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Soit-communiqué
°
OUI
°
NON
Date
Prénom Nom de l’autorité de
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
ET SA RÉPONSE
COMMUNE DE LA POSSESSION
Cahier 2 : ZAC « MOULIN JOLI »
(Département de La Réunion)
Exercices 2019 et suivants
Le présent document a été délibéré par la chambre le 26 novembre 2024
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
3
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
5
RECOMMANDATIONS
.........................................................................................................
6
PROCÉDURE
...........................................................................................................................
7
OBSERVATIONS
....................................................................................................................
8
1
UNE OPÉRATION AMBITIEUSE AUX FONDEMENTS FRAGILES
........................
9
1.1
Une zone d’aménagement concertée comportant de multiples contraintes
.....................
9
1.1.1
Une maîtrise foncière très partielle d’un périmètre très vaste
.................................
9
1.1.2
Une topographie accidentée et hétérogène
............................................................
11
1.1.3
Des aménagements diversifiés
...............................................................................
13
1.2
Un contrat initial présentant des fragilités juridiques et économiques
..........................
16
1.2.1
Une concession conclue sans publicité ni mise en concurrence en 1997
..............
16
1.2.2
Une absence de partage des risques financiers
......................................................
17
1.2.3
L’absence de prise en compte d’éléments stratégiques
.........................................
18
1.2.4
La banalisation d’avenants opérant des modifications contractuelles
substantielles
..........................................................................................................
19
2
DES DIFFICULTÉS D’EXÉCUTION
..............................................................................
20
2.1
Une expropriation illégale grevant le bilan de l’opération
............................................
20
2.1.1
Un choix des parcelles à exproprier contestable
....................................................
20
2.1.2
Une voie de fait sanctionnée et un arrêté de cessibilité annulé
.............................
21
2.1.3
Une indemnité surévaluée
......................................................................................
21
2.1.4
Une transaction menée sans autorisation du conseil municipal
.............................
23
2.1.5
Un défaut de contrôle communal persistant
..........................................................
24
2.2
Une sous-réalisation des aménagements, un triplement des coûts
................................
25
2.2.1
Des surfaces aménagées réduites
...........................................................................
25
2.2.2
Un coût prévisionnel d’opération plus que triplé
...................................................
26
2.2.3
Un suivi inadapté à l’ampleur et à la durée de la convention
................................
28
2.2.4
Une perte conséquente de ressources en raison d’une méconnaissance des
procédures budgétaires et comptables
...................................................................
29
3
UN IMPORTANT DÉFICIT DE TRÉSORERIE À RÉSORBER AVANT 2026
.........
31
3.1
Un bilan déséquilibré
.....................................................................................................
31
3.1.1
Une trésorerie déficitaire
.......................................................................................
31
3.1.2
L’augmentation des frais financiers
.......................................................................
33
3.2
Les
scenarii
de reprise du déficit par la commune
........................................................
33
3.2.1
La création contestable d’un budget annexe
..........................................................
33
3.2.2
Les alternatives au budget annexe
.........................................................................
38
3.3
Une hypothèque sur les finances communales
..............................................................
39
3.3.1
Analyse prospective avec reprise de 2,5 M€ de déficit en 2026
............................
39
3.3.2
Analyse prospective avec reprise d’un déficit de 9,3 M€ en 2026
........................
40
ANNEXES
...............................................................................................................................
42
RÉPONSE
...............................................................................................................................
50
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
4
PRÉCISIONS TERMINOLOGIQUES
L'opération d'aménagement de la zone d'aménagement concerté de « Moulin Joli » a fait
l'objet d'une concession auprès de la société d’équipement du département de La Réunion
(SEDRE). Dans les documents contractuels et comptes rendus à la commune sur le bilan de
l'opération, les termes de "trésorerie déficitaire", "trésorerie négative", "insuffisance de
trésorerie", "participation au déficit", "déficit de clôture" sont utilisés indifféremment.
La chambre utilise le terme de "déficit" ou, le cas échéant, "boni de clôture" pour le
montant de la participation qui sera demandé à la commune au terme du contrat. Le terme de
"participation prévisionnelle au déficit de clôture" est utilisé pour le montant prévisionnel de la
participation au déficit de clôture.
L’expression "déficit annuel de trésorerie" est utilisée pour désigner le montant de
l'insuffisance de trésorerie constaté chaque année dans les comptes.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
5
SYNTHÈSE
La commune de La Possession a créé en 1997 la ZAC « Moulin Joli » qui est l’opération
d’aménagement la plus vaste de La Réunion. Outre son étendue de 172 hectares (ha), elle se
distingue par sa complexité. La topographie accidentée et hétérogène, la multiplicité des
aménagements programmés ainsi que la maîtrise très partielle du foncier constituent des
contraintes majeures qui ont été mal appréhendées dès la conception de l’opération.
Le choix d’une concession d’aménagement conclue aux risques exclusifs de la
commune apparaît critiquable que ce soit en raison de l’insuffisante appréhension du risque
financier ou encore de sa durée excessive, ou encore de l’absence de mise en concurrence, ne
lui permettant pas s’adapter aux évolutions juridiques et économiques.
Prévue en 1997, pour une durée initiale de huit années, l’opération devrait, après de
multiples prolongations, arriver à échéance en 2026. Bien que l’ambitieux programme initial
d’aménagement n’ait été que partiellement réalisé, le coût de l’opération a plus que triplé,
passant de 38 M€ à 100 M€ de 1997 à 2013 et de 100 M€ à 105 M€ de 2014 à 2024. Le suivi
de l’opération a été insuffisant au regard des enjeux, à l’instar du manque de réactivité de la
commune pour le financement des opérations. Si la participation prévisionnelle de la commune
au déficit de clôture de l’opération est limitée à 3,3 M€ dans l’hypothèse où la commune
procède au rachat de 13 M€ de foncier et de 9,3 M€ dans l’hypothèse inverse, son montant
effectif dépendra de la réalisation de la vente, d’ici 2026, de 17 M€ de foncier.
La maîtrise très partielle du foncier a nécessité des opérations d’expropriation qui ont
été déléguées au concessionnaire sans contrôle. Il en a résulté des condamnations qui
sanctionnent des procédures menées irrégulièrement, pour un montant de plus de 8 M€. La
condamnation liée à l’opération d’aménagement de « Moulin Joli » n’a pas fait l’objet de
provisions comme recommandé par la chambre dans son précédent rapport de 2016.
Cette absence de prise en compte d’un déficit prévisionnel de clôture de
l’opération « Moulin Joli » permet à la commune de présenter une situation financière maîtrisée
au regard des principaux indicateurs de gestion. Toutefois, au terme de la concession, la
commune devra couvrir le solde des opérations, ce qui pourrait déséquilibrer durablement les
finances communales. Alors que la commune estime que sa participation au déficit de clôture
de la concession devrait rester limitée à 3,3 M€ sans tenir compte de la réserve faite sur la
condamnation liée à l’opération d’expropriation, elle envisage d’acquérir, en 2025, 13 M€ de
foncier de la concession, via un budget annexe de lotissement. Ce budget annexe mettrait à la
charge de la commune la commercialisation des terrains.
Ce budget, dont l’équilibre repose sur une commercialisation de terrains destinés à des
particuliers, serait financé par la souscription d’un emprunt destiné au logement social majorant
de 1 M€ le coût de l’opération dans l’hypothèse où la commune pourrait réaliser les cessions
en quatre années et de 4 M€ dans l’hypothèse inverse.
Ainsi, l’externalisation des opérations d’équipement nécessite un encadrement plus
étroit de la part des services municipaux tout au long de la procédure, de la conception à la
livraison. La commune doit préparer ces opérations d’envergure en appréhendant les risques
juridiques, économiques et contractuels, en définissant exhaustivement ses besoins, en vérifiant
les opérations confiées à ses prestataires et en limitant les demandes supplémentaires. Le
développement du contrôle juridique et financier, notamment pour permettre la régularisation
des opérations, constitue une priorité.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
6
RECOMMANDATIONS
1
N°
Type
Domaine
Objet
Page
1
Performance
Relations
avec les tiers
Mettre en place, dès 2024, un contrôle rigoureux des opérations
d’expropriation réalisées par la commune ou ses mandataires.
25
1
Les recommandations sont classées sous la rubrique « régularité » lorsqu’elles ont pour objet de rappeler la règle
(lois et règlements) et sous la rubrique « performance » lorsqu’elles portent sur la qualité de la gestion, sans que
l’application de la règle ne soit mise en cause. Leur mise en œuvre fait l’objet d’un suivi.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
7
PROCÉDURE
Le contrôle des comptes et de la gestion de la commune de La Possession a été ouvert
par lettre du président de la chambre adressée le 22 février 2024, réceptionnée le jour même, à
Mme Vanessa Miranville, en sa qualité de maire de la commune.
L’entretien préalable à la formulation d’observations provisoires de la chambre prévu à
l’article L. 243-1 du code des juridictions financières a eu lieu avec Mme Miranville.
Lors de sa séance du 29 août 2024, la chambre a arrêté ses observations provisoires qui
portent sur le suivi des recommandations, la situation financière, l’ouverture du centre-ville sur
le littoral, qui font l’objet d’un premier cahier. Le présent cahier est dédié à la zone
d’aménagement concertée (ZAC) « Moulin Joli ».
La chambre a reconstitué l’historique de la concession d’aménagement de la zone. Ses
répercussions sur les finances communales justifient le passage en revue de l’ensemble de cette
opération d’envergure régionale dont l’exécution, toujours en cours, s’étale sur plus de deux
décennies.
Le rapport d’observations provisoires a été notifié à la commune et à cinq destinataires
en septembre 2024. La préfecture de La Réunion et la direction de l'environnement, de
l'aménagement et du logement (DEAL) n’y ont pas répondu.
Suite à leur demande, la maire et la société d’équipement du département de La Réunion
(SEDRE) ont été auditionnés le 12 novembre 2024.
La chambre, après avoir examiné les réponses reçues, a arrêté les observations
définitives suivantes dans sa séance du 26 novembre 2024.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
8
OBSERVATIONS
La Possession fait partie de la
« ceinture urbanisée littorale »
2
, située dans l’aire
d’attractivité du nord-ouest de La Réunion. Avec une population qui, entre 1990 et 2021, a plus
que doublé
3
, l’aménagement de ce territoire étroit constitue un enjeu auquel la commune a
souhaité répondre, notamment par la création de deux zones d’aménagement concertées
(ZAC)
4
.
À l’entrée nord de la ville sur son centre historique, la ZAC « Cœur de Ville » a été
lancée en 2012. À l’entrée sud, la concession d’aménagement de la ZAC « Moulin Joli », a été
conclue en 1997 pour une durée initiale de huit années et devrait, après de multiples
prolongations, arriver à échéance en 2026. C’est sur cette seconde opération que l’instruction a
été menée compte tenu des enjeux financiers qu’elle représente.
Carte n° 1 :
Localisation de la ZAC
Source :
CRAC 2022
2
Albert Lopez.
La population réunionnaise : histoire d’une transition démographique
. Expressions,
1995, 07,
pp. 27-47. Hal-02403820.
3
De 15 000 habitants en 1990 à 35 000 habitants en 2021.
INSEE, 27 juin 2024, Dossier complet commune de
la Possession (97 408).
4
Prévues à l’alinéa 1 de l’article L. 311-1 du code de l’urbanisme :
« les zones d'aménagement concerté sont les
zones à l'intérieur desquelles une collectivité publique décide d'intervenir pour réaliser ou faire réaliser
l'aménagement et l'équipement des terrains, notamment de ceux que cette collectivité ou cet établissement a acquis
ou acquerra en vue de les céder ou de les concéder ultérieurement à des utilisateurs publics ou privés ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
9
1
UNE OPÉRATION AMBITIEUSE AUX FONDEMENTS
FRAGILES
1.1
Une zone d’aménagement concertée comportant de multiples
contraintes
1.1.1
Une maîtrise foncière très partielle d’un périmètre très vaste
Par délibérations des 21 février et 12 novembre 1997, la commune de La Possession a
créé la ZAC « Moulin Joli ». D’une superficie de 172 hectares
5
dont 70 étaient déjà urbanisés,
c’est l’opération d’aménagement la plus vaste de La Réunion. Cette opération répond aux
préconisations de densification et de structuration de la commune du schéma d’aménagement
régional (SAR) qui prévoyait 110 hectares d’extension urbaine destinés à accueillir
3 000 habitants supplémentaires et 50 hectares d’extensions d’activité
6
.
En matière d’aménagement, la procédure de la ZAC est l’outil opérationnel auquel est
généralement adossé un outil contractuel, la concession d’aménagement, qui confie à
l’aménageur l’étude et la réalisation de l’opération d’aménagement.
Le cahier des charges de la concession prévoit que les bases générales de l’opération
seront définies par le plan d’aménagement de zone (PAZ) et par le programme des équipements
publics. Cet aménagement comprend l’ensemble des travaux de voirie, de réseaux, d’espaces
libres et d’installations diverses à l’exclusion des équipements d’infrastructure primaire
7
,
réalisés dans le cadre d’une convention de mandat. Le concessionnaire devait acquérir les
immeubles nécessaires à la réalisation des ouvrages inclus dans la concession
8
et réaliser les
équipements d’infrastructure secondaire et tertiaire de la zone.
Le périmètre étendu de la ZAC implique l’impossibilité pour l’aménageur de disposer
d’une maîtrise totale du foncier la composant. Sur les 172 hectares de la ZAC, il s’agissait
d’acquérir 95 hectares dont 34 hectares auprès de propriétaires privés
9
. La ZAC « Moulin Joli »
étant une ZAC à maîtrise foncière partielle, elle doit répondre à une double contrainte. D’une
part, l’aménageur doit assurer la maîtrise du projet urbain sur des terrains qu’il n’a pas cédés.
D’autre part, il doit parvenir à un équilibre économique de l’opération d’aménagement alors
que, n’ayant pas cédé l’intégralité des terrains à bâtir, il se prive d’une partie de la plus-value
d’une opération qu’il a générée par les travaux réalisés et financés
10
. Sur ce point, les terrains
non acquis par l’aménageur peuvent, afin d’assurer une continuité dans l’aménagement de la
5
Bien que le cahier des charges de la concession mentionne 180 hectares environ.
6
Note explicative annexée au dossier de déclaration d’utilité publique de la ZAC « Moulin Joli » de mai 1999.
7
Trois types de travaux de viabilité peuvent être distingués : ceux de viabilité primaire permettent notamment de
relier la zone à l’extérieur, ceux de viabilité secondaire permettent d’équiper la zone dans son ensemble, tandis
que ceux de viabilité tertiaire ne visent qu’une catégorie déterminée d’habitants de la zone.
8
L’article 2 a) et 8 du cahier des charges.
9
Dossier de réalisation de la ZAC « Moulin Joli », modalités prévisionnelles de financement, mars 2000.
10
Xavier COUTON,
Les ZAC à maîtrise foncière partielle : état des lieux après la loi ELAN
, Lexis Nexis
Construction, Urbanisme n° 3 du 1
er
mars 2019.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
10
ZAC, être viabilisés et équipés par le biais du programme d’aménagement d’ensemble (PAE)
prévu à l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme, alors en vigueur
11
, et à l’article premier du
cahier des charges du traité de concession en échange d’une participation financière au titre des
équipements publics réalisés
12
.
L’article R. 311-11 du code de l’urbanisme, alors en vigueur
13
, imposait à la personne
publique à l’initiative de la création de la zone la constitution d’un dossier de réalisation
comprenant :
«
(…) a) Le programme des équipements publics à réaliser dans la zone ; / b) Le
projet de plan d'aménagement de zone, sauf si la décision de création a maintenu en vigueur
les dispositions du plan d'occupation des sols ; / c) Les modalités prévisionnelles de
financement de l'opération d'aménagement, échelonnées dans le temps. ».
Le dossier de réalisation de la ZAC « Moulin Joli » a été approuvé par le conseil
municipal le 14 mars 2000. Le document concernant les modalités prévisionnelles de
financement consiste à recenser les dépenses selon la typologie suivante : études préalables, les
acquisitions foncières pour 95 hectares, les travaux d’aménagement (création et élargissement
de voiries et de placettes, réalisation de réseaux divers et d’espaces verts), les frais financiers et
le PAE
14
pour un montant de 56 M€
15
. Les recettes sont identifiées : la cession de terrains aux
constructeurs selon leur affectation (habitat, commerces et services, bureaux, activités et
parc
16
), les cessions à la commune, les participations des constructeurs dans le cadre du PAE
pour un montant prévisionnel de 220 MF (49 M€). Toutefois, il ne comporte aucune donnée
temporelle quant à la mise en œuvre des mesures permettant de récupérer ces financements.
Cette incapacité initiale à établir des délais de réalisation afin d’inscrire les opérations
dans un calendrier va perdurer. En effet, les délais pour réaliser l’aménagement d’une zone
aussi vaste, n’ont fait l’objet ni d’une planification détaillée ni de mesures coercitives
(non-application des pénalités de retard prévues au contrat).
Les acquisitions foncières ont été fastidieuses, comme l’attestent les prorogations
17
de
la déclaration d’utilité publique du 14 juin 2000 pour s’étendre sur 15 années et une surface
globale ramenée à 65 hectares
18
. La notice explicative jointe à la demande de prorogation de la
11
Article L. 332-9 du code de l’urbanisme en vigueur du 10 février 1994 au 1
er
mars 2012 :
« Dans les secteurs de
la commune où un programme d'aménagement d'ensemble a été approuvé par le conseil municipal, il peut être
mis à la charge des constructeurs tout ou partie du coût des équipements publics réalisés pour répondre aux
besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans le secteur concerné. Lorsque la capacité
des équipements programmés excède ces besoins, seule la fraction du coût proportionnelle à ces besoins peut être
mise à la charge des constructeurs. Lorsqu'un équipement doit être réalisé pour répondre aux besoins des futurs
habitants ou usagers des constructions à édifier dans plusieurs opérations successives devant faire l'objet de zones
d'aménagement concerté ou de programmes d'aménagement d'ensemble, la répartition du coût de ces équipements
entre différentes opérations peut être prévue dès la première, à l'initiative de l'autorité publique qui approuve
l'opération. »
12
Le montant de la participation a été fixé à 135 € le m
2
.
13
Article R. *311-11 du code de l'urbanisme.
14
La différence entre le montant de la participation financière et le montant des travaux d’aménagement est
supportée par la commune et intégrée au bilan d’aménagement de la ZAC (page 16 du document « modalités
prévisionnelles de financement »).
15
252 MF.
16
Les recettes relatives à l’aménagement de la zone parc étaient estimées à 17 MF, soit 3,8 M€.
17
Une première prorogation de cinq ans a été effectuée par arrêté préfectoral du 15 juin 2005 et une seconde par
décret du 11 juin 2010 pour la même période.
18
Demande de prorogation de la DUP pour la ZAC « Moulin Joli », notice explicative, février 2010, page 18.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
11
déclaration d’utilité publique (DUP) de février 2010 retranscrit les difficultés rencontrées pour
maîtriser l’ensemble des parcelles faisant partie de l’opération.
Si un récapitulatif des acquisitions amiables et par voie d’expropriation est réalisé, la
chambre constate l’omissionconcernant l’expropriation des consorts P. réalisée en 2002
19
(voir
infra
§ 2.3
)
et dont le contentieux
20
, alors en cours, ne s’achèvera qu’en 2014. En effet, deux
des quatre parcelles expropriées ont été «
neutralisées
» du plan foncier présenté dans la notice
explicative (voir annexe n° 5).
L’absence de cadrage temporel des acquisitions foncières a pour conséquence une
augmentation des dépenses de l’opération. D’après la demande de prorogation de la DUP de
2010, le prix du foncier sur l’ensemble du secteur de la ZAC « Moulin Joli » a connu une nette
augmentation. Cette augmentation s’est effectuée de manière régulière de 2005 à 2008, avec
une moyenne de 25 €/m² (de 40 €/m² à 65 €/m²), jusqu’à un « emballement » en 2009 où le
montant des transactions « a plus que doublé passant d’un prix moyen de 65 € à plus de 130 €
le mètre carré »
21
.
Au titre du bilan révisé des dépenses au 1
er
janvier 2009, le concessionnaire
prévoyait, selon les estimations de France domaine de juillet 2009, une augmentation des
dépenses relatives au poste des acquisitions foncières de 13 M€
22
.
Le glissement temporel de l’opération, ne permettant pas une anticipation des évolutions
du marché immobilier, a accru la vulnérabilité de la ZAC à celui-ci. La question de l’équilibre
financier de la ZAC se pose ainsi avec plus d’acuité.
1.1.2
Une topographie accidentée et hétérogène
La ZAC « Moulin Joli » se déploie du sud au nord du bourg de la rivière des Galets à la
ZAC « Saint-Laurent » et d’est en ouest du quartier de Pichette à l’est à l’ancienne route
nationale
23
. Sa topographie, qui présente un
« profil en cuvette, en pente
(jusqu’à 14 %)
vers la
plaine des galets »
24
,
constitue une contrainte.
Elle est traversée par la ravine Balthazar où se déversent de multiples couloirs de
drainage à débit variable, nécessitant une gestion des eaux pluviales, en lien avec les
problématiques d’imperméabilisation de la zone du fait de son artificialisation. L’étude de
programmation de 1998 prévoyait un franchissement systématique des ravines par les voies
25
,
nécessitant la construction d’ouvrages d’art. En 2010
26
, un ouvrage de franchissement de la
ravine Balthazar a été réalisé, ainsi que des travaux d’endiguement de la ravine. De cette
contrainte a résulté une localisation des opérations de logement et d’équipement entre les bras
de ravine.
19
Voir l’annexe n°5.
20
Pour le détail, voir annexe n° 4.
21
Demande de prorogation de la DUP pour la ZAC « Moulin Joli », notice explicative, février 2010, page 31.
22
Note explicative précitée.
23
Carte n° 2
infra.
24
Étude de programmation de la ZAC « Moulin Joli » du 23 octobre 2018.
25
Étude de programmation précitée, page 10.
26
Demande de prorogation de la DUP pour la ZAC « Moulin Joli », notice explicative, février 2010, page 12.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
12
Autour de ces ravines, se déploie un espace naturel de 40 hectares
27
,
dont 12 hectares
avaient vocation à être aménagés en parc urbain disposant d’équipements de sports et de loisirs,
dont un centre aquatique de 6 hectares. L’ambition de cette zone était de devenir la seconde
grande centralité urbaine de la commune, un
« parc urbain à vocation régionale »
28
.
La ZAC « Moulin Joli » a été créée trois années avant l’entrée en vigueur de la loi du
13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU), ce qui permettait
de conduire une opération immobilière en dérogeant aux dispositions d’urbanisme en vigueur,
par l’adoption d’un plan d’aménagement de la zone (PAZ) non lié par un plan d’urbanisme
29
.
Ce PAZ a retenu une conception restrictive des zones naturelles limitée à une
« zone de ravine
et de végétation naturelle à préserver »
autour de laquelle étaient envisagés des équipements
de loisirs et sportifs, représentant la zone « PARC »
30
. Ce zonage n’a pas tenu compte ni des
servitudes existantes telles que les forages d’eau potable, ni des caractéristiques physiques de
la zone, notamment ; de la qualité des sites, des milieux et des espaces naturels, des paysages
et de leur intérêt ; du point de vue esthétique, historique ou écologique ; du caractère d'espaces
naturels ; de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ou de la nécessité
de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. Ainsi, lors de l’adoption du plan local
d’urbanisme de la commune en 2005, une partie substantielle de la zone à aménager a été
classée en zone naturelle.
27
L’étude de programmation de 1998 identifiait cette zone comme
« un espace noble, qualitatif, qui va de plus
permettre de résoudre certains problèmes liés aux ravines (importance des crues) ».
28
Étude de programmation précitée.
29
Article L. 123-6 du code de l'urbanisme
, version en vigueur du 9 janvier 1983 au 01 avril 2001 :
« Dans les
zones d'aménagement concerté créées en application de l'article L. 311-1, les dispositions du plan d'occupation
des sols rendu public ou approuvé, à moins que l'acte de création de la zone ne décide de les maintenir en vigueur,
cessent d'être applicables à compter de la publication de l'acte portant approbation du plan d'aménagement de
zone, à l'exception de celles qui sont relatives aux espaces boisés classés. ».
30
Plan d’aménagement de la zone de la ZAC « Moulin Joli », approuvé par délibération du conseil municipal du
14 mars 2000.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
13
Carte n° 2 :
Classement en zone N des espaces à aménager de la ZAC « Moulin Joli »
Plan d’aménagement de la zone de 2000
Plan local d’urbanisme
Source : Commune de La Possession
1.1.3
Des aménagements diversifiés
La procédure de la zone d’aménagement concerté, procédure d’initiative et de
compétence publiques
31
, permet de mettre en œuvre un programme diversifié (logements,
bureaux, commerces, activités) et des équipements publics d’infrastructure et de superstructure.
31
Seuls peuvent être à l’initiative d’une ZAC, l’État, une collectivité territoriale ou un établissement public ayant
vocation, de par la loi ou ses statuts, à réaliser ou à faire réaliser l’objet de la zone.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
14
Tel est le cas de la ZAC « Moulin Joli », envisagée comme
« un outil de reconquête et de
redéfinition d’un « patchwork » urbain en pleine mutation, fait d’un processus d’accumulation
en tâches successives de zones d’habitats individuels, d’ensembles collectifs et de zones
implantées le long de l’axe R.N.1.E. »
32
.
Outre sa vocation à répondre de manière équilibrée à
la demande en logements, la ZAC ambitionne de créer une nouvelle centralité urbaine,
attractive et dynamique. La création de 10 hectares de surfaces de construction à usage
d’activités économiques et d’équipements
33
, valorisant ainsi son positionnement au centre du
pôle économique du territoire de la côte ouest,
34
répond à cet objectif. Sa proximité avec la
route nationale est un atout pour le développement d’activités économiques notamment dans le
tertiaire, manquantes alors, la commune étant perçue comme un
« dortoir »
35
.
L’étendue et l’hétérogénéité de la ZAC ont nécessité un découpage en trois secteurs,
identifiés dans l’étude de programmation
36
urbaine de 1998 : le secteur 1, qui longe la route
nationale, est celui dont le
« caractère urbain est très marqué »
et concerne les activités mixées
avec du logement et d’importants équipements ; le secteur 2, logements et petits équipements
de loisirs, avec 250 logements concernés par la procédure de résorption de l’habitat insalubre
(RHI) ; le secteur 3 concerne la partie haute où sont prévus des logements à caractère individuel,
sous forme de lotissements ou d’opérations groupées.
Figure n° 1 : Représentation schématique de la ZAC Moulin Joli en 2009
Source : Agorah
Le programme constitue la
« feuille de route de l’opération »,
car il identifie les
aménagements à réaliser en fonction des contraintes de celle-ci. Un premier programme
d’aménagement a été réalisé en 1998. Il a fait l’objet d’une modification en 2004, après
l’élaboration du plan de masse détaillé de la ZAC. Ainsi, une année avant le terme initial de la
convention, les études étaient toujours en cours.
32
Étude de programmation
supra
.
33
Demande de prorogation de la DUP pour la ZAC « Moulin Joli », notice explicative, février 2010, page 33.
34
À 4 km du centre-ville de La Possession, à 3,5 km du secteur de Cambaie et à 4,5 km du Port.
35
AGORAH,
Étude qualitative des ZAC, diagnostic urbain, ZAC « Moulin Joli »
, septembre 2009.
36
D’après le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement
(CEREMA), la programmation urbaine
« est une démarche qui vise à fixer les objectifs en termes de rendu pour
l’espace urbain (…) ; une étape déterminante dans la vie du projet (…). Il s’agit de traduire en éléments de
programme les choix du porteur de projet en matière d’aménagement, de logement, d’activités, d’équipements
publics, de services en cohérence avec le contexte local et les besoins. ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
15
Carte n° 3 :
Objectifs initiaux et plan général de la ZAC Moulin Joli (source : Agorah)
Données générales
Superficie totale 172 ha
Périmètre opérationnel 85 ha
Programme de l’opération
2 200 logements dont 300 en RHI
équipements
publics :
deux
écoles,
un
collège, un gymnase
équipements privés : centre de remise en
forme, un parc aquatique, une résidence
hôtelière
équipements de commerce : surface
alimentaire, centre de l’habitat, 14 commerces
en rez-de-chaussée d’immeuble
activités tertiaires et bureaux.
Objectifs de la ZAC
répondre à une forte demande de logements et
résorber l’habitat insalubre
offrir des équipements diversifiés de qualité liés
(sportifs, de loisirs …)
permettre l’implantation d’activités économiques
améliorer la desserte générale du quartier
valoriser l’espace naturel remarquable en cœur
de ZAC
créer des aménagements de qualité
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
16
1.2
Un contrat initial présentant des fragilités juridiques et économiques
1.2.1
Une concession conclue sans publicité ni mise en concurrence en 1997
En 1997, la commune de La Possession a confié à la société d’équipement du
département de La Réunion (SEDRE) l’aménagement de la ZAC « Moulin Joli » pour une durée
de huit années
37
. La SEDRE est une société d’économie mixte ayant notamment pour objet
« l’étude et la réalisation par tous moyens de toutes opérations d’aménagement, de rénovation
et de restructuration urbaine (…) ; la réalisation d’opérations concernant l’infrastructure
générale et les équipements collectifs des collectivités territoriales (…) la construction et la
réalisation de tous immeubles individuels ou collectifs à usage principal d’habitation (…) en
tant que maître d’ouvrage, mandataire ou prestataire de service (…) la vente, la location, (…)
de tous ouvrages, constructions, locaux, immeubles collectifs ou individuels, d’habitation ou
d’activité et de tous équipements et aménagements réalisés »
38
. La commune de La Possession
n’étant pas actionnaire de cette société, il ne lui était pas possible de contracter avec celle-ci en
tant que prestataire intégré selon la technique
in house
ou quasi-régie.
Les dispositions du code de l’urbanisme en vigueur au moment de la signature du contrat
de concession dispensaient de toute mise en concurrence les concessions d’aménagement
39
.
Ces dispositions, contraires aux normes européennes
40
, ont donné lieu à l’ouverture
d’une procédure en manquement à l’encontre de l’État français
par la commission des
Communautés européennes. En 2005, l’article
41
en cause a été modifié mais validait les
concessions d’aménagement signées antérieurement
« en tant que leur légalité serait contestée
au motif que la désignation de l'aménageur n'a pas été précédée d'une procédure de publicité
permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes »
42
.
Le bien-fondé d’une telle
validation rétroactive a été remis en cause, le Conseil d’État ayant jugé en 2011
43
que
« le
principe de sécurité juridique s’il est susceptible de permettre aux cocontractants de poursuivre
leurs relations contractuelles durant une période transitoire, afin de les dénouer dans des
conditions acceptables, ne saurait autoriser la validation pure et simple de ces conventions
».
Ainsi, dès 2005, il était légalement établi qu’une concession devait être conclue en
mettant en œuvre les règles de publicité et de mise en concurrence. Cependant, la remise en
cause de la validation rétroactive des conventions d’aménagement opérée par le Conseil d’État
en 2011 est venue poser la question de la sécurisation juridique de la concession « Moulin Joli »,
lors de l’audit réalisé à la demande de la commune en juillet 2015
44
, soit dix années après la loi
portant validation législative. L’audit a préconisé d’opérer une neutralisation des voies et des
37
Article 6 du traité de concession d’aménagement conclu le 9 décembre 1997.
38
Article 2 des statuts de la SEDRE.
39
Article L. 300-4 du code de l'urbanisme
en vigueur du 15 novembre 2016 au 14 décembre 2000.
40
Directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés
publics de travaux.
41
Par la
loi du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement
.
42
Article 11 de la loi op. cit.
43
CE, 18 novembre 2011, req. n° 342147,
SNC Eiffage Aménagement
.
44
Groupement Stratorial finances / Fitex / ARGEMI / JDC,
Audit de la ZAC « Moulin Joli », note synthétique
,
25 juillet 2015.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
17
délais de recours en publiant la décision de signer le contrat de concession. À l’issue du délai
de recours de deux mois à compter de cette publication, la décision, devenue définitive ne
pouvait plus être contestée. La SEDRE avait indiqué qu’une consultation juridique de la société
Services, Conseils, Expertises, Territoires (SCET)
45
sur ce sujet avait été réalisée.
La commune n’a pas suivi cette proposition de neutralisation des voies de recours et a
choisi de prolonger le contrat par avenant à quatre reprises plutôt que de recourir à une
procédure de mise en concurrence ouverte à l’ensemble des opérateurs.
1.2.2
Une absence de partage des risques financiers
Il est établi de manière constante
46
que la notion de risque d’exploitation inhérente à la
concession la distingue d’un autre type de contrat administratif, à savoir le marché public
47
. Or,
aux termes de l’article 5 du traité de concession,
« l’opération est réalisée sous le contrôle de
la commune et à ses risques financiers ».
Ainsi, le contrat ne faisant supporter à la SEDRE
aucun risque financier, celui-ci ne peut se voir appliquer le régime juridique de la concession.
L’article L. 1121-1 du code de la commande publique définit la concession comme
« (…) le
contrat par lequel une ou plusieurs autorités concédantes (…) confient l'exécution de travaux
(…) à un ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l'exploitation
de l'ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d'exploiter l'ouvrage ou le service qui
fait l'objet du contrat, soit de ce droit assorti d'un prix. / La part de risque transférée au
concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute perte
potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement théorique ou
négligeable. Le concessionnaire assume le risque d'exploitation lorsque, dans des conditions
d'exploitation normales, il n'est pas assuré d'amortir les investissements ou les coûts, liés à
l'exploitation de l'ouvrage ou du service, qu'il a supportés. »
.
Il en résulte que le contrat conclu en 1997 aux risques exclusifs de la commune
s’apparente à un marché public. Dès lors, il aurait dû respecter les obligations de publicité et de
mise en concurrence incombant aux marchés publics
48
les plus contraignantes. En effet, les
recettes prévisionnelles de l’opération établies en mars 2000
49
, excédant les seuils de passation
applicables
50
, auraient nécessité la passation d’une procédure formalisée.
Sur le fond, le risque supporté par la commune implique que le déficit éventuel de
l’opération lui revienne, les obligations contractuelles des parties auraient dû être définies
différemment, surtout s’agissant de la tenue et du suivi du bilan de l’opération.
La conclusion d’avenants successifs, prolongeant cette irrégularité, a été privilégiée à
une régularisation du contrat tant d’un point de vue de la procédure que de celui de la répartition
45
Filiale de la Caisse des dépôts et consignations.
46
CE, 30 mars 1916,
Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux.
47
CJCE, 13 octobre 2005,
Parking Brixen GmbH
; CE, 7novembre 2008,
Département de Vendée
.
48
Les dispositions des articles R*300-11-1 à R*300-11-3 du
code de l'urbanisme
qui assujettissent les
« concessions d’aménagement ne transférant pas un risque économique »
aux dispositions du code de la
commande publique, n’étant en vigueur qu’à compter de 2009.
49
Dossier de réalisation de la ZAC « Moulin Joli », modalités prévisionnelles de financement
, mars 2000, page 20.
50
219 MF soit 49 M€, le seuil applicable aux marchés de travaux prévu par la directive 93/37/CEE du Conseil du
14 juin 1993
portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux étant alors de
5 M écus soit environ 5 M€.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
18
des obligations de chacune des parties. Les prolongations successives de la concession n’ont
pas permis une réduction du déficit annuel de trésorerie.
1.2.3
L’absence de prise en compte d’éléments stratégiques
Le contrat initial n’a pas pris en compte divers éléments stratégiques pour son exécution
financière. La commune n’a ni anticipé ni géré le risque financier qu’elle a choisi de porter sur
une opération d’aménagement de cette envergure. Au contraire, en choisissant, tout au long de
la convention
51
, de limiter sa participation financière prévisionnelle au déficit de clôture
52
qu’elle devra prendre en charge
in fine
, elle a contribué à son aggravation.
Ainsi, alors que les modalités prévisionnelles de financement de la ZAC doivent être
obligatoirement définies, les subventions et les participations au déficit originel estimé à 7 M€
(32 MF)
53
, n’ont pas été prévues. En effet, le document se borne à mentionner que
« les
subventions dont la répartition et les taux exacts ne sont pas connus à ce jour et qui seront
obtenues pour le montage de l’opération viendront en déduction du montant de la participation
de la collectivité. »,
ce montant n’étant lui-même pas déterminé dans la convention. Ce n’est
qu’en 2023, avec la signature de l’avenant n° 7 que la participation prévisionnelle au déficit de
clôture de 0,8 M€ a été portée à 3,3 M€.
Les participations au titre des équipements publics, qui peuvent être financières ou en
nature, n’ont pas été davantage explicitées. Pour que les apports en foncier soient inscrits en
participation, il faut qu’ils apparaissent dans les comptes de la commune. Depuis 2000
54
, ces
apports en nature doivent être précisés dans la concession à peine de nullité
55
. Les audits réalisés
par la commune ont recommandé qu’une délibération soit prise, l’apport en foncier y étant
évalué à 1,6 M€. Bien que le contrat et le cahier des charges établis avant l’entrée en vigueur
de la disposition précitée ne les aient pas précisés, il aurait été de bonne gestion de le faire par
la suite. La commune indique que «
l'apport en foncier est juste valorisé dans le bilan de la
ZAC, que l'on retrouve en dépenses et en recettes. Il n'y a pas eu d'écritures comptables (dans
les comptes de la commune). Il pourra être envisagé une régularisation de tous les apports
fonciers lors de la clôture de la concession
56
. ».
S’agissant des frais financiers, l’absence de risque pesant sur le concessionnaire aurait
dû, selon la commune
57
, amoindrir le taux appliqué aux frais financiers, ce qui n’a pas été le
cas en l’espèce. Dans le silence de la convention, la SEDRE a appliqué des taux de financement
à court terme
58
sans en informer la commune
59
.
La SEDRE justifie l’application de ces frais financiers par l’absence d’avance de
trésorerie par la collectivité. Elle conteste le manque d’information de la commune sur le taux
51
Conseil municipal de décembre 2023 où est mis en avant la très faible participation de la commune au déficit de
l’opération.
52
Il s’agit des participations pour assurer l’équilibre financier de la convention.
53
Dossier de réalisation de la ZAC « Moulin Joli », modalités prévisionnelles de financement
, mars 2000, page 20.
54
Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain.
55
Article L. 300-5 du code de l'urbanisme en vigueur à compter du 1
er
avril 2019.
56
Réponse de la commune.
57
Courrier du maire à la SEDRE en date du 29 janvier 2016.
58
Taux moyen mensuel du marché monétaire.
59
Groupement Stratorial finances / Fitex / ARGEMI / JDC,
Audit de la ZAC « Moulin Joli »
, note synthétique,
25 juillet 2015.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
19
de financement à court terme appliqué et précise avoir consenti une réduction de deux points
sur le taux appliqué à compter de 2015. Si la commune a renégocié le taux à la baisse, elle n’a
pas remis en cause le recours systématique à un financement de court terme et n’a pas expliqué
le non recours aux financements de long terme spécifiques au logement social.
Ces carences initiales ont fragilisé le montage et le suivi de l’opération. Elles témoignent
d’un manque de rigueur de la collectivité préjudiciable à l’équilibre financier de la ZAC, malgré
certaines mesures correctives prises par la commune à compter de 2015.
1.2.4
La banalisation d’avenants opérant des modifications contractuelles
substantielles
En matière de contrat administratif
60
, qu’il s’agisse d’un marché public ou d’une
concession, il est essentiel de prévoir une durée permettant de déterminer le terme du contrat.
Il s’agit de déterminer l’étendue des obligations et de prévenir ainsi l’obsolescence des clauses
contractuelles. Pour les marchés publics, l’article L. 2112-5 du code de la commande publique
précise que la durée du marché est définie en tenant compte de la nature des prestations et de la
nécessité d’une remise en concurrence périodique. En matière de concession, l’article L. 3114-7
du même code dispose que
« la durée du contrat de concession est limitée ».
Il en résulte que
la prolongation du contrat doit être proportionnée et limitée, toute modification substantielle
remettant en cause l’équilibre contractuel initial nécessitant une remise en concurrence.
Le contrat a fait l’objet de sept avenants
61
La durée a été portée de 8 à 29 années. La
rémunération du concessionnaire (avenant 2), l’intégration de pénalités de retard et l’intégration
de travaux supplémentaires (avenant 3)
62
, le montant de la participation communale (avenants
5, 6 et 7) constituent des modifications substantielles.
La chambre s’étonne de la volonté des deux parties de perdurer sur cette voie par la
passation d’avenants successifs prolongeant ledit contrat de 21 années. En effet, la commune
n’a pas envisagé une fois la convention arrivée à son terme d’effectuer une mise en
concurrence
63
pour, d’une part, se conformer à la réglementation et, d’autre part, actualiser le
cahier des charges. Au contraire, elle a conclu 7 avenants qui ont modifié substantiellement la
concession devenue inadaptée. Ces prolongations successives ont étendu d’une manière
anormalement longue la durée du contrat, ce qui a inévitablement altéré de manière substantielle
les conditions du contrat. Le coût d’opération est passé de 38 M€ à 100 M€ de 1997 à 2013
sous l’ancienne mandature puis de 100 M€ à 105M€ de 2014 à 2024 avec la nouvelle
mandature. Après 2014, des réductions conséquentes du programme ont été opérées, à savoir
60
Il s’agit en l’espèce d’un contrat passé par une personne publique soumis à la compétence et au droit
administratifs par disposition expresse de la loi.
61
L'avenant n° 1 a prolongé la durée de la concession à huit années supplémentaires pour la porter à 16 ans (2005),
l'avenant n° 2 a prolongé la durée de la concession de sept années supplémentaires pour la porter à 23 ans et
modifié les recettes du concessionnaire (2010), l'avenant n° 3 a prolongé la durée de la concession de 4 années
supplémentaires (2016), l'avenant n° 4 a prolongé la durée de la concession de 2 années supplémentaires (2020),
l'avenant n° 5 a permis de définir un nouveau bilan prévisionnel actualisé et définir un nouveau montant de
participation de la commune (2021),les avenant n° 6 et 7 ont permis de définir un nouveau bilan prévisionnel
actualisé et un nouveau montant de participation de la commune (2023).
62
Il s’agit des ilots C2 et D2 nommés par la suite « Olivine » et « Mantaly ».
63
CE, 7
ème
et 2
ème
sous-sections réunies, 18 novembre 2011,
SNC Eiffage Aménagement
.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
20
les dépenses ne donnant pas lieu à d’éventuelles recettes, avec notamment l’abandon non
formalisé de l’aménagement de la ravine Balthazar, dénommée également zone « PARC ».
2
DES DIFFICULTÉS D’EXÉCUTION
2.1
Une expropriation illégale grevant le bilan de l’opération
Le cahier des charges de la concession d’aménagement signée en 1997 a prévu
64
,
conformément aux dispositions de l’article L. 300-4 du code l’urbanisme alors en vigueur
65
,
que la SEDRE se chargerait de l’acquisition des biens nécessaires à la réalisation de l’opération
d’aménagement par la voie de l’expropriation
66
. La SEDRE, concessionnaire d’aménagement,
revêt la qualité de mandataire de l’expropriant, ce qui implique pour la commune mandante
l’opposabilité des actes de son mandataire
67
. Le mandant voit donc sa responsabilité engagée
dans le cadre des actions de son mandataire comme s’il en avait été l’auteur.
2.1.1
Un choix des parcelles à exproprier contestable
Sur les 172 hectares de la ZAC, 70 hectares étaient déjà urbanisés. Le dossier de
réalisation de la ZAC
68
avait prévu que les acquisitions foncières porteraient sur environ
95 hectares dont les parcelles et les propriétaires avaient préalablement été identifiés :
15 hectares
69
à la SEDRE, 45 hectares à la Société d'habitations à loyer modéré de La Réunion
(SHLMR), 2 hectares à la commune, les surfaces les plus importantes (33 hectares) appartenant
à des particuliers.
Les parcelles des consorts P., situées en zone urbaine densifiée (ZUD) au plan
d’occupation des sols de 1990, n’ont pas été identifiées parmi celles à acquérir par le dossier de
64
Articles 2 a) et 8 du cahier des charges de la concession.
65
Version en vigueur du 15 novembre 1996 au 14 décembre 2000 :
« L'État, les collectivités locales ou leurs
établissements publics peuvent confier l'étude et la réalisation des opérations d'aménagement prévues par le
présent livre à toute personne publique ou privée y ayant vocation. / Lorsque la convention est passée avec un
établissement public, une société d'économie mixte locale définie par la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983, ou une
société d'économie mixte dont plus de la moitié du capital est détenue par une ou plusieurs des personnes publiques
suivantes : État, régions, départements, communes ou leurs groupements, elle peut prendre la forme d'une
concession d'aménagement. Dans ce cas, l'organisme concessionnaire peut se voir confier les acquisitions par
voie d'expropriation. »
66
En annexe n° 4 les étapes d’une procédure d’expropriation.
67
CE, 10 décembre 1993, n° 57758,
Commune de Plemet contre Entreprise Brosolo et autres
; CE,
15 janvier 1992, n° 62302,
Perbet
concernant des mandats de maîtrise d’ouvrage.
68
Dossier de réalisation de la ZAC, page 2.
69
Arrondi au millième supérieur.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
21
réalisation de la ZAC établi en mars 2000. Ces parcelles avaient d’ailleurs été cédées aux
consorts P. en 1996 par la commune
70
.
Leur surface cumulée expropriée est de 85 867 m². Or, le programme de 1998 et le
dossier de réalisation de la ZAC en mars 2000 prévoyaient, pour le secteur ZUD, 6 000 m² de
surface hors œuvre nette (SHON) pour la réalisation d’équipements publics identifiés comme
« scolaire, jeux, administratif »,
soit environ quatorze fois moins que ces parcelles.
Dans ces conditions, il est peu compréhensible que la SEDRE ait procédé à leur
expropriation en 2002. La commune sera d’ailleurs incapable de justifier devant le juge
administratif l’étendue de la surface expropriée.
2.1.2
Une voie de fait sanctionnée et un arrêté de cessibilité annulé
La SEDRE a occupé une partie des terrains afin d’y construire une école avant que ne
soit établi l’arrêté de cessibilité
71
et sans autorisation des propriétaires
72
. Ce faisant, elle a
commis une voie de fait pour laquelle les consorts P. ont obtenu 23 000 € de dommages-intérêts
compensatoires
73
.
En parallèle, le Conseil d’État a annulé l’arrêté de cessibilité
74
au motif que « (
…) les
quatre parcelles (…) ont une superficie totale de 85 867 m² ; qu’il ressort des pièces du dossier
que les équipements publics dont le plan d’aménagement de la zone prévoit la réalisation sur
ces parcelles, à savoir une école et deux voies nouvelles, ont une surface de 8752 m² ; qu’ainsi
et en l’absence de toute explication de la commune de La Possession sur cette divergence des
surfaces en cause (…) l’arrêté de cessibilité a porté sur une superficie excédant largement celle
qui était nécessaire à la réalisation des équipements et aménagements déclarés d’utilité
publique (…)
».
2.1.3
Une indemnité surévaluée
Suite à l’annulation de la procédure d’expropriation, les consorts P. ont été indemnisés.
En avril 2014
75
, le concessionnaire a été condamné par la cour d’appel de Saint-Denis à payer
8,6 M€ à ces derniers
76
, la commune de La Possession n’a pas été partie à l’instance.
La fixation de l’indemnité principale de 7,3 M€ a pris en compte les caractéristiques des
terrains au moment de la déclaration d’utilité publique du 14 juin 2000, soit 75 867 m
2
en zone
70
Délibération du conseil municipal du 30 mai 1996.
71
Occupation allant de février 2002 au 10 décembre 2002.
72
L’accord d’un seul indivisaire aurait été obtenu alors que celui de l’ensemble des indivisaires était requis, ledit
accord ayant été contesté par les propriétaires comme étant un faux par la suite.
73
CA Saint-Denis, 1
er
juillet 2011, arrêt n° 11/536.
74
CE, 21 mai 2008, n° 295609.
75
CA Saint-Denis, 28 avril 2014, arrêt n° 14/372.
76
La commune avait été également condamnée à plus de 12 M€ à la suite d’une expropriation (Consorts S. -
tribunal de grande instance de Saint-Denis du 11 décembre 2013). Après avoir exproprié les consorts S. la
commune n’a pas respecté l’utilité publique et a échangé les terrains avec P., un promoteur, adjoint spécial de la
commune de 1989 à 1995.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
22
urbaine densifiée « constructible » à 96 € le m
2
et 10 000 m
2
en zone « PARC
77
» à
3 € le
m
2
.
Ce zonage est issu du plan d’occupation des sols de 1990 mais il n’a pas pris en compte une
servitude existante qui affecte de façon permanente l’utilisation et l’exploitation du bien comme
le prévoit le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique
78
.
Or, un forage d’eau, le forage « Balthazar », a été créé en 1993 et mis en service en
1994. Il est clairement identifié par le plan d’aménagement de la zone
79
, l’opération
immobilière envisagée par les consorts P. avait d’ailleurs reçu un avis défavorable de la
compagnie générale des eaux
80
. Le plan des servitudes, approuvé par délibération du conseil
municipal du 23 octobre 1998 annexé au plan d’aménagement de la zone de mars 2000,
identifiait cette
« servitude résultant de l’installation de périmètres de protection des eaux
potables »
81
.
La commune, gestionnaire alors de la distribution d’eau potable sur son territoire,
et le concessionnaire, chargé de l’aménagement de la zone, ne pouvaient méconnaître
l’existence de cette servitude
82
, la réglementation relative à la mise en place des périmètres de
protection des points de prélèvement d’eau destinée à la consommation humaine étant alors
applicable
83
.
En outre, un arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis du 16 novembre 2007 mentionnait
des problèmes de constructibilité
84
.
Logiquement, en 2005, le plan local d’urbanisme a classé 40 000 m
2
de ces terrains en
zone naturelle. Une délibération du 14 mars 2000 approuvait le plan d’aménagement de la zone,
mais elle n’a pas été prise en compte lors de la déclaration d’utilité publique de juin 2020.
Pour la commune qui porte, seule, l’ensemble des risques financiers liés à cette
« concession », le fait de ne pas avoir été partie à l’instance, compte tenu des enjeux financiers
de ce contentieux est susceptible de lui être fortement dommageable.
L’expropriation réalisée par la SEDRE a porté sur un foncier de 87 867 m
2
alors que les
besoins de l’aménageur pour la construction identifiée à l’origine sur ce secteur ne nécessitaient
que 8 752 m
2
pour la construction de l’école Jules Joron
85
et de deux voies. Par la suite,
l’aménageur a réalisé un lotissement lui permettant de porter à 38 000 m
2
la surface utilisée. En
revanche, 47 867 m
2
restent inexploitables, car classés en zone naturelle et en zone
inconstructible. Si l’aménageur n’avait exproprié que la surface utile, le montant de l’indemnité
d’expropriation aurait été d’environ 840 000 €. À ce montant s’est ajoutée une astreinte de
0,5 M€. L’indemnité correspondante a été imputée au bilan de l’opération.
77
C’est-à-dire zone naturelle inconstructible.
78
Article L. 322-2 du CECUP.
79
PAZ, note concernant les réseaux d’évacuation des eaux pluviales et des eaux usées et les réseaux d’alimentation
en eau potable, pages 63 et 64 ; plan des servitudes page 75.
80
C. Cass, 3
ème
civ., 9 septembre 2009, n° 08-11.154 mentionnant cour d’appel de Saint-Denis, 16 novembre 2007,
RG n°06/00846 :
« (…) l'opération de promotion immobilière envisagée par Monsieur P. sur ces terrains
apparaissait fortement compromise en raison des avis défavorables émis par la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES
EAUX et par la direction de l'agriculture. »
81
Pages 52 et 53 du PAZ.
82
Une étude hydraulique aurait été réalisée en 1997 par le bureau d’études BCEOM, d’après l’Agorah.
83
Circulaire n° 97-2 du 2 janvier 1997
.
84
C. Cass, 3
ème
civ., 9 septembre 2009, n° 08-11.154 mentionnant l’arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis du
16 novembre 2007 précité.
85
La SEDRE était concessionnaire de l'aménagement des voiries, parking et également mandataire du maître
d’ouvrage de certaines constructions dont l’école Jules Joron.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
23
2.1.4
Une transaction menée sans autorisation du conseil municipal
La SEDRE a réglé le contentieux indemnitaire par voie de transaction
86
le 27 mai 2015.
L'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales dispose que
« sous le contrôle
du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le
département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil
municipal et, en particulier : [...] 7° De passer dans les mêmes formes les actes de vente,
échange, partage, acceptation de dons ou legs, acquisition, transaction, lorsque ces actes ont
été autorisés conformément aux dispositions du présent code ; [...]. »
.
La signature de la
transaction par l'exécutif local ne peut intervenir avant que la délibération de l'organe délibérant
qui l'autorise n'ait acquis un caractère exécutoire.
Cette transaction fait suite à l’exercice de la délégation du droit d’expropriation de la
commune à la SEDRE. Ses conséquences financières, soit plus de 8 M€, seront, à terme,
supportées par la commune. La SEDRE devait donc obtenir l’autorisation de la commune pour
transiger, comme cela a été le cas s’agissant de l’indemnisation de la voie de fait
87
.
Or, en l’espèce, le seul élément autorisant la SEDRE à transiger pour 8 M€ est un
courrier simple en date du 9 octobre 2014 de l’exécutif local nouvellement élu
88
alors même
qu’il ne disposait pas de délégation de pouvoir du conseil municipal pour le faire
89
.
En 2015, la commune a diligenté un audit de l’opération. Suite à celui-ci, la commune
considère que la procédure d’expropriation a été conduite de manière contestable par la SEDRE.
Bien que le conseil municipal, de l’époque, ait approuvé le principe de cette expropriation, la
commune considère que l’annulation par le Conseil d’État de l’arrêté de cessibilité révèle
l’existence d’une illégalité fautive du concessionnaire et, par conséquent, que l’indemnité
d’expropriation devrait être portée par la SEDRE et ne devrait pas être intégrée au bilan de
l’opération. Aussi, en 2016, le conseil municipal a approuvé les comptes rendus d’activité de
2010 à 2014 de l’opération sauf pour ce qui concerne l’expropriation des consorts P.
La SEDRE, qui n’estime pas avoir commis une faute, a toutefois consenti à une prise en
charge partielle de l’indemnité, «
le concessionnaire procédera à un abattement forfaitaire de
sur les charges qu’il a imputées ou imputera à l’opération (…) d’un montant de 1 286 147 €.
Cet abattement correspond à la prise en charge par la SEDRE d’une partie de l’indemnité de
dépossession versée aux consorts P. et des frais associés. Il sera imputé par dixièmes, à partir
de 2015, jusqu’à l’achèvement de la concession prévu en 2024.
»
90
.
La chambre relève que cette participation de la SEDRE aux indemnités de dépossession,
qui consiste en une déduction des paiements demandés à la commune de 2015 à 2024, fausse
86
La transaction constitue l'unique possibilité offerte au maire de régler par voie de protocole amiable les actions
en justices en cours. Les collectivités territoriales et les établissements publics locaux peuvent recourir à la
transaction librement depuis la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements
et des régions sans avoir à solliciter l'accord du Premier ministre (cf. avis CE, section des travaux publics, du
21 janvier 1997).
87
Délibération du conseil municipal du 23 mai 2012.
88
L’exécutif local a été renouvelé le 30 mars 2014.
89
Cette autorisation de transiger sera accordée lors du second mandat par la délibération du 3 juillet 2020 et dans
la limite de 1 000 €.
90
Article 4 de l’avenant n° 3.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
24
les comptes de l’opération et contrevient au principe d’universalité qui interdit la compensation
entre les recettes et les dépenses.
La condamnation, portée au bilan de l’opération
91
, a nécessité pour la commune de
trouver de nouvelles recettes, avec l’aménagement de foncier supplémentaire, afin de
rééquilibrer à terme le bilan déficitaire de la concession. Suivant l’audit, un avenant a été conclu
pour prolonger le contrat de quatre années supplémentaires.
Le désaccord sur l’imputabilité de la réparation du préjudice causé aux consorts P. du
fait de l’expropriation illégale persiste entre la commune et le concessionnaire. Depuis 2014, la
commune le mentionne dans chaque délibération portant approbation des comptes rendus
annuels, sous forme d’une réserve. Les parties pourront, le cas échéant, saisir la justice de ce
différend lors des opérations de clôture de la concession.
2.1.5
Un défaut de contrôle communal persistant
À l’origine, il était prévu l’acquisition de 95 ha ; 74 ha ont été acquis par le
concessionnaire dont 57 ha par expropriation, c’est-à-dire plus des trois quarts des
acquisitions
92
. Douze années après le début de l’opération
93
, l’agence pour l’observation de
La Réunion, l’aménagement et l’habitat (AGORAH) a relevé un retard dans l’acquisition des
parcelles.
L’indemnisation des consorts P. a été fixée à plus de 8 M€ alors que le budget
d’acquisition foncière prévisionnel s’élevait à environ
94
12,7 M€. Reportée au bilan de
l’opération, cette indemnisation est venue bouleverser son fragile équilibre financier.
La commune a maintenu la délégation des prérogatives de puissance publique à la
SEDRE jusqu’en 2021 sans avoir jamais exercé de contrôle. En effet, aucun rapport spécial sur
les conditions d’exercice de ces prérogatives par la société d'économie mixte locale
95
n’a été
transmis par le concessionnaire, alors que sa transmission annuelle est obligatoire afin d’être
présenté à l'organe délibérant de la collectivité territoriale et adressé au représentant de l'État
dans le département. Ces rapports n’ont été pas produits et n’ont été réclamés ni par la commune
ni par la préfecture et ce, même après la condamnation du concessionnaire du fait de
l’expropriation réalisée.
La SEDRE a confirmé ne pas les avoir produits
96
. La réglementation prévoit pourtant la
réalisation d’un rapport spécifique compte tenu de la délégation de prérogatives de puissance
publique. La liste des acquisitions foncières figurant au CRAC ne peut en tenir lieu.
Ces retards et ces condamnations démontrent la nécessité de suivre l’exercice d’une
prérogative de puissance publique aussi importante que celle de l’expropriation, c’est pourquoi
la chambre recommande à la commune de :
91
Conformément à l’article 13 du cahier des charges de la concession.
92
Source : tableau transmis par la SEDRE.
93
AGORAH,
Étude qualitative des ZAC, diagnostic urbain, ZAC Moulin Joli
, septembre 2009, page 6.
94
Les modalités prévisionnelles de financement et de paiement, page 12 prévoyaient 72 MF.
95
Article L. 1524-3 du CGCT.
96
Courriel SEDRE du 29 mai 2024.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
25
Recommandation n° 1 : Mettre en place, dès 2024, un contrôle rigoureux des opérations
d’expropriation réalisées par la commune ou ses mandataires.
La commune s’est engagée à poursuivre l’amélioration du suivi des opérations
d’aménagement notamment en ce qui concerne les expropriations.
2.2
Une sous-réalisation des aménagements, un triplement des coûts
2.2.1
Des surfaces aménagées réduites
Le programme initial
97
qui prévoyait 294 000 m
2
d’aménagements a été réduit à
30 500 m
2
. Les 41 000 m
2
de surfaces destinées aux activités économiques ont été supprimées
alors que celles destinées à l’habitat ont été abondées de 40 000 m
2
; il en a résulté
1 000 logements supplémentaires, à l’inverse le nombre de logements RHI a été réduit d’un
tiers.
Tableau n° 1 :
L’évolution du programme
98
En m
2
Programme initial
Programme modifié
Réalisations
Habitat
170 000 m²
210 000 m²
188 790 m²
Activités économiques
41 000 m²
Non connues
Équipements publics
30 000 m²
13 000 m²
Non connues
Commerces et services
25 000 m²
25 000 m²
Non connues
Bureaux
11 000 m²
15 500 m²
Non connues
Autres
17 000 m²
Non connues
Surface aménageable
294 000 m²
263 500 m²
188 790 m²
En nombre
Programme initial
Programme modifié
Réalisations
Nombre de logement
2 200
3 213
2 697
Dont logement RHI
300
192
104
Source : réponse de la SEDRE
Les surfaces destinées aux équipements publics ont, elles, été réduites de 17 000 m
2
. Le
suivi du programme de construction des équipements publics ne comprend que les
superstructures. La SEDRE a indiqué que «
le fait que la 3
ème
colonne
99
n’ait pas été complétée
ne signifie pas qu’il n’y a pas eu de construction, mais que les sommes des surfaces plancher
constructible afférant aux équipements n’ont pas été entrées
».
Les réalisations d’équipements publics n’ont pas pu être précisées, même si le
concessionnaire recense trois écoles, un collège, un centre communal d’action sociale et un
97
À l’origine, il était prévu un plan d’eau destinée à la baignade et au jeux aquatiques, le projet a évolué en un
parc aquatique similaire à celui existant à l’Étang-Salé d’une surface de 25 000 m
2
. De même, la résidence de
tourisme d’affaire n’a pas été réalisée.
98
Les 17 000 m² « autres » correspondent au « PARC ».
99
Tableau n° 1.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
26
gymnase, ainsi que d’autres équipements publics de moins grande importance : six terrains de
tennis, un stade, trois aires de jeux, une aire de
street work out
et un
skate-park
.
L’aménageur a complété sa réponse en indiquant que «
cette opération a bientôt 30 ans
et plusieurs responsables d’opérations se sont succédés dans le pilotage de cette opération avec
malheureusement, comme cela peut arriver parfois une perte d’informations ou des outils de
suivi renseignés partiellement. L’enregistrement des permis de construire depuis l’origine et le
« reporting » sur des tableaux de suivi en font partie. Nous avions fait un très gros travail de
reconstitution pour la partie logements ce qui nous permet d’avoir une vision très précise, mais
les données ne sont pas disponibles avec précision pour le tertiaire et les équipements. Il s’agit
de contraintes d’organisation liées à la durée de vie d’une telle opération.
».
Comme pour les équipements publics, les réalisations se rapportant aux activités
économiques, commerces, services et bureaux n’ont pas été complétées. La SEDRE affirme
que le programme a été, en grande majorité, réalisé sauf un centre commercial et un espace
commercial (le projet « Latania »), mais ne précise pas les surfaces effectivement aménagées.
Elle recense trois crèches, un groupe scolaire privé, cinq pharmacies, deux résidences pour
personnes âgées, un centre de dialyse, deux pôles médicaux, un centre paramédical privé ainsi
qu’un centre de loisirs sportifs privé.
Enfin, les parties ont renoncé à l’aménagement des 17 000 m
2
destinés au parc (ligne
« autres » dans le tableau), au motif que ces dépenses ne généraient pas de recettes.
Selon la SEDRE, 10 % des surfaces restent à aménager pour l’habitat et 516 logements.
La chambre relève l’absence de suivi des surfaces aménagées, essentiellement préjudiciable
aux équipements publics puisqu’il donne lieu à remise à la commune et conditionnait la
récupération de la recette du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)
(voir
infra
§ 2.2.4)
2.2.2
Un coût prévisionnel d’opération plus que triplé
Le coût prévisionnel de l’opération, qui avait été prévu à l’origine à 38 M€, est passé à
plus de 105 M€ fin 2022.
Tableau n° 2 :
Coût prévisionnel de l’opération
Dépenses
en milliers
€
Recettes
en milliers
€
Acquisitions du foncier
31 940,4 Cessions
72 189,4
Travaux
48 869,3 Participations
25 435,8
Études + honoraires
5 388,9 Loyer
320,0
Frais financier
11 569,4 Subventions
7 328,1
Rémunération
6 001,0 Autres recettes
459,3
Autres dépenses
1 963,5
TOTAL
105 732,6 TOTAL
105 732,6
Source : réponse de la SEDRE
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
27
Tableau n° 3 :
Réalisations de l’opération
Dépenses
en milliers
€
Recettes
en milliers
€
Acquisitions du foncier
30 807,0 Cessions
54 504,6
Travaux
43 256,8 Participations
17 179,7
Études + honoraires
5 192,1 Loyer
198,7
Frais financier
10 503,2 Subventions
6 885,9
Rémunération
5 074,0 Autres recettes
460,3
Autres dépenses
1 894,1
TOTAL
96 727,2 TOTAL
79 229,2
Source : réponse de la SEDRE
Fin 2023, les dépenses réalisées s’élèvent à 96,7 M€, soit 91,5 % du montant des
dépenses prévues tandis que les recettes réalisées s’élèvent à 79,2 M€, soit 74,9 % du montant
des recettes prévues. L’état des réalisations présente un déficit de trésorerie de plus de 18,3 M€.
L’audit de l’opération, diligenté par la commune en 2015, constatait l’augmentation des
postes de dépenses qui ont
« explosé »
(« acquisitions foncières », « travaux tertiaires »,
« rémunérations », « frais financiers », etc.), alors que le niveau des équipements publics et les
prestations rendues par le concessionnaire ne permettaient pas de justifier cette évolution.
Les frais financiers liés à la trésorerie de l’opération sont en très forte hausse, compte
de tenu de la hausse des taux d’intérêt (+ 0,8 M€ en 2023) ; ils représenteraient à terme 11 %
des dépenses.
Sur les 18 M€ de déficit de trésorerie constaté fin 2023, 17 M€ correspondraient à des
cessions foncières qui n’ont pas été réalisées et dont la réalisation avant la fin de la concession
est incertaine
100
. La commune envisage la récupération d’une partie de ce foncier dont elle
devrait assurer la revente. L’objectif de la commune est d’obtenir un financement à cet effet
pour limiter la hausse des frais financiers.
L’avenant au contrat de concession de septembre 2023 porte à 13 M€ la participation
de la commune au coût de l’opération, dont 3,3 M€ au titre de la participation financière
prévisionnelle au déficit de clôture (dont seulement 0,8 M€ ont été versés), 3,9 M€ au titre des
apports en foncier, 2,7 M€ au titre de la participation à la RHI, 1,2 M€ au titre de la participation
aux équipements publics et 1,7 M€ au titre de reversement de subventions. Les concours
supplémentaires sont liés à l’augmentation des frais financiers et à la perte de recettes
prévisionnelles de la participation des constructeurs
« qui reste à confirmer ».
La prévision limite à 3,3 M€ la participation financière au déficit prévisionnel de
clôture, ce qui suppose la récupération en deux années de plus de 17,7 M€ de recettes de cession
immobilière.
100
Les rapports d’audit ont dénoncé la surévaluation des recettes de cession. Le prix de vente des lotissements
prévus par l’avenant n° 3 de 2016 est maximisé à 13 M€, voir
infra
.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
28
2.2.3
Un suivi inadapté à l’ampleur et à la durée de la convention
La durée de l’opération conjuguée à son ampleur et à sa complexité a entravé le suivi
de son exécution. Depuis la signature de la convention en 1997, cinq mandatures municipales
101
se sont déroulées, avec un changement d’exécutif local survenu en 2014. Outre ces
changements dans l’équipe dirigeante, les personnels tant de la commune que de la SEDRE se
sont succédés. Les outils déployés se sont révélés insuffisants pour assurer la continuité de ce
suivi.
La SEDRE, bien qu’ayant produit les comptes rendus annuels à la collectivité comme
exigé réglementairement, concède ne pas disposer d’un suivi individualisé des dépenses,
notamment s’agissant des équipements publics
102
, au motif que celui-ci
« n’existe pas dans le
CRAC tel que présenté. »
Toutefois, d’après le guide comptable professionnel
103
, il n’existe pas
de
modèle de compte-rendu d'activité de concession (CRAC) obligatoire, mais il est
recommandé de joindre les annexes jugées nécessaires afin de fournir une information claire et
facilement comparable.
Le concessionnaire reconnaît en outre une perte d’informations conjuguée à des outils
de suivi renseignés partiellement. Il excipe de
« contraintes d’organisation liées à la durée de
vie d’une telle opération »
auxquelles il n’a manifestement pas su répondre.
S’agissant de la commune, les CRAC des années 2011 à 2013 n’ont pas été approuvés,
faute de transmission de la part du concessionnaire
104
. De plus, ce n’est que depuis 2015 qu’elle
fait régulièrement auditer les CRAC qui lui sont transmis. Elle indique que les observations ont
fait l’objet de
« réunions de présentation des analyses avec demande de prise en compte faite
de la collectivité au concessionnaire. Ces demandes sont réitérées jusqu'à prise en compte
effective. »
. Cependant, d’importants constats réalisés dans les audits n’ont pas été suivis
d’effet, notamment concernant l’optimisation fiscale du fonds de compensation de la TVA ou
encore la valorisation des apports en nature.
Alors que la commercialisation des terrains constitue la principale source des recettes
de la ZAC, la commune n’a pas contrôlé la bonne réalisation de cette prestation. Au titre de ses
missions, l’article 2 du cahier des charges demandait au concessionnaire de
« (…) e) mettre en
place des moyens efficaces pour assurer la commercialisation dans les meilleures conditions
possibles ; organiser toute structure d’accueil et de conseil des acquéreurs ou locataires
potentiels … ».
Dans les faits, le concessionnaire a privilégié une communication informelle
ainsi que l’installation de panneaux sur site et en entrée de la ZAC, dans un contexte immobilier
assez défavorable.
L’audit de l’opération, réalisé en 2015, a relevé un manque de rigueur dans la gestion et
le suivi de cette opération d’envergure, tant du côté du concessionnaire que du côté de la
commune. Il en résulte un défaut d’anticipation et de vision prospective des acteurs, notamment
quant aux conséquences des modifications du programme de l’opération. L’audit constate
l’augmentation substantielle de certains postes de dépenses (« acquisitions foncières »,
« travaux tertiaires », « rémunérations », « frais financiers » …), alors que le niveau des
équipements publics et les prestations rendues par le concessionnaire ne permettaient pas de
101
1995-2001 ; 2001-2008 ; 2008-2014 ; 2014-2020 ; 2020-2026.
102
Réponse courriel de la SEDRE du 13 juin 2024.
103
Fédération des sociétés d’économie mixte,
Guide comptable professionnel des SEM, actions et opérations
d'aménagement
, octobre 2007.
104
Note de synthèse du conseil municipal du 24 février 2016, affaire n° 19.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
29
justifier cette évolution. Il en a résulté des négociations afin de réduire le taux appliqué dans le
calcul des frais financiers de l’opération à partir de 2015.
L’audit a mis en exergue une augmentation considérable et non fondée du montant des
recettes prévisionnelles permettant de présenter artificiellement un bilan équilibré en
maintenant le niveau de participation financière de la commune. Or, comme le relève la
fédération nationale des sociétés d’économie mixte (FNSEM)
105
, le concessionnaire est
responsable des informations adressées à la collectivité concédante, l’irréalisme des
informations données constituant une faute
106
.
En février 2016, l'avenant 3 a prorogé le traité de concession jusqu'en 2024 pour
permettre l'aboutissement des travaux d'aménagement des deux îlots
107
. L’avenant prévoyait
l’application de pénalités au concessionnaire si la viabilisation des parcelles n’était pas réalisée
avant fin 2020 et 2021. Ces pénalités n’ont pas été appliquées par la commune qui invoque la
crise sanitaire. En décembre 2020, un nouvel avenant a prolongé la concession jusqu’en 2026.
Le calendrier d’aménagement des îlots est repoussé à fin 2021 et fin 2022, mais ce nouveau
délai de réalisation n’a pas été respecté par le concessionnaire. Les travaux ne seront réalisés
qu’entre juin 2023 et juin 2024 pour l’îlot « Olivine » et, entre janvier et octobre 2024, pour
l’îlot « Mantaly ».
La commune n’a pas appliqué les pénalités de retard prévues pour ces opérations dans
l’avenant 4. En outre, les travaux d’aménagement non générateurs de recettes (ouvrage de
franchissement de la ravine Balthazar, aménagement du parc et tranche 6) ont été abandonnés
sans que cela ne soit formalisé dans un avenant
108
.
Même si la commune a mis en place un comité de suivi et un comité stratégique à
compter de 2015, la chambre relève un défaut de contrôle. Ainsi, la commune a conclu, en mars
2016, un avenant qui comporte des clauses contraignantes sans pour autant les mettre en œuvre.
2.2.4
Une perte conséquente de ressources en raison d’une méconnaissance des
procédures budgétaires et comptables
En application de l’article L. 1615-11 du code général des collectivités territoriales
(CGCT), le financement d’un équipement public destiné à être intégré dans le patrimoine d’une
collectivité territoriale dans les conditions prévues à l’article L. 300-5 du code de l’urbanisme
applicable au contrat de concession, ouvrait droit au bénéfice du fonds de compensation de la
TVA. Le droit était acquis à compter de l’intégration de l’équipement public dans le patrimoine
de la collectivité et le calcul de l’attribution s’effectue au regard de la valeur de l’équipement
intégré dans le patrimoine de la collectivité. Dans le cadre de la mise en place de
l’automatisation du FCTVA, l’article 249 de la loi de finances pour 2021 a abrogé cette
disposition à compter du 1
er
janvier 2021.
Pour l’opération d’aménagement de « Moulin Joli », la commune aurait dû récupérer
cette recette en procédant régulièrement à l’intégration des équipements publics réalisés par le
105
Pierre Massimi, FNSEM,
CRAC et concessions d'aménagement
, juillet 2000.
106
CAA Bordeaux,
2
ème
chambre, 11 octobre 1999, n° 95NX01630, 97BX02119
où a été reconnue la participation
du concessionnaire pour moitié du déficit final de l’opération dont la responsabilité a été reconnue pour avoir
fourni un bilan prévisionnel irréaliste.
107
« Mantaly » et « Olivine ».
108
Comité stratégique du 22 avril 2021.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
30
concessionnaire, comme cela avait été d’ailleurs recommandé dans le précédent rapport de la
chambre. La commune n’a pas procédé à l’intégration régulière des équipements publics dans
son patrimoine et lorsque certains équipements publics lui ont été transférés, elle n’a pas
procédé aux écritures permettant la récupération de la recette.
Par délibération du 30 octobre 2017, le conseil municipal a approuvé la rétrocession des
biens de retour de la ZAC « Moulin Joli » pour une superficie totale de 103 200 m
2
. Les
immeubles ont été réceptionnés par la commune les 1
er
février et 5 octobre 2017. Les
équipements (voiries, réseaux, équipements publics, espaces de jeux, espaces verts) ont été
valorisés, en septembre 2017, à 11,5 M€ par l’administration des domaines
109
. Le détail donné
par l’avis des domaines montre que la valorisation ne correspond qu’aux équipements publics
bâtis. En revanche, les voiries ont été valorisées à l’euro symbolique. Sur les 11,5 M€ listés
dans le transfert, environ 9 M€ résultent du concessionnaire, certains équipements ayant été
réalisés directement par la commune. Cette rétrocession a été formalisée par un acte authentique
du 14 septembre 2018, mais elle n’a pas fait l’objet d’une demande de récupération de la recette
du fonds de compensation de la TVA.
La commune aurait considéré que la récupération de la recette ne pouvait être réalisée
qu’à hauteur du montant des participations versées comme l’indiquaient les audits qu’elle a fait
réaliser. Pourtant, s’agissant de l’opération « Cœur de ville », elle a réalisé une telle
récupération, en 2018, qui lui a permis de quadrupler sa recette au titre du fonds de
compensation de la TVA.
Sollicitée sur ce point, la SEDRE a répondu au vu de la transmission d’une note établie
en 2019 par la direction générale des collectivités locales (DGCL) que «
l’explication apportée
par la DGCL est claire, et pleinement applicable à la ZAC Moulin Joli pour toutes les
intégrations d’équipements publics dans son patrimoine qui seraient survenues après la
publication de la loi SRU
110
même si la convention de concession est antérieure.
La réponse
de la DGCL apporte en outre un éclairage intéressant sur la détermination de la valeur d’un
bien d’équipement (coût historique au vu des états de dépenses), que nous n’avions pas, sinon
nous n’aurions pas sollicité une estimation domaniale. Cela suppose en outre un suivi
individualisé des dépenses, équipement public par équipement public, qui n’existe pas dans le
CRAC tel que présenté
. ».
Ceci aurait dû être appréhendé par la commune et son concessionnaire dans le cadre de
la remise des équipements en sachant que les incidences sur le droit à récupération de la TVA
de l’article L. 1615-11 du CGCT existe depuis 2002.
Après le transfert des équipements publics par la SEDRE, la commune aurait pu
demander à bénéficier du fonds de compensation de la TVA. Le transfert ayant été réalisé en
2018 (date de l’acte authentique), la demande aurait dû être réalisée avant 2023, compte tenu
de la prescription quadriennale qui prévoit que le délai de quatre années commence à courir à
compter du 1
er
janvier de l’année suivant le fait générateur. Ce qui signifie pour la récupération
du fonds de compensation de la TVA, non pas la réalisation de la dépense, mais la constatation
du transfert à la commune.
La commune indique que l’intégration dans son patrimoine a été réalisée à l'euro
symbolique compte tenu de l’acte authentique. Cette intégration à l’euro symbolique ne figure
d’ailleurs pas dans les comptes.
109
Avis de France Domaine du 26 septembre 2017.
110
Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
31
La remise des immeubles réalisée en 2018 permettait d’identifier clairement les
dépenses se rapportant aux équipements publics. Aussi, les 9 M€ d’équipements publics
réalisés par le concessionnaire auraient dû être intégrés dans le patrimoine de la commune et
faire l’objet d’une demande de récupération de la recette du fonds de compensation de la TVA,
évaluée à au moins 1,5 M€. La chambre constate une absence de comptabilisation préjudiciable
aux finances et à la sincérité des comptes de la commune.
Par ailleurs, le montant des équipements publics restant à réaliser a été estimé en 2017
à 6,4 M€, ce qui pouvait représenter une recette de fonds de compensation de la TVA évaluée
à 1 M€. Compte tenu de l’abrogation du dispositif à compter de 2021, la commune s’est privée
d’une recette significative.
Compte tenu de la modification du régime fiscal à compter de 2021, les dépenses
réalisées pour les équipements publics par le concessionnaire ne sont plus éligibles au fonds de
compensation de la TVA. Les participations versées par la commune pour d’autres opérations
ne seraient plus éligibles au fonds de compensation de la TVA, ce qui aurait pour conséquence
un surcoût fiscal de plus de 20 %, la TVA étant récupérée au taux pratiqué en hexagone même
si elle est payée au taux appliqué en outre-mer.
3
UN IMPORTANT DÉFICIT DE TRÉSORERIE À RÉSORBER
AVANT 2026
3.1
Un bilan déséquilibré
3.1.1
Une trésorerie déficitaire
En 2014, l’opération ZAC « Moulin Joli » présentait un déficit de 14,9 M€. De 2014 à
2023, le déficit de trésorerie est resté supérieur à 15 M€ pour atteindre un maximum de 21 M€
en 2019.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
32
Graphique n° 1 :
Évolution annuelle de la trésorerie de l’opération
Source : Comptes rendus d'activité de concession (CRAC
111
)
Afin de combler le déficit annuel de trésorerie, certaines dépenses prévues par le contrat
n’ont pas été réalisées et de nouvelles recettes ont été prévues, mais ces dernières n’ont pas pu
être encaissées.
Le cahier des charges prévoit
112
que le risque financier de l’opération est à la charge du
concédant (la commune). Ces montants doivent être intégralement versés par la commune à la
société dans les trois mois de la présentation des comptes de liquidation. Toutefois, avant cette
date et dès l’expiration du contrat de concession, la société concessionnaire aura droit, en cas
d’insuffisance de trésorerie de l’opération, à une avance suffisante pour couvrir ce déficit.
Dans l’hypothèse où l’équilibre de l’opération ne pourrait être rétabli en 2026, date de
fin de la concession, la commune, qui devra reprendre ce déficit de clôture, a proposé des
alternatives pour étaler sa prise en charge (voir
infra
§ 3.2.1 sur la création d’un budget annexe).
111
Compte rendu annuel aux collectivités. Il s’agit du document adressé chaque année par l’aménageur à son
concédant, de manière à ce que ce dernier puisse contrôler son activité et l’état d’avancement de l’opération. Il est
prévu par les dispositions de l’article L. 300-5 du code de l’urbanisme.
112
Article 25.4 du cahier des charges de la concession.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
33
3.1.2
L’augmentation des frais financiers
Le mode de calcul des frais financiers est déterminé par l’article 17.III du cahier des
charges : «
Le concessionnaire gère distinctement la trésorerie de l’opération en effectuant des
mouvements de trésorerie nécessaires à titre onéreux entre les différentes opérations de la
société, ou avec les comptes propres de la société, ou avec un établissement financier, en
imputant à l’opération ou en le faisant bénéficier des taux d’intérêts débiteurs ou créditeurs,
au plus égaux à ceux pratiqués par la Caisse des Dépôts et Consignations.
».
Les frais financiers correspondants sont imputés sur l’opération. L’audit réalisé par la
commune en 2015 constatait que le taux contractuel n’était pas précisé dans le contrat de
concession et que la SEDRE n’avait jamais communiqué, tout au long de ses comptes rendus
d’activité successifs, sur le taux de financement court terme appliqué au déficit annuel de
trésorerie de l’opération.
Aussi, à la suite de l’audit, il a été convenu qu’à partir de 2015 le taux applicable serait
le taux moyen mensuel du marché monétaire plus 2 %. Jusqu’en 2022, le taux appliqué a été de
1,65 %
113
. Les audits réalisés chaque année par la commune ont relevé que compte tenu des
dépenses à réaliser et des différentes prolongations du contrat, il était risqué de fonctionner avec
une trésorerie de court terme. Étant donné les logements sociaux réalisés, le recours aux prêts
prévus pour la construction de logements sociaux aurait permis de limiter le coût des frais
financiers.
La SEDRE a fait régulièrement état de problèmes de trésorerie l’empêchant d’engager
de nouvelles dépenses dans les comptes-rendus des comités de pilotage et de suivi. Elle a
indiqué avoir sollicité des avances de trésorerie qui auraient pu permettre de réduire ces frais,
mais que ces avances n’avaient pu être accordées par la commune compte tenu de sa situation
financière.
À compter de septembre 2022, le taux de référence des frais financiers a connu une forte
augmentation à 5 %. Les frais financiers sont passés de 0,4 M€ en 2022 à 0,87 M€ en 2023. Fin
2013, ces frais sont de 10,5 M€ et sont prévus à hauteur de 11,5 M€ en fin de concession, soit
11 % des dépenses.
La chambre fait observer que le contrôle de la gestion des frais financiers par la
commune a été insuffisant, ce qui a eu pour conséquence d’en augmenter le coût.
3.2
Les
scenarii
de reprise du déficit par la commune
3.2.1
La création contestable d’un budget annexe
En décembre 2023
114
, la commune a indiqué qu'afin de ne pas supporter de frais
financiers supplémentaires, elle envisageait le rachat d’une partie du foncier cessible au
concessionnaire au moyen d’un prêt prévu pour le logement social qui serait comptabilisé dans
un budget annexe de lotissement. Ce rachat permettrait de rétablir la trésorerie de la concession
113
Le taux de référence était négatif.
114
Lors de l’approbation du CRAC 2022.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
34
à zéro. Le rachat est limité à deux îlots de la concession (« Olivine » et « Mantaly ») qui ne
relèvent pas du logement social puisqu’il s’agit des terrains destinés à être revendus à des
particuliers sans condition de ressources. Le prix des terrains, 438 € le m², s’échelonne de
143 226 € à 202 356 €. Il s’agit des deux îlots dont la commercialisation devait être assurée par
la SEDRE.
En juin 2024, pour permettre le financement du rachat de ce foncier par un prêt réservé
au logement social, l’opération intègre une partie de l’opération de résorption de l’habitat
insalubre de la rivière des Galets (secteurs « Zambaville » et « Alma »).
Carte n° 4 :
Localisation des îlots
Projet joint à la demande de décembre 2023
Projet joint à la demande de juin 2024
Source : SEDRE
3.2.1.1
Le principe du budget annexe de lotissement
Les budgets annexes constituent une dérogation aux principes d’universalité et d’unité
budgétaire des collectivités. Pour les opérations de lotissement, considérées comme des
opérations à caractère industriel et commercial, la constitution du budget annexe est obligatoire.
Ils doivent être votés en équilibre
115
et être financés par les recettes liées à leur exploitation. En
matière de comptabilisation des opérations, la détermination du prix est fondamentale. À cet
effet, un suivi très précis doit permettre de déterminer de façon précise le coût de construction.
En matière de fiscalité, ces opérations entrent dans le champ d’application de la TVA, car elles
sont considérées comme une activité économique.
L’opération d’aménagement de zones se déroule en quatre phases :
-
une phase d’acquisition des terrains ;
115
Article L. 2224-1 du CGCT.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
35
-
une phase de réalisation d’équipements d’infrastructures ;
-
une phase de viabilisation ;
-
une phase de commercialisation des terrains.
Les opérations budgétaires et comptables ayant trait aux zones à aménager nécessitent
l’utilisation d’une comptabilité spécifique qui permet d’extraire avec précision le coût de
production de la zone à aménager.
Les travaux retracés dans le budget annexe de zone ou de lotissement sont ceux qui sont
indispensables à la viabilisation des terrains, avant leur cession. La comptabilisation des
acquisitions de terrains et des travaux de viabilisations permet de déterminer le coût de
production des parcelles et, donc, la plus ou moins-value effectuée.
3.2.1.2
Le projet de budget annexe présenté par la commune
La délibération approuvant la création du budget annexe a été prise le 19 juin 2024. La
commune indique avoir obtenu l’avis favorable de la direction des finances publiques. La
réponse courriel transmise par cette direction ne fait que rappeler les principes prévalant à la
constitution d’un tel budget, sans préciser s’ils sont applicables à ce budget. D’ailleurs, la
commune précise dans sa réponse que cette direction sera consultée sur la possibilité de
présenter un budget
« déficitaire »
dans l’attente des recettes qui ne devraient être perçues
qu’après 2026
116
.
La détermination du coût des aménagements n’a pas été prise en compte dans le projet
de budget et les dépenses ont déjà été réalisées par la SEDRE pour environ 2,9 M€. En effet, la
commune n’a pas reconstitué les opérations d’acquisitions, de réalisation des équipements et
de viabilisation en dépenses, mais prévoit de constater en dépenses 13 M€ de terrains aménagés,
c’est-à-dire leur prix de revente. L’emprise foncière des deux lotissements fait partie d’un
ensemble de parcelles d’une surface de 416 658 m
2
qui ont fait l’objet d’expropriation de la
Société d’habitations à loyer modéré de La Réunion (SHLMR) en date du 8 août 2001 pour un
montant de 2,9 M€, soit un coût d’environ 192 099 € pour les deux îlots, le solde des dépenses
résultant des travaux de viabilisation. Encore une fois, les surfaces expropriées ont excédé les
surfaces utilisées.
Aucune dépense n’est prévue dans le budget annexe au titre des secteurs « Zambaville »
et « Alma » intégrés à l’opération pour atteindre les 25 % de logements sociaux prévus par le
financement bancaire.
En recette, la commune prévoit d’inscrire 4 M€ de recettes effectives en 2025 et 9 M€
de recettes à venir. La commune précise que la TVA comptabilisée en dépenses pour les
acquisitions des terrains serait préfinancée par une avance de trésorerie de la commune de 1 M€.
Les recettes résultent de la vente escomptée des 69 lots des secteurs « Olivine » et
« Mantaly »
117
que le concessionnaire n’a pas réussi à commercialiser. Le prix de vente au m
2
est de 438 €. Traditionnellement, les opérations d’aménagement comportent un risque
économique attaché à l’exécution et à l’équilibre des opérations au regard de leur prix de vente
prévisionnel.
116
Réponse courriel du 19 juin 2024.
117
Le budget annexe serait cantonné aux parcelles non commercialisées des deux secteurs.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
36
Aucune recette n’est prévue au titre des secteurs « Zambaville » et « Alma » intégrés au
budget annexe. Les dépenses et les recettes se rapportant aux lotissements à caractère social
(« Zambaville » et « Alma ») ne sont pas prévues dans le budget annexe. Ces opérations ne
seront pas réalisées par la commune emprunteuse mais par la SEDRE, selon des délais prévus
au-delà de la fin de la concession.
La constitution de ce budget annexe n’est pas conforme aux principes de constitution
d’un budget annexe de lotissement en ce qu’il ne comprend pas les coûts d’aménagement pour
les quatre lotissements et les recettes des secteurs « Alma » et « Zambaville ». Les 13 M€
inscrits par la commune ne représentent pas le coût d’aménagement mais celui des acquisitions
des terrains des lotissements « Olivine » et « Mantaly ».
3.2.1.3
L’emprunt «
gaïa
» en cours d’instruction
La SEDRE a mobilisé à compter de 2018 un emprunt auprès de l’Agence française de
développement pour financer les travaux de viabilisation des secteurs « Corce Rouge »,
« Olivine » et « Mantaly » pour un montant de 3 M€
118
. Cet emprunt de court terme a déjà été
remboursé. Alors que les travaux d’aménagement ont déjà été financés par celui-ci, la commune
propose de refinancer les secteurs « Olivine » et « Mantaly » par un nouvel emprunt de la
Banque des territoires. Cette opération consiste donc à racheter du foncier « libre » aménagé
qui doit être revendu à des propriétaires privés. En effet, les lotissements « Olivine » et
« Mantaly », objets du projet de prêt, ne sont pas destinés à du logement social. Le prix
d’acquisition des parcelles des secteurs « Olivine » et « Mantaly » est fixé selon une fourchette
haute du marché immobilier
119
et ne relève en aucun cas du logement social (LLS, LLTS, PLS,
PSLA)
120
.
La délibération de création du budget annexe n’a pas acté du financement par emprunt
et avances du budget principal comme elle aurait dû le préciser.
Les conditions d’octroi et de contrôle du prêt de type gaïa
Ce prêt, de type gaïa, est d’une durée de 15 années. Il promeut l’implantation de
logement social, c’est pourquoi son obtention est conditionnée à ce que l’opération considérée
comprenne une proportion minimale de 25 % de logements sociaux. La première demande faite
par la commune, en décembre 2023, ne respectait pas cette proportion de logements sociaux.
C’est pourquoi, la commune a présenté une nouvelle demande, en juin 2024. Elle fait
référence à une surface plancher constructible (SPC) qui sert d’assiette pour le calcul des 25 %
de logements sociaux. La SPC est de 200 m
2
ou 230 m
2
lorsque la surface dépasse 400 m
2
qui
résulterait du droit maximum autorisé par les documents d’urbanisme et du cahier des charges
de cessions de terrains élaboré par la SEDRE. L’ajout des logements sociaux de la RHI permet
d’atteindre exactement la proportion des 25 %. D’ailleurs, la commune a sous-évalué la surface
plancher constructible des lotissements « Olivines » et « Mantaly » à 14 235 m
2
au lieu de
14 880 m
2
aussi les logements sociaux ne représentent que 24 %.
118
Source : CRAC 2022.
119
Il est nettement supérieur à ceux pratiqués sur les lotissements « Jules Joron » et « Bellevue » (350 € le m²).
120
LLS : logement locatif social, LLTS : logement locatif très social, PLS : prêt locatif social, PSLA : prêt social
location accession.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
37
La commune a indiqué que compte tenu du calcul réalisé sur la surface plancher
constructible maximale, le taux pourrait être dépassé et atteindre 31 %, l’ensemble des
acquéreurs n’utilisant pas toute la surface maximale autorisée.
La chambre relève cependant que pour satisfaire à cette proportion, la commune a
intégré des logements sociaux qui sont situés dans un autre secteur et dans une autre opération.
Il s’agit des lotissements « Zambaville » et « Alma » qui font partie de l’opération de résorption
de l’habitat insalubre de la rivière des Galets. La chambre s’interroge sur le respect effectif du
critère de mixité sociale, cette zone étant géographiquement distincte de l’opération initiale. En
outre, la DEAL n’a pas été en mesure de préciser s’il était possible de cumuler les financements
« RHI » avec un prêt de type
gaïa
.
La vérification du respect de la proportion de logements sociaux par la Banque des
territoires est effectuée
a posteriori
. En effet, la DEAL délivre un agrément permettant à une
opération d’être reconnue comme « sociale ».
Au stade de la demande de prêt, le respect de la proportion de logements sociaux n’est
assuré que par la transmission d’une attestation d’affectation par l’emprunteur, comme l’a fait
la commune.
À défaut du respect de cette proportion, des pénalités sont appliquées. Toutefois, la
chambre relève que les critères de ce contrôle (surface, nombre de logements, connexité
121
) ne
sont pas clairement identifiés. Bien que les conditions d’octroi et de contrôle des prêts de type
gaïa
soient définies dans les conditions générales qui leur sont applicables, la Banque des
territoires n’apporte pas de précision sur le caractère non contigu des parcelles, c’est-à-dire
l’ajout artificiel de 25 % de logements sociaux de la RHI de la rivière des Galets permettant de
prétendre à l’obtention du prêt. Elle ne fait pas plus d’observation sur le fait que le prêt soit
destiné au seul financement de terrains en lots libres, les acquisitions et les travaux des 25 %
de logements sociaux restant à la charge du concessionnaire. La SEDRE a indiqué qu’elle
réalisera ces travaux pour une exécution au-delà du terme de la concession.
Les conditions de remboursement du prêt
La commune demande un remboursement
in fine,
avec possibilité de remboursement
anticipé sans frais à chaque vente de terrain, ce qui est moins avantageux que les
remboursements anticipés qui donnent lieu au paiement d’une indemnité égale à un semestre
d’intérêts sur les sommes remboursées par anticipation, calculée au taux d’intérêts en vigueur
à la date du remboursement.
La commune a transmis un tableau d’amortissement avec ce différé de remboursement
de 15 années. Le taux d’intérêt de l’emprunt est celui du livret A
122
. Le recours à un
remboursement anticipé permettrait de limiter les frais financiers à 1 M€ d’après la commune.
Dans l’hypothèse où la commune obtiendrait ce prêt avec remboursement
in fine
du
capital, le budget annexe ne resterait équilibré qu’à la condition que les cessions de terrains se
réalisent rapidement et de manière continue afin de couvrir le paiement des intérêts d’emprunt.
À défaut, le déséquilibre du budget annexe serait avéré.
Or, le contexte économique actuel, notamment la hausse des taux d’intérêts et la
situation géographique des parcelles, ne favorise pas des ventes régulières aux prix appliqués.
121
Dans la même zone ou dans un autre emplacement de la commune.
122
3 % + 60 pb + inflation.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
38
Interrogé par la chambre, l’établissement public foncier confirme
« qu’il paraît illusoire de
penser que la vente, dans un temps court, des 70 lots permettra à la ville de faire face à ce
déficit, au vu, notamment, du contexte immobilier. ».
Les 13 M€ de l’emprunt permettent de couvrir les acquisitions à leur coût hors taxe
(12 M€) et les frais de notaires (1 M€). En revanche, ils ne couvrent pas la TVA (1 M€) qui
devra faire l’objet d’une avance de trésorerie de la commune au budget annexe.
En outre, les recettes escomptées de l’ensemble des ventes ne permettront pas de couvrir
les 1 M€ d’intérêts d’emprunt. Aucune recette n’est prévue au budget pour couvrir ces 1 M€,
la commune escomptant sur une recette de participation aux équipements après la clôture de la
concession pour les financer.
Dans l’hypothèse où la commune ne parviendrait pas à réaliser les ventes, la dépense
supplémentaire induite par les intérêts d’emprunt serait de 4 M€. L’emprunt permettrait un
étalement sur 15 années mais le coût de l’opération serait majoré de 5 M€.
En outre, la commune ne dispose pas des ressources humaines permettant de réaliser
cette commercialisation. Elle invoque un contrat de commercialisation avec le concessionnaire
alors que cette mission était déjà prévue dans le contrat de concession.
La chambre constate un éventuel détournement de la finalité sociale du prêt en l’état du
projet de budget annexe présenté. Les lotissements à caractère social qui permettent l’obtention
du prêt ne figurent pas dans le budget annexe prévisionnel. Aussi, le projet de prêt, en l’état des
éléments présentés à la chambre, ne permettrait que le financement des logements privés
dépourvus d’affectation sociale.
3.2.2
Les alternatives au budget annexe
Le recours à l’établissement public foncier ne peut être envisagé. L’allotissement est
prévu en vue d’une cession de lots libres, ce qui ne constitue pas une opération d’intérêt général.
L’établissement foncier considère, également, que la maîtrise foncière était réalisée dès lors que
le concessionnaire en était chargé. Il indique, enfin, que les aménagements ont déjà été réalisés.
3.2.2.1
La contestation par voie contentieuse du montant déficit de clôture
Le contrat de concession prévoit que l’opération de concession est réalisée sous le
contrôle de la commune à ses risques financiers
123
. L’évolution du déficit annuel de trésorerie
a été retranscrite dans les comptes rendus des comptes produits chaque année et votés par le
conseil municipal. La seule réserve de la commune porte sur les conséquences financières de la
condamnation du concessionnaire sur l’opération d’expropriation des consorts P., soit un
montant de 8 M€ dont 1,2 M€ a été pris en charge par le concessionnaire. La création du budget
annexe acterait de la non mise en œuvre judiciaire de cette réserve. La commune indique, de
manière contradictoire, que la création du budget annexe est sans incidence sur le contrat de
concession mais apporte une solution partielle à la résorption de la trésorerie négative et qu’elle
123
Article 5 du traité de concession du 9 décembre 1997.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
39
affectera positivement le bilan de la ZAC à terminaison. L’action en contestation est considérée
comme une option pour la réduction de la participation de la commune au déficit de clôture.
Une grande partie du déficit annuel de trésorerie résulte de la non-réalisation des recettes
prévisionnelles et des frais financiers. Les sanctions prévues par l’avenant du 31 mars 2016
pour la réalisation de travaux d’aménagement des lots « Olivine » (31 décembre 2020) et
« Mantaly » (31 décembre 2021) n’ont jamais été mises en œuvre par la commune ni fait l’objet
d’un nouvel avenant.
3.2.2.2
La revente en bloc
La chambre s’interroge sur le caractère réaliste de la vente dans un temps court, des
70 lots permettant à la ville de réduire le déficit annuel de trésorerie constaté, au vu, du contexte
immobilier défavorable, alors même que le concessionnaire, spécialiste en la matière, n’a pas
pu mener à bien cette mission prévue par la convention d’aménagement.
Aussi, il serait opportun avant la clôture de l’opération, d’ouvrir les discussions avec la
SEDRE afin que cette dernière lui propose des issues faisant baisser la charge communale :
modifications de programme (en veillant à l’économie générale de l’opération), emprunt et
revente en bloc à un autre opérateur. La commune a indiqué que la commercialisation ne fermait
pas la porte à la vente en bloc à un éventuel promoteur.
3.3
Une hypothèque sur les finances communales
L’analyse financière prospective réalisée par la chambre
124
, pour la période 2024-2028,
envisage deux hypothèses. La première reprend le déficit de l’opération « Moulin Joli » à
hauteur de 2,5 M€ tel qu’il figure dans le dernier avenant au traité de concession et la seconde
prend en compte une reprise d’un déficit de clôture de 9,3 M€.
3.3.1
Analyse prospective avec reprise de 2,5 M€ de déficit en 2026
L’analyse a été réalisée sur la base des évolutions de charges et de produits indiquées
par la commune pour la période 2024 à 2028 et une reprise du déficit limitée à 2,5 M€ en 2026,
c’est-à-dire au terme de la concession, tel que prévue dans l’avenant à la concession de
septembre 2023.
Tableau n° 4 :
Déficit prévisionnel
En €
CRAC 2021
CRAC 2023
Solde à verser
Participation au déficit
787 924
3 337 924
2 550 000
Source : Avenant n° 7 au traité de concession (septembre 2023)
124
Les hypothèses d’évolution ont été validées par commune.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
40
Les équipements seraient financés à 58 % contre 44 % sur la période précédente. Les
produits de gestion progresseraient de 3,2 % (4,7 % sur la période antérieure), tandis que les
charges progresseraient de 3,6 % (4 % sur la période antérieure).
La capacité d’autofinancement resterait supérieure à 5,6 M€ sur toute la période
permettant de couvrir les remboursements de la dette en capital et de contribuer aux dépenses
d’investissement, soit plus de 76 M€ contre 44 M€ sur la période antérieure. Le recours à
l’emprunt serait limité à 10 M€ (24,5 M€ sur la période antérieure). L’encours de la dette
passerait de 51 M€ à 44 M€, maintenant la capacité de désendettement à moins de huit années.
En limitant l’assiette du fonds de compensation de la TVA à 65 % des dépenses
d’équipements prévues, le recours à l’emprunt serait porté à 14 M€, soit un en cours de dette
de 48 M€ en fin de période.
3.3.2
Analyse prospective avec reprise d’un déficit de 9,3 M€ en 2026
La clôture de l’opération de la concession d’aménagement de la ZAC « Moulin Joli »
pourrait impliquer la prise en compte d’un déficit de clôture de l’opération évalué par la
commune entre 4,4 M€ et 9,3 M€ suivant que les cessions immobilières se réalisent ou pas.
Jusque-là, la participation financière de la commune au déficit a été limitée (0,8 M€), elle
pourrait être plus conséquente compte tenu des constats réalisés sur les derniers comptes rendus
d’activité.
Le traitement comptable des participations a été modifié à compter de 2021. Le collège
du Conseil de normalisation des comptes publics (CNOCP) a adopté et publié en avril 2021 le
recueil de normes comptables pour les entités publiques locales. La norme 22 rétrécit le champ
des subventions ou des participations pouvant être considérées comme des immobilisations.
Elle précise que «
les subventions d’investissement versées qui répondent à la définition d’un
actif sont de même nature économique que des opérations de financement direct : un lien doit
pouvoir être établi entre la subvention octroyée et l’immobilisation acquise ou créée par l’entité
bénéficiaire. L’entité publique locale versante doit être en capacité de suivre l’existence de ce
lien
. ».
En conséquence, les participations qui ne sont pas affectées à la remise d’un équipement
public sont à inscrire dans les charges de fonctionnement de la collectivité qui attribue le
financement. Ainsi, les participations d’équilibre sont à enregistrer en dépenses de
fonctionnement. La commune a indiqué que la participation financière à venir serait dédiée aux
équipements publics à recevoir pour pouvoir l’imputer en section d’investissement.
Aucune provision n’a été mise en œuvre par la commune contrairement à la
recommandation faite par la chambre dans son précédent rapport de 2016. Un tel déficit de
clôture représente 17 % des charges de gestion de 2023 ; il ne pourrait être constaté sur une
année sans remettre en cause les équilibres financiers. Il serait susceptible de faire l’objet d’une
procédure de charge à répartir sur plusieurs exercices qui permettrait un financement par le
recours à l’emprunt, en sachant que l’endettement de la commune est déjà élevé.
Les charges à répartir sur plusieurs exercices comprennent les charges à étaler et certains
frais affectant plusieurs exercices tels que les frais d’acquisition des immobilisations, les
pénalités de renégociation de la dette capitalisée et les frais d’émission d’un emprunt obligataire
qui peuvent être réparties sur la durée de cet emprunt. La commune en a déjà bénéficié, en 2016,
pour la condamnation au titre de l’expropriation des consorts S.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
41
Dans l’hypothèse où un budget annexe serait créé pour prendre en charge une partie des
ventes de foncier de l’opération de concession, la chambre rappelle que la saisine budgétaire
prévue en cas de déficit des comptes
125
est calculée sur l’ensemble des budgets, budget principal
et budgets annexes quelle que soit leur nature. En outre, le budget annexe devra être voté en
équilibre conformément à l’article L. 1612-5 du CGCT.
125
Article L. 1612-14 du CGCT.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
42
ANNEXES
Annexe n° 1. Glossaire
.............................................................................................................
43
Annexe n° 2. Les projets phares de l’opération « Moulin Joli »
..............................................
44
Annexe n° 3. Les étapes d’une procédure d’expropriation
......................................................
45
Annexe n° 4. Récapitulatif du contentieux de l’expropriation des consorts P.
........................
46
Annexe n° 5. Représentation des parcelles AO 813 et AO 195
...............................................
48
Annexe n° 6. Analyse financière prospective (avec reprise de 2,5 M€ de déficit en 2026)
....
49
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
43
Annexe n° 1. Glossaire
AGORAH : agence pour l’observation de La Réunion, l’aménagement et l’habitat
C. Cass : Cour de Cassation
CE : Conseil d’État
CEREMA : centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et
l’aménagement
CGCT : code général des collectivités territoriales
CG3P : code général de la propriété des personnes publiques
CJCE : Cour de Justice des Communautés Européennes (CJUE par la suite)
CNOCP : collège du conseil de normalisation des comptes publics
CRAC : compte rendu annuel à la collectivité
DEAL : direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement
DUP : déclaration d’utilité publique
EPFR : établissement public foncier de La Réunion
FCTVA : fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée
LLS : logement locatif social
LLTS : logement locatif très social
Loi NOTRé : loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République
Loi SRU : loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain
PAE : programme d’aménagement d’ensemble
PAZ : plan d’aménagement de zone
PLS : prêt locatif social
PSLA : prêt social location accession
PLU : plan local d’urbanisme
RHI : résorption de l’habitat insalubre
SAR : schéma d’aménagement régional
SCET : société Services Conseils Expertises Territoires
SEDRE : société d’équipement du département de La Réunion
SHLMR : société d’habitation à loyer modéré de La Réunion
SHON : surface hors œuvre nette
SMIC : salaire minimum de croissance
SPC : surface plancher
SPL : société publique locale
TCO : territoire de la Côte Ouest
TO : Territoire de l’Ouest
ZAC : zone d’aménagement concertée
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
44
Annexe n° 2. Les projets phares de l’opération « Moulin Joli »
Source : Note explicative annexée au dossier de déclaration d’utilité publique de mai 1999
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
45
Annexe n° 3. Les étapes d’une procédure d’expropriation
Source : Guide pratique de la phase administrative de la procédure d’expropriation, préfecture de
l’Oise,
juin 2016.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
46
Annexe n° 4. Récapitulatif du contentieux de l’expropriation des consorts P.
23 septembre 1997 : Acquisition par les consorts P., par échange avec la commune des parcelles
cadastrées AO 194,195,199 et 700 d’une superficie de 87 867 m² au lieu-dit ravine à Marquet.
14 juin 2000 : Le préfet déclare le projet d’aménagement de la ZAC « Moulin Joli » d’utilité
publique.
Février 2002 : Référé voie de fait
26 mars 2002 : Les consorts P. font constater par huissier de justice l’occupation d’une partie
des terrains pour la construction d’un groupe scolaire et des voiries (= voie de fait)
26 août 2002 : Les consorts P. assignent la commune pour être indemnisés du préjudice causé
par la voie de fait.
26 septembre 2002 : Arrêté de cessibilité du préfet pour les parcelles AO 195, AO 199, AO 700
et AO 813
10 décembre 2002 : Ordonnance d’expropriation des consorts P. (fin de la voie de fait).
2 juillet 2003 : Le tribunal administratif de Saint-Denis annule l’arrêté de cessibilité
23 décembre 2003 :
Le tribunal administratif de Saint-Denis annule le jugement du
2 juillet 2003 sur tierce opposition de la SEDRE
6 avril 2006 : La cour administrative d’appel de Bordeaux annule l’arrêté de cessibilité
(l’expropriation est irrégulière) la SEDRE se pourvoit en cassation.
7 juin 2006 : Le tribunal de grande instance de Saint-Denis déboute les consorts P. de leur
demande d’indemnisation de la voie de fait. Les consorts P. interjettent appel.
16 novembre 2007 : La cour d’appel de Saint-Denis déboute les consorts au motif d’une absence
de préjudice (elle a considéré que l’opération immobilière envisagée par la « Jimmy SIP OI »
apparaissait fortement compromise en raison des avis défavorables de la Compagnie générale
des eaux et de la direction de l’agriculture).
26 mars 2008 : Suite à l’annulation de l’arrêté de cessibilité, les consorts P. saisissent le juge
de l’expropriation d’une demande indemnitaire. Le juge de l’expropriation condamne la
SEDRE au paiement de 3,5 M€ d’indemnité d’expropriation aux consorts P.
21 mai 2008 : Le Conseil d’État annule l’arrêté de cessibilité « la déclaration de cessibilité a
porté sur une superficie de terrains excédant largement celle qui était nécessaire à la réalisation
des équipements déclarés d’utilité publique ».
9 septembre 2009 : La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel : la seule constatation
d’une voie de fait ouvre droit à réparation et renvoie à la cour.
1
er
juillet 2011 : La cour d’appel de Saint-Denis accorde 23 360 € de « dommages-intérêts
compensatoires du préjudice résultant de la voie de fait » ; la SEDRE fait une demande garantie
à l’encontre de la commune, la cour retient qu’elle a agi comme mandataire et non pas comme
concessionnaire (mandat du 8 août 2020 pour la construction du groupe scolaire) ; la cour limite
la voie de fait en termes d’espace (à la surface de la construction) et de temps (jusqu’à
l’ordonnance d’expropriation du met fin à la voie de fait).
28 novembre 2011 : La cour d’appel de Saint-Denis annule le jugement du 26 mars 2008 et
condamne la SEDRE au paiement de 6,6 M€ d’indemnité et 12 500 € par mois jusqu’au
règlement de l’indemnité principale
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
47
16 avril 2013 : La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis, les biens
sont estimés à la date de la décision de 1ère instance.
28 avril 2014 : La cour d’appel condamne la SEDRE au paiement de 7.3 M€.
2015 : La SEDRE conclut une transaction avec les consorts P.
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
48
Annexe n° 5. Représentation des parcelles AO 813 et AO 195
Plan du foncier 2005
Plan du foncier 2010
Source : SEDRE
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
49
Annexe n° 6. Analyse financière prospective (avec reprise de 2,5 M€ de déficit en
2026)
n-1
n
n+1
n+2
n+3
n+4
en milliers d'euros
2023
2024
2025
2026
2027
2028
2023 / 2019
2028 / 2024
Ressources fiscales propres
40 455
42 114
43 756
45 244
46 782
48 373
5,2%
3,5%
+ Fiscalité reversée
483
483
483
483
483
483
-6,6%
0,0%
= Fiscalité totale
40 939
42 597
44 240
45 728
47 266
48 857
5,0%
3,5%
+ Ressources d'exploitations (dont produits exceptionnels
réels)
4 267
3 414
3 441
3 468
3 496
3 524
13,3%
0,8%
+ Ressources
institutionnelles (dotations et participations)
9 185
9 755
10 057
10 369
10 690
11 022
1,4%
3,1%
+ production immobilisée, travaux en régie
240
240
240
240
240
240
-14,6%
0,0%
= Produits de gestion (a)
54 631
56 006
57 978
59 805
61 693
63 643
4,7%
3,2%
Charges à caractère général
6 435
6 628
6 827
7 031
7 242
7 460
2,0%
3,0%
+ Charges de personnel
30 372
31 769
32 722
33 507
34 312
35 135
2,6%
2,5%
+ Subventions de fonctionnement (dont subventions
exceptionnelles)
7 028
7 098
7 169
7 241
7 313
7 386
11,4%
1,0%
+ Autres charges de gestion (dont charges exceptionnelles)
1 678
1 711
1 746
4 281
4 366
4 454
11,9%
27,0%
= Charges de gestion (b)
45 513
47 206
48 464
52 060
53 233
54 435
4,0%
3,6%
Excédent brut de fonctionnement au fil de l'eau
(a-b)
9 119
8 800
9 515
7 745
8 459
9 208
9,1%
1,1%
en % des produits de gestion
16,7%
15,7%
16,4%
13,0%
13,7%
14,5%
11,9%
14,6%
+ Résultat financier réel
-969
-2 365
-2 464
-1 818
-2 861
-2 784
-2,4%
4,2%
+/- Solde des opérations d'aménagements de terrains (ou +/-
values de cession de stocks)
-313
0
0
0
0
0
-9,3%
s.o.
+/- Titres et mandats annulés sur exercices antérieurs
-6
0
0
0
0
0
-35,7%
s.o.
= CAF brute
7 831
6 435
7 050
7 899
5 599
6 424
12,6%
0,0%
en % des produits de gestion
14,3%
11,5%
12,2%
13,2%
9,1%
10,1%
9%
11%
Variation annuelle moyenne
1. La capacité d'autofinancement brute prospective
en milliers d'euros
2023
2024
2025
2026
2027
2028
2023 / 2019
2028 / 2024
CAF brute
7 831
6 435
7 050
7 899
5 599
6 424
22 166
33 406
- Remboursement de la dette en capital ancienne
3 792
3 721
3 829
3 620
3 380
3 173
18 039
17 723
- Remboursement de la dette en capital nouvelle
0
60
61
225
232
s.o
579
= CAF nette (c)
4 040
2 714
3 162
4 217
1 993
3 019
4 127
15 105
en % des produits de gestion
7,4%
4,8%
5,5%
7,1%
3,2%
4,7%
2%
5,0%
+ Taxe d'aménagement
546
300
300
300
300
300
2 184
1 500
+ FCTVA
1 008
2 012
3 368
2 597
3 373
1 866
5 205
13 216
+ Subventions d'investissement reçues hors attributions de
compensation
5 361
11 570
9 655
10 014
6 535
6 419
25 016
44 193
+ Fonds affectés à l'équipement (amendes de police en
particulier)
1 922
963
963
963
963
963
4 817
4 815
+ Produits de cession
0
302
302
302
302
302
1 512
1 510
+ Autres recettes
0
234
234
234
234
234
1 172
1 170
= Recettes d'investissement hors emprunt (d)
8 837
15 381
14 822
14 410
11 707
10 084
39 906
66 404
Financement propre disponible (c+d)
12 877
18 095
17 984
18 627
13 700
13 103
44 032
81 509
Fi. propre disponible / dépenses d'équipement (y c. tvx en
régie)
104,9%
88,1%
113,6%
90,6%
120,4%
160,8%
78,2%
106,6%
- Dépenses d'équipement (y c. tvx en régie)
12 270
20 536
15 833
20 568
11 381
8 150
56 296
76 468
- Subventions d'équipement versées hors attribution de
compensation (y c. en nature)
124
59
59
59
59
59
2 746
295
- Subventions d'équipement versées au titre des attributions
de compensation
59
0
0
0
0
0
119
0
- Dons, subventions et prises de participation en nature
0
0
0
0
0
0
245
0
- Participations et inv. financiers nets
836
0
0
0
0
0
5 277
0
+/- Variation autres dettes et cautionnements, affectations
d'immobilisation, opérations de tiers, reprise sur excédents
capitalisés
-22
0
0
0
0
0
2 005
0
= Besoin (-) ou capacité (+) de financement
-413
-2 500
2 092
-2 000
2 260
4 894
-22 995
4 746
Nouveaux emprunts de l'année*
3 000
2 500
1 500
2 000
2 000
2 000
24 500
10 000
Reconstitution (+) du fonds de roulement net global sur
l'exercice
(si capacité de financement)
2 587
0
2 092
0
2 260
4 894
1 505
9 246
Cumul
2. Le financement des investissements prospectif
COMMUNE DE LA POSSESSION (CAHIER 2)
50
RÉPONSE
La Possession, le 24 janvier 2025
•
•
•
24 janvier 2025
2025-021
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
2
Rapport d’observation
s définitives
Réponses de la ville au Cahier 2 : « La ZAC Moulin Joli »
Exercices 2019 et suivants
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
3
Table des matières
SYNTHÈSE DU CAHIER 2
.........................................................................................................................................
4
RECOMMANDATIONS
..............................................................................................................................................
6
OBSERVATIONS
........................................................................................................................................................
7
1
UNE OPÉRATION AMBITIEUSE AUX FONDEMENTS FRAGILES
.........................................................
7
1.1
Une zone
d’aménagement
concertée comportant de multiples contraintes
..................................................
7
1.1.1
Une maîtrise foncière très partielle
d’un
périmètre très vaste
.....................................................
7
1.1.2
Une topographie accidentée et hétérogène
..................................................................................
8
1.1.3
Des aménagements diversifiés
....................................................................................................
8
1.2
Un contrat initial présentant des fragilités juridiques et économiques
.....................................................
8
1.2.1
Une concession conclue sans publicité ni mise en concurrence
..................................................
8
1.2.2
Une absence de partage des risques financiers
...........................................................................
8
1.2.3
L’absence
de prise en compte
d’éléments
stratégiques
...............................................................
9
1.2.4
La banalisation
d’avenants
opérant des modifications contractuelles substantielles
....................
9
2
DES DIFFICULTES
D’EXECUTION
...........................................................................................................
10
2.1
Une expropriation illégale grevant le bilan de
l’opération
.....................................................................
10
2.1.1
Un choix des parcelles à exproprier contestable
.......................................................................
10
2.1.2
Une voie de fait sanctionnée et un arrêté de cessibilité annulé
.................................................
10
2.1.3
Une indemnité surévaluée
........................................................................................................
10
2.1.4
Une transaction menée sans autorisation du conseil municipal
................................................
10
2.1.5
Un défaut de contrôle communal persistant
..............................................................................
10
2.2
Une sous réalisation des aménagements, un triplement des coûts
.........................................................
11
2.2.1
Des surfaces aménagées réduites
..............................................................................................
11
2.2.2
Un coût prévisionnel
d’opération
qui a plus que triplé
.............................................................
12
2.2.3
Un suivi inadapté à
l’ampleur
et à la durée de la convention
....................................................
12
2.2.4
Une perte conséquente de ressources en raison
d’une
méconnaissance des procédures
budgétaires et comptables
...........................................................................................................................
12
3
UN IMPORTANT DÉFICIT DE TRESORERIE À RÉSORBER
.................................................................
13
3.1
Un bilan déséquilibré
.............................................................................................................................
13
3.1.1
Une trésorerie déficitaire
..........................................................................................................
13
3.1.2
L’augmentation des frais financiers
.........................................................................................
14
3.2
Les
scenarii
de reprise du déficit par la commune
................................................................................
14
3.2.1
La création contestable
d’un
budget annexe
.............................................................................
14
3.2.2
Les alternatives au budget annexe
............................................................................................
16
3.3
Une lourde hypothèque sur les finances communales
...........................................................................
16
3.3.1
Analyse prospective avec reprise de 2,5
M€
de déficit en 2026
...............................................
16
3.3.2
Analyse prospective avec reprise
d’un
déficit de 9.3
M€
en 2024
............................................
16
Glossaire
.........................................................................................................................................................
18
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
4
SYNTHÈSE DU CAHIER 2
En préambule
des réponses apportées aux observations du présent cahier 2 portant
uniquement sur la ZAC Moulin Joli, la Ville souhaite faire état
de sa perplexité sur d’une part
l’antériorité de
la période examinée eu égard à celle annoncée dans le titre du rapport
(exercices 2019 et suivants),
et d’autre part sur
les observations faites
a priori
à partir de
documents de travail fournis par les services de la commune.
Si les observations concernant la gestion de cette opération antérieurement à 2014 sont en
majorité partagées par la ville
, il n’en est pas de même pour les scénarii de reprise du déficit
par
la commune. Dans sa réponse au rapport provisoire, la ville avait pourtant alerté les
vérificateurs du caractère non officiel des documents transmis à la chambre dans un souci de
transparence et dans la perspective
d’une collaboration sur la recherche de solutions
acceptables pour la clôture de cette opération.
En effet, la chambre fonde son analyse « à charge » sur un projet de budget annexe élaboré
dans le but d’échanges avec l
es finances publiques. Ce budget devait être proposé au vote du
budget supplémentaire 2024, et faute
d’éléments essentiels nécessaires à son élaboration
il
sera finalement proposé au vote dans le cadre du budget primitif 2025.
Ainsi la partie 3.2.1.2 aurait dû être simplement retirée du rapport définitif.
La chambre s’est
heurtée à la difficulté liée à toute analyse inhérente à des documents de travail, ainsi les
diverses
options envisagées par la ville s’
y entrecroisent rendant les observations inefficientes.
La partie 3.2.1.3
traite d’une demande d’emprunt auprès de la CDC
en cours d’instruction
, la
ville s’interroge, une nouvelle fois, sur l’opportunité d’une telle analyse
comportant de surcroît
des inexactitudes notamment sur l’appréciation des critère
s d
’
éligibilité au produit GAIA. Ces
observations a priori sur des documents de travail sont inefficientes lor
squ’il est mentionné le
critère de 25% de surface de plancher affectés au logement social
alors qu’il s’apprécie aussi
,
depuis peu, en nombre de logements.
C’est pourquoi la conclusion
sur « un éventuel détournement de la finalité sociale du prêt » est
infondée
à cause d’
une connaissance imparfaite des critères du produit GAIA de la part de la
chambre.
Pour terminer la partie introductive sur ce sujet, la ville relève la méprise de la chambre dans
l’affirmation suivant
e «
La commune demande un remboursement in fine, avec possibilité de
remboursement anticipé sans frais à chaque vente de terrain, ce qui est moins avantageux que
les
remboursements anticipés qui donnent lieu au paiement d’une indemnité égale à un
semestre
d’intérêts sur les sommes remboursées par anticipation, calculée au taux d’intérêts en
vigueur à la date du remboursement
. ».
Il est évident qu’une possibilité de remboursement sans
frais est
plus
a
vantageuse que lorsqu’ils donnent lieu à paiement d’indemnité
s
d’un semestre
d’intérêts.
La chambre fait une analyse détaillée des relations contractuelles entre la ville et son
aménageur depuis 1997
, faisant ressortir l’absence de mise en concurrence
et la multiplication
des avenants.
La ville rappelle, qu’a
vant la loi n° 2005-
809 du 20 juillet 2005, les conventions d’aménagement
ne relevaient pas de la commande publique. Elles pouvaient prendre la forme de marchés
publics ou de concessions, mais elles étaient en règle générale assimilées à des marchés de
travaux.
En premier lieu, aucune disposition de droit interne n’imposait à la Commune de respecter des
obligations de publicité et de mise en concurrence lors de l’attribution de la convention
d’aménagement en 1997.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
5
En deuxième lieu, dès lors
que le régime de la convention d’aménagement se rapprochait de
celui des marchés publics, il ne peut pas être reproché à la Commune de ne pas avoir transféré
le risque d’exploitation à l’aménageur.
La municipalité actuelle précise toutefois
qu’elle n’a pas été à l’origine des choix
de cette
période.
L’évolution du bilan de l’opération
et participation communale
Il n'a pas échappé au vérificateur, que le bilan initial arrêté à 38M€ en 2000 comportait
l'engagement de la collectivité à participer à hauteur de 4,9M€ au déficit soit 12,82% du bilan
(cf. DCM du 14 mars 2000 approbation du dossier de réalisation).
Si le poste de dépenses a effectivement plus que triplé, la participation de la commune au
déficit a été réévaluée à 3,3M€ au CRAC 2022 correspondant à 3,12% du bilan actualisé à
105,7M€
(dont 1.4M
€
de déficit de la RHI intégré au bilan en 2007).
La ville présentera une réponse détaillée sur les points développés ci-après.
L’indemnité d’expropriation
et risque de déficit
S’agissant de la condamnation liée à l’opération d’expropriation
, celle-ci
fait l’objet de réserves
lors de chaque approbation du compte-rendu annuel à la collectivité (CRAC).
En effet, depuis 2016, le CRAC est approuvé chaque année sous réserve du désaccord portant
sur
l’intégration
au bilan de la concession de
la totalité de l’indemnité d’expropriation versée aux
consorts P.
La chambre reproche à la ville
l’absence de
provisionnement du risque de déficit. La ville
rappelle que chaque année le Compte rendu Annuel à la Collectivité (CRAC) retrace les
réalisations des années passées et le prévisionnel des années à venir. Dans ce prévisionnel
figure en recettes la participation du concédant
. Cette participation en numéraire fait l’objet de
prévisions budgétaires dans les comptes de la ville selon
l’échéancier inscrit dans les CRAC.
Or, jus
qu’au 31/12/2022, le bilan de l’opération ne faisait apparaître
aucune participation
complémentaire du concédant. Dans le CRAC 2023, qui sera approuvé au conseil municipal du
05/02/2025, la participation complémentaire du concédant est prévue à terminaison en 2026 à
hauteur de
3.9M€
(actualisation du CRAC2023)
.
Cette participation fera l’objet d’une prévision
budgétaire de 1.5M
€
en 2025 et de 2.5M
€ en 2026.
Les solutions réfléchies par la ville et le suivi des opérations
La maîtrise de ce déficit à terminaison incite la ville à créer un budget annexe dont les objectifs
sont les suivants :
-
assurer la maîtrise de la totalité du foncier aménagé par anticipation de la fin du traité,
sans débours supplémentaire
-
porter en direct le coût financier du portage de 12M€ de trésorerie pour un coût
inférieur
En effet,
la fin du traité de concession n’entraine pas la clôture de la ZAC
. La ville rappelle
qu’un
e
collectivité dispose de plusieurs modalités de gestion d’une ZAC,
dont les principales
sont : la régie directe, la convention de mandat ou encore la
concession d’aménagement.
Le
choix de la ville est de finaliser la ZAC en régie directe, et pour ce faire, l
a création d’un budget
annexe est obligatoire afin que la ville puisse y retranscrire les mouvements comptables qui ne
relèvent pas des mêmes méthodes comptables que celles du budget principal de la Ville.
Le financement de cette opération de rachat sera effectivement réalisé par la souscription d’un
emprunt qui génèrera des frais financiers moins élevés que ceux supportés actuellement au
bilan du concessionnaire, pour une économie
estimée à 230k€ par an.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
6
L’aboutissement de cette internalisation de la gestion de la ZAC
permet d’obtenir un
déficit de
clôture de la concession en 2026
de l’ordre de
3.9
M€
, essentiellement financé par une
participation de la Ville au financement des équipements publics. Sans rachat du foncier par la
ville en 2025, la chambre souligne que ce déficit
serait de 9.3M€
. La ville souhaite préciser que
ce déficit serait alors composé de
4.9M€ de
valeur de foncier rétrocédé à la ville
et de
4.4M€
de participation du concédant, soit un surcoût de 0.5M€
comparé au déficit avec rachat en
2025.
La ville est consciente
de la nécessité d’un encadrement
plus étroit des opérations
externalisées. C'est pourquoi, nous disposons depuis quelques années d'assistances à maîtrise
d'ouvrage en matière juridique et financier (AMO).
Cette AMO est sollicitée régulièrement, d’une
part sur l’analyse des CRAC, et d’autre part pour tout sujet stratégique ayant un impact juridique
et financier
RECOMMANDATIONS
N°
Type
Domaine
Objet
Page
1
Performance
Relations
avec les tiers
Mettre en place, dès 2024, un contrôle rigoureux des opérations
d’expropriation réalisées par la commune ou ses mandataires.
24
La ville prend acte des
recommandations et s’engage à poursuivre l’amélioration du suivi des
opérations d’aménagement engagée depuis 2014. Les expropriations réalisées par la
commune ou ses mandataires feront dorénavant l’objet d’un compte rendu au Conseil
Municipal.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
OBSERVATIONS
1
UNE
OPÉRATION AMBITIEUSE AUX FONDEMENTS
F
RAGILES
1.1
Une
zone
d’aménagement
concertée
comportant
de
multiples
contraintes
1.1.1
Une
maîtrise
foncière
très
partielle
d’un
périmètre
très
vaste
Afin de mieux appréhender la
question du bilan de l’opération et son évolution
, il est reproduit
ci-dessous
le bilan de l’année 2000.
Aucune opération d’aménagement n’échappe à
un glissement temporel, la viabilisation relève
de l’aménageur mais la construction des logements relève d’initiatives privées. C’est pourquoi le
rythme des viabilisations est intimement lié à celui des constructions.
Ce glissement temporel est effectivement
source d’augmentation des coûts d’aménagement,
mais parallèlement les recettes de cessions foncières ont aussi connu ces 20 dernières années
une évolution très importante à la Possession. Ainsi, le poste cessions dans le bilan 2000
évalué en 2000 à 26.14M€ est
maintenant évalué à 72
.19M€ au CRAC 2023 dont 17.69M€
restant à réaliser.
Source : dossier de réalisation
Dépenses
En francs
Dont PAE
I Etudes préalables
2 339 964,31
4 500 000,00
II Foncier
77 111 310,00
4 500 000,00
III Travaux
120 563 225,00
40 000 000,00
IV Frais financiers
16 732 552,00
4 000 000,00
V Frais Généraux
34 280 995,00
VI Dépenses diverses
600 000,00
Différentiel TVA prévu
454 206,00
Somme
252 082 252,31
53 000 000,00
Recettes
En francs
Dont PAE
1 Cessions de terrains aux constructeurs
108 463 000,00
Habitat
61 110 000,00
commerces et Services
9 785 000,00
Bureaux
5 358 000,00
Activités
15 010 000,00
Parc
17 200 000,00
2 Cessions à la collectivité
63 065 200,00
Equipements publics
30 000 000,00
Cession des terrains d'emprises publiques
31 822 200,00
Remboursement du terrain de l'acquisition du collège
1 243 000,00
Participation des constructeurs dans le cadre d'un PAE
44 741 100,00
Habitat
30 687 000,00
30 687 000,00
commerces et Services
4 564 500,00
4 564 500,00
Bureaux
1 692 600,00
1 692 600,00
Activités
7 797 000,00
7 797 000,00
3 - Subventions et participations
35 812 952,00
Les IRIS
1 000 000,00
FONDS DE CONCOURS ZAC ST LAURENT
2 500 000,00
Déficit Prévisionnel
32 312 952,00
8 258 900,00
Rappel dépenses
252 082 252,31
53 000 000,00
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
La municipalité partage le constat de la gestion passée de la ZAC que la nouvelle équipe a
découvert à son arrivée en 2014. Nous nous sommes attachés à trouver des solutions
permettant d'achever cette opération dans les meilleures conditions. Aussi, s'agissant du
secteur du foncier exproprié en particulier, le coût du foncier (intégrant 4ha de périmètre
protégé) a pu être en partie amorti. En effet le bilan financier sur ce foncier est le suivant :
Sources : calculs de la ville
1.1.2
Une
topographie
accidentée
et
hétérogène
…/…
1.1.3
Des
aménagements
diversifiés
…/…
1.2
Un
contrat
initial
présentant
des
fragilités
juridiques
et
économiques
1.2.1
Une
concession
conclue
sans
publicité
ni
mise
en
concurrence
L’absence de procédure en amont de l’attribution de la convention d’aménagement à
l’aménageur ne peut nullement être reprochée à la Commune de façon rétroactive.
D’autre part,
aucune disposition de droit interne n’imposait à la commune de respecter des obligations de
publicité et de mise en concurrence lors de l’attribution de la convention d’aménagement.
Les avenants ont été conclus dans le respect des stipulations contractuelles, qui permettaient
de procéder à des modifications.
1.2.2
Une
absence
de
partage
des
risques
financiers
L'état financier de la ZAC en 2015 a orienté les conclusions de l’audit vers une négociation et
non vers une nouvelle mise en concurrence. La ville a suivi son auditeur sur ce point, l'arrivée
d'un nouveau concessionnaire dans cette situation n'a pas été suggérée.
En effet, ne pas poursuivre la contractualisation avec la SEDRE à chaque terme de la
convention intervenu depuis 2014 posait la question du financement de la trésorerie négative
existante à chacun de ces termes. Au CRAC 2014, la trésorerie négative était de 14,9M€, elle
est restée négative à hauteur de 15 à 21M€ depuis 2014. A aucun moment il n'aurait été
envisageable de mettre fin à la relation contractuelle avec la SEDRE sans mettre la collectivité
en grande difficulté financière.
Bilan financier terrains expropriés P.
UD
Parc
Indemnités expro
8 628 690,71 €
35 542,01 €
Décote foncier école 8752m2
995 403,81 €
-
Coût des aménagements
2 798 132,00 €
Frais de gestion
125 915,94 €
Frais financiers
266 292,00 €
Coût total
10 823 626,84 €
35 542,01 €
Produits de cessions
9 904 484,00 €
-
€
919 142,84 €
-
35 542,01 €
-
954 684,85 €
-
Résultat opération
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
1.2.3
L’absence
de
prise
en
compte
d’éléments
stratégiques
Le bilan de l'opération jusqu'en 2021
présentait une situation équilibrée avec 0,8M€ de
participation ville déjà versée. La prise en compte de participations à recevoir au-delà du contrat
de
concession(1,4M€) et l'augmentation des frais financiers (1,4M€) non compensées par
d'autres recettes ont porté le montant de ce déficit à 3,3M€
au CRAC 2022
, acté par l’avenant
n°7. Nous pouvons constater que la participation de la ville à ce déficit prévisionnel reste
inférieure à celle du bilan initial de 4.9
M€
en 2000 (et non 7M
€ comme mentionné dans le
rapport).
Il est fait état dans le rapport du fait que la Commune n’aurait ni anticipé ni géré le risque
financier.
Les observations selon lesquelles des carences initiales auraient fragilisé le montage et le suivi
de l’opération, doivent considérer que l’équipe municipale actuelle est en poste depuis 2014.
Cette dernière a fourni ses meilleurs efforts pour prendre des mesures correctives à compter
de 2015, comme cela est utilement rappelé dans le rapport.
Au demeurant, il convient de rappeler que la conclusion d’un avenant implique la rencontre de
volontés des deux parties contractantes, la Commune pouvait difficilement imposer des
sujétions à l’aménageur sans son consentement.
Enfin s’agissant des modalités de financement, la chambre évoque le non
-recours aux
financements à long terme spécifique au logement social. Ce non-recours
s’explique par la
nature des dépe
nses à financer dans le cadre d’une opération d’aménagement
qui ne sont pas
éligibles à des financement long terme.
1.2.4
La
banalisation
d’avenants
opérant
des
modifications contractuelles
substantielles
L’aménageur n’assumant pas le risque d’exploitation liée à la convention d’aménagement, la
Collectivité est amenée à prendre en charge les déficits éventuels issus de l’exploitation.
La conclusion d’avenants avait notamment vocation à limiter à terme le montant
de ce déficit,
et à le lisser dans le temps.
Aussi, il importe de relever qu’il n’y a pas
lieu de raisonner par référence à la notion de
modifications substantielles, applicables aux contrats de la commande publique, alors que la
convention d’aménagement n’en relevait pas lors de sa signature.
Au surplus, ni l’ordonnance n° 2015
-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ni le
code de la commande publique n’ont rendu applicables aux contrats en cours les dispositions
relatives aux modifications qu’elles ont insérées.
Enfin, la convention d’aménagement prévoyait la conclusion d’avenants, ce qui signifie que les
modifications étaient prévues dans les documents contractuels initiaux.
La critique portant sur le caractère prétendument substantiel par nature des modifications n’est
donc pas totalement fondée au vu des enjeux de l’opération.
C’est pourquoi, nous rappelons qu’à aucun moment il n'aurait été envisageable de mettre fin à
la relation contractuelle avec la SEDRE sans mettre la collectivité en grande difficulté
financière. Jusqu'à la crise COVID, le bilan de la ZAC disposait suffisamment de recettes à
encaisser pour maintenir le bilan à l'équilibre.
En 2014, le bilan de l'opération était présenté à 100M€ et au dernier CRAC2022 approuvé en
2023 le bilan est de 105,7M€ soit 5,7% de plus en 10 ans lorsque l'inflation cumulée sur la
même période est de 17%.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
Nous ne pouvons que constater et déplorer la gestion de ce dossier jusqu'en 2014, mais il
serait souhaitable, afin d'éviter l'amalgame entre les personnes en responsabilité avant et
après 2014, d'avoir une analyse distincte de ces 2 périodes.
2
DES
DIFFICULTES
D’EXECUTION
2.1
Une
expropriation
illégale
grevant
le
bilan
de
l’opération
2.1.1
Un
choix
des
parcelles
à
exproprier
contestable
…/…
2.1.2
Une
voie
de
fait
sanctionnée
et
un
arrêté
de
cessibilité
annulé
…/…
2.1.3
Une
indemnité
surévaluée
La Ville regrette grandement la chronologie des faits suivants :
•
la DUP en 2000 qui fige la situation juridique du foncier exproprié
•
l’ordonnace d’
expropriation en 2002
•
la révision du PLU en 2005, qui déclasse une grande partie du terrain exproprié en non
constructible,
Il app
araît clairement que les intérêts de la Ville n’aient pas été défendu
s. La non-
représentation de la Ville, à la séance du jugement est intervenue le 24 mars 2014, s
’explique
probablement par le fait que cette date se situait entre les 2 tours des élections municipales
2014.
2.1.4
Une
transaction
menée
sans
autorisation
du
conseil
municipal
La Ville souhaite préciser que les réserves mentionnées
dans l’appr
obation des CRAC et
relatives
à l’imputabilité de la condamnation indemnitaire
attestent
de la volonté de l’exécutif
à
améliorer la gestion de cette opération dès son arrivée en 2014. (cf infra §2.1.5)
En effet, afin de ne
pas poursuivre notre partenariat avec l’aménageur sur un fond d’une
procédure contentieuse, la ville n’avait pas d’autre choix que de
repousser le règlement de ce
litige à la fin de nos relations contractuelles.
2.1.5
Un
défaut
de
contrôle
communal
persistant
L’expropriation des consorts P. a fait l’objet de plusieurs contentieux.
L’équipe municipale actuelle n’est pas en mesure de déterminer les responsabilités précises
des différentes parties prenantes à cette opération complexe, aux nombreuses ramifications.
Il est en revanche acté que la procédure d’expropriation a été conduite de manière contestable
par la SEDRE et que l’annulation par le Conseil d’État de l’arrêté de cessibilité révèle l’existence
d’une illégalité fautive de l’aménageur.
Par conséquent, la Commune soutient que l’indemnité d’expropriation devrait être portée par la
SEDRE et ne devrait pas être intégrée au bilan de l’opération.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
Au demeurant, la transaction a été signée par la SEDRE sans autorisation du conseil municipal,
ce qui est susceptible de la rendre nulle.
C’est la raison pour laquelle, depuis 2016, le conseil municipal approuve les CRAC sauf pour ce
qui concerne l’expropriation des consorts P.
La Commune pourra ainsi, le cas échéant, saisir la justice de ce différend lors des opérations
de clôture de la convention d’aménagement, puisqu’il apparait que ni la procédure
d’expropriation ni la phase transactionnelle n’ont été menées dans le respect des intérêts de la
collectivité.
Cette hypothèse est toujours envisagée par la Commune.
En complément, au regard des faits portés à la connaissance de la Commune, cette dernière
pourrait également faire application de l’article 40 du code de procédure pénale, du fait de la
similitude des faits présentés avec ceux ayant donné lieu au jugement du Tribunal de grande
instance de Saint-
Denis du 11 décembre 2013, relatif à l’expropriation des consorts S., à l’issue
de laquelle un échange est intervenu avec Serge Jimmy P., un promoteur, adjoint spécial de la
Commune de 1989 à 1995.
Plus globalement, le rapport fait état d’un manque de rigueur dans la gestion et le suivi de cette
opération d’envergure, tant du côté du concessionnaire que du côté de la Commune.
Cependant, à partir de 2014, l’équipe municipale actuelle a tenté de rééquilibrer l’économie de
la convention d’aménagement, ainsi que cela est justement rappelé dans le rapport.
En revanche, contrairement à ce qui est indiqué dans le rapport, le défaut de contrôle
communal n’est donc nullement persistant.
La ville prend acte des recommandations et s’engage à poursuivre l’amélioration du suivi des
opérations d’aménagement engagée depuis 2014. Les expropriations réalisées par la commune
ou ses mandataires feront dorénavant l’objet d’un compte rendu au Conseil Municipal. Il est
précisé par ailleurs, qu’afin d’être accompagnée dans ses sujets fonciers, la ville a étendu ses
marchés d'Assistance à Maitrise d'Ouvrage à l’assistance Foncier en 2021.
2.2
Une
sous
réalisation
des
aménagements,
un
triplement
des
coûts
2.2.1
Des
surfaces
aménagées
réduites
Les précisions demandées par la chambre ont été apportées dans la réponse de la Ville au
rapport
d’observations provisoires. Elles
sont reproduites ci-dessous :
Natures
SHOB
Groupe scolaire Eloi Julenon
1763
Ecole Jules Joron
1471
Ecole Lacaussade
1801
Un collège : Texeira da Motta
2805
Un centre d'action social : dans les bas de MJ
150
Un gymnase : Daniel Narcisse
3491
6 terrains de tennis : en contrebas du gymnase
250
Des aires de jeux : dans les zones de logements
1346
Total
13077
Equipements publics (hors parc)
Recommandation
n°
1
:
Mettre
en
place,
dès
2024,
un
contrôle
rigoureux
des
opérations
d’expropriation
réalisées
par
la
commune
ou
ses
mandataires.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
La ville précise que les équipements publics de superstructures ont été réalisés sous
conventions
de mandat de maîtrise d’ouvrage
avec la SEDRE, ils ne sont pas comptabilisés
dans le
bilan de la ZAC et ne font donc pas l’objet de r
étrocessions conditionnant la perception
de FCTVA. Les dépenses relatives à ces équipements ont
fait l’objet de déclaration de droit
commun dans
le budget d’investissement de la ville
par la comptabilisation d’avances au
compte 238 (cf. cahier 1), et ont bénéficié du FCTVA à hauteur des régularisations des
avances comptabilisées lors de la remise des ouvrages.
2.2.2
Un
coût
prévisionnel
d’opération
qui
a
plus
que
triplé
La Ville partage ce constat d’évolution
importante des dépenses, mais souhaite préciser que :
•
de 1997 à 2014 le bilan a évolué de
38 à 100M€,
•
alors que de 2014 à 2023
l’évolution a été contenue de 100 à 105,7M€
Sur la même période la participation de la ville estimée à 4.9
M€ en 2000
sera actualisée à
4.7
M€ au CRAC 202
3.
La ville note que le rapport
fait état d’une
trésorerie négative de 18M
€
imputable à hauteur de
17M€
aux cessions foncières non réalisées. Cette observation conforte la ville dans
l’idée qu’il
est urgent de trouver des solutions de réduction des frais financiers générés par le décalage
temporel entre les dépenses de travaux de viabilisation réalisées et les recettes de cessions du
foncier viabilisé.
2.2.3
Un
suivi
inadapté
à
l’ampleur
et
à
la
durée
de
la
convention
Le rapport fait état de difficultés dans le suivi de l’exécution de la convention d’aménagement.
Il est cependant reconnu que le changement d’exécutif local survenu en 2014 a abouti à une
meilleure gestion de la part de la Commune, qui fait notamment auditer les CRAC qui lui sont
transmis.
Depuis 2015, chaque année la ZAC Moulin Joli a fait l’objet d’instances de gouvernance
régulières avec des comptes-rendus :
-
Comités de suivi
-
Comités stratégiques
-
Echanges annuels sur le
CRAC en présence de l’AMO de la ville
-
Présentation par l’aménageur du suivi des participations constructeurs,
2.2.4
Une
perte
conséquente
de
ressources
en
raison
d’une
méconnaissance
des
procédures
budgétaires
et
comptables
Comme expliqué à plusieurs reprises aux vérificateurs, et comme observé par la CRC de
Bourgogne Franche-Comté
(rapport d’observation
s commune de Quetigny années 2015 et
suivantes)
, bien que l'article L1615-11 ne le précise pas explicitement, l'éligibilité d'une dépense
au FCTVA suppose que cette dépense soit réelle et ait supporté effectivement de la TVA ou de
la TVA non perçue mais récupérable. En l'espèce pour la ZAC Moulin Joli, l'optimisation a été
recherchée dès 2016 avec une analyse fiscale spécifique de notre AMO, si 10M€ de
financements ont été effectivement identifiés comme potentiellement optimisables,
seuls 1,7M€
ont été optimisés car portant sur des engagements non signés.
Ainsi, à aucun moment l'audit ne
considérait l'assiette de FCTVA potentiel à hauteur des 29M€
de dépenses restant à réaliser à la date de l'audit, mais plutôt sur les financements
(participations constructeurs, subventions FRAFU, RHI) à encaisser par la ville pour être
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
reversées
au bilan de la ZAC, soit 6,5M€ TTC, sous réserve que ces équipements ne soient
pas déjà ouverts au public.
La Direction de l'aménagement considérait en 2016 que les conditions d'une optimisation
n'étaient pas réunies, et ce n'est qu'en 2022, dans le cadre d'une tranche de travaux de la RHI
que des équipements publics ont été identifiés comme pouvant être optimisés via une
subvention
de 1,7M€ de l'Etat qui sera reversée par la ville à la SEDRE.
La comparaison avec la ZAC Cœur de Ville effectuée dans le rapport
est inappropriée. En effet,
le financemen
t de la ZAC Cœur de Ville prévoyait dès son origine
(lors de sa contractualisation)
tous les prérequis d’éligibilité à
une optimisation du FCTVA
–
participations versées par la ville
au concédant pour un
montant total de 42M€
.
La ville entend l’interprétation de l’article L1615
-
11 faite par la chambre. Les services de l’Etat
en charge de la liquidation du FCTVA ne peuvent ni confirmer ni infirmer cette interprétation
Une consultation de la DGCL est en cours sur cette interprétation. Il est en tout cas fort
probable qu’aucune commune de l’île
n’a entrepris de récupération de FCTVA sur la base de la
valeur
d’intégration à l’actif des biens de retours.
L’objet d’un amendement (non adopté) au projet de loi de finances 2023 donne cependant une
indication sur l’application faite de l’article L1615
-11 durant son existence entre 2002 et 2018 :
«
Avant son abrogation par la loi de finances pour 2019 et son rétablissement
temporaire pour les dépenses réalisées jusqu'au 31 décembre 2020 par la loi de
finances pour 2021, l’article L.1615
-11 du code général des collectivités
territoriales (CGCT) permettait d’encourager les efforts financiers des collectivités
à la réalisation d’équipements publics dans le cadre d’une concession
d’aménagement.
En effet, ces participations versées en contrepartie de la remise des équipements
publics
réalisés
dans
les
concessions
d’aménagement
aux
collectivités
compétentes, étaient jusqu’alors éligibles au fonds de compensation pour la taxe
sur la valeur ajoutée (FCTVA). »
Il est précisé qu’il est mentionné
«
les participations versées au financement des équipements
publics
», dépenses imputées aux chapitres 204 participations ou 27 immobilisations financières,
qui ne figurent plus
dans l’assiette d’éligibilité du FCTVA
depuis son automatisation en 2021.
Cependant, dans le cas de la ZAC Cœur de Ville, l’ensemble des équipements publics est
financé via des acomptes versés par la ville (compte 238), qu’ils soient issus de ses fonds
propres, de financements extérieurs ou encore de participations des constructeurs, ces
versements s’effectuent avec TVA en sus. Au 31/12/2023 le montant de ces avances est de
11.4M€, ils feront l’objet d’une écriture de régularisation à la
réception des ouvrages de la
tranche 2 de
l’aménageur. Cette écriture rendra éligible au FCTVA l’ensemble des sommes
versées par la ville.
3
UN
IMPORTANT
DÉFICIT
DE TRESORERIE
À
RÉSORBER
3.1
Un
bilan
déséquilibré
3.1.1
Une
trésorerie
déficitaire
La ville est tout à fait consciente de son obligation de couvrir le déficit à terminaison du contrat
avec son aménageur en 2026.
C’est pourquoi
, élus et administratifs ne ménagent pas leurs
efforts pour la recherche de solutions permettant la réduction de la participation de la ville à son
strict minimum.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
3.1.2
L’augmentation des frais financiers
Depuis l’approbation du CRAC 2022, la ville
a étudié les scénarios envisageables, dont celui de
la
création d’un budget annexe ZAC permettant d’internaliser l’opération
par anticipation de la
fin de la concession en 2026. Ce scenario
est en cours de mise en œuvre
et devrait se
poursuivre par le vote de son budget primitif sous réserve
d’obtention de tous les prérequis
.
3.2
Les
scenarii
de reprise du déficit par la commune
La ville s’étonne
du le traitement réservé à cette partie du rapport relative à des scénarios
envisagés.
En effet,
s’agissant d’observations sur la gestion de la commune
sur les années 2019 et
suivantes, l’analyse d’intentions
ne semble pas être en adéquation avec
la finalité d’un contrôle
de la CRC.
C’est pourquoi le
s notions de « caractère contestable », « détournement de la finalité sociale du
prêt GAIA », « lourdes hypothèques sur les finances communales », interrogent la ville quant à
l
’objectif recherché par le
vérificateur. Nonobstant, la qualité des magistrats qui ont émis un
jugement sur la gestion communale, la ville regrette les répercussions de la rédaction de ce
rapport, et notamment les interventions des vérificateurs auprès de notre financeur qui ont
engendré un retard
d’instruction
de notre demande de financement préjudiciable pour la ville.
3.2.1
La
création
contestable
d’un
budget
annexe
3.2.1.1
Le principe du budget annexe de lotissement
La Ville partage le point de vue du rapport selon lequel un budget annexe est obligatoire pour
retracer des opérations comptables sous un régime fiscal et patrimonial différent du budget
principal de la ville.
La législation (le Code Général des Collectivités Territoriales) n
’apporte pas de définition légale
du budget annexe, toutefois les instructions comptables la M57 en ce qui nous concerne
apporte des précisions sur le cas précis des budgets annexes lotissement et ZAC.
L’obligation d’imputations
au sein de ce budget
de certaines charges (coûts d’aménagement)
ne figure dans aucun texte législatif ou règlementaire. La non-conformité de la constitution de
ce budget mentionnée par le rapport est infondée en ce sens
, et s’agissant des
prévisions
budgétaires toutes les dépenses et recettes afférentes à ce budget seront effectuées de façon
sincère et réaliste.
3.2.1.2
Le projet de budget annexe présenté par la commune
Le projet de budget mentionné dans le rapport est un document de travail, destiné à être
travaillé avec les services de la DGFIP. Le calendrier prévoyait la présentation de ce budget au
BS2024 avec le budget principal de la ville, cependant l'instruction de la demande de
financement par la CDC ayant pris du retard le vote des crédits au sein de ce budget ne pourra
se faire au plus tôt
qu’
en mars 2025 lors du vote du budget primitif 2025.
Le développement au paragraphe 3.2.1.2 construit sur des éléments non définitifs et transmis
par la ville dans la plus grande transparence et dans un esprit constructif à la recherche de
solutions, aurait pu être
simplement supprimé.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
3.2.1.3
L’
emprunt « GAIA »
en cours d’instruction
Les conditions d’octroi et de contrôle du prêt de type gaïa
La demande de la ville auprès de la CDC, faite par courrier du 22 novembre 2023, ne
mentionnait rien d’autre que le rachat du foncier composé de 69 parcelles. Ce courrier avait
pour objectif de cibler un type de produit GAIA compatible avec notre projet. Dans un premier
temps, la ville souhaitait faciliter sur ces 69 parcelles, l’accession sociale à la propriété par le
portage d’un prêt GAIA à très long terme. Ce très long terme aurait aussi permis d’envisager la
mise en place de baux sociaux solidaires afin de réduire l’enveloppe financière des projets
individuels.
Les échanges avec la CDC ont permis de redéfinir le besoin de la ville. Eu égard aux
contraintes de gestion de la solution envisagée par la ville et évoquée dans son courrier, la
CDC a orienté la ville vers un produit « prêt GAIA court terme ».
Par courrier du 24/06/2024 la ville a sollicité officiellement la CDC sur le produit GAIA ainsi
redéfini.
L’éligibilité au prêt GAIA repose sur une géographie communale et non uniquement foncière.
L’objectif du prêt GAIA est, de selon sa plaquette de présentation « Acquérir du foncier pour
conforter l’implantation du logement social sur votre territoire », c’est exactement dans ce
contexte que l’opération de rachat est envisagée.
S'agissant du taux de 24% de logements sociaux calculé dans le rapport
sur l’ensemble
du
foncier financé par le prêt GAIA, depuis peu celui-ci
ne s’apprécie plus en
terme surface de
plancher mais en nombre de logements.
L’opération envisagé
e porte sur 69 logements libre et
74 logements sociaux, soit un taux de 51%.
Les conditions de remboursement du prêt
Le produit proposé par la CDC est l’emprunt GAIA à court terme, il permet un différé de
remboursement de 14 ans, avec ce financeur
c’est la seule option envisagée par la ville à ce
stade.
La durée de commercialisation est prévue sur 4 années pleines (durée basée sur le temps de
commercialisation des lotissements Jules Joron 1 et 2). C
’est la base du prévisionnel
Dépenses/Recettes du budget annexe ZAC. Les cessions venant en réduction du capital
restant dû, le montant total des frais financiers calculé jusqu’à remboursement total du prêt
s’élève à 1.2M€ (livret A à 3%), ce montant pourrait être revu avec la baisse probable du livret
A à partir de février 2025.
Contrairement à
ce qu’affirme le rapport
, les conditions de remboursement anticipés sans
indemnités sont de fait plus avantageux
que ceux prévoyant le paiement d’une indemnité d’un
semestre d’
intérêts.
S’agissant de la TVA, le budget annexe ZAC est voté en hors taxe, la TVA n’est donc pas
budgétée. A l’acquisition du foncier le budget annexe décaissera un montant TTC, mais ne
comptabilisera que le montant HT, le montant de la TVA payé sera porté par la trésorerie
commune de la ville. Cette TVA payée générera un crédit de TVA qui sera remboursé par les
finances publics
dans les 3 mois suivant l’acquisition
. A chaque cession réalisée, la TVA
collectée sera directement reversée aux impôts, seule la recette HT sera comptabilisée dans le
budget annexe.
L’équilibre global de l’opération doit prendre en compte les éléments suivants :
-
Achat de foncier avec TVA sur marge et frais d’acte réduit
s
-
Revente du foncier avec TVA sur la totalité et frais de notaire réduits (ces frais de
notaire réduits permettent une marge bénéficiaire de 4% à coût constant pour l’acquéreur final)
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
cette marge compensera en grande partie
les frais de notaire en sus du prix d’achat par la
ville.
-
Les frais financiers sont
évalués à 1.2M€ sur l’ensemble de l’opération
. Ils seront
financés par avances remboursables du budget principal de la ville, et leur montant sera figé
dès la fin de la commercialisation de tous les lots
-
Recettes potentielles au-delà de 2026 de 2
M€ de participations de constructeurs sur le
foncier disponible qui permettront de rembourser le budget principal.
Ainsi, la ville s’attache d’une part à ce que le coût de l’internalisation d’une partie de la ZAC
dans un budget annexe de la ville soit neutralisé à terminaison, et d’autre part à garantir que la
participation de la ville à la clôture du traité de concession soit diminuée à un niveau
acceptable pour la ville.
3.2.2
Les
alternatives
au
budget
annexe
3.2.2.1
La contestation du montant déficit
La création du budget annexe est sans aucune incidence sur le contrat de concession, dans le
sens
où la réserve formulée lors de l’approbation des CRAC persistera jusqu’à la fin du
contrat. L'action en contestation du déficit sur la base de l'indemnité P. pourra être engagée à
minima à hauteur du déficit réellement constaté en novembre 2026.
La ville rappelle que l
a mise en œuvre d’un budget annexe
apportera une solution à la
résorption partielle de la trésorerie négative et elle affectera aussi positivement le bilan de la
ZAC à terminaison.
La
contestation du déficit à l’heure actuelle
ne saurait être à elle seule une solution. Elle sera
une option pour la réduction de la participation de la ville au déficit à la fin du traité de
concession.
3.2.2.2
La revente en bloc
La commercialisation des 69 lots individuels ne ferme pas la porte à la vente en bloc à un
éventuel promoteur. Les travaux de viabilisation sont à ce jour au stade d'achèvement, comme
ont pu constater les vérificateurs lors de leur visite. Une modification de programme n'est plus
envisageable et la commercialisation est prévue sur une période de 4 années, ainsi le prêt
GAIA serait soldé courant 2029.
3.3
Une
lourde
hypothèque
sur
les
finances
communales
3.3.1
Analyse
prospective
avec
reprise
de
2,5
M€
de
déficit
en
2026
Les hypothèses prudentes transmises par la ville donnent effectivement cette trajectoire. Les
analyses prospectives réalisées régulièrement par la ville, avec l’outil LocalNova, sont
généralement plus pessimistes que les réalisations effectivement constatées.
3.3.2
Analyse
prospective
avec
reprise
d’un
déficit
de
9.3
M€
en
2024
L’hypothèse faite par la CRC devrait tenir compte des éléments suivants.
Les calculs d’atterrissage réalisés récemment par l’aménageur dans le cadre de la préparation
du CRAC2023 ont été faits selon 2 scénarios :
•
Scénario 1-Sans rachat du foncier
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
•
Scénario 2 -Avec rachat du foncier en avril 2025
Dans le premier cas la participation communale au déficit supplémentaire serait de 9.3M€ dont
4.9M€ de foncier cessible soit 4.4M€ en déficit net.
Dans le second scénario privilégié par la ville, le déficit supplémentaire serait de 3.9
M€
(et non
plus de 2.5M€)
. Ce scénario, comporte plusieurs avantages :
-
Rendre supportable sur 2 ou 3 exercices (2025 à 2027) le versement de la participation
complémentaire de 3.9
M€ dont tout ou partie serait dédiée au financement des
équipements publics à recevoir.
-
Sécuriser le financement de la recette
du foncier restant à céder qui serait de 4.9M€ en
2026 dans le premier scénario, ce rachat ayant déjà été opéré par le budget annexe
ZAC.
-
Diminuer de 0.5
M€ le déficit réel dans le scénario 2 comparé
au scénario 1
Il a bien été demandé à l’aménageur d’identifier la part de la participation de la ville qui pourrait
être affectée à la réalisation d’équipement public.
La constatation d’étalement de charge n’est pas exclue à ce jour, elle sera examinée lors de la
constatation effective de la charge et selon son montant.
Le budget annexe est créé pour anticiper, dans le bilan de la ZAC, une recette inscrite mais qui
ne sera pas réalisée totalement au terme de la concession en 2026. Le budget annexe ZAC ne
sera pas en déficit de 13M€ lors de l’achat du foncier la première année. Par
des écritures
comptables de
variations de stocks, le foncier acquis et non cédé à la clôture de l’exercice sera
« patrimonialisé » à l’actif en stock venant ainsi en équilibre de l’emprunt figurant au passif du
budget annexe ZAC.
Les déficits réels qui seront constatés en fin d’exercice seront essentiellement
dus aux frais
financiers servis à l’emprunteur, pour lesquels une avance remboursable
pourra être attribuée
par la ville dans l’attente de la perception des recettes de participations constructeurs estimées
à 2M
€ au
-delà de 2026.
Cahier 2
Réponses de la commune de La Possession
aux observations définitives
Glossaire
AGORAH : agence pour
l’observation
de La Réunion,
l’aménagement
et
l’habitat
C. Cass : Cour de
Cassation CE : Conseil d’État
CEREMA : centre
d’études
et
d’expertises
sur les risques,
l’environnement,
la mobilité et
l’aménagement
CGCT : code général des collectivités territoriales
CG3P : code général de la propriété des personnes publiques CJCE : Cour de Justice des
Communautés Européennes
CNOCP : collège du conseil de normalisation des comptes publics CRAC : compte rendu annuel à la
collectivité
DEAL : direction de
l’environnement,
de
l’aménagement
et du
logement DUP : déclaration d’utilité
publique
EPFR : établissement public foncier de La Réunion
FCTVA : fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée LLS : logement locatif social
LLTS : logement locatif très social
Loi NOTRé : Loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République Loi SRU : Loi
du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain PAE : programme
d’aménagement d’ensemble
PAZ : plan
d’aménagement
de zone PLS : prêt locatif social
PSLA : prêt social location
accession PLU : plan local d’urbanisme
RHI : résorption de l’habitat insalubre SAR
: schéma
d’aménagement
régional
SCET : société Services Conseils Expertises Territoires SEDRE : société
d’équipement
du département
de La
Réunion SHLMR : société d’habitation à loyer modéré de La Réunion SHON : surface hors
œuvre nette
SMIC : salaire minimum de croissance SPC : surface plancher
SPL : société publique locale TCO : territoire de la Côte
Ouest TO : Territoire de l’Ouest
ZAC : zone
d’aménagement
concertée
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
51
Chambres régionales des comptes de La Réunion et de Mayotte
44 rue Alexis de Villeneuve
97488 Saint-Denis cedex
www.ccomptes.fr/crc-la-reunion-et-mayotte
https://twitter.com/CRCLRM