COMMUNIQUÉ DE PRESSE
23 janvier 2025
Rapport public thématique
GÉRER MES BIENS IMMOBILIERS (GMBI)
Mise en service en août 2021 et ouverte au grand public en 2023, « Gérer mes biens
immobiliers » (GMBI) est une nouvelle application de l’administration fiscale visant à
moderniser à la fois la déclaration des biens immobiliers des propriétaires en France et la
gestion des déclarations foncières et des taxes d’urbanisme. Dans le contexte de la
suppression progressive de la taxe d’habitation sur les résidences principales entre 2018 et
2023, elle vise également à fournir à l’administration des données fiables, actualisables pour
établir le rôle des impôts subsistants : la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, la
taxe d’habitation sur les logements vacants et la taxe sur les logements vacants, tous
collectés par l’État au profit des collectivités locales. Le déploiement technique de GMBI
s’est déroulé dans des conditions particulièrement difficiles, puisque plus d’un million de
contribuables ont été imposés, à tort, à la taxe d’habitation ou à la taxe sur les logements
vacants. L’administration a dû consentir des dégrèvements très importants, d’un montant
supérieur à 1,3 Md
€
, intégralement supportés par l’État conformément aux dispositions du
code général des impôts. Compte tenu de l’état très dégradé des finances publiques, tous
les efforts doivent être conduits pour que les dégrèvements, et par conséquent la charge
supportée par l’État, soient considérablement réduits très rapidement.
Une campagne 2023 chaotique et aux conséquences financières très lourdes pour l’État
La première campagne incitant les contribuables à vérifier les informations saisies par
l’administration fiscale relatives à leurs biens immobiliers et à déclarer leurs occupants s’est
déroulée en 2023 dans des conditions difficiles.
Elle s’est heurtée à l’incompréhension des
assujettis, soumis à une nouvelle obligation déclarative assortie d’une amende en cas de
manquement, alors qu’était supprimée la taxe d’habitation sur les résidences principales. Des
situations spécifiques avaient de surcroît été mal anticipées, comme le cas des 3 400 multi-
propriétaires (disposant de plus de 200 biens, tels les bailleurs sociaux). Le choix par la DGFiP
d’une procédure totalement dématérialisée s’est révélé peu adéquat pour une obligation qui
touchait une population en moyenne plus âgée. Cette situation a conduit à un afflux de
demandes et de déplacements d’usagers dans les centres des impôts dans les derniers jours de
juin et les premiers jours de juillet 2023, qui a mis les services de la DGFiP en difficulté. Malgré
les reports successifs, seuls 54,1 des 71,4 millions de locaux ont été recensés à l’issue de la
campagne, ce qui a fragilisé l’établissement des rôles des taxes pour cette même année. Au
total, en ajoutant les coûts destinés à faire face à la situation de crise de l’été 2023 (recrutement
de vacataires et contractuels et octroi d’une « prime GMBI »), le dispositif a coûté au moins
56,4 M
€
, de son élaboration à son déploiement. Surtout, les erreurs dues principalement à
l’absence d’informations sur les déménagements et les emménagements de locataires ont
conduit à des dégrèvements massifs, occasionnant une perte de plus d’1,3 Md
€
pour le budget
de l’État. La DGFiP doit désormais se fixer pour objectif de réduire très sensiblement et à brève
échéance le taux de dégrèvement de ces impôts, la campagne 2024 révélant la persistance de
taxations erronées. Par ailleurs, les dégrèvements induits lorsque les collectivités territoriales
manquent à leurs obligations déclaratives au titre de l’occupation de leurs propres biens ne
devraient pas être à la charge de l’État.
Une nouvelle offre de service aux usagers mal préparée et au coût non maîtrisé
Développé sur plus de cinq années avant d’être mis en production, le projet GMBI a souffert
d’une gouvernance et d’un pilotage inadéquats ayant conduit à une dérive budgétaire
importante. Il a été déployé en trois grandes étapes afin que les propriétaires disposent dès
2021 d’une vision d’ensemble de leurs propriétés bâties, effectuent à partir de 2022 leurs
déclarations foncières et de taxes d’urbanisme et, enfin, procèdent en 2023 à la déclaration
d’occupation de leurs biens immobiliers. Les trois chantiers informatiques concernés par
l’élaboration de l’outil (foncier, occupation des locaux, et relations avec les particuliers) ont fait
l’objet d’une gouvernance différente pour chacun d’entre eux, qui s’est révélée complexe et
laborieuse, d’autant que la DGFiP a largement externalisé les développements. Par ailleurs, les
relations entre la DGFiP et la Dinum n’ont pas été satisfaisantes,
la première transmettant
parfois des informations obsolètes ou parcellaires à la seconde. En conséquence, l’outil mis en
production en janvier 2023 n’était dans les faits pas finalisé à l’approche de son lancement pour
les usagers, alors que la contrainte calendaire empêchait tout report. Hors mesures d’urgence,
son coût direct tel qu’évalué par la DGFiP s’élevait en octobre 2024 à 37,2 M
€
, soit près de trois
fois le coût initial indiqué (12,7 M
€
), sur un périmètre certes élargi par rapport au projet initial.
Des données de GMBI à sécuriser et à fiabiliser au profit de politiques publiques du
logement
Au-delà de la modernisation de la DGFiP dans la gestion de certains impôts, GMBI a pour objet
d’améliorer la collecte et l’actualisation des données liées au logement, indispensables à la mise
en
œ
uvre d’un certain nombre de politiques publiques. Ayant pris conscience des difficultés
liées au déploiement de GMBI, l’administration a organisé un retour d’expérience dès le mois
d’octobre 2023 et mis en place un plan de remédiation. Sur le moyen terme, GMBI a permis de
basculer vers un processus informatisé et automatisé, où la télédéclaration par le propriétaire
est centrale. En rythme de croisière, cet outil pourrait apporter des gains d’efficacité très
substantiels et permettre de moderniser la sphère foncière de l’administration fiscale.
Cependant, le manque d’information qui résulte de la suppression de la taxe d’habitation sur
les résidences principales fragilise aussi bien la production de données statistiques fiables que
des politiques publiques aussi diverses que celles relatives au chèque énergie ou au respect de
la loi SRU. Une plus grande coopération entre la DGFiP d’une part, les autres administrations
concernées et l’Insee d’autre part, pourrait permettre d’approfondir ces chantiers. Il est enfin
important d’anticiper la réforme des valeurs locatives cadastrales en obtenant, par GMBI, une
cartographie précise des loyers perçus en France par les propriétaires bailleurs.
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