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ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
« GÉRER MES BIENS
IMMOBILIERS »
Une campagne 2023 chaotique
aux très lourdes conséquences
financières pour l’État
Rapport public thématique
Janvier 2025
Gérer mes biens immobiliers (GMBI)- janvier 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Synthèse
.........................................................................................................
7
Récapitulatif des recommandations
...........................................................
13
Introduction
..................................................................................................
15
Chapitre I Une nouvelle offre de service aux usagers mal
préparée et au coût non maitrisé
................................................................
17
I - Un projet ambitieux, élaboré sur plus de six années et toujours
en cours de déploiement
.................................................................................
17
A - Des objectifs nombreux qui ont évolué dans le temps
....................................
18
B - Un
projet qui combine le renforcement de l’information sur
l’occupation des locaux et la modernisation de la gestion foncière
......................
21
C -
Un calendrier étalé sur cinq années avant l’ouverture de la campagne
déclarative
............................................................................................................
22
II - Un pilotage et une gouvernance défaillants
.............................................
23
A - Un accompagnement et un suivi limités de la part de la direction
du numérique de l’État (Dinum)
...........................................................................
23
B - Une gouvernance complexe et dispersée, sans portage stratégique
ni maîtrise suffisante de la gestion de ce projet
....................................................
24
III - Un coût plus de cinq fois supérieur aux prévisions, mesures
d’urgences incluses
........................................................................................
26
A -
Une dérive financière du fait notamment d’un chiffrage initial
incomplet du projet
...............................................................................................
27
B - Un accompagnement coûteux par des prestataires externes
............................
28
C - Une absence de bilan ou de chiffrage du coût total du projet, pourtant
supérieur à 50
M€
.................................................................................................
29
Chapitre II Une campagne 2023 chaotique et aux conséquences
financières très lourdes pour l’État
............................................................
33
I - Une campagne déclarative 2
023 qui n’a pas permis de fiabiliser
les données nécessaires à l’établissement du rôle des taxes
...........................
34
A - Une réussite du lancement en 2021 qui ne laissait pas présager
les difficultés futures
............................................................................................
34
B - Une campagne 2023 chaotique qui a conduit à des reports successifs
............
34
C -
Un rôle établi alors que l’administration ne disposait de données
que sur 75 % des locaux en France
.......................................................................
36
Gérer mes biens immobiliers (GMBI)- janvier 2025
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4
II - Une mauvaise anticipation des réactions des usagers qui a entraîné
une saturation du dispositif d’accueil
.............................................................
38
A - Une campagne mal expliquée aux assujettis
...................................................
38
B -
Le choix inadéquat d’une procédure entièrement dématérialisée
reposant sur un outil informatique non mature
.....................................................
40
C - Une mauvaise prise en compte des cas spécifiques
........................................
42
D -
Une saturation du dispositif
d’accompagnement et d’assistance
...................
43
III - Des conséquences financières
très lourdes pour l’État
...........................
46
A -
Un coût élevé des mesures d’urgence
.............................................................
46
B -
Une série d’erreurs de liquidation qui entraine une perte de plus
d’1,3
Md€ pour l’État
...........................................................................................
48
Chapitre III Des données de GMBI à sécuriser et à fiabiliser
au profit de politiques publiques du logement
...........................................
53
I - Des données GMBI au caractère sensible nécessitant une protection
renforcée
........................................................................................................
53
A - Des audits de sécurité réalisés tardivement, des standards de sécurité
non atteints
...........................................................................................................
54
B - Une conformité au RGPD à marche forcée
.....................................................
54
II -
Une modernisation en devenir de l’administration fiscale
.......................
55
A -
Une montée en puissance progressive s’agissant des taxes d’urbanisme
........
56
B - Une automatisation source de gains substantiels, notamment en ETP
............
57
III - Une fiabilisation et amélioration de la qualité des données issues
de GMBI à poursuivre
...................................................................................
59
A - Une fiabilisation des bases inaboutie
..............................................................
59
B - Une qualité et une exhaustivité des données à renforcer pour
compenser
la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences
principales
............................................................................................................
61
IV -
Un potentiel en matière statistique et d’appui aux
politiques
publiques encore sous-exploité
......................................................................
67
Conclusion générale
.....................................................................................
71
Liste des abréviations
..................................................................................
73
Annexes
.........................................................................................................
75
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Procédures et méthodes
En application de l’article L. 143
-6 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes publie chaque année un rapport public
annuel et des rapports publics thématiques.
C
es travaux et leurs suites sont réalisés par l’une des six chambres
que comprend la Cour ou par une formation associant plusieurs chambres
et/ou plusieurs chambres régionales ou territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutair
e de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que t
outes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a l
ieu, après audition des
responsables concernés.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, l
a publication d’un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses sont présentées en annexe du texte de la Cour.
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La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et d
éfinitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
Le présent contrôle a été conduit sur le fondement de articles 111.3
du code des juridictions financières dans le cadre d’une formation
interchambre (FIC) associant trois chambres de la Cour. Les rapporteurs ont
adressé des questionnaires et rencontré l’ensemble des administrations
concernées : direction générale des finances publiques (DGFiP), Institut
national des statistiques et études économiques (Insee), direction de
l’habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), service des données et
études statistiques (SDES). Des échanges ont été organisés dans un centre
de contact du réseau déconcentré des finances publiques.
Le rapport initial a été délibéré le 10 juillet 2024. Le rapport définitif
a été délibéré le 17 octobre 2024 par la FIC présidée par Mme Camby,
présidente de chambre, et composée de MM. Cabourdin, Giannesini,
Marcovitch et Mmes Mazoyer et Lajus, conseillers maîtres ainsi que, en tant
que rapporteurs, MM. Brouillet et Colin, conseillers maîtres, M. Dedrie,
conseiller référendaire et, en tant que contre-rapporteur, M. Pierre,
conseiller maître.
Il a été examiné et approuvé le 19 novembre par le comité du rapport
public et des programmes de la Cour des comptes, composé de
M. Moscovici, Premier président, M. Rolland, rapporteur général,
M. Charpy, Mme Camby, M. Bertucci, M. Meddah, Mme Mercereau,
M. Lejeune et Mme Thibault, présidentes et présidents de chambre de la
Cour, M. Strassel, M. Serre, Mme Daussin-Charpantier, Mme Renet et
Mme Bonnafoux présidentes et présidents de chambre régionale des
comptes, Mme Hamayon, Procureure
générale, entendue en ses avis
.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
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Synthèse
En réflexion depuis 2015 et mis en service en 2021, «
Gérer mes
biens immobiliers
» (GMBI) est un outil de l’administration fiscale
conçu
pour moderniser la déclaration des biens immobiliers des propriétaires en
France et
les modalités d’
occupation de ces biens. Il offre ainsi aux
contribuables la possibilité d’
avoir accès en temps réel aux informations
dont dispose l’administration sur leurs
biens et de pouvoir les corriger. Il
assure également la gestion des déclarations foncières et des taxes
d’urbanisme.
Enfin, dans le contexte de la suppression par étapes de la taxe
d’habitation
sur les résidences principales entre 2018 et 2023 et, à plus long
terme, de la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux
d’habitation,
cette application doit également permettre
à l’administration
fiscale de disposer de données fiables et actualisées pour établir le rôle des
trois
impôts subsistants, à savoir la taxe d’habitation sur les résidences
secondaires,
la taxe d’habitation sur les logements vacants et
la taxe sur les
logements vacants
, tous collectés par l’État au profit des collectivités
locales
et, pour la dernière, de l’agence nationale pour l’amélioration de
l’habitat (Anah)
.
Au printemps 2023, les propriétaires ont été invités à vérifier et
éventuellement mettre à jour les données relatives à leurs biens immobiliers
préalablement saisi
es par l’administration dans GMBI. Il leur était
demandé d
’indiquer
s’ils occupaient eux
-
mêmes le bien, s’ils le louaient
ou si celui-ci était vacant. Ils devaient également préciser la période
d’occupation et l’identité des occupants. Toutes ces données é
taient
indispensables à l’administration pour qu’elle puisse établir les rôles des
trois taxes encore en vigueur.
En raison notamment de l’incompréhension des contribuables sur ce
qui leur était demandé, l’administration fiscale n’a cependant pas pu
disposer
en temps utile de données robustes sur l’occupation des locaux.
Le
déploiement
de
GMBI
s’est
déroulé
dans
des
conditions
particulièrement difficiles et, de
ce fait, plus d’
un million de contribuables
ont été imposés, à tort,
à la taxe d’habitation ou à
la taxe sur les logements
vacants.
L’administration a dû consentir des
dégrèvements très importants,
d’un montant supérieur à 1,3
Md€
, équivalent à 34 % du produit de ces
taxes en 2023. Conformément aux dispositions du code général des impôts,
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ces dégrèvements
ont été entièrement à la charge de l’
État, le produit de
ces taxes restant acquis aux collectivités territoriales. Dans un contexte
financier très difficile pour les finances publiques, tous les efforts doivent
être conduits pour qu
’une
perte
d’une
telle ampleur ne se reproduise pas
en 2024.
Un projet ambitieux de modernisation dont le pilotage défaillant
a entraîné un triplement du coût initial
Élaboré à partir de 2019 après avoir reçu un financement du fonds
de transformation de l’action publique,
le projet GMBI a été déployé en
trois grandes étapes afin que les propriétaires disposent dès 2021
d’
une
vision d’ensemble de leurs propriétés bâties, effectuent à partir de 2022
leurs déclarations foncières
et de taxes d’urbanisme et, enfin, procèdent en
2023 à la déclaration d’occupation de leurs biens immobiliers.
L’élaboration de l’outil n’a
toutefois pas respecté les bonnes
pratiques de gestion attendues dans ce domaine. Les trois chantiers
informatiques concernés (foncier, occupation des locaux, et relations avec
les particuliers) ont fait l’objet d’une gouvernance différente pour chacun
d’entre eux, qui s’est
révélée complexe et laborieuse. De nombreuses
équipes étant
mobilisées, le pilotage a été peu efficace en raison d’un
portage politique limité et d’une absence de direction de projet de plein
exercice, transverse et rattachée à la direction générale de la DGFiP.
Par ailleurs, les relations entre la DGFiP et la direction
interministérielle du numérique (Dinum)
n’
ont pas été satisfaisantes, la
première transmettant parfois des informations obsolètes ou parcellaires à
la seconde, que ce soit à l’occasion de la procédure d’avis conforme rendu
pour tous les projets info
rmatiques d’envergure ou au moment de
l’actualisation de leur panorama.
Les alertes de la Dinum au sujet de la
protection des données personnelles n’ont pas été prises en compte assez
rapidement. Elles ont donné lieu en 2023 et 2024 à des discussions
complexes entre la DGFiP et la CNIL en vue de préparer le décret régissant
la protection des données.
Enfin,
lors de l’élaboration de l’outil, les
exigences en matière de
sécurité informatique n’ont pas
été prises en compte à la hauteur des
enjeux ; des fragilités sont apparues, pouvant expliquer les difficultés
ultérieures.
En conséquence, l’outil mis en production en janvier 2023 n’était
dans les faits
pas finalisé à l’approche de son lancement pour les usagers,
alors que la contrainte calendaire empêchait tout report. Certains modules
de gestion du contentieux ou de la taxation
n’étaient en particulier toujours
Gérer mes biens immobiliers (GMBI)- janvier 2025
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SYNTHÈSE
9
pas disponibles ; d’autres avaient été peu
testés, avaient soulevé des
difficultés d’exploitation ou étaient peu ergonomiques pour les agents,
avec une vision de l’outil différente de celle des usagers complexifiant le
rôle d’accompagnement des services.
À la date de publication du présent rapport
, l’outil GMBI est
toujours en développement. Hors mesures d’urgence, son coût direct tel
qu’évalué par la DGFiP est de 37,2 M€, soit trois fois plus que le montant
total initialement prévu (12,7 M€), sur un périmètre certes élargi par
rapport au projet in
itial. Ce dépassement s’explique en grande partie par le
recours massif
à des prestataires externes, pour un total de 25 M€, soit les
deux tiers des dépenses affichées.
Une première campagne déclarative chaotique
et aux très lourdes conséquences financière
s pour l’État
Pour les 24 millions de propriétaires et les agents de la DGFiP
concernés, la campagne 2023 s’est déroulée dans des conditions très
difficiles. Elle s’est tout d’abord
heurtée à l’incompréhension des
assujettis, soumis à une nouvelle obligati
on déclarative assortie d’une
amende en cas de manquement, alors qu’était supprimée la taxe
d’habitation. La finalité de la campagne, visant à établir le statut
d’occupation de chaque local, n’a
pas été suffisamment expliquée aux
contribuables.
De nombreuses situations spécifiques avaient de surcroît été mal
anticipées, notamment pour traiter le cas des 3 400 « multi-propriétaires »,
c’est
-à-dire les propriétaires disposant de plus de 200 biens, comme les
collectivités territoriales ou les bailleurs sociaux. La DGFiP avait fait, par
ailleurs,
le choix d’une procédure entièrement dématérialisée, notamment
pour éviter un afflux de formulaires papier en 2023 à l’occasion de la
première déclaration. Ce choix était cependant inadéquat pour une
obligation qui touchait une population en moyenne plus âgée et plus
éloignée des outils informatiques. Il s’est révélé particulièrement
préjudiciable
compte
tenu
notamment
des
indisponibilités
et
dysfonctionnements
de l’application et de la décision de n’envoyer un
courrier
de relance que 15 jours avant l’échéance de déclaration. Cette
situation a conduit à un afflux de demandes
et de déplacements d’usagers
dans les centres des impôts dans les derniers jours de juin et les premiers
jours de juillet 2023, qui a mis les services de la DGFiP en grande
difficulté.
Dans ce contexte,
des reports successifs de l’échéance de déclaration
ont été décidés dans l’urgence à l’été 2023. Ils n’ont cependant pas été
suffisants pour permettre à l’administration fiscale de disposer d’un état
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10
d
es lieux complet de l’occupation des locaux en France, enjeu central de
GMBI : seuls 54,1 millions parmi les 71,4 millions de locaux, dépendances
comprises, ont été recensés
à l’issue de la campagne
, représentant 73,1 %
du nombre de propriétaires, ce qui a
fragilisé l’établissement des rôles des
taxes pour cette même année.
Pour faire face à cette situation de crise, la DGFiP a été conduite à
mettre en
œuvre
des mesures d’urgence coûteuses
:
mise en place d’une
équipe spéciale pour accompagner certains publics comme les multi-
propriétaires, recrutement en grand nombre de vacataires ou de
contractuels ou
encore octroi d’une
« prime GMBI » à une partie des agents
à la fin de l’année 2023. L’ensemble de ces mesures a représenté un coût
de 20 M€, s’ajoutant au c
oût direct de développement de GMBI de
37,2
M€
. Au total, en ajoutant les coûts supplémentaires destinés à faire
face à la situation de crise de l’été 2023,
GMBI a ainsi coûté au moins
56,4
M€
, de son élaboration à son déploiement et à la campagne 2023.
Surtout, les erreurs nombreuses dans la liquidation de la taxe
d’habitation sur les résidences secondaires et
les logements vacants, dues
principalement à la mauvaise prise en compte du déménagement ou
emménagement de locataires, ont conduit à une perte de p
lus d’1,3
Md€
pour le budget de l’
État. Cette perte représente 34 % du produit des trois
taxes concernées en 2023.
Or l’État
est tenu, en application des dispositions
du code général des impôts, de prendre à sa charge les dégrèvements de
taxes d’habitation
collectées au bénéfice des collectivités territoriales. La
DGFiP a tenu les ministres informés des difficultés rencontrées, mais ne
les a pas alertés sur le risque budgétaire lié à la prise en charge intégrale
des dégrèvements par l’
État.
Dans un context
e de diminution des recettes des taxes d’habitation
résiduelles (sur les résidences secondaires et les locaux vacants), la DGFiP
doit désormais se fixer pour objectif de réduire très sensiblement et à brève
échéance le taux de dégrèvements de ces impôts. Par ailleurs, lorsque les
collectivités territoriales manquent à leurs obligations déclaratives au titre
de l’occupation de leurs propres biens immobiliers, les dégrèvements
induits ne devraient pas être à la charge de l’
État.
Une application qui ne contribue pas suffisamment
à la nécessaire amélioration de la connaissance des données
en matière de logement
L
’administration
qui a pris conscience tardivement des difficultés
liées au déploiement de GMBI, a organisé un retour d’expérience dès le
mois d’octobre
2023 et mis en place un plan de remédiation. Le nombre
et le montant des dégrèvements qui seront accordés au titre de 2024
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SYNTHÈSE
11
permettront d’apprécier son efficacité.
Sur le moyen terme, au-delà des
graves difficultés de la campagne 2023, GMBI a permis de basculer vers
un processus informatisé et automatisé, où la télédéclaration par le
propriétaire est centrale. En rythme de croisière, cet outil
, même s’il
reste
à parfaire,
doit apporter des gains d’efficacité très substantiels et permettre
de moderniser la s
phère foncière de l’administration fiscale.
GMBI ne pallie toutefois
pas le manque d’information
résultant de
la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, qui
seule permettait d’établir un lien
entre un logement et son occupant. En
conséquence, plusieurs politiques publiques (chèque énergie, loi SRU
notamment) reposant sur la fiabilité des données des logements et de leur
occupation ont été fragilisées. Des projets comme le programme «
Résil
»
de l’Insee visent à re
constituer cette information, mais ils dépendent de la
qualité des informations collectées dans GMBI. Or celle-ci est encore
limitée au regard de la couverture incomplète des locaux à l’issue de la
campagne déclarative de 2023, ainsi que du nombre incertain de
rectifications issues du cadastre. Une plus grande coopération entre la
DGFiP d’une part, les autres administrations concernées et l’Insee d’autre
part, s’agissant par exemple
du contrôle de la qualité des données, pourrait
permettre d’approfondir ces chantiers.
À moyen terme, des réflexions plus abouties devraient être engagées
sur l’apport de GMBI à d’autres politiques publiques ou pour des
usages
connexes propres aux métiers de la DGFiP, par exemple pour les contrôles
fiscaux. Il est enfin
important d’anticiper
la réforme des valeurs locatives
cadastrales, plusieurs fois repoussée, pour obtenir une cartographie précise
des loyers perçus en France par les propriétaires bailleurs.
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Récapitulatif des recommandations
1.
Désigner un directeur de projet transverse et de plein exercice rattaché
au directeur général pour la conduite de projets informatiques à fort
enjeux technique, juridique, administratif et financier (
ministre chargé
du budget et des comptes publics
, 2025).
2.
Fournir à la direction interministérielle du numérique, pour le
développement
de
tout
système
d’information
d’envergure,
l’ensemble des informations nécessaires et chercher à résoudre les
points d’attention qu’elle soulève
(
ministre chargé du budget et des
comptes publics
, 2025).
3.
Engager les actions nécessaires à la diminution du taux de
dégrèvement et faire du taux de dégrèvement des impôts locaux un
indicateur de la mission « Remboursements et dégrèvements »
(
ministre chargé du budget et des comptes publics
, 2025).
4.
Suivre le nombre de rectifications des données du cadastre issues de la
coopération des propriétaires (
ministre chargé du budget et des
comptes publics
, 2025).
5.
Fournir aux services statistiques publics qui en ont besoin les
informations permettant de mieux appréhender la qualité des données
issues de GMBI (
ministre chargé du budget et des comptes publics
,
2025).
6.
Organiser dès 2025 la collecte des données relatives aux loyers en
prévision de la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux
d’habitation
(
ministre chargé du budget et des comptes publics
, 2025).
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Introduction
Mise en service en août 2021 et ouvert au grand public en 2023,
«
Gérer mes biens immobiliers
» (GMBI) est une nouvelle application de
l’
administration fiscale visant à moderniser à la fois la déclaration des biens
immobiliers des propriétaires en France, par la mise en place d’un nouveau
référentiel national d’occupation des locaux, et la gestion des déclarations
foncières et des taxes d’u
rbanisme. Elle
permet aux contribuables d’avoir
accès en temps réel aux informations dont dispose l’administration fiscale
sur leurs propriétés foncières et de les actualiser. Dans le contexte de la
suppression progressive
de la taxe d’habitation
entre 2018 et 2023 et, à plus
long terme, de la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux
d’habitation servant d’assiette notamment aux taxes foncières
, elle vise
également
à fournir à l’administration des données fiables, actualisables
au fil de l’eau
et utilisables pour établir le rôle des impôts subsistants, à
savoir les taxes d’habitation sur les résidences secondaires et les logements
vacants, qui financent les collectivités territoriales, ainsi que pour des
contrôles fiscaux.
Son lancement auprès du grand public en 2023 a été marqué par
d
’important
es difficultés techniques. Cette application a rencontré
l’incompréhension d’une large partie des 24 millions de propriétaires
1
soumis, dans des délais réduits et sous peine d’amende, à
une nouvelle
obligation déclarative d’occupation de leurs locaux, conséquence de la
suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales. Compte
tenu des difficultés rencontrées, l’échéance
initialement prévue a fait
l’objet de plusieurs reports
, retardant le processus de quelques semaines
2
.
Des erreurs importantes dans la liquidation de certains impôts ont par
ailleurs
été constatées, en particulier concernant la taxe d’habitation sur les
résidences secondaires. Elles ont représenté un coût très important
d’1,3
Md€ intégralement supporté par l’
État.
1
34 millions de propriétaires, mais 24 millions de personnes morales ou physiques
soumis à l’obligation déclarative du fait des indivisions, pour 71 millions de locaux
dépendances comprises.
2
Report du 30 juin au 31 juillet puis au 10 août 2024.
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16
Eu égard à ces difficultés touchant de près de nombreux
contribuables
, à l’écho médiatique qui leur a été apporté et aux
enjeux
budgétaires afférents, la Cour a décidé de conduire un contrôle de ce
nouveau service de la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Après avoir mis en évidence les difficultés rencontrées dans la gouvernance
et la mise en œuvre du projet
3
, conduisant à des surcoûts importants (partie
1), le rapport s’attache à
caractériser les difficultés rencontrées au cours de
la première campagne déclarative menées en 2023 et à en chiffrer le coût,
très élevé, pour l’
État (partie 2). Il analyse enfin les limites de GMBI en
termes d’amélioration de la
qualité, de fiabilisation et de protection des
données fiscales relatives au logement (partie 3).
3
La régularité des marchés publics concernés, excédant le champ du présent rapport,
n’a pas fait l’objet d’investigations spécifiques par la Cour.
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Chapitre I
Une nouvelle offre de service
aux usagers mal préparée
et au coût non maitrisé
Dans un contexte contraint par la réforme de la fiscalité directe
locale, le
projet GMBI répond à l’ambition forte de moderniser le rapport
des contribuables avec l’administration fiscale s’agissant des nouvelles
obligations déclaratives et des démarches foncières.
Développé sur plus de cinq années avant d’être mis en production,
l
e projet a souffert d’une gouvernance et d’un pilotage
inadéquats ayant
conduit à une dérive budgétaire importante.
I -
Un projet ambitieux, élaboré sur plus de
six années et toujours en cours de déploiement
Nouvel applicatif fiscal destiné à moderniser la relation avec les
contribuables dans la sphère foncière, il a évolué du fait de la suppression
de la taxe d’habitation sur les résidences principales et de la nécessité de
continuer à disposer d’informations fiables sur l’occupation des locaux
.
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COUR DES COMPTES
18
A -
Des objectifs nombreux qui ont évolué dans le temps
Lancé en septembre 2018, mais à l’étude depuis 2015
dans son
aspect d’amélioration des données liées au logement
4
, le projet GMBI est
institué par la loi de finances pour 2020, et
codifié à l’
article 1418 du code
général des impôts. Ouvert officiellement en avril 2021 pour la
consultation des données liées aux propriétés, GMBI est progressivement
déployé jusqu’à la campagne déclarative
de 2023, obligatoire pour les
usagers sous peine d’amende
et lancée alors que cette application
informatique
n’était
pas tout à fait parvenue au terme de son
développement.
Inscrit dans un contexte de profonde réforme de la fiscalité locale,
et notamment de suppression progressive
de la taxe d’habitation sur les
résidences principales, le projet GMBI poursuit cinq objectifs mentionnés
dans les documents de présentation qui peuvent être récapitulés comme
suit :
4
Le rapport de la Cour de 2015 consacré aux aides personnelles au logement évoque
ainsi la « base de données » à venir permettant de connaître les données relatives aux
logements des allocataires des aides (Cour des comptes,
Les aides personnelles au
logement. Communication à la commission des finances du Sénat
, juillet 2015).
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1919
Tableau n° 1 :
objectifs du projet GMBI
Sous-objectif / moyen
d’y parvenir
1
Améliorer l’information
des contribuables
sur leurs biens immobiliers
Mettre à la disposition des usagers
les informations connues
par l’administration fiscale relatives
au statut d’occupation
et aux caractéristiques
de leurs biens immobiliers
2
Dématérialiser les procédures
de déclaration liées
aux biens immobiliers
Permettre aux usagers de déclarer en
ligne les informations concernant
l’occupation
du logement et l’identité
des occupants
Permettre aux usagers de déclarer en
ligne les constructions
ou travaux effectués
sur les biens immobiliers
3
Moderniser la gestion
et le recouvrement des impôts liés
au logement
Moderniser, notamment par
une plus grande automatisation,
le recouvrement des impôts
concernés, en particulier la taxe
d’habitation sur les résidences
secondaires, la taxe d’habitation su
r
les logements vacants et la taxe sur
les logements vacants
Moderniser les procédures
de surveillance et de relance
des propriétés bâties
Permettre la liquidation
et le recouvrement des taxes
d’urbanisme par la DGFiP
4
Fiabiliser les bases
de la fiscalité directe locale
Permettre une actualisation
plus rapide des bases
Permettre aux usagers de rectifier les
informations disponibles
sur leurs biens immobiliers
Organiser la collecte des loyers
perçus par les propriétaires bailleurs
pour actualiser les valeurs locatives
cadastrales (VLC)
des locaux d’habitation
5
Poursuivre la réforme
de la DGFiP
Réduire les emplois, principalement
dans les services fonciers, en passant
à un processus entièrement
automatisé
Instaurer une relation de confiance
avec le contribuable
Source : Cour des comptes
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COUR DES COMPTES
20
Ces objectifs n
’étaient pas tous formulés de façon
explicite.
L’objectif d’approfondir la réforme de la DGFiP, en l’inscrivant davantage
dans une « relation de confiance » avec le contribuable et en réduisant les
effectifs, notamment par l’automatisation des procédures, est perceptible
dès la conception du projet
dans les documents budgétaires. Il n’a
cependant jamais été officiellement affiché par l’administration.
Par ailleurs, ces objectifs ont évolué dans le temps. Le sous-objectif
lié à la liquidation des taxes d’urbanisme, ajouté en 2021, ne faisait pas
partie du projet initial, tandis que l’actualisation des
valeurs locatives
cadastrales
a été pour l’heure reportée, supprimant l’obligation déclarative
des loyers perçus par les propriétaires qui avait été envisagée.
La réforme en cours de la fiscalité locale
Le projet GMBI a été élaboré et déployé dans le contexte d’une
réforme profonde de la fiscalité locale. Pr
emièrement, la taxe d’habitation
sur les résidences principales a été supprimée de manière progressive entre
2018 et 2023
5
, d’abord pour les 4/5e des ménages les plus modestes
au
rythme d’
une réduction de 30 % (2018), de 65 % (2019), enfin de 100 %
(2020), puis pour les ménages restants, selon un même étalement de 2021 à
2023. Dans le même temps, le financement des collectivités territoriales et
des EPCI à fiscalité propre a été revu pour compenser cette suppression avec
notamment l’attribution aux départements et aux intercommunalités d’une
part des recettes de TVA, la création de la
taxe d’habitation sur les
résidences secondaires, le transfert aux communes de la part départementale
de la taxe foncière sur les propriétés bâties et divers abondements ou
dotations.
Deuxièmement, l’ordonnance du 14 juin 2022 et le décret du
1
er
août 2022
6
ont prévu le transfert de la liquidation des taxes d’urbanisme
à la DGFiP à partir du 1
er
septembre 2022, qui en assurait auparavant le seul
recouvrement. Conduite jusque-là par les services du ministère de la
transition écologique et de la cohésion des territoires (notamment les
directions départementales des territoires), cette mission de liquidation
gagnait à être assurée par une même direction pour éviter redondances et
pesanteurs administratives.
5
Cf. notamment Conseil des prélèvements obligatoires,
Pour une fiscalité du logement
plus cohérente
, 2023.
6
Décret n° 2022-1102 du 1er août 2022 fixant les modalités et la date du transfert de la
gestion de la taxe d'aménagement et de la part logement de la redevance d'archéologie
préventive aux services de la direction générale des finances publiques.
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1921
Enfin, la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux
d’habitation est une nécessité identifiée par les pouvoirs publics depuis au
moins 1990
7
. Pourtant, la réforme prévue à l’article 74 de la loi de finances
rectificati
ve pour 2013 n’a pas été conduite, du fait des importants transferts
qui en auraient résulté pour les contribuables. Une nouvelle réforme, inscrite
dans la loi de finances pour 2020, et dont GMBI constituait une pièce
importante, a été reportée de 2026 à 2028
8
.
La Cour a eu l’occasion de
relever que cette situation «
fragilise les fondements des taxes foncières et
nuit à l’équité de traitement entre contribuables
»
9
.
B -
Un projet qui combine le renforcement
de l’information sur l’occupation des locaux
et la modernisation de la gestion foncière
Le projet comporte deux volets distincts. Le premier volet, lié à
l’occupation des locaux, correspond à l’aspect le plus connu de GMBI
. Il
consiste à instaurer pour les propriétaires de biens immobiliers une
obligation déclarative portant
sur le régime d’occupation
de ces biens et
l’identité de
leurs occupants
. Ces informations doivent permettre d’assurer
la gestion des taxations qui y sont liées
10
. À terme, la taxation et les
contentieux seront également gérés dans cette application
. L’objectif est de
pouvoir établir des rôles plus fiables
des taxes d’habitation subsistant à la
suppression de la
taxe d’habitation sur les résidences principales
, à savoir
la taxe d’habitation sur
les résidences secondaires et celle sur les logements
vacants, étant entendu que les données issues précédemment de la taxe
d’habitation étaient d’une qualité inégale.
Le second volet est lié au cadastre et aux aspects de gestion
foncière
11
. Il permet :
-
la gestion du suivi des obligations déclaratives et la relance des
propriétaires pour le dépôt des déclarations sur les propriétés bâties
12
;
7
La loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 en posait le principe.
8
Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, article 106.
9
Cour des comptes,
Les taxes foncières
, Observations définitives, 2023.
10
Ce volet est géré par un applicatif dont le nom est « GestODL » (pour « Gestion de
l’Occupation Des Locaux
»). « GestODL
» est associé au répertoire de l’occupation des
locaux, « R-ODL
», créé pour l’occasion.
11
Il
repose sur le système d’info
rmation « GESLOC » (associé au répertoire des locaux,
« R-LOC », qui existait déjà auparavant).
12
Applicatif SURF (pour « Surveillance Relance Foncière).
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COUR DES COMPTES
22
-
l’évaluation foncière du local concerné
13
;
-
la liquidation des taxes, et la gestion des aspects contentieux et
d’impositions correctives
14
.
Le déploiement de GMBI
permet d’automatiser
une grande partie
du suivi des propriétés bâties, réalisé presque entièrement jusque-là de
manière manuelle par les agents. En effet, la DGFiP était auparavant
informée des changements relatifs aux propriétés bâties par le ministère
ch
argé de l’écologie qui lui transférait les autorisations d’urbanisme
15
,
permettant à la DGFiP de veiller au respect des obligations déclaratives par
les usagers. Enfin, les déclarations des propriétaires prenaient la forme de
formulaires papier saisis manuellement par les agents de la DGFiP.
Du point de vue de l’usager, personne physique ou morale possédant
un bien immobilier, la porte d’entrée est
désormais unique, GMBI se
présentant comme un espace spécifique du site «
impots.gouv.fr
» sur
lequel le contribuable peut
déclarer le régime d’occupation du bien
immobilier ainsi que l’identité du ou des occupants
, consulter les
informations qui constituent la base notamment de la taxe foncière,
solliciter le cas échéant leur correction et déclarer les constructions ou
aménagements assujettis
à la taxe d’urbanisme.
C -
Un calendrier étalé sur cinq années
avant l’ouverture de la campagne déclarative
Le projet GMBI est officiellement lancé en juin 2018. Un contrat de
transformation est conclu en décembre 2018 entre la DGFiP et le secrétariat
général des ministères économiques et financiers d’une part, la direction
interministérielle de la transformation publique (DITP) et la direction du
budget d’autre part. Il présente le projet de «
dématérialisation des
déclarations foncières des propriétés bâties
» dans l’optique d’obtenir
4
M€ du fonds de transformation de l’action publique (FTAP). Cette
somme a été intégralement engagée par la suite.
Entre la première phase de son élaboration en juin 2018 et
l’ouverture de la première campagne déclarative en janvier 2023, presque
cinq années se sont écoulées. Sur ce laps de temps, deux périodes sont à
distinguer (cf. annexe n° 1) :
13
EVALOC.
14
Gestion TU, application de «
gestion des Taxes d’Urbanisme
».
15
SITADEL pour «
Système d’Information et de Traitement Automatisé des Données
Élémentaires sur les Logements et les locaux ».
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-
l’élaboration du pro
jet et des modules concernés, qui a évolué avec
l’intégration, prévue à partir de juin 2020, de la prise en compte
du transfert des taxes d’urbanisme
;
-
le déploiement progressif des modules, en trois phases distinctes.
Prévu pour une durée de 54 mois, soit quatre ans et demi, le projet
GMBI est pourtant toujours en cours de développement à la date de
publication du présent rapport, soit six ans après. En particulier, une partie
de la chaîne de taxation qui devait disparaître avec GMBI n’a pas encore
été décommissionnée
16
.
II -
Un pilotage et une gouvernance défaillants
En tant que « grand projet numérique
de l’
État
», GMBI a fait l’objet
d’un suivi par la Dinum ainsi que d’un pilotage et d’une gouvernance
ad hoc
qui n’ont toutefois permis d’éviter ni la dérive bud
gétaire du projet,
ni l’arbitrage tardif
rendu sur certains de ses paramètres clés.
A -
Un accompagnement et un suivi limités de la part
de la direction du numérique de l’
État (Dinum)
Le rôle de la Dinum dans l’élaboration et la mise en œuvre du projet
GMBI a
été limité. La direction n’a pas été associée à la phase d’études et
de conception préalable de 2018-2019, les premiers échanges informels
avec la DGFiP datant de janvier 2020. La saisine au titre de la procédure
dite « article 3 »
17
n’est intervenue qu’en juin 2020, soit plus d’un an après
les premières études d’urbanisation
18
du système d’information, sans
d’ailleurs que le dossier soumis par la DGFiP ne les contienne toutes
19
;
l’avis favorable rendu par la Dinum le 7 juillet 2020
20
, comportant cinq
16
En
informatique, décommissionner signifie abandonner l’utilisation d’un logiciel
(ou d’un serveur) en l’ayant au préalable rempl
acé par un outil plus performant (ou en
en ayant extrait les données, pour un serveur).
17
Article 3 du décret n° 2019-1088 : procédure selon laquelle la Dinum rend un avis de
conformité sur les grands projets d’un système d’information de l'
État de plus de
9 M€.
18
Accompagnement visant à faire évoluer les systèmes d'information (SI) afin qu'ils
soutiennent et accompagnent efficacement les missions d’une org
anisation et anticipent
ses transformations.
19
Si l’étude du volet surveillance et occupation est bien en annexe de la saisine, tel n’est
pas le cas de l’étude du volet taxation, qui date de mars 2020.
20
Avis de la Dinum, consultable sur le site internet.
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COUR DES COMPTES
24
points d’attention et aucune réserve, s’appu
yait ainsi sur des informations
incomplètes ou déjà partiellement obsolètes.
Le suivi de GMBI a été assuré au titre des « grands projets
numériques de l’État
». Il n’a toutefois pas permis de lim
iter la dérive
budgétaire et calendaire (cf.
infra
) pourtant prévisible du projet, comme en
atteste le dernier point d’attention émis dans l’avis conforme. Les données
issues du « Panorama des grands projets numériques », disponibles en juin
et en décembre de chaque année, indiquent par ailleurs que, même si elle a
pu contester les chiffrages ou demander des informations complémentaires,
la Dinum n’a pas été en mesure de proposer une contre
-expertise ou de
rappeler les points d’attention émis dans l’avis co
nforme, y compris quand
le projet a commencé à dériver en termes calendaires et budgétaires en mai
2021. Enfin, la DGFiP n’a pas toujours souhaité transmettre les documents
qui auraient pu éclairer l’avis de la Dinum, comme en témoignent plusieurs
comptes rendus de comité de pilotage.
De manière générale, aucun des cinq points d’attention concernant le
portage du projet,
son articulation avec le ministère chargé de l’écologie, la
délégation de l’accès, la conformité au RGPD ou l’estimation des coûts, n’a
ét
é clos pendant la période de suivi, qui s’est conclue en novembre 2023.
B -
Une gouvernance complexe et dispersée,
sans portage stratégique ni maîtrise suffisante
de la gestion de ce projet
La gouvernance du projet GMBI a été et reste complexe et dispersée.
Elle a mobilisé, et mobilise toujours, au sein de la DGFIP, de nombreux
bureaux du service de la gestion fiscale et du service des systèmes
d’information. La direction de projet est assumée par le chef du bureau
chargé du pilotage de la taxe foncière, de la
taxe d’habitation et des
applications d’assiette et de recouvrement forcé des impôts des particuliers
(« GF-1B »)
21
. La conduite opérationnelle des travaux (MOE) pour
l’ensemble du projet est
, quant à elle, assurée par le bureau du pilotage de
la production
des systèmes d’information («
BSI2 »). La maitrise
d’ouvrage (MOA) et la maitrise d’œuvre (MOE) sont donc assurées par des
équipes différentes des services du cadastre, des particuliers et de
l’informatique
, rendant très complexe le pilotage du projet.
21
GF-1B assume de nombreux rôles au sein du projet GMBI : il est également
responsable de la maîtrise d’ouvrage (MOA) de la partie occupation pour les agents
(GestODL), et bureau métier pour les briques TELEFON et GestODL.
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1925
Ces différents acteurs se réunissent régulièrement au sein d’une
comitologie spécifique. Ainsi, le comité de pilotage (COPIL) se réunit de
manière bimestrielle et le comité opérationnel de manière mensuelle. Les
autres comités plus opérationnels et les ateliers techniques se réunissent
plus fréquemment, en tant que de besoin.
L’analyse des comptes rendus de
s entités constituant cette
comitologie et les auditions montrent la fragilité de la coordination entre
les différents bureaux et un manque de portage stratégique du projet par la
direction générale
22
. Les comités de pilotage mentionnent, en effet, des
réunions au niveau du directeur général, qui
n’ont pas fait l’objet de
comptes rendus systématiques. Cette implication ne semble pas avoir été
suffisamment régulière. En particulier, les conséquences de la suppression
de la taxe d’habitation sur les résidences principales
, identifiées de manière
assez précoce, n’ont toutefois pas été prises en compte opérationnellement
suffisamment en amont. De façon géné
rale, le calendrier n’a pas été
suffisamment anticipé de façon à éviter de fragiliser les politiques
publiques concernées (cf. partie 3).
Le projet a, en outre, pâti d
’une
pratique insatisfaisante de la gestion
de projet et de l’absence de direction de pro
jet de plein exercice,
transversal, doté par ailleurs du positionnement hiérarchique adéquat. En
ce sens, le point d’attention relevé par la Dinum dans son avis conforme
relatif à la nécessité de mettre en place, en plus de la comitologie classique,
un por
tage global du projet et un mécanisme d’arbitrage entre ces différents
acteurs en cas de désaccord, n’a pas été suivi d’effet.
Cette organisation a entrainé une coordination limitée entre les
services techniques et ceux du bureau du pilotage de la production des
systèmes d’information (
BSI2), ainsi que des retards dans le déploiement
de l’outil. Les phases de tests de performance ont été défaillantes
23
,
notamment celles relatives à la chaîne de taxation de la taxe d’habitation.
Le très mauvais déroulement de la campagne déclarative 2023 des multi-
propriétaires (cf.
infra
) démontre que le service
mis en production n’était
pas finalisé. De plus, les analyses de risques ont été trop tardives et certains
de ces risques
n’avaient pas été
anticipés pour la campagne 2023. En
revanche, pour la campagne 2024, une matrice des risques et un plan
d’actions associé ont été mis en place.
22
Le projet GMBI est porté au niveau chef de service. À titre de comparaison, le projet
du prélèvement à la source (PAS) a été piloté par la direction générale de la DGFiP.
23
La DGFIP a rencontré de problèmes d’intégration dans GMBI des fichiers type CSV
li
stant l’ensemble des biens des
multi-propriétaires et contenant les données permettant
de caractériser chaque local.
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26
L
a mission de contrôle de gestion des systèmes d’information
(« MCGSI ») a eu, quant à elle, la charge
d’apporter un soutien
méthodologique et technique au porteur du projet dans la réalisation
d’études financières et stratégiques. L’analyse des comptes rendus de
réunions transmis par ce service met pourtant
en exergue l’absence de
réexamen à intervalles réguliers des coûts du projet GMBI et des
incertitudes sur l’instabilité du périmètre fonctionnel et technique du
projet. À titre illustratif, cette mission ne dispose toujours pas à ce jour de
vision à court terme (deux années) des coûts de maintenance et de
développement des modules restants (« taxation » et « contentieux »).
Enfin, plusieurs points structurants pour le périmètre du projet ont
été arbitrés tardivement. Ainsi, les difficultés pour la gestion de la
contribution à l’
audiovisuel public du fait de la suppression de la taxe
d’habitation sur les résidences principales
ont été identifiées dès 2020, sans
qu’
aucune décision ne soit prise avant 2022. Cette situation est notamment
due au fait que, à la différence d’autres prog
rammes de la DGFiP comme
le prélèvement à la source, le projet GMBI, versant administratif et
technique d’une décision politique, n’a pas bénéficié d’un portage de haut
niveau qui aurait permis d’en assurer la visibilité, en externe comme au
sein de la DGFiP.
La Cour a déjà eu l’occasion de recommander
24
que pour des projets
numériques à l’envergure significative, un responsable unique soit désigné,
ayant autorité pour prendre les décisions et les faire appliquer par
l’ensemble des équipes engagées dans le p
rojet. La DGFiP doit mettre en
place ce type de fonctionnement.
III -
Un coût plus de cinq fois supérieur
aux prévisions, mesures d’urgences incluses
Un portage défaillant du projet, l’absence de cartographie des
risques en amont et une mise en production insuffisamment testée ont
fragilisé les prévisions budgétaires. Le coût direct se révèle au final trois
fois plus élevé que ce qui était prévu dans la saisine de la Dinum, et cinq
fois plus élevé en intégrant les mesures d’urgence mises en place en 2023
(cf. chapitre II du présent rapport).
24
Cour des comptes,
La conduite des grands projets numériques de l’
État
,
Communication à la commission des finances du Sénat, juillet 2020.
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A -
Une dérive financière du fait notamment
d’un chiffrage initial incomplet du projet
À
l’issue du suivi organisé par la Dinum, le coût de référence du
projet mesuré par la DGFiP s’élève à 35,7 M€, soit près de trois fois le coût
initial indiqué, y compris dans les documents budgétaires (12,7 M€).
Graphique n° 1 :
coût de GMBI indiqué par la DGFiP à la Dinum
Source
: Cour des comptes, d’après documents DGFiP
Selon la DGFiP, cette augmentation significative est due, d’une
part à une absence de chiffrage initial de certaines actions (module
« taxation
», actions de communication estimées ensuite à 1 M€, et module
« contentieux
», à 4,26 M€), d’autre part à l’évolution non
prévue du
périmètre du projet, notamment le transfert de la liquidation des taxes
d’urbanisme (coûts relatifs à l’application «
Gestion TU »).
Ces différents coûts auraient toutefois pu être mieux anticipés. La
Dinum évoquait déjà ce défaut de chiffrage global dans l’un des points
d’attention de son avis
du 7 juillet 2020, sans manifestement que la DGFiP
ne cherche à le lever. Ainsi, l’intégration de la liquidation des taxes
d’urbanisme, actée à l’été 2020, est mentionnée dans l’information fournie
à la Dinum le 1
er
septembre de la même année, sans que le coût total du
projet GMBI ne soit officiellement actualisé avant janvier 2021. De même,
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28
l’arbitrage sur les actions de communication date du mois de mai 2021. Le
nécessaire déploiement d’une campagne de communication aurait
pourtant
pu être pris en compte dès la saisine de la Dinu
m, d’autant que le chiffrage
définitif correspond à environ 1
M€
pour les années 2021 à 2023. Enfin,
une partie de l’augmentation est en réalité due à la hausse des dépenses de
personnel, notamment à partir de 2022, date à laquelle la DGFiP intègre
dans les calculs les années 2023 (première année du déploiement) et 2024,
désormais sur un périmètre intégral ; une telle hausse remet en cause la
sincérité des informations contenues dans la saisine initiale de la Dinum.
B -
Un accompagnement coûteux
par des prestataires externes
Contrairement au choix effectué pour la grande majorité du
développement de ses autres systèmes d’information, la DGFiP a quasi
-
intégralement externalisé le développement de GMBI et ne s’est appuyée
qu’à la marge sur ses compétences internes. En juin 2024, les crédits
engagés pour les prestations externes représentaient ainsi un montant total
de 25,1 M€, soit plus des deux tiers du coût de l’outil (37,2 M€), là où
auparavant la DGFiP internalisait ses charges de développement
25
. Pour la
mise en œuvre du prélèvement à la source, par exemple, plus de la moit
du coût d’investissement
correspondait à des prestations réalisées par des
agents de la DGFiP. S’agissant des effectifs, la DGFiP indique que le taux
d’externalisation a été significatif pour la maîtrise d’œuvre du volet
occupation (66 %), relativement moindre pour le volet foncier (26 %), et
qu’il a été globalement de 70
% jusqu’en juillet 2024, date à laquelle le
renforcement des équipes a permis de le réduire à 37,5 %. La DGFiP relève
pourtant elle-
même qu’un taux supérieur à 60
% est le reflet d’une
externalisation excessive.
La DGFiP a fait principalement appel à cinq prestataires pour
l’assistance à maîtrise d’ouvrage et à maîtrise d’œuvre
, pour un total de
24,4
M€.
Deux
d’entre eux
représentent trois-quarts du coût total de
l’externalisation.
Le r
ecours massif à l’externalisation et le sous
-dimensionnement
concomitant des équipes SI internes à la DGFiP
, dans le contexte d’une
25
Selon la Cour, en 2019, 80 % des charges de développements étaient internalisées
(Cour des comptes,
Les systèmes d’information de la DGFiP et
de la DGDDI, Investir
davantage, gérer autrement
, avril 2019).
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1929
gouvernance et d’un pilotage perfectibles, peuvent expliquer à la fois la
dérive budgétaire et les difficultés de mise en pr
oduction de l’outil
.
C -
Une absence de bilan ou de chiffrage du coût total
du projet, pourtant supérieur à 50
M€
La DGFiP a proposé la sortie de GMBI du périmètre des « grands
projets numériques de l’
État », effective depuis novembre 2023. Du point
de vue de
l’administration fiscale, «
le projet rentre désormais dans une
phase de maintenance visant à tenir compte de retours des agents et des
usagers
». Or, à cette date, une partie des modifications des applicatifs sont
encore
en cours de développement, tandis que l’applicatif
Iliad
gérant les
contentieux de l’occupation n’a pas été décommissionné
26
.
L
’administration
a publié un chiffrage à 35,7 M
€. Or, l’outil de suivi
des coûts, appelé Mareva
27
, du mois de mai 2024 fait état d’u
n coût complet
de 37,2
M€, soit 1,
5
M€ de plus.
Tableau n° 2 :
coût de GMBI d’après la
Mareva de mai 2024
(en M€)
Année
2018
2019
2020
2021
2022
2023
2024
Total
Coût
1,29
2,29
3,54
5,18
8,02
8,75
8,17
37,2
Source
: Cour des comptes d’après documents DGFiP
Cette hausse résulte principalement
d’une augmentation des
dépenses de personnel, qui ont été sous-estimées au démarrage du projet.
Alors que la Mareva de 2019 prévoyait la mobilisation de 44,7 ETP
jusqu’en 2022, la dernière
Mareva transmise à la Cour, datée de mai 2024,
montre un quasi-triplement de ce chiffre (120,2 ETP
comme l’indique le
graphique suivant). Par ailleurs, et dans une moindre mesure, les ETP
mobilisés pour les années déjà écoulées
ont fait l’objet de légères
réestimations à la baisse
a posteriori
. Ces fluctuations illustrent la difficulté
de de la DGFiP à évaluer les moyens nécessaires pour mener à bien ce
projet informatique ambitieux.
26
La reprise par GMBI du contentieux est même reportée à 2026-2027.
27
«
Méthode d’analyse et de remontée de la valeur
»
: il s’agit d’une méthode
interministérielle d’analyse de la valeur des projets SI de l’
État.
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COUR DES COMPTES
30
Graphique n° 2 :
ETP mobilisés pour GMBI selon les Mareva
Source : Cour des comptes
Contrairement à ce qui avait été indiqué à la Dinum le 27 octobre 2022,
les blocs « gestion du contentieux » et « impositions correctives » ne sont pas
intégrés dans le périmètre initial du projet. Il convient donc de les ajouter pour
disposer d’
une estimation du coût de GMBI plus proche de la réalité. De plus,
le montant évalué par la DGFiP dans s
a demande d’octobre 2023 sollicitant la
sortie de GMBI du périmètre des «
grands projets de l’État
» ne saurait être
définitif, le projet étant encore en cours de développement. Un bilan complet
devrait
selon
la
Cour
être
réalisé
par
la
DGFiP
à
l’issue
du
décommissionnement des anciens applicatifs que remplace GMBI.
Pour apprécier le coût direct
28
réel de GMBI, toutes catégories de
dépenses comprises, il convient également de prendre en compte les
mesure
s d’urgence
visant à remédier aux difficultés rencontrées au cours
de la campagne déclarative 2023, dont le coût
s’élève à
19,2 M€
(cf.
infra
partie 2), ce qui porte le total à au moins 56,4
M€.
Ce coût est presque cinq
fois supérieur au coût initialement estimé.
28
Coût lié au développement du projet, dépenses d’investissement et de fonctionnement
confondues, y compris mesures directement liées au projet comme les actions répondant
à la mise en production du produit non-finalisé.
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UNE NOUVELLE OFFRE DE SERVICE AUX USAGERS
MAL PRÉPARÉE ET AU COÛT NON MAITRISÉ
1931
Graphique n° 3 :
coût direct de GMBI (en M€)
Source : Cour des comptes
Une collaboration plus étroite de la DGFiP avec la Dinum aurait
sans doute permis d’
éviter une telle dérive budgétaire.
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COUR DES COMPTES
32
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
GMBI s
inscrit dans un contexte complexe, caractérisé par un
objectif de modernisation des obligations déclaratives, le transfert de la
liquidation des taxes d’urbanisme à la DGFiP, la suppression de la taxe
d’habitation
sur les résidences principales et la nécessité de procéder à
une ré
vision des valeurs locatives des locaux d’habitation
. Le projet a
souffert d’u
ne gouvernance dispersée et
d’
un pilotage défaillant, à quoi
s’ajoute un taux d’externalisation des prestations de développement
exceptionnellement élevé. Les prestations externalisées,
d’un montant de
25 M€
, représentent en effet les deux tiers du coût du projet à date
(37,2
M€).
Une collaboration rapprochée avec la Dinum, une meilleure
maîtrise de la gestion de projet et
la désignation d’
une direction de projet
de plein exercice auraient permis de mener le projet à son terme tout en
évaluant mieux les coûts dès le démarrage mais aussi
d’éviter
les grandes
difficultés rencontrées par les agents de la DGFiP comme par les usagers
lors de la première campagne déclarative de 2023.
Dans ces conditions, la Cour formule les recommandations
suivantes :
1.
désigner un directeur de projet transverse et de plein exercice rattaché
au directeur général pour la conduite de projets informatiques à fort
enjeux technique, juridique, administratif et financier (ministre chargé
du budget et des comptes publics, 2025) ;
2.
fournir à la direction interministérielle du numérique, pour le
développement de tout système d’information d’envergure, l’ensemble
des informations nécessaires et chercher à résoudre les points
d’attention qu’elle soulève (
ministre chargé du budget et des comptes
publics, 2025).
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Chapitre II
Une campagne 2023 chaotique
et aux conséquences financières
très
lourdes pour l’
État
La campagne 2023 s’est
très mal déroulée et la prise de conscience
des difficultés a été tardive. Elle a conduit à un afflux de demandes dans
les derniers jours de juin et les premiers jours de juillet 2023. Face à cette
situation de crise, la réaction de la DGFiP a été coûteuse, tant en raison des
mesures d
’urgence
adoptées
que du fait de l’absence de fiabilisation du rôle
d’imposition de la
taxe d’habitation.
Un
retour d’expérience sur ce
tte campagne a cependant été réalisé,
apportant rapidement des actions correctrices. Le nombre et le montant des
dégrèvements qui seront accordés au titre de 2024 permettront d’apprécier
leur efficacité.
À terme, GMBI devrait significativement contribuer à la
modernisation de l’administration fiscale, à condition de bien prendre en
compte l’enjeu de la relation avec l’usager qui est désormais au cœur du
dispositif de suivi foncier de la DGFiP.
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COUR DES COMPTES
34
I -
Une campagne d
éclarative 2023 qui n’a pas
permis de fiabiliser les données nécessaires
à l’établissement du rôle des taxes
Alors que l’ouverture de GMBI s’était plutôt déroulée de façon
satisfaisante en 2021, des difficultés majeures sont apparues tardivement,
au printemps 2023, ce qui a conduit à un décalage de quelques semaines
des obligations de déclaration. L’administration a
, un temps, envisagé le
report de GMBI et a finalement fait le choix de procéder au recouvrement
des taxes d’habitation sur les résidences
secondaires et sur les logements
vacants sur la base de données
qu’elle savait
incomplètes.
A -
Une réussite du lancement en 2021
qui ne laissait pas présager les difficultés futures
Malgré les difficultés induites par les évolutions du périmètre du
projet (cf.
supra
), le lancement du service à l’été 2021 se déroule de façon
satisfaisante du point de vue de la DGFiP. Les questions des usagers
correspondent à ce qui avait été anticipé, notamment sur la description des
biens, et les services les traitent rapidement. Quant aux formations des
agents, les comptes-rendus des sessions organisées en 2021 font état
d’évaluations positives
.
B -
Une campagne 2023 chaotique qui a conduit
à des reports successifs
À compter de la fin 2022, la situation se détériore. Le déploiement
des formations est compliqué par l’absence de base école
29
et reste très
inégal d
’un
département
à l’autre
. Les applicatifs sont ouverts au public en
novembre 2022 puis en janvier 2023 ; des dysfonctionnements majeurs
apparaissent et les résultats des audits sur l’accessibilité ne sont pas
satisfaisants. La DGFiP explique ces résultats par le calendrier contraint
des travaux au moment du lancement.
Ce n’est réellement qu’en avril
2023
que l’administration dispose d’indicateurs fiables sur la campagne et
29
La base école décrit l’application test qui permet aux équipes de procéder à des
exercices pratiques avant déploiement de l
’outil. En l’absence d’une telle base, le taux
de satisfaction des agents qui ont suivi les stages en présentiel s’est dégradé.
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UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE ET AUX CONSÉQUENCES
FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
35
constate que la progression des déclarations est très lente, en particulier
s’agissant des multi
-propriétaires (possédant plus de deux cents locaux),
que les indicateurs de satisfac
tion sur l’application restent négatifs
30
, que
la campagne entraîne un afflux de sollicitations auprès des services des
impôts qu
’ils
ne parviennent pas à traiter, avec des taux de réponse
dégradés à partir de mai 2023
31
. Ces constats ont été également soulignés
par les représentants du personnel
32
.
Tableau n° 3 :
calendrier de la campagne déclarative 2023
Campagne
de communication
Communiqué de presse
23 janvier 2023
Mass mail envoyé à l’ensemble
des propriétaires
23 février-
16 mars 2023
Mass mail de relance aux personnes
qui n’avaient pas rempli leur
obligations déclaratives
26 mai – 1
er
juin
Envoi de correspondances aux publics
éloignés du numérique
12-16 juin 2023
Envoi d’un mass mail de relance
aux particuliers multi-propriétaires
et aux personnes morales
17 juillet
et 24 juillet
Reports de la date butoir
de déclaration
Première échéance annoncée
pour l’obligation déclarative
30 juin 2023
Deuxième date retenue du fait
du nombre insuffisant de déclarations
1
er
août 2023
Troisième date, du fait d’une attaque
informatique le 31 juillet 2023
10 août 2023
Gestion de crise
Taskforce d’accompagnement
des multi-propriétaires
17 août 2023
Recrutement de contractuels
en renfort
Septembre-
octobre 2023
Mise en place de la «
prime GMBI
»
Décembre 2023
Source : Cour des comptes
30
À
environ 4/10 pendant l’ensemble de la campagne.
31
Le taux de réponse passe sous les 75 % en mai : au 22 mai, il est de 73 % pour les
particuliers et 69 % pour les professionnels ; au 19 juin, il reste de 73 % pour les
particuliers et se dégrade à 63 % pour les professionnels. Il se redresse en juillet : 76 %
pour les particuliers et 66 % pour les professionnels au 17 juillet.
32
Gérer mes biens immobiliers (GMBI) ou Grand Machin Bien Identifié
, Solidaires
Finances publiques, 13 mars 2023 ;
GMBI ou le Gérer Moi-Même le Bazar des Impôts
!,
CGT Finances publiques, juillet 2023.
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COUR DES COMPTES
36
La situation devient critique à partir de la mi-juin,
avec l’envoi d’un
second courriel de masse et d
’un
courrier aux publics éloignés du
numérique, envois qui entrainent en retour un engorgement des services
d’accueil, notamment
physiques. Dans le même temps, le nombre de
locaux déclarés restait très faible : seuls 47,64 % des locaux avaient été
déclarés le 19 juin, à 10 jours de la fin théorique de la campagne. Le 23 juin,
l’intersyndicale s’est alarmée des conditions très diffic
iles dans lesquelles
s’est déroulée la campagne
.
Cette situation conduit la DGFiP à reporter l’échéance de
déclaration. En parallèle, les DDFiP sont autorisées à recruter des
vacataires, puis des contractuels, pour faire face aux flux de demandes.
À partir de mi-juillet, une action spécifique est mise en place à destination
des multipropriétaires : courriel
de relance, mise en place d’une assistance
spécifique et création à la mi-
août d’une
équipe au niveau de
l
’administration
centrale pour fiabiliser les données de cette catégorie de
propriétaires.
Au final, l
a campagne déclarative 2023 s’est très mal déroulée et n’a
pas répondu aux objectifs attendus au regard des reports successifs de la
date limite de déclaration, du faible taux de déclaration notamment chez
les multi- propriétaires, et de
l’émission automatique d’avis de taxation
erronés
33
.
C -
Un rôle établi alors que l’administration ne
disposait de données que sur 75 % des locaux en France
Au 14 septembre 2023, date de l’établissement du rôle,
seuls 73,1 %
des propriétaires avaient rempli leur obligation déclarative, soit
18,1 millions sur une population totale de 24,8 millions de propriétaires.
Sur les 3 397 multi-propriétaires, 2 192, soit 64,3
% d’entre eux, avaient
déclaré le statut d’occupa
tion de leurs biens.
De nombreux multi-propriétaires publics (collectivités territoriales,
bailleurs sociaux, investisseurs institutionnels propriétaires de logements
intermédiaires, etc.) ont été défaillants
du fait notamment d’une
connaissance imparfaite
de leur parc immobilier ou d’informations en
décalage par rapport aux données cadastrales, ce qui a conduit la DGFiP à
engager une action ciblée vers ces acteurs.
33
1/7 selon la DGFiP soit de l’ordre de 15
%.
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UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE ET AUX CONSÉQUENCES
FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
37
Schéma n° 1 :
propriétaires déclarants
à l’issue de la campagne 2023 (en millions)
Source : Cour des comptes
La proportion de locaux déclarés
est comparable à l’échelle de
l’ensemble des propriétaires
:
le statut d’occupation
de 54,1 millions de
locaux parmi les 71,4 millions en France a été renseigné. Toutefois, la
statistique est plus dégradée pour les multi propriétaires : seuls 46,4 % des
locaux leur appartenant
34
ont été déclarés dans GMBI, ce qui signifie que
les personnes (principalement morales) possédant les plus grands parcs de
logements n’ont pas pu ou voulu remplir cette obligation déclarative.
En
d’autres termes, plus d’un tiers des locaux non
-déclarés dans GMBI
appartiennent à des multi-propriétaires
35
.
34
5,9 M de locaux sur 12,6 M de locaux appartenant à des multi-propriétaires.
35
6,8 M sur 17,3 M de locaux non-déclarés.
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COUR DES COMPTES
38
Schéma n° 2 :
locaux déclarés
à l’issue de la campagne 2023 (en millions)
Source : Cour des comptes
II -
Une mauvaise anticipation des réactions
des usagers qui a entraîné une saturation
du dispositif d’accueil
Depuis plusieurs années, la DGFiP veille particulièrement à mettre les
usagers au cœur de ses transformations et
à créer une relation de confiance
avec les usagers. Or, les usagers semblent
a posteriori
les grands oubliés du
projet GMBI. La DGFiP a visiblement sous-
estimé l’incompréhension
engendrée par cette campagne, alors que les pouvoirs publics avaient
largement communiqué sur la suppression de la taxe d’habitation. Par ailleurs,
elle n’a pas assez ten
u compte de plusieurs cas spécifiques.
A -
Une campagne mal expliquée aux assujettis
En 2021, des actions de communication ont été déployées par
l’administration
36
. En 2022, une communication sur GMBI a été réalisée
36
Ces actions ont été menées en septembre 2021. Elles ont consisté en : un
référencement de mots clés et l’achat d’espaces dans la pre
sse généraliste et
spécialisée ; une vidéo de présentation et des messages sur les réseaux sociaux ; un
communiqué de presse, une bannière relative au service ainsi que des vidéos publiées
sur le site impots.gouv.fr. Une communication en anglais, à destination notamment des
usagers non-résidents, a été mise à disposition sur la page internationale du site
impots.gouv.fr (le service est entièrement traduit en anglais).
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UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE ET AUX CONSÉQUENCES
FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
39
à l’occasion de la campagne des avis de taxes
foncière et d’habitation. Ces
communications insistaient davantage sur la mise à disposition de
nouvelles informations que sur la future obligation déclarative. Elles ont
conduit à encourager un nombre élevé de connexions (15 millions) avant
le 18 janvier
2023 et donné lieu à 439 106 demandes d’information.
En 2023, la communication a évolué
37
pour se centrer sur
l’obligation déclarative, en mentionnant l’amende qui serait imposée en cas
de défaillance. Après un communiqué de presse le 23 janvier, un premier
envoi massif de courriers électroniques à destination des propriétaires a été
envoyé du 23 février au 16 mars. La promotion de GMBI a également été
faite dans le cadre de la campagne de déclaration des revenus et un nouveau
courriel de masse envoyé à par
tir du 26 mai aux personnes qui n’avaient
pas encore rempli leurs obligations déclaratives.
Cette campagne s’est
toutefois
heurtée à l’incompréhension des
assujettis, dans un contexte marqué par la suppression de la taxe
d’habitation
rendant donc plus difficile la compréhension de la nouvelle
obligation de déclaration
. La finalité de la campagne n’a en effet pas été
suffisamment expliquée et comprise. Les nombreuses interrogations des
contribuables ont été également suscitées
par la crainte de l’augmentatio
n
future des impôts, ainsi que par le risque de devoir supporter une amende
de 150 € s’ils ne procédaient pas à leur déclaration de biens immobiliers ou
encore si les informations communiquées comportaient des omissions ou
des inexactitudes. Cette sanction prévue au code général des impôts
38
a rendu la campagne anxiogène malgré les actions de pédagogie et de
bienveillance déployées par l’administration, s’agissant de cette nouvelle
obligation.
Surtout, la plupart des échanges initiés par les usagers via la
messagerie sécurisée du site impots.gouv.fr (e-contacts) ont concerné le
descriptif des locaux, souvent incompris (prise en compte de la surface au
sol et non de la surface Carrez, prise en compte de certains aménagements
contigus aux maisons, etc.) voire erroné (aménagements anciens non
déclarés). La DGFiP reconnait, en effet, une fiabilisation insuffisante des
bases en amont. Au total, plus de 1,6 million de e-contacts ont concerné ce
37
Les actions de communication consistaient notamment en la création et l’alimentation
d’u
ne page sur le site impots.gouv.fr
; l’achat d’espaces dans la presse généraliste et
spécialisée, ainsi que des échanges bilatéraux avec les grands opérateurs privés et
publics.
38
Article 1770 terdecies du CGI.
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COUR DES COMPTES
40
thème en 2023
39
. La campagne menée en 2021-
2022 n’avait permis de
traiter que 22
% de ces demandes et n’a donc,
a posteriori
, pas atteint ses
objectifs.
Tableau n° 4 :
catégorisation des e-contacts GMBI
40
2021
2022
2023
J’ai une question sur le service «
biens immobiliers » sur
Descriptif
d’un bien immobilier
109 126
329 980
1 564 887
Déclaration
foncière et de taxe
d’urbanisme
275 202
Déclaration
d’occupation
et de loyer
d’un bien immobilier
992 516
Total
109 126
329 980
2 832 605
Source : DGFiP
B -
Le choix inadéquat
d’une procédure entièrement
dématérialisée reposant sur un outil informatique
non mature
Les usagers éloignés des outils numériques sont, en proportion, plus
nombreux parmi les propriétaires. En effet, les propriétaires occupants sont
généralement plus âgés que les locataires (l’occupant principal est en
moyenne âgé de 60 ans lorsque le ménage est propriétaire, contre 48 ans
lorsqu’il
est locataire). Or, alors que le taux de l’illectronisme est très faible
chez les moins de 59 ans (moins de 6%), il atteint 24,2 % chez les 60-74 ans
et 61,9 % chez les 75 ans ou plus. Les syndicats avaient alerté à de
nombreuses reprises sur cette difficulté en amont, sans que ces alertes
n’aient été prises en compte par la DGFiP.
Deux décisions ont eu une incidence particulièrement importante sur
ces usagers. L’administration fiscale a, tout d’abord, fait le choix d’une
déclaration entièrement élec
tronique. Elle a en effet considéré qu’une
39
Ce nombre est probablement sous-estimé, de nombreux services ayant indiqué que
les usagers avaient parfois mal catégorisé leurs demandes.
40
55 % des demandes portent sur le descriptif des locaux, 10 % sur les déclarations
foncières et TU, 35
% sur l’occupation des locaux.
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UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE ET AUX CONSÉQUENCES
FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
41
déclaration effectuée massivement au format papier risquait de se traduire
par d’importantes saisies manuelles d’informations
de la part de ses agents.
Moyennant quoi, les services ont été confrontés à un très grand nombre de
contacts téléphoniques et physiques, notamment à l’été 2023 (cf.
supra
).
Face à cet afflux, certaines directions départementales ont pris la décision
de créer un formulaire papier
ad hoc
, en dépit des instructions données par
l’administration
centrale. Cette situation a entraîné des difficultés dans
l’accompagnement
des usagers : appel des centres de contact pour obtenir
une aide à remplir des formulaires qui n’étaient pas normés, usagers venant
déposer dans un département des formulaires récupérés dans un autre
département, etc. Au final, la DGFiP a pris la décision tardive de rétablir
un formulaire simplifié CERFA en avril 2024. S’il est vrai que la
proportion d’usagers remplissant le formulaire
a été faible en 2024
41
, dans
la mesure notamment où le stock a été peu ou prou fiabilisé, cette décision
illustre la nécessité
de mieux prendre en compte l’éloignement entre une
proportion non négligeable des usagers et les outils numériques et de
prévoir un support papier pour de telles déclarations.
Su
rtout, afin de réduire les coûts d’affranchissement
42
, la DGFiP a
fait le choix de ne pas adresser de courriers papier aux usagers en février
2023. Des correspondances n’ont été envoyées aux usagers éloignés
des
outils numériques que du 12 au 16 juin 2023, soit à quelques jours de la
date limite de déclaration (30 juin). Comme le reconnait la DGFiP, cette
décision, motivée par des raisons budgétaires, a finalement été
contreproductive puisqu’elle a entrainé un engorgement des services
sollicités par les usagers fin juin - début juillet et au final à des surcoûts en
ressources humaines.
A minima
, la DGFiP aurait pu envoyer dès février un
courrier papier aux usagers qui remplissaient leurs déclarations de revenu
dans ce format.
Enfin, alors même que le choix av
ait été fait d’une procédure
entièrement dématérialisée, le service en ligne était encore très perfectible
lors de la campagne de 2023. À son ouverture et à des moments critiques
de la campagne, il a connu des indisponibilités et des dysfonctionnements,
notamment le 7 juin, puis à nouveau du 7 au 13 juillet, et enfin le 31 juillet.
Par ailleurs, l’absence d’un accusé
de réception après validation a conduit
de nombreux usagers à déposer une nouvelle déclaration, inquiets de ne
pas avoir reçu de confirmation. Enfin, le vocabulaire technique utilisé
n’était pas
nécessairement adapté ni aisément compréhensible pour une
partie des usagers.
41
La DGFiP indique que seuls 100 000 formulaires ont été reçus en 2024.
42
La réduction des coûts d’affranchissement induite par GMBI est estimée à 2M€
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COUR DES COMPTES
42
C -
Une mauvaise prise en compte des cas spécifiques
Les propriétaires de plus de 200 biens
43
devaient réaliser une
déclaration
via
un mode opératoire spécifique par dépôt de fichier. Cette
modalité déclarative a rencontré de nombreuses difficultés. Elle a été
ouverte le 10 février, mais les rapports d’intégration des dépôts des fichiers,
qui permettaient de s’assurer que le fichier
était complet et que les données
pouvaient être exploitées, n’ont été disponibles qu’en juillet, à quelques
jours de l’expiration du deuxième délai de déclaration. Les services métier
avaient pourtant alertés, à plusieurs reprises, sur le caractère critique de ce
palier de déploiement de GMBI à l’occasion des comités de pilotage. Ces
rapports ont montré que les fichiers étaient souvent rejetés, en raison de
leur complexité ainsi que de règles de gestion restrictives qui conduisaient
au rejet total du fichie
r dès qu’une ligne était en erreur. Or, la nécessité de
renseigner la date et le lieu de naissance des occupants
indispensable à
l’administration pour pouvoir les identifier
- a constitué une importante
difficulté pour les multi-propriétaires. Au 30 juin 2023, seuls 21,4 %
d’entre eux avaient rempli leurs obligations déclaratives. Une équipe a
donc été mise en place pour les accompagner.
Par ailleurs, les situations complexes (SCI immobilières, résidences
étudiantes, propriétaires de locaux professionnels soumis à la TH, nue-
propriété, viager) rendaient les déclarations très difficiles. La création
d’espaces professionnels pour les SCI et la nécessité qu’y soit inclus le
module GMBI ont notamment été sources de difficultés.
De même, la communication à destination des non-résidents a été
insuffisante. Si la nécessité de traduire le module en anglais avait bien été
prise en compte dès le début du projet, la nécessité d’une communication
adaptée vers ce public n’avait pas été intégrée. Par ailleurs, la plupar
t des
non-
résidents ne disposaient pas d’espace particulier. Ils devaient donc
compléter un formulaire et joindre des justificatifs. Le processus s’est
révélé complexe et long en raison de la barrière de la langue pour certains
d’entre eux et de l’absence d’une communication adaptée.
43
3 397 personnes physiques ou morales, en 2023.
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UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE ET AUX CONSÉQUENCES
FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
43
D -
Une saturation du dispositif
d’accompagnement et d’assistance
Les difficultés rencontrées pendant la campagne ont entraîné une
augmentation significative des sollicitations, à l’échelle de l’ensemble des
services :
-
lors
de la campagne de déclaration de l’occupation, plus de
2,8 millions de contacts via le site
impots.gouv.fr
, avec un taux de
réponse dégradé (88
%) aux questions portant sur le descriptif d’un
bien immobilier ;
-
après l’envoi des avis d’imposition au titre
des
taxes d’habitation sur
les résidences secondaires et sur les logements vacants et de la taxe
sur les logements vacants, une augmentation de 44 % des e-contacts
relatifs à des demandes d’information et
réclamations : 1,5 million
d’e
-contacts en 2023 contre 1,05 million
d’e
-contacts en moyenne en
2021 et 2022 ;
-
une augmentation de 37 % des appels au numéro national
(0809 407 401) imputable à 80 % à la campagne GMBI et à une
indisponibilité pendant plusieurs jours de e-contact ;
-
enfin, dans le cadre de l’observatoire interne des flux d’accueil, les 24
services des impôts des particuliers du panel ont recensé environ 8 %
de démarches « physiques
» d’usagers liées à GMBI en 2023.
Plusieurs témoignages recueillis ont mentionné un afflux d’usagers
entre la mi-juin et la mi-
juillet dans les services d’accueil, notamment
d’usagers peu habituels pour ces services (personnes très âgées
notamment).
Face à cet afflux de sollicitations, les services se sont retrouvés
saturés, notamment en juin-
juillet 2023, d’autant qu
e le déploiement de
GMBI intervenait simultanément avec la campagne de déclarations de
revenus des personnes physiques (IRPP). Par ailleurs, les agents avaient
été insuffisamment formés, la formation ayant été beaucoup trop théorique
(absence de base école notamment). Enfin, les dysfonctionnements des
outils informatiques ont entravé le travail des services au quotidien.
Des agents supplémentaires (vacataires, contractuels) ont donc été
recrutés pour gérer cet afflux de sollicitations et réduire le stock de
demandes non traités. Les centres de contact ont notamment été mobilisés
pour répondre aux contacts via le site impots.gouv.fr non traités.
Cependant, face à l’importance du stock, certains départements ont fait le
choix, à l’issue de la campagne, de cl
ore les demandes sans les avoir
traitées. Cette solution a in fine été généralisée au niveau national. Le
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COUR DES COMPTES
44
22 mai 2024, un message automatique a ainsi été envoyé en réponse aux
54 224 demandes qui avaient été transmises
jusqu’au 31 octobre 2023
inclus, et qui
n’avaient donné lieu à aucune réponse ou demande
complémentaire par les services fonciers à l’encontre de l’usager
destinataire. Des mesures correctives dont le bilan devra aboutir à une forte
diminution des erreurs de taxation
La DGFiP a réagi rapidement lorsqu’elle s’est retrouvée dans une
situation critique à l’été 2023 pour disposer d’informations suffisantes pour
pouvoir établir un rôle (cf.
supra
). Elle a également organisé des retours
d’expérience et défini un ambitieux plan d’action pour 2024 dès le
7
décembre 2023. Mis en œuvre en début d’année 2024, il a été présenté
au réseau à plusieurs reprises. Il concerne à la fois les agents de la DGFiP
et les utilisateurs.
Le plan d’action 2024 du volet occupation des locaux dans
GMBI
Le plan d’action mis en place en 2024 contient, pour le volet
occupation des locaux, 5 axes différents :
-
préparer la campagne déclarative : fiabiliser le périmètre des biens des
propriétaires dans le référentiel des locaux et procéder à des actions de
communications et de relance ciblées,
-
améliorer les parcours déclaratifs : traiter différemment les parcours des
petits et des multi-propriétaires,
-
aménager
l’environnement
applicatif
:
adapter
les
modules
de
consultation et de pilotage des applicatifs, aménager les chaines de
taxation et améliorer le traitement des contentieux et impositions
correctives,
-
formation assistance et accompagnement
: adapter l’offre de formation et
la documentation pour rendre un meilleur service à l’usager,
-
suivi juridique, axes de contrôle et échanges de données : faire évoluer le
cadre normatif, procéder aux opérations de contrôle et valoriser les
échanges de données avec les tiers habilités (collectivités locales, Insee,
DGALN).
Source : DGFiP
Les agents ont bénéficié de nouveaux outils pour faciliter leur
travail : une base de formation a été réalisée sur le volet foncier ; le
parcours usagers leur est accessible pour mieux intégrer leur démarche ; de
nouvelles fonctionnalités des applicatifs leur sont offertes : des modules
sont améliorés afin de leur permettre de disposer d’une meilleure
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FINANCIÈRES TRÈS LOU
RDES POUR L’ÉTAT
45
information sur l’occupation des locaux et le volet foncier. Les agents
souhaitaient surtout pouvoir bénéficier rapidement de la fonctionnalité
cobrowse
44
qui
leur permet d’avoir accès en temps réel à l’écran des
usagers. Son déploiement prévu initialement au premier semestre 2024, ne
sera pourtant opérationnel que pour la prochaine campagne.
Ce plan d’action prévoit également de nombreuses mesures au
bénéfice des usagers :
-
la distinction entre le parcours des petits et des multi-propriétaires est
clairement identifiée ;
-
pour les petits propriétaires, un formulaire CERFA sera disponible.
Un accusé de réception fera suite à une déclaration en format PDF.
Une clarification sera opérée entre « résidence secondaire » et « local
vacant » ;
-
pour les multi-propriétaires, le fichier les concernant sera simplifié ;
ils disposeront «
d’un bac à sable
» pour tester leurs fichiers en avance
de phase de déclaration ;
-
le cas p
articulier des syndics de copropriété fera l’objet d’une
communication et de relances ciblées au regard des cas identifiés ;
-
l’assistance aux usagers sera renforcée avec un corpus documentaire
plus complet comprenant des tutoriels vidéo et des fiches pratiques. Il
en sera de même pour les professionnels.
Les usagers bénéficieront ainsi d’une meilleure lisibilité dans leurs
démarches avec la mise à disposition d’un compte rendu de déclaration
d’occupation, un accompagnement tout au long de leur parcours.
Plu
sieurs mesures ont également été prises afin d’inciter les
propriétaires à accomplir leurs démarches GMBI :
-
un courrier papier a été envoyé aux multipropriétaires comme aux
nouveaux acquéreurs d’un bien immobilier
;
-
un rappel automatique a été ajouté dans le parcours déclaratif de
l’impôt sur le revenu. Cette insistance sur la déclaration du domicile
principal à l’occasion de la déclaration de revenus ainsi que sur la
nécessaire validation de l’occupation des biens
via
GMBI doit
permettre d’éviter les erreu
rs de taxation constatées en 2023.
44
Application de co-navigation pour accompagner les usagers dans leur démarche
fiscale.
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COUR DES COMPTES
46
Au total, selon la DGFiP, la campagne 2024 se déroule dans de
meilleures conditions, ce que confirment les organisations de représentants
du personnel. Le bilan quantitatif et qualitatif qui en sera fait à l’issue sera
l’occasion de mesurer l’efficience des axes d’amélioration mis en œuvre.
Déjà, le nombre de e-contacts a été notablement réduit, avec plus de
217 000 sollicitations contre 1,6 million pour la campagne précédente.
Pour les multi-propriétaires, la campagne déclarative 2024 a permis, selon
la DGFiP, de récolter le statut d’occupation de 78
% de leurs biens. Au
total, au 17 septembre 2024, 86,5
% des locaux avaient fait l’objet d’une
déclaration depuis le 1
er
janvier 2023.
III -
Des conséquences financières très lourdes
pour l’
État
Les difficultés rencontrées lors de la campagne 2023 ont d’abord
conduit à mettre en place des mesures d’accompagnement en termes de
ressources humaines, au
coût non négligeable. Surtout, l’établissement du
rôle de la taxation sur la base de données incomplètes a conduit à un
montant très élevé de dégrèvements
à la charge de l’
État, pour un montant
supérieur à 1,3 Md€. Ce sont autant de recettes
indues qui ont été versées
aux collectivités territoriales
alors qu’elles résultaient d’erre
urs de
liquidation,
et dont l’
État a
in fine
supporté le remboursement aux
contribuables.
A -
Un coût élevé des mesures d’urgence
Cette situation a conduit à la mise en place de mesures d’urgence,
coûteuses pour l’administration
(plus de 20 millions d’euros)
:
-
la mise en place d’une
équipe spécifique
, armée par l’administration
centrale, pour accompagner à compter de la mi-août 2023 les multi-
propriétaires. Cette «
task force
» a mobilisé un total de 21 rédacteurs
dans 9 bureaux du service de la gestion fiscale du 17 août au
8 septembre ;
-
le recrutement de 127 contractuels en renfort des directions régionales
et départementales des finances publiques (DRDFiP) au titre de la
campagne GMBI à l’automne
2023
, pour des périodes d’une année,
durée qui peut sembler lon
gue par rapport au besoin d’autant que
les
demandes
via
le site
impots.gouv.fr
ont été automatiquement closes en
mai 2024. Ces recrutements ont coûté 3,9
M€
;
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47
-
des dotations exceptionnelles en crédits d’auxiliaires à hauteur de
6,3
M€
,
octroyées en trois vagues aux DRDFiP durant l’année 2023,
pour des durées plus courtes, de l’ordre de quelques semaines, et un
total de 197,6 ETP ;
-
l’allocation d’une prime de 500 € bruts à 18
085 agents, soit 19 % de
l’ensemble de
s agents de la DGFiP, sur la paie de décembre 2023 pour
«
reconnaître le professionnalisme et l’engagement des agents
mobilisés et impliqués dans la gestion, le conseil et l’accueil des
usagers concernés
». Le coût de cette prime, de 9
M€, représente plus
de 46 % des dépenses inh
érentes aux mesures d’urgence.
S’agissant de l’attribution de cette prime, la Cour souligne que les
fonctions de «
gestion, conseil et accueil des usagers
» constituent en
principe
le cœur de métier de l’immense majorité des agents mobilisés. Par
ailleurs,
pour certaines catégories d’agents, les heures supplémentaires
permettent déjà de rémunérer un surcroît de travail.
L’ensemble de ces mesures a conduit l’administration à engager des
dépenses supplémentaires non anticipées et qui auraient pu être évitées en
2023, pour un montant estimé à plus de 19,2
M€, s’ajoutant aux 37,2
M€
de coûts de développement directs du projet (montant lui-même trois fois
supérieur aux prévisions initiales, pour toutes les raisons exposées en
partie 1) (cf. chapitre I).
Tableau n° 5 :
coût
des mesures d’urgence mises en place
pour la campagne 2023
Mesure d’urgence
Coût (M€)
Taskforce d’accompagnement des multi
-propriétaires
Non connu
Recrutement de 127 contractuels
3,9
Dotations exceptionnelles crédits d’auxiliaires octroyées
en trois va
gues aux DRDFIP durant l’année 2023 (197,6 ETP)
6,3
Prime « GMBI
» de 500€ bruts pour 18 085 agents
(paie de décembre 2023)
9,0
Total
19,2
Source : Cour des comptes
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COUR DES COMPTES
48
B -
Une série d’erreurs de liquidation qui entraine
une perte de plus d’1,3
Md€ pour l’
État
Les difficultés rencontrées lors du déploiement de GMBI ont
entraîné plusieurs types d’erreur
s
de liquidation, notamment s’agissant de
la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. La plus médiatisée a été
la taxation d’enfants mineurs à la taxe d’h
abitation sur les résidences
secondaires. Mais ce cas est relativement marginal (16 500 avis émis à tort
pour un montant de 15 M€) et a donné lieu à un dégrèvement d’office. En
revanche, les défaillances et erreurs déclaratives des bailleurs et des
locataires ont eu un impact significatif pour le budget de
l’
État. Il est estimé
au 4 octobre 2024 à 1 307 M€, dont 995 M€ pour la seule taxe d’habitation
sur les résidences secondaires.
Tableau n° 6 :
dégrèvements accordés au titre de la campagne 2023
(au 4 octobre 2024)
Nombre
de contentieux
Montants dégrévés (€)
Taxe d’habitation sur
les résidences secondaires
906 202
995 141 282
Taxe d’habitation sur
les logements vacants
94 887
58 697 112
Taxe sur les logements vacants
226 011
252 882 285
Total
1 227 100
1 306 720 676
Source : DGFiP
Ce montant d’1,3
Md€ représente 34
% du produit des trois taxes en
2023.
D’après la DGFiP, cette erreur massive est principalement due à la
mauvaise prise en compte des déménagements de locataires lors du
croisement entre les données issues de la déclaration des revenus et celles
de GMBI :
-
L
’adresse déclarée sur la déclaration des revenus permet de déterminer
l’adresse du domicile principal. Lorsqu’un locataire ne déclare pas son
changement d’adresse à l’occasion de sa
déclaration de revenus,
l’administration considère que son nouveau logement –
déclaré par
son propriétaire
est une résidence secondaire et le taxe comme tel.
Cette erreur rencontrée en 2023 a conduit l’administration fiscale
à insister sur les déclaratio
ns de changement d’adresse dans la
campagne de déclarations de revenus 2024.
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RDES POUR L’ÉTAT
49
-
L
es locataires qui avaient déclaré leur changement d’adresse dans le
cadre de leur déclaration de revenu ont également pu se retrouver
assujettis à tort à la
taxe d’habitation sur
les résidences secondaires si
le propriétaire n’avait pas effectué sa déclaration d’occupation.
L’administration a alors considéré que l’ancien logement était une
résidence secondaire et l’a taxé
comme telle.
Ces anomalies potentielles avaient pourtant été identifiées pendant la
campagne par la DGFiP. Ainsi, lors du comité de pilotage du 25 juillet 2023, le
risque de voir un occupant taxé à tort avait ainsi été évalué comme majeur. Pour
réduire ce risque, la DGFiP prévoyait des tests sur le processus de taxation. Fin
septembre 2023, à l’issue de ces tests, ces difficultés demeur
aient un point
majeur de préoccupation. Cependant, d’après la DGFiP, aucune «
remédiation
» n’était «
techniquement envisageable
» à cette date du fait de la
«
nature industrielle des processus de taxation techniques mis en œuvre.
» Des
alternatives (principalement le report de la taxation et la reprise des données de
la taxation 2022) avaient toutefois été expertisées au cours de l’été 2023.
Cependant, toutes comportaient selon la DGFiP «
des risques majeurs
»
45
, ce
qui
l’
a conduite à les écarter.
Les ministres concernés ont été tenus informés des difficultés
rencontrées. En effet, ils ont été destinataire de trois notes en date du 26 juin, du
28 septembre et du 6 octobre 2023. Elles mentionnent bien les difficultés liées
à l’incomplétude des déclarations d’occupation, ainsi que le risque important
que des contribuables soient taxés à tort. La DGFiP aurait néanmoins utilement
pu alerter les ministres sur
l’ampleur des dégrèvements pouvant résulter des
dysfonctionnements constatés, et en conséquence du risque budgétaire pour
l’État
. Par ailleurs, les ministres
n’ont pas
formellement validé la mise en
recouvrement, malgré les incertitudes entourant la constitution des rôles, alors
qu’un report avait été envisagé par la DGFiP
.
Si la DGFiP n’a pas su corriger cette erreur de liquidation avant
l’émission des avis d’imposition
et le reversement des recettes de taxe
d’habitation aux collectivités en décembre 2023
, elle a néanmoins fourni
des données partiellement ajustées aux collectivités pour les bases
prévisionnelles d’imposition de la taxe d’habitation sur les résidences
secondaires
pour l’année 2024
; les bases prévisionnelles notifiées en mars
2024 tiennent en effet
compte des dégrèvements opérés jusqu’au début de
l’année 2024.
45
Risque « de calendrier » en cas de report, de faisabilité technique et de
solidité juridique concernant la reprise de la taxation 2022 en ignorant les
déclarations d’occupation de la campagne 2023.
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50
En application de l’article 1641 du code général des impôts, l’État prend
à sa charge les frais de dégrèvement et de non-
valeurs de la taxe d’habitation
46
.
En contrepartie, il perçoit 2 % du montant de cette taxe
47
. Dans un contexte de
forte diminution des recettes de taxe d’habitation, les dégrèvements supportés
par l’
État représentent en 2023 près de dix fois cette somme.
Tableau n° 7 :
évolution des dégrèvements sur la taxe d’habitation
(en Md€)
2021
2022
2023
Recettes taxe d’habitation
8,9
6,2
3,6
Dégrèvements
0,8
0,7
0,7
%
9 %
11 %
19 %
Source
: Cour des comptes, d’après les notes d’analyse de l’exécution budgétaire
De la même façon, les erreurs de déclaration entrainent un taux de
dégrèvement très important sur la taxe sur les locaux vacants. GMBI n’a
pas permis d’améliorer la situation et l’a même nettement détériorée en
2023, le taux de dégrèvement atteignant 64 %.
Tableau n° 8 :
évolution des dégrèvements sur la taxe sur les locaux
vacants (en
M€)
48
2022
2023
Recettes taxe sur les locaux vacants
200,5
346,9
Dégrèvements
78
222
%
39 %
64 %
Source
: Cour des comptes, d’après la DGFiP
Dans ce contexte, il importe désormais que la DGFiP fiabilise
durablement
le recouvrement de la taxe d’habitation et de la taxe sur les
locaux vacants pour revenir à des taux de dégrèvement nettement
46
À
l’exception des dégrèvements de la majoration de la taxe d’habitation pour les
résidences secondaires résultant de l’application du II de l’art. 1407 ter du code général
des impôts.
47
L’
État perçoit en outre 1
% du montant de la taxe d’habitation pour les
frais d’assiette
et de recouvrement.
48
Situation au 26 avril 2024.
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51
moindres. Le taux de dégrèvement des impôts locaux pourrait utilement
intégrer la matrice de performance de la mission « Remboursements et
dégrèvements » dont la Cour a recommandé la modernisation afin de tenir
compte notamment de la suppression de la taxe d’habitation sur les
résidences principales
49
.
Par ailleurs, l’économie actuelle du dispositif n’incite pas les
collectivités publiques à remplir leurs obligations déclaratives au titre de
GMBI. Cette défaillance des collectivités, notamment s’agissant des
bailleurs sociaux, peut conduire à des erreurs de recouvrement de la
taxe
d’habitation sur les résidences secondaires
du fait de la mauvaise prise
en compte des déménagements de locataires. Or, la charge de ces
dégrèvements repose toujours,
in fine
, sur l’
État. La DGFiP a donc engagé
une réflexion pour modifier le code général des impôts afin que les
dégrèvements ne soient pas pri
s en charge par l’
État lorsque les
collectivités n’ont pas respecté leurs obligations déclaratives.
49
Cour des comptes, Analyse de l’exécution budgétaire 2023 de la mission
« remboursements et dégrèvements », avril 2024, recommandation n°3 (reconduite).
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COUR DES COMPTES
52
___________ CONCLUSION ET RECOMMANDATION __________
La campagne déclarative 2023 s’est déroulée dans des conditions
très difficiles. Elle s’est heurtée à l’incompréhension des
usagers alors
qu’était supprimée la taxe d’habitation. De nombreuses situations
spécifiques avaient de surcroit étaient mal anticipés. Enfin, le choix d’une
procédure entièrement dématérialisée, pour une obligation qui touchait
une
population
proportionnellement
plus
éloignée
des
outils
informatiques, s’est révélé particulièrement préjudiciable.
Ces difficultés ont entraîné
des reports successifs de l’échéance de
déclaration décidés dans l’urgence à l’été 2023. La DGFiP a également
été contrainte de mettre
en place des mesures d’urgence coûteuses
et
contestables : recrutement en grand nombre de vacataires et de
contractuels,
versement d’une prime à de nombreux agents de la DGFiP.
L’ensemble de ces mesures a représenté un coût de
20
M€.
Ces reports et ces mesures d’urgence n’ont cependant pas été
suffisants pour permettre à l’administration fiscale de disposer d’un état
des lieux complet de l’occupation des locaux en France, enjeu central de
GMBI. De ce fait, les rôles de taxe d’habitatio
n et de logements vacants
comprenaient de nombreuses erreurs, dues principalement à une mauvaise
prise en compte des déménagements et emménagements des locataires. La
DGFiP aurait utilement pu alerter les ministres sur l’ampleur des
dégrèvements pouvant résulter des dysfonctionnements constatés et du
risque budgétaire pour l’État
. Ces erreurs se sont en effet traduites
in fine
par une perte considérable
de plus d’1,
3
Md€ pour l’
État, qui représente
34
% du produit des trois taxes concernées au titre de 2023.
Si l’administration a pris conscience tardivement des difficultés
liées au déploiement de GMBI, elle a organisé un retour d’expérience dès
le mois d’octobre 2023 et mis en place un plan de remédiation. D’après la
DGFiP, ce plan aurait permis à la campagne 2024 de se dérouler dans de
meilleures conditions.
Dans ces conditions, la Cour formule la recommandation suivante :
3.
Engager les actions nécessaires à la diminution du taux de
dégrèvement et faire du taux de dégrèvement des impôts locaux un
indicateur de la mission « Remboursements et dégrèvements »
(
ministre chargé du budget et des comptes publics, 2025).
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Chapitre III
Des données de GMBI
à sécuriser et à fiabiliser au profit
de politiques publiques du logement
GMBI a pour objet non seulement de moderniser la DGFiP dans la
gestion de certains impôts mais également
d’
améliorer la collecte et
l’actualisation des données liées au logement
, indispensable à la mise en
œuvre d’un certain nombre de politiques publiques
.
Toutefois,
cet objectif n’est qu’imparfaiteme
nt atteint. Pour être
pleinement opérationnel, il est indispensable que GMBI garantisse la
fiabilisation et la qualité de ces données, mais aussi que la DGFiP en
renforce la protection, compte tenu de leur caractère sensible. Ces actions
pourraient également permettre de dessiner des perspectives ambitieuses
d’utilisation pour les contrôles fiscaux ou les politiques publiques liées au
logement.
I -
Des données GMBI au caractère sensible
nécessitant une protection renforcée
L’application GMBI
vise à recueillir et utiliser des données
personnelles sensibles. Pourtant, la mise aux normes tant en termes de
sécurité informatique que de conformité au RGPD a été tardive.
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COUR DES COMPTES
54
A -
Des audits de sécurité réalisés tardivement,
des standards de sécurité non atteints
Les trois projets informatiques qui constituent GMBI
50
ont fait
l’objet d’audits de sécurité et d’homologations internes par les services
informatiques de la DGFiP. Conformément au référentiel général de
sécurité
51
,
il s’agit d’
instaurer la confiance numérique dans les échanges
électroniques en prenant toutes les mesures nécessaires à la sécurisation
des
systèmes
d’information
avec
notamment
une
identification
électronique et une signature électronique sécurisées, la confidentialité des
données et la sécurisation des infrastructures domiciliant les données
sensibles.
Les audits internes de sécurité, réalisés tardivement, ont mis en
exergue des fragilités. La mise en production hâtive de GMBI a par ailleurs
généré des problèmes en production sur la qualité des données et les
correctifs applicatifs ont été appliqués avec retard. L
’audition d’agents
d’assistance téléphonique
52
aux usagers a fait remonter de nombreux
problèmes de performance et de disponibilité de l’outil GMBI.
Ces dysfonctionnements ont donné lieu de la part des usagers à de
nombreuses plaintes auprès de la CNIL pour non-respect du règlement
général sur la protection des données (RGPD).
B -
Une conformité au RGPD à marche forcée
Au regard de sa finalité, GMBI traite un nombre important de
données sensibles, concernant plus de 34 millions de propriétaires, dont
15 millions de propriétaires bailleurs particuliers. Ces données sont
couvertes par le secret fiscal et entrent
dans le champ d’application
de la
loi dite « Informatique et Libertés »
53
et du règlement général sur la
protection des données (RGPD)
54
, qui renforce les obligations de
50
TELEFON, GESLOC et le volet occupation avec GestODL et R-ODL, cf. partie 1.
51
Référentiel issu de
l’ordonnance n°
2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux
échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les
autorités administratives.
52
Le centre de contacts de Rouen de la DGFiP a été audité.
53
Loi n° 78-
17 du 16 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés
.
54
Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016
relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces données.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
55
transparence des traitements et de respect des droits des personnes en
affirmant une logique de responsabilisation des acteurs de traitement des
données. En tant que
responsable de traitement, la DGFIP a l’obligation de
démontrer, en cas de contrôle de la CNIL, sa conformité au RGPD et les
protections particulières mises en place pour ces données sensibles
55
. C’est
pourquoi
la DGFIP s’est organisée pour se
conformer aux obligations
du RGPD.
Cette organisation a cependant été tardive et, au 30 octobre 2024,
les textes relatifs aux finalités des traitements de données personnelles dans
le cadre de GMBI n’ont toujours pas été publiés.
La DGFiP doit être plus
attentive au respect de la protection des données au regard de la nature
confidentielle et sensible des informations traitées et au périmètre évolutif
des fonctionnalités de GMBI. Elle doit faciliter
également l’accès des
usagers aux informations relatives à leurs droits en matière de protection
des données personnelles, notamment en termes de visibilité des
coordonnées du délégué à la protection des données sur le site des impôts.
La DGFiP indique avoir pris les mesures nécessaires visant à répondre à
l’ense
mble de ces attentes en ayant soumis le 15 octobre 2024, à la
signature du gouvernement, le décret destiné à répondre aux demandes de
la CNIL en matière de protection des données.
II -
Une modernisation en devenir
de l’administration fiscale
Les questions liées à la sécurisation des données et les difficultés
rencontrées lors de la campagne 2023, bien qu’extrêmement coûteuses,
ne doivent pas masquer l’apport de GMBI à la modernisation de
l’administration fiscale.
À cet égard, la montée en puissance progressive
d
u traitement des taxes d’urbanisme est encourageante.
55
Outre la désignation du délégué à la protection des données (DPD), un ensemble de
documents doit être élaboré et tenu à jour. Cette documentation concerne le traitement
des données personnelles, l’information des personnes et les contrats définissant les
rôles et responsabilités des acteurs.
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56
A -
Une montée en puissance progressive
s’agissant des taxes d’urbanisme
Alors que ce volet a été intégré plus tardivement au projet GMBI
56
et qu’il était considéré comme déterminant sur le projet et son cal
endrier,
son déploiement ne présente pas
jusqu’à présent –
de difficultés majeures.
Le transfert de la liquidation des taxes d’urbanisme du ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires
57
à la DGFiP est
effectif depuis le 1
er
septembre 2022. Le stock des autorisations
d'urbanisme dont la demande a été déposée avant le 1
er
septembre 2022
reste de la compétence des directions départementales des territoires (et
de la mer) jusqu’au 1
er
janvier 2025 et selon le calendrier ancien de
liquidation, soit 12 et 24 mois après validation de l'autorisation.
La montée en charge des taxes d’urbanisme à la DGFiP est très
progressive. En effet, les autorisations d’urbanisme gérées par la DGFiP
sont celles dont la demande a été déposée après le 1
er
septembre 2022. Ces
demandes doivent ensuite être instruites et validées et les locaux construits.
Ce n’est qu’à l’achèvement de la construction, dans un délai de 90 jours,
que le propriétaire doit déposer sa déclaration.
L’obligation de déclarations en matière de taxes d’urbanisme a, en
effet, été alignée avec l’obligation de déclarations foncières, dans les 90
jours de l’achèvement de la construction. Cette mesure est source de
simplification pour les contribuables et permet à la DGFiP de proposer un
parcours cohérent de déclaration aux nouveaux propriétaires. Cependant,
s’agissant des collectivités territoriales, ce décalage de la date d’exigibilité
est susceptible d’induire un retard dans la perception des recettes de taxes
d’urbanisme, notamment lors de
la bascule entre les deux systèmes. Cela a
conduit le gouvernement à prévoir des acomptes de 50% et de 35% de la
taxe due pour les constructions supérieures à 5 000 mètres carrés.
En 2023, seuls 1 576 dossiers de liquidation de taxe d’urbanisme ont
été réalisés par la DGFiP. Cependant, le niveau global des prises en charge
des taxes d’urbanisme en 2023 n’a pas diminué
: au global, DGFiP et
directions départementales des territoires (et de la mer) confondues, il est
constaté en 2023 un niveau de prise en charge qui augmente de 3,4 % par
rapport à 2022 et de 9,6 % par rapport à 2021. Il semble donc que la montée
56
Le transfert de la gestion des taxes d’urbanisme à la DGFiP a été évoqué pour la
première fois en comité de pilotage en juin 2020, au sortir de la première période de
confinement. Elle a été validée en RIM le 1
er
juillet 2020.
57
Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
57
en charge de la liquidation de la taxe d’urbanisme par la DGFiP se déroule
sans encombre.
Par ailleurs, cette montée en puissance progressive a permis à la
DGFiP d’améliorer les outils informatiques, et notamment le parcours
déclaratif.
S’agissant enfin du transfert d’agents provenant du ministère de la
transition écologique et de la cohésion des territoires vers les services
fonciers de la DGFiP, il est encore incomplet. 290 ETP étaient en effet
prévus pour accompagner la nouvelle mission dévolue à la DGFiP. Trois
vagues ont été organisées pour ce recrutement, sur la base du volontariat.
En tout, 107 des 290 postes soit 37 % des effectifs ont été pourvus par des
agents du ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires
(MTECT), le reste étant, d’après la DGFiP, assumé par des
agents de la direction générale
via
des recrutements
ad hoc
.
Tableau n° 9 :
transfert d’agents du MTECT
vers les services fonciers de la DGFiP
Date prévue d’arrivée
Postes ouverts
Postes pourvus par des agents
du MTECT
1
er
septembre 2022
16
15
58
1
er
septembre 2023
159
66
59
1
er
septembre 2024
115
26
Total
290
107
Source : Cour des comptes
, d’après données DGFiP
B -
Une automatisation source de gains substantiels,
notamment en ETP
GMBI a permis de basculer vers un processus informatisé et
automatisé pour lequel la télédéclaration par le propriétaire est centrale.
Les nombreuses difficultés rencontrées en 2023 tenaient à la nécessité de
mise à jour de la base de données initiale. En rythme de croisière, GMBI
58
16 chargés de mission à la préfiguration (catégorie B) ont rejoint les services de la
DGFiP ; 1 agent a été réintégré, suite à sa demande au MTECT.
59
76 agents du MTECT (agents de catégories B et C) ont rejoint les services de la
DGFiP ; 10 de ces agents ont à leur demande été ensuite réintégrés au MTECT.
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58
doit apporter des gains d’efficience très substantiels et permet de
moderniser la sphère foncière de l’administration fiscale (cf. partie 3).
Cette modernisation devait être source d’économies récurrentes et
substantielles. Le contrat de transformation conclu le 10 décembre 2018
entre la DGFiP et le secrétariat général des ministères économiques et
financiers d’une part, la direction du budget (DB) et la direction
interministérielle de la transformation publique (DITP) d’autre part
listait
les gains suivants :
-
abandon des déclarations papiers
coût d’édition de 90
000 €/an
et coût d’affranchissement de 1,1 M€/an
;
-
des gains de 100 ETP
60
, soit une économie de 3,8 M€ en 2022.
Ces gains ont été fortement réévalués à la hausse par la suite. Ainsi,
la Mareva de 2024 fait état de gains à hauteur de 600 ETP, à partir de 2025,
soit une économie de 33,1 M€. Au total, les gains attendus en 2025
s’élèvent à 36,2 M€. Ils devraient atteindre 40,5 M€ en 2033. De ce fait, la
DGFiP estime que le projet aura un impact positif cumulé à compter de
2025.
La prise en compte du coût direct révisé estimé par la Cour (cf. partie
1.3.3.) ne modifie pas cette conclusion. En effet, l’impact positif cumulé
estimé en 2025 est de 27 M€. En tenant compte des dépens
es induites par
les dépenses exceptionnelles de 2023 (19,2 M€), le projet devrait rester à
l’équilibre à compter de 2025. En revanche, la prise en compte du
dégrèvement exceptionnel et ponctuel de 1,3
M€ en 2024 (cf.
supra
) ne
permettrait pas au projet d’a
voir un impact positif cumulé avant 2033,
horizon de projection de la DGFiP sur ce projet
61
, même si les gains en
ETP sont structurels et produiront donc des effets à long terme.
Dès 2023, la DGFiP prévoyait la suppression de 112,5 ETP du fait
du déploiement de GMBI. Le recours au recrutement de 127 contractuels
et à des auxiliaires à hauteur de 197,6 ETP au cours de la même année
montre cependant que ces gains de productivité ont sans doute été trop
anticipés. Il illustre, par ailleurs, «
l’effet rebond
» s
ur les agents d’un
projet informatique mal maitrisé qui a entrainé une explosion des saisines
et des contentieux (cf.
supra
).
60
Automatisat
ion de l’envoi des courriers –
41 ETP ; saisie des déclarations
59 ETP.
61
A cette date, les pertes annuels cumulés seraient encore de 1 Md€.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
59
III -
Une fiabilisation et amélioration
de la qualité des données issues de GMBI
à poursuivre
L’outil GMBI doit également permettre de
recueillir les
informations relatives aux logements, à leurs caractéristiques et à leur statut
d’occupation en France. Toutefois, la fiabilité et la qualité de ces données
sont pour l’heure perfectibles.
A -
Une fiabilisation des bases inaboutie
Le projet GMBI vise notamment à fiabiliser les bases de la fiscalité
locale. Il s’agit d’une part de permettre la rectification, par les propriétaires,
des informations dont dispose déjà l’administration au titre du cadastre
;
d’autre part, de faciliter voire d’automatiser l’obtention et l’actualisation
de
certaines
informations
(occupation
des
locaux,
déclarations
d’achèvement de travaux, loyers perçus notamment).
1 -
Les améliorations d’informations pour la sphère foncière
S’agissant de l’obtention de nouvelles information
s, GMBI
représente une innovation majeure. Pour la partie occupation des locaux, le
répertoire R-ODL
(répertoire de l’occupation des locaux)
est renseigné
automatiquement, en temps réel, quand le propriétaire effectue la
déclaration sur le site des impôts.
Pour la partie foncière, le fonctionnement reposait auparavant
largement sur des tâches manuelles effectuées par les agents de la DGFiP.
L’autorisation de travaux obtenue par un propriétaire était transmise par la
mairie et les services déconcentrés de l’
État à la DDFiP, au sein de laquelle
un agent devait requérir auprès du propriétaire certaines informations,
comme la date d’achèvement des travaux
; après une relance, il pouvait
confirmer les travaux et entrer les informations concernées dans le
répertoire de la DGFiP. Ce processus fastidieux avait été récemment
amélioré, notamment
via
des contrôles internes plus poussés vérifiant par
exemple la régularité des relances
62
.
Avec GMBI, la procédure en ligne est à la fois plus simple pour les
usagers et moins chronophage pour
les agents de la DGFiP. L’ensemble est
62
Cour des comptes,
Les taxes foncières
, Observations définitives, janvier 2023.
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COUR DES COMPTES
60
largement automatisé
, notamment l’alimentation des flux entre
ministères,
les relances auprès des propriétaires et la transmission des données après
l’achèvement des travaux.
Les agents de la DGFiP peuvent encore
intervenir pour résoudre des anomalies dans les informations collectées
auprès des propriétaires, aider l’usager dans la déclaration des informations
sur GMBI ou renseigner manuellement les données en cas d’erreur.
Ce nouveau process a permis de résoudre une grande partie des
difficultés identifiées précédemment par la Cour
63
. Il a également contribué
à fiabiliser l
es données recueillies. Toutefois, le nombre d’anomalies dans
l’intégration des flux reste conséquent, évalué par la DGFiP à 20
% environ
(mais 26,5 % selon les partenaires sociaux
64
), nécessitant un appui manuel
de la part des agents. Il apparaît également que le contrôle informatique
entre la surface déclarée par le propriétaire et celle figurant dans
l’autorisation d’urbanisme n’es
t pas automatique, fragilisant les données
récoltées
65
. La DGFiP devra lever ces différentes difficultés pour permettre
à GMBI de devenir un puissant outil de fiabilisation automatique d’une
grande partie des données du cadastre.
2 -
Les obstacles à une fiabilisation complète
S’agissant de la fiabilisation
des informations, plusieurs difficultés
complémentaires peuvent être relevées.
Tout d’abord
, les catégories
utilisées par l’administration fiscale pour désigner les caractéristiques des
biens et leurs dépendances ne sont pas connues ni comprises par les
propriétaires (cf.
supra
, partie 2). De plus, la rectification des informations
repose sur le postulat de la coopération du propriétaire. Si ce principe est
pertinent pour une rectification en sa faveur, le con
tribuable n’a en
revanche aucun intérêt à procéder à une rectification conduisant à
augmenter le
montant de l’impôt dû. Constatant d’ailleurs lors de la
campagne 2023 que les propriétaires ne validaient pas leur déclaration
d’occupation au motif que les in
formations affichées étaient erronées, la
DGFiP a conduit un travail de communication pour les inciter à faire leur
déclaration même si les éléments du descriptif ne correspondaient pas.
L’incertitude sur les effets d’une telle rectification pouvant être u
n frein à
la pleine coopération du contribuable, il pourrait être utile de prévoir un
63
Cour des comptes,
La gestion de la fiscalité directe locale par la DGFiP
, janvier 2017.
64
Chiffre fourni par la CGT Finances publiques, dans une note rédigée à la suite d’une
audience du 14 mai 2024.
65
Ibid.
Le manque d’exhaustivité des données Sitadel est également relevé, mais il
s’agit d’une difficulté propre aux liaisons entre collectivités territoriales et ministère
chargé de l’écologie.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
61
outil simulant, pour le propriétaire, les effets d’une révision des données
cadastrales.
Interrogée par la Cour, la DGFiP a indiqué ne pas disposer des
moyens permettant
d’établir le nombre de propriétaires ayant rectifié les
informations disponibles de leur bien : seul le nombre des « e-contacts »
portant sur les questions relatives au descriptif du bien immobilier est
disponible, sans pouvoir faire le lien avec les demandes de rectification. La
DGFiP pourrait se doter des moyens de les suivre, afin de pouvoir mieux
apprécier l’efficacité de GMBI au regard de l’objectif de fiabilisation des
données cadastrales.
B -
Une qualité et une exhaustivité des données
à renforcer pour compenser la suppression de la taxe
d’habitation
sur les résidences principales
1 -
Une perte de données insuffisamment compensée par GMBI
La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales
a eu une incidence significative sur les données liées au logement.
L’existence de la taxe d’habitation
permettait à l’administration d’établir
le lien entre un local et le foyer fiscal auquel appartient son occupant. Le
fichier PLFC (Permanent Local Foncier Commun) comptabilisait ces liens
au 1
er
janvier de l’année, si bien que s’y trouvaient l’ensemble des foyers
reliés à un local soumis à la
taxe d’habitation
: le « foyer TH ». Le
« ménage fiscal
» était ensuite constitué par l’Insee par l’appariement du
fichier PLFC avec le fichier des déclarations de revenu, dit POTE. Si ce
dernier fichier, indépendant de la
taxe d’habitation
, existe toujours, le
PLFC a disparu avec la suppression de la taxe. De même, le fichier
d’imposition des personnes (FIP) connaît progressivement une diminution
de sa qualité, puisque disparaissent des données les foyers fiscaux qui
n’étaient redevables que de la taxe d’habitation
.
GMBI ne parvient pas à compenser
cette perte d’information. Il
n’est de fait plus possible pour l’administration de connaître précisément
la composition du foyer, étant donné que le renseignement de la seule
occupation est important pour le propriétaire, qui n’a pas à déclarer
l’ensemble des locataires, et à qui il a été d’ailleurs recommandé, au regard
des erreurs dues à la campagne 2023, de ne pas renseigner l’identité des
enfants, faisant auparavant partie des « rattachés TH ». En ce sens,
l’information récoltée par GMBI est moins riche
que celle obtenue
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62
précédemment
: ne sont pas identifiés d’une part les sous
-
locations, c’est
-
à-dire la situation de foyers fiscaux hébergés au sein du même local sans
être titulaires du bail, d’autre part les foyers de personnes qui cohabitent
mais qui représentent des foyers fiscaux séparés
66
. En conclusion, avec la
fin de la
taxe d’habitation
a disparu le lien entre le logement et l’occupant,
que GMBI ne peut à lui seul rétablir.
Si cette disparition n’a pas d’importance du point de vue de la
DGFiP, elle est en revanche problématique pour les services statistiques
publics, notamment l’Insee et le
service des données et des études
statistiques (SDES), complexifiant un certain nombre de leurs productions.
Pour les enquêtes de recensement par exemple, les données issues de la
taxe d’habitation
permettaient de contrôler l’information post
-collecte,
notamment en cas d’écart conséquent, pour obtenir avec le plus
d’exactitude possible les populations légales au niveau des communes. Les
principales bases de données localisées sont également pénalisées
67
,
notamment celles qui permettaient
d’optimiser le tirage des échantillons
d’enquêtes statistiques auprès des ménages.
66
Au cas des enfants majeurs s’ajoutent les conjoints non mariés et non pacsés, ou
encore les colocataires.
67
Il s’agit des fichiers Fidéli (Fich
ier démographique sur les logements et les individus),
Filocom (Fichier des logements communaux), et Filosofi (Fichier localisé social et
fiscal).
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
63
Schéma n° 3 :
le remplacement partiel et indirect des données issues
de la TH par GMBI
Source : Cour des comptes
Au-delà des aspects statistiques, la suppression de la taxe
d’habitation sur les résidences principales
a complexifié la bonne mise en
œuvre de plusieurs politiques publiques. Pour le chèque énergie, la
Cour
68
avait déjà alerté sur l’impact potentiellement dommageable de la perte
d’information liée à la suppression de la taxe d’habitation
. En effet, la
remise du chèque énergie dépend de l’établissement du «
foyer TH », à
partir duquel la DGFiP produit le fichier des potentiels bénéficiaires en
fonction du revenu fiscal de référence par unité de consommation des
foyers, et le transmet au ministère chargé de l’environnement. Dès lors, le
choix a été fait à partir de 2023 d’adosser le chèque énergie sur le «
foyer
fiscal
» au sens de l’
impôt sur le revenu, et de reconduire les bénéficiaires
de 2023
69
(hors décédés) pour 2024. Bien que ce critère ne soit pas
totalement adapté à une aide au logement, il a été retenu faute d’options
alternatives plus adaptées. Toutefois
, l’administration avait sensibilisé les
autorités politiques sur les effets de bord potentiels, estimés à 2,4 millions
de ménages percevant le chèque sans respecter les critères, et un coût
68
Cour des comptes,
Le chèque énergie
, Communication à la commission des finances,
de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, février 2022.
69
5 612 099 ménages en 2023 et 5 507 440 en 2024 ;
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64
budgétaire d’environ 350 M€. La DGFiP n’a pour l’heure pas été en
mesure
de fournir l’estimation actualisée du coût budgétaire des erreurs
d’attribution pour 2024. Seule une enveloppe de 75 M€ a été mise en place
pour répondre cette année aux demandes des foyers primo-éligibles. Les
frais de gestion liés aux nouvelles m
odalités d’attribution du chèque
énergie sont estimés à près de 3 M€.
Par ailleurs, l’arrêté du 12 juin 2024 qui précise désormais les
modalités de demande du chèque énergie 2024 à la suite de la suppression
de la taxe d’habitation sur les résidences princ
ipales en 2023, complexifie
les démarches des bénéficiaires. Ces derniers n’ont, en outre, pas toujours
conscience qu’ils sont éligibles à cette aide.
S’agissant de la politique de mixité sociale dans les logements,
l’application de la loi du 13 décembre 2
000 relative à la solidarité et au
renouvellement urbains (dite « loi SRU
») a été altérée par l’absence de
données fiables pour l’année 2023. En effet, aux termes de l’article 55
70
de
cette loi, le nombre minimal de logements sociaux dont doivent disposer
certaines communes est proportionnel à leur parc de résidences principales.
Or, du fait des erreurs et absences
de déclaration, l’administration a décidé
de ne retenir que les données relatives à l’année 2022, entraînant pour
certaines communes des pénalit
és qu’elles contestent devant la juridiction
administrative
71
.
Enfin, le dispositif permettant le dégrèvement ou l’exonération de
taxe foncière pour les propriétaires de condition modeste, appelé « ECF »
(personnes dites « EConomiquement Faibles ») nécessite de disposer de la
liste des personnes concernées selon
: l’occupation du bien
; les revenus ;
le droit sur le bien
; l’âge
; le bénéfice éventuel d’une aide ou allocation.
En l’absence du fichier TH permettant d’établir cette liste, la DGFiP étudie
la mi
se en place d’une solution
reposant sur le recensement des
propriétaires occupants dans
le répertoire de l’occupation des locaux
(R-ODL)
, la récupération des données fiscales, le critère d’âge, et
l’obtention des listes des bénéficiaires d’allocation par l
es caisses.
Toutefois, cette solution n’était pas prête pour la taxe foncière de 2024
alors que la DGFiP était sensibilisée au problème depuis au moins 2021.
Une solution transitoire a été mise en place par « vieillissement » de la
population déjà bénéficiaire du dispositif. De ce fait, de nouvelles
70
Les dispositions de cet article visent à rééquilibrer l’offre de logement social et
abordable sur l’ensemble du territoire en favorisant une répartition équilibrée du parc
social.
71
Ainsi la commune de Saint-Cloud, contestant le nombre de résidences principales
retenues pour le calcul de la proportion de logements sociaux au titre de l’année 2023,
a déposé un recours auprès du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
65
personnes qui y avaient pourtant droit
n’ont pas pu être exonérées de la
taxe foncière. Comme le précise la DGFiP, elles peuvent formuler une
réclamation contentieuse.
2 -
Une reconstitution du lien « logement-occupant »
qui dépend de la qualité des données GMBI
Au regard des conséquences de la réforme de la fiscalité locale pour
la statistique publique, la DGFiP a veillé à associer le plus tôt possible les
administrations concernées. Avec l’Insee,
les contacts ont été nombreux et
satisfaisants, à raison de deux à trois réunions par an à partir de janvier
2020, et de deux expressions de besoin (avril 2020 et septembre 2021) ; il
en va de même pour le service statistique du ministère chargé du logement.
Avec les directions opérationnelles du ministère chargé du logement, la
coopération a été plus lacunaire en 2021 et 2022, avant que le travail sur
les données liées au logement ne fasse l’objet d’échanges plus réguliers à
partir de 2023, notamment avec le Centre d'études et d'expertise sur les
risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).
Pour compenser la perte d’information liée à la suppression de la
taxe d’habitation sur les résidences principales
et pour faciliter
l’appariement entre sources concernant les individus ou ménages et les
logements, l’Insee a lancé le projet de «
Répertoire statistique des individus
et des logements », appelé Résil. Il doit notamment permettre de fiabiliser
les enquêtes de recensement
72
, mais aussi de constituer des bases de
sondage pour les enquêtes auprès des ménages et de rendre plus homogènes
et comparables les statistiques démographiques et sociales.
Le programme « Résil
» consiste en l’établissement, à partir de
sources diverses concernant soit les individus, soit les logements, de deux
répertoires (Individus et Logements), permettant de reconstituer le lien
« logement-occupant »
73
qui avait disparu avec la fin de la
taxe d’habitation
sur les résidences principales et de donner une photographie annuelle de ce
lien. Concrètement, trois services doivent être mis en place : un service
d’accueil des sources administratives
; une production d’univers de
référence (l’établissement du lien «
logement-occupant » mais également
la liste des personnes présentes sur le territoire national au 1
er
janvier, ainsi
que la liste des logements habitables et leur statut d’occupation)
; une
72
L’Insee estime la population des communes de plus de 10
000 habitants sur la base
de 40 % des logements (8 % des logements sur cinq ans).
73
Ce lien permet de reconstituer des ménages, préalable à la construction de données
sur le niveau de vie.
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COUR DES COMPTES
66
production de fichiers enrichis par appariement (bases de sondage
notamment). Après la phase de conception (
2021), d’ingénierie statistique
et technique (2022-
2024) et d’initialisation du répertoire (2024), la mise en
œuvre de Résil est prévue en 2025 pour une première photographie obtenue
au cours de l’année 2026. Les données fournies par GMBI, en combinaison
notamment avec les données des revenus autres que les salaires et des
allocataires des caisses d’allocations familiales, le fichier d’imposition des
personnes et le répertoire des locaux, sont centrales pour la réussite de ce
projet, comme représenté dans le schéma suivant.
Schéma n° 4 :
le rôle central de GMBI pour la création
d’un lien logement
-occupant
Source : Cour des comptes
Or, les données issues de la première campagne GMBI, en raison des
difficultés rencontrées par la DGFiP, sont de qualité médiocre et parcellaires.
Seuls 55 % des individus y sont déclarés, et 69 %
des locaux d’habitation y
sont recensés, principalement du fait de l’absence de renseignement
suffisamment complet pour la catégorie des « multi-propriétaires », cette
proportion n’étant que de 47
% pour les logements sociaux. En conséquence,
9,8 millions d’individus sont non localisés au sein d’un logement, soit plus du
double par rapport à 2023 (4,7 millions d’individus).
De ce fait,
plusieurs fichiers statistiques n’ont pas pu être établis par
les services statistiques publics en 2023-
2024. Pour l’année 2023, c’est le
cas du fichier des logements communaux (Filocom) pour le service des
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
67
données et des études statistiques (SDES) et du fichier démographique sur
les logements et les individus (Fidéli)
pour l’Insee,
rendant impossible
l’étude des mobilités résidentielles pour les années 2022, 2023 et 2024.
S’agissant du fichier
localisé social et fiscal (Filosofi), il doit, pour produire
les données relatives aux revenus et à la pauvreté à un niveau géographique
fin
74
, reprendre le millésime de 2021.
Par ailleurs, la transmission par la DGFiP des fichiers obtenus ne
s’accompagne pas des informations techniques et méthodologiques des
traitements opérés dont auraient besoin les services statistiques.
L’utilisation des variables, l’existence de contrôles sur la vraisemblance
des réponses, les principes d’appariement des fichiers GMBI avec les
autres répertoires, des locaux par exemples, sont des informations qui
faciliteraient la compréhension des données, mais également leur
utilisation statistique
, comme l’indique notamment l’Insee. La Cour
recommande à la DGFiP de les fournir à l’Insee et aux services statistiques
publics comme le SDES.
D’autres administrations
que celles déjà concernées souhaiteraient
avoir accès aux données de GMBI. Cette démarche nécessiterait toutefois
de modifier les règles relatives à cette transmission et de définir « un cadre
d’accès adapté
» à ces informations.
IV -
Un potentiel en matière statistique
et d’appui aux politiques publiques
encore sous-exploité
Les perspectives ouvertes par GMBI sont nombreuses.
D’un point
de vue statistique, GMBI peut permettre d’améliorer significativement la
connaissance des logements et les politiques qui en découlent. En effet, le
projet de « Référentiel inter-administratif des locaux », porté par le
ministère chargé de l’environnement, l’Insee et la DGFiP, pourra une fois
mis en place faciliter l’appariement entre les données issues
de GBMI
et les autres sources de données, permettant ainsi, pour les politiques
publiques liées à la lutte contre la vacance des logements, l’augmentation
des
locations
saisonnières
ou
d’amélioration
des
performances
74
En revanche, les données au niveau national peuvent être produites car elles
s’appuient sur d’au
tres sources que GMBI.
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68
énergétiques du bâti
75
, de mieux connaître le parc et de mieux évaluer
l’efficacité des dispositifs mis en place. Cette mise à disposition d’un
référentiel pour d’autres acteurs de la sphère publique,
via
des interfaces
de programmation d’applications
(API) sécurisées permettant à différents
services de connecter leurs données, nécessite toutefois que les difficultés
techniques ou de fiabilisation des données sources cadastrales, foncières
ou d’occupation des locaux soient résolues. Elle est également
conditionnée par une stratégie interministérielle de gestion des API et de
priorisation des chantiers qui fait actuellement défaut
76
. Enfin, au regard de
leur grande sensibilité, le partage des données ne peut se faire que de
manière générique et non-identifiantes pour les contribuables.
Du point de vue fiscal, le croisement des données peut permettre de
faciliter les missions de la DGFiP. S’agissant par exemple de l’impôt sur la
fortune immobilière (IFI), la fiabilisation des données cadastrales pourrait
conduire à mieux identifier la valeur des biens et à améliorer la programmation
des contrôles fiscaux
; la DGFiP n’a toutefois pas encore étudié la question. De
même, le ministre chargé des finances indiquait en 2020 que GMBI pourrait
être «
mis à profit pour lutter contre la fraude
»
77
, mais les avancées sont pour
l’instant limitées. Pour l’application des
aides personnelles au logement, la
CNAF avait fait connaitre dès juin 2021 son intérêt pour les données de GMBI,
de façon à pouvoir identifier les personnes ne prétendant pas aux aides
personnelles au logement
alors qu’elles y ont droit
. L
a Cour n’a
toutefois pas
constaté d
’avancée
significative des travaux entre la CNAF et la DGFiP, ce qui
est d’autant plus regrettable qu’un tel échange pourrait avoir une utilité
également dans la détection des fraudes aux aides sociales
78
. C
e sujet n’a pas
pu aboutir et est inscrit
au sein de la convention d’objectifs et de gestion de la
CNAF pour 2023-2027.
L’outil GMBI représente également un potentiel élevé dans la politique
de lutte contre la vacance des logements. Les données déclaratives peuvent en
effet alimenter à la fois le fichier LOVAC sur les logements vacants, préparé
par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité
75
Par exemple en prévoyant une obligation effective du renseignement de l’identifiant
fiscal du local pour l’établissement du diagnostic de performance énergétique.
76
La Dinum ne fournit que des recommandations à destination des administrations, et
sa « feuille de route » de mars 2023 rappelle simplement le rôle de la direction dans
l’institutionnalisation des API.
77
Réponse du ministre chargé des finances au chapitre « Les aides personnelles au
logement
: des évolutions insuffisantes, une réforme à mettre en œuvre
» du rapport
public annuel de 2020.
78
La Cour avait déjà mentionné cette piste dans son rapport sur
Les aides personnelles
au logement
de septembre 2015.
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DES DONNÉES DE GMBI À SÉCURISER ET À FIABILISER AU PROFIT
DE POLITIQUES PUBLIQUES DU LOGEMENT
69
et l'aménagement (Cerema), ainsi que des outils visant à remettre sur le marché
locatif ces locaux, comme « Zéro logements vacants
» (start up d’
État).
Toutefois, ces perspectives dépendent largement de la qualité des données, qui
n’est pas encore assurée
: la
direction de l’habitat, de l'urbanisme et des
paysages (DHUP) a ainsi noté dans les premières données GMBI une
augmentation de la vacance des logements de 12 %, entre 2022 et 2023.
S’agissant de l
a révision des valeurs locatives cadastrales, plusieurs fois
reportée malgré la nécessité d’y parvenir
79
, l’utilisation des informations
collectées dans GMBI apparaît pour l’heure prématurée. Le renseignement par
les propriétaires bailleurs du loyer perçu permettrait des analyses sur
l’évolution des loyers à un niveau géographique fin et sur un rythme court, au
moins annuel. L’utilité de disposer des données relatives aux loyers pourrait
constituer également des informations utiles en matière de plafonnement des
loyers ou, pour le SDES, d’établissement du compte satellite du logement avec
un chiffrage plus précis des loyers imputés. Sans conduire à supprimer les
collectes trimestrielles menées par l’Insee, cette perspective pourrait également
alléger certaine
s collectes de données qu’il réalise
80
. Ce renseignement est
toutefois facultatif
81
, contrairement à ce qui avait été envisagé initialement et
à ce que laissait entendre en juillet 2022, la réponse des ministres chargés de
l’économie et des finances au référ
é de la Cour relatif à la production et
l’utilisation des données des logements. S’il devait être r
endu obligatoire, il
n’est pas certain qu’il conduise à une qualité optimale des données, les
indications sur les montants sollicités étant pour l’heure parc
ellaires. À ce titre,
l’objectif
de GMBI visant à fiabiliser les bases de la fiscalité directe locale
n’est
pas rempli à court et moyen terme. La Cour rappelle l’importance de ce
chantier majeur et invite la DGFiP à s’assurer d’ores et déjà d’un
fonctionne
ment optimal, y compris en termes de compréhension par l’usager,
de la rubrique renseignant le loyer pour les propriétaires bailleurs, dans
l’optique d’une future obligation et des finalités recherchées.
Enfin, l’administration fiscale n’a pas envisagé la possibilité d’une
réintroduction de la taxe d’habitation sur les résidences principales si une
décision politique devait par hypothèse être adoptée un jour en ce sens. Une
telle perspective,
a minima
pour étudier la configuration de GMBI qui en
découlerait
, pourrait faire l’objet d’une réflexion voire d’un groupe de
travail au sein de la DGFiP.
79
Cf. notamment Conseil des prélèvements obligatoires,
Pour une fiscalité du logement
plus cohérente
, décembre 2023.
80
Notamment l’enquête Loyers et charges, et les enquêtes auprès des bailleurs sociaux.
81
Caractère facultatif a
u titre de la campagne 2023 et 2024. Il n’est ainsi pas bloquant
de laisser vide sur GMBI l’espace réservé au loyer (décision de la DGFiP d’août 2022).
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70
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Malgré une mise en production en deçà des standards de sécurité
informatique et une protection des données personnelles à améliorer,
GMBI permet d’automatiser l’obtention et la vérification de données,
notamment pour la sphère foncière. Il ne permet toutefois pas de pallier le
manque d’information qui résulte de la suppression de la taxe d’habitation
sur les résidences principales, fragilisant plusieurs politiques publiques et
la production de données statistiques. Les programmes mis en place pour
répondre à ces difficultés nécessitent la collaboration étroite de la DGFiP.
Sur le moyen terme, GMBI a permis de basculer vers un processus
informatisé et automatisé, où la télédéclaration par le propriétaire est
centrale. En rythme de croisière, cet outil qui reste à parfaire doit apporter
des gains d’efficacité très substantiels et permettre de moderniser la sphère
foncière de l’administrati
on fiscale, mais également les politiques
publiques liées au logement.
Dans ces conditions, la Cour formule les recommandations
suivantes :
4.
suivre le nombre de rectifications des données du cadastre issues de
la coopération des propriétaires (ministre chargé du budget et des
comptes publics, 2025) ;
5.
fournir aux services statistiques publics qui en ont besoin les
informations permettant de mieux appréhender la qualité des données
issues de GMBI (ministre chargé du budget et des comptes publics,
2025) ;
6.
organiser dès 2025 la collecte des données relatives aux loyers en
prévision de la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux
d’habitation
(ministre chargé du budget et des comptes publics, 2025).
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Conclusion générale
Développée et déployée dans un calendrier contraint, l’application
GMBI offre sur moyen et long terme des possibilités nouvelles en matière
de modernisation de l’administration fiscale
. Elle doit permettre
d’améliorer le dialogue avec les usagers sur la consistance et l’occupation
de leurs biens immobiliers, mais aussi de mieux utiliser les données du
logement, au service des missions connexes de la DGFiP comme des
différents volets de la politique du logement. Ces objectifs ont été en partie
atteints : les contribuables ont désormais accès aux informations liées à leur
logement, et peuvent échanger de manière dématérialisée avec la DGFiP
s’agissant de la gestion du foncier.
Toutefois, l
a mise en service de GMBI en 2023 s’est très mal passée.
Le coût de cette application et des mesures d’urgence mises en place a été
a minima
cinq fois supérieur au coût initialement prévu. Surtout, le coût
des dégrèvements que l’
État a dû supporter est considérable,
s’él
evant à
1,3
Md€.
Du fait des difficultés rencontrées au cours de la très difficile
campagne 2023, l
e parcours de l’usager
a été simplifié
et l’action des
agents a été facilitée pour la campagne 2024. Le niveau des dégrèvements
au titre de cette année permettra d’apprécier les actions correctives mises
en place.
Pour l’heure, d’importants travaux restent à mener pour fiabiliser
les données foncières, actualiser les informations portant sur les logements
et finaliser l’automatisation du recouvrement des impôts fonciers.
La
connaissance des loyers perçus par les propriétaires, une fois rendue
obligatoire leur déclaration, devrait également permettre la réforme
attendue de la fiscalité directe locale.
À
terme, l’application GMBI, une fois mieux connue des usagers de
l’administration fiscale, devrait permettre de trouver un équilibr
e entre sa
modernisation et la fourniture de données quantitatives et qualitatives
nécessaires à la mise en œuvre des politiques publiques liées notamment
au logement.
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Liste des abréviations
API
Interface de programmation d’application (
Application programming
interface
)
COPIL
Comité de pilotage
COSTRAT
Comité stratégique
CEREMA
Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement,
la mobilité et l'aménagement
DDFiP
Direction départementale des finances publiques
DDT(M)
Direction départementale des territoires (et de la mer)
DGALN
Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature
DGFiP
Direction générale des finances publiques
DGEC
Direction générale de l’énergie et du climat
DHUP
Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages
DINUM
Direction interministérielle du numérique
DITP
Direction interministérielle de la transformation publique
ETP
Équivalent temps plein
FIDELI
Fichier démographique sur les logements et les individus
FILOCOM
Fichier des logements communaux
FILOSOFI
Fichier localisé social et fiscal
GMBI
Gérer mes biens immobiliers
GESLOC
Gestion des locaux
GESTODL
Gestion d’occupat
ion des locaux
INSEE
Institut national de la statistique et des études économiques
Mareva
Méthode d’analyse et de remontée de la valeur
MOA
Maîtrise d’ouvrage
MOAD
Assistance à maîtrise d’ouvrage
MOE
Maîtrise d’œuvre
MTECT
Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
RGPD
Règlement général sur la protection des données
SDES
Service des données et études statistiques
SITADEL
Système d’
information et de traitement automatisé des données
élémentaires sur les logements et les locaux
T2
Titre 2 (dépenses de personnel)
TFPB
Taxe foncière sur les propriétés bâties
THLV
Taxe d’habitation sur les logements vacants
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THRP
Taxe d’habitation sur les résidences principales
THRS
Taxe d’habitation sur les résidences secondaires
VLC
Valeurs locatives cadastrales
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Annexes
Annexe n° 1 : calendrier du projet
.................................................................
76
Annexe n° 2 : résultats de GMBI
...................................................................
77
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76
Annexe n° 1 :
calendrier du projet
Tableau n° 10 :
calendrier simplifié de l’élaboration
et du déploiement du projet
Contenu
Date
Élaboration
Phase
préparatoire
Première réflexion sur le projet GMBI
et réponse au 1
er
appel du FTAP
Juin 2018
Contrat de transformation signé avec
le DITP
(4 M€ de financement)
10 décembre 2018
Première étude Mareva
82
: première
évaluation du périmètre et des contours du
projet
29 mai 2019
Préparation
des modules
R-LOC
Chargement des propriétaires dans
le répertoire national des locaux (R-LOC)
en zone « agents »
Juin 2019
Juin 2020
Pilotage et
budgétisation
Avis de la DINUM après sollicitation
en juin 2020
7 juillet 2020
Intégration officielle du volet des taxes
d’urbanisme après une première mention
en juin 2020
Octobre 2020
Intégration au périmètre des grands projets
numériques de l’État sous le chiffrage initial
Novembre 2020
Déploiement
pour les
usagers
1
er
volet :
Consultation
Ouverture à la consultation pour
les propriétaires des biens immobiliers
détenus et de leurs caractéristiques
utilisées pour la taxation
2 août 2021
2
ème
volet :
Foncier
Ouverture du service dématérialisé
de déclaration foncière et/ou de taxe
d’urbanisme (achèvement de construction
ou d’aménagement)
Ouverture du service de surveillance
relance (SURF)
17 novembre 2022
3
ème
volet :
Déclaration
Ouverture du service en ligne de déclaration
obligatoire de la situation d’occupation
(sauf pour les multi-propriétaires)
Ouverture de la déclaration facultative
des loyers d’habitation perçus
Ouverture de l’applicatif de gestion des
taxations restantes d’habitation (GestODL)
18 janvier 2023
Source : Cour des comptes
82
«
Méthode d’analyse et de remontée de la valeur
»
: il s’agit d’une méthode
interministérielle d’analyse de la valeur des projets SI de l’
État.
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ANNEXES
77
Annexe n° 2 :
résultats de GMBI
Le tableau suivant dresse le bilan
à date de l’application GMBI
au regard des objectifs évoqués dans le rapport.
Tableau n° 11 :
résultats du projet GMBI par rapport
aux objectifs identifiés
Sous-objectif / moyen d’y parvenir
1
Améliorer l’information
des contribuables sur leurs
biens immobiliers
Mettre à la disposition des usagers les informations connues
par l’administration fiscale relatives au statut d’occupation
et aux caractéristiques de leurs biens immobiliers
2
Dématérialiser
les procédures de
déclaration liées aux biens
immobiliers
Permettre aux usagers de déclarer en ligne les informations
concernant l’occupation du logement et l’identité
des occupants
Permettre aux usagers de déclarer en ligne les constructions
ou travaux effectués sur les biens immobiliers
3
Moderniser la gestion
et le recouvrement des
impôts liés au logement
Moderniser, notamment par une plus grande automatisation,
le recouvrement des impôts concernés, en particulier la taxe
d’habitation sur les résidences secondaires (THRS), la taxe
d’habitation sur les logements vacants (THLV) et la taxe
sur les logements vacants (TLV)
Moderniser les procédures de surveillance et de relance
des propriétés bâties
Permettre le recouvrement des taxes d’urbanisme
par la DGFiP
4
Fiabiliser les bases de la
fiscalité directe locale
Permettre une actualisation plus rapide des bases
Permettre aux usagers de rectifier les informations disponibles
sur leur logement
Organiser la collecte des loyers perçus
83
par les propriétaires
bailleurs pour actualiser les valeurs locatives cadastrales (VLC)
des locaux d’habitation
5
Poursuivre la réforme
de la DGFiP
Réduire les ETP principalement dans les services fonciers
en passant à un processus entièrement automatisé
Installer une relation de confiance avec le contribuable
Source : Cour des comptes
Note de lecture : en vert sont indiqués les sous-objectifs qui, selon la Cour, ont été atteints ; en orange, les sous-
objectifs en cours de mise en
œuvre
; en rouge, les sous-objectifs qui ne peuvent pas être atteints dans un futur
proche.
83
La collecte des loyers initialement obligatoire est devenue facultative lors de la
déclaration des occupants.
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