europe, avec une densité moyenne faible et l’existence de
zones très rurales, souvent montagneuses, les obligations du service
universel, comportant la levée et la distribution en tout point du territoire,
au domicile même du destinataire, six jours sur sept seront très difficiles à
remplir par un opérateur alternatif. L’arrivée d’un opérateur global
semble donc peu probable. Considérant « la quasi impossibilité pour un
entrant de viabiliser les investissements nécessaires », l’ARCEP estime
que ce risque peut être « raisonnablement exclu ».
-
L’utilisation de niches
Le courrier est en France à la fois relativement développé, avec des
volumes d’envois par habitant plutôt plus élevés que dans la plupart des
autres pays européens, et concentré entre des émetteurs relativement peu
nombreux.
Dans ce contexte, il serait envisageable pour un opérateur postal
étranger ou un opérateur alternatif de s’implanter sur le marché français
en utilisant des niches sectorielles (le courrier des entreprises par
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
67
exemple) ou géographiques (zones urbaines ou transfrontalières). Le
segment du routage peut jouer un rôle de prescripteur influent vis-à-vis
des émetteurs de courrier industriel. Ce point mérite attention car le
marché du routage concernerait en France près de 7 milliards de plis,
chiffre à rapprocher des 16 milliards d’objets traités par La Poste en 2009.
L’ARCEP estime néanmoins que ce facteur n’est pas de nature à favoriser
réellement la concurrence entre distributeurs car les marges de manoeuvre
commerciale des routeurs sont strictement limitées, et leur situation
économique fragile.
Quel que soit le scénario considéré, et les incertitudes qui y sont
attachées, la Cour recommande cependant que La Poste consacre une
attention particulière à ces questions.
Comme on l’a noté, le courrier des entreprises est très concentré
sur de grands clients. Si une concurrence se faisait jour, La Poste sera
probablement contrainte de baisser ses prix sur ce segment de son
activité. Cette évolution pèsera naturellement sur les équilibres financiers
du Courrier et contribuera à dégrader le financement des missions de
service public. Or, le coût net du service universel, la part non couverte
de la contribution à l’aménagement du territoire et le déficit du compte
presse bénéficient aujourd’hui des marges positives du courrier industriel.
Cette perspective rend encore plus impératifs les gains de
productivité du courrier, ainsi que la mise en oeuvre effective des
dispositions qui ont été arrêtées récemment pour clarifier le financement
de la distribution de la presse et la présence territoriale postale.
______________________
CONCLUSION
_____________________
L’ouverture complète du marché postal français à la concurrence
interviendra le 1
er
janvier 2011 alors que plusieurs pays européens ont
anticipé cette échéance.
Dans les faits, le marché « accessible » demeurera limité dans les
prochaines années. Une vigilance est cependant indispensable car
l’entrée d’opérateurs alternatifs sur les créneaux les plus rentables ne
saurait être écartée, d’autant que le marché postal est très concentré sur
des grands clients.
Dans ce contexte, La Poste est encore plus confrontée à la
nécessité d’une réduction de ses coûts et l’équilibre du financement du
service universel et des missions de service public deviendra plus délicat
(voir infra).
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68
COUR DES COMPTES
B - La rationalisation des envois et la substitution
numérique
La crise économique conduit les entreprises à rechercher les tarifs
les plus avantageux. Cette recherche d’économies peut se traduire aussi
par des envois plus espacés, comme les relevés bancaires par exemple,
mais surtout par la dématérialisation des envois.
La dématérialisation peut ouvrir des opportunités de croissance
pour le colis grâce au développement du commerce mais elle pèse très
fortement sur les volumes de courrier.
La dématérialisation des envois a cru de manière exponentielle au
cours des dernières années. Ainsi, le nombre de feuilles de soins
électroniques est passé, avec l’introduction de la carte vitale, de 11
millions par an en 1999 à 1,1 milliard aujourd’hui, ce nombre continuant
de progresser, tandis que le nombre de télé-déclarants à l’impôt sur le
revenu est passé de 600 000 en 2003 à 9,7 millions en 2009.
Les marges de substitution de l’envoi électronique au papier
restent considérables. Les banques et assurances ont déjà beaucoup réduit
leurs envois postaux de relevés de compte et autres documents
transactionnels récurrents, mais ce secteur demeure le premier client de
La Poste, devançant encore le secteur public. A présent les grands
facturiers, comme EDF ou les concessionnaires de réseaux d’eau et
d’assainissement, multiplient les initiatives pour convaincre leurs clients
d’accepter la facturation électronique.
De ce point de vue, le retard de la France en termes d’accès
internet qui se comble rapidement (en 2002, 23 % des ménages avaient
accès à internet, ils sont 63 % en 2009, contre 79 % en Allemagne et 83
% en Suède) pourrait avoir pour effet que l’évolution du courrier de La
Poste soit désormais moins favorable que celui de ses concurrents
principaux (voir annexe n°10).
Même si le courrier des particuliers ne représente que 14 %
environ des envois de correspondance, l’informatisation croissante des
ménages est de nature à augmenter le rythme de dématérialisation des
envois des entreprises et des administrations aux particuliers.
Le média électronique constitue donc, certainement, le concurrent
le plus redoutable du courrier pour les années à venir, en même temps
qu’une opportunité pour d’autres activités de La Poste, qui doit innover
sur de nouveaux services multi-supports, développer le colis dans le e-
commerce, renforcer la banque à distance …
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69
C - Une réaction tardive
Comme on l’a constaté au début de ce rapport, le plan stratégique
2008-2012 continuait à reposer sur l’hypothèse que le Courrier
demeurerait le principal contributeur des résultats du groupe, sous la
condition que le programme d’industrialisation soit mené à son terme et
permette de dégager les gains de productivité nécessaires.
Depuis le début des années 2000, les échanges de courrier étaient
en déclin régulier, un peu plus prononcé en Europe du nord qu’en France.
En 2008, la décroissance est devenue beaucoup plus marquée. Tous les
grands opérateurs mondiaux ont alors pris conscience brutalement d’un
bouleversement durable de leur modèle économique : le repli modéré des
cinq années précédentes, qui avait diminué leur activité d’environ 5 %,
serait six fois plus fort d’ici 2015. Il semble exister un consensus assez
large des grands opérateurs postaux réunis dans IPC
52
pour estimer la
baisse des volumes des activités courrier dans une fourchette de 30 à 40
%. Royal Mail affiche une prévision de décroissance annuelle de -5 à -7
% de 2010 à 2015. Deutsche Post DHL annonce - 5 % par an jusqu’en
2020, soit moins 30 % jusqu’en 2015 et TNT - 6 % par an entre 2008 et
2012.
Même si l’ensemble du monde postal n’avait pas prévu un
retournement aussi brutal, l’opérateur français aurait pu anticiper en
2006-2007, lors de la préparation de son plan stratégique 2008-2012, un
recul de son activité plus important que la simple prolongation des
tendances passées. Son trafic, en effet, était inévitablement appelé à
rejoindre les évolutions plus précoces et plus importantes constatées dans
les autres pays développés, ne serait-ce qu’en notant que le retard de notre
pays en matière d’internet était en train de se combler rapidement.
Pour le moins, les prévisions pour 2008-2012 ne peuvent manquer
d’étonner. En effet, les hypothèses d’évolution du courrier ont été à peine
infléchies à la baisse : - 1,5 % pour 2009 et 2010 et - 2 % pour 2011 et
2012, soit simplement une légère accentuation de la baisse de l’ordre de 1
% par an constatée sur la période 2004-2007.
De fait, dès la première année du plan « Performance et
confiance », La Poste a perçu, au printemps 2008, les premiers signaux
précurseurs d’une accélération de la baisse des volumes du courrier. Un
plan de « réassurance du résultat » visant des économies de 200 M€ sur
52) Créée en 1989, l’International Post Corporation regroupe 25 des grands opérateurs
postaux dans le monde qui représentent 80 % du trafic postal mondial.
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70
COUR DES COMPTES
l’exercice était mis en oeuvre et réalisé par le Courrier avec une
contribution de la tête de groupe et de l’Enseigne.
En revanche, le projet massif d’industrialisation du courrier n’a pas
été reconfiguré pour adapter ses ambitions aux volumes prévisibles du
trafic. Au contraire, des mesures diverses ont été prises pour réduire
autant que possible les trois années de retard constatées dans le
déploiement de ce programme. Même sans alléguer la prévisibilité du
choc de 2008, il est regrettable que La Poste n’ait pas su adapter en 2008
son projet d’investissement, manifestement surdimensionné désormais.
Le groupe a pris progressivement conscience de l’ampleur du
retournement structurel des flux du courrier, à partir de la crise financière
de septembre 2008. Les charges d’exploitation consolidées ont continué à
progresser, ainsi que la masse salariale, ce qui s’est traduit par une chute
du résultat d’exploitation de La Poste de 32% et de son résultat net de
44% sur l’exercice 2008.
Le budget 2009 élaboré fin 2008 n’a pas été significativement
infléchi, de sorte que le réalisé a fait apparaître un chiffre d’affaires
courrier inférieur de 330 M€ par rapport au budget voté et en recul de 535
M€ par rapport au réalisé de 2008.
La réactivité de La Poste a néanmoins été plus marquée dans le
courant de 2009. Toutes les entités opérationnelles du groupe ont mis en
place des programmes d’économies, notamment en application de dix
chantiers validés par le comité exécutif du groupe et portant
principalement sur les fonctions transverses. Les charges opérationnelles
ont diminué de 1,6 % à périmètre et taux de change constants. Les
charges de personnel ont été pratiquement stabilisées à 12 625 M€, du fait
d’une diminution de l’effectif moyen de 8 571 agents équivalent année,
soit - 2,9 %. En dépit d’une baisse du chiffre d’affaires de 1,3 %, La Poste
a maintenu son résultat net consolidé au niveau de 2008, soit 531 M€.
Ce n’est que dans ses budgets 2010 que La Poste a pris en compte
la perspective d’une baisse importante et structurelle de l’activité
courrier.
D - Un statu quo impossible
Sans doute crédible pour la période 2003-2007, la stratégie de La
Poste était devenue plus discutable pour la période 2008-2012. Ces
perspectives devaient conduire sur la période 2008-2012 à une croissance
du chiffre d’affaires du Courrier de 1 % par an et à un résultat
d’exploitation autour de 850 M€ en 2012.
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71
Dès à présent, ce modèle de développement n’est plus tenable.
Après une accentuation de la baisse des volumes économiques constatée
en 2008, cette baisse a atteint 5,3 % en 2009 et le résultat d’exploitation
du courrier n’est plus que de 179 M€.
Les menaces qui pèsent sur le devenir du courrier sont fortes.
Même si la concurrence ne devait se concrétiser que de façon modérée à
l’échéance des cinq années à venir, il n’est guère douteux que la
substitution des envois électroniques au courrier papier va se poursuivre
et s’amplifier.
La détermination du volume raisonnablement prévisible des
activités courrier est évidemment essentielle. Elle est, en effet,
déterminante pour fixer la feuille de route des actions à conduire pour
maintenir à flot le métier historique, mais également pour arrêter la
trajectoire qui doit être impartie aux autres métiers et à leurs filiales pour
compenser, si possible, et limiter en tout état de cause l’impact du recul
du courrier.
La Poste retient une hypothèse de recul global de 30 % des
volumes économiques du courrier entre 2008 et 2015. Il est possible que
cet alignement sur les hypothèses de l’IPC ne rende pas compte de la
situation particulière de la France où, comme mentionné plus haut, le
recul du courrier a été plus tardif et pourrait donc, à l’avenir, être plus
marqué que dans les autres pays européens.
La difficulté serait naturellement plus grande encore si la
contraction du métier historique était plus forte. Face aux incertitudes qui
affectent toute prévision économique à échéance de cinq-six ans, le
scénario de La Poste ne peut être qualifié ni de trop optimiste ni de trop
pessimiste. En revanche, des évolutions plus défavorables ne doivent pas
être exclues et dans cet esprit, des simulations complémentaires tournant
autour d’une hypothèse alternative à - 40 % devraient être effectuées
53
.
En outre, se pose la question de savoir si, après cette évolution,
qu’elle soit de - 30 % ou plus forte encore, le courrier se situera à une
sorte de seuil incompressible ou si, loin d’atteindre son étiage, l’activité
poursuivra au-delà de 2015 un retrait continu, conduisant quasiment à une
disparition du média papier.
53) Le Ministre chargé de l’industrie, Ch. Estrosi, a déclaré lors d’une audition devant
la commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale le 1er décembre
2009 : « (…) les volumes de courrier de La Poste ont déjà diminué de 10 % depuis
deux ans et, dans quelques années, la baisse pourrait atteindre 30 ou 50 % ! »
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72
COUR DES COMPTES
Sans retenir cette perspective extrême, La Poste ne peut néanmoins
pas poursuivre son développement dans la continuité de la stratégie
menée depuis 2003. En effet, celle-ci est devenue intenable à plusieurs
égards :
Faute de demeurer le joyau de La Poste (dans les années 2000, le
résultat d’exploitation du Courrier a été, certaines années, supérieur
au résultat consolidé du groupe), le Courrier ne doit pas devenir
pour autant un foyer de pertes structurelles. La Poste va donc
devoir accélérer ses gains de productivité ;
Les
activités
bancaires,
le
colis
et
l’express
constituent
incontestablement des relais de croissance, mais leur contribution
ne saurait se limiter à combler les reculs du courrier, faute de quoi
leur croissance serait inévitablement freinée par une capacité
d’autofinancement insuffisante et un niveau d’endettement du
groupe déjà trop élevé ;
Les marges de manoeuvre au plan financier pour des opérations de
croissance
externe
sont
désormais
très
limitées,
malgré
l’augmentation de capital prévue ;
La question de l’adaptation de la politique de ressources humaines
de La Poste aux mutations profondes de son environnement et de
ses activités se pose.
______________________
CONCLUSION
_____________________
La dématérialisation des envois et la substitution numérique qui se
déroulent à un rythme accéléré placent les opérateurs postaux devant une
interrogation redoutable.
De ce point de vue, la question la plus ouverte est de savoir si,
après cette évolution, le courrier se situera à une sorte de seuil
incompressible ou si, loin d’atteindre son étiage, l’activité poursuivra au-
delà de 2015 un retrait continu, conduisant quasiment à une disparition
du média papier.
Compte tenu des incertitudes qui affectent la prévision à cette
échéance, la Cour recommande que des simulations complémentaires
tournant autour d’une hypothèse alternative de baisse des volumes
économiques du courrier de 40 % entre 2008 et 2015 soient réalisées.
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73
II
-
Les réponses de La Poste à horizon 2015 : le
plan « Ambition 2015 »
Pour répondre aux nombreux défis auxquels elle est confrontée, La
Poste a présenté à son conseil d’administration, le 15 avril 2010, un
nouveau projet stratégique, dénommé « Ambition 2015 ». Ce plan se veut
une réponse à l’importante modification de l’environnement économique
enregistrée ces deux dernières années.
A - Les priorités du plan « Ambition 2015 »
Ce plan vise à revenir progressivement aux niveaux de rentabilité
qui prévalaient avant la crise économique. Il est articulé autour de 5
priorités :
1.
la pleine exécution de ses quatre missions de service public ;
2.
la performance durable et responsable du groupe, fondée sur la
croissance du chiffre d’affaires, la maîtrise des coûts, l’amélioration
de la rentabilité opérationnelle, le développement des partenariats et
une meilleure satisfaction des clients ;
3.
un renforcement de la qualité de service ;
4.
l’innovation ;
5.
le développement d’activités nouvelles et la recherche de nouveaux
marchés en Europe.
La Cour partage ces orientations générales.
B - La trajectoire financière
La Poste prévoit à horizon 2015 un chiffre d’affaire de 22,6 Md€,
hors croissance externe, en légère hausse par rapport à 2009 (+ 1,1 % en
moyenne par an, contre 2,04 % entre 2003 et 2009), un résultat
d’exploitation de l’ordre de 1,7 Md€ (soit une progression moyenne
annuelle de 14 %, proche de celle enregistrée entre 2003 et 2009 qui était
de 16 %) et une marge opérationnelle de l’ordre de 8 %, supérieure à la
meilleure performance de La Poste dégagée en 2007 (6,29 %) mais
inférieure à l’objectif de 8,5 % inscrit au plan stratégique 2008-2012.
Ces projections comportent une relative stabilité jusqu’en 2012 et
une accélération au-delà grâce au réseau européen du colis-express et à la
montée en puissance de La Banque Postale. Elles sont fondées sur des
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74
COUR DES COMPTES
hypothèses moyennes, comportant notamment une progression du PIB de
1,3 % en 2010, 1,5 % en 2011 et 2,1 % en 2012, et sur un recul des
volumes du courrier de 30 % entre 2008 et 2015. La Poste considère que
cette réduction du trafic serait gérable par le groupe, sans altérer les
objectifs ambitieux du service universel postal et sans remettre en cause les
valeurs de l’entreprise, notamment sur le plan social.
La trajectoire 2015 a sa propre cohérence mais elle repose, pour
partie, sur des hypothèses volontaristes.
En effet, ce scénario implique de placer l’entreprise sous une forte
tension, car elle devra absorber une perte du chiffre d’affaires du courrier
de l’ordre de 2 Md€ au moins. La Poste prévoit de limiter cet impact à 1,5
Md€ par une revalorisation tarifaire, le développement de nouveaux
produits, une contribution plus forte des métiers connexes et un transfert de
la charge au titre de l’accessibilité du service universel (500 M€) sur les
comptes du groupe. Or, les marges de manoeuvre dont dispose La Poste sur
l’ensemble de ces paramètres doivent être considérées avec prudence pour
les raisons déjà évoquées.
Au total, le chiffre d’affaires du courrier diminuerait de 11,6 Md€ en
2009 à 10,1 Md€ en 2015, soit une baisse moyenne annuelle de 2,4 %
quasiment équivalente à la baisse moyenne annuelle entre 2007 et 2009.
Alors que sur la période 2007-2009, le résultat d’exploitation du courrier a
été divisé par plus de quatre, il resterait globalement constant entre 2009 et
2015, ce qui suppose une forte réduction des charges d’exploitation. En
2015, le Courrier ne représenterait plus que 44 % du chiffre d’affaires du
groupe, et 6 % de son résultat d’exploitation (contre respectivement 55 %
et 16 %
54
en 2009).
Le chiffre d’affaire du secteur colis-express croîtrait de près de 4 %
en moyenne par an (soit une croissance inférieure à celle de 5,5 % par an
en moyenne dégagée entre 2003 et 2009), pour atteindre 5,65 Md€ en
2015. Il représentera, à cette échéance, 25 % de celui du groupe et son
résultat d’exploitation, 17 %. Les progressions prévues pour le secteur du
colis-express paraissent raisonnables. En effet, elles sont inférieures aux
progressions affichées par d’autres opérateurs européens. Par ailleurs, elles
semblent à la portée de La Poste compte tenu de la robustesse déjà
démontrée du modèle économique de ColiPoste et GeoPost.
54) Le résultat d’exploitation du groupe est la somme algébrique des REX des trois
métiers et de celui structurellement négatif de la tête de groupe et de l’Enseigne. De
ce fait, l’addition des REX du courrier, du colis-express et de La Banque Postale est
nécessairement supérieure au REX du groupe.
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75
Enfin, le produit net bancaire de La Banque Postale croîtrait de 5 à
6 % par an pour atteindre près de 7 Md€ en 2015, soit une progression
supérieure à celle dégagée entre 2006 et 2009 (taux de croissance annuel
moyen de 4,2 %). Certes, LBP dispose de nombreux atouts : sa clientèle
actuelle recèle un potentiel de développement important, le crédit à la
consommation et l’assurance de dommages vont monter en puissance et
son activité devrait s’étendre au crédit aux entreprises. La Banque Postale
peut également capitaliser sur son image de service public et de banque
moins chère que la concurrence. Enfin, elle a enregistré, au cours des
dernières années, une augmentation forte de ses encours de crédits
immobiliers. Mais l’organisation complexe de La Banque Postale, les
incertitudes économiques et la relative rigidité des parts de marché des
établissements bancaires pourraient contrecarrer ces objectifs.
LBP représenterait en 2015 31 % du chiffre d’affaires du groupe et
77 % de son résultat d’exploitation (contre respectivement 24,3 % et 55
% en 2009).
La compensation de la chute du courrier par le développement des
activités financières et la croissance du colis et de l’express s’est amorcée
en 2009. Les projections d’Ambition 2015 sont la prolongation de cette
tendance. Le cadre apparaît donc raisonnable. Le fait que le plan 2010-
2015 n’intègre pas tous les projets de développement possible du Groupe,
tels que le projet de création d’un opérateur virtuel de téléphonie mobile,
ou encore le développement du crédit aux TPE et PME pourraient
conforter cette appréciation confiante. A l’inverse, l’analyse du plan
d’affaires par métiers peut susciter une préoccupation plus forte,
notamment
quant
aux
attentes
fondées
sur
une
limitation
des
conséquences du recul des volumes du courrier. Une interrogation
analogue se pose pour les projections relatives aux activités bancaires.
III
-
Les conditions de la réussite du plan
« Ambition 2015 »
La Poste se trouve face à des enjeux majeurs. Elle dispose, pour y
faire face, d’atouts incontestables :
la densité de son réseau et ses activités multi-métiers ;
l’attachement de ses personnels aux missions de service public ;
la confiance dont elle bénéficie auprès du public et l’image
« éthique »
qu’on
lui
accorde
et
qui
lui
confèrent
un
positionnement de « tiers de confiance » qu’elle a pour ambition de
valoriser dans le domaine du numérique afin de « réinventer » le
courrier et de progresser dans les services bancaires ;
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76
COUR DES COMPTES
un gisement de clientèle très large, 45 millions de clients
particuliers à La Poste et 30,1 millions de clients à La Banque
Postale ;
la possibilité de développer des synergies commerciales entre les
différents métiers du groupe.
Une forte mobilisation s’impose pour tirer profit de ces atouts et
réunir les conditions de réussite du plan « Ambition 2015 ». Il s’agit, pour
La Poste, de répondre aux enjeux de la qualité, de réduire ses coûts et de
faire progresser ses revenus opérationnels.
A - Répondre aux enjeux de la qualité
Les enquêtes de satisfaction généralement très favorables aux
différents métiers du groupe ont tendance à masquer les problèmes de
qualité de service qui subsistent. Soutenu par une communication efficace
de La Poste et par l’attachement réel de l’opinion à ce grand service
public, le sentiment dominant serait de considérer que les retards de La
Poste par rapport aux autres grands opérateurs historiques finiront par se
résorber, l’essentiel étant que les progrès se poursuivent à leur rythme.
Ce serait oublier le poids des grands clients dans les volumes
traités par La Poste dans les domaines du colis, de l’express et du courrier
et méconnaître la progression rapide de leurs exigences quant à la qualité
des services qu’ils paient. De ce double point de vue, la qualité de service
devient plus que jamais une composante cruciale de la compétitivité de
La Poste.
La question lancinante de l’accueil et des délais d’attente dans les
bureaux de poste demeure, par ailleurs, toujours mal résolue, même si des
progrès sensibles ont été enregistrés très récemment dans les bureaux de
poste les plus importants.
1 -
Des progrès inégaux
Les objectifs de qualité de service des prestations du service
universel sont fixés par le ministre chargé des postes (voir annexe n°11).
Les progrès dans le domaine de la qualité de service sont inégaux :
elle s’est améliorée dans le domaine du colis et de l’express et révèle un
certain nombre d’éléments positifs dans le domaine bancaire ; des
insuffisances demeurent dans celui du courrier.
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77
a)
Une amélioration sensible dans le domaine du colis et de l’express
Depuis 2003, la qualité de service s’est considérablement
améliorée à la fois dans le domaine du colis et celui de l’express, tant
pour les délais que pour le suivi de l’objet.
Aujourd’hui, 93% des colis sont livrés en J+2, contre 73 % entre
J+3 et J+5 en 2002. De même, le pourcentage des colis suivis des
entreprises (« B to C ») est passé de 27 % à 75 %. Le taux de pertes ou
vols est très faible (0,041 % en 2009).
Dans le domaine de l’express, la qualité de service offerte par
GeoPost est aujourd’hui conforme aux standards du marché. Plus de 95 %
des colis sont livrés dans les délais. Le nombre de colis perdus-volés est
très faible (1,94 pour 10 000 colis facturés en 2009 s’agissant de
Chronopost).
De nombreux éléments d’insatisfaction des clients quant aux
modalités de la livraison des colis ont toutefois été recueillis pendant
l’enquête de la Cour (mises en instance non justifiées, paquets
endommagés…). De plus, 15 % des Colissimo déposés aux guichets sont
livrés au-delà du délai maximum garanti de 48 heures.
Par ailleurs, la complexité des tarifs et l’optimisation des envois
entre ce qui peut relever du courrier et ce qui ressort du colis soulèvent de
fréquentes critiques. Ainsi, pour de petits envois de moins de 1 kg et de
moins de 2 centimètres, il est possible d’utiliser un envoi en Mini Max
55
sensiblement moins cher que le Colissimo, sans engagement de livraison
sous 48 heures, mais avec une indemnisation analogue en cas de perte ou
de détérioration.
Une enquête récente de l’Institut national de la consommation fait
apparaître que ce produit n’a été proposé que dans 7 % des 150 tests
mystères réalisés. Elle constate par ailleurs que 29 % des envois tests en
Colissimo sont arrivés au-delà du délai de 48 heures.
55) Cette offre économique a été imposée par l’ARCEP pour compenser la
suppression du Colis eco en France métropolitaine pour les particuliers. Ainsi l’envoi
d’un CD d’un poids estimé à 100 grammes est facturé 1,50 €, au lieu de 5,30 € en
Colissimo.
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COUR DES COMPTES
b)
Des efforts dans le domaine des services bancaires
Les enquêtes menées par la direction marketing de La Banque
Postale mais aussi des enquêtes externes
56
font apparaître une position
globalement satisfaisante de la banque par rapport à ses concurrents en
termes de qualité de service.
Ces enquêtes soulignent notamment que La Banque Postale
pratique une politique tarifaire modérée. Ainsi, selon l’une d’entre elles
57
,
LBP affiche le coût annuel moyen des services bancaires le plus faible.
Ce coût est de 367 euros en 2009 (contre une moyenne de 437 euros pour
les établissements bancaires). Pour la clientèle jeune, le coût annuel des
services bancaires à La Banque Postale est en moyenne de 51 euros. Cette
politique tarifaire est cohérente avec le positionnement historique de La
Poste.
LBP a, par ailleurs, maintenu une politique prudente de
distribution des crédits et des produits. La durée des crédits immobiliers a
été allongée, mais, plafonnée à 25 ans, elle est restée en deçà des
pratiques de la concurrence.
Dans le domaine des produits financiers, des progrès ont été
constatés quant aux conseils à la clientèle. Les services financiers de La
Poste ont en effet connu, il y a quelques années, des difficultés avec les
souscripteurs
d’un
fonds
commun
de
placement
(BENEFIC),
commercialisé entre octobre 1999 et décembre 2000
58
.
Depuis lors, LBP a mis en oeuvre, conformément à ses obligations
réglementaires, des dispositifs pour prémunir sa clientèle contre le risque
de défaut de conseil.
La banque veille à ce que ses produits soient bien adaptés aux
caractéristiques de sa clientèle, souvent âgée ou en situation financière
fragile, et s’efforce de les rendre clairement compréhensibles.
Au stade de la commercialisation, la gamme de produits de
placement proposée par le réseau est limitée et proportionnée aux
compétences de chaque catégorie de conseillers clientèle. De plus, la
56) Voir l’édition 2009 de l’étude annuelle CLCV-Mieux Vivre Votre Argent ou les
enquêtes du magazine Le Revenu ou le Monde Argent
57) Trophées 2009 du magazine Le Revenu
58) Près de 310 000 épargnants avaient souscrit à ce produit dont le capital pouvait
être entamé si l’indice de référence réalisait une baisse supérieure à 23%. Ces clients
ont constaté des performances négatives et certains ont subi une perte sur leur mise de
fonds.
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79
rémunération variable des conseillers financiers ne comporte pas
d’incitation au placement des produits financiers risqués.
Dans le domaine du crédit à la consommation, le dispositif
comprend un pôle spécifique dédié à la prévention du surendettement.
L’offre commerciale sera principalement centrée sur le prêt personnel
classique et sur le regroupement de prêts
59
.
En dépit de ces éléments positifs indéniables, la qualité du service
bancaire est souvent altérée par les conditions d’accueil dans les bureaux
de poste. En particulier, la prise de contact avec l’interlocuteur compétent
s’avère parfois difficile.
c)
Des insuffisances persistantes dans le domaine du courrier
Les objectifs dans le domaine du courrier s’expriment en
pourcentage d’objets distribués à une échéance déterminée : le lendemain
du dépôt pour la lettre « urgente » (J+1), J+4 pour la lettre
« économique », J+7 pour le courrier publicitaire …
Dans son rapport public de 2003, la Cour soulignait le problème
majeur de la qualité de service dans le domaine du courrier, qui demeurait
nettement inférieure à celle des grandes postes européennes.
Au cours de la période récente, la qualité de la distribution à J+1
de la lettre égrenée prioritaire a sensiblement progressé, passant de 69,6
% en 2003, à 84,4 % en 2009
60
. Elle demeure toutefois inférieure à celle
des grandes postes européennes et semble se heurter désormais à une
barrière difficilement franchissable. Ce constat est décevant car les
investissements massifs de modernisation de l’outil industriel du courrier
auraient dû se traduire par une amélioration plus nette de la qualité de
service.
L’objectif interne de La Poste traduit dans CQC était de porter la
qualité de la distribution à J+1 de la lettre égrenée prioritaire à 90 % en
59) La loi du 9 février 2010 vient de renforcer les précautions en ce domaine en
prévoyant que le contrat d’entreprise conclu par l’Etat avec La Poste « contient des
engagements de La Poste en matière de lutte contre le surendettement et de prévention
de celui-ci, en particulier en ce qui concerne le crédit à la consommation renouvelable
(…). »
60) Malgré cette progression de la qualité de la distribution du courrier à J+1,
l’impression peut exister au sein de l’opinion publique d’une dégradation par rapport
à une situation antérieure où il y avait une distribution du courrier en J. Il convient de
rappeler, sur ce point, que le mode d’acheminement du courrier en J était limité à des
flux marginaux. Ce mode de distribution a disparu à partir des années 1980, avec la
généralisation du traitement industriel du courrier.
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80
COUR DES COMPTES
2010. Le contrat de plan 2003-2007 avait cependant fixé un objectif de
85% qui n’a jamais été atteint sur aucune des années concernées et
rarement sur un mois donné. Pour la période 2008-2010, le contrat de
service public a pris acte des difficultés de La Poste et réduit les
ambitions de qualité en fixant l’objectif à 83 % en 2008 et 84 % en 2009,
soit pratiquement au niveau déjà atteint en 2007. Pour la première fois en
2008 et 2009, l’objectif réglementaire a été légèrement dépassé (83,9 %
en 2008 et 84,7 % en 2009).
Ce résultat est décevant au regard des performances supérieures à
90% réalisées dès 2006 dans les sept pays suivants: Pays-Bas (96,6%) ;
Finlande (96%) ; Allemagne (95,9%) ; Suède (94,2%) ; Danemark
(94,1%) ; Royaume-Uni
(94%) ; Belgique (92%). L’Espagne et l’Italie se
situaient à cette époque en dessous de 90%, mais avaient cependant des
résultats plus favorables que ceux de La Poste
62
.
Les comparaisons doivent tenir compte des différences de
superficie et de densité de population, qui rendent l’objectif de qualité de
service plus difficile et plus coûteux à atteindre en France
63
. Il reste que
La Poste demeure à un niveau de qualité de service de la distribution du
courrier prioritaire bien inférieur à celui de la plupart des pays européens.
Par ailleurs, la réglementation n’ayant fixé aucune règle quant aux
heures de levée des boîtes aux lettres, La Poste a sensiblement raccourci
au cours des dernières années les plages horaires utiles pour le dépôt du
courrier prioritaire. En 2008, environ 120 000 boîtes jaunes sur 147 000
ont une heure limite de dépôt fixée à 13 heures et 22 000 entre 13 et 16
heures. Il est clair que la question des heures de levée constitue un
élément essentiel de la qualité de service. Il serait souhaitable, sous le
contrôle de l’ARCEP, de pondérer la mesure du respect du J+1 par
l’évolution des heures limites de levée du courrier.
La distribution des lettres égrenées prioritaires en J+1 pose ainsi
une difficulté que La Poste ne semble pas en mesure de résoudre
réellement. En plafonnant au taux de 85% elle se trouve, en fait, dans une
situation de non qualité pour près de une lettre prioritaire sur six. La
ponctualité de la distribution est sensiblement meilleure pour les envois
intra-régionaux. Face à cette situation, la Cour recommande qu’une
nouvelle réflexion soit engagée sur cet indicateur et sur les moyens
d’améliorer la qualité de service (voir infra).
62) « Les services postaux en Europe », 2006, Eurostat.
63) De plus, les méthodologies d’évaluation ne sont pas parfaitement homogènes.
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Les délais excessifs ont été très sensiblement réduits. En 2003,
12,2% du courrier prioritaire parvenait au-delà de J+2. Le contrat de plan
avait fixé l’objectif de ramener ce taux à 5% maximum. L’objectif a été
atteint dès 2005. En 2008, seulement 3,2% des envois prioritaires ont été
distribués au-delà de J+2.
La lettre recommandée a pour objet de garantir la sécurité
d’acheminement de certains envois importants. Il s’agit d’un service
« haut de gamme » dont le tarif est cinq fois plus élevé que celui d’une
lettre ordinaire
64
. L'objectif de qualité de service de la lettre recommandée
n'est pas mesuré par le délai de sa remise effective au destinataire, mais
par sa date de mise en distribution par le bureau de poste d'arrivée. Près
de 90 % des lettres recommandées ne sont pas distribuées en J+1 et 0,4 %
d’entre elles ne sont distribuées qu’à partir de J+7. Dès lors, les modalités
de remise des avis de passage en cas d’absence et les mises en instance au
bureau de poste suscitant des réclamations nombreuses, la qualité de
service de la lettre recommandée apparaît pour le moins perfectible à
beaucoup d’égards.
Par ailleurs, la capacité de La Poste à tenir les calendriers de
distribution des envois de marketing direct convenus avec de grands
clients est parfois prise en défaut. Des éléments recueillis pendant
l’enquête de la Cour témoignent d’insatisfactions d’entreprises de ventes
par correspondance dont des campagnes de promotion ont souffert d’une
distribution à mauvaise date des catalogues de vente.
Ainsi, La Poste doit encore progresser pour améliorer la régularité,
la ponctualité, la traçabilité des envois et enrichir les services qui leur
sont associés. Face au renforcement de la concurrence, sa ligne de
défense ne peut être de se concentrer sur une guerre des prix, comme cela
semble se profiler dans certains secteurs au cours des derniers mois.
d)
Une professionnalisation du traitement des réclamations
Le nombre des réclamations demeure très faible dans le secteur du
courrier, comparé aux flux d’objets traités, mais une augmentation
sensible est notée depuis 2008, malgré le contexte de baisse des volumes
du courrier. La Poste estime que cette évolution n’est pas préoccupante
car elle traduirait l’amélioration de l’accès au dispositif de réclamations.
64) Pour un envoi dont le poids est compris entre 20 et 50 grammes, le tarif de la
lettre recommandée varie entre 4,70 € et 6,20 € selon le niveau d’indemnité choisie en
cas de perte, alors que la lettre ordinaire est tarifée 0,90 € dans cette tranche de poids.
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COUR DES COMPTES
Statistiques concernant le traitement des réclamations
Courrier
2005
2008
2009
Nombre de réclamations
533 123
446 751
627 812
Réclamations par rapport au flux
total
0,003%
0,002%
Réponses données dans un délai
de 21 jours
87%
97,7%
93,3%*
Colis
Nombre de réclamations
385 567
479 497
424 853
Réclamations par rapport au flux
total
1,38%
0,98%
1,33%
Réponses données dans un délai
de 21 jours
92,5%
94,68%
98,9%
Source : La Poste – Tableau de bord du service universel
*
Les délais de réponse de La Poste s’entendent désormais en 15 jours ouvrés qui
correspondent à 21 jours calendaires.
Sous le pilotage de la direction de la qualité du groupe, un nouveau
dispositif de traitement des réclamations grand public a été mis en place
en 2008.
Modalités de traitement des réclamations grand public
Un service consommateurs, point d’entrée unique pour tous les
métiers et multicanal, prend en charge désormais le traitement des
réclamations. Les réclamations ne sont plus prises en charge par les bureaux
de poste, mais par ce service consommateur. Les réclamations peuvent
encore être déposées par courrier
65
, mais aussi par téléphone (numéro court
unique et non surtaxé) et surtout par internet
66
.
Cette réorganisation permet de réduire le temps consacré par les
guichetiers à ces demandes, tout en professionnalisant leur prise en compte.
Elle permet aussi de mieux garantir l’exhaustivité de la saisie des plaintes.
65) Par courrier libre ou à l’aide d’un formulaire papier élaboré avec les clients et les
associations de consommateurs, à une adresse unique (Service Consommateurs 99999
La Poste) spécifiquement créée pour l’occasion.
66) Accès visible dès la page d’accueil du portail internet du Groupe.
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83
Des engagements clients adoptés par La Poste sont, par ailleurs,
destinés à répondre aux principaux motifs d’insatisfaction identifiés.
Outre le traitement des réclamations, ils portent sur la réduction de
l’attente en bureau de poste, mais aussi sur les problèmes de distribution
de courrier
67
.
Ces évolutions vont dans le bon sens et doivent être poursuivies
résolument afin d’améliorer encore l’accessibilité du dépôt des
réclamations pour tous les métiers de La Poste (en particulier s’agissant
de ColiPoste et de La Banque Postale), améliorer la qualité des réponses
qui leur sont faites et affiner l’analyse des dysfonctionnements qu’elles
révèlent.
Au-delà du service consommateurs, les réclamations peuvent être
soumises au Médiateur de La Poste, directement rattaché au président du
groupe et compétent sur l’ensemble des métiers. En 2008, le Médiateur a
été saisi de 5 775 plaintes, soit quasiment le triple du nombre de plaintes
enregistrées en 2003, dont 47 % au titre des activités bancaires, 35 %
pour le colis et 17 % pour le courrier.
En 2007 comme en 2006, le Médiateur a fait réaliser une étude de
satisfaction afin de mieux appréhender la perception des clients vis-à-vis
du recours au Médiateur. Cette enquête témoigne d’une appréciation
assez positive (73 % des clients ayant saisi le Médiateur sont prêts à
recommander cette voie à d’autres clients).
La fonction du Médiateur trouve une utilité complémentaire dans
des recommandations visant à corriger les dysfonctionnements structurels
détectés. Ces recommandations semblent largement suivies par les
services de La Poste. Ainsi, LBP a donné suite à toutes les
recommandations formulées par le Médiateur et mis en oeuvre, par
exemple, une série de mesures destinées à réduire le délai d’encaissement
des chèques.
2 -
La question persistante de l’accueil dans les bureaux de poste
L’accueil dans les bureaux de poste, qui a pendant longtemps
constitué un « point noir », a fait l’objet de nombreuses initiatives de La
Poste, destinées notamment à rénover les bureaux et surtout, à réduire le
temps d’attente aux guichets. Ces initiatives semblent commencer à
porter leurs fruits.
67) Ainsi, en cas d’avis de mise en instance d’une lettre recommandée, le client peut
demander avant 14h00 en semaine (13h00 le samedi) une deuxième présentation
gratuite le jour ouvrable suivant.
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84
COUR DES COMPTES
a)
La rénovation immobilière des bureaux de poste
La réorganisation des bureaux de poste a été évolutive dans le
temps. Le nouveau concept de bureau de poste, défini en 2005, a consisté à
passer du guichet traditionnel, où toutes les opérations étaient effectuées
indifféremment, à trois espaces : un «
espace guichet
» réservé à la vente
« face à face », un «
espace confidentiel
» pour les entretiens avec les
conseillers financiers, et un «
espace libre-service
» où les clients réalisent
directement leurs opérations simples d’achat de produits « boutique »
(courrier, colis « prêt-à-poster », cadeaux) ou financières (retraits et dépôts
via les automates).
En 2009, La Poste a modernisé l’ensemble de ses bureaux de poste
parisiens. Le modèle appelé « Espace service clients » ne comprend plus
que deux guichets et quatre « ilots » dédiés respectivement aux
professionnels, aux dépôts et retraits, à l’affranchissement et à l’accueil.
Parallèlement tous ces bureaux sont désormais ouverts en semaine jusqu’à
20 heures et jusqu’à 13 heures le samedi, voire jusqu’à 16 heures 30 pour
une vingtaine d’entre eux.
Ce nouveau type de bureau de poste constitue un progrès
symbolique de la modernisation de l’entreprise, par la suppression des
guichets et de leur cloisonnement, la fin de la file d’attente unique et son
remplacement par un accueil personnalisé.
Son impact concret sur la qualité de service semble positif, puisque
selon le résultat des visites qualité réalisées par un institut indépendant
entre septembre 2008 et octobre 2009, le temps d’attente moyen pour les
opérations postales simples (envoi d’une lettre recommandée par exemple)
a été réduit de moitié dans les 1 000 bureaux les plus importants.
L’enquête de la Cour montre cependant que des adaptations sont
encore nécessaires pour améliorer l’ergonomie des automates postaux,
optimiser l’attente, encore problématique et désorganisée à certaines
heures, et faciliter l’appréhension des nouveaux processus pour les
personnes âgées, handicapées ou ayant besoin d’une aide.
En outre, cette avancée des Espaces service clients mérite d’être
encouragée et étendue au plus tôt au-delà des 1 000 bureaux les plus
importants. La programmation élaborée jusqu’à présent ne concerne pas les
bureaux dont la fréquentation est plus modeste (le plus souvent, les
bureaux de taille moyenne qui constituent l’essentiel du parc). La Poste a
évalué les investissements encore nécessaires pour la rénovation des
bureaux de poste à 175 M€ par an jusqu’en 2012. Ce montant comprend la
généralisation du nouveau modèle « Espace service clients » aux 1 000
bureaux les plus fréquentés en 2010-2011, puis à des bureaux « moyens ».
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85
b)
Autres initiatives
Outre la réorganisation de l’espace des 1 000 bureaux les plus
importants, d’autres actions ont été mises en oeuvre pour réduire le temps
d’attente au guichet :
-
Elargir les horaires d’ouverture : pour atténuer les effets des
périodes d’affluence importante, les horaires d’ouverture de
certains bureaux de poste ont été modifiés
68
;
-
Développer les automates : en 2004, le parc comptait 4 500
automates, GAB ou DAB
69
. La situation reste aujourd’hui
presque identique. Seuls 50 % des bureaux de poste sont équipés
de DAB-GAB, contre 68 % des agences du réseau Crédit
Agricole-LCL et 92 % des agences de celui du groupe Banque
populaire-Caisse d’Epargne (BPCE)
70
;
-
Décharger le personnel des guichets en orientant les demandes
vers des plate-formes d’appels téléphoniques.
c)
Le temps d’attente et la satisfaction des clients : des résultats en
voie d’amélioration sur la période récente
De manière un peu surprenante, compte tenu de la baisse de
fréquentation constatée dans les bureaux de poste, le temps d’attente
moyen en bureau de poste s’était dégradé de 2005 à 2008, passant de 7,16
minutes à 8,01 minutes.
Le contrat de service public entre l’Etat et La Poste pour 2008-2012
a fixé, pour la première fois, un objectif quantifié et précis, quoique
« indicatif », pour l’accueil dans les bureaux et la qualité des services qui
y sont proposés : La Poste s’engageait à ce que d’ici fin 2010, le temps
moyen d’attente soit ramené à moins de 8 minutes dans les 1 000 plus
68) La loi du 9 février 2010 a prévu que soit organisée une expérience d’ouverture
d’un bureau de poste jusqu’à 21 heures, un jour ouvrable par semaine, dans les
communes de plus de 51 000 habitants.
69) GAB : guichet automatique de banque ; DAB : distributeur automatique de billets.
70) Selon les éléments fournis à la Commission sur le développement de La Poste,
cette dernière aurait besoin, pour atteindre un taux de 85 % d’automatisation des
activités élémentaires, de 6 000 automates supplémentaires, dont 3 000 automates
bancaires.
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grands bureaux et à ce que les « opérations simples »
71
soient réalisées
partout en moins de cinq minutes.
Cette démarche commence à porter ses fruits. Le temps d’attente a
été significativement réduit en 2009. Pour les opérations simples, qui
représentent près de la moitié des opérations, le temps d’attente des clients
dans les 1 000 plus grands bureaux est passé de 6 minutes et 50 secondes
en fin 2008 à 4 minutes et 30 secondes fin 2009
La Poste a donc fait le choix de centrer ses efforts sur les plus
grands bureaux du réseau, en considérant qu’une action ciblée aurait plus
de chance de porter ses fruits qu’un programme général. Tout en
convenant que le concept des flux segmentés (automates, ilot spécialisé
pour les professionnels, ilot rapide dans un espace commercial et guichet
bancaire) ne se transpose pas nécessairement pour les petits bureaux où le
problème à traiter est plus délicat, la Cour recommande que soient
recherchées et mises en oeuvre les améliorations adaptées aux spécificités
de cette autre partie du réseau.
Par ailleurs, si le dimensionnement des moyens des bureaux est à
juste titre réalisé essentiellement sur la base des flux à traiter, l’expérience
montre que l’irrégularité des flux constitue le principal facteur de l’attente.
De ce point de vue, il semble souhaitable que La Poste accentue ses
actions visant à adapter lesdits moyens selon les fluctuations d’activités
prévisibles, tel le paiement des prestations sociales dans certaines zones,
comme les zones urbaines sensibles (ZUS) par exemple, où la durée de
l’attente demeure souvent une question aigüe
72
. Les possibilités ouvertes
par la loi du 20 août 2008 sur la modulation du temps de travail peuvent
aider à corriger ces difficultés.
Enfin, La Poste doit également intensifier toutes les autres actions
pouvant concourir au traitement de l’attente, comme le développement du
multi-canal sur site et hors site (automates plus ergonomiques, plates
formes de renseignements téléphoniques et, bien sûr, internet) ou la remise
à niveau des procédures pour accélérer et simplifier les démarches.
Les résultats positifs enregistrés dans les 1 000 plus grands bureaux
ne doivent pas masquer les progrès qui restent à réaliser dans l’ensemble
du réseau, puisque la mesure nationale de satisfaction des clients demeure
à un niveau faible : 74 % de clients satisfaits sur le thème de l’attente.
71) Les « opérations simples » sont des opérations, à faible valeur ajoutée qui peuvent
aussi bien être réalisées en libre service sur les automates ou au guichet : retraits
d’espèces, opérations d’affranchissement, dépôts de chèques, achat de timbres, etc.
72) La Poste tient en partie compte de cette problématique spécifique aux ZUS en
introduisant un majorant de 10 % dans les ratios servant au calcul des effectifs des
bureaux concernés.
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AVEC LA STRATEGIE « AMBITION 2015 », LA POSTE VISE A
REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
87
______________________
CONCLUSION
_____________________
Dans son nouveau plan stratégique « Ambition 2015 », La Poste
fait de la qualité de service sa troisième priorité. Elle met en avant sa
volonté de renforcer ses engagements clients dans tous ses métiers,
d’achever la modernisation des bureaux de poste et de renforcer la
qualité de conseil de La Banque Postale, notamment dans le domaine de
la lutte contre le surendettement.
Malgré des progrès indéniables, la qualité de service demeure très
perfectible dans la plupart des segments d’activité de La Poste.
ColiPoste a encore des progrès à accomplir pour la livraison des
colis aux particuliers, souvent perturbée par les problèmes de remise en
instance dans les bureaux de poste. La qualité de prestation de La
Banque Postale est souvent altérée par les conditions d’accueil dans les
bureaux de poste. A l’exception des années 2008 et 2009, le Courrier n’a
jamais pu atteindre les objectifs de J+1 fixés par la réglementation. Les
conditions de l’attente et de l’accueil dans les 1 000 plus grands bureaux
de poste ont sensiblement progressé, mais il reste à trouver des solutions
adaptées aux spécificités des bureaux moins importants.
B - Réduire les coûts
La Poste reste une entreprise très endettée, et donc fragile. Compte
tenu des perspectives dégradées sur son coeur de métier, sa priorité doit être
de rétablir, au plus tard en 2015, une rentabilité au moins équivalente à
celle
atteinte
en
2007.
Dans
cette
perspective,
le
groupe
doit
impérativement améliorer sa performance économique, en réduisant ses
coûts fixes et en variabilisant davantage des charges, dont le niveau élevé
constitue un handicap concurrentiel majeur.
1 -
Réduire le coût des fonctions support
La
logique
de
la
nouvelle
organisation
reposait
sur
une
déconcentration forte des responsabilités de pilotage opérationnel, en
transférant aux métiers la maîtrise des fonctions support jusqu’alors
mutualisées au niveau de la tête de groupe. Il s’agissait au départ des
fonctions ressources humaines, comptabilité, finances/gestion achats et
système
d’information.
Disposant
des
leviers
d’organisation
et
d’optimisation, les métiers seraient désormais soumis à des obligations de
résultat.
Si l’objectif du programme Responsabilisation Du Management
(RDM) a été atteint, les analyses de la Cour montrent néanmoins,
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88
COUR DES COMPTES
notamment dans les métiers du courrier et de l’Enseigne, que les
responsables de ces filières au sein des métiers ne se considèrent pas
toujours en charge de l’optimisation de leur fonction, car le principe même
de la déconcentration territoriale voulue par RDM confère un rôle
déterminant aux décideurs locaux. Le programme Performance des
Fonctions Transverses (PFT) lancé en avril 2005, malgré une phase 2
d’ajustement décidée en 2008, n’a pas encore atteint l’objectif de
performance globale qui était visé.
Ainsi la Cour a relevé le coût excessif de la filière financière du
courrier. Cette situation résulte de la volonté de conférer à chacun des
responsables des 41 structures territoriales la maîtrise de ses propres
fonctions support. Il en résulte un éclatement excessif des structures et une
hypertrophie des moyens. Par comparaison avec les fonctions financières
d’autres entreprises, la Cour avait estimé le surcoût à 27 M€, correspondant
à 700 postes environ. Dans sa réponse La Poste a indiqué que cette filière
serait réorganisée d’ici 2015 et n’a pas contesté cette estimation.
Pour l’ensemble des métiers, la fonction RH mobilise 2,95 % des
effectifs de la maison mère, alors que selon les éléments recueillis auprès de
la commission supérieure d’audit salarial du secteur public, les autres
entreprises publiques se situent à un niveau sensiblement moins élevé, par
exemple 1,55 % à la RATP, ou 1,15 % à la SNCF. Même si le périmètre de
cette fonction RH est plus large à La Poste et même si on admettait la
réfaction de 1 % suggérée par elle, il demeure que cette fonction RH est
plus lourde que dans beaucoup d’autres entreprises.
Ce constat est dans une certaine mesure celui du reflet encore tenace
de l’organisation ancienne de l’administration d’Etat des PTT, calquée sur
le découpage départemental, qui conférait à cet échelon la plénitude des
tâches opérationnelles et administratives. Ayant consacré une priorité
stratégique au projet CQC, La Poste a été conduite parfois, pour rendre
acceptable
certaines
restructurations
industrielles,
à
maintenir
des
organisations administratives très dispersées, aujourd’hui moins justifiées
73
.
73) On pourrait multiplier les exemples : outre 200 comptables répartis entre 46
échelons territoriaux, le courrier utilise 5 centres de services partagés de comptabilité.
Outre 300 gestionnaires centraux, la paye est répartie pour l’ensemble de La Poste
entre 24 « Centres interdépartementaux de gestion administrative et de paye »
regroupant 1300 personnes. Sans forte justification fonctionnelle, le courrier conserve
un cinquième niveau hiérarchique constitué fin 2008 de 180 directeurs de groupement
du courrier qui, avec les entités qui leur sont rattachées, représentaient en fin 2008,
lors du contrôle du courrier, une administration de près de 700 personnes. Il existe 23
services d’achats locaux du courrier et 8 centres locaux d’achat de transport etc.
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89
Le poids des fonctions support constitue un enjeu encore plus lourd
dans le réseau de l’Enseigne
comme le montrent les besoins d’adaptation
de ce réseau (voir infra).
Au total, le programme PFT a d’abord conduit entre 2005 et 2007
à un accroissement des effectifs des fonctions transverses, mis en
évidence par un audit de La Poste et chiffré à 5 %. La phase 2 de PFT a
conduit à redresser la tendance. Un audit de 2009 estime que les effectifs
des 12 filières examinées ont vu leurs effectifs ramenés de 25 700 à
23 600 personnes entre 2005 et 2008, soit - 8 %. Toutefois cette évolution
est plutôt inférieure à celle de l’ensemble de La Poste maison-mère. De
plus, la réduction des effectifs ayant concerné les populations les moins
qualifiées, du fait de l’externalisation de certaines fonctions logistiques,
leur traduction sur la masse salariale est faible. Les niveaux de
classification des personnels en place ayant été systématiquement relevés
et les recrutements portant sur des personnes de compétence plus
spécialisée, les dépenses salariales engagées dans les fonctions support
présentent un différentiel positif de + 10 % par rapport à la croissance de
ce poste dans les autres structures du groupe.
Ce constat montre, comme le souligne l’audit précité, que la
métiérisation et l’organisation des fonctions support qui la sous-tend ne
sont pas encore totalement sous contrôle, faute d’une identification
simple et fiable du périmètre de ces fonctions et d’un système de pilotage
suffisamment pertinent.
Un autre point critique concerne les prestations qui n’ont pas été
incluses dans le programme PFT et demeurent mutualisées au niveau de
la tête de groupe. Elles comprennent les fonctions maintenance,
approvisionnement, télécommunications, ainsi que l’informatique et les
achats de la tête de groupe.
Après de multiples évolutions, la Direction des Services Partagés,
DSP, rattachée au directeur général, a été créée en avril 2008. Elle
regroupe quatre directions : le Support et la Maintenance (DSEM),
l’Approvisionnement de la Poste (DAPO), l’Ingénierie des Systèmes de
l’Information et des Télécommunications (DISIT) et les Systèmes
d’Information Corporate (DSI corp).
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COUR DES COMPTES
La DSP représente une structure conséquente de plus de 2 500
personnes qui facture aux métiers de l’ordre de 400 M€ par an. Elle pose
un double problème : celui du niveau du coût des prestations internes,
considéré comme trop élevé par ses clients et celui d’une redondance
avec des fonctions analogues exercées dans les métiers.
Même si les métiers sont en principe autorisés, au moins dans
certains domaines, à recourir à la prestation externe, ce qui aurait
l’avantage de réduire leurs coûts et d’améliorer leur compétitivité, La
Poste est en fait contrainte de limiter fortement cette option pour ne pas
dégrader la situation consolidée du groupe qui aurait à supporter à la fois
les coûts de structures internes insuffisamment utilisées et les coûts des
achats externes.
Concernant les redondances, la DSEM est dans une situation
caractéristique. Cette direction regroupe près de 1 800 agents, alors que le
courrier conserve, pour les mêmes tâches, un effectif de 1 300 personnes.
Celles-ci sont, par ailleurs, mal coordonnées entre une direction centrale
et les 41 directeurs territoriaux, réparties de façon non optimale entre ces
échelons et en partie sous-utilisées du fait des outils modernes de
maintenance à distance.
L’existence d’une Direction des achats, du contrôle des coûts et
des systèmes d’information (DHAOCI) illustre également la complexité
de l’organisation de la tête de groupe. Elle est rattachée au directeur
général délégué, chargé de la stratégie du développement, des affaires
internationales et juridiques et de la régulation. Elle comporte une
direction des systèmes d’information du groupe (DSI G) et une direction
des achats et du contrôle des coûts (DHACC)
74
.
En fin 2008-début 2009, La Poste a engagé un vaste processus de
réduction des coûts à court et moyen terme qui porte principalement sur
les fonctions transverses. Ce programme qui comporte dix chantiers
concerne, par exemple, l’administration du personnel et les procédures de
paie, l’optimisation des coûts de maintenance des matériels, la
rationalisation des coûts des télécoms et des infrastructures informatiques.
La démarche, validée par le comité exécutif du groupe au début 2009, est
trop récente pour permettre son évaluation. Elle dénote néanmoins une
mobilisation positive sur un domaine où les gains de productivité
pourront être relativement importants si l’effort engagé perdure.
74) Cette DHACC comprend elle-même la direction des achats Groupe (DHA G) et la
direction de l’optimisation des coûts (DOC), ce qui montre clairement la singulière
richesse de l’organigramme de la tête de siège et l’inflation des fonctions de directeur.
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91
Par ailleurs, une nouvelle réflexion sur l’optimisation du partage
entre celles des fonctions support qui doivent être mutualisées au niveau
de la tête de groupe et celles qui doivent déconcentrées serait
indispensable. Un effort analogue d’optimisation devient incontournable
au sein des métiers, dans lesquels les responsables des filières doivent
être mobilisés davantage sur la rationalisation de l’organisation entre
leurs services centraux et les échelons territoriaux.
______________________
CONCLUSION
_____________________
La réorganisation du groupe a eu pour objectif de responsabiliser
les métiers en leur transférant l’ensemble des fonctions support
nécessaires à l’exercice de leurs missions. Cette évolution ne s’est pas
encore traduite par une suffisante optimisation.
Subsistent au sein des métiers des redondances et des lourdeurs,
qui conduisent à une incontestable hypertrophie des moyens dans
certains secteurs. De plus, entre les métiers et les fonctions support de la
tête de groupe, le partage des responsabilités laisse place dans certains
domaines à des recoupements inutiles.
Réduire davantage le coût des fonctions support implique d’abord
une rationalisation de leur organisation au sein de chaque métier, et une
répartition plus efficiente entre la tête de groupe et chacun des secteurs.
Cette réflexion doit viser à définir celles de ces fonctions qui doivent être
mutualisées au niveau de la tête de groupe et celles qui doivent être
déconcentrées dans les métiers.
2 -
Simplifier le « modèle postal de banque »
Le réseau constitue pour La Poste un atout dont la valorisation
suppose, au préalable, d’en optimiser l’organisation. Cette optimisation
passe principalement par la simplification de l’organisation de l’activité
bancaire, qui repose aujourd’hui sur un partage des rôles parfois
complexe entre l’Enseigne et La Banque Postale.
Les liens étroits qui existent entre La Banque Postale et l’Enseigne
sont un atout, mais aussi un handicap :
-
Un atout car la banque a accès à un réseau très étendu sur l’ensemble
du territoire, auquel les conventions de service conclues avec la Poste
lui garantissent un droit exclusif d’accès ;
-
Un handicap, car ce réseau est surdimensionné par rapport à ses
besoins propres et qu’elle se trouve dans l’impossibilité d’en
maîtriser les coûts du guichet. De plus, en dépit des efforts de
rationalisation
déployés
en
collaboration
avec
l’Enseigne,
l’organisation actuelle demeure d’une grande complexité.
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COUR DES COMPTES
a)
Un partage des rôles avec les bureaux de poste imposant un
dialogue difficile
La Banque Postale exerce son activité bancaire à travers un réseau
physique qui n’est pas un réseau bancaire, mais un réseau postal. Ce
« modèle postal de banque » soulève des difficultés internes et pose des
questions commerciales.
Il n’est sans doute pas d’une très grande importance que les
services financiers localisés dans les bureaux de poste ne soient pas
dirigés par un banquier, mais par un postier. En revanche, le partage des
responsabilités est une source de complexité réelle et n’est pas
nécessairement
la
solution
la
plus
évidente
pour
renforcer
le
professionnalisme bancaire à mesure que les opérations se sophistiquent
et que les exigences de la clientèle croissent.
Les opérations bancaires les plus simples de dépôt et de retrait
peuvent être réalisées aux guichets, au même titre que la remise des
recommandés ou le dépôt des colis. Ces opérations bancaires sont
cependant gérées pour l’essentiel par des centres financiers dépendant de
La Banque Postale. Ainsi, l’établissement teneur de compte n’est pas le
bureau de poste mais le centre financier.
La réalisation des processus bancaires engendre des échanges
quotidiens entre deux entités distinctes, l’une dépendant de l’Enseigne et
l’autre de La Banque Postale.
De même, dans le domaine plus
commercial,
l’Enseigne entretient le contact physique avec le client, mais
les centres financiers sont beaucoup sollicités pour répondre aux clients
par téléphone.
Une telle organisation faisant intervenir plusieurs acteurs crée
inéluctablement des frictions. Au plan des opérations bancaires, un
rapport d’audit interne récent souligne que la forte activité constatée en
2008 dans le domaine des prêts immobiliers au niveau des bureaux de
poste a posé des difficultés de mise en oeuvre pour les centres financiers.
Dans le domaine commercial, le même rapport relève que l’activité
commerciale des centres financiers, qui s’est développée sensiblement au
cours des dernières années, est parfois perçue par les agents de l’Enseigne
(directeurs
d’établissement
et
leurs
collaborateurs)
comme
une
concurrence et une dépossession.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
93
Il est vrai que ces difficultés tiennent pour une large part à des
processus de dialogue insuffisants et, pourtant, relativement faciles à
résoudre, par exemple par l’utilisation d’une base clients unique pour
partager les mêmes informations.
Force est de constater qu’en dépit de plans successifs pour
renforcer
la
synergie
entre
ces
différents
acteurs
(projet
3C,
Client/Conseiller/Centre financier ; démarche DIAMS, Dialogue pour
l’Amélioration de la Satisfaction des clients), La Poste, constatant le peu
de succès de ces programmes, a dû se résoudre à une maîtrise plus directe
de son réseau commercial par La Banque Postale.
b)
Les limites de la nouvelle organisation commerciale
Les équipes d’appui, de support et d’expertise bancaire, rattachées
antérieurement à l’Enseigne La Poste, ont été placées, au 1
er
janvier 2008,
dans la ligne hiérarchique de La Banque Postale.
Cette réorganisation s’est traduite notamment par la création au 1
er
janvier 2008 de 25 directions commerciales régionales bancaires, qui
s’appuient sur 107 directeurs commerciaux bancaires et 24 responsables
du développement de l’expertise commerciale, soit plus de 1 800
personnes au total.
La Banque Postale dispose donc désormais de sa propre
organisation, aux échelons national, régional et local pour les fonctions
d’appui et d’expertise commerciale. Le dialogue nécessaire entre la
banque et le réseau de l’Enseigne ne se limite donc plus à l’échelon
central, mais se développe à chaque niveau territorial.
Cette réorganisation constitue une avancée, mais elle se limite à
corriger à la marge les difficultés résultant du partage des rôles entre la
Banque et l’Enseigne, dont les personnels constituent le gros des moyens.
En effet, les trois Directeurs Exécutifs Commerciaux Bancaires, les 25
directeurs commerciaux régionaux bancaires et les 1800 agents de LBP,
avec une simple autorité fonctionnelle et sans pouvoir hiérarchique,
doivent impulser et piloter plus de 11 000 conseillers de la chaîne
commerciale, qui sont des conseillers financiers présents dans 4 100
bureaux de poste et qui demeurent sous la direction de l’Enseigne même
s’ils travaillent exclusivement pour la banque.
La Poste vient ainsi plaquer une seconde ligne de pilotage sur une
organisation qui demeure fondamentalement inchangée. Cette démarche
conduit à une sorte de « rubik’s cube organisationnel » (voir graphique
figurant à l’annexe n°12).
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94
COUR DES COMPTES
Au regard du développement soutenu que La Poste est en droit
d’espérer de son activité bancaire, il est permis de souligner l’ampleur des
défis qui consistent à trouver un équilibre entre, d’une part, la proximité
et la taille critique et d’autre part, entre la polyvalence et l’expertise. La
proximité est assurément un atout de La Banque Postale grâce à la densité
du réseau de l’Enseigne, mais elle ne conduit pas aisément à un
encadrement adapté dans chaque bureau. La polyvalence est aussi un
atout des bureaux de poste par l’avantage commercial que peut
représenter le multi-métiers, mais la sophistication croissante des
produits, notamment des produits financiers, implique une expertise et
une personnalisation du contact qui peuvent ne pas être nécessairement
assumés à distance de façon pleinement pertinente.
Composition de la force de vente de La Banque Postale
La force de vente de La Banque Postale est segmentée en fonction de
la composition de sa clientèle :
- Les gestionnaires de clientèle
(1 450
75
) traitent les clients de passage
sans rendez-vous avec des besoins bancaires simples (équipement en produits
simples comme la convention de compte …).
• Les conseillers financiers
(4 899) sont responsables d’un portefeuille
de clients avec des besoins bancaires relativement simples.
• Les conseillers clientèle
(2 760) ont la responsabilité d’un
portefeuille de clients avec des besoins bancaires
plus complexes
(immobilier, retraite, transmission …).
• Les conseillers spécialisés en patrimoine
(744) ont la responsabilité
d’un portefeuille de clients présentant une surface financière supérieure à
150K€ avec des besoins patrimoniaux (défiscalisation, transmission …).
• Les conseillers en gestion de patrimoine
(42) ont la responsabilité
d’un portefeuille de clients présentant une surface financière supérieure à
500K€ avec des besoins patrimoniaux (défiscalisation, transmission …).
• Les conseillers spécialisés en immobilier
(746) traitent les dossiers
de crédit immobilier.
Les gestionnaires de clientèle, conseillers financiers, conseillers
clientèle et conseillers spécialisés en patrimoine dépendent hiérarchiquement
de l’Enseigne.
Les conseillers spécialisés en immobilier dépendent
hiérarchiquement des services financiers de La Poste et les conseillers en
gestion de patrimoine sont salariés de La Banque Postale.
75) Effectifs en ETP au 31 décembre 2008.
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95
L’encadré ci-dessus illustre :
La faiblesse relative des forces de vente de La Banque Postale au
regard du nombre de ses clients actifs (seulement 11 000
conseillers pour près de 10 millions de clients actifs) ainsi qu’en
comparaison avec les guichetiers multi-métiers du réseau qui sont
refacturés par La Poste à La Banque Postale
76
.
Le très faible nombre de conseillers spécialisés en clientèle
patrimoniale (seulement 786), qui reflète le caractère encore
modeste de la clientèle de La Banque Postale ;
La complexité du pilotage des forces commerciales bancaires,
résultant du rattachement hiérarchique de la plupart des agents
concernés à l’Enseigne, ce qui déjà conduit pour celles de ces
fonctions qui apparaissent trop complexes à placer les conseillers
concernés sous l’autorité de la banque.
c)
Une nouvelle organisation de la direction des opérations
Une évolution analogue a d’ailleurs eu lieu au niveau de la
direction des opérations bancaires de La Banque Postale. Au 1
er
janvier
2008, les équipes de la direction de l’exploitation des services financiers
(DESF) sont passées des services financiers de La Poste à La Banque
Postale. La direction des opérations bancaires (DOB) de LBP, devenue
direction des opérations depuis le 1
er
avril 2009, a ainsi intégré 226
collaborateurs de l’ancienne DESF. Ce regroupement va dans le sens
d’une meilleure efficacité du pilotage des processus bancaires, et
notamment de l’organisation des centres financiers.
3 -
Optimiser le coût du réseau
a)
Alléger le poids des fonctions d’appui et des supports
Les mécanismes d’imputation des charges communes des bureaux
de poste aux métiers utilisateurs ne permettent pas, on a pu le noter plus
haut, de répercuter pleinement les efforts de productivité de tel ou tel
métier sur les charges communes car celles-ci ne s’adaptent pas
mécaniquement dans la proportion des gains propres aux métiers.
76) LBP ne fournit pas de données sur la conversion en ETP du temps travaillé par
ces agents à son profit. Selon les évaluations de la Cour, fondée sur la statistique de la
répartition du temps de travail des guichetiers entre les métiers, les activités bancaires
des guichets représentent 18 578 ETP pour 2008.
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COUR DES COMPTES
La rigidité relative des charges d’encadrement, des coûts des back
offices et la lourdeur des fonctions support de l’Enseigne sont un des
éléments du coût du réseau qui s’additionnent au poids résultant de sa
densité excessive par rapport aux besoins stricts de La Banque Postale ou
du Courrier. Ainsi, les conventions signées entre LBP et La Poste
montrent que 70 % des gains de productivité susceptibles d’être réalisés
par la banque ne lui bénéficient pas entièrement, en raison de
l’importance des coûts fixes attachés aux bureaux de poste.
La Poste a engagé des efforts relativement récents pour alléger les
structures d’encadrement de l’Enseigne en substituant aux directeurs
départementaux de l’ancienne administration des PTT, 48 directions
territoriales.
De
même
la
structure
d’encadrement
territoriale
intermédiaire
constituée
des
directeurs
de
« terrain »
(territoire
d’attractivité et d’initiative) qui comptaient 4 860 circonscriptions en
2007-2008 a été ramenée à environ 3 000 « terrains ». Enfin des actions
trop récentes pour permettre une évaluation ont été mises en oeuvre pour
optimiser les fonctions de support logistique par le biais de treize
directions d’appui et de soutien territorial plus resserrées que les plates-
formes d’appui antérieures.
b)
Etendre les partenariats
Comme il a été déjà noté, la France présente dans le paysage postal
européen la singularité de conserver une proportion de bureaux gérés en
propre deux fois supérieure à la moyenne européenne.
Depuis 2003, La Poste a pu transformer chaque année de l’ordre de
500 à 600 bureaux en points de contact en partenariat.
Cette évolution s’est inscrite dans la volonté de La Poste
d’instaurer une relation de confiance avec les élus, tant pour la décision
de principe d’un passage en partenariat, que pour le choix entre une
« agence postale communale » ou un « relais poste commerçant ». La
commission
départementale
de
présence
postale
77
composée
des
différentes catégories de collectivités territoriales doit donner un avis sur
l’évolution annuelle du maillage territorial, comme sur la répartition de la
dotation départementale du fonds de péréquation. La Poste a fait le choix
de suivre systématiquement les avis de cette commission.
Cette stratégie s’est révélée fondée car les agences postales
communales et les relais poste commerçants recueillent une appréciation
très largement positive après leur création.
77) Créée par l’article 3 de la loi du 20 mai 2005
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
97
Les enquêtes de satisfaction réalisées à l’initiative de La Poste et
l’enquête de la Cour le confirment. Du côté des élus, les points de contact
sont analysés comme l’occasion du maintien d’un commerce ou de la
consolidation d’un emploi. Pour les partenaires, en particulier les
buralistes
78
(40%
des
relais
postes
commerçants),
cette
activité
complémentaire est souvent jugée cruciale.
Quant aux usagers, le constat est que l’accessibilité au service est
plutôt en progrès par rapport à un bureau de poste ouvert quelques heures
par semaine. La gamme des services postaux est pratiquement identique à
celle d’un bureau de poste rural, y compris pour les « facilités de caisse »
(300€ par semaine et par personne dans les agences communales et 150€
dans les relais commerçants). L’association des maires de France souhaite
la modification de ces plafonds. Pour plus de souplesse, ils pourraient être
calculés selon un montant mensuel.
Aux termes du contrat de service public conclu entre l’État et La
Poste pour 2008-2012, l’État s’est engagé à accompagner La Poste et les
élus dans leur dialogue territorial en soutenant l’adaptation du réseau.
Au vu des enjeux nouveaux auxquels La Poste est confrontée, en
considérant l’impact financier non négligeable du passage en partenariat,
la Cour recommande de poursuivre cette politique avec détermination.
Sans constituer un objectif en soi, ni la solution unique au problème du
coût excessif du réseau, cette forme alternative de gestion du réseau est
positive et doit se rapprocher progressivement des pratiques des autres
grands opérateurs postaux européens.
c)
Développer avec prudence des ressources propres au réseau
Le réseau dispose d’un certain nombre d’atouts : sa capillarité, la
fréquentation des bureaux de poste, les contacts commerciaux qu’il
entretient avec les entreprises.
Il paraît légitime que La Poste tire parti de ces caractéristiques
pour développer des activités de diversification. Cette évolution ne doit
cependant pas contribuer à freiner la nécessaire rationalisation du réseau.
L’échec des activités commerciales des bureaux de poste illustre les
difficultés
d’une
telle
démarche
lorsqu’elle
n’est
pas
dans
le
prolongement naturel des activités postales.
78) Rencontrée pendant l’enquête de la Cour, la profession a exprimé un souhait
d’étendre le champ de ce type d’activités en partenariat dans le domaine du colis et
d’insérer ses relations avec La Poste dans une convention générale.
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98
COUR DES COMPTES
L’échec de la diversification des activités commerciales
des bureaux de poste
Le projet « Cap Relations Clients 2007 », adopté en 2005, avait
développé le concept des boutiques de La Poste au sein des bureaux de poste et
fixé des objectifs ambitieux de recettes de diversification afin de réduire le coût
des guichets pour les métiers. Les boutiques étaient aussi conçues comme un
élément de distraction de nature à améliorer les conditions de l’attente aux
guichets.
Mais les objectifs ambitieux de chiffre d’affaires ont conduit à un
élargissement excessif de la gamme. Aux produits dits de réseau comme les
diverses formules de recharge téléphonique, les enveloppes pré timbrées, voire
la papèterie ou les fournitures de bureau, se sont ajoutés les « achats
d’impulsion » orientés vers des clientèles plus jeunes (t-shirts, articles de plage
etc.).
A certains égards critiquable au regard des missions du service public, la
« merchandisation » des bureaux de poste, mal préparée et pas nécessairement
comprise par les personnels de La Poste, s’est soldée par un échec. Les
réalisations se sont révélées rapidement très inférieures aux ambitions initiales
(161 M€ réalisé en 2006, contre un objectif de 215 M€ et 2006, et 175 M€
réalisé en 2007, contre un objectif initialement fixé à 493 M€).
Certaines activités commerciales ont dû être abandonnées : dès 2006,
la
vente de développement photographique, mise en place en 2005, puis les
services d’accès à internet via des bornes « Wi-Fi ».
En mai 2006, La Poste s’est engagée dans la distribution de chèques
emplois service et a créé à cet effet une filiale dédiée, SAS-SAP. Malgré les
atouts de départ que représentaient à la fois son réseau, le potentiel offert par un
portefeuille de l’ordre de 20 à 30 millions de clients et les synergies
envisageables avec les produits d’assurance et de capitalisation du groupe CNP
Assurances, cette activité de diversification a été jusqu’à présent sans résultats
probants. La Poste a prévu de transférer cette activité à La Banque Postale.
En 2008, le chiffre d’affaires des boutiques s’est élevé à 198 M€. Ce
n’est pas négligeable, mais 80% des produits sont réalisés grâce à la vente des
cartes téléphoniques et le total représente moins de 1% du chiffre d’affaire
généré par les bureaux de poste pour le compte de la banque, du courrier et du
colis.
Les projets à venir devront respecter trois précautions. Le
développement d’une nouvelle activité, qui ne serait pas nécessairement
dans le prolongement des activités postales traditionnelles, ne doit pas
créer un risque d’image pour La Poste. Le développement d’offres
commerciales au sein des bureaux de poste ne doit pas constituer une
distorsion de concurrence. Enfin, la rentabilité du projet doit être
suffisante pour justifier l’allocation de ressources.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
99
C’est notamment à cette aune que devrait être évaluée la pertinence
du récent projet de développement envisagé dans le domaine de la
téléphonie mobile. Cette nouvelle activité viendrait en complément de la
vente de cartes téléphoniques pré-payées. Plusieurs acteurs postaux (dont
la poste italienne) et bancaires européens ont lancé leur propre offre
d’opérateurs mobiles virtuels
79
. Une consultation est actuellement en
cours afin de déterminer le meilleur schéma permettant à La Poste
d’entrer sur le marché de la téléphonie mobile, sachant que La Poste
souhaite, en tout état de cause, disposer d’un partenariat industriel et
financier avec un acteur des télécoms.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Le « modèle postal de banque » est le reflet d’une organisation
historique dans laquelle tous les métiers étaient exercés dans les bureaux
de poste, sous la responsabilité hiérarchique des responsables du réseau.
La création de La Banque Postale n’a pas conduit à modifier cette
organisation car la banque n’avait pas nécessairement avantage à créer
sa propre structure d’encadrement pour piloter les conseillers financiers
présents dans 4 100 bureaux.
Il demeure que LBP ne dispose que d’une autorité fonctionnelle
sur l’essentiel des agents affectés aux fonctions commerciales bancaires,
que le partage avec l’Enseigne suscite sur le terrain des frictions
inévitables et que la sophistication croissante des activités financières
nécessite, au niveau du responsable hiérarchique local, et pas seulement
à celui du conseiller financier, une expertise et une personnalisation du
contact. L’organisation multi-métier, qui est par ailleurs un atout, ne va
pas parfaitement dans ce sens.
La solution ne réside pas nécessairement dans la création
d’agences bancaires distinctes. Dans la mesure où La Banque Postale
représente plus de la moitié de l’activité des bureaux de poste, il serait
indispensable de clarifier les lignes de responsabilité.
Tout en maintenant sa volonté d’entretenir des relations confiantes
avec les élus locaux, La Poste doit néanmoins s’efforcer d’amplifier et
d’étendre les partenariats.
79) MVNO : Mobile virtual network opérateur, fournisseur de services de téléphonie
mobile qui ne dispose pas d’infrastructures et rémunère un opérateur hôte (SFR,
Bouygues, Orange) pour l’utilisation de ses infrastructures.
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100
COUR DES COMPTES
La recherche par le réseau de ressources propres pour en réduire
le coût doit écarter les segments de diversification trop éloignés des
métiers traditionnels de La Poste. Le projet d’extension d’activité en tant
qu’opérateur virtuel de téléphonie mobile peut s’appuyer sur les bons
résultats déjà obtenus par la vente de cartes téléphoniques pré-payées. La
Poste doit tenir compte de la complexité des relations commerciales entre
les opérateurs et leurs clients et veiller à ce que les réclamations qui en
découlent ne portent pas atteinte à son image.
4 -
Concrétiser les gains de productivité de
« Cap Qualité Courrier »
Pour s’adapter à la baisse des volumes, La Poste doit renforcer les
efforts entrepris pour baisser et rendre variables les coûts de ses activités
traditionnelles, avec quatre orientations principales : réexaminer le format
de l’outil industriel, renforcer les capacités d’adaptation de la distribution
à la charge de travail, optimiser la gestion des ressources humaines et
rationaliser les fonctions support.
a)
Le format de l’outil industriel optimal
Le projet CQC a été conçu dans le but d’atteindre la performance
maximale pour la distribution de la lettre prioritaire, tout en contribuant à
la baisse des coûts.
Il a conduit à un maillage industriel dont la trame est déterminée
par le temps de trajet maximal à respecter entre le centre de tri et les
unités de distribution, soit une distance de l’ordre de 200 km conduisant à
45 plates-formes industrielles du courrier.
Les coûts d’investissement auront été de plus de 3 Md€, mais le
coût de fonctionnement récurrent est également très élevé. Il résulte de
l’amplitude du travail de nuit, du faible taux d’occupation des machines
80
,
et de l’utilisation inévitable du transport aérien qui, pour ne concerner que
4 % des volumes, totalise cependant 33 % des coûts de transport.
En dépit de ces investissements et des efforts déployés, le respect
du délai de J+1 stagne au niveau décevant de 85 %, bien inférieur à celui
observé dans la plupart des autres pays européens.
80) Le tri urgent est arrêté à une heure limite impérative et les plis non urgents sont
traités dans les intervalles. Les coupures qui en découlent, nécessaires pour changer
les plans de tri, conduisent à un faible d’utilisation des machines, de l’ordre de 12 à 14
heures par jour.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
101
Dans son plan Ambition 2015, La Poste place en première position
des cinq priorités stratégiques « la parfaite exécution de ses quatre
missions de service public ». Cette ambition ne peut qu’être approuvée.
Concernant le service postal, la Cour estime que la distribution du
courrier 6 jours sur 7 ne saurait être remise en cause, même si nombre de
grands opérateurs postaux l’envisagent pour leur part, et recommande que
l’engagement de La Poste vis-à-vis de ses clients pour la distribution en
J+1 soit significativement relevé et rendu plus effectif.
Constatant que dans un périmètre moins étendu que la France
entière, les lettres prioritaires sont déjà effectivement distribuées dans le
délai de J+1 dans 95 % des cas, l’objectif de qualité pourrait être relevé
de 85 % à 95 % dans des parties de territoire à définir. Le même
engagement s’appliquerait dans chaque zone pour respecter une égalité de
traitement de tous les usagers.
Pour les destinations plus éloignées, en particulier celles qui
imposent aujourd’hui un transport aérien, l’engagement serait également
de 95% mais dans un délai maximal de 48 heures.
La plage utile pour la remise du courrier à La Poste devrait alors
être élargie, de manière à autoriser un dépôt plus tardif de la
correspondance dans un nombre plus important de boîtes aux lettres
En permettant une optimisation du réseau du courrier, en
améliorant le taux d’utilisation de l’outil industriel, en réduisant les coûts
du transport, en même temps que les émissions de CO², cette évolution
représenterait une économie des coûts du Courrier qui peut être estimée
dans une fourchette de 500 à 600 M€ par an. L’enjeu financier mérite
d’autant plus d’attention que la part de la lettre prioritaire dans l’ensemble
du courrier baisse (32 % des volumes en 2008) et que nombre de clients,
notamment les entreprises, privilégient la certitude d’une remise du
courrier sous 48 heures, au risque de non réception dans le délai de J+1 de
1 courrier sur 6 (85 %).
b)
L’adaptabilité de la distribution
Le programme Facteur d’Avenir ne permet pas dans son format
actuel d’obtenir un véritable resserrement de l’organisation de la
distribution. En effet, quand 70% du tri arrivée aura été mécanisé, voire
80% comme envisagé antérieurement, le temps de travail des facteurs
consacré à des travaux préalables à leur tournée de distribution se réduira
de manière importante. Dans un mécanisme qui repose sur le pur
volontariat, il n’est pas avéré que la répercussion de ces économies de
temps conduise nécessairement à une réduction du nombre des tournées.
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102
COUR DES COMPTES
La difficulté à résoudre n’est pas simple : l’adaptation du périmètre
des tournées doit tenir compte des temps de parcours des facteurs et de la
nécessité commerciale de conserver une heure limite raisonnable pour la
remise des plis à leurs destinataires.
De surcroît, les engagements pris dans le cadre des accords de
Vaugirard de supprimer progressivement les temps partiels imposés
limitent les possibilités d’adapter le processus de distribution.
Bien adapté aux objectifs spécifiques qui lui étaient assignés, le
programme FA doit désormais être complété par un nouveau projet visant
à adapter l’organisation de la distribution aux évolutions structurelles du
plan de charge des facteurs.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Le programme « Cap Qualité Courrier » était indispensable pour
réduire les coûts et améliorer la qualité de service du courrier.
Cependant, malgré les efforts engagés, le respect des délais du
J+1 stagne à un niveau décevant. La volonté de La Poste d’assurer « la
parfaite exécution des missions de service public » doit se traduire
effectivement dans la réalité.
De même que la distribution du courrier 6 jours sur 7 ne saurait
être remise en cause, la Cour estime que l’objectif de qualité du J+1
devrait être relevé à 95 % et rendu effectif dans le périmètre où il est
réalisable à des conditions compatibles avec les difficultés actuelles de
La Poste. Dans le même temps, la plage utile pour la remise du courrier
devrait être élargie pour permettre un dépôt plus tardif dans un nombre
plus élevé de boîtes aux lettres.
5 -
Adapter le modèle social
Le modèle social de La Poste a été un élément d’accompagnement
majeur des changements réalisés depuis 2003. Le maintien de ce modèle
est un enjeu important.
Pour en préserver les acquis essentiels, c'est-à-dire la richesse du
dialogue social, la promotion de l’emploi de qualité et la défense des
valeurs postales, il s’agit de poursuivre et d’accentuer l’adaptation de La
Poste aux évolutions profondes de son environnement et de ses activités.
Cette adaptation suppose notamment une fluidité entre les métiers
plus habituelle, une modularité plus grande des organisations, une
mobilité renforcée et, bien sûr, une évolution de la masse salariale qui
reste en phase avec celle des revenus d’exploitation du groupe.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
103
a)
Maîtriser la masse salariale
Entre 2003 et 2009, le groupe La Poste a vu ses effectifs évoluer de
315 364 à 287 174 personnes (- 9 %). Le nombre de fonctionnaires a
baissé de 28 % (- 57 202) et celui des contractuels augmenté de 25 % (+
29 012). La part des charges de personnel dans le chiffre d’affaires est
passée de 67,8 % à 62 %. Ces indicateurs ne sont cependant pas
pleinement significatifs car ils intègrent la croissance externe des filiales.
Sur la même période, les effectifs de la seule maison mère sont
passés de 288 820 à 248 287, soit une réduction de 14 %.
Charges de personnel dans le chiffre d’affaires de la maison mère
M€
2004
2005
2006
2007
2008
2009
CA
ns
ns
13 468
13 715
13 600
13 064
Charges de
personnel
10 735
10 712
10 737
10 464
10 312
10 030
Charges de
personnel / CA
ns
ns
79,7%
76,3%
75,8%
76,8%
Effectifs
280 800
275 495
271 887
264 781
257 120
248 287
Source : La Poste (Les rubriques non significatives sont dues à la rupture de
périmètre liée à la création de La Banque Postale en 2006)
Le cadrage salarial fixé a été respecté. Toutefois, la diminution des
charges de personnel (soit – 5,5 % de 2003 à 2009) est en grande partie
imputable à la prise en charge par l’Etat du financement des retraites des
fonctionnaires de l’État rattachés à La Poste
81
(à taux équivalent à celui de
2006, les cotisations patronales de retraite auraient été supérieures de 407
M€ au montant effectivement comptabilisé en 2007 ; sur 2007-2009,
l’économie de charges est estimée à 1,3 Md€).
Par ailleurs, la diminution de la masse salariale a été sensiblement
inférieure à la réduction des effectifs, soit - 14 % depuis 2003. Cet écart
s’est accompagné d’un dynamisme des primes et indemnités. Les
dépenses correspondantes ont augmenté, passant de 520 M€ à 640 M€,
consommant ainsi les économies de rémunération consécutives à la
diminution des effectifs.
81) En contrepartie de cette prise en charge, La Poste a versé une contribution
exceptionnelle de 2 Md€.
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104
COUR DES COMPTES
Les mesures catégorielles et individuelles se sont élevées, au total,
à 741 M€ de 2003 à 2009, dans une large mesure sous l’effet des mesures
individuelles en faveur des fonctionnaires.
Ainsi la politique de promotion a été très active (le taux des
promotions a été multiplié par deux de 2003 à 2008 pour atteindre 10,2 %
des effectifs). Elle a été coûteuse : l’engagement de promouvoir 37 000
facteurs, pris dans le cadre de Facteur d’Avenir, continuera à peser au
moins jusqu’en 2012, avec un impact sur la masse salariale de l’ordre de
1 % par an, alors que l’allègement des charges sociales résultant de la
réforme du financement des retraites des fonctionnaires n’aura plus
d’effet supplémentaire au-delà de 2010.
A l’avenir, La Poste devra affecter une part des gains résultant de
ses efforts de productivité à l’augmentation de ses capacités de
financement pour assurer son développement.
b)
Renforcer les gains de productivité
La
concrétisation
des
gains
de
productivité,
c’est-à-dire
l’adaptation des effectifs aux évolutions de l’activité, va devenir une
préoccupation à la fois cruciale et difficile dans un contexte où des
mesures de départs imposés ne peuvent être envisagées pour les
fonctionnaires (58 % des effectifs de la maison mère) et ne sont pas
envisagées par La Poste pour les autres salariés.
La première marge de manoeuvre dont dispose La Poste est celle
du flux des départs naturels. Ceux-ci devraient se situer d’ici 2015 à un
niveau relativement élevé. La Poste devra en tirer tout le parti possible et
réduire dans de fortes proportions les recrutements de remplacement. La
Poste a mis en place un dispositif aménagé de fin d’activité (DAFA)
destiné à garantir les dates de départs effectifs en retraite de certains
fonctionnaires. Ce dispositif coûteux implique que les départs des
fonctionnaires qui en bénéficieront ne soient pas remplacés.
Un taux faible de remplacement des départs naturels n’est tenable
que si les réorganisations adéquates sont mises en place et si l’entreprise
dispose d’un large choix d’organisations du travail. De ce point de vue,
La Poste dispose de réelles possibilités de réorganisation qui devraient
résulter de l’industrialisation du traitement du courrier et du colis, de la
généralisation des automates, du multi-canal.
Comme souligné plus haut, dans le secteur du courrier, un nouveau
programme prenant le relais de « Facteur d’Avenir » permettrait
d’adapter
la
distribution
à
la
charge
de
travail
nouvelle.
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105
Dans le secteur bancaire, le développement des automates et de la
banque à distance ont eu pour effet entre 2005 et 2008 de réduire de plus
de 16 % les activités financières du guichet, alors que les coûts facturés à
ce titre à La Banque Postale ont augmenté de plus de 10 %. Une telle
distorsion entre l’évolution de l’activité et celle des charges appelle un
ajustement des moyens correspondants.
Des marges d’action importantes existent également dans le
domaine des organisations fonctionnelles et des fonctions support,
comme souligné plus haut.
Ces réorganisations supposent un éventail plus adapté des modes
d’organisation du travail tenant compte des besoins réels des métiers.
La Poste, sans remettre en cause son engagement fort contre la
précarité de l’emploi, devra trouver les méthodes qui lui permettent de
concilier la qualité des emplois contractuels avec un large choix
d’organisation du travail. Ainsi, les formules déjà utilisées des
recrutements en alternance ou celles envisagées dans la stratégie
Ambition 2015 pour l’emploi à temps partagé d’étudiants et de seniors
peuvent faciliter les adaptations nécessaires. La question se pose de savoir
si cette orientation ne mériterait pas d’être étendue.
La démarche sera d’autant plus positive qu’elle s’appuiera sur une
motivation renforcée de l’ensemble des agents. A l’évidence, des progrès
restent à faire en la matière au regard par exemple du niveau élevé de
l’absentéisme. Proche de 7 %, le taux d’absentéisme de La Poste semble
supérieur à celui que connaissent la plupart des secteurs d’activité (4,4%
dans l’industrie, 3,9% dans les transports). Même en tenant compte des
divergences des modes de calcul, un taux d’absentéisme ramené au
niveau de celui des autres secteurs représenterait plusieurs milliers
d’agents année. Des programmes de réduction de l’absentéisme ont été
lancés dans les métiers, comme Présenceo au Courrier, sans résultats bien
tangibles pour le moment. Une action particulière pilotée par le siège du
groupe s’impose.
L’ensemble n’est pas sans risque. La Poste a d’ailleurs identifié
l’ajustement des emplois aux activités comme un « risque majeur » dans
la cartographie de ses risques. En fait, le risque le plus immédiat est que
l’ajustement, selon les projections de l’entreprise, peut sans doute se
concevoir, mais dans un univers postal de fluidité parfaite, où les
surnombres des secteurs en retrait seraient absorbés par les besoins des
activités en croissance. Cette situation n’est pas encore une réalité. C’est
dire toute l’importance que revêt une politique active de mobilité.
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106
COUR DES COMPTES
c)
Organiser la mobilité
Les réorganisations déjà réalisées ont entrainé des changements
d’affectation importants mais ils ne se produisent qu’au sein d’un même
métier et s’effectuent dans un périmètre géographique étroit (les
changements de département ne représentent que 10 % des mutations).
En application des accords sociaux signés, la direction ne peut
imposer la mutation d’un agent en surnombre que dans un rayon de 30 km.
Ces questions revêtent un caractère très sensible, mais face aux
menaces qui pèsent sur l’entreprise, une politique de mobilité plus
déterminée est souhaitable, tout en restant respectueuse des difficultés
qu’elle peut susciter dans certains cas.
Ainsi le problème que La Poste doit résoudre justifierait qu’un lien
soit instauré entre la politique de promotion et les besoins de mobilité. La
politique de promotion a été très active, mais cet effort important a été peu
utilisé en faveur de la mobilité.
Par ailleurs La Poste ne tire pas le meilleur parti des moyens
importants qu’elle a mis en place pour accompagner sa politique de
mobilité. Ainsi, alors qu’il existe dans les métiers près de 300 conseillers
en mobilité, leurs actions pourraient être mieux coordonnées et surtout plus
étroitement pilotées par le siège en fonction des priorités du groupe.
La politique de formation gagnerait en efficacité si le groupe lui
fixait
des
priorités
nouvelles,
dont
celle
d’accorder
une
place
prépondérante à la formation des agents en place, en vue de les qualifier
pour les nouveaux métiers qui pourront leur être proposés dans le groupe.
A beaucoup d’égards, l’employabilité des agents en poste devient plus
importante que la formation des nouveaux recrutés.
En évitant les ruptures brutales, La Poste doit reconsidérer sa
politique de mobilité interne. Dans la situation qui est la sienne, elle ne
peut plus s’accommoder de l’existence de « surnombres » de durée
croissante, correspondant à des sureffectifs officiels, des personnes sous-
utilisées ou des postes à contenu plus ou moins virtuel. Elle devra négocier
un mécanisme qui permette plus de souplesse. Les dispositions décidées
récemment dans le cadre de la fonction publique de l’Etat pour accroître la
mobilité peuvent constituer une piste de réflexion.
La mobilité vers l’extérieur est également à développer. Certes, dans
la situation économique actuelle, ces mobilités sont limitées, vers les trois
fonctions publiques comme vers la création d’entreprise. Mais ces efforts
doivent être poursuivis même si le nombre de départs volontaires aidés par
ces mécanismes ne pourra vraisemblablement pas dépasser quelques
centaines par an.
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107
______________________
CONCLUSION
_____________________
L’adaptation de La Poste aux mutations profondes de son
environnement et de ses activités exige de fortes réductions des coûts.
Sur le plan salarial, l’entreprise a démontré son aptitude à
respecter les cadrages fixés et à ajuster l’emploi.
Dans Ambition 2015, La Poste affirme sa volonté de conduire ce
plan dans le cadre d’un modèle social réaffirmé, reposant principalement
sur l’absence de plan de départs imposés et la qualité de l’emploi
contractuel. L’ajustement des emplois aux activités doit être atteint, selon
La Poste, grâce à des organisations adaptables et performantes et au prix
d’un faible remplacement des départs naturels qui devrait se situer entre
1 sur 3 ou 1 sur 4.
Selon les projections de l’entreprise, cet ajustement peut sans
doute se concevoir, à condition qu’une fluidité parfaite existe entre les
secteurs en retrait et les activités en croissance, les besoins de celles-ci
absorbant les surnombres de ceux-là. Cette situation n’est pas encore une
réalité à La Poste.
Le groupe est dans une situation où les possibilités de
réorganisation, résultant, par exemple, de l’automatisation, du multi
canal, de l’optimisation des fonctions support représentent un potentiel
de productivité supérieur aux départs naturels. Il ne pourra en bénéficier
pleinement que pour autant qu’il gagnera la souplesse qu’exigent les
perspectives d’activité et leurs incertitudes.
Dans ce contexte, il est plus que jamais nécessaire d’orienter les
efforts de formation sur le développement des compétences favorisant la
motivation et l’employabilité durable des collaborateurs, de développer
une politique active de mobilité respectueuse des difficultés qu’elle peut
susciter dans certains cas, de concilier la qualité des emplois
contractuels avec un large choix d’organisation du travail.
La Poste a identifié l’ajustement des emplois aux activités comme
un « risque majeur » dans la cartographie des risques du groupe. Elle
doit donc en assurer un suivi étroit et se prémunir d’engagements trop
lourds qui ne pourraient être tenus.
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108
COUR DES COMPTES
C - Faire progresser les revenus opérationnels
Face aux lourdes menaces auxquelles elle est confrontée, et pour
répondre au défi majeur de la chute du secteur du courrier en tant que
principal contributeur des résultats du groupe, La Poste doit faire
progresser les revenus opérationnels du groupe en optimisant les
opportunités de croissance et en accordant une priorité à l’innovation.
1 -
Optimiser les opportunités de croissance
Le groupe n’a pas d’autre solution que d’exploiter pleinement le
potentiel de croissance organique dont il dispose, notamment dans le
domaine bancaire et celui du colis, et de saisir, de manière prudente et
sélective, les opportunités de croissance externe.
a)
La Banque Postale
Parmi les relais de croissance du groupe, La Banque Postale doit
jouer un rôle majeur.
Comme indiqué plus haut, La Banque Postale dispose d’une
clientèle étendue, mais encore largement sous-équipée en produits et
services bancaires. Son potentiel de croissance organique est donc
important. LBP doit également faire fructifier les partenariats récemment
conclus dans le domaine du crédit à la consommation et de l’assurance de
dommages
82
.
L’agrément de La Banque Postale devrait, par ailleurs, être élargi à
l’octroi de crédits aux personnes morales
83
. LBP devrait, dans ce cadre,
concentrer ses efforts en priorité sur les petites et moyennes entreprises
(PME), y compris les très petites entreprises (TPE)
84
, ainsi que les
associations.
82) Le crédit à la consommation a été déployé dans le réseau en avril 2010. L’offre
d’assurance dommage devrait être effective d’ici fin 2010.
83) Discours du Président de la République sur l’avenir des territoires ruraux, du 9
février 2010 : « (…) Je souhaite que La Banque Postale complète sa gamme de
produits financiers et prête aux entrepreneurs et aux TPE, en particulier en zone
rurale. »
84) Les petits commerçants, artisans et professions libérales font notamment partie de
la catégorie des TPE.
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109
L’élargissement des compétences de LBP à l’octroi de crédit à
cette clientèle pour laquelle se pose parfois un problème de financement
serait cohérent avec son positionnement de « banque pas comme les
autres ». Il permettrait également à la banque d’accroître sa rentabilité.
La Banque Postale n’étant pas compétente aujourd’hui pour
accorder des crédits aux PME, elle se trouve contrainte de centraliser la
totalité de sa collecte au titre du livret A ou du livret de développement
durable à la Caisse des dépôts
85
. A la fin octobre 2009, sans cette
limitation, elle aurait pu conserver à son bilan un montant de 6,5 Md€.
En dehors de l’octroi de crédits qu’elle ne peut actuellement leur
accorder, La Banque Postale est d’ailleurs déjà présente sur la clientèle
des personnes morales
86
. Le fonds de commerce de La Banque Postale sur
ce segment comprend environ 500 000 clients, dont 65% d’associations.
Le PNB réalisé avec ces clients s’élève à 255,6 M€ en 2008 (5,3% du
PNB de LBP, contre 30% en moyenne pour les réseaux de détail en
France). Faute de pouvoir octroyer des crédits à ces clients, le
positionnement de LBP est fragile.
L’élargissement des compétences de La Banque Postale à l’octroi
de crédit à cette clientèle devra respecter toutes les conditions de
prudence. LBP doit notamment se doter au préalable de la capacité
financière, technique et humaine d’absorber la nouvelle activité, tout en
consolidant son assise sur les particuliers et en faisant fructifier les
partenariats récemment conclus.
b)
Le colis et l’express
Le colis et l’express sont également des vecteurs de croissance
importants. Au-delà des baisses conjoncturelles de volume enregistrées en
2009, les perspectives de croissance sur ces marchés à moyen terme sont
élevées. Deux priorités s’imposent :
-
Développer de nouvelles modalités de livraison des colis ainsi
que le «
B to C
» en Europe
Pour demeurer leader sur le marché domestique du colis, il est
important que ColiPoste puisse développer, au-delà de la livraison à
domicile, d’autres modalités de livraison, adaptées aux demandes de plus
85) En application de la loi LME, les ressources collectées par les établissements
distribuant le livret A ou le livret de développement durable doivent être
principalement affectées au financement des PME.
86) La Banque Postale peut gérer les flux des entreprises, recevoir leurs dépôts,
accorder des facilités de caisse.
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110
COUR DES COMPTES
en plus diversifiées des clients, notamment dans le cadre des achats
réalisés sur internet. Des initiatives telles que la mise en place des
consignes
automatiques
Cityssimo
et
la
nouvelle
marque
« So
Colissimo »
87
vont dans ce sens. Cette orientation doit être poursuivie
résolument, en évaluant, à partir de ces initiatives, l’offre de services qui
répond le mieux aux attentes des clients.
Compte tenu du fort développement du commerce électronique, y
compris au niveau européen, ColiPoste devrait également étudier la
possibilité de développer davantage son activité de livraison aux
particuliers dans des pays européens. Cette perspective pourrait être
l’occasion de renforcer les synergies au sein du secteur colis-express, en
appuyant le cas échéant ce développement d’activités de ColiPoste sur le
réseau européen de GeoPost.
-
Achever le réseau européen de l’express
La Poste doit achever son réseau européen de l’express. Certains
opérateurs avec lesquels elle a noué des partenariats non capitalistiques,
notamment en Italie, pourraient être la cible d’acquisitions.
c)
Le courrier
La Poste s’est engagée, depuis plusieurs années, dans une stratégie
de diversification sur les métiers connexes du courrier. Décrites
précédemment, ces activités recouvrent d’une part la distribution de la
presse et des prospectus publicitaires et de l’autre le traitement pour le
compte de clients de leur courrier et de leurs documents (préparation des
envois, édition et expédition numérique…). Au-delà de la préoccupation
de développer des relais de croissance, cette politique visait à offrir aux
clients une offre complète sur l’ensemble de la chaîne de valeur du
courrier répondant à l’ensemble de leurs besoins. Cette stratégie de
diversification a reposé principalement sur des opérations de croissance
externe.
Elle doit être poursuivie, en respectant toutefois certaines
conditions de prudence. En effet, les opérations de croissance externe
sont consommatrices de capitaux et comportent des risques intrinsèques,
renforcés par la nouveauté de ces activités au regard des savoirs faire
traditionnels des postiers. La Poste doit déterminer ses investissements de
croissance externe dans les métiers connexes en fonction de leur propre
87) Cette nouvelle marque, mise en place en 2010, englobe un éventail de solutions de
livraison : domicile, livraison en bureau de poste de son choix, Cytissimo, commerces
de proximité, et sur Paris, livraison le soir sur rendez-vous de 17h00 à 21h30.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
111
création de valeur, sans privilégier des préoccupations défensives vis-à-
vis de futurs opérateurs alternatifs potentiels.
Par ailleurs, l’attrait des innovations technologiques ne devrait pas
faire passer à un rang de moindre priorité la nécessaire adaptation des
produits classiques aux attentes des entreprises, en termes de contenu, de
services associés et de tarification.
Enfin, après une période de démarrage où la préoccupation
première était d’atteindre les seuils critiques de taille dans les différents
métiers, La Poste doit s’attacher à concrétiser toutes les synergies
potentielles qui existent entre diverses sociétés du pôle documentaire.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Le plan « Ambition 2015 » confère à La Banque Postale un rôle
majeur pour le développement du groupe. A cette fin, pour accroître sa
rentabilité et jouer pleinement ce rôle de relais de croissance, La Banque
Postale doit recevoir compétence pour attribuer des crédits aux
personnes morales, dès lors qu’elle disposera des capacités techniques,
humaines et financières adéquates. LBP devrait concentrer ses efforts en
priorité sur les petites et moyennes entreprises (PME), y compris les très
petites entreprises (TPE), ainsi que les associations, pour lesquelles se
pose parfois un problème de financement.
Le plan « Ambition 2015 » se fixe pour objectif de faire du colis et
de l’express le leader européen en termes de parts de marché et en
rentabilité dans le segment des livraisons légères et rapides.
Pour y parvenir, ColiPoste doit élargir les choix de livraison
proposés aux clients, renforcer sa présence dans le commerce
électronique, développer le colis standard de particulier à particulier en
Europe.
L’express, quant à lui, doit demeurer vigilant sur les opportunités
qui lui permettraient d’être présent directement dans tous les pays
européens.
Il
doit
poursuivre
progressivement
son
implantation
internationale, sans viser le créneau des grands intégrateurs mondiaux.
Indépendamment des efforts propres qui lui incombent, la
direction du courrier doit tirer profit des complémentarités existantes
entre les diverses sociétés du pôle documentaire, poursuivre sa
diversification dans les métiers connexes du courrier en privilégiant la
création de valeur ajoutée et l’innovation, tout en demeurant prudente
quant aux opérations de croissance externe en Europe.
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COUR DES COMPTES
2 -
Innover
La Poste a su réussir depuis longtemps des innovations majeures
88
.
Face aux mutations technologiques et à la montée de la concurrence,
l’innovation doit, encore davantage, constituer un élément central de la
stratégie de La Poste.
Au-delà de la recherche de nouveaux produits, l’un des axes
d’innovation est de développer des offres commerciales de services
transverses entre les différents métiers du groupe. Il s’agit d’un axe
particulièrement important, qui peut répondre aux besoins non seulement
de PME/TPE mais aussi de grandes entreprises. Ainsi, les entreprises de
vente par correspondance sont clientes de La Poste, à la fois au niveau du
courrier (pour la distribution notamment de leurs catalogues) et du colis
(pour la distribution des produits achetés par correspondance). La Cour
souscrit donc à cette orientation qui doit être davantage développée afin
de tirer le plein bénéfice des synergies entre les métiers du groupe.
De nombreux éléments recueillis pendant l’enquête témoignent par
ailleurs d’insatisfactions de certains clients de La Poste sur la façon dont
cette dernière décide, parfois sans concertation, de modifier ses processus
industriels sur le courrier, alors même que ces modifications ont souvent
un impact majeur. Il apparaît donc souhaitable que La Poste puisse
davantage innover en concertation avec ses grands clients, notamment sur
son coeur de métier.
Enfin, La Poste ne doit pas seulement innover mais également faire
connaître à ses clients, notamment professionnels, ses nouveaux produits.
Les auditions réalisées par la Cour ont, en effet, montré que certains
clients n’étaient pas toujours au courant de l’ensemble des produits
offerts
par
La
Poste. Plusieurs
éléments
peuvent
expliquer
ce
phénomène : dans certains cas, la volonté de ne pas défavoriser le trafic
dans le réseau des bureaux de poste en promouvant des produits mis à
disposition sur internet (par exemple, le service de réexpédition en ligne
du courrier), mais aussi une communication davantage centrée sur la
marque et les valeurs de La Poste, plutôt que sur les produits.
88) Développement de la bancarisation des particuliers dès le début du XIXème siècle
en créant des services financiers,
création de l’aviation postale (1927), automatisation
du tri pour les colis des particuliers …
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113
Dans son projet stratégique « Ambition 2015 », La Poste fait de
l’innovation sa quatrième priorité. Elle mise sur le développement de
nouveaux produits, dont par exemple :
des services liés à internet, destinés à « réinventer » l’activité
traditionnelle du courrier. Dans le cadre de son nouveau service
Digiposte, La Poste vise à offrir aux particuliers et professionnels
la possibilité de recevoir, archiver et partager, par le biais d’une
boîte aux lettres numérique, d’un coffre-fort numérique et d’un
espace partagé, des documents numériques (bulletins de paye,
relevés de banque …). Elle entend capitaliser sur l’image de tiers
de confiance qu’elle a gagnée sur le courrier papier.
la possibilité pour le client de choisir les modalités de livraison de
son colis (à domicile, dans un magasin, à son bureau …) ;
le renforcement des services en ligne à La Banque Postale.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Dans son nouveau projet stratégique « Ambition 2015 », La Poste
fait de l’innovation sa quatrième priorité, avec le développement de
nouveaux produits.
Dans le contexte de l’ouverture des marchés et de la montée des
préoccupations écologiques, elle doit notamment affirmer sa présence sur
tous les médias du courrier et tirer parti des synergies possibles entre le
papier et le numérique. Elle doit ainsi donner sa pleine dimension à son
programme « réinventer le courrier ».
Elle doit, par ailleurs, affirmer sa capacité à faire des offres
commerciales globales impliquant tous ses métiers.
Davantage que par le passé, les innovations devront être définies
en concertation avec ses grands clients et La Poste devra mieux faire
connaître ses nouveaux produits.
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114
COUR DES COMPTES
IV
-
Les relations entre La Poste et ses
actionnaires
La recapitalisation de La Poste est une opportunité majeure pour le
développement du groupe et le renforcement de son unité.
A - Tirer le meilleur parti possible de l’augmentation de
capital
L’augmentation de capital annoncée par l’Etat en faveur de La
Poste devrait s’élever à 2,7 Md€, qui seront souscrits par l’Etat à hauteur
de 1,2 Md€ et par la CDC à hauteur de 1,5 Md€. Le calendrier et les
modalités de cette augmentation de capital ne sont pas encore arrêtés.
Cette augmentation de capital est essentielle pour permettre au groupe de
se préparer à ses nouveaux défis, en développant des activités créatrices
de valeur sans peser sur un endettement net de 5,5 Md€ déjà trop élevé.
1 -
Maintenir l’unité du groupe La Poste
Il est positif que l’augmentation de capital intervienne au niveau de
La Poste, et non de ses filiales. Des augmentations de capital effectuées
directement par certaines des filiales de La Poste, par exemple GeoPost
ou La Banque Postale, auraient présenté le risque d’entraîner un moindre
contrôle stratégique de la maison mère sur ces filiales.
L’apport de fonds propres au niveau du groupe permet a contrario
de maintenir son unité. Celle-ci est un élément essentiel de l’équation
financière du groupe. Dans un contexte de déclin structurel du courrier,
La Banque Postale et le secteur colis-express constituent, à court et
moyen terme, des relais de croissance nécessaires, même s’ils ne sont pas
encore suffisants à ce stade.
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115
2 -
Valoriser La Poste à son juste prix
La valorisation de départ du groupe La Poste doit être établie de
manière équilibrée. Dans le contexte de repli massif des activités
traditionnelles de La Poste et du pari difficile que représente la croissance
volontariste du résultat envisagée pour la banque, la valorisation du groupe
représente un enjeu particulièrement difficile. Cette évaluation doit tenir
compte du réel potentiel de développement du groupe, mais aussi des
risques qui lui sont associés. Elle doit donc s’appuyer sur un plan d’affaires
réaliste pour la période 2010-2015.
Les capitalisations boursières constatées, quelques années après leur
introduction en bourse, pour certains opérateurs postaux européens
90
également frappés par l’effondrement en cours du courrier, montrent que le
potentiel de valorisation des opérateurs postaux n’est pas à sous-estimer. Le
groupe hollandais TNT vient ainsi d’annoncer qu’il envisageait de scinder
ses activités courrier de celles de son pôle express, afin d’introduire en
bourse le secteur courrier.
3 -
Optimiser les opportunités ouvertes par l’augmentation de
capital
L’augmentation de capital de 2,7 Md€ constitue une opportunité
essentielle pour La Poste en lui permettant de financer ses besoins
d’investissement, y compris les éventuelles opportunités de croissance
externe, sans recourir à un endettement supplémentaire, dont l’aggravation
constituerait un handicap majeur pour le groupe.
Sur la période 2010-2015, La Poste prévoit un programme
d’investissement de près de 9 Md€, avant impact éventuel de nouvelles
règles applicables aux activités financières. Ce programme intègre
notamment l’aboutissement du processus de modernisation du courrier et
du colis, la rénovation et la sécurisation du réseau des bureaux de poste,
l’identification des opérations de croissance externe nécessaires en matière
de logistique légère au niveau européen, l’innovation et la consolidation des
fonds propres de la banque au vu des exigences réglementaires actuelles.
La Poste devra mobiliser ses fonds propres, accrus par la
recapitalisation, en effectuant des arbitrages entre les métiers, au vu de leur
potentiel de croissance et du retour sur investissement de chacune des
opérations envisagées.
90) En 2007, la capitalisation boursière de Deutsche Post DHL s’élevait à plus de 28
Md€, soit plus de 15 fois son résultat net. En 2009, la capitalisation boursière de TNT
s’élevait à près de 5 Md€, soit environ 9 fois son résultat net.
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COUR DES COMPTES
Les fonds propres complémentaires dont La Banque Postale
pourrait avoir besoin à la suite du durcissement des exigences
prudentielles dans le cadre de la réforme des normes prudentielles en
cours de préparation, dite « Bâle 3 »
91
, et de la révision de la directive sur
la supervision des conglomérats financiers ne sont pas prévus dans le
programme d’investissement de 9 Md€. Selon les dirigeants de La Poste,
ces
nouveaux
développements
pourraient
représenter
un
besoin
complémentaire de fonds propres de La Banque Postale de l’ordre de
1 Md€, notamment en raison de la participation qu’elle détient dans CNP
Assurances
92
. Il conviendra de rechercher les outils (croissance propre des
fonds propres de la banque, relocalisation de certains actifs à l’intérieur
du groupe, politique plus active de cessions d’actifs, émission de titres
obligataires) qui permettent d’assurer la mise en conformité avec les
nouvelles obligations prudentielles sans ponction excessive sur la
recapitalisation.
______________________
CONCLUSION
_____________________
La recapitalisation de 2,7 Md€ sera un élément important, pour
conforter l’unité du groupe et faciliter ses investissements internes et
externes, sans peser sur son endettement. Elle suppose de valoriser La
Poste à son « juste prix ».
Pour tirer le meilleur parti possible de cette augmentation de
capital, la Cour recommande que La Poste améliore le suivi des métiers
au niveau de la tête de groupe, afin de garantir un meilleur pilotage et
une gestion plus globale des ressources du groupe, permettant d’assurer
une allocation optimale de ces ressources, y compris pour La Banque
Postale.
Le choix des investissements appellera un réexamen des priorités
tenant compte des besoins en fonds propres de La Banque Postal qui
pourraient résulter du durcissement des normes prudentielles.
Il conviendra également de rechercher les outils (croissance
propre des fonds propres de la banque, relocalisation de certains actifs à
l’intérieur du groupe, politique plus active de cessions d’actifs, émission
de titres obligataires) qui permettent d’assurer cette mise en conformité
sans ponction excessive sur la recapitalisation.
91) Les travaux liminaires en cours au sein du comité de Bâle sont néanmoins
susceptibles d’évolutions substantielles après la période de simulation.
92) La participation dans CNP Assurances est consolidée dans le bilan de La Banque
Postale par mise en équivalence.
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117
B - Organiser les synergies avec la Caisse des dépôts
Un certain nombre de conditions et garanties s’imposent afin que
l’entrée de la CDC au capital de La Poste soit créatrice de valeur, sur le
moyen terme, à la fois pour la CDC et pour La Poste.
1 -
Impliquer l’actionnaire Caisse des dépôts dans la gouvernance
L’entrée de la CDC au capital de La Poste, à hauteur de 1,5 Md€,
s’inscrit dans le rôle d’investisseur d’intérêt général de la Caisse des
dépôts. Cette entrée doit respecter l’obligation faite par la loi à la CDC
d’être attentive à ses intérêts patrimoniaux
93
et le cadre d’intervention
approuvé par la commission de surveillance de la CDC pour ses
investissements d’intérêt général.
La doctrine de l’investisseur d’intérêt général, dont la CDC s’est
dotée avec l’approbation de l’Etat, dispose notamment que la Caisse des
dépôts « doit se prémunir des risques pouvant l’exposer au-delà du capital
investi.
L’investisseur d’intérêt général recherche une rentabilité
financière positive à long terme qui garantit la rémunération minimale du
coût de la ressource financière, de la couverture du risque ainsi que des
fonds propres. »
Dans ce contexte, la Cour estime que plusieurs garanties doivent
être apportées par l’Etat actionnaire :
Comme indiqué plus haut, le groupe La Poste doit être valorisé à
son juste prix ;
Le nouveau plan d’affaires du groupe doit définir l’emploi qui sera
fait de l’augmentation de capital et conduire à une création de
valeur à moyen et long terme ;
La loi du 9 février 2010 a naturellement prévu une présence de la
Caisse des dépôts et consignations au conseil d’administration de
La Poste
94
. Il sera utile qu’elle soit également présente dans les
autres instances de gouvernance. De façon plus générale, un pacte
d’actionnaire entre l’Etat et la Caisse devrait être établi.
93) Article L. 518-2 du code monétaire et financier
94) La loi du 9 février 2010 prévoit que les actionnaires de La Poste soient représentés
au conseil d’administration « de manière à leur assurer une représentation reflétant
leur détention du capital ». La loi précise que les actionnaires détiennent ensemble la
majorité des droits de vote au sein du conseil.
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118
COUR DES COMPTES
2 -
Explorer les synergies potentielles entre la CDC et La Poste
L’entrée de la Caisse au capital ne peut pas se réduire à une simple
participation financière. Cette évolution capitalistique n’a de sens que si
elle conduit, avec l’implication de l’Etat, à développer des synergies entre
ce nouvel actionnaire, La Poste et certaines de leurs filiales.
a)
Le groupe CNP Assurances
La Poste, via La Banque Postale, et la CDC entretiennent des
relations étroites à travers leur actionnariat commun au sein du groupe
CNP Assurances. Le capital de CNP Assurances se répartit, aujourd’hui,
entre deux blocs d’actionnaires principaux : la CDC (qui détient près de
40 %), premier actionnaire, et Sopassure (à hauteur de 35,48 %),
contrôlée par les deux réseaux distributeurs de produits CNP Assurances,
à savoir La Banque Postale (à hauteur de 50,1 %) et le groupe BPCE
(49,9 %).
Ces
actionnaires
sont
liés,
depuis
1998,
par
un
pacte
d’actionnaires, dont l’Etat est également signataire, qui vient à échéance
au 31 décembre 2015 (voir annexe n°13). Un équilibre a donc été trouvé
de longue date, malgré les intérêts éventuellement divergents qui peuvent
exister entre les distributeurs, La Banque Postale et le groupe BPCE, qui
cherchent à concentrer l’activité de CNP Assurances sur leur marché, et
la CDC, exclusivement actionnaire, qui soutient la stratégie de
développement à l’international de CNP Assurances.
L’entrée de la Caisse au capital de La Poste crée une situation
inédite. Elle conduit mécaniquement à accroître la participation de la
Caisse et donc, potentiellement, son influence sur CNP Assurances. Dans
le même temps, le fait pour la Caisse de devenir actionnaire de La Poste
serait plutôt de nature à faire converger ses intérêts d’actionnaire à la fois
dans CNP Assurances et dans La Poste.
CNP Assurances est, en effet, une filiale très importante pour la
CDC. Sa contribution (hors provisions liées à la crise financière) au
résultat de la CDC a été de 540 M€ en 2008, représentant 35% du résultat
net récurrent part du groupe.
Mais
CNP
Assurances
constitue
également
un
partenaire
stratégique et financier majeur pour le groupe La Poste. La participation
de La Banque Postale dans le capital de CNP Assurances offre une
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119
rentabilité élevée, utile à son résultat
95
, et la consolidation de cette
participation améliore la structure de son bilan. Par ailleurs, en tant que
réseau distributeur des produits d’assurance vie et de capitalisation de
CNP Assurances, La Banque Postale perçoit des commissions de collecte
qui représentent une part significative de son produit net bancaire (entre 9
et 10 % selon les années).
Dans un contexte où La Poste fonde le rétablissement de sa
rentabilité sur un développement soutenu de La Banque Postale, il est
manifestement de son intérêt que ne soit pas rompu l’actuel équilibre
actionnarial de CNP Assurances.
b)
Autres synergies éventuelles
L’entrée de la CDC dans le capital de La Poste doit conduire à
rechercher les synergies potentielles entre la Caisse, La Poste et leurs
filiales.
La recherche de synergies potentielles, voire de stratégies
d’alliance, avec les filiales du groupe La Poste pourrait être menée, par
exemple :
entre certaines filiales de Doc@post et CDC FAST
96
, filiale qui
sécurise les échanges électroniques de documents, ou CDC
Arkhinéo (société d’archivage et de conservation à long terme de
documents électroniques) ;
entre GéoPost et CDC infrastructure (qui prend des participations
minoritaires en fonds propres notamment dans les secteurs des
transports) ;
L’entrée de la CDC au capital de La Poste est également l’occasion
d’étudier l’opportunité d’un approfondissement des partenariats existant,
par exemple entre Poste Immo et Icade, foncière immobilière. Le plan
stratégique 2008-2012 de La Poste avait fait du rendement optimal des
cessions d’immeubles une priorité. Des compétences spécifiques étant
nécessaires à la réalisation de cet objectif qui pouvait conduire à des
opérations de réhabilitation avant cession, un partenariat entre Poste
Immo et Icade, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, a été mis
en place.
95) La quote-part du résultat de la CNP mise en équivalence a contribué au résultat
consolidé de LBP à hauteur de 227 M€ en 2007, 131 M€ en 2008 et 186 M€ en 2009.
96) CDC FAST (Fournisseur d’Accès Sécurisé Transactionnel) se positionne comme
tiers de télétransmission sécurisée dans les secteurs public, privé et parapublic.
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120
COUR DES COMPTES
Enfin, il est important, à cette occasion, que la stratégie
d’investissement de la CDC vis-à-vis du secteur bancaire soit clarifiée
97
.
La CDC détient, en effet, 17,61% du capital de Dexia dont elle est le
premier actionnaire
98
.
______________________
CONCLUSION
_____________________
L’entrée de la Caisse des dépôts au capital de La Poste, à hauteur
de 1,5 Md€, doit respecter l’obligation faite par la loi à la CDC d’être
attentive à ses intérêts patrimoniaux. Elle ne peut, par ailleurs, trouver
son sens que si elle ne se réduit pas à une simple participation financière.
Ce doit être d’autant plus le cas que le législateur a pris la précaution de
limiter l’actionnariat de La Poste à l’Etat et à des personnes morales de
droit public.
Dans ce cadre, un pacte d’actionnaire devrait être établi entre
l’Etat et la Caisse, en vue notamment de garantir à cette dernière une
participation adéquate aux organes de gouvernance de La Poste. Une
réflexion devrait, par ailleurs, être menée, dès maintenant, sur les moyens
de développer de nouvelles synergies entre la CDC, La Poste et certaines
de leurs filiales.
S’agissant du groupe CNP Assurances, de nombreuses raisons
militent en faveur de la préservation de l’équilibre ancien qui existe entre
ses actionnaires.
97) La CDC est, par ailleurs, présente au capital du groupe Oséo, mais celui-ci, en tant
qu’établissement de place, peut difficilement nouer des relations privilégiées avec
l’une des banques.
98) La CDC a participé au sauvetage du groupe bancaire Dexia, à hauteur de 2 Md€
(dont 1,2 Md€ au titre de la section générale et 445,5 M€ au titre des fonds
d’épargne).
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
121
C - Le financement des missions de service public
de La Poste
1 -
Les conséquences financières de la fin du monopole sur le
financement du service universel postal
La directive postale du 15 décembre 1997 donne une définition
imprécise du service universel postal
99
. La France a utilisé la marge
d’interprétation laissée aux Etats pour retenir une acception ambitieuse du
service universel dans toutes ses composantes (périmètre, fréquence,
qualité de service, accessibilité, politique tarifaire).
Cette définition du service universel, soutenue également par La
Poste, a représenté un défi pour l’opérateur national en termes de qualité
de service et pesé sur ses équilibres économiques et financiers, car les
obligations
de
service
public
sont
très
déterminantes
pour
le
dimensionnement de l’outil de production.
Principales composantes du service universel en France
Le périmètre du service universel
La France a retenu une définition très large du service universel postal
en incluant notamment : les envois en nombre, les envois de journaux,
périodiques et catalogues pesant au plus 2 kg, les services de réexpédition et
de conservation des recommandés, les colis de 20 kg au plus. Au total, le
service universel représente aujourd’hui en France 94 % du chiffre d’affaires
du Courrier et du Colis. Cette part est sensiblement moins élevée dans des
pays comme l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, les pays
scandinaves, l’Irlande.
La fréquence de levée et de distribution
La troisième directive postale européenne permettrait de limiter à cinq
jours par semaine la levée et la distribution du courrier mais, sous réserve des
jours fériés, le courrier est levé et distribué en France six jours sur sept.
Quatre autres pays (Allemagne, Danemark, Pays-Bas et Royaume-Uni)
imposent 6 collectes et distributions par semaine. Certains opérateurs n’ayant
d’obligation que cinq jours par semaine ont cependant choisi une fréquence
de 6 jours sur 7, soit sur l’ensemble de leur territoire (Estonie, Italie, Malte),
soit seulement dans les zones urbaines (Espagne, Lettonie, Lituanie,
Slovénie). Au total 15 pays de l’Union Européenne se limitent à une collecte
et une distribution cinq jours par semaine.
99) « Une offre de services postaux de qualité déterminée, fournis de manière
permanente en tout point du territoire, à des prix abordables pour les utilisateurs ».
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122
COUR DES COMPTES
La qualité de service
La partie réglementaire du code (article R.1 du CPCE) impose une
exigence plus forte que ne l’aurait nécessité la directive de 1997, en
prévoyant que les envois prioritaires relevant du service universel sont
distribués le jour ouvrable suivant celui de leur dépôt (J+1).
L’accessibilité
(voir chapitre I - point I A (pages 8 et suivantes)
a)
Le « coût net » et la « charge inéquitable »
du service universel postal
Selon les directives communautaires, le coût net des obligations du
service universel qui constituerait une charge financière inéquitable au
détriment de l’opérateur peut donner lieu, sous réserve de l’aval de la
Commission européenne, soit à une aide d’Etat, soit à la mise en place
d’un fonds de compensation.
Selon une étude de La Poste basée sur des hypothèses présentées
aux pouvoirs publics, le coût net de ces obligations serait très important.
Jusqu’à présent, ce coût était supposé couvert par le monopole conservé
sur la lettre de moins de 50 grammes. De fait, le secteur réservé
contribuait de façon positive au résultat d’exploitation du Courrier,
rendant sans intérêt pratique l’analyse précise de la décomposition du
coût global entre ses diverses composantes (l’accessibilité, la distribution
et la collecte six jours par semaine, y compris la distribution des flux
déficitaires, l’information, le règlement des réclamations et la qualité de
service).
La suppression du monopole au 1
er
janvier 2011 pourrait donc faire
apparaître une charge inéquitable de l’opérateur du service universel,
soulevant la question du financement de ses diverses composantes.
A ce jour, La Poste semble considérer que cette question trouvera
sa solution, pour les années 2010-2015, grâce à la réduction des coûts et
grâce aux revalorisations tarifaires que l’ARCEP pourrait lui consentir.
La marche à franchir par le Courrier étant cependant très haute au
regard de ses prévisions d’activité, le groupe a décidé de transférer dans
les comptes de la tête de groupe la charge du coût de l’accessibilité, soit
environ 500 M€.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
123
Les problématiques de la politique tarifaire et de la compensation
du coût net qui constituerait une charge inéquitable ne peuvent donc être
complètement éludées.
b)
La politique tarifaire
La politique tarifaire régulée pendant longtemps par l’Etat, puis par
l’ARCEP, n’a pas été d’une parfaite cohérence avec les ambitions du
service universel postal, dans la mesure où les tarifs postaux ont été gelés
en France pendant près d’une décennie jusqu’en 2003.
Le cadre juridique européen impose que le service universel soit
fourni « à des prix abordables pour les utilisateurs ». Mais la directive
souligne en même temps que les prix doivent être orientés sur les coûts.
La mission du régulateur est de veiller à assurer la pérennité du
service universel tout en veillant à l’exercice d’une concurrence loyale.
La question de l’équilibre entre ces deux préoccupations s’est posée au
Royaume Uni en raison de la situation financière très dégradée de Royal
Mail. Le rapport remis par R. Hooper au gouvernement en décembre
2008
100
souligne les graves retards de productivité de Royal Mail et les
contraintes liées au financement des retraites de ses employés, mais
recommande également de reconsidérer le cadre de la régulation du
marché postal. Il indique que le régulateur devrait avoir pour mission
première de maintenir le service universel.
La formule complexe d’établissement de la trajectoire tarifaire sur
trois ans, dénommée le «
price cap
», doit en principe permettre de
concilier un financement adéquat du service universel et la défense des
intérêts du consommateur. Cette formule définit une moyenne annuelle
d’ajustement pour un panier de produits du service universel postal.
L’évolution moyenne du panier est égale à l’inflation diminuée
d’un « facteur d’efficience ». Le facteur d’efficience est lui-même calculé
à partir de l’élasticité prix et des évolutions prévisionnelles des volumes
et des charges, ces dernières tenant compte d’un engagement de
productivité de La Poste sur la période.
Pour la période 2009-2011, l’ARCEP a autorisé La Poste à relever
ses tarifs du service universel de 2,3 % en moyenne par an. Avec des
prévisions annuelles estimées à + 2 %, pour l’inflation et - 1,3 % pour la
progression des volumes, le facteur d’efficience était négatif, à - 0,3 %
100) « Modernise or decline : Policies to maintain the universal postal service in the
United Kingdom » - An independant review of the UK postal services sector, 16
décembre 2008.
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124
COUR DES COMPTES
par an, contribuant à due concurrence au relèvement des tarifs ainsi porté
à 2,3 %.
Le renouvellement du price cap pour la période 2012-2015 va se
présenter dans un contexte difficile. D’un côté les prévisions de baisse
des volumes seront nécessairement plus fortes que celles retenues en
2008, - 1,3 % par an. De l’autre, le maintien pendant six années
consécutives d’un facteur d’efficience négatif de 0,3 %, s’il pouvait se
justifier dans la période d’investissements massifs d’industrialisation du
courrier, est plus délicat avec l’achèvement de ce programme. Le
régulateur peut, en effet, considérer que le consommateur est en droit de
bénéficier désormais d’une partie des gains de productivité générés par
CQC, d’autant que le courrier est en compétition avec un service gratuit
apporté par internet.
La modération souhaitable des tarifs de l’opérateur du service
universel conduit donc à considérer que la question de la compensation
éventuelle du coût de ces missions ne peut être complètement évitée.
c)
Les mécanismes de compensation
Si l’hypothèse d’une aide directe de l’Etat est écartée, la mise en
place du fonds de compensation pourrait être envisagée.
Selon les dispositions de l’article 21 de la loi du 9 février 2010, si
le fonds de compensation était activé, les prestataires de services postaux
titulaires d’une autorisation de l’ARCEP y contribueraient au prorata du
nombre d’envois postaux acheminés par leurs soins.
Dès lors deux cas de figure se présenteraient.
Si la concurrence ne devait avoir à moyen terme qu’un impact
marginal, La Poste en serait le contributeur quasi exclusif. Dans cette
hypothèse, le fonds de compensation ne serait d’aucune utilité.
En revanche, si un ou des opérateurs alternatifs captaient ensemble
une part de marché relativement significative, La Poste pourrait se trouver
dans une situation concurrentielle inéquitable si elle devait supporter
seule le financement du coût net du service universel.
Pour autant, la mise en oeuvre éventuelle du fonds de compensation
ne serait pas sans soulever des questions difficiles.
Par
une
communication
datant
de
1998,
la
Commission
européenne a rappelé que les règles de la concurrence s’appliquent au
secteur postal. Ainsi, dans le cadre d’une aide d’Etat, si une compensation
financière est mise en place, elle doit être justifiée par l’impossibilité pour
le prestataire retenu de fournir le service dans des conditions
économiques acceptables en l’absence de cette compensation.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
125
La troisième directive postale européenne décrit dans son annexe I
les modalités de calcul du coût net du service universel, mais ne donne
aucune indication sur ce qui constitue une charge inéquitable. Ce concept
flou risque d’être très contesté car différentes approches sont concevables
au regard de la rentabilité relative des opérateurs, ou du niveau de profit
« raisonnable ».
Les procédures qui pourraient en découler soulèveraient par
ailleurs la question de l’accès aux données de la comptabilité
réglementaire de La Poste, non publiables aujourd’hui en raison des
informations commerciales sensibles qu’elles contiennent. La Cour
estime qu’il sera nécessaire d’intégrer les modélisations effectuées par La
Poste dans un modèle simplifié et accessible en cas de litige.
Au regard de ces incertitudes et de la difficulté de démontrer
l’absence de surcompensation des coûts, il apparait plus efficient pour La
Poste de poursuivre les efforts engagés, notamment au travers de CQC, en
visant une baisse des coûts plus significative que celle obtenue les
dernières années. De son côté, l’Etat devrait contribuer à la couverture
des autres charges de service public concernant le transport de la presse,
l’aménagement du territoire et l’accessibilité bancaire au travers du
livret A.
Si ces points sont désormais résolus dans leur principe, il demeure
un handicap concurrentiel qui pénalise La Poste, celui de la taxe sur les
salaires, liée à l’exonération de la TVA des activités du service universel
postal.
En Europe les produits du service universel postal ne sont pas
assujettis à la TVA dans le but d’offrir à un coût réduit des services
essentiels. Ceci prive la Poste, comme toutes les postes européennes, de
la possibilité de déduire la taxe payée sur ses achats. Mais La Poste est le
seul opérateur européen à devoir acquitter en contrepartie une taxe sur les
salaires, qui s’est élevée en 2009 à 549 M€.
Cette situation spécifique constitue un désavantage concurrentiel
de La Poste vis-à-vis des postes européennes désormais potentiellement
concurrentes, voire vis-à-vis des nouveaux entrants nationaux exemptés
de la taxe sur les salaires qui concentreraient leur politique commerciale
sur des clients récupérateurs de TVA. Tant que la concurrence n’aura pas
d’impact véritable, ce désavantage de principe n’aura pas d’effet pratique.
En revanche, si l’arrivée des opérateurs historiques étrangers ou des
nouveaux entrants sur le marché postal conduisait à une dégradation des
comptes du courrier au point d’entraver la capacité de La Poste à fournir
les
produits
du
service
universel
postal
dans
des
conditions
économiquement satisfaisantes, il deviendrait indispensable, soit de
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126
COUR DES COMPTES
revenir au plan communautaire sur l’exonération de TVA des produits du
service universel postal, soit de mettre fin à l’assujettissement de La Poste
à la taxe sur les salaires pour ses activités de service public. L’impact
pour les finances publiques pourrait être limité par une révision de la
politique des dividendes
101
versés par La Poste. Un ajustement de cette
politique pourrait par ailleurs être utile vis-à-vis de l’entrée au capital de
La Poste de la Caisse des dépôts qui se positionne en « investisseur
avisé ».
Dans le même esprit, et selon une approche analogue, l’occasion
du rendez-vous prévu par la loi du 9 février 2010 pourrait être utilisée
pour faire le point, au vu de l’évolution de la rentabilité du groupe, sur le
financement de l’ensemble des autres missions de service public,
notamment celle de l’accessibilité bancaire à travers le livret A (voir
infra).
2 -
Veiller à la compensation de la mission d’aménagement du
territoire
La mission d’aménagement du territoire de La Poste est
partiellement compensée par le fonds de péréquation postale créé par la
loi de 1990. Ce fonds est abondé par un abattement de 85 % de la taxe
professionnelle accordé à La Poste. Le fonds de péréquation a ainsi
bénéficié de 137 M€ en 2008 et de 136 M€ en 2009.
Selon les orientations fixées dans le Contrat de présence postale
signé en juillet 2008 entre l’Etat, La Poste et l’Association des maires de
France et après consultation de l’Observatoire de la présence postale, le
fonds est utilisé pour contribuer au coût de gestion des agences postales
communales (833 € par mois) et des relais poste commerçant (300€ par
mois), financer les dépenses d’aménagement et d’équipement préalables
aux nouveaux partenariats, rénover les bureaux dans les zones prioritaires
etc.
Les
obligations
d’aménagement
du
territoire
sont
ainsi
partiellement compensées. La loi du 9 février 2010 modifie le dispositif
sur un point essentiel en confiant désormais à l’ARCEP la responsabilité
de définir le coût de cette mission d’aménagement du territoire. Par
ailleurs, à compter de 2011, le taux de l’abattement fiscal sera fixé chaque
année dans la limite de 95%, « de manière à ce que le produit de cet
101) Au titre de l’exercice 2009, le dividende versé à l’Etat a représenté 20 % du
résultat net, contre 25 % initialement convenu avec l’Etat.
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REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
127
abattement contribue au financement du coût du maillage territorial
complémentaire de La Poste tel qu’il est évalué par l’ARCEP ».
La Poste estime que cette compensation pourrait s’élever à 180
M€. Elle se fixe pour objectif, par un effort de productivité propre, de
ramener, à terme, le coût de la mission d’aménagement du territoire à un
ordre de grandeur de 250 M€. Au regard des gains que représentent les
transformations des bureaux de poste en points de contact et du rythme de
500 transformations par an observées ces dernières années, les
perspectives évoquées ci-dessus ne seront réalisables à l’échéance de
2015 qu’au prix d’une détermination renforcée.
3 -
Mener à terme la résorption du déficit
du transport postal de presse
a)
Présentation générale
Deux canaux de distribution sont utilisés par les éditeurs de presse
payante : la vente au numéro d’un côté, qui représente en 2009 un peu
plus de 53% de la diffusion et la vente par abonnement de l’autre, qui se
répartit entre le postage (23 % des flux de presse en volume) et le portage
(24 %).
Dans le cadre de l’accord global du 23 juillet 2008 entre l’Etat, la
presse
et
La
Poste,
les
trois
parties
entendent
poursuivre
le
développement du portage de presse qui offre l’avantage majeur d’une
distribution très matinale des abonnés.
En 2008, La Poste aura transporté et distribué sur l’ensemble du
territoire, six jours sur sept, plus de 1,65 milliard d’exemplaires couvrant
une très grande variété de publications de presse quotidienne, magazine,
professionnelle, associative ou récréative.
Les volumes transportés subissent une lente érosion, avec une
baisse cumulée de 8 % entre 2003 et 2008. Compte tenu du rattrapage
tarifaire, le chiffre d’affaires du courrier dans le transport de presse
progresse cependant de 16 % sur la même période. Au sein de l’activité
Courrier, le transport de la presse ne représente que moins de 5 % du
chiffre d’affaires, mais près de 10 % du trafic en volume, et 30 % du
poids emporté par les facteurs.
En raison notamment des tarifs très avantageux fixés par l’Etat,
cette activité est très déficitaire pour La Poste.
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128
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Bilan économique du transport et de la distribution de la presse
M€
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Chiffre d'affaires
423
440
453
466
476
473
Aide de l'Etat
290
290
242
234
229
232
Coûts complets
1 242
1 280
1 252
1 174
1 119
1 122
Résultats
-820
-550
-799
-708
-644
-649
Contribution de La
Poste
530
550
557
474
414
417
Source : La Poste
b)
Le maintien d’un niveau de tarification inférieur aux coûts
En tant que service public, les tarifs demeurent homologués par les
ministres concernés. Ces tarifs sont accessibles à tous les éditeurs, quelle
que soit leur taille ou leur forme juridique, dès lors que leur publication
est inscrite au registre de la Commission paritaire des publications et
agences de presse (CPPAP)
102
.
Les tarifs postaux de la presse conservent un avantage marqué par
rapport au courrier ordinaire : pour un poids six fois supérieur à une lettre
égrenée prioritaire, le tarif du journal est plus de deux fois inférieur et
l’objectif de qualité de service (J+1) plus exigeant.
Ces tarifs sont fixés à un niveau très préférentiel. Selon une
comparaison établie entre une dizaine de pays européens
103
par la mission
Schwartz
104
, la France est le pays où le rapport entre les tarifs presse et les
tarifs des produits courriers comparables est le plus faible (sauf en Italie
pour les quotidiens). Au titre de la péréquation tarifaire, les prix de La
Poste sont nécessairement identiques quels que soient les lieux de dépôt
et de distribution sur le territoire.
Les accords successifs conclus entre l’Etat, les éditeurs de presse et
La Poste se sont attachés à tracer les perspectives d’un rétablissement
progressif de l’équilibre du transport de la presse abonnée par La Poste.
102) Ce régime prévoit pour les publications qui remplissent les conditions prévues
par les textes le bénéfice du tarif postal préférentiel et l’application du taux réduit de
TVA à 2,1 %. Au 1er mars 2008, 10 864 publications étaient agrées par la CPPAP,
dont 393 au titre du « ciblage » de la presse d’information politique et générale.
103) Les pays retenus sont la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la
Belgique, les Pays Bas, la Suède, la Suisse, la Finlande.
104) Mission de réflexion et de proposition sur l’acheminement des abonnements de
presse.
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129
Les revalorisations tarifaires convenues dans l’accord tripartite de
juillet 2004 ont été effectivement mises en oeuvre sur quatre ans et se sont
traduites par des augmentations comprises entre 10 % et 21,5 % selon les
niveaux d’urgence.
Dans le cadre de l’accord tripartite du 23 juillet 2008 (accord
Schwartz), applicable pour 2009-2015, ont été pris les engagements
suivants :
-
L’État a fixé le montant de sa contribution annuelle globale de
manière dégressive sur la période ;
-
La Poste s’est engagée sur une réduction des coûts de 200 M€ ;
-
Les éditeurs de presse, ont accepté, malgré leur situation
financière très tendue, des revalorisations tarifaires (3,3 % en
moyenne), en conservant des conditions plus favorables pour la
presse d’information politique et générale.
Ainsi, La Poste faisant son affaire d’une charge résiduelle de 140
M€ en 2015, la question du déficit du transport de presse est censée être
réglée à cette échéance.
Un suivi attentif de la mise en oeuvre de cet accord s’impose
cependant. Ainsi, un moratoire sur les revalorisations tarifaires est
intervenu dès la première année. Les éditeurs n’ont commencé à
appliquer cet accord qu’en 2010. Il est indispensable qu’il soit respecté. Il
est tout aussi nécessaire que La Poste réalise les gains de productivité
promis.
Par ailleurs, le développement du portage peut contribuer à la fois
à la solution de ce problème et à améliorer la diffusion de la presse.
L’État a créé, en 2009, une aide spécifique (70 M€) pour en accélérer le
développement. La Poste, avec les moyens d’industrialisation dont elle
dispose, devrait être l’un des opérateurs importants du portage. L’accord
intervenu fin 2009 entre la presse quotidienne nationale et Neopress,
filiale de Mediapost, organise ainsi le portage de la majorité des titres
dans dix grandes villes de province.
Pour les publications qui ne bénéficient pas de l’agrément de la
commission paritaire, La Poste a fait approuver, le 1
er
janvier 2009, par
l’ARCEP un tarif de service universel. Les tarifs correspondants,
« orientés vers les coûts », sont supérieurs de 36 à 85 % aux tarifs de la
presse aidée. L’intérêt de ce dispositif est confirmé par les premiers
résultats de 2009 (23 millions d’exemplaires et un chiffre d’affaires de
13,2 M€).
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COUR DES COMPTES
4 -
Vérifier le coût de l’accessibilité bancaire
La Banque Postale a obtenu du législateur la reconnaissance de sa
spécificité dans le domaine de l’épargne réglementée compte tenu du rôle
significatif joué par le livret A. Sur 21,7 millions de livrets A ouverts à La
Banque Postale, 60% de livrets, soit 12 millions, ont un solde inférieur à
150 € ; ces livrets, qui ne totalisent que 0,7% des encours, ont cependant
un coût de gestion très important : ils pèsent en effet pour environ 50 %
dans les coûts de gestion du livret A car ils comptent parmi les livrets les
plus utilisés (ils sont à l’origine de 44% du total des opérations sur livrets
A). La loi de modernisation de l’économie a donc maintenu, au seul
bénéfice de La Banque Postale, une mission d’accessibilité bancaire à
travers le livret A.
La Banque Postale est soumise à des obligations spécifiques :
obligation d’ouvrir un livret A à toute personne en faisant la demande ;
d’accepter des seuils de dépôts et de retrait sur les livrets A différents des
seuils pratiqués par les autres établissements de crédit
(dès 1,5 euros,
contre un seuil général fixé à 10 euros) ; d’accepter la domiciliation sur le
livret A d’un certain nombre de versements …
La loi de modernisation de l’économie a prévu une rémunération
spécifique à ce titre.
Financement de la mission d’accessibilité bancaire
Jusqu’au 1
er
janvier 2009, La Banque Postale percevait une
commission unique de 1,3% de l’encours au titre de la collecte et de la
distribution du Livret A. Depuis le 1
er
janvier 2009, la rémunération de La
Banque Postale est désormais composée de trois éléments :
- Une rémunération à hauteur de 0,60% des encours centralisés auprès
de la CDC, identique à celle perçue par l’ensemble des banques ;
- Une rémunération de transition, versée temporairement aux trois
réseaux historiques (La Poste, les Caisses d’épargne et le Crédit mutuel) et
supprimée à la fin de la période de transition le 31 décembre 2013.
- Une compensation spécifique à La Banque Postale liée à la mission
d’intérêt général d’accessibilité bancaire. Le montant de cette rémunération
complémentaire est calculé de manière à assurer à La Banque Postale une
« compensation proportionnée aux missions de service d’intérêt économique
général qui sont conférées à cet établissement » (article R. 221-8-1 du code
monétaire et financier). Les coûts de La Banque Postale sont compensés dans
la limite d’un plafond annuel pérenne de 210 M€, auquel vient s’ajouter
transitoirement un montant décroissant de 70 M€ en 2009 à 25 M€ en 2013.
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AVEC LA STRATEGIE « AMBITION 2015 », LA POSTE VISE A
REPONDRE A DES DEFIS SANS PRECEDENT
131
La compensation forfaitaire de la mission d’accessibilité bancaire
remplie par La Banque Postale est aujourd’hui satisfaisante. Elle clarifie le
financement des charges liées à cette mission. Elle est cohérente avec les
orientations suggérées par la Commission européenne dans sa décision du
10 mai 2007
105
. Cependant, le caractère dégressif de cette compensation
complémentaire (qui diminue de près de 25% sur cinq ans) suppose que le
groupe La Poste réalise d’importants gains de productivité. L’évolution de
la compensation au titre de la mission d’accessibilité bancaire à travers le
livret A devra donc faire l’objet d’un réexamen, en lien avec celui prévu à
fin 2011 des règles de centralisation de l’épargne réglementée à la Caisse
des dépôts et consignations.
______________________
CONCLUSION
_____________________
La Poste semble considérer que la question du financement du coût
net du service universel, assuré jusqu’en 2011 par le monopole sur la lettre
de moins de 50 grammes, sera résolue par la baisse des coûts et la
revalorisation tarifaire. Cependant, pour alléger les charges de la direction
courrier, elle impute désormais dans les comptes de la tête de groupe le
coût de l’accessibilité au titre du service universel (de l’ordre de 500 M€).
Par ailleurs, l’ARCEP devra se montrer attentive à la répercussion d’une
partie des gains de productivité au profit du consommateur.
La question de la compensation du coût net des obligations du
service universel ne saurait donc être complètement éludée. La mise en
place éventuelle du fonds de compensation apparaît soit comme une
hypothèse d’école, soit comme une solution délicate quant à la
détermination de la « charge inéquitable » de l’opérateur. Dans ces
conditions, la compensation appropriée des missions de service public est
une question essentielle.
Or, ces missions sont aujourd’hui inégalement compensées par
l’Etat. L’accessibilité bancaire est couverte par une compensation à
caractère dégressif. L’aide de l’Etat au transport de presse est également
dégressive et l’équilibre financier du transport de presse dépendra du
respect de l’accord tripartite de juillet 2008. Le coût de la mission
d’aménagement du territoire ne sera qu’en partie couvert par l’abattement
maximal de 95 % sur la nouvelle contribution économique territoriale.
Sur ces sujets, l’occasion du rendez-vous prévu par la loi du
9 février 2010 devrait être utilisée pour faire le point, au vu de l’évolution
de la rentabilité du groupe et des besoins des usagers, sur le financement
de l’ensemble des missions de service public.
105) Décision de la Commission du 10 mai 2007 au titre de l’article 86, paragraphe 3,
du traité CE, relative aux droits spéciaux octroyés à La Banque Postale, aux Caisses
d’Epargne et au Crédit Mutuel pour la distribution des livrets A et bleu.
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Conclusion générale
Jusqu’en 2008, La Poste a pensé que les activités courrier
demeureraient le principal contributeur à ses résultats. Sa stratégie
comportait le développement de relais de croissance dans le colis et
l’express et surtout dans le secteur financier, grâce la création de La
Banque Postale intervenue en 2006. Mais les investissements massifs
consentis pour industrialiser les activités du courrier marquent clairement
où se situait, inévitablement du fait des retards pris par le passé, la
première priorité du groupe.
La Poste a beaucoup changé au cours de cette période. Elle a réussi
à franchir des étapes significatives de sa modernisation. Ses procédures de
pilotage et de gestion ont été portées au standard des grands groupes privés
de services. Les performances de son outil industriel du courrier sont
désormais comparables à celles de ses grands concurrents européens.
Même si son réseau est encore incomplet, en particulier à l’international,
La Poste est devenue un acteur majeur sur l'express en Europe. Dans les
limites de son agrément, La Banque Postale peut rivaliser avec les autres
banques de réseau, tout en conservant sa spécificité de banque ouverte à
tous.
Les foyers de pertes structurelles de certains métiers ont été
redressés. Le groupe a su multiplier par quatre son résultat d’exploitation et
son bénéfice net entre 2003 et 2007. Sa rentabilité opérationnelle est
devenue bien supérieure à celle des années 2000. L’Etat a notablement
contribué à ce redressement en corrigeant les principaux handicaps
concurrentiels qui pénalisaient l’opérateur.
Mais confrontée au défi sans précédent du repli structurel du
courrier, La Poste est aujourd’hui dans une situation plus difficile. Elle a
pour atout de s’appuyer sur plusieurs métiers complémentaires qui utilisent
en commun un réseau de point de contact d’une densité exceptionnelle.
Elle peut s’appuyer également sur l’attachement de ses personnels aux
missions de service public, sur la confiance dont elle bénéficie auprès du
public et sur un gisement de clientèle très large.
La nouvelle stratégie devrait valoriser davantage les opportunités de
ce « modèle postal » afin que la progression des activités financières, du
colis et de l’express fasse de ces métiers, à l’instar de ce que fut le courrier
pendant de longues années, les principaux vecteurs du développement du
groupe.
Le plan « Ambition 2015 » répond à ces préoccupations. La Cour en
partage les axes essentiels, en particulier la volonté de La Poste d’atteindre
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134
COUR DES COMPTES
« la pleine exécution de ses quatre missions de service public » réaffirmées
par la loi du 9 février 2010. Les hypothèses économiques retenues
correspondent à un scénario moyen cohérent. Même si la perspective d’une
amélioration de la rentabilité du groupe La Poste (dont la marge
opérationnelle s’établissait à 3,69 % en 2009) paraît fondée, la réalisation
complète de l’objectif fixé dans le plan « Ambition 2015 » (soit un
doublement du résultat d’exploitation d’ici 2015) paraît plus ambitieuse.
Elle suppose la concrétisation de toutes les hypothèses, sans doute
volontaristes pour certaines d’entre elles. Cette appréciation renforce la
nécessité de réunir toutes les conditions de réussite de ce plan.
En premier lieu, La Poste doit affirmer sa capacité à réaliser des
efforts de productivité. Elle doit tout d’abord engager une réduction plus
volontariste que celle menée jusqu’à présent du coût des fonctions support.
Elle doit dégager des solutions nouvelles pour réduire le coût de son réseau
afin de préserver les atouts qu’il représente. Elle doit aussi concrétiser les
gains de productivité du programme « Cap Qualité Courrier ». Enfin, pour
préserver les acquis de son modèle social, La Poste doit trouver des
formules plus souples pour concilier le rythme des départs naturels, le
maintien d’un minimum de recrutements et la réduction des effectifs.
Par ailleurs, La Poste doit renforcer sa capacité de développement et
d’innovation. Cela implique d’abord d’améliorer le pilotage des métiers au
niveau de la tête de groupe, afin de garantir une allocation optimale des
ressources. La Poste doit également offrir de nouveaux services, plus
transversaux, tirant avantage des compétences de tous les métiers du
groupe.
La Poste doit impérativement renforcer sa qualité de service. Elle
doit notamment poursuivre ses efforts pour améliorer l’accueil dans les
bureaux de poste, en recherchant également les améliorations adaptées aux
spécificités des petits bureaux, et pour améliorer les modalités de livraison
des colis aux particuliers.
Le changement de statut résultant de la loi du 9 février 2010 et
l’augmentation de capital de 2,7 Md€ annoncée ont pour ambition d’aider
le groupe à préparer cet avenir.
L’entrée de la CDC au capital de La Poste n’a de sens que si elle ne
se résume pas à une simple participation financière. La CDC doit
s’impliquer dans la stratégie de La Poste. Sa participation aux instances de
gouvernance devra être fixée en conséquence. Dans le même esprit,
l’occasion doit être saisie de développer des synergies entre l’opérateur
postal, la Caisse et certaines de leurs filiales. L’Etat joue un rôle majeur
vis-à-vis tant de la CDC que de La Poste. Il devra donc veiller à que ces
orientations se concrétisent dans un pacte d’actionnaires qu’il devrait
conclure avec la CDC.
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CONCLUSION GENERALE
135
Enfin, les principes de la compensation du coût net des missions
d’aménagement du territoire, de transport de la presse, d’accessibilité
bancaire et du service universel postal sont aujourd’hui définis. Il
demeure cependant, en particulier pour cette dernière mission, des
incertitudes. En vertu de la loi du 9 février 2010, le gouvernement doit
présenter en 2013 au Parlement un rapport sur l'exécution des missions de
service public. Cette occasion devrait être mise à profit pour apprécier
l'adaptation de ces missions aux évolutions des attentes du public, des
usagers et des clients, en tenant compte de leur coût, de leur consistance
et de la situation financière de La Poste.
Recommandations incluses au chapitre II du rapport
Recommandations aux pouvoirs publics
1. Conclure un pacte d’actionnaire entre l’État et la CDC dans le but
de donner sa pleine signification à cette nouvelle répartition du capital et de
développer les synergies potentielles entre La Poste, la Caisse et certaines de
leurs filiales (IV B)
2. Dès lors qu’elle disposera des capacités financières, humaines et
techniques adéquates, étendre l’agrément de la Banque Postale à l'octroi de
crédit aux personnes morales, en orientant prioritairement ses efforts vers les
petites et moyennes entreprises (PME), y compris les très petites entreprises
(TPE), ainsi que vers les associations (III C)
3. Relever significativement l’objectif de qualité de la distribution en
J+1 et le rendre plus effectif dans un périmètre géographique pertinent. Dans
le même temps, élargir la plage utile pour la remise du courrier en permettant
un dépôt plus tardif dans un nombre plus élevé de boîtes aux lettres (IV C)
4. Examiner en 2013 la compensation des coûts supportés par La
Poste au titre des missions de service public au regard de l’évolution des
besoins du public et des entreprises, du périmètre de ces missions et de la
rentabilité du groupe (IV C)
5. Examiner, dans ce même esprit, la question de l’assujettissement de
La Poste à la taxe sur les salaires qui la place dans une situation d'inéquité
concurrentielle (IV C)
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136
COUR DES COMPTES
Recommandations à La Poste
6. Réaliser des simulations complémentaires tournant autour d’une
hypothèse alternative de baisse des volumes économiques du courrier de 40
% entre 2008 et 2015 (I D)
7. Renforcer la qualité de service en priorité pour résoudre la question
de l’accueil et de l’attente dans les bureaux de poste, sans délaisser les petits
bureaux, et améliorer les modalités de livraison des colis aux particuliers (III
A)
8.
Réduire
les
charges
fixes,
notamment
en
rationnalisant
l’organisation des fonctions support au sein de chaque métier ainsi que la
gestion du parc immobilier du groupe, qui représente son deuxième poste de
charges (III B ; chapitre I IV C)
9. Tout en maintenant le nombre des points de contact, poursuivre leur
transformation en partenariats et engager un effort de réduction du poids de
leurs structures de gestion (III B)
10. Clarifier les lignes de responsabilité entre La Banque Postale et
l’Enseigne (III B)
11. Permettre le plein effet des perspectives de départs naturels en
instaurant une complète fluidité entre les secteurs en décroissance et les
activités en développement (III B)
12. A cet effet conférer une importance prépondérante à la formation
qualifiante des agents en place pour leur permettre d'évoluer vers les
nouveaux emplois qui pourront leur être proposés et renforcer l'efficacité des
dispositifs existants de mobilité interne et externe (III B)
13. Disposer d'organisations plus performantes et plus adaptables en
fonction des besoins de l'entreprise, notamment pour la distribution du
courrier (III B)
14. Pour ColiPoste, élargir les choix de livraison proposés aux clients,
renforcer sa présence dans le commerce électronique, développer le colis
standard de particulier à particulier en Europe (III C)
15. Pour l’express, poursuivre son implantation internationale, sans
viser le créneau des grands intégrateurs mondiaux (III C)
16. Pour les métiers connexes du courrier, tirer profit des
complémentarités existantes entre les diverses sociétés du pôle documentaire,
privilégier la recherche de valeur ajoutée et l’innovation, tout en demeurant
prudent quant aux opérations de croissance externe en Europe (III C)
17. Affirmer la capacité du groupe à faire des offres commerciales
globales impliquant tous ses métiers (III C)
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ANNEXES
137
Annexe 1 – Organigramme simplifié
du groupe La Poste
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138
COUR DES COMPTES
Annexe
2
– Glossaire
Accords Schwartz
: accords signés entre l’Etat, la Poste et des
représentants de la presse le 23 juillet 2008, sur le transport de la presse
par la Poste entre 2009 et 2015. A cette occasion, l’Etat s’est engagé à
continuer à soutenir la Poste, pour un montant de 242 millions d’euros en
2011, 232 millions en 2012 et 180 millions en 2015. L’accord prévoyait
également une hausse progressive des tarifs de distribution (d’ici 2015,
25% pour la presse d’information politique et générale et 34% pour le
reste de la presse), mais le contexte de crise économique a conduit à
reporter en 2010 le début de ce rattrapage.
Accessibilité bancaire
: Le code monétaire et financier modifié
par la loi n° 2008-776 de modernisation de l’économie du 4 août 2008
confie à La Banque Postale une mission d’intérêt général d’accessibilité
bancaire à travers le livret A (articles L. 221-2 et suivant et article L. 518-
25-1 du code monétaire et financier). Cette mission spécifique l’oblige à
ouvrir un Livret A à toute personne qui en fait la demande, à accepter des
seuils de dépôts et de retrait sur les livrets A différents des seuils
pratiqués par les autres établissements de crédit
(dès 1,5 euros, contre un
seuil général fixé à 10 euros), à accepter la domiciliation sur le livret A
d’un certain nombre de versements …
Accessibilité territoriale
: conformément à l’article R. 1-1 du
Code des postes et communications électroniques (CPCE), « au moins 99
% de la population nationale et au moins 95 % de la population de chaque
département sont à moins de 10 km d’un point de contact et toutes les
communes de plus de 10 000 habitants disposent d’au moins un point de
contact par tranche de 20 000 habitants ». Ces obligations de couverture
du territoire par la Poste vont plus loin que la directive postale,.
Circuit postal de distribution de la presse aux abonnés :
la
presse écrite est l’ensemble des quotidiens et des publications périodiques
diffusant une information générale, judiciaire ou technique, inscrits à la
commission paritaire des papiers de presse. La Poste offre une prestation
de distribution au titre du « service public de transport et de distribution
de presse ».
Coefficient d’exploitation bancaire :
indicateur utilisé pour
mesurer l’efficacité d’un établissement de crédit. Il correspond au rapport
des
charges
d’exploitation
(frais
de
personnel,
dotations
aux
amortissements sur les immobilisations corporelles et incorporelles,
autres services externes) divisées par le produit net bancaire (PNB).
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ANNEXES
139
Colis express
: livraison d’objets et de plis dans des délais
garantis, du seuil de la porte de l’expéditeur jusqu’à celui du destinataire.
Il s’agit d’un marché complètement ouvert à la concurrence, qui porte sur
les colis légers (jusqu’à 30 kg) émis et distribués sur le territoire français.
Colis « ordinaires »
: colis de 0 à 30 kg, livrés à domicile ou en
points de retrait des colis. Ce marché se caractérise par des délais plus
importants que ceux des envois express. Il est complètement ouvert à la
concurrence mais partiellement régulé : le service universel garantit
qu’une offre de colis jusqu’à 20 kg en envoi ordinaire ou en recommandé
est disponible à l’unité sur tout le territoire. Sont exclus les services
d’envois offerts à des entreprises en exécution de contrats portant sur
plusieurs envois.
CECEI :
Le comité des établissements de crédit et des entreprises
d'investissement est chargé par la législation bancaire et financière
figurant dans le code monétaire et financier, entre autres, d’agréer les
établissements de crédit qui effectuent à titre de profession habituelle des
opérations de banque.
Convention de service
: dans le cadre des travaux effectués par les
guichetiers de La Poste, divisés entre les prestations postales et d’autres
services pour les filiales (notamment La Banque Postale), une convention
de service est signée entre chacun des métiers et la maison-mère pour
facturer l’activité correspondante des guichetiers. Ces conventions sont
renégociées chaque année et sont fondées soit sur le temps consacré au
métier, soit sur des commissions à la vente.
Courrier de gestion
: représente près de 90% du chiffre d’affaires
du Courrier, hors presse et publicité adressée. Correspond dans une large
mesure aux volumes envoyés par les entreprises (relevés bancaires,
factures, courriers administratifs …), mais également à celui des
administrations. Le courrier de gestion partage deux caractéristiques avec
la publicité postée : il est très concentré sur des opérateurs majeurs et sa
production est de plus en plus externalisée, en tout ou partie, par les
entreprises émettrices.
Courrier égrené
: ensemble du courrier des particuliers et des
petites entreprises, auquel s’ajoute le courrier non industriel des
entreprises. Le courrier industriel est composé, à l’inverse, d’envois en
nombre.
Deutsche Post DHL
: Opérateur postal historique en Allemagne.
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140
COUR DES COMPTES
DOTC
: directeurs opérationnels territoriaux du Courrier. Les
quarante DOTC
106
constituent le niveau pivot de la décentralisation du
courrier. Dans leurs zones respectives, leurs responsabilités couvrent
toutes les fonctions : commercial, ressources humaines, production,
gestion, communication … Ils sont organisés en centres de profit,
consolidés dans les comptes du Courrier.
Enseigne La Poste
: direction de la maison mère érigée en
« métier » en charge des activités courrier, colis, bancaires au sein du
réseau des bureaux de poste.
Envoi postal :
tout objet destiné à être remis à l’adresse indiquée
sur l’objet lui-même ou sur son conditionnement et présenté dans la
forme dans laquelle il doit être acheminé. Outre les envois de
correspondance, sont notamment considérés comme des envois postaux
les livres, les journaux, les périodiques et les colis postaux contenant de la
marchandise avec ou sans valeur commerciale.
Envois de correspondance
: envoi postal ne dépassant pas 2 kg.
Les envois postaux adressés tels que les livres, catalogues, journaux ou
périodiques ne font pas partie des envois de correspondance. Le
publipostage
(publicité adressée ou marketing direct) est un envoi de
correspondance.
Envois remis contre signature
: peuvent correspondre aux envois
recommandés et aux envois à valeur déclarée. L’envoi recommandé est
un service consistant à garantir forfaitairement contre les risques de perte,
vol ou détérioration et fournissant à l’expéditeur, le cas échéant à sa
demande, une preuve du dépôt de l’envoi postal et/ou sa remise au
destinataire. L’envoi à valeur déclarée est un service consistant à assurer
l’envoi postal à concurrence de la valeur déclarée par l’expéditeur en cas
de perte, vol ou détérioration.
Export
:
segment
du
courrier
international
(envois
de
correspondance) sortant, qui est ouvert à la concurrence pour toutes
tranches de poids. Les opérateurs sont pour la plupart des filiales des
postes européennes.
106) Il existe une quarante et unième DOTC qui couvre une seule responsabilité : la
gestion du transport logistique pour la région Ile-de-France.
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ANNEXES
141
Fonds de compensation
: l’article 21 de la loi du 12 janvier 2010,
prévoit qu’un fonds de compensation peut être mis en oeuvre afin
d’assurer « le financement des coûts nets liés aux obligations de service
universel ». Si ce fonds est décidé, il sera financé par « les prestataires de
services postaux titulaires de l’autorisation prévue à l’article L. 3 » du
Code des postes et des communications électroniques. La contribution de
chaque prestataire sera calculée au prorata du nombre d’envois postaux
acheminés dans le champ du service universel.
Portage de presse
: deuxième canal de distribution de la presse,
qui s’ajoute à celui du courrier. Certains éditeurs de presse ont créé leur
propre réseau de distribution (sur liste d’abonnés), Néopress est la filiale
de La Poste spécialisée dans le portage.
Produit net bancaire (PNB)
:
Le PNB est la différence entre les
produits bancaires et les charges bancaires (activité de prêt et d’emprunt ;
opérations sur titres, change, marchés dérivés…). Il mesure la
contribution spécifique des banques à l’augmentation de la richesse et
peut en cela être rapproché de la valeur ajoutée dégagée par les
entreprises non financières. Depuis 1993, le calcul du PNB intègre les
dotations ou reprises de provisions sur titres de placement.
Publicité
non adressée
(PNA)
:
totalement
ouverte
à
la
concurrence, correspond à la distribution de messages sans référence
personnelle, sans adresse et sans nom, par opposition à la publicité
adressée. Ces plis ne nécessitent ni collecte, ni tournée quotidienne de
distribution.
Royal Mail
: Opérateur postal historique au Royaume-Uni.
Secteur en concurrence domestique et import
: envois de
correspondance intérieure ou en provenance de l’étranger et distribués sur
le territoire français, dont le poids est supérieur à 50 g et dont le prix est
supérieur à deux fois et demi le tarif de base. Il s’agit d’un secteur
concurrentiel.
Secteur réservé
: correspond, depuis le 1
er
janvier 2006, aux
envois de correspondance intérieure ou en provenance de l’étranger et
distribués sur le territoire français, y compris ceux assurés par courrier
accéléré, dont le poids ne dépasse pas 50 g et dont le prix est inférieur à
deux fois et demi le tarif de base. Pour l’heure en monopole, ce secteur
sera soumis intégralement à la concurrence au 1
er
janvier 2011.
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142
COUR DES COMPTES
Service universel postal
: est défini dans la directive postale .Le
service universel postal français constitue une
plus large série de services
que les opérateurs postaux doivent fournir, y compris dans les zones très
rurales. Ces obligations sont la levée et la distribution en tout point du
territoire, au domicile même du destinataire, 6 jours sur 7 (la directive
prévoyant au moins cinq jours ouvrables par semaine).
Titres (règles IFRS de comptabilisation) :
On distingue, dans le
cadre des normes IFRS, trois catégories de titres, dont les règles de
comptabilisation différent.
-
Les titres à la juste valeur par contrepartie du compte de
résultat
sont détenus à des fins de transactions, c’est-à-dire
acquis dès l’origine avec l’intention de les revendre ou de les
racheter à brève échéance. Les variations de valeur de marché
(gains ou pertes nets) de ces titres sont enregistrées dans le
résultat à chaque arrêté des comptes ;
-
Les titres détenus jusqu’à l’échéance
sont des titres que
l’entreprise a l’intention et la capacité de conserver jusqu’à leur
échéance. En date d’arrêté des comptes, ils sont évalués au coût
amorti ;
-
Les titres disponibles à la vente
comprennent, par défaut, les
actifs financiers non classés dans les catégories précédentes.
Les variations de la valeur de marché de ces titres (gains ou
pertes latents) sont enregistrées dans les capitaux propres.
TNT
: Opérateur postal historique aux Pays-Bas.
Vigik :
Système d’accès par badges magnétiques aux immeubles
qui implique pour les utilisateurs d’obtenir au préalable une autorisation
du syndic de copropriété pour pénétrer dans l’immeuble et de se doter des
équipements appropriés leur permettant de programmer leur passage dans
l’immeuble.
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ANNEXES
143
Annexe
3
Synthèse du rapport public particulier
de la Cour des comptes publié en octobre 2003
« Les comptes et la gestion de La Poste
(1991-2002) »
1.
Synthèse du rapport de la Cour
Face
à
l’ouverture
prochaine
des
marchés
postaux
à
la
concurrence, la Cour constate que La Poste a accompli des efforts
d’adaptation significatifs mais que ces évolutions ont été beaucoup plus
lentes que celles de ses concurrents, en particulier les postes allemande et
néerlandaise qui se sont vigoureusement préparées en vue de l’ouverture
des marchés (quitte à s’appuyer sur un prix du timbre élevé) et que le
retard relatif de La Poste s’est donc accru.
L’écart sensible avec ses concurrents traduit une rentabilité
intrinsèquement insuffisante de l’établissement : La Poste n’a pas été en
mesure de dégager entre 1991 et 2002 des résultats qui lui auraient permis
de générer les capitaux propres nécessaires à sa croissance. Cette situation
reflète également des choix de l’Etat : son souci prédominant à été celui
d’assurer l’équilibre des comptes, objectif qui ne peut suffire à créer les
conditions du développement d’une entreprise compétitive dans un
contexte de concurrence croissante.
Le retard vis-à-vis des concurrents concerne tous les secteurs
d’activité de La Poste. Tout d’abord, La Poste, à la différence de ses
concurrents, est encore très dépendante de son activité courrier (qui
représente 59% de son chiffre d’affaires, soit près du double de ses
principaux concurrents) dans un contexte de baisse inexorable des
volumes de correspondance, que les hausses tarifaires ne pourront
qu’atténuer temporairement en termes de résultats.
Pour ce qui concerne l’activité colis, La Poste n’a pu s’engager
qu’avec retard par rapport à ses concurrents dans la bataille nécessaire
pour acquérir une dimension internationale. Même si les résultats
commencent à être positifs, selon la Cour ils ne seront pas suffisants pour
compenser le déclin attendu du courrier, en raison de la concurrence qui
caractérisera le secteur du colis dans les années à venir.
La Cour prévoit une évolution similaire pour les services
financiers : certes ils devraient contribuer positivement aux résultats du
groupe dans les années à venir mais les performances de La Poste restent
faibles en la matière par rapport aux banques concurrentes. A cela
s’ajoute la vulnérabilité de l’activité bancaire en raison du vieillissement
et du non renouvellement de sa clientèle, et des coûts attachés à la
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144
COUR DES COMPTES
fonction sociale qu’elle assure à l’égard des populations défavorisées.
D’où la conclusion que les services financiers ne seront pas en mesure, à
eux seuls, de compenser la dégradation du courrier.
La Cour pointe plusieurs handicaps permettant d’expliquer les
retards importants de La Poste en termes de performances par rapport aux
autres opérateurs européens :
-
Des charges de personnel très élevées. Cette situation est
aggravée par le poids plus élevé que représentent les dispositifs
qui s’appliquent à La Poste en matière de charges sociales et de
retraite.
-
Une organisation encore complexe, lourde et coûteuse, avec un
important retard de modernisation des outils de production,
notamment dans le domaine du courrier, ce qui se traduit par
des sureffectifs, des charges élevées et une qualité de service
globalement très médiocre ;
-
Un réseau territorial hypertrophié, de plus en plus décalé par
rapport aux besoins des populations et beaucoup plus coûteux
que ceux de ses concurrents.
La Cour souligne la nécessité pour La Poste de modifier
radicalement cette situation dans les années à venir.
La Cour considère que La Poste ne peut y parvenir toute seule et
que l’Etat doit jouer un rôle fondamental. Le bilan des contrats de plan
entre La Poste et l’Etat de la période 1991-2001 montre que ceux-ci ont
souffert de très sérieuses faiblesses en matière de fixation d’objectifs et
d’indicateurs de performance. La Cour recommande de définir le cadre
d’action de La Poste pour l’avenir de manière plus précise et plus durable.
La clarification nécessaire des relations entre l’Etat et La Poste concerne
un vaste ensemble de domaines :
La définition, et le cas échéant le financement des missions
d’intérêt général. La Cour considère que l’Etat devrait notamment
sortir de l’ambiguïté quant à la mission d’intérêt général qui
s’attache à la présence postale sur le territoire et accompagner la
nécessaire
refonte
du
réseau,
en
définissant
des
normes
d’accessibilité et les règles de financement applicables au réseau
résultant de leur mise en oeuvre ;
Le champ d’action de La Poste en matière de services financiers.
La Cour préconise un élargissement de la gamme des activités ;
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ANNEXES
145
Le financement des retraites, avec la nécessité de trouver des
modalités d’allègement équilibrées ;
L’allègement des charges sociales ;
Le cadre juridique dans lequel opère La Poste.
La Cour considère que la définition d’un nouvel équilibre dans les
relations entre l’Etat et La Poste peut donc emprunteur divers
canaux, sans qu’il soit nécessaire de les utiliser tous. Par contre, la
Cour souligne que le soutien apporté à La Poste doit être calculé de
façon à l’inciter fortement à se réformer et moderniser.
2.
Réponse du Ministre de l’économie, des finances et de
l’industrie
Le Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie indique
avoir pris en compte les recommandations de la Cour dans le contrat de
plan à venir, notamment en matière de clarification des relations entre
l’Etat et La Poste.
Il reconnaît également la nécessité de repenser les critères et les
modalités d’évaluation des performances de La Poste.
3.
Réponse du Président de La Poste
Le Président de La Poste, dans sa réponse, indique que La Poste a
pris quatre engagements pour relever les défis auxquels le groupe est
confronté.
Quatre engagements :
-
Améliorer la qualité, enrichir l’offre et développer l’esprit de
service au sein de l’entreprise, afin notamment d’adapter les
caractéristiques de ses offres aux besoins réels des clients.
-
Développer la compétitivité à travers une amélioration de la
productivité, l’innovation, l’accroissement de la responsabilisation
des postiers et de leur autonomie de gestion, une stratégie de
partenariats pour répondre à l’internationalisation des marchés.
-
Faire du réseau des bureaux de poste un réseau de proximité
accessible à tous et attractif (notamment en matière d’offre de
services financiers).
-
Accroître la modernité sociale et renforcer la cohésion dans le
cadre d’un nouveau contrat social.
Le Président de La Poste précise que La Poste a déjà ouvert quatre
chantiers correspondant à ces engagements. Il reconnaît le caractère vital
de l’accompagnement de l’Etat pour mener cette transformation.
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146
COUR DES COMPTES
Annexe 4 – Les grands conflits sociaux à La Poste
Printemps 1899
: les fonctionnaires n’ayant pas encore le droit de
grève, la grève est une première. La grève ne concerne que les postiers
parisiens, mais elle affecte le pays entier dont l’ensemble du courrier
transite par les gares parisiennes. La troupe intervient ; de nombreuses
révocations sont décidées.
Avril 1906
: d’abord pour des revalorisations salariales, puis de
mars à mai 1909 pour des avancements de carrière, les facteurs parisiens
lancent le mouvement et sont rejoints par ceux des villes de province ;
plusieurs centaines de révocations.
Août 1953
: 22 jours de blocage pour des demandes de
revalorisation conduisent à la réquisition des postiers pour assurer la
continuité des distributions.
Octobre à décembre 1974
: la grève se répand dans les centres de
tri ; l’ensemble des échanges, des communications et des transactions est
arrêté. Malgré la mise sur pied de circuits de secours, la grève conduit à
un vrai blocage du pays.
Automne 1988
: les « camions jaunes » bloquent l’accès aux
centres de tri et paralysent le système.
Novembre à décembre 1995
: la dernière grève postale
paralysante pour le pays, l’arrêt des centres de tri affecte des pans entiers
de l’activité économique.
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ANNEXES
147
Annexe
5
Comparaisons entre les opérateurs
postaux européens
Résultats des opérateurs postaux européens
M€
La Poste
2003
2007
2008
2009
CA
18 004
20 778
20 799
20 527
REX
310
1 306
886
757
Marge opérationnelle
1,72%
6,29%
4,26%
3,69%
Résultat net
202
943
529
531
Résultat net / CA
1,12%
4,54%
2,54%
2,59%
Effectifs 2008 (ETP)
295 742
Deutsche Post
2003
2007
2008
2009
CA
40 017
54 043
54 474
46 201
REX
2 975
2 133
-966
231
Marge opérationnelle
7,43%
3,95%
-1,77%
0,50%
Résultat net
1 309
1 383
-1 688
644
Résultat net / CA
3,27%
2,56%
-3,10%
1,39%
Effectifs 2008 (ETP)
451 515
TNT
2003
2007
2008
2009
CA
11 866
11 017
11 152
10 402
REX
767
1 192
982
648
Marge opérationnelle
6,46%
10,82%
8,81%
6,23
Résultat net
300
986
556
281
Résultat net / CA
2,53%
8,95%
4,99%
2,70%
Effectifs 2008 (ETP)
114 493
Source : Cour des comptes d'après les rapports publics des opérateurs
postaux et La Poste
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148
COUR DES COMPTES
Les tableaux ci-dessus illustrent les points suivants :
-
La Poste a entrepris à partir de 2003 une modernisation de
l’organisation de son activité courrier et des efforts de gains de
productivité. Ces mesures ont été plus tardives que chez
Deutsche Post DHL et TNT. A la suite de la réunification
allemande, la Deutsche Post a dû absorber la Poste est-
allemande. Elle a donc procédé à des restructurations massives
dès le début des années 1990 pour améliorer ses résultats. Cette
restructuration a dégagé toutes les conséquences permises en
termes de productivité par des investissements majeurs
d’automatisation des processus de traitement du courrier. Grâce
aux résultats dégagés suite à ces restructurations et à
l’augmentation du prix du timbre, la Deutsche Post s’est lancée
dans une série d’acquisitions (achat de 132 compagnies en 10
ans) qui lui ont permis de constituer un réseau européen de
l’express
107
. De son côté, le groupe TNT a largement recours au
temps partiel afin de réduire ses coûts salariaux. Sur un effectif
de 54 375 agents aux Pays Bas en 2007, 69% travaillent à
temps partiel, ce qui est permis par le niveau élevé de
mécanisation du tri du courrier, aujourd’hui supérieur à 95%.
-
Les résultats d’exploitation de TNT et Deutsche Post DHL ont
fortement décliné à compter de l’exercice 2008. S’agissant de
Deutsche Post DHL, outre l’impact de la réduction des volumes
du courrier et de la crise économique, se sont ajoutées les
difficultés
conjoncturelles
consécutives
à
son
aventure
américaine qui sont largement à l’origine des résultats et de la
marge opérationnelle négatifs enregistrés sur l’exercice 2008.
Les résultats de Deutsche Post DHL se sont d’ailleurs redressés
au cours de l’exercice 2009 ;
-
Un rapprochement consécutif des performances de La Poste
avec ces deux opérateurs européens, tant au niveau de la marge
opérationnelle que de la marge nette. Ce rapprochement doit
néanmoins être nuancé au regard du fait que les gains de
productivité de La Poste demeurent inférieurs à ceux de ses
concurrents dans le domaine du courrier (voir supra) et que
l’endettement du groupe est très supérieur à celui de ses
concurrents. Il doit également l’être au regard du fait que le
107) La Deutsche Post a ainsi racheté Ducros en France, Securicorp, Danzas pour
aller plus loin dans la constitution d’un réseau routier, maritime et aérien, DHL pour
assurer du transport express en porte-à-porte international ...
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ANNEXES
149
recul des performances de Deutsche Post DHL est largement
imputable à son échec sur le marché domestique de l’express
aux Etats Unis ;
-
La mise en oeuvre de programmes de réduction des charges
opérationnelles, notamment à partir de l’exercice 2009, pour
faire face aux conséquences de la crise économique et de la
réduction des volumes du courrier. Ce programme a été d’une
ampleur très importante pour Deutsche Post DHL (permettant
d’économiser 1,1 Md€ sur l’exercice 2009). Les réductions de
coûts se sont élevées en 2009 à 527 M€ s’agissant de TNT et à
395 M€ s’agissant de La Poste
108
.
108) Les charges opérationnelles de La Poste ont reculé de 307 M€ sur l’exercice
2009
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150
COUR DES COMPTES
Annexe
6
Les parts de marché des services
financiers et de La Banque Postale
Les parts de marché des services financiers et de La Banque Postale
dans la collecte (en encours)
Fin d'année, en %
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Dépôts à vue
9,4
9,1
8,7
8,6
8,5
9
8,9
Epargne
(hors titres en direct)
9,2
9,1
8,8
8,5
8,7
9,1
8,7
dont -
Livrets et comptes d’épargne
13,9
13,7
13,5
13,3
13
12,9
12,3
-
OPCVM
3,6
3,5
3,3
2,9
3,3
3,6
3,1
-
Assurance vie
8
8
7,8
7,8
7,9
8,3
8,3
Les parts de marché des services financiers et de La Banque Postale
dans les crédits à l’habitat
Fin d'année, en %
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
En encours
4,2
4,2
3,8
3,6
3,8
4,1
4,6
Dans les crédits nouveaux
3,8
4,2
3,1
3,4
4,6
6,3
8
Source : La Banque Postale
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ANNEXES
151
Annexe
7
Les étapes de la libéralisation
Pour permettre le financement du service universel, la directive
postale communautaire autorise le maintien de droits exclusifs au profit
de l’opérateur historique. Celui-ci conserve ainsi un monopole transitoire,
dénommé le « secteur réservé » dont le périmètre a été progressivement
réduit en quatre étapes par les directives 97/67/CE du 15 décembre 1997,
2002/39/CE du 10 juin 2002 et 2008/6/CE du 20 février 2008 :
- 1999 : le secteur réservé est limité aux services nationaux et
transfrontaliers d'envois de correspondance, que ce soit par courrier
accéléré ou non, y compris le publipostage, d'un poids inférieur à 350
grammes et dont le prix est inférieur à cinq fois le tarif applicable à un
envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie
normalisée la plus rapide (tarif de base) ;
- 1
er
janvier 2003 : le secteur réservé est limité aux envois de
correspondance (courrier adressé des ménages et des entreprises,
domestique ou provenant de l’étranger) de moins de 100 grammes et à un
prix inférieur à trois fois le tarif de base dans la limite de un euro
maximum ;
- 1
er
janvier 2006 : la limite poids-prix du monopole postal est abaissée à
50 grammes et à deux fois et demi le tarif de base ;
- 1
er
janvier 2011 : les services postaux sont totalement ouverts à la
concurrence (suppression de tout secteur réservé).
Plusieurs Etats avaient, eux, anticipé soit par une ouverture
complète de leur marché, soit par une libéralisation partielle, comme
l’exclusion du monopole du service réservé de la publicité adressée.
Date de libéralisation des marchés postaux européens
Marchés totalement ouverts
Suède
(1993),
Royaume-Uni
(2006),
Allemagne (1
er
janvier 2008), Pays Bas
(1
er
avril 2009)
Libéralisation
partielle
préalablement à l’échéance du
1
er
janvier 2011
Espagne (courrier intra-urbain) et Italie
(publicité adressée)
Libéralisation complète prévue
à l’échéance du 31/12/2010
Autriche, Belgique, Danemark, Espagne,
Estonie, France, Hongrie, Irlande, Italie,
Portugal, Slovénie
Source : Rapport d’activité 2008 de l’ARCEP
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152
COUR DES COMPTES
Annexe 8 – Etat de la concurrence sur les différents
segments de marché en 2008
Envois de correspondance
• Secteur réservé = La Poste conserve jusqu’au 31 décembre 2010
le monopole pour toute correspondance d’un poids inférieur à 50gr et
affranchie à moins de deux fois et demi le tarif de base.
• Secteur en concurrence =
Tous les envois de correspondance
distribuée sur le territoire français dont le poids est supérieur à 50g et
dont le prix est supérieur à deux fois et demi le tarif de base sont ouverts
à la concurrence. Acteurs
: La Poste et une dizaine d’acteurs représentant
moins de 1% de part de marché.
• Courrier international sortant, export =
Segment ouvert à la
concurrence depuis 1999 pour toutes tranches de poids. Acteurs
: La
Poste, dont la part sur ce marché dépasserait toujours 80% ; des filiales
des postes européennes (Belgian Post, Deutsche Post, Royal Mail,
Spring, Swiss Post), quelques opérateurs postaux alternatifs (IMX, Let
France Routage) dont la part de marché est marginale.
Colis
• Colis « ordinaires » :
Marché ouvert à la concurrence mais
partiellement régulé (le service universel garantit qu’une offre de colis
jusqu’à 20 kg en envoi ordinaire ou en recommandé soit disponible au
public à l’unité sur tout le territoire). Acteurs
:
ColiPoste, dont la part de
marché s’élèverait à 70% environ ; Distrihome (créé en 1993 et racheté
par Adrexo
,
en 2008), Kiala, Mondial-Relay (filiale des Trois Suisses),
Sogep (filiale de la Redoute)…
• Colis express :
Marché complètement ouvert à la concurrence.
Acteurs
: La Poste (via Chronopost International, Exapaq), DHL, GLS
France, TNT Express …
Publicité non adressée (PNA) :
Totalement en concurrence, ce
marché correspond à la distribution des messages sans référence
personnelle, sans adresse et sans nom. Deux acteurs principaux
:
La Poste
(via Mediapost qui détiendrait une part de marché de 45% environ en
volume mais de 53% en termes de chiffre d’affaires) ; Adrexo (part de
marché de 45% en volumes).
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ANNEXES
153
Annexe
9
Points de repère juridiques sur
l’ouverture du marché postal à la concurrence
1) L’ouverture totale du marché aura lieu, en droit, au 1er janvier
2011. A cette date, il y a disparition des secteurs réservés des prestataires
de service universel postal, leurs surcoûts éventuels pouvant être
compensés par d’autres mécanismes que le monopole.
2) La Poste est le prestataire du service universel postal pour une
durée de 15 ans (article 10 de la loi de février 2010)
L’autorité de la concurrence a considéré, dans son avis du 20
Octobre, qu’il n’y avait pas de raison de remettre en cause cette durée,
dans la mesure où les prestations du service universel doivent être
proposées à des prix « abordables «
et « orientés sur les coûts », ce qui ne
permet pas d’amortir les investissements sur un durée plus courte
3) Conformément aux obligations de la directive
postale de
1997 (article 11 bis modifié par la directive de 1998) le code des postes et
télécommunications (articles L3-1 et L3-2 et article L5-2) fixe les
conditions transparentes et non discriminatoires dans lesquelles les
opérateurs postaux accèdent aux différents moyens (boite, codes,
répertoire, changements d’adresse etc..) .Cette transposition était une
obligation de la directive.
La garantie d’accès au réseau postal est, elle, une faculté pour les
Etats et la France, comme la plupart des Etats européens ne l’a pas
utilisée. La régulation de l’accès au réseau n’est, en effet, pas considérée
comme nécessaire à l’émergence de concurrents.
4) De manière générale, aucune décision des autorités de
concurrence nationale ou européenne n’a jusqu’à présent considéré le
réseau postal comme une infrastructure essentielle. Les quatre conditions
fixées par la jurisprudence ne paraissent pas établies au moins pour deux
d’entre elles : l’infrastructure n’est pas indispensable à l’exercice d’une
activité concurrente et elle peut être reproduite dans des conditions
économiques raisonnables. Aussi bien certains secteurs (express et colis,
par exemple ) sont complètement ouverts à la concurrence, ce qui montre
bien que celle ci peut s’exercer indépendamment de l’accès au réseau qui
n’a donc pas la caractéristique d’ une infrastructure essentielle.
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154
COUR DES COMPTES
5) Les conditions d’une concurrence « équitable » continueront
d’exiger un contrôle tarifaire et comptable de La Poste.
Un opérateur historique peut être tenté, dans certains segments
du marché par des tarifs trop bas autorisées par des subvention croisées
entre missions de service universel et secteurs concurrentiel. Il
s’exposerait alors à des plaintes pour abus de position dominante si les
prix ne sont pas « abordables », « orientés sur les coûts » et si les tarifs ne
sont pas « transparents et non-discriminatoires ».
6) Le mécanisme de compensation des surcoûts nets des missions
de service public doit être équitable.
Les financements supplémentaires de ces missions de service
public par rapport au service
postal universel doivent être neutres du
point de vue de la concurrence (Avis du conseil de la concurrence 03 –A
06 2003).
Si une surcompensation était organisée, en allant au-delà de ce
qui est nécessaire pour couvrir des couts raisonnables (arrêt Altmark du
54 juillet 2003) elle pourrait conduire les autorités
de la concurrence
saisies d’un contentieux à une requalification de ces aides en aides d’État.
Il faut d’ailleurs souligner que le fait que peu d’entreprises sont
comparables
aux
opérateurs
postaux
n’empêcherait
pas
cette
requalification (CJCE Chronopost 2003 ; TPICE Bupa 2008).
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155
Annexe 10 – Ménages ayant accès à internet
Evolutions au sein de l’Union européenne des ménages ayant
un accès internet à domicile
%
2002
2009
Union européenne
nc
65
Pays-Bas
58
90
Luxembourg
40
87
Suède
nc
86
Danemark
56
83
Allemagne
46
79
Royaume-Uni
50
77
France
23
63
Source : Eurostat, « internet in usage in 2009 »
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156
COUR DES COMPTES
Annexe
11
Les objectifs de la qualité de service
pour le service universel
Aux termes de l’article R. 1-1-8 du code des postes et communications
électroniques (CPCE), le ministre chargé des postes arrête des objectifs de
qualité applicables aux prestations du service universel, qui portent sur la
rapidité et la fiabilité avec lesquelles ces prestations sont assurées. Ces
objectifs ont été fixés, pour la première fois, en 2008 par un arrêté du 22
juillet, puis en 2009, par l’arrêté du 8 juin 2009.
Les objectifs liés à la fiabilité ainsi qu’aux délais d’acheminement et
de traitement des réclamations sont les suivants :
• Lettre prioritaire :
83% des envois en J+1 ; 95,5% des envois en
J+2 ;
• Courrier transfrontière communautaire :
88% des envois en
J+3 ; 97% en J+5 ;
• Colissimo guichet :
86% des envois en J+2 ; 95% des envois en
J+3 ;
Traitement des réclamations :
90% de taux de réponse aux
réclamations concernant le courrier domestique dans un délai de 21 jours ;
• Perte des lettres recommandées :
mesure des pertes.
La Poste doit procéder périodiquement à des mesures de la qualité des
services en recourant à des méthodes normalisées sur le plan européen ou
national et porter ces résultats à la connaissance des usagers et de l’Autorité
de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). A la
demande de l’ARCEP, La Poste publie annuellement depuis 2006 ces
informations dans un tableau de bord du service universel.
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157
Annexe
12
L’organisation commerciale au sein de
La Banque Postale et de l’Enseigne
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Annexe 13 – Historique de l’évolution de
l’actionnariat de CNP Assurances
La CNP était à l’origine une direction de la Caisse des dépôts et
consignations, chargée de l’activité d’assurances de personnes. En 1987, la
CNP a été transformée en établissement public à caractère industriel et
commercial (EPIC), puis en 1992, en société anonyme sous le nom de CNP
Assurances. A cette occasion, les réseaux distributeurs, La Poste et le réseau
des caisses d’épargne et de prévoyance sont rentrés au capital de CNP
Assurances au côté de l’Etat et de la CDC. Le capital de CNP Assurances
était détenu à hauteur de 42,5% par l’Etat, de 30% par la Caisse des dépôts
et consignations, de 17,5% par La Poste et de 10% par les caisses d’épargne.
En 1998, le groupe CNP Assurances est introduit en bourse, tout en
conservant son appartenance au secteur public. Le décret n°98-619 du 20
juillet 1998 autorisant l’ouverture minoritaire du capital précise que la
participation publique au capital de CNP Assurances doit être d’au moins
61%. Cette introduction en bourse s’accompagne d’un changement
significatif de la composition du capital de CNP Assurances, la CDC
devenant le premier actionnaire en lieu et place de l’Etat, celui-ci cédant la
presque quasi-totalité du capital qu’il détient au bénéfice des trois autres
actionnaires.
Un pacte d’actionnaires a été conclu, le 2 septembre 1998
109
, entre
l’Etat, la CDC, La Poste et le réseau des caisses d’épargne. Ce pacte
d’actionnaire, complété de plusieurs avenants, vient à échéance au 31
décembre 2015.
En 2000, le groupe des caisses d’épargne a porté sa participation au
capital de la société à 18%. Pour ce faire, la CDC et La Poste ont cédé au
groupe des caisses d’épargne respectivement 3% et 2% du capital de CNP
Assurances, le solde étant acquis auprès de l’Etat pour 0,5%. Les deux
participations de La Poste et de la Caisse Nationale des caisses d’épargne
ont été regroupées dans une holding commune, Sopassure, gérée
paritairement mais qui appartient au secteur public, La Poste y détenant la
majorité (50,1% des actions). Sopassure détient 35,48% du groupe CNP
Assurances.
109) Pacte d’actionnaires conclu entre l’Etat, la CDC, le Centre National des caisses
d’épargne et de prévoyance et La Poste le 2 septembre 1998. Le préambule de ce
pacte d’actionnaires stipule que les signataires, dans la perspective du transfert au
secteur privé d’une partie du capital de la Société et de l’introduction en bourse des
titres de CNP Assurances, ont souhaité « manifester leurs intentions de réaffirmer leur
affectio societatis en tant qu’actionnaires de la société, de rester durablement au
capital de la société, d’assurer le maintien de la société dans le secteur public et de
mettre en oeuvre une politique commune relative à la société (…) ».
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REPONSE DU MINISTRE DE L’ECONOMIE,
DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI
Le rapport public thématique de la Cour intitulé « La Poste : un
service public face à un défi sans précédent, une mutation nécessaire »
appelle de notre part les observations suivantes.
1. Pour ce qui concerne, tout d’abord, les constats faits par la
Cour sur la période 2003-2008, le projet de rapport met, à juste titre,
l’accent sur l’ampleur de l’effort de transformation accompli par le
groupe La Poste entre 2003 et 2009. La période 2003-2007 a vu un
formidable rattrapage de la rentabilité de La Poste, dont le résultat
d’exploitation a été multiplié par plus de quatre. Historiquement très
basse, la marge opérationnelle du groupe s’est rapprochée de celle des
comparables du secteur, grâce à des améliorations profondes réparties
sur l’ensemble des métiers. La période 2008-2009 a confirmé la solidité
financière du groupe, qui a su mieux résister à la crise que la plupart des
ses concurrents.
Cette performance est le fruit d’une adaptation rapide aux
changements de l’environnement et d’un « modèle postal » reposant sur
plusieurs métiers complémentaires, co-utilisateurs d’un réseau de points
de contacts unique en France, modèle dont je ne pense pas qu’on puisse
le qualifier d’« obsolète » au regard des résultats obtenus par
l’entreprise.
Elle résulte également, comme votre rapport le souligne, d’un
soutien fort de l’Etat en faveur de la modernisation de l’entreprise. La
réforme des retraites était une condition nécessaire pour améliorer
l’équité concurrentielle de La Poste dans une perspective d’ouverture des
marchés. Si elle s’est traduite à court terme par un alourdissement de la
dette du Groupe, cette réforme a permis à La Poste de résorber un de ses
principaux handicaps concurrentiels. Par ailleurs, l’Etat a également
permis la création de La Banque Postale, après accord de la Commission
européenne, et, dans les années qui ont suivi, l’extension de sa gamme au
crédit à la consommation puis à l’assurance-dommage et, demain, au
crédit aux entreprises. Aujourd’hui, LBP peut rivaliser avec les autres
banques de réseau sans pour autant renier sa mission historique de
« banque pour tous » à travers sa mission d’accessibilité bancaire en
particulier et l’attention portée à l’accompagnement et à l’information du
client dans tous ses nouveaux produits en général.
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Le métier historique de La Poste, le Courrier, a fait la preuve de
sa capacité à générer des gains de productivité, grâce à la mise en place
d’un outil industriel moderne (programme « Cap qualité courrier ») et à
l’optimisation de l’organisation interne de la distribution (programme
« Facteur d’avenir »). L’enjeu des prochaines années sera, comme la
Cour l’a bien noté, la capacité de ce métier à faire face à la baisse
accélérée des volumes et à l’ouverture totale à la concurrence au
1
er
janvier 2011.
S’agissant de La Banque Postale, malgré un léger retard sur le
plan d’affaires présenté au CECEI en 2005, la croissance de LBP a été
tout à fait remarquable. Son produit net bancaire a cru de 13 % entre
2006 et 2009 alors que le secteur bancaire était durement touché par la
crise financière. Grâce à une gestion prudente de ses emplois, LBP a été
la banque française qui a le mieux résisté à la crise et n’a pas eu besoin
de recourir aux concours publics mis en place en faveur des
établissements de crédit. A cet égard, il me semble devoir relativiser le
constat de la stagnation du produit net bancaire entre 2006 et 2008 au
regard des performances des autres grandes banques de la place sur
cette même période. Pour l’avenir, la conjonction des gains de parts de
marché sur les nouveaux produits (crédit à la consommation notamment)
comme sur le crédit immobilier, ainsi que la progression du taux
d’équipement des clients, devraient assurer à LBP une croissance
soutenue dans les prochaines années.
Par ailleurs, il me semble utile de préciser que le choix de recourir
à des co-entreprises pour les partenariats noués par LBP n’est pas la
conséquence indirecte d’une priorité qu’aurait accordée La Poste aux
investissements dans l’activité Courrier, mais résulte du souci de la
banque de minimiser les risques d’exécution dans des nouveaux domaines
d’activité et de permettre le démarrage rapide de ces activités.
Les partenariats n’ont pas encore produit leur plein effet, car ils
devraient contribuer à fortement dynamiser le PNB de LBP à l’avenir.
S’agissant de GeoPost, la Cour regrette que cette activité n’ait pas
pu atteindre une dimension mondiale. Il me semble, au contraire, que le
modèle de développement choisi par cette filiale s’est révélé pertinent et
efficace dans la durée. En donnant la priorité au transport routier des
colis de moins de 30 kg en Europe, GeoPost a su construire un réseau
efficace, plus flexible et beaucoup moins coûteux que ses concurrents qui
ont fait porter leurs investissements sur les flux intercontinentaux.
Cette stratégie a montré une remarquable résistance à la crise dans une
activité très pro-cyclique, avec une baisse limitée de son résultat
d’exploitation (- 2 %) tandis que les opérateurs plus mondialisés étaient
mis en difficulté.
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La Poste a, par ailleurs, su se développer dans les métiers
connexes au courrier. Même si leur contribution aux résultats du
Courrier en 2009 est encore marginale, ces métiers constituent un
véritable relais de croissance face au déclin des volumes du courrier. Ils
prouvent la capacité du Groupe à se repositionner sur des marchés en
croissance.
Enfin, votre analyse du réseau des 17 000 points de contact, que
vous jugez « inadapté et coûteux » me paraît également devoir être
nuancée. Je demeure en effet convaincue que le réseau postal est un des
atouts majeurs du Groupe. La création des points partenariaux a montré
son efficacité pour maintenir une activité commerciale au niveau local,
conserver la même densité de contact avec la population sur tout le
territoire tout en garantissant la distribution des produits du service
universel postal à moindre coût. Cet effort doit être poursuivi dans les
années à venir. Vous soulignez, très justement, que la majeure partie des
coûts du réseau provient des bureaux centres qui, s’ils ne sont pas
maîtrisés, pourront faire peser un déficit de compétitivité sur le
développement des autres métiers. C’est un des enjeux organisationnels
majeurs du Groupe dans les prochaines années.
2. Comme la Cour le relève, 2010 est une année charnière dans
l’histoire du Groupe La Poste. 2010 est l’année du changement de statut
de la maison mère du Groupe, qui est devenue au 1
er
mars une société
anonyme. Cette évolution ouvre la voie à l’entrée au capital de la Caisse
des dépôts et consignations, qui participera aux côtés de l’Etat, à une
augmentation de capital de La Poste à hauteur de 2,7 md€ (dont 1,5 md€
apportés par la CDC et 1,2 md€ apportés par l’Etat). LBP est devenue le
premier contributeur au résultat du Groupe et cette tendance à vocation à
s’amplifier dans les années à venir. LBP bénéficie d’un réseau de
distribution sans équivalent en France et d’une large base de clients
encore peu équipés et avec lesquels elle a réussi à établir une relation de
confiance. La croissance de LBP devrait donc se confirmer grâce
notamment à la montée en puissance de nouveaux produits ainsi que le
développement de nouveaux segments d’activité comme le crédit
notamment aux TPE. Ce dernier développement me semble de nature à
rejoindre une des recommandations figurant dans le projet de rapport de
la Cour. Une demande d’agrément sera déposée par LBP auprès de
l’autorité compétente dans les prochains mois.
Pour la première fois également en 2010, le chiffre d’affaires du
Groupe a baissé légèrement, traduisant l’accélération de la baisse de
volumes du Courrier. Dans le même temps, le Courrier parvenait à
baisser ses charges, montrant l’amélioration de l’adéquation entre l’outil
industriel et les volumes. Les volumes du courrier vont continuer de
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baisser et les usages du courrier évolueront sur le long terme selon une
dynamique largement imprévisible. La Poste fait l’hypothèse d’une baisse
de 30 % d’ici à 2015 par rapport au pic de 2008, ce qui est en ligne avec
les prévisions des autres grands acteurs européens du secteur. Des
stress
tests
sur l’ampleur de la chute des volumes et ses conséquences
éventuelles pourraient néanmoins être utilement documentés par
l’entreprise, comme le suggère votre projet de rapport.
Par ailleurs, si le courrier de gestion qui représentait une grande
partie du chiffre d’affaires est voué à décroître durablement, tous les
segments de ce marché ne subiront pas nécessairement ce sort. Le
marketing direct a prouvé son efficacité dans la communication des
entreprises avec leurs clients ou prospects et devrait entrer dans une
dynamique de croissance forte. De même, La Poste a un rôle à jouer dans
le développement d’offres au confluent des communications papier et
électroniques, voire dans le développement d’un opérateur virtuel de
téléphonie mobile.
S’agissant de l’immobilier, La Poste a su professionnaliser la
gestion de son parc, ce que la création de Poste Immo a permis. Cette
filiale travaille conjointement avec tous les métiers pour optimiser le
parc. La restitution de surfaces à Poste Immo, à des fins de valorisation,
est désormais engagée.
Enfin, La Poste devra poursuivre ses efforts de réduction de
modernisation et d’adaptation à un environnement en évolution
accélérée. L’amélioration de la qualité de service et la poursuite des
créations de points partenariaux doivent se poursuivre pour renforcer
l’image particulièrement favorable dont bénéficie La Poste pour les
Français.
3. Votre projet de rapport aborde, dans sa dernière partie,
l’augmentation de capital à venir qui devrait permettre de financer les
investissements prévus dans le plan d’affaires tout en jugulant
l’endettement du Groupe.
Cette augmentation de capital de 2,7 Md€ sera souscrite à hauteur
de 1,2 Md€ par l’Etat et 1,5 Md€ par la Caisse des dépôts et
consignations (CDC). Elle sera naturellement précédée, comme le
suggère la Cour, de la conclusion d’un pacte d’actionnaires qui prévoira
notamment les nouvelles modalités de gouvernance. Elle sera également
précédée d’un exercice de valorisation du Groupe. A cet égard,
je partage tout à fait votre recommandation de « valoriser La Poste à son
juste prix ». La CDC a commencé depuis mars dernier son travail
d’instruction afin de valoriser le Groupe. Mes services veillent à ce qui
les
due diligence
menées par la CDC se déroulent dans le meilleur cadre
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possible afin de permettre l’évaluation la plus juste de ce groupe multi-
métier. L’effort d’exhaustivité de mise à disposition d’information par La
Poste confirme cette volonté de transparence totale en vue d’une
évaluation au juste prix.
La question des synergies entre La Poste et d’autres participations
de la CDC mérite en effet d’être explorée, ainsi que vous le proposez.
Elle aura, en tout état de cause, vocation à être abordée dans la durée,
avec la connaissance croissante par la CDC des métiers du Groupe
La Poste, et dans le respect des mécanismes de gouvernance des deux
groupes.
S’agissant, enfin, des missions de service public, celles-ci ont
toujours représenté une part importante de l’activité du Groupe, et, par
conséquent, une part importante des coûts. Depuis 2003, l’évaluation du
coût de ces missions a été affinée et des mécanismes de compensation
pérennes ont été mis en place. Les quatre missions ont été réaffirmées
dans la loi postale du 9 février 2010 et la compensation de deux d’entre
elles a été améliorée par ce texte législatif (l’aménagement du territoire
et le service universel postal). L’enveloppe des compensations et la
prévisibilité de celles-ci ne doivent pas créer de biais concurrentiel. A cet
égard, je note la recommandation de la Cour de tirer parti du rendez-
vous de 2013 prévu dans la loi postale pour apprécier à la fois les
opportunités d’adaptation du contenu de ces missions aux besoins du
public mais aussi leur impact sur la situation financière de l’entreprise.
Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer au Président de La Poste, je ne
suis pas favorable à ce qu’il soit mis fin à l’assujettissement de La Poste
à la taxe sur les salaires. Cela représenterait un manque à gagner pour
les finances publiques supérieur à 500 M€ qui ne saurait être compensé
par une révision de la politique de dividende et qui, par ailleurs,
remettrait en cause l’équilibre général de cette imposition.
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RÉPONSE DU MINISTRE CHARGÉ DE L’INDUSTRIE
AUPRÈS DU MINISTRE DE L’ÉCONOMIE, DE L’INDUSTRIE
ET DE L’EMPLOI
Je partage le constat général effectué dans le rapport public de la
Cour des comptes « La Poste : un service public face à un défi sans
précédent, une mutation nécessaire » qui souligne notamment les
évolutions positives intervenues depuis le dernier rapport de synthèse de
la Cour sur la situation de La Poste en 2003 et met en évidence les défis
majeurs auxquels l’entreprise est à présent confrontée.
La création de La Banque Postale, la réforme du financement des
retraites de fonctionnaires de La Poste, l’ouverture progressive à la
concurrence du marché du courrier, ainsi que la mise en place d’un
cadre juridique rénové pour la mise en oeuvre des missions de service
public de l’entreprise, ont constitué des étapes importantes de la
modernisation de La Poste. Sa transformation en société anonyme, depuis
le 1
er
mars 2010, est aussi une condition déterminante de son
développement pour les années à venir en permettant le renforcement de
ses fonds propres.
Depuis 2004, grâce à une amélioration significative de sa
rentabilité d’exploitation, La Poste a engagé d’importants chantiers de
modernisation avec les programmes « Cap Qualité Courrier » et « Cap
Relation Clients », ainsi qu’avec la « métiérisation » de ses activités.
Cette évolution a favorisé une amélioration notable de la qualité de
service du courrier et de l’accueil des clients dans les bureaux de
l’enseigne La Poste. Cette stratégie de modernisation était de toute
évidence nécessaire pour assurer un service public de qualité et doit être
poursuivie et parachevée au cours des prochaines années.
L’ouverture complète à la concurrence des marchés du courrier en
2011 et les perspectives de forte baisse des volumes de courrier ont
cependant rendu nécessaire la définition d’un nouveau plan stratégique
pour la période 2010-2015 et d’une nouvelle trajectoire financière, qui
ont
été
approuvés
par
le
conseil
d’administration
du
groupe
le 15 avril 2010. La trajectoire 2010-2015 repose sur les ambitions
suivantes concernant le groupe La
Poste et ses différents métiers.
Entre 2010 et 2015, le chiffre d’affaires consolidé du groupe (hors
croissance externe) devrait croître de manière très modérée (+ 0,9 % par
an) pour atteindre 21,9 milliards d’euros en 2015. Depuis l’année 2008,
La Poste est en effet confrontée à un « choc numérique » induisant une
baisse très sensible du trafic du courrier (prévision de baisse de 5 % par
an jusqu’en 2015).
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Dans le contexte de forte baisse de trafic du courrier, au cours des
prochaines années, la rentabilité d’exploitation du groupe dépendra
essentiellement, au sein de La Poste maison-mère, de la branche
ColiPoste (branche non filialisée de La Poste), ainsi que de la croissance
de ses principales filiales, en premier lieu de la Banque Postale, mais
également de GeoPost, filiale de colis-express.
Avec le développement du commerce électronique, les prévisions
de croissance de la branche Coliposte (branche non filialisée de La
Poste) sont satisfaisantes, avec une prévision de croissance de 4 % par
an. Sur ce marché, ColisPoste a réalisé un chiffre d’affaires de près de
1,4 milliards d’euros en 2009.
La stratégie de développement du groupe La Poste dans le
domaine du colis-express en Europe a également été jusqu’à présent bien
maîtrisée. Les prévisions de croissance et d’activité (transport de paquets
et
de
colis
inter-entreprises
généralement
à J + 2)
apparaissent
satisfaisantes pour les prochaines années. Géopost, filiale de La Poste,
dispose de positions commerciales solides en Europe, avec un chiffre
d’affaires global de plus de trois milliards d’euros en 2009 et une
rentabilité correcte. Le renforcement de Geopost en Europe pourrait
apporter un supplément de chiffre d’affaires significatif. La stratégie de
développement de GeoPost hors d’Europe devra être suivie avec une
particulière attention.
Les perspectives de croissance du produit net bancaire (PNB) de
la Banque Postale sont également notables. La croissance de l’activité de
La Banque en 2009 peut être jugée encourageante. Son PNB externe a
dépassé cinq milliards d’euros en 2009 et son résultat net (part du
groupe) a atteint 587 millions d’euros. Le maintien de la rentabilité de la
Banque Postale est un objectif prioritaire pour les années à venir.
Pour assurer sa pérennité, le « modèle postal de banque » doit s’adapter,
afin que la meilleure synergie possible entre les métiers utilisateurs du
réseau postal favorise une réduction des coûts pour l’ensemble des
métiers.
Au cours des prochaines années, le coefficient d’exploitation de la
Banque Postale (ratio des frais d’exploitation sur le produit net bancaire)
devra rejoindre le niveau observé dans les autres banques de détail. Pour
la réalisation de cet objectif, la Banque Postale, outre la progression de
son PNB, devra bénéficier à plein des gains de productivité du réseau
postal et des baisses de coûts.
L’augmentation de capital, prévue à hauteur de 2,7 milliards
d’euros, apparaît par ailleurs indispensable, en complément des
ressources d’autofinancement du groupe La Poste, pour couvrir
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l’ensemble des investissements du plan stratégique 2010-2015 : les
investissements internes des métiers, les opérations de croissance
externe, ainsi que le renforcement des fonds propres prudentiels de la
Banque Postale.
Les années 2010-2015 devraient ainsi être des années de
consolidation financière pour le groupe. Ce n’est qu’en fin de période
que le groupe La Poste pourra escompter une rentabilité aussi forte que
celle observée en 2007 et 2008.
Pour ma part, je serai particulièrement attentif à ce que La Poste
continue d’exercer ses quatre missions de service public avec le même
niveau de qualité et de service au public qu’elle le fait actuellement. Mes
services y veilleront également au quotidien.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT – DIRECTEUR GÉNÉRAL
DU GROUPE LA POSTE
Le rapport de la Cour des comptes
intitulé « La Poste : un
service public face à un défi sans précédent, une mutation
nécessaire »
dresse un bilan positif de l’évolution considérable qu’a
connu le groupe
La Poste de 2003 à 2009 et inscrit ses préconisations
s’agissant de l’avenir dans le cadre du plan ambition 2015 présenté au
conseil d’administration.
La Poste a, en effet, comme le reconnait la Cour, «
beaucoup
changé au cours de cette période. Elle a réussi à franchir des étapes
significatives de sa modernisation
». Elle a également mis à profit la
période 2003-2009, anticipant le déclin à venir des activités courrier,
pour développer ses relais de croissance (développement du réseau
européen de GeoPost, modernisation de ColiPoste, création de La
Banque Postale, conclusion de partenariats pour mettre rapidement en
marché le crédit consommation et l’assurance IARD…)
La crise n’a pas rendu obsolète ce modèle de développement multi-
métiers bien au contraire. En revanche, la baisse des volumes du courrier
impose d’accélérer le rythme de son déploiement.
En effet, l’évolution du poids relatif des activités va se poursuivre
et les réformes structurelles menées par La Poste vont s’amplifier. Le
plan stratégique Ambition 2015 s’appuie sur ce constat. Il se situe ainsi
dans la suite logique de la stratégie menée depuis 2003.
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*
*
*
Dans ce cadre général largement partagé, tout est affaire
d’appréciation, qu’il s’agisse des anticipations effectuées par le
management (aurait-il été possible de mieux prévoir ?), des rythmes de la
modernisation (aurait-il été possible d’aller plus vite ?) ou encore de la
mesure des résultats obtenus.
S’agissant tout d’abord de la période passée, La Poste ne partage
pas le point de vue de la Cour sur certains éléments de constat qu’elle
trouve exagérément sévères.
Concernant en premier lieu le Courrier, la Cour donne certes un
satisfecit global à la politique de modernisation de l’outil industriel et de
flexibilisation des organisations. Elle indique toutefois que celle-ci aurait
gagné dans sa mise en oeuvre à plus d’anticipation et de réactivité.
La
Poste
considère
au
contraire
qu’elle
a
fait
preuve
d’anticipation.
Dans sa conception du plan Cap Qualité Courrier (CQC), tout
d’abord : lorsque ce plan a été lancé fin 2003, il était plus que temps de
s’engager dans la modernisation d’un appareil de production vieilli, de
combler un retard devenu considérable vis-à-vis des autres grandes
Postes européennes, de préparer l’ouverture totale du marché alors
prévue en 2009. Dès ce moment, était anticipée et prise en compte dans le
dimensionnement du plan une baisse des volumes du courrier de 12% sur
la période 2003-2010.
La Poste a également su adapter l’exécution du plan à l’évolution
des volumes.
On rappellera à cet égard que sur la période 2003-2007 la baisse
totale du trafic adressé n’a pas dépassé 2,3%, d’autre part, que sur la
même période il a été très difficile de tirer des conclusions de
l’observation des pays étrangers dont les évolutions de trafic étaient très
disparates, enfin, qu’à la fin 2007 personne ne pouvait anticiper la crise.
Ce n’est que fin 2008-début 2009 qu’un consensus s’est établi entre les
grandes Postes sur un scénario de décroissance à moyen terme plus
rapide.
Confrontée à la baisse accélérée des volumes à partir de la mi-
2008, La Poste a fait preuve de réactivité en adaptant ses budgets et son
projet industriel à la nouvelle donne.
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Dès le deuxième semestre 2008, un plan d’économie a été lancé
pour faire face à la baisse des volumes. Le budget 2009, établi en cours
d’année, intégrait par ailleurs une accélération de la baisse des volumes à
– 3,5%, estimation qui a été revue à – 5,4% au premier trimestre 2009,
en même temps qu’était lancé un programme de réassurance sur les coûts.
Dès la mi-2009, le plan stratégique 2008-2015 a été construit sur
la base d’une baisse des volumes de 30% et le budget 2010 construit en
conséquence.
Le programme CQC a lui aussi été adapté. Sa cible a été ajustée à
plusieurs reprises, y compris en 2009, en cohérence avec la nouvelle
trajectoire stratégique. On trouvera, en annexe, une note faisant un bilan
détaillé de son exécution dont j’extraie ici quelques chiffres qui illustrent
le fait que le programme est déployé à son rythme et produit les résultats
attendus. Ainsi, à fin 2010 :
-
36 plaques couvrant 80% du trafic auront été déployées,
-
76 % de l’investissement initial aura été réalisé et 90% de l’objectif
de productivité atteint,
-
93 % des tournées de facteur feront l’objet d’une organisation en
équipe.
Comme la Cour le reconnait elle-même, le déploiement de CQC a
déjà permis de réaliser des gains de productivité importants et lui seul
permet aujourd’hui et demain l’adaptation des organisations rendues
nécessaires.
S’agissant enfin des résultats de qualité de service, le qualificatif
de « médiocres » apporté par la Cour paraît très exagéré.
Une analyse détaillée de la Qualité de Service figure en annexe à
la présente lettre. On se contentera de noter que le respect des délais de
distribution, mesurés par un organisme indépendant, est en amélioration
constante sur l’ensemble de la gamme de produits et que les objectifs
fixés par le Gouvernement ont été dépassés en 2008 et 2009.
Toutefois, La Poste entend les remarques de la Cour sur la
nécessité de s’interroger sur la qualité de l’offre de service en matière de
courrier.
La recherche d’un haut niveau de qualité est en effet un objectif
essentiel pour La Poste qui doit s’inspirer des pratiques des entreprises
de service, qui prennent des engagements généralement proches de 95%.
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C’est pourquoi La Poste a engagé fin 2009 une large écoute de ses
clients (particuliers, professionnels, petites et grandes entreprises, clients
grands comptes) dont les résultats serviront à connaître leur attentes
contemporaines et les adaptations et innovations qu’elle devra conduire
pour les satisfaire et se positionner parmi les opérateurs les plus
performants en la matière.
*
*
*
Au total, La Poste se félicite d’avoir conçu et déployé le
programme CQC qui lui permet à la fois d’améliorer sa qualité de
service, d’enrichir son offre et de réduire ses coûts.
Elle a adapté ce programme, comme d’ailleurs l’ensemble de ses
budgets, à la nouvelle donne des trafics.
*
*
*
S’agissant de l’Enseigne, en dépit de contraintes multiples que la
Cour rappelle, l’organisation du réseau des bureaux de poste a été
profondément modifiée et dynamisée sur la période :
-
Développement des points de présence postale en partenariat avec
les communes et les commerçants,
-
Réduction des structures territoriales (de 8 directions exécutives à
6, de 100 directions départementales à 49 directions territoriales),
-
Réduction des structures de soutien,
-
Mise en place d’un pilotage par Terrain.
Ces différentes mesures ont permis de maîtriser les charges et de
réduire de 15% les effectifs hors bureaux de Poste, de près de 20%
l’encadrement en bureaux et de ramener à près de 25% le taux de back
office des bureaux.
S’agissant du temps d’attente au guichet, le déploiement du
programme ESC permet de confirmer les premiers résultats que note la
Cour dans son rapport : c’est ainsi que la mesure SOFRES effectuée en
avril 2010 donne un temps d’attente moyen tous bureaux et toutes
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opérations confondues de 5,54 mn en baisse de 23% sur un an, résultat
confirmé par les mesures spécifiques mises en place dans les 1 000 plus
grands bureaux.
Au total, s’il reste encore beaucoup à faire, l’Enseigne progresse
rapidement dans la voie de la modernisation des bureaux de Poste de
l’amélioration de l’accueil des clients et d’une commercialisation
efficace des produits et services des métiers du Groupe.
*
*
*
L’appréciation portée par la Cour sur les relais de croissance que
sont les métiers de la Banque et du colis/express est également bien
sévère.
S’agissant de La Banque Postale, tout d’abord, on rappellera que
sa création début 2006 a constitué pour La Poste un progrès historique.
La Cour elle-même reconnait que la Banque a modernisé ses procédures
et sa gamme de produits et qu’elle est devenue « une banque reconnue
comme telle par le public ». C’est pour l’avenir un atout crucial. Sans
doute la progression du produit net bancaire (PNB) a-t-elle été plus
faible qu’attendu mais c’est avant tout parce que, comme le rappelle
d’ailleurs la Cour, les éléments d’environnement externe ont été modifiés
(en particulier la baisse de la rémunération de l’épargne réglementée).
En dépit de ces éléments adverses, hors variation de la provision
épargne logement, le PNB consolidé de la Banque a progressé de 8,7%
entre 2006 et 2009. De même, le coefficient d’exploitation consolidé à fin
2009 atteignait 86,5%, en retrait de 5% par rapport à 2008 et de plus de
8% par rapport au pro forma 2005 cité par la Cour.
Ces éléments montrent une exceptionnelle résistance à la crise de
La Banque Postale.
Ils montrent également une réelle capacité à exploiter les marges
de manoeuvre ouvertes par la création de La Banque Postale, dont
témoigne par exemple la croissance des parts de marché en matière de
crédit immobilier, dès lors que La Banque Postale a pu se battre à armes
égales avec ses concurrents.
Il convient de rappeler que cette création s’est réalisée sans
aucune aide de l’Etat, seule la quote-part des fonds propres de la CNE
correspondant aux obligations prudentielles du portefeuille immobilier de
celle-ci ayant été apportée en même temps que le dit portefeuille.
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Par ailleurs, le choix de développer les nouveaux métiers (crédit
consommation, IARD notamment) à travers des partenariats n’a
nullement été contraint par une priorité supposée donnée par le Groupe à
d’autres investissements. Il s’est au contraire agi d’un choix tout-à-fait
volontaire et assumé dont le principal objectif était, en s’appuyant sur les
compétences et les moyens de partenaires soigneusement choisis,
d’accélérer la mise en marché des nouvelles offres et de mettre le plus
rapidement possible à la disposition de la clientèle la totalité de la
gamme, conformément à la stratégie de la Banque qui vise, avant tout, à
développer le potentiel de sa clientèle existante.
La Banque dispose ainsi maintenant de la gamme complète de
produits destinés aux particuliers. La Cour souhaite que cette gamme
puisse être étendue au crédit aux personnes morales, en particulier les
TPE. La Poste y est également favorable et étudie actuellement ce dossier
avec l’Etat.
Enfin s’agissant des commentaires de la Cour sur le niveau des
frais de réseau supportés par La Banque Postale, on rappellera, au-delà
des efforts permanents de La Poste pour en stabiliser le niveau, que la
Banque
bénéficie
du
partage
avec
La
Poste
des
coûts
de
dimensionnement de ce réseau.
S’agissant de ColiPoste et GeoPost, la Cour reconnait elle-même
qu’il s’agit de réels relais de croissance.
C’est vrai, non seulement pour
GeoPost dont le positionnement sur le marché de l’express « deferred »
continental lui permet de bénéficier de réelles perspectives de croissance,
mais également pour ColiPoste qui bénéficie du développement
d’internet, la totalité des e-marchands en étant aujourd’hui clients
et lui
confiant entre 70 et 100% de leur chiffre d’affaires.
Le choix, pour cette activité, de développer un réseau intégré en
Europe continentale et des partenariats à l’intercontinental est un choix
stratégique volontaire du Groupe, conforme aux moyens financiers dont
il disposait et non le résultat d’un arbitrage de l’allocation de ressources
fait aux dépens de GeoPost.
En résumé, il me semble que, sur la période considérée, La Poste a
bien mis en place, avec la création de La Banque Postale et la croissance
du colis/express les relais nécessaires à son développement.
Contrairement à ce que laisse entendre la Cour, la réalisation du
plan de modernisation du Courrier (CQC) n’a pas privé La Banque
Postale et l’express des moyens de leur développement.
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Grâce à cette politique multi-métiers, elle se trouve aujourd’hui
dans une situation plus favorable pour absorber les effets des baisses de
volumes du courrier, que d’autres postes qui n’ont pas su se diversifier en
temps utile ou qui l’ont fait avec moins de succès.
*
*
*
Sur la question des missions de service public, enfin, La Poste
partage largement l’analyse faite par la Cour et se félicite que celle-ci
ouvre un certain nombre de pistes de réflexion pour l’avenir. Elle note en
particulier l’importance du rendez-vous fixé en 2013 par le Parlement
dans la loi du 9 février 2010.
Elle souhaite également souligner que la période a été marquée
par de grands progrès en la matière : définition plus précise
des
missions, chiffrage de leur coût, mise en place d’indicateurs de
performance, mise en place de mécanismes de compensation.
Par ailleurs, La Poste partage l’analyse de la Cour sur le
désavantage concurrentiel qu’elle subit du fait de son assujettissement à
la taxe sur les salaires et sa proposition d’éliminer ce handicap.
*
*
*
Le rapport de la Cour envisage, dans sa 2
ème
partie l’avenir de La
Poste.
A titre liminaire, je dirais que je ne partage pas l’appréciation
selon laquelle le groupe La Poste se trouverait aujourd’hui dans une
situation « difficile ».
Les défis sont certes nombreux, mais, comme la Cour le relève
elle-même, La Poste ne manque pas d’atouts pour les résoudre : densité
du réseau, puissance de la marque, confiance des Français, gisement de
clientèle, savoir faire des Postiers…
Sur ces bases, nous pouvons développer une véritable Ambition
pour 2015.
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C’est l’objet de notre plan stratégique.
La Cour, après l’avoir examiné,
affirme que celui-ci est construit
sur des hypothèses
volontaristes
et invite l’Etat à procéder à une
valorisation du groupe La Poste sur la base d’un plan d’affaires
réaliste
.
La Poste souhaite apporter des éléments complémentaires à cette
appréciation portée par la Cour pour souligner la crédibilité de la
trajectoire financière 2010-2015, mais aussi la nécessité d’une ambition
financière répondant aux objectifs de l’Etat et de la Caisse des Dépôts
intervenant en l’espèce comme investisseurs avisés.
Cette ambition ne peut reposer sur la simple prolongation des
tendances passées dont la Cour a d’ailleurs montré qu’elles n’étaient
plus d’actualité. En revanche, l’entreprise doit exploiter un potentiel de
développement reconnu et continuer à rechercher l’amélioration de son
efficacité. Sous réserve d’un contexte général qu’il serait illusoire de
considérer comme figé pour six ans, le plan Ambition 2015 décrit les
impacts en termes de résultats et de plan de financement d’une stratégie
validée par l’Etat dont le management ne sous-estime en aucune façon les
conditions de mise en oeuvre. Aucune entreprise, a fortiori publique, ne
saurait aujourd’hui se départir de cette démarche exigeante.
Un plan d’affaires est par construction un exercice complexe, plus
encore dans le contexte économique et réglementaire actuel.
La Poste a mis à profit l’année 2009 et le début de l’exercice 2010
pour mettre à jour son plan d’affaires compte tenu du décalage qui
existait avec les hypothèses de construction du précédent plan
« Performance et Confiance » et de la nécessité pour l’Etat et la Caisse
des Dépôts de disposer d’un scénario central actualisé pour procéder à
une évaluation de l’entreprise.
La construction du plan repose sur un jeu d’hypothèses dont la
Cour relève d’ailleurs qu’il est cohérent. La réalisation du plan reposera
également sur la mise en oeuvre d’un ensemble de programmes d’action
déjà identifiés et en cours de déploiement dont la Cour a pu prendre
connaissance.
S’agissant du courrier, le plan Ambition 2015 tient compte d’une
baisse du chiffre d’affaires du courrier cohérente avec les tendances
observées depuis 2008 et en 2009, conforme au consensus des principaux
opérateurs postaux, qui confrontent régulièrement leurs analyses dans le
cadre d’International Post Corporation (IPC), et tenant compte des
différences d’utilisation du courrier dans les différents pays (la France a
par exemple une tradition désormais bien établie de paiement par
prélèvement automatique). Les revalorisations tarifaires ont par ailleurs
été prises en compte pour des valeurs modestes et inférieures à celles
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permises par les dispositifs existant. Une baisse du trafic supérieure à
celle retenue par La Poste pourrait ainsi être partiellement compensée
par des revalorisations tarifaires plus ambitieuses. Au total, comme
l’indique la Cour, les hypothèses retenues ne peuvent être qualifiées ni de
pessimistes ni d’optimistes mais de centrales.
Le développement du chiffre d’affaires des activités colis/express a
pour sa part été intégré pour des valeurs inférieures à ce qui a été
enregistré au cours des dernières années. La Cour qualifie elle-même de
raisonnables ces hypothèses qui se contentent de stabiliser à environ 7%
la marge opérationnelle de l’ensemble constitué de ColiPoste et GeoPost,
à comparer à une ambition de 8,5% dans le plan « Performance et
Confiance ». Sauf détérioration majeure des conditions économiques et
des flux commerciaux, le plan d’affaires du colis/express doit donc, lui
aussi, être qualifié de central, des marges d’amélioration étant sans
doute envisageables, en particulier si les baisses de prix provisionnées
dans le plan d’affaires en France et en Europe pouvaient ne pas être
mises en oeuvre.
Le développement des encours bancaires et la progression du
produit net bancaire (PNB) présentent quant à eux une accélération par
rapport à la période qui vient de s’écouler, accélération cohérente avec
le développement d’un potentiel que souligne la Cour dans la première
partie du rapport et en particulier avec la complétude de gamme et
l’émergence des partenariats. Ces partenariats, qui n’ont pas contribué
aux résultats de La Banque Postale dans la période passée, vont
constituer un véritable relais au développement actuel. A ce titre, le
maintien des parts de marché actuelles en termes de collecte d’épargne et
de distribution de crédits immobiliers constitue un enjeu dans un contexte
concurrentiel particulièrement tendu. C’est la raison pour laquelle
aucune ambition spécifique de progression n’a été prise en compte.
S’agissant de la maîtrise des coûts opérationnels et des frais
généraux, le plan d’affaires prend en compte des objectifs d’amélioration
que la Cour juge elle-même nécessaires dans son rapport, en particulier,
la réalisation des gains de productivité inhérents à la mise en oeuvre du
programme CQC et la réduction des coûts de structure dans les différents
métiers et les directions transverses et centrales du Groupe.
Enfin, sur la période 2010-2015, aucune mesure de soutien
additionnel de l’Etat n’a été prise en compte
en dehors de l’exécution des
engagements contractuels (accords « Schwartz » prévoyant une baisse
progressive de 242 à 180 M€ des subventions de l’Etat), réglementaires
(dispositions de la loi LME prévoyant une baisse de 280 à 210 M€ des
subventions au titre de l’accessibilité bancaire) et fiscaux (mise en oeuvre
des abattements de fiscalité locale prévus par la loi du 9 février 2010
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relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités
postales, pour
des montants qui restent inférieurs au plafond de 95% des coûts
d’aménagement du territoire).
Comme la Cour le relève, l’année 2009 a constitué une étape
importante dans l’établissement de ce plan d’affaires
, en particulier dans
la démonstration de la capacité du groupe La Poste à réduire ses
dépenses et à maîtriser sa dette. Pour la première fois, les charges de
personnel ont été stabilisées et les dépenses de fonctionnement ont été
réduites, de manière cohérente avec l’évolution de l’activité. La dette
nette du Groupe a baissé de 100 M€, y compris la contribution au plan de
relance de l’économie. Le premier trimestre 2010 se situe dans le
prolongement de 2009, le chiffre d’affaires consolidé étant en
progression et le maîtrise des charges se confirmant. Ces tendances
devront être confirmées lors des résultats semestriels que La Poste
présentera à son conseil d’administration le 26 août prochain.
Le plan d’affaires n’est pas exempt de risques d’exécution que le
management de La Poste a clairement mis en exergue dans la
présentation faire devant le Conseil d’Administration
. La gestion fluide
des effectifs de la maison mère et la maîtrise des besoins prudentiels de
La Banque Postale en constituent les principaux aspects. L’atteinte des
objectifs financiers du Groupe repose également sur un contexte
économique et financier précisément spécifié qui pourrait évoluer. La
réforme des retraites comme le contexte de taux d’intérêts sont, par
exemple, susceptibles d’avoir un impact important sur la masse salariale
ou encore le rendement des placements de la Banque.
L’ensemble de ce plan ne pourra se réaliser qu’avec les agents de
La Poste. C’est la raison pour laquelle la conduite du changement et
l’attention particulière qui doit être portée à la dimension humaine de
celle-ci, sont pour La Poste et pour l’ensemble de l’encadrement une
priorité absolue.
A cet égard, La Poste adhère pleinement aux recommandations
faites par la Cour en la matière, s’agissant notamment de la mobilité et
de la formation.
En conclusion, il me semble que les recommandations que la Cour
formule à l’endroit de La Poste sont à l’unisson des grands axes que nous
avons adoptés pour notre plan stratégique 2010-2015 : assurer une
parfaite exécution de nos 4 missions de service public, réaliser une
performance économique durable, donner la priorité à la qualité de
service dans la relation client, plus que jamais innover et s’ouvrir aux
partenariats. Le tout dans le respect de notre modèle social.
Telle est la feuille de route que nous proposons à l’Etat et à la
Caisse des Dépôts et Consignations pour les années qui viennent.
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COUR DES COMPTES
Annexe à la réponse du Président directeur général
du groupe La Poste
- Programme CQC et qualité de service -
1. Le programme Cap Qualité Courrier est déterminant pour permettre
l’adaptation aux enjeux majeurs des marchés du Courrier
Ainsi que le souligne à juste titre le rapport de la Cour, « l’outil
industriel du courrier a été profondément modernisé avec des gains de
productivité appréciables » (page 3). Cette révolution a été rendue
possible par le programme Cap Qualité Courrier (CQC) engagé en 2004.
La Poste souhaite rappeler que ce programme visait avant tout à
anticiper la baisse du trafic et la transformation des usages du courrier,
afin de s’y préparer au mieux.
Les principes fondateurs de CQC sont au nombre de quatre :
porter les technologies permettant la rénovation de l’offre et des
services ;
anticiper une baisse de trafic de -2 % par an et se préparer dans
toutes ses composantes
110
à faire face à une baisse globale de -
15 %
111
;
réduire de 20 % le coût du réseau de production et transformer les
processus pour s’adapter à la saisonnalité de l’activité ;
s’adapter
aux
évolutions
du
marché
et
aux
trajectoires
prévisionnelles de trafic.
Pour en garantir la maîtrise, trois objectifs ont été fixés dès la
conception du programme :
le respect des échéances commerciales majeures, dont celle de la
suppression du secteur réservé en 2011 ;
un taux de retour sur investissement au moins égal à 12 % ;
un délai de retour sur investissement en 8 années au maximum.
Depuis son lancement, le programme CQC respecte ces principes
fondateurs et ces objectifs et le déploiement s’opère selon le rythme
prévu.
110) Nombre de PIC et de PPDC, nombre de machines, réseau de transport, etc.
111)
Initialement, la baisse anticipée était de -12 % sur la période 2004-2010. Celle-
ci a été portée à -15 % sur la période 2006-2012 à partir de 2008 dans tous les
business plans locaux (cibles industrielles locales et productivité attendue).
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Fin 2010, ce sont 36 plaques qui seront organisées selon la cible
industrielle et plus de 80 % du trafic qui sera couvert par le nouvel outil
industriel.
La productivité réalisée est conforme aux objectifs :
fin 2008, 47 % de l’investissement et 54 % de l’objectif de
productivité étaient réalisés ;
fin 2009, 65 % de l’investissement et 72 % de l’objectif de
productivité ont été atteints ;
fin 2010, c’est 90 % de l’objectif de productivité initial qui devrait
être atteint avec 76 % de l’investissement.
Ces résultats, qui témoignent de la pleine réussite du projet, ont
été obtenus grâce à une grande maîtrise du déploiement :
sur le réseau des PIC : fin 2010, 83 % des nouvelles machines petit
format et 77 % des nouvelles machines grand format seront
installées ;
sur le réseau de proximité et de distribution : fin 2010, 85 % du
programme immobilier sera réalisé et les nouveaux matériels de tri
seront intégralement déployés.
Dans les PIC, le taux de mécanisation atteint les objectifs sur les
premiers niveaux de tri (90 % de produits mécanisés) et la productivité
(plus de 6 000 plis par opérateur et par jour) dépasse celle des centres de
tri des meilleurs opérateurs postaux.
Le niveau de préparation automatique de la sacoche du facteur
(séquencement dans l’ordre de la tournée) dépasse 30 %, ce qui
positionne La Poste française parmi le trio de tête des postes mondiales.
Il sera porté à 40 % fin 2010 et à 50 % fin 2011.
Par ailleurs, fin avril 2010, ce sont 93 % des tournées de facteurs
qui fonctionnent selon le modèle du travail en équipe, qui permet à la fois
l’adaptation à la saisonnalité croissante du trafic, la professionnalisation
du remplacement en cas d’absence des titulaires des tournées et le
maintien de régimes de travail suffisamment stables pour tous les
facteurs.
Au total, la maîtrise du déploiement de CQC a permis, entre 2004
et 2008, une amélioration annuelle de plus de 2 % de la performance
opérationnelle (nombre d’objets triés et distribués par agent). La
diminution annuelle de trafic sur la période ayant été de -1 %, cela
signifie que la productivité s’est accrue chaque année de plus de 3 %.
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COUR DES COMPTES
En 2008, le trafic trié et distribué a baissé de 3 %. La performance
opérationnelle (nombre d’objets par agent) a diminué de moins de 1 %,
ce qui signifie que l’outil de production a réussi à absorber les deux tiers
de la baisse de trafic.
En 2009, la baisse du trafic trié et distribué a atteint -5,1 %. La
performance opérationnelle du tri a quant à elle diminué de -0,8 %
seulement, ce qui signifie que l’outil de production a réussi à absorber la
quasi-totalité de la baisse de volume au tri ; elle a diminué de -1,6 % à la
distribution, ce qui traduit une variabilisation des charges liées à la
distribution à hauteur de 70 %. Ces performances remarquables sont
directement attribuables au programme CQC et à la mise en place de
l’organisation
« Facteurs
d’Avenir ».
Elles
confirment
que
la
mécanisation est essentielle à l’adaptation de l’outil de production
(comme le recommande la Cour en page 99).
Ce déploiement s’est accompagné d’une amélioration de la qualité
de service. Entre 2004 et 2009, plus de 8 points ont été gagnés sur le
trafic « tous flux confondus ».
Conformément au calendrier, les nouveaux services et offres sont
progressivement mis en marché. Ainsi, la première génération « d’offres
CQC » a été proposée avec succès aux clients :
pour le marketing direct, les clients ont basculé 100 % de leurs flux
dans l’offre DESTINEO, sans réclamation ni opposition des
prestataires ;
pour le courrier de gestion, 100 % des clients industriels ont
réalisé les changements de conteneurisation avec le déploiement de
220 000 KUBs en lieu et place des sacs postaux.
Le système TAE (traitement automatisé de l’adresse) a été mis en
production dans les délais à l’automne 2008. En mai 2010, 12 PIC
fonctionnent intégralement avec ce système qui couvrira l’ensemble du
trafic à fin 2011.
Les premières offres de tracing dites «
génération TAE
»,
préconisées par la Cour (page 79, §3), seront quant à elles mises en
marché à l’automne 2010.
2. Le programme Cap Qualité Courrier s’est adapté continûment à
l’évolution du marché du courrier au cours de son déploiement
Loin d’être un programme figé, CQC a démontré sa capacité
d’adaptation aux évolutions du marché et à l’accélération de la baisse des
trafics. Le relevé de constatations provisoires transmis par la Cour en
juillet 2009, qui qualifiait la logique de CQC de «
pleinement pertinente
»
(page 41), pointait d’ailleurs au contraire (page 41 également) le fait que
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«
CQC est un projet de restructuration industrielle majeur qui, au-delà de
sa dimension technique et de ses implications financières, comporte aussi
de fortes dimensions sociale et territoriale, qui peuvent justifier, d’une
certaine façon, le flou qui a prévalu depuis l’origine quant à son format,
son calendrier et sa traduction géographique
».
Le déploiement de CQC repose en réalité sur une démarche
d’amélioration et d’ajustement permanents qui est un des principes
fondateurs du programme.
La cible CQC a été ajustée de façon régulière en fonction des
perspectives connues du marché du courrier. On en citera ici les
principales étapes :
fin 2005 : 1
ère
adaptation du schéma des PIC (passage de 50 % à
33 % de la part de créations dans le total des PIC), des PPDC
(réduction de 24 % du nombre de projets) et des PDC (réduction
de plus de 50 % du nombre de projets) ;
septembre 2006 : étude d’une 2
ème
adaptation du schéma des PIC
(liste des PIC pouvant ne pas être réalisées et identification des
PIC capables d’absorber à partir de 2011 une plus forte
concentration du trafic) ;
mi 2008
112
: ajustement de la cible CQC à une baisse de trafic de
-15 % (2015 vs 2008) ;
début 2009 : ajustement de la cible CQC à une baisse de trafic
de -30 % (2015 vs 2008), entraînant la déprogrammation
définitive de 3 PIC en création (soit 40 M€ d’économie) et la
reconfiguration
des
investissements
des
futures
PIC
en
transformation (soit 20 M€ d’économie).
Ainsi, dès 2009, le programme CQC a été ajusté pour s’adapter à
une trajectoire de trafic de -30 % et produire les niveaux de performance
(productivité, ROI et TRI) définis initialement avec la trajectoire
originelle de trafic de -12 %.
Contrairement à ce qu’indique le rapport de la Cour (page 51,
notamment), La Poste reconfigure en permanence le programme et
n’accepte aucun surdimensionnement du réseau de traitement, de
transport ou de distribution.
112)
La Cour constate qu’à cette date tous les opérateurs postaux prennent
conscience de la rupture structurelle de l’activité (page 69).
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COUR DES COMPTES
Bien au contraire, La Poste anticipe en permanence les évolutions
du marché tout en menant les investissements indispensables de
modernisation dont la suppression « impliquerait une rupture majeure
par rapport aux efforts déjà réalisés dans le cadre du plan Cap Qualité
Courrier ; il en résulterait un retard de productivité particulièrement
pénalisant dans le contexte d’une baisse des volumes et d’une ouverture à
la concurrence » ainsi que le rapport AILLERET a tenu à le souligner.
3. La qualité des prestations rendues par La Poste dans son activité
courrier est élevée et en progression régulière
Les résultats de qualité de service en matière de courrier, qualifiés
de « médiocres » par le rapport de la Cour, appellent une analyse
précise.
Tout d’abord, il convient de relever que les résultats, mesurés par
un organisme indépendant, sont en amélioration constante.
Contrat de
service public
Arrêté
interministériel
2005
2006
2007
2008
2009
Objectif de la Lettre
Prioritaire égrenée
J+1
NA
NA
85 %
83,0 %
84,0 %
Résultats
Lettre
Prioritaire égrenée
J+1
79,1 %
81,2 %
82,5 %
83,9 %
84,7 %
D’autre part, la comparaison avec des opérateurs étrangers (page
77) ne saurait être menée sans prendre en considération les missions qui
leur sont confiées et les conditions géographiques et opérationnelles dans
lesquelles ils les assurent.
Les Pays-Bas, la Belgique ont des résultats meilleurs mais la
dimension du territoire national et la densité d’habitation nécessitent un
système opérationnel beaucoup moins complexe et moins exposé aux
aléas climatiques.
En Espagne, la part du trafic non urgent à distribuer en J+3 est
très importante. Il en résulte que la part dans le total du trafic courrier
du trafic urgent à distribuer en J+1 est beaucoup plus faible qu’en
France.
En Allemagne, l’opérateur historique pratique des heures de
levées plus précoces qu’en France, ce qui lui permet d’assurer une
alimentation de ses centres de traitement dès l’après-midi. La
comparaison de l’indicateur de qualité en J+1 entre les postes allemande
et française n’est donc pas pertinente.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS
ET ORGANISMES INTÉRESSÉS
181
Dans les pays comparables en termes géographiques par leurs
caractéristiques géographiques ou leur densité d’habitat (Royaume-Uni,
Italie, Norvège), le taux de qualité de service déclaré par les opérateurs
historiques est proche de 88 %. Dans ces pays, les opérateurs ont réalisé
un programme de modernisation analogue à celui que mène la poste
française.
Les niveaux atteints sont dès lors comparables. Le taux de qualité
mesuré en France sur les organisations modernisées atteint fin 2009 une
QS J+1 supérieure à 87,1 % alors même que les flux qu’elles reçoivent
n’ont pas bénéficié d’un processus intégralement industriel puisqu’une
partie du réseau demeure à moderniser.
S’agissant de la qualité de service de la Lettre recommandée
(pages 76 et 77), la comparaison avec les formes courantes de courrier
doit tenir compte des exigences de sûreté de ce type de produit.
Le traitement des lettres recommandées est encore entièrement
manuel puisque c’est le seul processus permettant de suivre et
d’enregistrer le parcours de ce type d’envoi.
Grâce au déploiement du projet TAE dans le cadre de CQC, les
machines
vont
devenir
capables
d’assurer
le
suivi
des
lettres
recommandées et apporteront la rapidité de traitement que le processus
manuel est incapable d’apporter.
S’agissant de la qualité de service du courrier industriel (MD7,
G4, G2), elle a fortement progressé depuis 2005, en particulier sur deux
points attendus par les grands clients de La Poste : le resserrement de la
plage de traitement (distribution sur un nombre limité de jours) et la
réduction des délais aberrants (la part du flux MD7 distribué entre J+1
et J+3 a par exemple été divisée par 2,5 entre 2005 et 2009). Les
engagements clients de La Poste sont tenus et même régulièrement
dépassés dans les organisations industrielles en place : fin 2009, les PIC
stabilisées ont atteint une qualité de service de 97,7 % sur le G2, de
97,2 % sur le G4 et de 96,2 % sur le MD7.
C’est grâce à un meilleur pilotage des flux, de plus en plus
maîtrisé par les PIC, que La Poste a pu obtenir une réelle différenciation
des produits par les délais et répondre ainsi à ce que demandent ses
grands clients. Une enquête menée récemment auprès des clients montre
d’ailleurs leur satisfaction quant à la qualité de la prestation qu’ils
souhaitent : « régularité » et « fiabilité » sont les deux points qu’ils
mettent en avant pour la qualifier.
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182
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU GOUVERNEUR DE LA BANQUE DE FRANCE
Les constats et recommandations du rapport public thématique de
la Cour des Comptes intitulé « la Poste : un service public face à un défi
sans précédent, une mutation nécessaire ».ont retenu toute notre
attention, en particulier ceux relatifs à La BANQUE POSTALE (LBP)
dont l’Autorité de Contrôle Prudentiel assure la supervision.
Je prends note en particulier que l’activité bancaire qui est un
relais de croissance essentiel au sein du groupe LA POSTE, doit
bénéficier de moyens renforcés pour assurer son développement dans des
conditions satisfaisantes. L’ACP veillera ainsi à ce que LBP poursuive le
développement de ses activités dans le respect des standards de la
profession bancaire en matière de rentabilité et de maîtrise de ses
risques.
J’attire donc l’attention de la Cour des Comptes sur les
conséquences que pourrait avoir, pour LBP, un développement trop
rapide de ses activités de crédit auprès de personnes morales, PME et
associations, mais aussi d’entrepreneurs individuels. LBP doit, en effet,
s’assurer qu’elle dispose des compétences humaines et techniques
indispensables pour aborder un marché plus risqué que celui des crédits
immobiliers aux particuliers. Il faudra donc que l’établissement consente
des investissements importants ou, comme pour d’autres activités, noue
un partenariat qui, compte tenu de l’enjeu que représente cette clientèle
pour tous les établissements, risque d’être plus difficile à trouver.
Enfin, le rapport montre que le taux de distribution des résultats
de LBP sur la période récente a été très élevé et nettement supérieur aux
projections faites lors du dépôt du dossier d’agrément. Pour le futur,
l’actionnaire prévoirait, selon le rapport, un taux de distribution de 45 %
qui me paraît plus élevé que la moyenne des grands établissements
français, surtout dans une période où les fonds propres doivent être
renforcés pour tenir compte des nouvelles exigences réglementaires mais
aussi, s’agissant de LBP, pour faire face au développement prévu de son
activité et à l’éventuelle extension de son activité aux personnes morales.
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COUR DES COMPTES
Liste des rapports publiés par la Cour des comptes
depuis le 1
er
janvier 2007
* Rapport public annuel (février 2010)
* Rapport public annuel (février 2009)
* Rapport public annuel (février 2008)
* Rapport public annuel (février 2007)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2009 :
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
(juin 2010)
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2009 (mai 2010)
La certification des comptes de l’Etat – Exercice 2009 (mai 2010)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2008 :
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
(juin 2009)
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2008 (mai 2009)
La certification des comptes de l’Etat – Exercice 2008 (mai 2009)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2007 :
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
(juin 2008)
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2007 (mai 2008)
La certification des comptes de l’Etat – Exercice 2007 (mai 2008)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2006 :
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
(juin 2007)
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2006 (mai 2007)
La certification des comptes de l’Etat – Exercice 2006 (mai 2007)
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COUR DES COMPTES
185
* Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité
sociale :
Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité
sociale - exercice 2009 (juin 2010)
Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité
sociale - exercice 2008 (juin 2009)
Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité
sociale - exercice 2007 (juin 2008)
Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité
sociale
- exercice 2006 (juin 2007)
* Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale :
Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale (septembre 2009)
Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale (septembre 2008)
Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale (septembre 2007)
Rapports publics thématiques :
Les concours publics aux établissements de crédit : bilan et
enseignements à tirer (mai 2010)
L’éducation nationale face à l’objectif de la réussite de tous les élèves
(mai 2010)
Les effectifs de l’Etat 1980-2008 - Un état des lieux (décembre 2009)
Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels
(décembre 2009)
Le transfert aux régions du transport express régional (TER) : un bilan
mitigé et des évolutions à poursuivre (novembre 2009)
La conduite par l’Etat de la décentralisation (octobre 2009)
France Télévisions et la nouvelle télévision publique (octobre 2009)
La protection de l’enfance (octobre 2009)
Les concours publics aux établissements de crédit : premiers constats,
premières recommandations (juillet 2009)
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COUR DES COMPTES
Les communes et l’école de la République (décembre 2008)
La formation professionnelle tout au long de la vie (octobre 2008)
Les aéroports français face aux mutations du transport aérien
(juillet 2008)
La mise en oeuvre du plan cancer (juin 2008)
Le réseau ferroviaire, une réforme inachevée, une stratégie incertaine
(avril 2008)
Les grands chantiers culturels (décembre 2007)
Les aides des collectivités territoriales au développement économique
(novembre 2007)
Les institutions sociales du personnel des industries électriques et
gazières (avril 2007)
La gestion de la recherche publique en sciences du vivant (mars 2007)
Les personnes sans domicile (mars 2007)
* Contrôle des organismes faisant appel à la générosité publique
La Fondation pour l’enfance (avril 2010)
La Fondation Hôpitaux de Paris - Hôpitaux de France (février 2010)
La Société protectrice des animaux (septembre 2009)
L’association France Alzheimer et maladies apparentées : l’impact des
recommandations de la Cour (juin 2009)
Le Comité Perce-Neige : l’impact des recommandations de la Cour
(juin 2009)
L’association Sidaction : l’impact des recommandations de la Cour
(juin 2009)
Les Restaurants du Coeur – Les Relais du Coeur : l’impact des
recommandations de la Cour » (juin 2009)
Amnesty International section française (AISF) (décembre 2008)
La ligue nationale contre le cancer (octobre 2007)
La qualité de l’information financière communiquée aux donateurs par
les organismes faisant appel à la générosité publique (octobre 2007)
Fondation « Aide à Toute détresse » - ATD Quart Monde (mars 2007)
Association « Le Secours Catholique » (mars 2007)
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