Monsieur le Président,
Le contrôle du "comité départemental d'habitat et d'urbanisme de l'Aube" (CDHU) inscrit au
programme pour 1999 de la chambre a principalement porté sur l'organisation, le fonctionnement
et les ressources de l'association pour les exercices 1993 à 1998.
Outre divers dysfonctionnements concernant les dispositions légales réglementaires et statutaires
régissant les rapports entre collectivités publiques et organismes privés, le contrôle a également
fait apparaître la situation irrégulière du directeur de la structure.
Dans sa séance du 13 janvier 2000, la chambre a examiné vos réponses ainsi que celles du
président du conseil général de l'Aube, du directeur du CDHU, du président du SIVU de la vallée
de l'Aube et du président de la SICAHR, reçues à la chambre les 22 et 23 novembre 1999. Vous
voudrez bien trouver, ci-après, la version définitive des observations retenues.
I - Les dysfonctionnements relatifs aux rapports entre collectivités publiques et organismes privés
1- L'organisation du CDHU
Le CDHU est né en 1955 de la volonté du conseil général et des organismes socio-professionnels
de promouvoir une politique d'aide à la rénovation et à l'adaptation de l'habitat rural
départemental. Son activité s'est poursuivie et développée sans interruption depuis sa création et
ses statuts n'ont pas fait l'objet de modification majeure.
La chambre estime que l'activité de l'association a aujourd'hui débordé de ce rôle d'étude, de
documentation et de présentation de dossiers pour participer directement et contre rémunération à
la mise en oeuvre, à l'animation de procédures et à la fourniture de services. Cette évolution
soulève des difficultés diverses.
Le président du CDHU a indiqué dans sa réponse qu' " une réflexion... avait été entreprise avant
l'intervention de la chambre pour sectoriser d'une part les activités d'intérêt général et d'autre part
les activités ayant un destinataire identifié... Cette réflexion débouchera sur une restructuration
fonctionnelle nécessitant probablement la modification des statuts et de l'organisation comptable
et fiscale... permettant ... d'intégrer les observations de la chambre...".
En confirmant que les ambiguïtés constatées entre l'évolution des activités sociales et la stabilité
de dispositions statutaires anciennes avaient déjà généré une réflexion interne importante, le
président du CDHU va dans le sens souhaité. La chambre souhaite donc une rédaction des
statuts plus conforme au fonctionnement actuel du CDHU.
2 - La composition et l'organisation des instances
La chambre a observé la prépondérance du conseil général dans la composition de l'assemblée
générale, du conseil et du bureau. Les réunions régulières du conseil d'administration et du
bureau n'appellent pas d'observation à l'exception de l'absence de registre des délibérations. Cela
accentue le caractère très informel du fonctionnement de l'organe détenteur de la réalité du
pouvoir et empêche d'apprécier les conditions de quorum et de majorité qui président aux votes.
Il apparaît donc nécessaire que les décisions, prises en conseil d'administration et en bureau,
soient actées sous forme écrite afin de faciliter l'exercice des contrôles pesant sur le CDHU et sur
sa gestion. Le président a déclaré avoir mis en place ce recueil à la suite du passage de la
chambre qui lui donne acte de cette évolution.
3 - Le fonctionnement de l'assemblée générale
La chambre a constaté que, malgré les statuts en vigueur, l'assemblée générale n'était pas réunie
tous les ans puisque, sur les cinq exercices contrôlés, il n'y a eu que trois réunions. Malgré un
article 5 (dernier alinéa) qui dispose " qu'elle approuve les comptes de l'exercice clos, vote le
budget de l'exercice nouveau ", aucune des assemblées de la période sous revue n'a été saisie
du budget de l'exercice. Elle a été dépossédée des compétences budgétaires, qui ont été dans les
faits attribuées au bureau.
La chambre ne peut que constater les dérives passées mais prend acte de la volonté de
réorganisation annoncée par le président qui a précisé que "le CDHU a prévu un réexamen
systématique ; par exemple, la clause d'approbation préalable du projet de budget par l'assemblée
générale sera débattue, la pratique montrant que cette clause présente plus d'inconvénients que
d'avantages réels...".
4 - L'organisation interne du bureau et le poids particulier du directeur
La réalité du fonctionnement du bureau est concentrée entre les mains du président, aucun autre
membre du bureau ne semble exercer de délégation formalisée et effective.
De fait, outre le président, c'est le directeur qui détient la signature des comptes, ordonnance et
paye les dépenses et exécute les budgets contrairement aux statuts qui précisent que " les
dépenses sont ordonnancées par le président ou un vice-président délégué ". Selon le président
cette pratique a été décidée par : "le conseil d'administration du 3 juillet 1980 [qui] a donné pouvoir
pour la signature des chèques et ordres de débits au président et au vice-président assisté soit du
directeur, soit de la salariée assurant la gestion courante. Cette règle a été observée jusque vers
1991... En effet, cette pratique très lourde gênait le fonctionnement de l'association... ".
Le président du CDHU annonce que la réforme statutaire à venir permettra de clarifier les divers
points soulignés par la chambre.
La chambre prend donc acte des améliorations à l'étude et de la régularisation en cours.
5 - La clarification de la mission et du statut du CDHU
Dès sa création, le CDHU s'est vu assigner par le conseil général une mission d'aide et
d'assistance aux collectivités. L'association se consacre donc essentiellement à cet objectif, en
ciblant ses efforts sur l'augmentation qualitative et quantitative de l'offre de logement en zone
rurale et la promotion et accompagnement des procédures d'aménagement communales.
Pourtant, aucune convention entre le CDHU et le conseil général n'a jamais défini le rôle respectif
des partenaires, ni précisé en quoi la mission du CDHU, son contenu et ses modalités d'exécution
constitue une activité d'intérêt général favorisant ou complétant l'action des services publics
locaux (décret n° 85-1081 du 8 octobre 1985 art 1er) et justifiant ainsi l'attribution de moyens
publics.
Cette activité génère cependant l'essentiel des produits d'exploitation. Il n'est donc pas surprenant
que ce service, soit particulièrement développé et suivi.
En ce qui concerne le conseil aux communes, le président estime que "ce service n'est nullement
lucratif, et encore moins commercial. Il se caractérise pour l'essentiel par des actions de
sensibilisation de la population et des élus sur les objectifs et les moyens destinés à améliorer
l'habitat et le cadre de vie.
Une convention sera proposée (au département) pour expliciter les conditions d'emploi des
subventions qu'il pourra attribuer au secteur d'intérêt général de l'activité et les modalités de
contrôle de leur respect".
La chambre ne quantifiait pas la répartition entre les activités concurrentielles et les activités
d'intérêt général mais se bornait à constater la part croissante des premières dans le compte de
résultat. En fait, la répartition apparaît a priori assez équilibrée si l'on prend en compte les
nouveaux chiffres fournis par l'association qui incluent dans les recettes publiques l'aide en nature
du conseil général que constitue la mise à disposition du directeur.
La chambre prend acte des améliorations à l'étude et de la régularisation en cours des rapports
conventionnels avec le département.
Par ailleurs, le CDHU semble appelé à remettre en cause son fonctionnement, pour tenir compte
des règles fiscales.
A cet égard, la chambre signale que les conditions de l'assujettissement des associations aux
impôts dus par les entreprises ont été précisées par le Conseil d'Etat, (CE n°170289 Section
Association Jeune France, 1er octobre 1999) dans des termes, notamment au regard de la
présence sur le même secteur d'entreprises privées à même d'offrir une prestation comparable.
6 - La régularité des interventions du CDHU
La succession des conventions entre l'association et ses prestataires, conduit le CDHU à réaliser
des études, puis à suivre leur mise en oeuvre pour des montants qui parfois dépassent le seuil
des marchés négociés.
Lors de l'examen des pièces, la réponse à une mise en concurrence a parfois pu être constatée
pour certaines actions et notamment celles relatives à l'élaboration ou la modification des POS.
A l'inverse, certaines études préalables ont été suivies d'une prestation d'animation, dont le coût
total excédait le seuil prévu à l'article 321 du code des marchés publics et dont l'attribution ne
reposait sur aucune mesure de concurrence.
Le président estime que l'association n'est pas en charge de l'application du code des marchés
publics et précise "qu'il n'y a pas lieu de cumuler les coûts des animations des OPAH avec celui
des études préalables : rien n'autorise à anticiper, lorsque les études préalables sont entamées,
sur les suites qu'elles peuvent avoir ou ne pas avoir selon les résultats présentés ... avec ou sans
le concours du CDHU...".
Sur le plan des études préalables aux OPAH, il semble cependant que les conclusions auxquelles
elles aboutissent, déterminent la phase d'exécution, sauf à considérer que cette dernière est
lancée sans objectifs. Les deux études sont donc fonctionnellement liées.
Il est probable que la gestion de toutes les OPAH suivant une étude préalable, ne sont pas
attribuées au CDHU. A l'inverse, ce qui a été constaté, c'est que les études conduites par le
CDHU auprès des collectivités citées ont été parfois suivies d'une convention d'animation de
procédure.
En ce domaine, l'intervention du CDHU au niveau des études préalables peut être analysée
comme une opération d'assistance au maître d'ouvrage. Le code des marchés publics interdit,
sauf en cas particulier, que celui qui participe à la définition du marché concourt pour son
exécution.
Au delà, et sans même chercher à cumuler les coûts de plusieurs prestations, la chambre a
constaté qu'un SIVOM a passé, sans mise en concurrence ni marché, et pour un coût de 416.070
F, une convention d'animation avec le CDHU pour gérer les suites de l'étude préalable
En fait, comme souvent dans les politiques partenariales impulsées par l'Etat et les collectivités
locales, les acteurs se trouvent confrontés à une excroissance de fait des administrations
concernées qui conduit à s'affranchir des obligations de publicité et de déontologie imposées pour
la sélection des entreprises privées.
Dans le contexte actuel, le CDHU doit être considéré comme un fournisseur d'études privé. Il ne
devrait donc être retenu qu'à la suite d'une mise en concurrence préalable ouverte à toutes les
entreprises concernées. Si l'animation des procédures est une prestation distincte des opérations
d'études préalables, ainsi que le soutient l'ordonnateur, c'est une nouvelle mise en concurrence
qui doit être mise en oeuvre.
Il n'appartient pas au CDHU de veiller à la régularité des procédures précédant l'attribution de ses
contrats, mais la chambre ne peut que souligner l'incertitude juridique et financière issue de ces
pratiques dont l'association pourrait devoir, avec les ordonnateurs concernés, assumer les
conséquences, en particulier en cas d'annulation.
7 - La gestion financière de l'association
7.1 - Les ressources
La chambre relève que les cotisations sont inexistantes et que les ressources de l'association se
composent quasi exclusivement des subventions publiques et des recettes tirées de l'exploitation.
La comptabilité ne reprend pas la prise en charge financière du salaire du directeur (environ 160
000 F annuels) par le conseil général alors qu'elle s'analyse de fait comme une subvention
indirecte à réintégrer dans les comptes. Même si le président estime que " ...Les coûts de la
direction sont pris en compte dans le calcul du coût de chaque intervenant... " ils ne pèsent pas
sur les charges d'exploitation et donnent au CDHU un avantage concurrentiel dans les mises en
concurrence auxquelles l'association pourrait participer.
De ce fait, l'organisme dégage un résultat d'exploitation positif en progression constante et l'actif
du bilan laisse apparaître des placements significatifs critiquables. Les fonds publics, dont les
aides indirectes non comptabilisées, mis annuellement à la disposition du CDHU semblent en effet
manifestement excédentaires par rapport à ses besoins courants.
Le président du CDHU a fait valoir que la " question des cotisations sera mise à l'ordre du jour de
la prochaine assemblée générale...La réintégration du coût salarial du directeur a été posée au
commissaire aux comptes. Pour ce qui est du niveau des placements effectués, le département a
indiqué au CDHU que le montant et le calendrier de ses subventions seraient réajustés en
fonction de la nouvelle structuration expérimentée depuis le 1er janvier 1999...".
La chambre prend donc acte des réformes à intervenir en soulignant tout l'intérêt d'une convention
définissant les rapports entre le CDHU et le conseil général.
7.2 - La tenue des comptes
L'étude de la comptabilité n'appelle pas de remarque particulière à l'exception de l'indemnité de
responsabilité du directeur. Le CDHU a produit une délibération du 12 septembre 1979 fondant le
principe de cette indemnité et prévoyant que : "le directeur, recevra une indemnité de fonction de
1 300 F par mois. Cette rémunération s'appliquera dans les conditions fixées par le régime
d'emploi en vigueur au sein du CDHU. Toute autre modification fera l'objet d'un avenant à la
présente nomination".
"La justification de l'indemnité remonte au conseil d'administration du 12 septembre 1979 auquel
assistaient notamment les directeurs départementaux de l'Agriculture et de l'Equipement. Le
montant a suivi l'évolution de l'ensemble des rémunérations..., sauf une majoration individuelle
décidée par le président vers 1990, qui n'a jamais été formalisée, mais à laquelle le conseil et
l'assemblée ne se sont jamais opposés. Les chèques étaient signés du président jusqu'en 1991,
ce qui empêche toute ambiguïté sur sa volonté de l'accorder.
Le règlement de cette somme n'est soumis à aucune condition ou formalité. Il n'a jamais fait l'objet
de remarques du commissaire aux comptes ".
La chambre constate donc l'existence de la délibération du 12 septembre 1979, non produite lors
de l'instruction, qui fonde l'attribution de la prime de responsabilité.
Toutefois, aucune décision de revalorisation ou d'augmentation et nul "avenant" n'en justifie, à
l'inverse, l'évolution qui l'a porté de 1 300 F mensuels à 4 904 F mensuels et double mois en
décembre (en complément du régime indemnitaire fonction publique ). La délibération susvisée en
fait fort justement une "rémunération qui s'appliquera dans les conditions fixées par le régime
d'emploi en vigueur". Il est donc tout à fait anormal que cette rémunération n'ait pas figuré dans la
masse salariale de l'association, n'ait donné lieu à aucun contrat de travail et n'ait pas été portée
aux déclarations fiscales et sociales de l'association.
Au delà, la référence aux "conditions fixées par le régime d'emploi en vigueur" n'apparaît pas
d'une grande pertinence pour un fonctionnaire en activité qui n'est pas salarié par l'association.
Enfin, les documents produits démontrent qu'un fonctionnaire de l'Etat, à l'époque censé travailler
dans un service de la DDE (cellule technique de construction), était irrégulièrement en poste dans
une association et bénéficiait avec la tolérance de sa hiérarchie d'un complément de rémunération
irrégulier.
7.3 - L'insincérité du poste frais de déplacements
Le budget des frais de déplacements inclut une dotation permettant, à hauteur de 63 909 F par an
en 1997 (60 % du total du poste) de payer de façon irrégulière et sans pièce justificative
l'indemnité de responsabilité du directeur.
De ce point de vue, la comptabilité du poste n'apparaît donc pas sincère, puisqu'il sert à payer des
dépenses salariales qui ne devraient pas en relever dans des conditions d'attribution, d'évolution
et de déclarations fiscales et sociales particulièrement obscures.
Dans sa réponse, le président du CDHU annonce que les réformes en préparation pourront
conduire, si la prime est maintenue, à une écriture comptable l'individualisant. La chambre prend
acte, les faits étant confirmés, de la volonté exprimée de régulariser du point de vue
réglementaire, statutaire et comptable le régime indemnitaire particulier consenti au directeur.
7 4 - Risques potentiels et irrégularités manifestes
Les circuits financiers du CDHU présentent un risque, la subvention du conseil général étant en
effet déposée sur un compte courant qui sert à effectuer les paiements de l'association.
Dans la pratique, le compte fonctionne avec un chéquier dont le président détient la signature et le
pouvoir en vertu d'une délibération du conseil d'administration du 8 juillet 1998. Le même procès-
verbal précise : " les membres du conseil renouvellent leur confiance au directeur et les pouvoirs
qui lui sont conférés à savoir : pouvoir de signature, de représentation, de direction et de gestion
de l'organisme ".
Il apparaît donc, contrairement aux statuts, qui disposent que " les dépenses sont ordonnancées
par le président ou un vice-président délégué ", que le directeur bénéficie des mêmes pouvoirs
d'ordonnancement que le président, en lieu et place du trésorier, en vertu d'une délibération du
conseil d'administration dont la régularité est douteuse au regard des dispositions statutaires
applicables.
II - La situation irrégulière du directeur du CDHU
1 - La situation administrative du directeur
La chambre a constaté que le directeur du CDHU, en poste depuis 1979, est un fonctionnaire de
catégorie B du ministère de l'Equipement, actuellement détaché auprès du conseil général de
l'Aube par arrêté du 6 novembre 1995, sur un emploi de rédacteur territorial pour une durée de 5
ans à compter du 1er septembre 1994 et jusqu'au 31 août 1999, dans le cadre du droit d'option
prévu par le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 art 14-2.
Le président du conseil général, par arrêté du 27 juillet 1994 l'a nommé en service détaché à
compter du 1er septembre 1994, et l'a reclassé au 3ème échelon du grade de rédacteur principal
titulaire du cadre territorial.
En fait, cet agent n'a jamais exercé au conseil général mais a été maintenu, par une mise à
disposition critiquable, dans sa fonction de directeur du CDHU.
L'article 4 du décret n° 85-1081 du 8 octobre 1985 fixe en effet comme condition à la mise à
disposition d'un fonctionnaire territorial, l'établissement d'une convention entre la collectivité
gestionnaire du fonctionnaire et l'organisme d'accueil. Elle doit mentionner la durée de la mise à
disposition, la nature de l'activité à exercer, les conditions de travail et les modalités du contrôle
de la collectivité d'origine.
Force est de constater que la mise à disposition du directeur n'a pas respecté les dispositions
légales.
Il est également établi que le directeur du CDHU est aussi employé à plein temps en qualité de
directeur de la société intérêt collectif agricole d'habitat rural (SICAHR).
Il en résulte que ce fonctionnaire de l'Etat, censé être en détachement sur un emploi du conseil
général de l'Aube et irrégulièrement mis à disposition, cumule finalement, si on admet l'intérêt
général de la mission de l'association, un emploi public au CDHU et un emploi privé dans une
société privée.
En vertu des termes de l'article 6 du décret du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de
rémunérations et de fonctions, toute infraction aux interdictions édictées en matière de cumul de
rémunération et d'activité entraînera obligatoirement :
- des sanctions disciplinaires (CE 22/04/1988 SIMON n° 61297) ; - le reversement, par voie de
retenue sur le traitement des rémunérations irrégulièrement perçues, au profit du budget qui
supporte la charge du traitement principal du fonctionnaire en cause.
Le président du CDHU a confirmé que "L'étendue exacte de cette difficulté avait échappé à tous
les intervenants et à toutes les autorités de contrôle jusqu'à l'observation de la chambre... Ainsi, la
mise à disposition du CDHU n'a (pas) été formalisée, mais elle figure explicitement chaque année
dans les fiches de congé de M... signées par la DDE... C'est également à la demande des
dirigeants respectifs du CDHU et de la SICAHR... que ces deux organismes ont choisi d'avoir une
direction commune et non de fusionner. Il n'est donc pas conforme à la réalité d'écrire que M
....
serait également employé à plein temps par la SICAHR : son activité se déploie sur les deux
organismes".
Le conseil général de l'Aube a estimé " ... que ce détachement ne saurait être assimilé à un
détachement classique puisqu'il s'est réalisé au titre du droit d'option... ce contexte induit deux
conséquences :
- ce détachement s'est réalisé dans un contexte de droit pour l'intéressé, - ce détachement n'a eu
pour seule conséquence que de reprendre, dans un cadre territorial, une situation existante ...
dans le cadre de la fonction publique de l'Etat.
Il ne peut y avoir dans un tel cadre, procédure spécifique de mise à disposition de l'association
CDHU par le département, ce qui reviendrait à enchaîner un détachement et une procédure de
mise à disposition, ce que ne permet ni le statut de la fonction publique d'Etat, ni celui de la
fonction publique territoriale.
Dans le cas de M
....
, le détachement au titre du droit d'option de l'article 30 de la loi du 2 mars
1982 incluait de fait cette mise à disposition du CDHU, puisqu'il n'avait pour effet que d'entériner
la situation antérieure.
Il n'y avait pas lieu que le conseil général re-facture à l'association la charge salariale de M
....
dans la mesure où il perçoit simultanément une compensation équivalente de l'Etat par la DGD.
Ainsi, la nouvelle situation de M
....
, à compter du 1er septembre 1994 (date du détachement) est
neutre financièrement... tant pour l'Etat et le département, que pour l'association.
... Pour ce qui est du cumul d'activité et de rémunérations, il apparaît que cette situation est
ancienne, bien avant sa position de détachement auprès du département, dont l'intervention s'est
limitée au statut quo dans le cadre du droit d'option sans d'ailleurs disposer d'informations sur
l'existence de ce cumul".
L'ensemble des faits étant ainsi confirmé la chambre constate que :
1/ la situation du directeur, en sa qualité de fonctionnaire de l'Etat en poste à la DDE de l'Aube et
mis à disposition du CDHU de 1979 à 1994, est irrégulière. Le statut de la fonction publique de
l'Etat pose des conditions précises à la mise à disposition d'un fonctionnaire auprès d'une
association qui n'ont jamais été réunies en l'espèce.
Les pièces relatives à cette période, essentiellement des feuilles de congés et des feuilles de
notation mentionnent une affectation au sein de la DDE qui ne correspond pas à la situation réelle
de l'agent. Elles démontrent la fiction de sa position administrative, tolérée sinon organisée, par sa
hiérarchie qui constitue un dévoiement de l'action administrative conduite par le canal d'une
association constituant un démembrement de l'administration.
A supposer même que cette affectation présente un semblant de régularité, il subsiste que le
statut de la fonction publique interdit clairement tout complément de rémunération pour les
fonctionnaires mis à disposition autres que les remboursements de frais.
Or, les pièces transmises établissent que c'est avec l'abstention du directeur départemental de
l'Equipement, présent lors de la délibération du 12 septembre 1979, qu'un régime indemnitaire
particulier, faussement comptabilisé dans une rubrique relative aux frais de déplacement, a été
consenti par un organisme privé à un fonctionnaire de l'Etat dont les fonctions réelles et la
situation administrative ne correspondaient pas à une situation régulière.
C'est dans ce cadre que cet agent a été détaché à compter du 1er septembre 1994 auprès du
conseil général de l'Aube.
2/ La situation antérieure, juridiquement contestable, ne s'imposait pas au conseil général lors de
l'accueil en détachement
La décision de détachement du ministre de l'équipement et l'arrêté du président du conseil
général, ne laissent pas apparaître la position réelle du fonctionnaire. Le bénéfice du droit d'option
ouvert pour régler le sort des agents qui, à la suite des réformes de décentralisation se sont
trouvés avoir une affectation ne correspondant pas à leur rattachement statutaire ne pouvait
évidemment avoir pour objet ou pour effet de légaliser des situations contraires au statut général.
Or, cet agent de catégorie B a été détaché dans des conditions qui ne présumaient en rien la
légalité de sa situation réelle. Les effets de droit dont se prévaut le département dans le cadre de
la mise en ouvre du droit d'option n'existent et n'ont d'effet que dans un cadre statutairement
régulier.
Dès lors, s'il ne peut y avoir, comme le souligne justement le conseil général, enchaînement d'un
détachement et d'une décision de mise à disposition interdite par le statut, la légalité aurait voulu
que le fonctionnaire détaché par l'Etat soit nommé sur un emploi ouvert dans les cadres du
conseil général.
La mise à disposition, à supposer qu'elle soit possible, aurait dû être prononcée et assumée par
l'Etat au profit de l'association et le détour par un détachement dans la fonction publique
territoriale n'apparaît pas utile.
Il est donc nécessaire, à l'occasion de la fin du détachement du directeur au 31 août 1999, de
régulariser la situation de fait dans laquelle se trouve le département employeur de droit, le CDHU
employeur réel et le fonctionnaire concerné soit en :
- mettant fin au détachement auprès du conseil général, - reconduisant le détachement, ce qui
interdit toute mise à disposition, - intégrant l'agent dans la fonction publique territoriale.
Dans cette dernière position, une mise à disposition redevient possible sous réserve du respect
des textes statutaires de base applicables.
2 - Le cumul d'emploi et de rémunération
Quelle que soit la position administrative du directeur, personne ne conteste qu'il est un
fonctionnaire en position d'activité, qui est soumis pendant toute sa période d'activité aux
dispositions du décret du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de
fonctions.
Le département, autorité d'emploi au sens du décret précité, se borne à déclarer qu'il ne disposait
pas d'information sur l'existence de ce cumul qui a porté la rémunération totale à plus de 420 000
francs en 1997. Le président du CDHU conteste qu'il soit employé à plein temps par la SICAHR .
Le président de la SICAHR confirme qu'un contrat de travail a succédé à une situation de fait à
compter du 1er juillet 1995 et souligne que cette situation était parfaitement connue des services
officiels.
Il est clair pour la chambre que le directeur a profité des pratiques en vigueur au sein des services
de l'équipement qui permettaient hors des cadres statutaires le déroulement de carrières plus
rémunératrices que celles de l'administration, de l'absence de rigueur du conseil général ainsi que
de la confusion fonctionnelle volontairement cultivée et développée entre une société privée et
une association censée être d'intérêt général.
Il est incontestable que le directeur est bien déclaré être employé à plein temps par ses deux
employeurs (DAS 1), malgré ce qu'affirme le président du CDHU.
Le directeur perçoit donc, outre la prime versée mensuellement par l'association, un traitement à
temps plein en sa qualité de fonctionnaire (ce qui impliquerait d'ailleurs qu'il
consacre tout son
temps à son emploi) et un salaire à temps plein, d'ailleurs supérieur à son traitement à la SICAHR,
qui apparaît rémunérateur, si l'on admet comme les parties en cause, que l'activité déployée n'est
qu'un temps partagé au sein d'un même emploi.
Il est évident que cette approche est irrecevable et que le directeur avec la connivence de
l'association, de la SICAHR et sans l'accord de son autorité d'emploi, a sciemment bénéficié d'un
système initié par la direction départementale de l'équipement et pérennisé par le conseil général
pour, en contournant le statut de la fonction publique, occuper au mépris de la réglementation
deux emplois incompatibles, cumuler deux rémunérations à temps plein et un régime indemnitaire
irrégulier.
La chambre ne peut donc qu'inviter les parties concernées à revenir à la légalité en régularisant la
position de l'agent, en mettant fin au cumul d'emploi et de rémunération et en suspendant le
régime indemnitaire mis en place.
Les observations ci-dessus revêtent maintenant un caractère définitif. Conformément aux
dispositions de l'article L. 241-11 du code des juridictions financières, les présentes observations
sont transmises au président du conseil général de l'Aube pour être communiquées à l'assemblée
délibérante lors de sa plus proche réunion.
Après cette réunion, ces observations deviendront communicables à toute personne qui en ferait
la demande conformément à la loi du 17 juillet 1978.
Enfin, je vous signale qu'en application des dispositions de l'article 127 du décret n° 95-945 du 23
août 1995, les présentes observations sont également transmises à monsieur le préfet et à
monsieur le trésorier-payeur général de l'Aube
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma considération distinguée.
Alain DOYELLE
Conseiller référendaire à la Cour des comptes
Monsieur le Président du comité départemental d'habitat et d'urbanisme de l'Aube Cité
Beurnonville 10000 TROYES