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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES CONCERNÉS
ÉVALUATION
DE DEUX PEINES
ALTERNATIVES
À L’INCARCÉRATION
Le travail d’intérêt général
et la détention à domicile
sous surveillance électronique
Rapport public thématique
Évaluation de politique publique
Mars 2025
Évaluation de deux peines alternatives à l’incarcération - mars 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
RÉPONSES
DES
ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES
CONCERNÉS
Réponse reçue
à la date de la publication (04/03/2025)
Réponse du ministre d’État, Garde des Sceaux, ministre de la justice
.......
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Évaluation de deux peines alternatives à l’incarcération - mars 2025
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RÉPONSE DU
MINISTRE D’ÉTAT,
GARDE DES SCEAUX,
MINISTRE DE LA JUSTICE
Vous avez bien voulu m'adresser le rapport d'évaluation de politique
publique intitulé « Évaluation de deux peines alternatives à l'incarcération,
le travail d'intérêt général et la détention à domicile sous surveillance
électronique » que la Cour se propose de publier prochainement.
Ce projet contient neuf recommandations et plusieurs constats sur
lesquels nous souhaitons apporter des précisions et compléments.
En premier lieu, la Cour formule trois recommandations appelant au
renforcement de l'effectivité des sanctions de travail d'intérêt général (TIG)
et de détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE),
auxquelles nous souscrivons pleinement.
D'abord, la Cour recommande de «
réduire significativement les
délais d'exécution des travaux d'intérêt général en utilisant tous les leviers
possibles » et de « traiter les dossiers en souffrance
»
1
.
La question des délais de mise à exécution des peines constitue un
sujet prioritaire pour le ministère. En particulier, la maîtrise des délais
d'exécution du TIG, concerne non seulement le délai de saisine des services
pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), mais aussi le délai
d'affectation à un poste de TIG.
Des modifications des pratiques professionnelles des SPIP et des
organisations de service, ont d'ores et déjà permis d'observer, en une année,
une réduction du délai moyen entre la saisine par l'autorité judiciaire et la
date d'affectation à un poste de TIG, qui est passé de 7,9 mois à 6,9 mois. La
loi n° 2023-1059 d'orientation et de programmation du 20 novembre 2023
devra permettre de réduire encore le délai moyen de saisine des services,
puisque, désormais, l'article 474 du code de procédure pénale, prévoit que
le condamné à une peine de TIG est, dès sa sortie de l'audience, convoqué
devant le SPIP compétent qui se trouve alors saisi de la mesure.
Par ailleurs, l'impératif de célérité est régulièrement rappelé aux
parquets en charge de l'exécution des peines, et dernièrement dans la
circulaire de politique pénale générale du 27 janvier 2025.
Nous entendons améliorer encore la maîtrise de ces délais, en nous
appuyant sur les conclusions de la mission d'urgence dédié aux délais
d
exécution des peines installée par mon prédécesseur et qui a notamment
pour mission de faire toute proposition favorisant l'exécution immédiate et
1
Recommandation n° 2
.
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effective des peines, y compris d'amende, le prononcé et l'exécution de peines
courtes d'emprisonnement et des peines alternatives à celui-ci.
Ensuite, la Cour recommande l
a mise en œuvre d'une
« gestion plus
efficace des alarmes lors des DDSE en laissant plus de souplesse de gestion
au niveau local
»
2
.
La direction de l'administration pénitentiaire (DAP) et la direction
des affaires criminelles et des grâces inscrivent leurs actions dans cette
dynamique de renforcement de la gestion au niveau locale. Ainsi un guide et
un protocole type portant sur la remontée et le traitement des incidents
seront prochainement diffusés dans les services déconcentrés.
Enfin, la Cour appelle au renforcement du « contrôle des SPIP sur
l'exécution des TIG et des DDSE en y intégrant des visites au lieu de
résidence des probationnaires ».
Nous souscrivons pleinement à cette recommandation. Si les
conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP) peuvent d'ores
et déjà réaliser de telles visites dans un certain nombre de situations, le
développement de certaines missions de contrôle, confiées à d'autres
professionnels, par exemple au domicile, mais aussi sur le lieu de travail du
probationnaire ou sur le lieu d'exécution du TIG, peut être envisagé. Une
réflexion sur les contours et l'organisation de telles missions, ainsi que des
moyens susceptibles d'y être affectés, notamment en termes de ressources
humaines devra être menée.
En deuxième lieu, la Cour appelle à renforcer les dispositifs
d'insertion des probationnaires condamnés à une peine de DDSE ou de TIG.
Ce besoin est parfaitement identifié. Dès le mois d'avril de cette
année, nous tiendrons des états généraux de l'insertion et de ta probation.
L'objectif poursuivi sera notamment de mobiliser encore davantage
l'ensemble des politiques publiques d'insertion à destination des personnes
placées sous main de justice, pour la prise en compte des spécificités de ces
publics.
Ainsi, la Cour recommande de «
privilégier le recrutement de
travailleurs sociaux, d'éducateurs et de coordonnateurs d'activités au sein des
équipes
des
SPIP
»
3
.
La
DAP
poursuit
le
renforcement
de
la
pluridisciplinarité au sein des SPIP initiée en 2008 et, en particulier,
privilégie le recrutement d'assistants de service social.
2
Recommandation n° 3.
3
Recommandation n° 9
.
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Aussi, la Cour recommande de « promouvoir les partenariats avec les
acteurs spécialisés dans l'accompagnement global des personnes en grande
difficulté, en recensant les démarches engagées, en y allouant des budgets
identifiés et en évaluant leur contribution à l'objectif de réinsertion »
4
.
Des actions sont déjà l'œuvre. En particulier, les partenariats entre
les SPIP et les services de droit commun sont encouragés dès lors qu'ils sont
de nature à faciliter l'insertion ou la réinsertion des personnes suivies. Ainsi,
par exemple, la DAP est partenaire avec des associations généralistes
enmatière de lutte contre la grande précarité (Croix rouge, Secours
catholique, Emmaüs...). Par ailleurs, dans le cadre de l'évaluation de ces
partenariats, un état des lieux est réalisé chaque année afin d'identifier tes
pistes d'améliorations et les perspectives.
En troisième lieu, la Cour invite à repenser l'articulation entre les
SPIP et l'autorité judiciaire.
En effet, le renforcement de la collaboration entre SPIP et autorité
judiciaire, ainsi que la connaissance réciproque des missions poursuivies,
est indispensable pour favoriser le prononcé des TIG et des DDSE, et en
améliorer les conditions de mise à exécution.
Notamment, la Cour recommande la mise en place d'une
«
expérimentation de présence des SPIP au sein des tribunaux judiciaires au
moment des audiences correctionnelles
»
5
.
Si nous souscrivons à cette recommandation, c'est sous réserve que
soient précisés les modalités et les contours d'une telle expérimentation. En
effet, il pourrait être envisagé d'expérimenter la présence du SPIP au sein
des juridictions, qui serait seul en charge de la réalisation des enquêtes
sociales rapides, ainsi que le cas échéant, son intervention au cours de
l'audience correctionnelle, sous réserve que cela n'entraine pas un
allongement de ces dernières. Aussi, la possibilité d'étendre cette
expérimentation par exemple à la réalisation d'un premier entretien par le
SPIP dès la sortie de l'audience, doit encore donner lieu à une analyse plus
approfondie de l'utilité en termes de réduction des délais de mise à exécution
de la peine, et de développement des alternatives à l'incarcération dans un
contexte de surpopulation carcérale, compte tenu des contraintes
organisationnelles du greffe correctionnel et des ressources humaines
mobilisables au sein des SPIP.
En outre, la Cour invite à la « présence régulière de l'ensemble des
magistrats concernés à la commission d'exécution des peines et des juges
4
Recommandation n° 5.
5
Recommandation n° 7.
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7
d'application des peines aux audiences correctionnelles »
6
. Mon ministère
œuvre depuis déjà de nombreuses années, au renforcement des contacts et
de la connaissance réciproque entre les juges correctionnels et les services
de l'administration pénitentiaire, en particulier, via le suivi des conclusions
de l'inspection générale de la Justice dans le cadre de l'audit sur la mise en
œuvre
du « bloc peine » issu de la loi du 23 mars 2019 n° 2018-2022. Aussi,
si nous souscrivons à l'utilité d'une participation régulière des juges de
l'application des peines aux audiences correctionnelles, c'est à la condition
que cette participation puisse être adaptée localement compte tenu des
effectifs disponibles, et être accompagnée d'un suivi de ta charge
supplémentaire de travail que cela représente pour ces magistrats. Par
exemple, une telle présence pourrait être privilégiée pour certaines
audiences, telle que la comparution immédiate.
En quatrième lieu, la Cour souligne la nécessité développer les
connaissances afin d'être en mesure de mieux évaluer l'efficacité de la
politique de développement des alternatives à l'incarcération et des
aménagements de peine sur fa prévention de la récidive.
Le ministère partage cet objectif et est d'ores et déjà engagé dans une
démarche d'évaluation des publics suivis et de leurs prises en charge, qui
devrait encore être optimisée dans les années à venir, comme le préconise la
Cour aux termes de sa recommandation n° 4
77
. Il convient par ailleurs de
noter qu'au-delà du sujet du profil social des personnes suivies en milieu
ouvert, le ministère soutient et conduit régulièrement des études portant sur
le milieu ouvert, dans lesquelles la question du profil social des bénéficiaires
des mesures est traitée. C'est par exemple le cas des recherches en cours
relatives à l'état des lieux du bracelet anti rapprochement ou à l'évaluation
de ta réalité virtuelle dans la prise en charge des auteurs de violences
conjugales.
Plus largement, le ministère a déjà initié des travaux de nature à
répondre à la recommandation n° 6 de la Cour portant sur l'évaluation de
la récidive et de l'efficacité de la prise en charge des personnes placées sous
main de justice. Ces travaux
8
portant sur des données sensibles produites par
6
Recommandation n° 1.
7
Recommandation n° 4 :
« Conduire, en lien avec des organismes de recherche, des
études en vue de caractériser le profil social des personnes suivies en TIG et en DDSE ».
8
Il s'agit notamment : travaux de modélisation statistique permettant de réduire les
biais de sélection, interconnexion de flux de données entre les applicatifs APPI /
PRISME et TIG 3600 dès 2025 (dans le but d'évaluer l'efficacité de la mesure de TIG),
et l'enrichissement du corpus de données existantes avec des données sociales portant
sur la période qui suit la fin de la mesure.
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plusieurs ministères, et requérant une expertise technique pointue,
s'inscrivent dans le temps long.
Cependant, la production d'un indicateur annuel de récidive trois ans
après la fin d'une mesure de TIG ou de DDSE peut être envisagée à plus
courte échéance.
Enfin, si nous saluons cette première démarche d'évaluation sur un
sujet d'intérêt majeur pour le ministère, il nous parait utile de vous faire part
de nos réserves sur certaines orientations méthodologiques du rapport.
Ainsi, nous regrettons que pour conclure à la faible efficacité du TIG
sur la prévention de la récidive, la Cour ait fait le choix d'étudier une cohorte
datant de 2010, de bénéficiaires de cette mesure, ne permettant pas de
prendre en compte les nombreuses améliorations organisationnelles mises
en place depuis pour l'exécution de cette peine. En outre, il nous est difficile
de comprendre le choix opéré par la Cour de ne pas comparer les taux de
récidive entre les TIG prononcés et les TIG exécutés, au motif que les
données concernant les TIG exécutés ne sont pas disponibles. En effet, une
telle comparaison, nous paraissait pouvoir être menée sur des cohortes de
dossiers pour lesquels la mise à jour de l'état d'exécution des peines inscrites
au casier judiciaire national (CJN) était réalisée, ce d'autant que ces mises
à jour sont de plus en plus fréquentes
9
Quant au degré d'appropriation de
la plateforme TIG 360°
par ses utilisateurs, que la Cour juge faible, il nous
semble que le caractère progressif du déploiement de cet applicatif, par
strates successives de fonctionnalités pour des zones géographiques et des
publics définis, n'a peut-être pas suffisamment été pris en compte lors de
l'évaluation. La temporalité de rédaction du rapport ne nous semble ainsi
pas nécessairement correspondre à l'activité finale de la plateforme.
Ces quelques réserves n'entachent nullement l'engagement du
ministère de la Justice pour le développement du prononcé et le
renforcement de l'exécution de ces deux peines alternatives à l'incarcération
que sont le TIG et la DDSE, particulièrement au regard des enjeux actuels
en matière de surpopulation carcérale.
9
Le CJN enregistre les avis d'exécution des TIG prononcés comme peine transmis par
les JAP des juridictions et les avis de fin de TIG suite aux décisions de conversion de
peine, en peine de TIG. Le délai d'enregistrement de ces décisions par le CJN est de 10
jours en février 2025.
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