ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
L’ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR ET LA
RECHERCHE EN
OUTRE-MER -
ANTILLES
Exercices 2017-2024
Rapport public thématique
Novembre 2024
•
L'enseignement supérieur et la recherche dans les Outre-mer - novembre 2024
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Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Synthèse
.........................................................................................................
9
Récapitulatif des recommandations
...........................................................
13
Introduction
..................................................................................................
15
Chapitre I Une offre de formation et de recherche importante
mais dont les résultats sont encore à consolider
........................................
17
I -
Une offre de formation complète mais souffrant d’un déficit
d’attractivité, de pilotage et de performance
..................................................
17
A - Un contexte démographique, économique et social qui pèse
sur le développement de l’université
....................................................................
18
B - Une offre de formation très généraliste
...........................................................
19
C - Des taux de réussite réduits et le maintien de formations peu attractives
.......
20
D -
Un pilotage de l’offre de
formation à renforcer
..............................................
21
E - Les réformes des études de santé
: une mise en œuvre nécessitant
la coopération de tous
...........................................................................................
23
F - Une action internationale sans résultats probants en dépit des ambitions
affichées et du potentiel de coopération avec les universités caribéennes
............
26
II - Une recherche peu visible et manquant de perspectives
..........................
27
A - Une production limitée reposant sur des unités de recherche morcelées
et sans rayonnement suffisant
...............................................................................
27
B - Une capacité de réponse aux appels à projets limitée
mais en progression
..............................................................................................
29
C -
Une relation avec les partenaires dans le cadre d’un consortium
à réinventer
...........................................................................................................
29
D - Une politique doctorale à consolider
..............................................................
31
Chapitre II
Une gestion de l’université qui présente de
nombreuses faiblesses et qui doit être renforcée
.......................................
35
I - Un cadre juridique dérogatoire
..................................................................
35
A -
Une organisation fragilisée par des ambiguïtés sur l’autonomie
des pôles
...............................................................................................................
36
B - Des critères de répartition des emplois et des crédits des pôles
insatisfaisants
........................................................................................................
41
C - Un accroissement des compétences de la présidence
......................................
42
II - La gestion financière et comptable
..........................................................
43
A - Un contrôle des rectorats à renforcer pour remédier aux carences
de la gestion budgétaire
........................................................................................
43
B - Une procédure budgétaire insuffisamment formalisée et transparente
............
44
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COUR DES COMPTES
4
C - Une analyse budgétaire quasi-inexistante
.......................................................
48
D - Une qualité comptable non assurée
................................................................
54
E - Un contrôle des régies qui appelle une rationalisation
et la fin de certaines irrégularités
..........................................................................
55
III - La commande publique
...........................................................................
56
A - Une organisation du processus manquant de ressources et de maturité
..........
56
B - Un processus mal maitrisé qui obère la performance
de la fonction achat
...............................................................................................
57
IV - Les ressources humaines
........................................................................
59
A - Une gestion des ressources humaines à renforcer
...........................................
59
B - Une organisation fragile de la DRH mise en évidence
par la cartographie des risques
..............................................................................
61
C -
Des défaillances du pilotage des services d’enseignement et de la paye
.........
62
V - Le patrimoine immobilier
........................................................................
64
A - Un patrimoine vétuste soumis aux contraintes climatiques
et aux risques naturels
...........................................................................................
65
B - Une fonction essentiellement basée en Guadeloupe
.......................................
65
C - Une stratégie immobilière quasiment achevée
................................................
66
D -
Des objectifs de réduction de la consommation d’énergie
qui se concrétisent
................................................................................................
67
VI -
Les systèmes d’information
....................................................................
67
A -
Une logique de pôle au détriment d’une logique d’établissement
..................
68
B -
Un suivi de l’activité et une gestion de projet défaillants, dans un
contexte d’infrastructures vieillissantes et de systèmes non interopérables
..........
68
C -
La sécurité informatique, un chantier d’ampleur
............................................
69
Liste des abréviations
..................................................................................
73
Annexes
.........................................................................................................
79
•
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Procédures et méthodes
En application de l’article L. 143
-6 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes publie chaque année un rapport public
annuel et des rapports publics thématiques.
Ces travaux et leurs suites sont réalisés par l’une des six chambres que
comprend la Cour ou par une formation associant plusieurs chambres et/ou
plusieurs chambres régionales ou territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux
gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes, donc
aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration des
rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la co
llégialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique
que
toutes
les
constatations
et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; e
lles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, la publication d’un rapport es
t nécessairement précédée par la
communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses sont présentées en annexe du texte de la Cour.
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COUR DES COMPTES
6
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rappor
t d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation comprenant
au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de co
ntre-
rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
La présente enquête a été réalisée par une formation inter-juridictions
(FIJ). Elle a associé la Cour des comptes et quatre chambres régionales et
territoriales des comptes : CRTC Antilles-Guyane, La Réunion-Mayotte,
Polynésie française et Nouvelle-Calédonie.
Cette formation a procédé au contrôle des comptes et à l’examen de la
gestion des universités de Guyane, des Antilles, de Polynésie française, de
Nouvelle-Calédonie, de La Réunion et de Mayotte. En outre, des travaux
portant sur «
l’enseignement supérieur et la recherche dans les Outre
-mer »,
ont été réalisés et présentés au sein de cette formation commune.
Outre les entretiens qui ont été réalisés avec les acteurs territoriaux
(gouvernance et services des universités, recteurs et vice-recteurs, préfets et
hauts commissaires, collectivités territoriales, etc.), des échanges approfondis
et réguliers ont eu lieu avec la directrice générale de l’enseignement supérieur
et de l’insertion professionnelle
(DGESIP), la directrice générale de la
recherche et de l’innovation (DGRI) et la directrice générale des Outre
-mer
(DGOM).
Par ailleurs, dans le cadre de l’instruction, des échanges ont eu lieu
avec l’agence française de développement (AFD), la direction
générale des
collectivités locales (DGCL), la direction générale des étrangers en France
(DGEF), la direction générale de l’administration et de la fonction publique
(DGAFP), la direction de l’immobilier de l’État (DIE), l’agence de l’Outre
-
mer pour la mo
bilité (Ladom), le secrétariat général pour l’investissement
(SGPI), l’agence nationale de la recherche (ANR), la banque des territoires
(BT), la caisse des dépôts et consignations (CDC), l’agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe),
le centre national des
œuvres universitaires et scolaires (Cnous), l’office français de la biodiversité,
l’institut de la recherche pour le développement (IRD), l’institut national de
la recherche en informatique et en automatique (Inria), l’institut natio
nal de
recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAé), le
centre national de la recherche scientifique (CNRS), le bureau de recherches
géologiques et minières (BRGM), le centre de coopération internationale en
recherche agronomique
pour le développement (Cirad), l’institut français de
recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), l’inspection générale de
l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) et le haut conseil de
l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supé
rieur (HCERES).
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PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
Par ailleurs, dans le cadre de l’instruction, les équipes de rapporteurs
se sont rendus dans chacun des six territoires concernés pour une période d’au
moins deux semaines. Ils ont pu y rencontrer l’ensemble des interlocuteurs
présentan
t un intérêt en matière d’enseignement supérieur et de recherche
(gouvernance des universités, services des universités, recteurs et vice-
recteurs, préfets et hauts commissaires, collectivités territoriales, organismes
de recherche, acteurs socio-économiques, etc.).
Les priorités de l’enquête générale ont été définies afin que
l’instruction permette à la fois de présenter le panorama des acteurs de
l’enseignement supérieur et de la recherche dans les Outre
-
mer, d’évaluer les
politiques publiques afférentes à la formation, la recherche et la vie étudiante,
et de présenter la gestion des universités ainsi que leurs relations avec les
directions d’administration centrale, les opérateurs et les acteurs locaux.
Quant aux six cahiers territoriaux qui accompagnent le rapport de
synthèse, les priorités ont été définies par des plans de contrôle afin que
l’instruction permette de présenter le panorama des acteurs de l’enseignement
supérieur et de la recherche sur le territoire et de procéder au contrôle des
comptes e
t de la gestion de l’université.
Le projet de rapport soumis pour adoption à la chambre du conseil a
été préparé, puis délibéré le 8 juillet 2024, par une formation interjuridictions,
présidée
par
M. Nacer
Meddah,
président
de
chambre,
et composée de MM. Philippe Hayez et Philippe Rousselot, présidents
de section, M. Henri Guaino, conseiller maître à la troisième chambre,
Mme Sandrine Venera, conseillère référendaire à la cinquième chambre,
MM. Nicolas Péhau, Jean-Luc Le Mercier, Mme Florence Bonnafoux,
M. Patrick Barbaste, présidents de chambres régionales des comptes, ainsi
que, en tant que rapporteur général de la formation commune, M. David
Carmier, conseiller référendaire à la troisième chambre et en tant que
rapporteurs, Mme Agnès Delétang, conseillère maître, M. Yohan Pallier,
auditeur, Mme Delphine Hlavaty, auditrice des systèmes d’information.
Il a été examiné et approuvé, le 11 septembre 2024, par le comité
du rapport public et des programmes de la Cour des comptes, composé de
M. Pierre Moscovici, Premier président, M. Rolland, rapporteur général,
M. Charpy, Mme Camby, Mme Démier, M. Bertucci, Mme Hamayon,
M. Meddah et Mme Mercereau, présidentes et présidents de chambre de la
Cour, M. Strassel, M. Lejeune, Mme Daussin-Charpantier, Mme Renet et
Mme Bonnafoux, présidentes et présidents de chambre régionale des
comptes, et M. Louis Gautier, Procureur général, entendu en ses avis.
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COUR DES COMPTES
8
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
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Synthèse
L’université des Antilles (UA) est une université de taille moyenne,
avec environ 14 000 étudiants, 1 000 agents (enseignants, chercheurs et
Biatss
1
), et un budget annuel de l’ordre de 100 M€. En vertu de ses statuts
,
elle se compose de deux pôles, en Guadeloupe et en Martinique, qui ont
une gouvernance et une administration propres et dont l’autonomie est
censée favoriser l’adaptation aux spécificités des deux territoires. La
période sous revue (2017-2024) succède à une période marquée par une
crise de gestion, par la scission en 2015 avec l’Université de Guyane et par
de graves désordres de gestion concernant l’un des laboratoires.
Une offre de formation perfectible,
une recherche au potentiel insuffisamment exploité
L’UA parvient à offrir une formation assez complète en sciences
exactes et en santé comme en sciences humaines et sociales. Le parcours
de ses étudiants est toutefois marqué par un taux d’échec plus important
que celui de la moyenne nationale, compte tenu de la forte proportion de
boursiers et de la situation globalement plus défavorisée des étudiants. La
capacité de l’UA à adapter son offre en fonction des besoins des territoires
antillais est à parfaire, d’autant que le contexte socioéconomique local est
contraint. En outre, la perspective de décroissance démographique rend
d’autant plus sensible le renforcement de l’attractivité de l’UA, qui
demeure réduite vis-à-vis des étudiants étrangers.
En matière de recherche, l’UA peine également à rayonner dans s
on
aire géographique malgré un apport reconnu sur des thèmes tels que
l’échouement des sargasses ou l’impact de la pollution par le chlordécone. Le
territoire, riche de plusieurs antennes d’organismes nationaux de recherche,
manque d’animation et de production collectives. Malgré la présence d’unités
performantes, l’UA ne parvient pas à développer des travaux de recherche
susceptibles de déboucher sur des partenariats et des ressources propres. Si
l’ingénierie de recherche manque de compétences, l’UA a réce
mment obtenu
un financement de l’agence nationale de recherche (ANR), qui lui permettra
1
Personnels des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de
santé (Biatss).
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COUR DES COMPTES
10
de renforcer ses capacités de montage et de suivi de projets de recherche. Les
caractéristiques locales invitent à une spécialisation de la recherche et à la
création d
e niches d’excellence en matière de formation dans les domaines
linguistiques, culturels et historiques, ainsi qu’en recherche médicale, de
biodiversité et d’agroécologie.
Une répartition complexe des compétences
La gouvernance originale de l’UA est fragil
isée par des ambigüités
législatives relatives à l’autonomie des pôles, à l’origine d’une concurrence
entre le président de l’université et les vice
-présidents des pôles. Les statuts
et le règlement intérieur de l’UA accentuent le déséquilibre en faveur de
la
présidence au détriment des vice-présidences de pôles, altérant parfois le bon
fonctionnement de l’établissement. Cette situation requiert une meilleure
articulation des instances et une simplification des procédures. L’UA n’a en
outre pas fait évoluer les critères de répartition des emplois et des crédits des
pôles en fonction des besoins réels. Elle présente un retard en matière de
transition écologique, y compris au regard des obligations réglementaires.
Une absence de procédures formalisées
et une organisation porteuse de risques
Conséquence des désordres antérieurs à 2017, la gestion budgétaire
et comptable de l’UA est marquée par de sérieuses lacunes procédurales
ainsi que par l’absence d’analyses financière et comptable susceptibles
d’éclairer les
membres du CA et de garantir la sincérité de la certification
des comptes par les commissaires aux comptes. La gestion financière et le
contrôle interne financier révèlent une insuffisance de pilotage et de
coordination entre l’ordonnateur et le comptable
.
Faute de ressources humaines (RH) suffisantes et compétentes en
matière de commande publique et malgré un volume d’achat substantiel,
les procédures de passation des marchés ne sont pas toujours respectées.
Par ailleurs, l’archivage des pièces des marché
s est lacunaire et prévient
toute possibilité de contrôler et de justifier les choix des titulaires retenus.
La gestion des RH et celle des services d’enseignement font
apparaître des dysfonctionnements, qui vont de légers écarts dans la gestion
des comptes épargne-temps à un défaut de réconciliation entre les
informations du journal de paye et celles des systèmes de gestion
administrative, ce qui affecte la qualité du processus de paye.
Par ailleurs, l’UA doit se doter immédiatement d’un schéma
pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI), qui fait défaut depuis de
nombreuses années, ce qui conduit à des errements de gestion
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SYNTHÈSE
11
(déclassement et fermeture de bâtiments rénovés avant même d’avoir été
ouverts, comme ceux de l’INSPé de la Martinique).
Les systèmes d
’information (SI) présentent quant à eux des
vulnérabilités importantes, faute de schéma directeur des SI et de politique
de sécurité, y compris en matière de droits d’accès individuels. Le manque
d’interopérabilité des systèmes et le vieillissement du par
c informatique et
des réseaux en sont la conséquence. L’absence de désignation d’un référent
RGPD est également à souligner.
Ainsi, tant sur le plan de la formation que sur celui de la recherche, la
situation de l’UA reste difficile malgré l’existence de r
éelles opportunités.
Cela implique, pour les saisir, de restaurer la cohérence de son organisation
interne et de développer des partenariats avec les acteurs du territoire. Sans
évolution substantielle, les insuffisances observées en matière de gestion des
ressource humaines, de commande publique, d’immobilier et de systèmes
d’information persisteront, voire s’intensifieront. La réussite des étudiants,
la performance de la recherche et,
in fine
, le rayonnement de l’université sur
le plan régional imposent u
n tel effort, auquel il revient à l’UA de procéder
en poursuivant le rétablissement entamé, en vue de la doter d’une
administration robuste et efficace.
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Récapitulatif des recommandations
1.
Concentrer l’offre de formation sur les filières structurantes, avec un
recours plus important aux organismes de recherche présents sur place
(Université des Antilles ; rentrée 2025).
2.
Remobiliser les partenariats dans le cadre du
consortium
Pari et
mutualiser davantage les moyens existants pour le montage des
projets, notamment avec les organismes de recherche
(Université des
Antilles ; mi-2025).
3.
Clarifier la répartition des compétences au sein de l’UA et mettre en
place rapidement des procédures écrites visant à assurer une bonne
gestion administrative
(
ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche et Université des Antilles ; fin du premier trimestre 2025)
.
4.
Mettre en place une procédure budgétaire conforme aux obligations
réglementaires
(
ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche et Université des Antilles ; fin 2024)
.
5.
Procéder à une revue des régies et adopter un plan de contrôle de
celles-ci
(Université des Antilles ; fin du premier trimestre 2025)
.
6.
Mener à bien les chantiers résultant de la carte des risques en matière
de ressources humaines
(Université des Antilles ; fin du premier
trimestre 2025).
7.
Fiabiliser les outils de gestion des services d’enseignement
et mettre
en cohérence les données de paye (
Université des Antilles ; fin du
premier trimestre 2025
).
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Introduction
L’université des Antilles (UA) est un établissement public à caractère
scientifique, culturel et professionnel (EPSCP), qui jouit de la personnalité
morale, de l’autonomie
pédagogique, scientifique, administrative et
financière, dans le cadre des responsabilités et compétences élargies (RCE)
2
.
Depuis l’autonomisation du pôle universitaire de Guyane, décidée en 2014
3
et effective depuis le 1
er
janvier 2015, l’université est i
mplantée dans deux
départements : la Guadeloupe et la Martinique, collectivités régies par
l’article 73 de la Constitution avec un régime d’identité législative.
L’UA, issue de la scission de l’
Université des Antilles et de la
Guyane, a été créée par la loi n° 2015-737 du 25 juin 2015 modifiée par la
loi n° 2020-
1674 du 24 décembre 2020 et par l’ordonnance n°
2021-552 du
5 mai 2021, portant actualisation et adaptation des dispositions du code de
l’éducation
relatives
à
l’Outre
-mer.
Les
dispositions
législatives
applicables, complétées par des dispositions issues des décrets n° 2021-
1910 du 30 décembre 2021, sont inscrites dans le code de l’éducation
4
. Le
préambule des statuts de l’UA
,
adoptés en conseil d’administration (CA)
le 23 juin 2016 puis modifiés le 23 février 2021,
rappelle que l’UA est
organisée autour de deux pôles universitaires
5
(Guadeloupe et Martinique).
L’UA est
donc une jeune université,
dont l’objectif est d’apporter
son concours au bénéfice des deux territoires insulaires, en veillant à la
mutualisation des moyens et l’articulation de la formation et de la
recherche des deux départements. La scission avec la Guyane n’empêche
pas l’UA de coopérer avec l’université de Guyane (UG) dans le cadre de
l’unité de formation de recherche (UFR) en san
té et de projets de recherche.
La pertinence et la performance de la formation et de la recherche à
l’UA sont deux impératifs pour entretenir l’attractivité de l’université. Les
territoires des Antilles, auxquels il faut ajouter Saint-Martin, Saint-
Barthélemy, la Guyane et Haïti, sont des territoires francophones dans une
zone caribéenne majoritairement anglophone et hispanophone.
2
Articles L
.
712-8 à L
.
712-10 et L
.
954-1 à L
.
954-
3 du code de l’éducation.
3
Décret n° 2014-851 du 30 juillet 2014
.
4
Articles L
.
771-1 à L
.
771-17, D
.
711-1 et D
.
771-9 du
code de l’éducation.
5
Article L
.
771-
14 du code de l’éducation.
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COUR DES COMPTES
16
L’université des Antilles (UA) est un établissement public à caractère
scientifique, culturel et professionnel (EPSCP), qui jouit de la personnalité
morale, de l’autonomie pédagogique, scientifique, administrative et
financière, dans le cadre des responsabilités et compétences élargies (RCE).
Depuis l’autonomisation du pôle universitaire de Guyane, décidée en 2014
et effective depu
is le 1er janvier 2015, l’université est implantée dans deux
départements : la Guadeloupe et la Martinique, collectivités régies par
l’article 73 de la Constitution avec un régime d’identité législative.
L’UA, issue de la scission de l’Université des Anti
lles et de la
Guyane, a été créée par la loi n° 2015-737 du 25 juin 2015 modifiée par la
loi n° 2020-
1674 du 24 décembre 2020 et par l’ordonnance n° 2021
-552
du 5 mai 2021, portant actualisation et adaptation des dispositions du code
de l’éducation relatives à l’Outre
-mer. Les dispositions législatives
applicables, complétées par des dispositions issues des décrets n° 2021-
1910 du 30 décembre 2021, sont inscrites dans le code de l’éducation. Le
préambule des statuts de l’UA, adoptés en conseil d’administrat
ion (CA)
le 23 juin 2016 puis modifiés le 23 février 2021, rappelle que l’UA est
organisée autour de deux pôles universitaires (Guadeloupe et Martinique).
L’UA est donc une jeune université, dont l’objectif est d’apporter
son concours au bénéfice des deux territoires insulaires, en veillant à la
mutualisation des moyens et l’articulation de la formation et de la
recherche des deux départements. La scission avec la Guyane n’empêche
pas l’UA de coopérer avec l’université de Guyane (UG) dans le cadre de
l’unit
é de formation de recherche (UFR) en santé et de projets de recherche.
La pertinence et la performance de la formation et de la recherche à
l’UA sont deux impératifs pour entretenir l’attractivité de l’université. Les
territoires des Antilles, auxquels il faut ajouter Saint-Martin, Saint-
Barthélemy, la Guyane et Haïti, sont des territoires francophones dans une
zone caribéenne majoritairement anglophone et hispanophone.
La Guadeloupe et la Martinique sont marquées par un départ des jeunes
après le baccalauréat, sur fond de déclin démographique. Le maintien sur
place des jeunes bacheliers antillais suppose que l’UA offre des formations
et des perspectives de recherche de qualité, répondant aux souhaits
d’études et au besoin en compétences du territoire. Cet enjeu n’est pas
nouveau, et pourtant l’UA se heurte encore à la faiblesse de ses partenariats
avec les organismes nationaux de recherche et les acteurs socio-
économiques, et à une fragilité organisationnelle depuis l’éclatement de
l’affaire du CEREGMIA et la scission avec l’Université de Guyane, que ce
soit sur le plan de la gouvernance ou de l’administration.
L'enseignement supérieur et la recherche dans les Outre-mer - novembre 2024
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Chapitre I
Une offre de formation et de recherche
importante mais dont les résultats
sont encore à consolider
L’offre de formation proposée par l’Université des Antilles est
complète mais elle souffre d’un déficit d’attractivité, de pilotage et de
performance (I). Par ailleurs, en ce qui concerne la recherche, elle est peu
visible et manque encore de perspectives (II).
I -
Une offre de formation complète
mais souffrant d’un déficit d’attractivité,
de pilotage et de performance
Les Antilles ont un contexte démographique, économique et social
spécifique et qui n’est pas sans conséquences sur le développement de
l’université (A). L’offre de formation de l’établissement est très généraliste
afin de répondre aux besoins des néobacheliers du territoire (B). Par
ailleurs, l’université pâtit d’un taux de réussite
insuffisant et de formations
pas toujours suffisamment attractives (C). De manière générale, le pilotage
de l’offre de formation doit être renforcé (D).
Aux Antilles, la réforme des
études de santé nécessite une coordination effic
ace de l’ensemble des
acteurs (E). Enfin, si l’établissement d’une ambition internationale
importante, les efforts en la matière doivent se poursuivre (F).
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COUR DES COMPTES
18
A -
Un contexte démographique, économique et social
qui pèse sur le développement de l’université
L’UA
évolue dans un contexte qui affecte le maintien de ses effectifs
dans la durée. La Guadeloupe et la Martinique subissent les effets de la
diminution de la population jeune et du choix des bacheliers des deux
académies de poursuivre leurs études dans l’hexa
gone, tout en accueillant
un public socialement plus défavorisé que la moyenne. Le vivier de
recrutement principal de l’UA est donc en diminution. Si le nombre annuel
de ces derniers stagne depuis 2013 en Guadeloupe, il baisse de 8 % en
Martinique. La démo
graphie est défavorable avec la perte d’environ
1 500 jeunes de 17 à 19 ans entre 2013 et 2021.
Tableau n° 1 :
évolution des populations âgées de 0 à 19 ans,
de 17 à 19 ans et du nombre de bacheliers entre 2013 et 2021
Population 0-19 ans
Population 17-19 ans
Bacheliers
Guadeloupe
Martinique
Guadeloupe
Martinique
Guadeloupe
Martinique
2013
112 363
97 606
16 904
15 024
5 477
4 561
2021
88 823
75 073
15 489
13 411
5 457
4 205
Évolution
- 21 %
- 23 %
- 8 %
- 11 %
- 0,4 %
- 8 %
Source
: Cour des comptes d’après les données de l’I
nsee et de la DPP
Par ailleurs, entre 2018 et 2022, selon les données Parcoursup,
seulement 52 % des bacheliers de Guadeloupe et 50 % de ceux de
Martinique ont rejoint un cursus d’enseignement supérieu
r situé dans leur
académie. Au total, 20 % à 23
% d’entre eux ont intégré l’UA, 17
%
poursuivant leurs études dans l’hexagone. L’UA capte une proportion
relativement stable des bacheliers de son territoire depuis 2018 mais le
statu quo
pourrait conduire à une diminution de ses effectifs.
L’UA ne concentre que 61
% des effectifs scolarisés dans
l’enseignement supérieur dans les Antilles, en raison de la présence
historique de sections de technicien supérieur (STS) et classes préparatoires
aux grandes écoles (CPGE) dans les lycées de Guadeloupe et de Martinique.
Elle occupe une place secondaire dans le paysage des formations courtes et
professionnalisantes du territoire. La part des étudiants en institut
universitaire de technologie (IUT) et licences professi
onnelles de l’UA est
faible (3 % des étudiants) par rapport aux STS des deux territoires (22 % en
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
19
Guadeloupe et 29 % en Martinique), en dépit de la présence de deux IUT et
de 17 mentions de licences professionnelles
6
.
D’autre part, l’UA accueille 40
% à 44 % de boursiers selon les années.
Cette situation impose un suivi renforcé afin de maximiser leurs chances de
réussite. L’origine sociale des étudiants se distingue de la moyenne nationale
par une sous-représentation des enfants de cadres et professions supérieures
(15 % contre 34 % au niveau national) et la surreprésentation des enfants
d’employés (25
% contre 17 % au niveau national).
B -
Une offre de formation très généraliste
L’UA a accueilli 12
300 étudiants en 2023-2024, dont 57 % se
concentrent sur le pôle Guadeloupe. Cette proportion est globalement
stable, même si la part du pôle Martinique tend à augmenter (38 à 43 % des
étudiants entre 2016-2017 et 2023-2024) (cf. tableau n° 2).
Tableau n° 2 :
effectifs étudiants, y compris double-inscriptions
et formation continue
2016-2017
2019-2020
2023-2024
Guadeloupe
7833 (62 %)
7965 (58 %)
7003 (57 %)
Martinique
4770 (38 %)
5786 (42 %)
5298 (43 %)
Total
12 603
13 751
12 301
Source
: Cour des comptes d’après l’Université des Antilles
L’UA dispose d’une offre
relativement complète, de la licence au
doctorat. La spécialisation de chaque pôle, qui prévalait à la création de
l’UAG, s’est estompée pour disparaitre au niveau licence (20 mentions de
licences générales, 17 mentions de licences professionnelles). Elle
n’est
presque plus perceptible au niveau master : sur 27 mentions, 16 peuvent
être suivies indifféremment en Guadeloupe ou en Martinique. Concernant
la formation, 11 composantes regroupant l’essentiel des 527
enseignants-
chercheurs
7
permettent d’assurer l’
offre de formation. La symétrie des
cursus entre les deux pôles est facilitée par les modalités d’enseignement à
distance et les plateformes de travail en ligne (
eCursus
, s’appuyant sur la
plateforme
Moodle
). La proximité des cursus entre les deux pôles s’
illustre
en licence, où les mentions parmi les plus dotées en effectifs sont délivrées
6
STRATER de la DGESIP, juillet 2022.
7
Données 2019 : Sur 1
002 agents physiques, l’UA compte 57 enseignants
-chercheurs
(97 PU, 230 MCF, 84 enseignants du second degré) et 475 BIATSS.
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20
sur les deux territoires (Parcours d’accès spécifique santé (PASS),
physique-chimie,
informatique,
droit,
économie-gestion,
etc
.
).
La
généralisation des formations de premier cycle sur les deux territoires
permet à l’UA de maintenir ses effectifs, qui augmentent respectivement
de 100 et 170 étudiants entre 2017-2018 et 2022-2023.
Les effectifs de l’UA au niveau master sont proportionnellement
moins importants qu’au niveau
national (32 % contre 38 %). Le poids
prépondérant des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la
formation (MEEF) dans les deux INSPé (40 % à 45 % des étudiants par
rapport à une moyenne nationale de 16
%) montre l’importance d’un
débouché qui pe
rmet d’envisager une insertion professionnelle locale.
C -
Des taux de réussite réduits et le maintien
de formations peu attractives
Les taux de réussite sont inférieurs à la moyenne nationale. La
« valeur ajoutée » des formations de niveau licence, telle que mesurée par
le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR), est
négative, bien que cet indicateur neutralise les effets liés aux
caractéristiques socio-économiques des étudiants (cf. tableau n° 3).
Tableau n° 3 :
taux de réussite à 3 ans des étudiants entré en licence
en 2017 (en %)
Discipline en L1
Moyenne
nationale
UA
Valeur ajoutée
de l’UA
Arts, lettres, langues, SHS
35,8
26,5
- 5,2
Droit, Sc. politiques
36,4
14,6
- 5,1
Économie, AES
32,3
16,9
- 2,2
Sciences-santé
31,0
17,7
0,3
STAPS
32,4
8,6
- 12,3
Toutes disciplines
34,3
17,6
- 4,5
Source : m
inistère de l’enseignement
supérieur et de la recherche
Il n’y a pas de mesure précise des facteurs de réussite dans chaque
cursus,
pourtant
indispensable
pour
construire
des
dispositifs
d’accompagnement
. La réussite étudiante est seulement mesurée sur la
base du taux de réussite en licence en trois, quatre ou cinq ans, sans prendre
en compte les réorientations en cours de cursus ou certains facteurs pouvant
expliquer un échec tels que la filière du baccalauréat. Les taux de réussite
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
21
affichés dans les documents internes diffèrent de ceux de l’enquête SISE
du MESR sans que ces écarts, parfois importants, puissent être expliqués.
L’analyse des taux de réussite n’a pas de conséquences sur
l’adaptation de l’offre de formation. L’augmentation des effectifs en
STAPS
8
, particulièrement en 2022-2023 (+ 213 étudiants par rapport à 2021-
2022), mériterait un examen car le taux de réussite de la licence en trois ans
n’y est que de 9
% contre 32
% au niveau national. L’
absence de données
communiquées sur les taux de réussite en PASS et en licence accès santé
(LAS) après deux années universitaires de mise en œuvre de la réforme du
premier cycle des études de santé empêche tout retour d’expérience sur les
conditions d’amél
ioration de la réussite étudiante dans ces filières. Les taux
de réussite en master ne font pas l’objet d’une analyse, alors que ceux
-ci
connaissent de fortes variations dans le temps, notamment en MEEF (66 %
en 2016-2017 ; 57 % en 2018-2019 ; 69 % en 2019-2020).
Contrairement à la licence, l’offre de master se caractérise par sa
faible attractivité. Entre 40 % et 45 % des étudiants de niveau master sont
en MEEF. En dehors de ces filières, l’UA se caractérise par l’émiettement
de ses effectifs au sein d’une
offre trop vaste. Les masters dont les effectifs
sont inférieurs à 10 étudiants sont de plus en plus nombreux (neuf en 2016-
2017 et 17 en 2019-2020). La faiblesse des effectifs de certains masters
vaut également pour l’offre liée aux spécificités du terri
toire. Par exemple,
au sein de l’UFR lettres et sciences humaines (LSH) du pôle Martinique,
les masters «
gestion de l’environnement
» et « histoire, civilisations,
patrimoine
» ne rassemblent qu’une vingtaine d’étudiants.
En matière d’insertion profession
nelle, le taux de réponse des
diplômés des années 2016-2017, 2017-2018 et 2018-2019 se situe entre
56 % et 61
%. L’insertion professionnelle à 30 mois est perfectible
(respectivement 48 %, 47 % et 54 %).
D -
Un pilotage de l’offre de formation à renforcer
Sur le plan de la gouvernance, la duplication des commissions de la
formation et de la vie universitaire (CFVU) entre les pôles ne permet pas
de fixer des orientations stratégiques claires sur l’adaptation de la carte de
formation, qui pourraient être débattues au CA et au conseil académique
(CAC). Les statuts de l’UA posent le principe de complémentarité de
l’offre de formation mais restent imprécis sur les rôles respectifs des pôles
8
Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS).
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22
et des instances communes. Dans son rapport de 2022, le HCERES
9
mentionnait que « la complexité des circuits de validation ne facilite pas le
processus de constitution de l’offre de formation
».
Le pilotage de l’offre de formation s’apparente à une accumulation
de choix spécifiques, dont la cohérence n’est pas évidente. Si la
rationalisation des mentions de licences professionnelles est pertinente, le
projet de campus de taille réduite à Saint-Martin qui prolongerait les STS
existantes par des licences professionnelles ne repose pas sur une étude
d’impact à la charge de la collecti
vité demanderesse.
Sur le plan administratif, la modélisation du coût des formations
dans le système d’information APOGEE est inachevée, même si des
progrès sont en cours. La soutenabilité budgétaire des décisions
d’ouverture ou d’adaptation des formations
n’est pas vérifiée. Les cursus à
faibles effectifs restent nombreux alors même qu’ils impliquent une charge
d’enseignement et un coût substantiels. Par exemple, on dénombre encore
17 licences professionnelles dans la maquette d’enseignement 2022
-2027
malgré la transformation des diplômes universitaire de technologie (DUT)
en bachelor universitaire de technologie (BUT) et la présence de centre de
formation d’apprentis (CFA), dont l’un au moins propose des cursus
équivalents (CFA de la chambre de commerce et
d’industrie de
Martinique). Une systématisation de seuils d’ouverture et de fermeture des
formations permettrait de simplifier la gestion de l’offre et abaisser le coût.
L’UA ne dispose pas d’un outil analytique permettant d’évaluer le
coût des formations. Toutefois, elle a initié en 2018-2019 une démarche de
calcul des coûts complets des activités par diplôme. Ces travaux, qui ont
abouti en décembre 2020 à un rapport réalisé par un agent chargé du
contrôle de gestion, se fondent sur des règles communes et homogènes
définies au niveau national pour les EPSCP, dans « une perspective
d’optimisation de l’offre de formation
» pouvant déboucher sur des
propositions de mutualisation de certaines formations. Le rapport a
identifié plusieurs formations à faible eff
ectif et d’un coût élevé
par
étudiant diplômé. Le diplôme le plus cher dépasse 70
000 €
par étudiant ;
les huit formations les plus chères coûtent 30
000 € par étudiant et une
vingtaine de diplômes se situent à plus de 20
000 €. Les masters MEEF à
faibles
effectifs en constituent une large part, auxquels s’ajoutent des
licences d’ingénieur, des DUT pouvant nécessiter des équipements
techniques assez lourds. Aucune suite n’a été donnée à cette étude, jamais
renouvelée en dépit de son intérêt pour la gestion
de l’université.
9
Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
23
Enfin, l’UA apparait relativement isolée. Elle pourrait s’adjoindre
les compétences des organismes de recherche présents sur le territoire, en
adoptant une approche plus partenariale. Le master « gestion de
l’environnement
» délivré sur le
pôle Martinique n’associe pas le centre de
recherche agronomique pour le développement (Cirad) et n’aborde pas
l’agroécologie, le Cirad n’ayant des liens qu’avec les IUT. L’Institut
français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), présent en
Martinique, participe quant à lui aux enseignements de la nouvelle licence
professionnelle « métiers de la mer » délivrée sur le pôle Guadeloupe.
E -
Les réformes des études de santé : une mise
en œuvre nécessitant la coopération de tous
L’UFR Santé est la seule composante de l’UA à couvrir les trois
anciens pôles de l’ex
-
UAG. Il ne s’agit pas d’une faculté de médecine de
plein exercice dans la mesure où le deuxième
cycle n’y est pas dispensé.
L’UFR Santé est liée par convention aux centre hospitalier
universitaire
(CHU) de Guadeloupe et de Martinique et au CH de Cayenne pour le
troisième
cycle. L’UFR Santé s’appuie sur 80
enseignants, dont 11 en
Guyane, pour un effectif de de 3 500 étudiants, dont un peu moins de 2 000
en médecine.
Le
numerus clausus
des filières de santé est en hausse depuis la
création de la 1
ère
année en 1998. Depuis sa suppression en 2021, l’UFR
Santé dispose d’un
numerus apertus
fixant un
minimum
d’étudiants à
former dans les filières médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie.
Celui-ci est commun aux Antilles et à la Guyane pour la médecine mais
distinct pour les autres spécialités
10
.
Concernant la formation, après la mise en œuvre de la réforme du
1
er
cycle depuis la rentrée 2020, l’UFR a accueilli la première promotio
n
de son nouveau master d’orthophonie à la rentrée 2022. Elle a dû assurer
la première année de mise en œuvre du 2
ème
cycle réformé à la rentrée 2023,
préparer les conditions de passage des nouvelles épreuves dématérialisées
nationales (EDN) et des examens cliniques objectifs et structurés (ECOS),
en vue d’un accès à l’internat à la rentrée 2026 et la première année de mise
en œuvre du 3
ème
cycle de pharmacie à la rentrée 2024. L’UA a également
déposé un dossier d’accréditation pour délivrer le diplôme d’Ét
at
d’infirmière en pratique avancée, avec un objectif de 15 étudiants.
10
Arrêté du 13 septembre 2021 définissant les objectifs nationaux pluriannuels de
professionnels de santé à former pour la période 2021-2025.
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24
En matière d’infrastructures, les deux pôles de l’UFR Santé sont
engagés dans des projets d’ampleur entourés d’incertitudes. En
Guadeloupe, un « campus santé
», dont la maitrise d’ouvra
ge et le
financement sont assurés par la région, pour un montant prévisionnel de
53,5 M€, doit accueillir l’ensemble des effectifs guadeloupéens de l’UFR
Santé. Ce campus sera adossé au nouveau bâtiment du CHU de
Guadeloupe, situé aux Abymes, dont la livraison était prévue pour octobre
2023, et l’ouverture pour le dernier trimestre 2024. Le campus santé ne sera
pas achevé avant 2028 selon le projet de SPSI 2023-2027. À terme, le site
de Fouillole ne comprendra plus aucun étudiant ni bâtiment en lien avec la
santé. Les travaux n’ont pas débuté et le projet a pris du retard compte tenu
d’un premier appel d’offre infructueux. En Martinique, le projet de «
pôle
santé » adossé au CHU ne comprenait pas de centre de simulation dans sa
configuration initiale, étant donné que le projet précédait de plusieurs
années la réforme du 2
ème
cycle des études de santé.
La réforme du 1
er
cycle des études de santé à l’UA a été l’occasion de
créer le parcours d’accès spécifique santé (PASS) ainsi que 10 licences accès
santé (LAS) en Martinique, neuf en Guadeloupe et une en Guyane
11
. Les LAS
sont accessibles aux étudiants poursuivant certaines licences. De plus, l’UA
fait partie des 15 universités dont le
numerus clausus
d’étudiants en PACES
ayant redoublé en 2020-
2021 en vue d’êtr
e admis en 2
ème
année en 2021-2022
a été annulé par le Conseil d’État
12
. Par ailleurs, l’articulation entre l’UFR
Santé et les composantes chargées de mettre en place les nouvelles LAS n’a
pas été satisfaisante la première année. Les composantes ont choisi de
positionner l’ensemble des modules des LAS au niveau L1. Compte tenu du
volume d’enseignement à suivre (60 ECTS pour une année de licence
classique et 24 ECTS pour la LAS), un fort taux d’échec a été enregistré pour
la première année de mise en œuvre de
la réforme. À partir de la rentrée 2021-
2022, la coopération entre l’UFR Santé et les autres composantes s’est
fluidifiée de façon à échelonner la validation de chaque LAS sur les années
de licence. La progression des taux de réussite ne peut toutefois être vérifiée
car ils n’ont été transmis par l’UA que jusqu’en 2019. L’effectif exact dans
chaque LAS n’est pas non plus connu. Cet élément est pourtant essentiel pour
se prononcer sur la capacité de l’UA à contribuer à l’objectif de la réforme du
11
Conformément à l’article 1
er
de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à
l’organisation et à la transformation du système de santé, les voies d’accès aux
formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique ont été
modifiées afin de remplacer la première année commune aux études de santé (PACES)
par une pluralité de parcours : parcours spécifique avec accès santé (PASS), licences
accès santé (LAS) ainsi que les passerelles depuis les formations d’auxiliaire médical.
12
Conseil d’État
, 8 juillet 2021, n°452731.
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
25
1
er
cycle. Une coopération étroite est indispensable entre chaque composante
pour suivre et maximiser la réussite des étudiants en LAS.
La création du 2
nd
cycle des études de santé à l’UA à la rentrée 2023
est un projet d’importance. Évoqué pour la première fois lor
s des états
généraux de l’Outre
-mer de 2009, puis annoncé officiellement par la
ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2011, il a été
plusieurs fois reporté par manque de personnels hospitalo-universitaires,
jusqu’à une nouvelle annonce
officielle le 17 mars 2022. Ce 2
nd
cycle vise
à remédier à la faible densité en professionnels de santé sur le territoire et
à anticiper l’évolution de la demande de soins. Il a pour objectif de former
des médecins dans les départements antillais et guyanais en offrant un
cursus complet de la première année à la fin de l’internat.
Toutefois, l’internat dans les CHU des Antilles est peu attractif et ne
favorise pas l’installation définitive de ses anciens internes. Si l’on se base
sur les choix des étudiant
s à l’issue des ECN sur la période 2010
-2022,
l’internat de Guadeloupe
-Martinique est choisi à 40 % par des étudiants
classés au-delà de la 6 000ème place pour une moyenne nationale à 26 %.
À l’issue de l’internat, seuls 47
% des internes ayant obtenu leur diplôme
dans les Antilles s’inscrivent pour exercer sur le territoire (moyenne 2012
-
2022). Cette proportion est d’autant plus préoccupante qu’elle est la plus
faible de tous les internats et qu’elle est en baisse de six points depuis 2012.
Les médecins d
iplômés dans l’hexagone et qui s’installent aux
Antilles peuvent à l’inverse être davantage susceptibles d’y exercer au
moins temporairement. Par ailleurs, les EDN et ECOS qui succèdent aux
ECN restent un couperet dans les études de médecine, à l’issue des
quelles
un étudiant de l’UA souhaitant effectuer son internat aux Antilles peut être
contraint de quitter le territoire si son vœu n’est pas satisfait. Ce risque
existe d’autant plus que peu d’étudiants ayant débuté leurs études de santé
à l’UA obtiennent l’internat aux Antilles, soit par classement insuffisant,
soit par manifestation d’autres préférences. Cela réduit le vivier potentiel
de médecins souhaitant se sédentariser. En effet, 37 % des étudiants ayant
fait leur PACES à l’UA (années 2011
-2012 à 2014-2015) ont réalisé leur
internat aux Antilles, soit 88 étudiants sur 239. Ainsi, seulement 19 % des
internes sur la période 2016-2017 à 2019-
2020 étaient des anciens de l’UA.
Afin de maximiser les chances d’appariement entre les étudiants en
2
ème
cycle de
l’UA et l’internat aux Antilles, l’UFR Santé déploie plusieurs
outils. Le taux d’encadrement en stage étant très peu favorable, compte
tenu du manque d’hospitalo
-universitaires (HU), 70 praticiens hospitaliers
(PH) ont été identifiés pour participer à l’e
ncadrement des stagiaires. Le
CHUM délivre un diplôme universitaire de pédagogie et de simulation en
santé afin d’améliorer la qualité de l’encadrement en stage. Enfin, l’UFR
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26
Santé souhaite maximiser l’obtention de points de valorisation, qui
comptent pour 15 % de la note finale aux EDN/ECOS, en offrant à tous les
étudiants en 2
ème
cycle, la possibilité de réaliser un semestre d’échange
Erasmus+, d’obtenir un master de recherche ou encore de réaliser un stage
dans un autre CHU. Sur ce dernier point, l’UA me
t à profit ses anciennes
conventions qui organisaient l’arrivée des étudiants de l’UA ayant achevé
leur premier cycle dans des facultés de médecine de l’hexagone (Paris
-
Saclay et Bordeaux par exemple).
Ainsi, la Cour invite toutes les parties prenantes à évaluer la mise en
place du 2
ème
cycle (taux de réussite des étudiants, impact final sur
l’amélioration de la démographie médicale aux Antilles,
etc.).
F -
Une action internationale sans résultats probants
en dépit des ambitions affichées et du potentiel
de coopération avec les universités caribéennes
L’UA accueille peu d’étudiants en mobilité de crédits (Erasmus+
principalement) et encore moins d’étudiants en mobilité de diplôme. La
proportion d’étudiants étrangers oscille entre 4
% et 7 %, nettement en-
deçà de la moyenne nationale de 10 %. En particulier, les étudiants en
échange via Erasmus+ sont peu nombreux. Sans que des données précises
aient pu être fournies par l’UA, ces étudiants sont majoritairement
originaires d’Allemagne et de Belgique. La majorité
des étudiants en
mobilité de diplôme est inscrite dans un master de français langue étrangère
(FLE), dispensé au sein de l’UFR LSH de Martinique (
cf. tableau n° 4).
Depuis que le décret du 19 avril 2019 relatif aux modalités
d’exonération des droits d’in
scription des étudiants étrangers offre la
possibilité de différencier les droits d’inscription, l’UA a pour politique
constante d’aligner les droits d’inscription des étudiants étrangers hors
-UE
sur les tarifs acquittés par les étudiants français
13
. Cette
position ne s’est
pas accompagnée d’une réflexion approfondie sur la stratégie d’attractivité
internationale de l’établissement, alors que la diminution à terme des
effectifs nationaux pourrait être en partie compensée par l’accueil
d’étudiants étrangers e
n mobilité de crédits ou de diplômes.
13
Délibérations du CA 2019-030 du 23 mai 2019, 2020-034 du 10 mars 2020, 2021-06
du 8 janvier 2021, 2022-41 du 5 juillet 2022.
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MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
27
Tableau n° 4 :
étudiants étrangers en mobilité entre 2016 et 2024
2016-2017
2020-2021
2023-2024
Étudiants étrangers inscrit
dans un cursus de l’UA
534 (4 %)
882 (6 %)
1 130 (8,7 %)
Étudiants étrangers
en mobilité d’échange
75 (0,6 %)
65 (0,4 %)
83 (0,6 %)
Source
: Cour des comptes d’après l’Université des Antilles
Les orientations évoquées par l’UA, visant à renforcer son
rayonnement dans les Caraïbes, ne s’appuient pas sur un plan d’action
validé par les instances de gouvernance. Ainsi, elle se borne à évoquer,
sans priorisation, sa participation aux salons Campus France, son
appartenance à des réseaux internationaux ou encore le projet d’Erasmus
de la Caraïbe. Sur ce dernier point, la possibilité de recourir aux
financements « Erasmus+ / Mobilité internationale de crédits » (MIC),
pour obtenir des financements pour des échanges avec des universités non-
européennes, n’a jamais été exploitée.
II -
Une recherche peu visible
et manquant de perspectives
La production de recherche est limitée et repose sur des unités de
recherche morcelées et sans rayonnement suffisant (A). Même si la
capacité de l’université à répondre aux appels à projet
est encore limité, de
nombreux progrès ont été accomplis au cours des dernières années (B). Les
relations entre l’université et les autres partenaires de recherche doivent se
renforcer (C). Enfin, la politique
doctorale de l’établissement demeure
encore à consolider (D).
A -
Une production limitée reposant sur des unités
de recherche morcelées et sans rayonnement suffisant
L’UA comporte 15 unités de recherche, sept unités mixtes de
recherche (UMR) et trois structures fédératives. L’Université de
Montpellier est tutelle de trois des sept UMR et l’Université de Guyane de
deu
x d’entre elles. Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
est cotutelle de quatre UMR sur sept, l’Institut national de la santé et de la
recherche médicale (Inserm) de deux d’entre elles et l’Institut de recherche
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COUR DES COMPTES
28
pour le développement (IRD),
le Cirad et l’Institut national de recherche
pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inraé) de seulement
une pour chacun de ces organismes. Des équipements de pointe sont
présents en microscopie électronique
; l’unité de recherche COVACHIM
dispose d’un plateau de biochimie
; un laboratoire d’analyses pathogènes
de classe « P3 » et un calculateur intensif sont également recensés.
La recherche est morcelée, avec des effectifs variant de deux
enseignants-chercheurs (unité CELTEC
14
dans le domaine de la santé
publique, épidémiologie, recherche clinique) à plus de trente (UMR LC2S,
unités de recherche CRILLASH et LAMIA)
15
. La plupart de ces unités ne
disposent pas de la masse critique permettant de distinguer leur production
au sein de la recherche nationale (cf. annexe n° 1).
Le volume même de la production scientifique (cf. annexe n° 2) est
à prendre avec précaution car sa mesure est fondée sur les déclarations des
enseignants-
chercheurs, en l’absence d’un SI fonctionnel. La production
scientifique dans la période sous revue montre que toutes les unités de
recherche de l’UA y contribuent, mais avec des disparités. Selon le Hcéres,
80 % des enseignants-chercheurs publient régulièrement.
La valorisation économique des travaux des unités de recherche
r
este assez faible, à l’exception de l’unité GTSI (groupe de technologie des
surfaces et interfaces), qui développe une activité contractuelle importante
avec des entreprises nationales (Phytobokaz, Biometal Guadeloupe,
RevAntilles, Sara, EDF ENR, Sevar SEVN) et internationales (Condat,
Pyrovac). Sept brevets ont été déposés par cette unité. L’unité GM
(Géosciences-
Montpellier) développe d’importantes coopérations avec des
entreprises. Cependant, l’UA n’emploie que 5
% de l’effectif de cette unité.
La compar
aison avec la principale université de l’arc antillais,
l’University of the West Indies
(UWI) est peu favorable à l’UA. Compte
tenu de sa taille, l’UWI dispose d’une grande visibilité et constitue la
référence principale de la région en matière d’enseignem
ent supérieur
16
.
Elle est la seule université caribéenne présente dans le classement mondial
14
Cancer et environnement localisation tête et cou.
15
Laboratoire caribéen de sciences sociales, Centre de recherches interdisciplinaires en
lettres, langues, arts et sciences humaines, Laboratoire de mathématiques informatiques
et applications.
16
Créée en 1948 sous la forme d’un collège de l’
University of London
situé à Mona en
Jamaïque, puis devenue université indépendante dotée d’un hôpital à partir de 1962,
l’
UWI
est une université multinationale disposant de campus en Jamaïque (
Mona
campus, 1948), à Trinité-et-Tobago (
Saint Augustine
campus, 1960), à la Barbade
(
Cave Hill
campus, 1963), à Antigua-et-Barbuda (
Five Islands campus
, 2019) et d’un
campus en ligne. Elle compte 50 000 étudiants.
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
29
réalisé par le
Times Higher Education
(fourchette 501-600 depuis 2019).
Plus spécifiquement, ce classement place l’UWI dans les vingt premières
universités latino-américaines et au premier rang dans les Caraïbes.
B -
Une capacité de réponse aux appels à projets limitée
mais en progression
Afin d’accroître sa production scientifique et dégager des ressources
propres par une meilleure réussite aux appels à projets nationaux et
européens, l’UA doit renforcer son soutien aux laboratoires de recherche,
en rendant de nouveau opérationnelle une structure d’appui au montage et
au suivi de projets. Le bureau de la recherche scientifique, qui ne compte
qu’un agent, n’est pas en mesure d’apporter ce soutien, n’étant pas identifié
comme point de passage systématique par les porteurs de projet.
Un effort notable de l’UA a été couronné de succès en 2022 et 2023,
en devenant lauréate d’un appel à projet (AAP) de l’agence nationale de
recherche (ANR) important intitulé « Accélération des stratégies de
développement des établissements d’enseignement supérieur et de
recherche
» (ASDESR). Ce financement de 1,23 M€ sur sept ans doit aider
à reconstituer l’ingénierie de recherche pour répondr
e aux appels à projets
ultérieurs, dont une dizaine serait identifiée par l’UA.
L’UA a par ailleurs répondu avec succès à des appels à projets de
l’ANR orientés sur les enjeux locaux, tels que l’AAP «
Sargassum », lancé
en février 2019 avec plusieurs structures régionales et internationales, pour
répondre à la problématique d’échouement des sargasses, ou l’AAP de
recherche conjoint « Chlordécone », lancé en mars 2022.
C -
Une relation avec les partenaires dans le cadre
d’un consortium à réinventer
En matière de recherche, la relation avec les collectivités
territoriales se concentre sur les thématiques d’intérêt local. La région
Guadeloupe se signale par sa coopération depuis dix ans avec l’ANR en
matière d’évaluation des projets financés par les fonds européen
s, dont la
gestion relève de la région. Plus récemment, l’appel à projet de l’ANR
relatif aux sargasses a associé très en amont la région Guadeloupe, la
collectivité territoriale de Martinique (CTM) et la collectivité territoriale
de Guyane (CTG) au cofinancement. Une coopération similaire est à
relever sur la pollution au chlordécone. La CTM porte un projet de centre
territorial d’exploration de la biodiversité.
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COUR DES COMPTES
30
Le potentiel de coopération local est élevé, compte tenu de la
présence de plusieurs partenaires majeurs :
-
Le Cirad Antilles-Guyane, dont les priorités de recherche portent sur
la transition agroécologique et la santé animale, végétale et humaine,
compte 80 agents. Il dispose d’une ingénierie de projet performante
associant les cadres scientifiques et les agents administratifs et peut
solliciter la cellule d’accompagnement du siège de Montpellier pour
les montages plus complexes.
-
L’Ifremer dispose d’une station de 19 agents en Martinique, dont les
priorités de recherche portent sur les ressources halieutiques,
l’aquaculture et l’environnement. Si l’ingénierie de recherche est
moins développée qu’au Cirad, l’Ifremer parvient toutefois à accéder
à des ressources variées.
-
Le BRGM est implanté en Guadeloupe et en Martinique. Son antenne
de Martinique compte neuf agents. Les deux antennes priorisent
l’étude des ressources en eau, des risques naturels (glissements de
terrains, séismes, érosion et submersion du littoral), des pollutions
(chlordécone,
sargasses)
et
de
la
transition
écologique
(développement du potentiel géothermal). Le BRGM coopère avec
l’Observatoire
volcanologique
de
la
Montagne
Pelée
pour
cartographier sa structure interne. L’ingénierie de projet y est bien
présente et peut bénéficier de la cellule d’appui du siège à Orléans
pour les projets complexes.
-
Le pôle agro-ressources de la Martinique (Parm), association financée
principalement par la CTM, comprend 23
agents. Il s’agit de la seule
structure labellisée centre de ressources technologiques (CRT) par le
MESR parmi les territoires ultra-marins. La priorité du Parm est de
développer la connaissance des ressources agrologiques du territoire
afin d’augmenter la valeur ajoutée de l’agriculture locale.
Un contrat de site 2017-
2021 a été signé entre l’UA et le MESR le
3 juillet 2018, en association avec les organismes nationaux de recherche
présents aux Antilles : CNRS, Inserm, Inraé, Cirad et IRD, avec pour
objectifs d’encourager notamment des projets de recherche dans les deux
pôles et d’améliorer de l’UA grâce aux collaborations avec les pa
rtenaires
extérieurs. Depuis octobre 2019, le « Consortium de coordination de la
Politique Antilles Recherche et Innovation » (Pari) est censé fédérer la
recherche produite en Guadeloupe et en Martinique en rassemblant
28 partenaires
17
chargés de la formati
on, de la recherche, de l’innovation,
17
Autour de l’UA, les organismes de recherche implantés sur le site, les CHU, les
académies de Guadeloupe et de Martinique, le
c
onseil régional de Guadeloupe, la CTM,
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
31
ainsi que les entreprises. Ce
consortium
, dont l
’
initiative et l
’
animation
incombent à l
’
UA, a proposé un plan stratégique
à
dix ans structur
é
autour
de six pôles articulés autour de trois axes majeurs : le développement
durable et la biodiversité (i), la santé, le sport et l’environnement
tropical (ii) et les territoires et les sociétés (iii). Aucun partenariat ni projet
substantiel n’a émergé du Pari, en dépit de l’existence d’animateurs pour
chaque thématique. L’UA
n’a pas fourni de bilan d’activité de ce
consortium
. Les procès-verbaux de son comité stratégique ne font
apparaître aucune action menée à leur terme. Le dispositif souffre de
l’absence de moyens communs d’appui à la conception et au dépôt de
projets, les
établissements étant plutôt bien dotés, à l’inverse de l’UA.
Constatant l’absence de résultats du
consortium
, le président de l’UA
a proposé de réduire le nombre de pôles thématiques et d’instaurer un binôme
« scientifique-administratif » pour animer et favoriser la communication.
Lors du dialogue contractuel de site au MESR tenu en mai 2022, les
organismes de recherche ont souhaité davantage de collaborations avec l’UA.
L’UA a enfin été récemment sensibilisée par les délégués régionaux
académiques à la
recherche et à l’innovation (Drari), placés auprès des
recteurs et des préfets, pour susciter une mobilisation autour de l’AAP de
l’ANR «
Excellence sous toutes ses formes »
18
. Deux universités ultra-
marines ont déjà été lauréates de cet appel aux effets potentiellement
transformateurs (Guyane et Polynésie française), compte tenu du montant
attribué (10 M€ chacune pour une période de six à 10 ans).
Si la conception d’une politique de site à l’échelle des Antilles reste
une mission de long terme, une dynamique reposant sur des associations
souples de partenaires et un partage large de l’information apporteraient de
premiers progrès, en veillant à construire les partenariats en lien avec les
programmations pluriannuelles des fonds européens et les AAP de l’ANR
.
D -
Une politique doctorale à consolider
La progression sensible de 62,5 % en six ans du nombre de thèses
soutenues par les doctorants ne doit pas masquer la diminution nette de leur
effectif de près de 24,5 %. Le ratio de soutenance est relevé à partir de la rentrée
2020-2021 au-delà des 15
%. S’agissant des modes de financements des
doctorants, les allocations doctorales des deux collectivités territoriales sont
les organismes de transfert et d’innovation du site, les organisations professionnelles
,
les chambres consulaires de Guadeloupe et de Martinique,
etc
.
18
Cet AAP, dont la 3
ème
vague de lauréats a été dévoilée en 2022, vise à accompagner
les établissements d’enseignement supérieur et de recherche
.
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COUR DES COMPTES
32
indispensables mais la plupart des doctorants doivent travailler en parallèle, ce
qui rallonge l
es durées des thèses et provoque un certain nombre d’échecs.
Depuis six ans, deux écoles doctorales sont accréditées (ED588 -
« le milieu insulaire tropical
–
dynamique de développement, sociétés
patrimoine, culture dans l’espace Caraïbes
-Amériques » et ED589 - « le
milieu insulaire tropical à risques
–
protection, valorisation, santé et
développement »). En 2020-2021, 257 doctorants y étaient inscrits. La
présidence actuelle de l’UA ambitionne de revenir à la situation antérieure
d’école doctorale unique
19
, dans le but d’améliorer la formation doctorale
et l’insertion professionnelle des docteurs, et d’établir un parcours vers
l’inscription à l’habilitation à diriger des recherches (HDR). Elle s’est
engagée à faire adopter son règlement intérieur et a installé son conseil.
19
ED636
–
« Dynamique des environnements dans l’espace Caraïbes
-Amériques »
.
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UNE OFFRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE IMPORTANTE
MAIS DONT LES RÉSULTATS SONT ENCORE À CONSOLIDER
33
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Bien que présentant une offre importante en matière de formation et
de recherche, les résultats obtenus par l’UA (taux de réussite des étudiants,
insertion professionnelle, performance scientifique, coordination des
acteurs présents, pilotage de la formation et de la recherche, etc.)
apparaissent largement perfectibles et doivent être consolidés.
La Cour formule en particulier les recommandations suivantes :
1.
c
oncentrer l’offre de formation sur les filières structurantes, avec un
recours plus important aux organismes de recherche présents sur
place (Université des Antilles ; rentrée 2025) ;
2.
remobiliser les partenariats dans le cadre du
consortium
Pari et
mutualiser davantage les moyens existants pour le montage des
projets, notamment avec les organismes de recherche (Université des
Antilles ; mi-2025).
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Chapitre II
Une gestion de l’université qui présente
de nombreuses faiblesses
et qui doit être renforcée
L’Université des Antilles relève de dispositions dérogatoires
prenant en compte ces spécificités (I).
Même si des progrès ont été
accomplis au cours des dernières années, ils doivent se poursuivre,
notamment en ce qui concerne la gestion financière et comptable (II), la
commande publique (III), les ressources humaines (IV), l’immobilier (V)
et les systèmes d’information (VI).
I -
Un cadre juridique dérogatoire
L’organisation de l’Université des Antilles est fragilisée par des
ambiguïtés sur l’autonomie des pôles (A).
Les critères de répartition des
crédits et des emplois entre les pôles apparaissent perfectibles (B). Enfin,
la présidence de
l’établissement a pro
gressivement acquis un rôle plus
important au sein de la gouvernance (C).
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COUR DES COMPTES
36
A -
Une organisation fragilisée par des ambiguïtés
sur l’autonomie des pôles
1 -
Une création inédite et une gouvernance originale
Les dispositions applicables à l’UA, uniques dans le paysa
ge des
EPSCP, en font un « laboratoire juridique »
20
, parce qu’elles sont de niveau
législatif
21
, et créent deux pôles distincts au sein d’une université unique.
Seule université créée par la loi, les dispositions qui lui sont applicables
sont spécifiques, même si certaines font référence à des dispositions du
droit commun
22
. Les dispositions législatives applicables à l’UA sont
issues, dans leur version en vigueur, de l’ordonnance n°
2014-806 du
17 juillet 2014, qui a entériné la création de l’UA sous sa form
e actuelle.
Cette ordonnance a été ratifiée par la loi n° 2015-737 du 25 juin 2015, qui
a séparé l’UA de celle de la Guyane. Elles ont ensuite été modifiées par la
loi de programmation de la recherche du 20 décembre 2020.
Ces modifications ont rompu avec
l’objectif d’alternance des pôles
à la présidence, pour y introduire un mode d’élection, dit «
ticket à trois »
du président de l’UA et des deux VP de pôle. Cette évolution récente
correspond à un objectif d’apaiser la gouvernance, en suscitant une
cohésio
n entre le président et les VP. L’ordonnance du 5 mai 2021 portant
actualisation et adaptation des dispositions du code de l’éducation relatives
à l’outre
-
mer a codifié les dispositions applicables à l’UA aux articles
actuels L. 771-9 à L. 771-17 du code d
e l’éducation. Au niveau de l’UA,
deux textes, auxquels les articles législatifs renvoient, ont été adoptés : les
statuts et le règlement intérieur, les derniers étant respectivement des
5 juillet 2022 et 24 juin 2021.
Au niveau institutionnel, l’organisat
ion bipolaire conduit à
dédoubler les services et commissions en plus de ceux du niveau central.
La gestion de l’ensemble est de ce fait plus compliquée et nécessite un
dialogue constant au sein de l’établissement. Les attributions des
responsables comme celles des conseils et commissions comportent des
aspects dérogatoires au droit commun afin de prendre en compte la
structure polaire de l’université.
20
Termes employés dans
le
contrat de site 2017-
2021
signé le 3 juillet 2018.
21
Selon l’article L.
711-
4 du code de l’éducation
: «
Les EPSCP sont créés par décret
après avis du CNESER
».
22
Articles L. 771-1 à 771-
6 du code de l’éducation.
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UNE GESTION DE L’UNI
VERSITÉ QUI PRÉSENTE
DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
37
Les dispositions spécifiques de l’UA organisent la gouvernance
autour d’un président d’université, assisté de VP, dont le nombre n’est plus
limité à sept depuis 2021
23
, et de deux VP de pôle, qui sont chacun assistés
de VP chargés de la vie étudiante, des commissions de la formation et de
la vie universitaire (CFVU) et de la recherche (CR). Élu pour un mandat
de cinq ans non-renouvelable, le président a un rôle qui le singularise des
autres présidents d’université puisqu’il est qualifié d’«
arbitre en assurant
la cohésion et l’équilibre entre les deux pôles
», en concertation avec les
VP des pôles
24
. Les VP de pôle sont élus en même temps que le président,
la durée de leur mandat étant la même. Le VP de pôle doit avoir été choisi
par le candidat aux fonctions de président de l'université, pour chaque pôle
universitaire, parmi les représentants des enseignants-chercheurs et des
personnels assimilés. Le VP de pôle préside le conseil du pôle universitaire
régional. Il est ordonnateur des recettes et des dépenses du pôle.
Concernant les conseils et commissions, la loi dispose que « le
conseil d'administration par ses délibérations, le conseil académique par
ses délibérations et avis, et les conseils des deux pôles universitaires,
Guadeloupe et Martinique, par leurs délibérations et avis, assurent
l'administration de l'université des Antilles »
25
. Le CA
26
voit le nombre de
ses membres et sa composition fixés de façon dérogatoire. Il comprend
30 membres, dont 12 représentants des enseignants-chercheurs et des
personnels assimilés, 10 personnalités extérieures, quatre représentants des
étudiants et quatre représentants des Biatss. Tous ses membres sont élus ou
nommés pour cinq ans. Il exerce les compétences comme dans les autres
EPSCP, mais ses délibérations sont limitées en matière d’approbation des
accords et conventions pour des affaires intéressant les pôles, qui sont de
la compétence des conseils de pôle
27
. Il dispose en outre de compétences
particulières comme celle de répartir les emplois et les crédits par pôle
universitaire régional sur la base des effectifs étudiants, des enseignements
et de l’activité de recherche
de chaque pôle.
Le conseil académique (CAC) comporte, par dérogation à l'article
L.712-
4 du code de l’éducation, les membres de la CR et de la CVFU des
deux pôles universitaires. Il lui revient de désigner un VP de la CFVU et
un VP chargé de la vie étudiante au titre de chaque pôle. Si les CFVU et
CR dites « polaires » exercent les compétences de droit commun au niveau
de leurs pôles, le CAC est l’organe délibérant lorsque les deux pôles sont
23
Statuts du 27 février 2021.
24
Art. L. 771-
12 du code de l’éducation.
25
Article L.771-
9 du code de l’éducation.
26
Article Art. L. 771-11 et L. 771-
13 du code de l’éducation.
27
Article L. 771-
13 du code de l’éducation.
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COUR DES COMPTES
38
concernés pour délibérer sur des formations donnant lieu à un même
diplôme ou une décision de la CR d'un pôle relative à une structure de
recherche exerçant des activités dans les deux pôles.
Les conseils de pôle (CP) délibèrent et rendent des avis. Chaque CP
prépare et adopte un projet stratégique de pôle dont les moyens sont définis
avec l'université dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens,
approuve les accords et conventions pour les affaires intéressant le pôle
dans les conditions fixées par le règlement intérieur de l'université, répartit
les emplois et les crédits dans les composantes qu'il regroupe, établit le
rapport annuel d'activité du pôle présenté par le VP et le transmet au CA
de l'université, prépare le bilan social du pôle et le transmet au CA de l’UA.
2 -
Le principe de l’autonomie des pôles
Le pr
incipe de l’autonomie des pôles ne figure pas explicitement
dans les dispositions législatives de l’ordonnance de 2014. Le sens de ces
dispositions, tel qu’il ressort clairement des débats parlementaires, est de
respecter l’autonomie des pôles tout en maintenant la cohérence de l’UA.
Si les débats préparatoires à l’ordonnance de 2014 sont clairs, la lettre des
dispositions législatives est moins explicite dans la mesure où le terme
d’autonomie ne figure ni dans le texte de l’ordonnance, ni dans celui de la
loi de ratification. Dès lors, le principe d’autonomie des pôles, pourtant au
cœur de la création de l’UA, ne peut se déduire que de l’intention du
législateur exprimée sans ambiguïté dans les débats parlementaires. Une
concurrence entre président de l’uni
versité et vice-présidents des pôles
3 -
Les compétences concurrentes de la présidence de l’UA
et des deux vice-présidences de pôle
Certains articles législatifs portant sur l’UA comportent des
dispositions pouvant être considérées comme contradictoires et un rapport
d’information de l’Assemblée Nationale de 2015 les qualifie de
« difficilement compatibles »
28
. Ces dispositions ont des objets très
sensibles puisqu’elles concernent l’autorité sur les personnels, le pouvoir
budgétaire ou les responsabilités pour assurer la sécurité des personnels.
Les statuts et le règlement intérieur adoptés consécutivement à la loi par
l’UA entretiennent ces ambiguïtés au lieu de tenter d’en atténuer les effets.
28
Rapport d’information sur l’évaluation de la loi
n°2015-737 du 25 juin 2015 de
Danièle HENIN et Josette MANIN déposé par la commission des affaires culturelle et
de l’éducation de l’Assemblée nationale
le 22 janvier 2020.
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UNE GESTION DE L’UNI
VERSITÉ QUI PRÉSENTE
DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
39
Un premier exemple concerne le budget. Selon le 3° de l’article
L. 712-
2 du code de l’éducation auquel renvoie l’article L. 771
-12 du même
code, le président de l’UA «
est ordonnateur des recettes et des dépenses
de l'université
». Simultanément, l’article L.
713-9 du même code prévoit
que le VP désigné au titre de chaque pôle universitaire « est ordonnateur
des recettes et des dépenses du pôle ».
In fine
, ces dispositions sont reprises
par les statuts de l’UA de 2022.
Un second cas, particulièrement sensible, porte sur la sécurité des
personnels des pôles et des usagers.
Le VP de l’un des pôles avait décidé
de fermer l’accès à l’un des bâtiments pour des raisons de sécurité et refusé
de le rouvrir malgré la décision du président de l’UA. La section
disciplinaire de CAC de l’université Paris II Panthéon
-Assas compétente
a é
té saisie par le Conseil national de l’enseignement supérieur (Cneser) à
la suite de poursuites disciplinaires engagées en novembre 2020 par le
président de l’UA à l’encontre du VP de pôle, notamment pour
désobéissance hiérarchique
29
. La section disciplinaire a rejeté en décembre
2021 les poursuites dans leur intégralité, en invoquant le caractère
contradictoire des textes législatifs, des statuts de l’UA et de l’instruction
générale relative à la sécurité de l’UA. La section a considéré que «
le
présent litige illustre cette regrettable ambigüité des textes régissant la
répétition des compétences entre la présidence de l’UA et la vice
-
présidence du pôle […] et le risque extrême de conflits pouvant en résulter
dans un contexte de tensions exacerbées ».
4 -
Une situation déjà connue et signalée
En mai 2016, le Hcéres recommandait, « pour que ce système soit à
la fois viable et démocratique
», la mise en place d’un système définissant
nettement le partage de compétences entre la présidence et les pôles, et
établiss
ant clairement des principes de subsidiarité afin d’assurer
l’équilibre entre l’unité de l’UA et l’autonomie des pôles. En avril 2018,
l’IGESR
faisait
état
de
dysfonctionnements
nombreux,
relevait
l’insuffisance de dialogue entre la présidence et les pôles
et recommandait
à la présidence de mettre les pôles en situation d’exercer leurs
responsabilités. En 2019, la mission de médiation confiée par la ministre
de l’enseignement supérieur et de la recherche à M. François WEIL
s’appuyait
sur
les
mêmes
constats
de
sérieuses
difficultés
de
fonctionnement de l’UA, liés à des ambiguïtés juridiques problématiques
tant au niveau de la loi que des statuts. La mission de médiation préconisait
la création du « ticket à trois » qui a été instauré peu après en 2020.
29
Le VP a porté
plainte à l’encontre du président pour harcèlement moral en mai 2019.
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COUR DES COMPTES
40
En 20
20, le rapport d’évaluation de la loi du 25 juin 2015 de
l’assemblée nationale concluait que «
la lecture combinée des dispositions
des articles L. 781-2 et L. 781-3
30
du code de l’éducation, relatifs à
l’université des Antilles, avec celles des articles L.
712-2 et suivants,
relatifs à la gouvernance de droit commun des universités, met en évidence
de sérieux risques de conflits ». Il constatait un « fonctionnement
problématique, source de tensions fortes entre acteurs disposant de
pouvoirs » et « aussi des incidents répétés, parfois violents », « des
demandes de protection fonctionnelle et des dépôts de plaintes
» à l’origine
«
d’une situation extrêmement préoccupante sur le plan humain
». Ce
rapport préconisait la publication d’une circulaire par le MESR p
our
clarifier les rôles des acteurs ou bien de réviser l’ordonnance du
12 décembre 2018
31
« afin de permettre à UA de disposer du cadre
juridique lui donnant la possibilité de définir elle-
même, pour l’avenir,
l’organisation qui lui conviendra le mieux
». La réforme relative à
l’élection commune du président de l’université et des VP des pôles a
constitué un progrès pour la gouvernance de l’UA.
5 -
Les difficultés d’articulation des instances
Dans son bilan d’activité pour 2022, l’UA estime que la fréquence
de réunion de ses instances témoigne de la « vitalité de sa démocratie ».
Toutefois, les délais de convocation et de transmission des documents pour
ces réunions ne sont pas toujours tenus, en dépit de progrès dans leur
programmation et la construction d’ordr
es du jour conjoints entre instances
polaires. À ce titre, le bilan d’activité du pôle Guadeloupe pour l’année
2022 indique qu’il «
n’existe pas de document rassemblant de manière
écrite les process relatifs à la gestion administrative de l’ensemble des
services polaires. » Un diagnostic de certaines attributions polaires et des
décisions pouvant s’abstraire d’une validation en CA mériterait d’être
engagé collectivement pour fluidifier le fonctionnement des instances de
l’UA. Il devrait déboucher sur la réd
action de processus clairs et partagés.
30
Dispositions figurant aux actuels articles L. 771-12, L. 771-13 et L. 771-14.
31
Ordonnance n° 2008-
1131 du 12 décembre 2018 relative à l’expérimentation de
nouvelles formes de rapprochement, de regroupement ou de fusion des établissements
d’enseignement supérieur ou de recherche.
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41
B -
Des critères de répartition des emplois et des crédits
des pôles insatisfaisants
L’article L.
771-
13 du code de l’éducation, applicable à compter du
1
er
janvier 2022 prévoit que « le conseil d'administration exerce les
compétences définies au IV de l'article L. 712-3 sous réserve des dispositions
suivantes
: […] La répartition des emplois et crédits alloués à l'université est
opérée par pôle universitaire régional en prenant en compte, notamment, les
effectifs des étudiants, les enseignements dispensés et l'activité de recherche
de chaque pôle ». Il lui revient donc, sur proposition du président, de répartir
« par pôles universitaires » les emplois et créd
its alloués à l’université,
laissant ainsi la répartition des moyens entre composantes à la responsabilité
des pôles. La loi cite trois critères (effectifs des étudiants, enseignements
dispensés et activité de recherche) devant être pris en compte dans la
répartition, mais laisse une marge de manœuvre à l’UA pour en déterminer
d’autres en «
fonction des besoins réels
» de chacun des pôles. L’UA ne s’est
pas saisie de cette possibilité d’adaptation. L’IGESR concluait en avril 2018
que « la question de la répartition de la masse salariale et des moyens entre
les pôles devra en particulier faire l’objet d’un travail d’audit approfondi sur
lequel l’appui de l’IGAENR et du MESR pourrait être sollicité
».
Une clé de répartition avait été adoptée par le CA du 24 avril 2018,
fondée sur les trois critères mentionnés. Pour les prendre en compte, le président
indiquait que les calculs se seraient fondés sur une pondération liée au coût par
étudiant selon les domaines disciplinaires et un facteur relatif à la qualité des
enseignants-chercheurs produisant ou non, inspirés du modèle SYMPA
32
d’allocation des moyens aux universités par le MESR. Cette clé avait conduit à
doter le pôle Martinique de près de 34 % des moyens hors masse salariale et le
pôle Guadeloupe de 66 %, au lieu des taux de 40 % et 60 % appliqués
antérieurement. Ces modalités de cette répartition sont sources de tensions entre
les pôles eux-
mêmes ainsi qu’entre les pôles et la présidence. Compte tenu de
la baisse de la population des jeunes beaucoup plus forte
en Martinique qu’en
Guadeloupe, le déséquilibre entre les dotations ne peut que s’accentuer.
Sauf afflux d’étudiants hexagonaux ou étrangers ou adjonction de
nouveaux critères liés par exemple aux nécessités de rénovation de
bâtiments, les proportions respectives des crédits et emplois risquent de
diverger et de fragiliser l’unité de l’UA. En tout état de cause, la situation
n’est pas satisfaisante dans la mesure où la liste de critères objectifs de la
loi, volontairement limitée pour permettre à l’UA de l’adapter aux besoins
réels des pôles pouvant varier tous les ans, n’a pas été enrichie.
32
Système de répartition des moyens à la performance et à l'activité.
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COUR DES COMPTES
42
C -
Un accroissement des compétences de la présidence
Les statuts de l’UA et le règlement intérieur évoluent dans le sens
d’une réduction de l’autonomie des pôles, à partir
de leur modification en
2021, à rebours de l’intention du législateur, des recommandations des
rapports précités et des orientations du contrat de site 2017-2021.
Les statuts de 2016 fixaient quatre principes
: unité de l’université,
autonomie des pôles, participation de chaque instance à la vie de
l’établissement
et équité entre les pôles. Les statuts de 2021 ont supprimé
les termes relatifs à l’autonomie des pôles, ainsi que les principes de
participation et d’équité. Ils ont en revanche introduit les pr
incipes de
mutualisation et de complémentarité entre les pôles. Les statuts de
2022 actuellement en vigueur sont globalement identiques à ceux de 2021.
Les statuts de 2021 renforcent les prérogatives des services
centraux, en ajoutant que le directeur des affaires financières (DAF) et le
directeur des ressources humaines (DRH) ont leur résidence administrative
à Pointe-à-
Pitre au siège de l’UA. Cette disposition était déjà présente dans
les statuts de 2016 pour le président, le directeur général des services
(DGS) et l’agent comptable. Par ailleurs, les statuts actuels limitent le droit
de participation et les possibilités dialogue entre la présidence, les pôles et
les services. Ils suppriment la possibilité pour les VP de pôle et le VP
étudiant d’être invit
és par le président au bureau, la parité des pôles au sein
du bureau de président, la participation avec voix consultative du DAF et
du DRH au CA et autres instances de l’UA et limitent à un le nombre de
questions diverses qu’un membre du CA peut soulever
en séance.
Les statuts de 2021 réduisent le pouvoir des pôles et accroissent ceux
dévolus à la présidence. Ils suppriment les dispositions prévoyant que le
VP de pôle est l’interlocuteur privilégié du président pour les questions
concernant le pôle, l’avis
conjoint du DGS et du VP de pôle préalable à la
nomination par le président d’un DGS adjoint exerçant les fonctions de
responsable administratif et financier de pôle, la possibilité pour le VP de
pôle de nommer des « chargés de missions » et celle du CP d
’émettre un
avis sur le contenu. Enfin, les dispositions relatives aux accords et
conventions transfèrent l’essentiel de la compétence initialement confiée
aux CP et à leurs VP au CA et au président.
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43
II -
La gestion financière et comptable
Le contrôle des rectorats de Guadeloupe et de Martinique est à
renforcer afin de remédier aux carences de la gestion budgétaire (A). La
procédure budgétaire de l’Université des Antilles est insuffisamment
formalisée et transparente (B). Par ailleurs, l’analyse budgétaire est
insuffisante (C)
, la qualité comptable n’est pas assurée (D) tandis que le
contrôle des régies est à renforcer (E).
A -
Un contrôle des rectorats à renforcer pour remédier
aux carences de la gestion budgétaire
La mission de contrôle budgétaire et de la légalité
de l’UA, assurée
par le rectorat de Guadeloupe, porte sur la soutenabilité budgétaire, la
sincérité des dépenses et des recettes, le respect du caractère limitatif de la
masse salariale et des emplois, et la situation du fonds de roulement. Par
exception, le recteur de Martinique assure le contrôle des emplois et de la
masse salariale. Le rectorat constate notamment un défaut de suivi précis
de la situation budgétaire et comptable de l’UA, une mesure insuffisante
des emplois non-consommés financés par la S
CSP, l’absence de suivi des
crédits faisant l’objet d’opérations pluriannuelles, en particulier pour les
conventions de recherche, et la nécessité d’une analyse plus fiable de la
trésorerie fléchée et du fonds de roulement réellement disponible.
Les liens
entre le rectorat et l’UA ont été renforcés. Ce dialogue
prend la forme de « pré-
conseils d’administration
» pour examiner les
projets de budgets et les comptes financiers, mais ceux-ci sont rarement
transmis dans des délais permettant une analyse de nature à ajuster les
choix budgétaires de l’université.
Pour la troisième année consécutive, le compte financier était
présenté selon le standard de la gestion budgétaire et comptable publique
(GBCP)
33
. Le SI comptable, qui repose sur la suite logicielle Cocktail, est
toujours en cours d’adaptation pour prendre en compte les caractéristiques
de la comptabilité budgétaire et le format des annexes budgétaires. L’UA
a demandé à acquérir le logiciel SIFAC auprès de l’AMUE dans le cadre
du dialogue stratégique et de g
estion (DSG) avec le MESR, ce qui s’est
traduit par le versement d’une subvention pour l’acquisition du logiciel et
son adaptation. L’UA est encore dans une phase d’appropriation de la
GBCP par rapport à la comptabilité patrimoniale mise en œuvre
33
Décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
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44
historiquement. Lors des réunions avec le rectorat consacrées au budget
initial (BI) 2022, l’UA a été en difficulté pour renseigner les tableaux des
opérations pluriannuelles. En effet, jusqu’en 2022, il n’a présenté que les
annexes budgétaires n°1 à 6 lors du vote du BI. Les tableaux n°7 (plan de
trésorerie), n°8 (recettes fléchées), n°9 et n°10 (opérations pluriannuelles)
et n°11 (moyens des UMR) sont présentés aux administrateurs en séance,
mais non déposés sur l’Infocentre de la DGFiP.
La DRFiP ne s’est pas manifestée auprès de l’UA pour signaler
l’absence du dépôt de documents complets, ce qui conduit à s’interroger
sur la qualité de son contrôle et des vérifications effectuées. Cependant,
pour la première fois, le tableau de synthèse budgétaire et comptable a été
produit. En outre, le DSG a amené l’UA à se projeter sur trois ans et à
émettre des hypothèses sur sa trajectoire pluriannuelle financière et de
masse salariale. Enfin, les documents du BI 2023, ont été présentés dans
les délais. Cette démarche doit être encouragée et confortée.
B -
Une procédure budgétaire insuffisamment
formalisée et transparente
En 2022-
2023, l’UA n’a pas conclu de contrats d’objectifs, de
moyens et de performance (Comp) avec l’État, faute, selon l’UA, de
disposer de bases de données fiabilisées « notamment en RH (calcul du
GVT [pour] assurer un pilotage budgétaire de performance financière
(utilisation des ressources propres), mais aussi sur le plan immobilier pour
l’entretien du bâti (une utilisation optimale de ses locaux) et sa
soutenabilité dans le temps
». L’UA a en revanche poursuivi le DSG
entamé en 2019 avec le MESR, même si les rectorats estiment que l’UA ne
dispose pas de la maturité pour rejoindre le mouvement général de
contractualisation lancé par le ministère en 2022.
Si le b
udget est bien élaboré sous l’autorité du président, les procès
-
verbaux des CA sont lacunaires. Les rectorats précisent qu’au «
vu de la
technicité des documents transmis et présentés dans leur globalité, cela
pourrait expliquer le peu d’échanges et de questions qu’il peut en
découler. » Ils ajoutent que «
l’UA a présenté pour la première fois, un
document de « dialogue budgétaire
» pour l’exercice 2024, validé en
séance du 31 mai 2023
». Toutefois, elle n’a pas transmis de délibération
actant la tenue d’un
débat budgétaire, ce qui contrevient à l’obligation
posée par l’article R. 719
-
64 du code de l’éducation. L’UA se caractérise
par une qualité insuffisante de sa prévision budgétaire, qui impose des
ajustements significatifs, jusqu’en fin d’exercice. Le ca
lendrier de la
procédure budgétaire, tardif et resserré dans le temps, explique cette
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DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
45
budgétisation ajustée plusieurs fois en cours d’exercice. En effet, il débute
en septembre de l’année N
-
1 et s’achève en décembre de la même année
(phase dite du dialogue de gestion). De plus, la difficulté à recenser
l’intégralité des engagements pluriannuels compromet la sincérité des
prévisions de recettes. En conséquence, l’UA adopte des prévisions de
dépenses très prudentes, qui privent les pôles et leurs composantes
d’une
visibilité sur leurs ressources et les forcent à attendre les ajustements du
budget rectificatif (BR) pour couvrir leurs dépenses incompressibles. De
2017 à 2022, l’UA a recouru de façon quasi
-systématique à la fongibilité
asymétrique entre titres de dépenses afin de couvrir des dépenses sous-
estimées et pourtant prévisibles. Ainsi, en 2019, dans le BR n°2, il est
écrit : « pour optimiser au mieux les dépenses, et abaisser quelque peu la
tension sur la masse salariale, nous avons décidé cette année de baisser le
montant des primes et du CIA
34
, puis d’aborder la question des heures
complémentaires. […] Le montant des heures complémentaires sont
inférieurs à 2018, mais toujours supérieurs au maximum annuel voté
précédemment en CA
». L’UA a donc préféré ré
duire les primes des
personnels
Biatss,
plutôt
que
d’agir
sur
le
volume
d’heures
complémentaires des enseignants et enseignants-chercheurs.
Il est surprenant qu’avant de faire ce choix, l’UA n’ait pas cherché
à recenser l’ensemble de ses recettes. Pourtant, l’analyse des comptes de
classe 4 fait ressortir que le solde de la taxe d’apprentissage (TA) s’élevait
au 31 décembre 2022 à 801 320
€. Alors que la TA est un prélèvement
obligatoire soumis au principe de l’annualité, cette règle, ainsi que le titrage
c
orrect de la recette, n’ont jamais été respectés depuis 2017, le solde du
compte n’ayant jamais été ramené à zéro depuis 2017. Ainsi, le pôle
Martinique n’a reçu que 12
099 € de TA en 2021 pour l’IUT alors que les
formations qui y sont dispensées génèrent beaucoup de recettes liées à cette
taxe. L’UA a indiqué ne pas être en mesure de préciser à quelle formation
rattacher les versements de TA, notamment parce que les employeurs qui
s’acquittent de cette taxe ne l’affectent pas à une formation précise. Le
comptable, qui prend en charge les titres de recettes, informe pourtant
chaque année les composantes de la nécessité de titrer cette recette. Cette
sensibilisation n’a produit aucun résultat car les composantes ont indiqué
ne pas connaître le montant de la T
A qui leur est affectée. L’UA a publié
la liste des formations éligibles à la collecte de TA et a transmis une
procédure de mise en œuvre de gestion de ces crédits. En tout état de cause,
elle doit solder son compte d’attente de la TA de près de 0,8 M€.
34
Complément indemnitaire annuel
.
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46
L’UA a provisionné ses titres de recettes de l’année N en N+1, y
compris les titres des collectivités territoriales et du MESR. Le comptable,
sollicité sur ce point, a listé les justifications présentées en 2022. Il est
étonnant que l’UA ait comptabilisé un
titre de collectivité publique en
admission en non-
valeur (ANV), alors qu’une inscription en mandatement
d’office aurait sans aucun doute permis de récupérer la somme. La
technique de budgétisation dans le cadre de la GBCP n’est pas maitrisée.
Les pratiques actuelles pourraient progresser en renforçant le suivi des
recettes et en budgétisant les dépenses sur la base d’estimations réalistes.
La DGS a transmis un « livret dialogue de gestion » élaboré en 2023 qui
présente « les grands principes budgétaires et
[…] détaille la procédure
appliquée au sein de l’UA
». Ce document mériterait de guider l’ensemble
de la procédure financière de l’UA à compter de 2023. L’UA entend mettre
en place, dès 2024, un pilotage budgétaire et financier, initier des réunions
avec les services financiers et informer la communauté et les financeurs.
Elle doit engager, sans délai, le recensement des opérations pluriannuelles
afin d’améliorer le recouvrement des recettes qu’elles devraient générer.
La répartition des budgets (hors dépenses de personnel et dotations
aux laboratoires) entre le siège et les deux pôles est l’un des éléments les
plus conflictuels. Le CA de l’université vote la répartition de cette fraction
de la SCSP, qui représente la principale recette globalisée des pôles, de
leurs composantes et des 23 unités de recherche. Cette répartition est fixée
par une délibération du CA du 1
er
décembre 2017
35
. Depuis 2018, la
répartition des crédits par composantes est votée par les instances polaires,
sur la base des crédits notifiés par le siège
36
. En pratique, la répartition
n’intervient que postérieurement à l’adoption du budget par le CA. Cette
situation illustre les conséquences de la complexité de la gouvernance et
de la désorganisation de la procédure budgétaire interne. Les crédits des
deux pôles ont été votés respectivement les 30 et 31 janvier 2023
37
. Pour
débuter l’exercice en l’absence de budget voté, le pôle Martinique a perçu
des avances de crédits de l’ordre d’un sixième de budget dès janvier. Cela
n’a toutefois pas été
le cas du pôle Guadeloupe. De ce fait, les composantes
de ce pôle étaient incapables d’exécuter leurs budgets et de fonctionner
correctement en début d’année. La gouvernance n’a pas anticipé la
situation pour que l’activité des composantes puisse débuter alors qu’elle
était financièrement stabilisée depuis novembre 2022.
35
Délibération n°2017-045.
36
Jusqu’en 2017, l’
UA présentait en CA la répartition des crédits par composante et les
soumettait au vote, ce qui facilitait l’information des administrateurs et de la
communauté, bien que la loi n’exige cette répartition qu’au niveau polaire.
37
Cette situation est liée à une mauvaise planification des instances chargées de voter
successivement les budgets centraux et polaires.
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47
Le débat et le vote du budget polaire au CP apparaissent tronqués
car ils ne portent que sur la répartition de la SCSP attribuée et les droits
universitaires, mais pas sur les crédits issus des ressources propres (TA et
subventions diverses). Ainsi, la vision complète des ressources des pôles
n’existe pas au niveau des pôles eux
-mêmes. Du point de vue des
composantes, il n’est pas possible de connaitre le montant exact de ses
recettes, ni de les spécifier par nature de dépenses, et donc de construire un
budget en recettes et en dépenses. L’architecture budgétaire repose sur au
moins 880 lignes budgétaires alors que la mise en œuvre de la GBCP avait
pour objectif de réduire cette arborescence. Seule la DAF crédite ces lignes
budgétaires par pôles et par composantes
via
le SI financier. La répartition
des crédits au sein des pôles est fixée dans le cadre d’une réunion entre la
présidence de l’UA, la DAF et les VP de pôle, assistés des responsabl
es
administratifs et financiers, mais sans la DGS. En revanche, plusieurs
composantes indiquent ne pas connaitre les modalités d’attribution de
crédits au sein de leur pôle, ce qui incite à penser que le dialogue de gestion
puis le débat budgétaire à l’éch
elle du pôle sont à mieux formaliser.
Le dispositif d’allocation des crédits vers les pôles et vers les
composantes (cf. tableau n°
6) n’est pas optimal, sa lourdeur et son
caractère partiel altérant le principe d’autonomie des pôles. Un dialogue de
gestion positionné plus en amont permettrait aux pôles de fixer la
répartition de leurs budgets de composantes avant le début de l’exercice.
L’UA ne dispose pas d’un tableau de suivi des montants répartis en
BI, BR et compte financier. On peut considérer qu’ell
e ventile, chaque
année, environ 5 M€ de SCSP hors dépenses de personnel, sur des bases
peu transparentes :
-
Au sein des services communs, centraux et à l’UFR Santé, la
répartition des crédits entre les services communs, centraux et le
budget alloué à l’UFR
Santé, l’une des principales composantes de
l’UA, ne sont pas disponibles, alors que l’ensemble pourrait s’élever
à environ 2 M€
par an.
-
Une part du budget (2 %), soit environ 100
000 €
par an, est réservée
au président, sans qu’une discussion sur son e
mploi ait lieu, lors de
l’examen du budget ou du compte financier. Cette enveloppe servirait
à financer les projets prioritaires du président. L’université s’est
engagée à faire abroger cette disposition lors de la rentrée 2023-2024.
-
Hors recherche, les crédits reversés aux pôles sont partagés entre la
Guadeloupe et la Martinique, selon une clé de répartition inchangée
depuis 2018 (34 % en Martinique et 66 % en Guadeloupe), ce qui
représenterait respectivement 0,7 M€ et 1,3 M€/an pour chaque pôle.
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48
-
Concernant la recherche, 75 % du total de la subvention allouée aux
unités recherche est alloué sur la base de critères liés à l’activité
38
pour
un montant estimé à 0,5 M€ en 2023. Un complément de dotation,
représentant 20
% du total, est alloué en fonction d’AAP i
nternes, qui
donne lieu à une seconde répartition, appelée « bonus qualité
recherche », en fonction de plusieurs facteurs
39
. Ce BQR s’élevait à
0,11 M€ en 2022. Enfin, il est prévu de réserver 5
% de l’enveloppe
recherche pour les fonctions support et pour les projets transversaux.
En outre, le mécanisme de reversement d’une fraction des droits
d’inscription générés par chaque formation, qui s’ajoute à la dotation de
fonctionnement des pôles, manque de transparence. Si les composantes ne
perçoivent pas la totalité de ces droits, elles doivent en revanche reverser
l’intégralité de la somme payée par l’étudiant en cas de demande de
remboursement lié à un désistement ou à l’octroi d’une bourse. Faute d’une
procédure interne attestant de cette obligation, cette mesure paraît
défavorable aux composantes. Ce mécanisme engendre une incertitude
pour les gestionnaires des composantes puisque le montant définitivement
acquis n’est pas connu avant le premier trimestre de l’année.
C -
Une analyse budgétaire quasi-inexistante
L’exécution budgétaire de 2017 à 2022 apparaît erratique
(cf. annexe n° 3). Les BR, au nombre de deux à trois par an, sont
systématiquement et fortement sous-consommés, y compris en ce qui
concerne les dépenses de personnel. Les taux d’exécution passés, pr
oches
de 99 %, sont à relativiser, compte tenu du recours à la fongibilité
asymétrique à partir de l’enveloppe de fonctionnement. Concernant les
charges de fonctionnement, avant la crise sanitaire, le taux d’exécution des
BI était supérieur à 100 %, avant de chuter, encore plus nettement au regard
des derniers BR votés. Les documents de l’ordonnateur et du comptable
sont dépourvus de toute explication. L'UA a amélioré, dans les documents
du compte financier 2022, sa présentation des documents budgétaires,
effort qui doit être poursuivi. Cette sous-consommation en matière de
fonctionnement révèle un défaut de gestion, dans la mesure où les pôles
manquent dès septembre de 0,5 à 1 M€ pour terminer leur exécution et ne
38
Le nombre d’enseignants
-chercheurs permanents, le nombre de publiants sur les cinq
dernières années, le nombre de thèses soutenues sur les cinq dernières années, le nombre
d’habilitations à diriger des recherches (HDR) soutenues sur les cinq dernières années
et le nombre de masters adossés à l’unité de recherche.
39
« Missions doctorants », publications, soutenances HDR, colloques, jeunes
chercheurs, accueil de chercheurs étrangers, gratification stages M2.
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49
connaissent le montant des autres recettes
qu’à l’occasion des BR (recettes
propres ou taxe d’apprentissage). La présentation du compte financier au
CA devrait afficher la consommation réelle par nature de dépenses et de
recettes, en distinguant le niveau central et les pôles. L'UA envisage cette
possibilité, sous réserve que les outils informatiques le permettent.
Le fonds de roulement (FR) et la trésorerie sont en augmentation
constante et représentent plus de cent jours depuis 2020 (cf. tableau n° 5).
Cette situation excessivement favorable ne doit pas omettre que la
composition du FR mobilisable est sujette à caution. Si les soldes des
contrats de recherche et de formation continue sont pris en compte dans
son calcul, la TA non dépensée devrait également apparaître dans ce FR
mobilisable. Un tableau de calcul a été transmis par la DAF, qui affiche
seulement 85 841
€ en 2020. Après examen, si les montants des comptes
491 (« dépréciation des comptes de clients et comptes rattachés ») et
496 (« dépréciation des comptes de débiteurs divers ») avaient été intégrés,
le FR mobilisable aurait été négatif. Cela illustre la fragilité financière de
l’UA et pourrait expliquer le recours répété à la fongibilité asymétrique.
Tableau n° 5 :
les grands agrégats de 2017 à 2022 (en €)
Agrégat
2017
2020
2023
Résultat
2 740 035
188 637
6 169 911
CAF / IAF
5 518 390
5 140 724
7 506 132
Trésorerie
15 210 304
26 670 265
35 648 939
FR
13 421 232
25 848 565
37 669 724
FR en jours de fonctionnement
55
103
139
Source
: Cour des comptes d’après les comptes financiers de l’Université des Antilles
1 -
Des outils d’analyse financière insuffisants
Les nombreuses carences et imprécisions dans la documentation
financière traduisent une faiblesse de l’outil financier et altèrent la qualité
des comptes. Ainsi, le montant total des mandats et des titres de recettes de
chaque exercice n’est jamais égal au montant des sommes des comptes de
classes 6 et 7 figurant dans les balances définitives non soldées. La DAF et
le comptable n’ont jamais justifié ces différences. En outre, il est anor
mal
que les outils soient paramétrés de telle façon qu’en fin d’exercice
l’ensemble des écritures ne puisse que basculer manuellement en année
n+1. Cette opération est d’autant plus incompréhensible que l’entreprise
qui développe ce logiciel assure que le système permettait cette bascule
automatiquement. Enfin, le comptable ne peut accéder à l’architecture du
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budget dans l’outil financier et reste tributaire des extractions réalisées par
la direction des systèmes d’information et du numérique pour analyser
et
améliorer son outil de travail quotidien.
Le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 prévoit que chaque
établissement se dote d'une comptabilité analytique et d’un contrôle
interne. Toutefois, l’UA est démunie d’outils adaptés pour partager les
données financières et budgétaires avec les composantes et les centres
décisionnels de dépenses. Le suivi budgétaire infra-annuel, le pilotage de
la masse salariale et le suivi fiable des opérations pluriannuelles ne sont
pas assurés. Afin d’optimiser et de sécuriser sa gestion financière, l’UA
devrait se doter d’outils de pilotage élémentaires. L’élaboration annoncée
d’une fiche projet, dans le cadre du dialogue de performance, est une
initiative à confirmer. Aucun tableau de suivi financier n’existe. L’agent
char
gé du contrôle de gestion jusqu’en 2021
40
avait permis de fiabiliser le
suivi des heures complémentaires, tout en améliorant la connaissance du
coût complet des formations. Sa production a toutefois été abandonnée
après son départ. L’agent chargé du contrôle interne dispose d’un champ
de compétences encore trop limité. Cette démarche de contrôle interne
devrait être généralisée afin de rendre sincères les prévisions budgétaires,
inscrire l’UA dans une démarche de performance, sécuriser les processus
comptables et améliorer la qualité comptable. Le comptable et la DAF
devraient respectivement fiabiliser certaines de ses écritures pour obtenir
la levée de la réserve des commissaires aux comptes de l’UA sur le
financement externe de l’actif, et informer la direc
tion mensuellement du
taux d’exécution des dépenses, sans attendre le compte financier.
2 -
Des ressources propres en diminution
Les produits de l’UA ont crû de 11
% et les charges de 9 % de 2017 à
2022. Cette progression n’a pas été linéaire
: les produits
d’exploitation ont
progressé de 3,4
% entre 2017 et 2020. L’année 2021 a été une année de
rattrapage des opérations non réalisées en 2020 du fait de la crise sanitaire.
En 2022, l’augmentation des charges a été de 0,3
%, alors que les produits
baissaient de 1,0 %. Au sein des recettes, les évolutions sont disparates ;
-
La SCSP, qui constitue 95 % des recettes, a progressé de manière
régulière, avec une hausse marquée en 2021 et 2022 du fait de la
croissance du nombre des étudiants.
-
Les recettes propres sont faibles et ont chuté de 31 % entre 2017 et 2022.
La crise sanitaire a pu produire un impact sur les recettes liées aux contrats
de recherche en 2020 et 2021, en raison de la difficulté à mettre en œuvre
40
Le poste de contrôleur de gestion n’a été pourvu qu’à compter d’août 2023.
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51
les projets prévus, et sur les recettes liées à la formation continue (en 2020
tout particulièrement), avec un retour à la normale en 2022. Les recettes
issues des collectivités territoriales sont principalement liées à
l’avancement des projets d’investissement. Toutefois, la chute des
recettes propres lors de la période sous revue est à souligner, avec
principalement la baisse des recettes des contrats de recherche (- 41 %),
des produits de gestion (- 93 %) et de la formation continue (- 18 %) et
l’absence de titre de recettes émis sur la taxe d’apprentissag
e depuis 2021.
3 -
Une évolution erratique de certaines dépenses
Les charges d’exploitation ont moins augmenté (9
%) que les produits
d’exploitation mais ont aussi subi l’impact de la crise sanitaire. L’essentiel des
charges est constitué par la masse salariale (cf
.
tableau n° 6), qui représente
chaque année un montant quasi équivalent à celui de la SCSP. Les dépenses
de personnel, rapportées aux produits et aux charges totales, sont nettement
supérieures à 80 % des produits, seuil prudentiel retenu par le MESR.
Tableau n° 6 :
les dépenses de personnel de l’UA de 2017 à 2022 (en €)
Détail des Dépenses de personnel
2017
2020
2022
Évolution
2017/2022
Traitements, salaires
45 117 525 46 961 057 47 783 907
5,91 %
Dont rémunérations principales
42 416 002 45 490 488 46 031 651
8,52 %
Dont rémunérations accessoires
2 701 523
1 470 569
1 752 256
- 35,14 %
Congés payés du personnel
693 626 -
170 226
23 672
- 96,59 %
Primes et gratifications
1 722 501
973 980
545 591
- 68,33 %
Indemnités et avantages divers
789 419
3 931 405
5 694 543
621,36 %
Autres (dont supplément familial)
261 776
239 555
224 399
- 14,28 %
Reversements sur rémunérations
- 132 403
- 252 191
- 247 315
86,79 %
Sous-total Rémunérations du personnel
48 452 444
51 683 581
54 024 797
11,50 %
Charges sociales
27 219 281 28 790 294 29 351 813
7,83 %
Sous-total charges du personnel
75 671 725
80 473 874
83 376 610
10,18 %
Impôts et taxes sur rémunérations
460 280
515 718
517 141
12,35 %
Sous-total Dépenses de personnel interne
76 132 005
80 989 593
83 893 751
10,20 %
Ratio Dépenses de personnel interne
sur les produits
81,7 %
85,0 %
82,3 %
Ratio Dépenses de personnel interne
sur les charges
86,8 %
89,8 %
87,4 %
Source
: Cour des comptes d’après les données de l’Université des Antilles
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52
En matière d’achats, le coût des fluides a augmenté de 10,5
% entre
2017 et 2022, la documentation générale et administrative de 72 %, les frais
d’honoraires de 42,5
%, et les frais de publications de 43 %.
4 -
Les contrats de recherche et des fonds européens : une gestion
éclatée potentiellement risquée sur le plan financier
Le nombre de conventions et leur montant sont respectivement
divisés par deux et par trois entre 2017 et 2022. Si la crise sanitaire de
2020
a eu un impact sur l’activité de recherche et
la possibilité de répondre
aux appels d’offre, les données 2022 laissent présager une faiblesse durable
de l’UA en la matière.
Le suivi de ces conventions par la DAF apparait particulièrement
imprécis et emporte le risque de non-perception du solde de la part des
bailleurs, voire de demandes de remboursement. L’UA a transmis un tableau
dans lequel 39 contrats de recherche présentaient une consommation en CP
supérieure aux AE, dont 21 pour lesquels les CP étaient supérieurs de
10 000
€ aux AE, soit un monta
nt total de 1 704 177
€
41
. La DAF n’a pas
fourni d’explication à ces écarts. Il est impossible de connaitre la situation
financière exacte des contrats de recherche car l’information n’est pas
suffisamment partagée entre les services. L’absence de récolemen
t entre
données budgétaires et comptables provoque un doute sur la sincérité de la
budgétisation
42
. En effet, l’UA n’est pas en état de garantir que les crédits
qu’elle a inscrit en recette sont fondés sur des produits non susceptibles
d’annulation par défa
ut de réalisation des contrats.
Au vu de quelques exemples de conventions, il existe un risque de
non versement du solde de la convention. Les dépenses du projet ANR-11-
CESA-0019-01 CHLORINDIC n'ont ainsi pu être justifiées. Aucun relevé
de solde n’ayant été fourni par l'université, l'AN
R a procédé à une demande
de remboursement des sommes perçues et non justifiées. Cette situation a été
confirmée par le comptable, qui « constate que certains contrats de recherche
n’ont pas fait l’objet de remontées de dépenses par les services de
l’ordon
nateur, ce qui rend difficile la procédure de recouvrement en raison
de la caducité du contrat. Cela compromet fortement l’encaissement de la
recette et conduit l’université à rembourser les sommes perçues car non
justifiées.
» L’UA a indiqué mettre en pla
ce des groupes de travail pour
développer le suivi administratif consacré à la recherche. Les données
41
Les 18 contrats restants présentent une exécution en CP inférieure à moins de
10 000
€ pour un total de 74
399
€, ce dernier point n’étant pas préoccupant.
42
La budgétisation n’est pas contrôlée par les
CAC car cela
n’entre pas dans
le mandat.
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DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
53
financières associées aux contrats pluriannuels (formation continue et
recherche) doivent être fiabilisées sans délai et le recouvrement des créances
sur les anciens contrats de recherche doit être effectué.
S’agissant des fonds européens, les subventions de la région
Guadeloupe et de la CTM se signalent par un niveau de mise en œuvre
satisfaisant par les organismes de recherche mais par un défaut de remontée
de l’information par l’UA
:
-
Concernant la CTM, les fonds Feder de la programmation 2014-2020,
qui ne pourront plus être versés après octobre 2023, restaient en attente
des remontées de dépenses, qui n’ont toujours pas été réalisées par
l’UA.
-
Concernant la Guadeloupe, les fonds Feder de la programmation 2014-
2020 recouvraient 24 projets pour un coût total de 10 M€, dont 6,1 M€
apportés par la région. Toutefois, une seule opération s’est achevée et le
taux de certification des dépenses n’est que de 22
%, alors que la clôture
du programme est définitive au 31 décembre 2023. De plus, la région
pouvait financer à 85
% un poste d’ingénierie administrative et
financière dans le cadre du FSE, possibilité dont l’UA ne s’est jamais
saisie et qui ne figure plus dans la programmation 2021-2027 du FSE.
Concernant les subventions de la région dans le cadre du fonds Interreg
2014-
2020, les trois opérations financées, pour un coût total de 2,5 M€,
n’ont débuté qu’en 2020 et en 2022 pour deux d’entre elles. Seule une
opéra
tion est réellement en cours d’exécution (SARGOOD).
L’UA avait pourtant institué en janvier 2018 une «
cellule d’appui
aux projets de recherche » (CAP) commune aux deux pôles, afin de mieux
accompagner les enseignants-chercheurs et les équipes de recherche dans
la réalisation de leurs projets tout en répondant également aux attentes des
partenaires financiers de l’établissement. La CAP a depuis été supprimée
et ses agents réaffectés. La direction des affaires juridiques (DAJ) a élaboré
une note datée du 26 janvier 2023, dressant un panorama des difficultés en
matière de suivi des conventions de recherche.
Il est indispensable que l’UA clarifie la gestion de ses conventions
de recherche en améliorant l’information réciproque et la coordination des
services concernés par le suivi financier et comptable. La mise en place
d’outils de suivi de l’état des dépenses et des recettes, communicables aux
pôles comme aux porteurs de projet, implique une centralisation des
informations au siège. La réforme portée par la DGS sur la gestion des
contrats et conventions de recherche et le processus de suivi de la recette
et de son recouvrement par le comptable devraient participer de cette
réorganisation. À défaut, la situation financière de l’UA pourrait à nouveau
subir les conséquences de ces errements.
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54
D -
Une qualité comptable non assurée
Dès 2018, les commissaires aux comptes de l’UA demandaient à
l’ordonnateur et au comptable d’établir une note conjointe de commentaire
du compte financier. Comme indiqué
supra
, l’UA a amorcé un
début
d’amélioration de présentation pour le compte financier 2022. À l’avenir,
ces deux services devraient saisir cette opportunité pour analyser les
blocages dans la chaîne de la dépense et de recette, les écarts constatés et
les états financiers. Par ailleurs les commissaires aux comptes ont relevé
des fragilités suite à l’audit des comptes 2013
-2014 et formulé plusieurs
recommandations
: organisation d’un service de suivi des conventions,
mise en place de l’outil Hyperplanning et croisement des plannin
gs pour
justifier les heures complémentaires, mise en place d’un système de suivi
d’inventaire périodique, mise en place d’une procédure d’entrée et de sortie
des biens et sensibilisation des différents acteurs du processus, organisation
d’un service de su
ivi des conventions, mise en place de tableaux de suivi
des recettes de la formation continue, comptabilisation des mises en rebut
depuis 2010, fléchage des subventions d’investissement après intégration
du patrimoine immobilier intégré à l’actif,
etc
.
L’UA a intégré son patrimoine immobilier en bilan d’ouverture de
l’exercice 2017 dans le but de fournir une image fidèle du patrimoine au
31 décembre de l’année considérée. Le comptable a, en 2022, procédé à
une première sortie d’inventaire. Cette opération pourrait être l’amorce
d’une gestion active de l’inventaire physique, mis à jour pour la dernière
fois en 2010 et jamais actualisé depuis. L’UA précise que le comptable
souhaite depuis 2017 que l’ordonnateur organise cet inventaire physique, à
partir du logiciel NEPTUNE, pour le suivi et la gestion des
immobilisations. Ce travail doit être effectué chaque année par chaque
composante de l’UA car il participe de la fiabilité des comptes.
Le taux de vétusté des immobilisations incorporelles est très élevé
(95
%), et s’est fortement dégradé depuis 2019, signe d’un vieillissement
du parc informatique. La DSIN et le comptable doivent réaliser, sans délai,
un rapprochement des biens figurant à l’inventaire physique et comptable
et
procéder
aux
sorties
d’inventaire
nécessaires.
En
matière
d’immobilisations corporelles, la situation est moins dégradée et tendrait à
s’améliorer. Le taux de vétusté est inférieur à 40
%. Les investissements de
l’UA permettent de réaliser certains travaux et ont dû contribuer à
améliorer la situation des immobilisations corporelles.
Les variations de la CAF sont liées à celles du résultat. En 2018, la
faiblesse du résultat et une reprise sur amortissement importante,
expliquaient l’insuffisance d’autofinancement. La part du financement
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55
pr
opre disponible sur les dépenses d’équipement est devenu négative en
2022. En effet, les flux des dépenses sur les comptes « installations à
caractère spécifique » (21531) et « mobilier » (21841/42) ont été nettement
créditeurs (près de 20 M€), sans qu’auc
une explication ne figure dans le
compte financier. À l’aune de cet état des lieux, on peut regretter le manque
de fiabilité des données financières nécessaires pourtant pour éclairer les
décisions des membres du CA et les commissaires aux comptes.
E -
Un contrôle des régies qui appelle une
rationalisation et la fin de certaines irrégularités
L’UA disposait au 1
er
janvier 2023 de neuf régies de recettes et de
huit régies d’avance. La DRFiP a émis, en 2019, «
une appréciation
extrêmement défavorable » et mis en évidence une « totale opacité du
fonctionnement de la régie » et « des mauvaises pratiques qui perdurent ».
L’UA a pris la décision, en 2022, de fermer la régie du service de formation
continue du pôle Martinique, une enquête pénale ayant été initiée en
septembre 2021. L’UA a par ailleurs supprimé la régie de l’UFR de
Sciences juridiques et économiques du pôle Guadeloupe en janvier 2023.
Il n’existe désormais plus que trois régies et cinq régies de recettes,
lesquelles devaient être passées en revue par le comptable à la rentrée 2023.
En 2020, l’UA a fait le choix d’un passage systématisé au paiement
des frais d’inscription directement sur le compte du comptable, ou plus
rarement sur le compte des régisseurs, par virement bancaire, ce qui a réduit
les flux financiers passant par les régies, et sécurisé le circuit financier avec
la fin du recours au paiement en numéraire. Le maintien de régies de
recettes à très faible montant est inutile compte tenu des montants et de la
proximité géographique du comptable.
Cinq régies situées sur le pôle de la Martinique ont fait l’objet d’un
contrôle sur pièces et sur place
(les régies d’avance et de recettes du service
commun de la documentation, les régies d’avance et de recettes de l’INSPé
de Martinique et la
régie de recettes de la faculté de droit et d’économie).
Plusieurs points d’attention méritent d’être relevés
:
-
Le relevé de la régie, qui doit être effectué mensuellement lorsque
l’arrêté le prévoit, ne l’est pas toujours.
-
Le régisseur de la bibliothèque
universitaire de Martinique n’a pas
présenté d’attestation de cautionnement.
-
Le montant maximum de dépense autorisé est parfois dépassé.
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56
-
Des recettes non prévues par l’arrêté sont perçues, comme à l’INSPé
de Martinique où la régie encaisse la taxe d’appre
ntissage.
-
La faculté de droit et d’économie encaisse des droits d’inscription
pour le compte de l’Institut d’études juridiques Jean Domat de
l’Université Paris 1 Panthéon
-
Sorbonne dans le cadre d’une
convention partenariale, ce qui compte tenu du montant moyen de
recettes encaissées (de l’ordre de 25
000
€ par an), imposerait un
cautionnement du régisseur.
III -
La commande publique
L’organisation du processus de la commande publique manque de
ressources et de maturité (A). Le processus global est insuffisamment
maitrisé ce qui obère la performance économique de la fonction achat (B).
A -
Une organisation du processus
manquant de ressources et de maturité
Le service achat de l’UA est isolé. La DSIN a une large autonomie
dans la gestion de ses achats. De même, les marchés de travaux sont
largement préparés et suivis par le service du patrimoine immobilier
(DPL). La DAJ n’assurait pas le rôle d’appui juridique à l’élaboration et au
suivi des marchés, au moment du contrôle. L’UA indique avoir recruté en
juin 2023 un expert juridique au sein de la DAJ pour accompagner les
procédures de marchés publics. Ce service achat est par ailleurs sous-doté
en ressources et en compétences. Outre le DAF, qui a une solide expérience
en achats, un seule agent de catégorie A s’y consacre, un agent apportant
un concours occasionnel. Le recrutement d’un agent contractuel de
catégorie A, début 2023, est resté infructueux.
Le rapprochement des données d’exécution des dépenses et des
tableaux de suivi des marchés fait apparaitre des lacunes dans plusieurs
domaines
: prestations de formation, prestations d’analyse scientifique,
mobilier de bureau, services de traiteurs, communication, évènementiel et
approvisionnements généraux. L’UA prépare des marchés relevant de
plusieurs des domaines identifiés ci-dessus, en se rattachant à des marchés
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DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
57
nationaux, comme c’est le cas avec le CLOUS
43
pour la fourniture de cartes
multiser
vices (cartes professionnelles et cartes d’étudiants).
B -
Un processus mal maitrisé qui obère la performance
de la fonction achat
1 -
Une expression préalable des besoins non encadrée
en l’absence d’un outil de recensement des besoins
L’UA ne dispose pas d’une cartographie de ses achats, faisant le lien
entre ses dépenses et les marchés existants ou en préparation. La prévision
des besoins récurrents et l’établissement de seuils de computation par
nomenclature d’achats ne peuvent donc pas être mis en œuvre. Il en résulte
que le choix de la procédure d’achat à adopter ne repose pas sur une
évaluation claire et aboutit à un « saucissonnage » des besoins et des
procédures de passation, comme, par exemple, pour le marché de
fournitures d’équipements de laboratoire de l’IUT de Guadeloupe. Les
achats de solutions d’impression, pour lesquelles il a été a fait appel à sept
fournisseurs distincts, montrent l’absence de gestion centralisée des
besoins, qui se répercute sur la gestion de la maintenance. Le processus
d’harmonisation sera long compte tenu de l’obligation de poursuivre les
contrats en cours jusqu’à leur terme.
2 -
Une mise en concurrence et une passation mal maitrisées
et cause d’irrégularités
La DAF rédige les cahiers des clauses techniques particulières
(CCTP) des marchés hormis les marchés informatiques et de travaux, qui
sont le plus souvent préparés par les assistants maitres d’ouvrage (AMO),
selon les besoins exprimés par les services prescripteurs. L’UA mobilise
une commission d’appel d’offres (CAO), bien que les statuts et le
règlement intérieur ne l’imposent pas. Cette pratique est à encourager car
elle associe les responsables des pôles concernés par les marchés. En
pratique, elle ne comprend que deux membres, dont un de la DAF, ce qui
est insuffisant pour que la décision puisse être prise collectivement. Par
exemple, la CAO n’a pas inclus de membre du pôle Martinique pour le
marché de gardiennage de ses sites en 2021. Le VP du pôle a alerté la
présidence sur sa mise à l’écart de la
procédure, alors même que le montant
de ce marché a été confié à un nouvel attributaire, pour un coût de
43
Centre lo
cal des œuvres universitaires et scolaires.
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58
223 000
€ en 2021 contre 100
000
€ en 2019 et 2020. La direction a argué
auprès du VP du pôle que ce marché était un marché qualifié
«
d’établissement
» et qu’il ne justifiait pas son concours.
La justification des choix retenus dans l’élaboration des marchés est
faible. Par exemple, le marché de 354 000
€ relatif à la plateforme
commune de calcul intensif de volumes de données de bio-informatique
n’a été attribué que pour un point d’écart entre les deux derniers
soumissionnaires, alors même que les critères techniques d’évaluation des
offres ont omis d’inclure l’évolutivité capacitaire du supercalculateur
pourtant prévue au CCTP. L’UA n’a jamais exploré les solutions d’achat
mutualisées avec d’autres acheteurs publics du territoire. Elles existent
pourtant sur des segments récurrents et généralistes (photocopieurs,
véhicules ou téléphonie mobile) grâce aux plateformes régionales d’achat
de Martinique et de Guadeloupe, qui ont indiqué se tenir à la disposition de
l’UA pour étudier l’adhésion aux marchés mutualisés existants.
Un échantillon de 20 marchés a été analysé. Il inclut des marchés à
fort enjeu financier, tels que le transport aérien, le matériel, les fournitures
informatiques et la téléphonie. Concernant le respect des seuils de mise en
concurrence, 11 des 20 marchés sélectionnés ne respectent pas le seuil qui
distingue les marchés à procédure adaptée (MAPA) des marchés à
procédure formalisée. Un des marchés a été passé sans aucune publicité ou
mise en concurrence, sans que l’urgence, l’exclusivité du fournisseur ou le
caractère d’achat scientifique ne le justifient.
3 -
Un archivage lacunaire
L’archivage des pièces des marchés est défaillant, notammen
t sur
les premières années de la période sous revue. Ces carences sont d’autant
plus graves que plusieurs normes contraignent le service des achats, le
prescripteur et le représentant du pouvoir adjudicateur à conserver, pendant
au moins cinq ans, les pièces se rapportant à la procédure de passation du
marché, et pendant dix ans, celles relatives à son exécution.
4 -
Un suivi de l’exécution des marchés non conforme
au code de la commande publique
Pour certaines dépenses, le recours à des marchés à bon de
comman
de au sein desquels un grand nombre de services de l’UA sont
autorisés à émettre n’est acceptable que si le contrôle des dépenses est
rigoureux et si les services consommateurs rendent compte. Ce n’est en
l’occurrence pas le cas, comme l’illustre l’absence
de tableau de suivi des
marchés pluriannuels, pourtant possible dans le SI JEFYCO. Pour de
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DE NOMBREUSES FAIBLESSES ET QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE
59
nombreux marchés, des avenants se sont révélés nécessaires, l’UA
dépassant les limites admises par le CCP s’agissant des modifications de
faible montant. Au-dessus
de ces seuils, l’UA peut se prévaloir de
« modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévues »
prévues au 2° de l’article L. 214
-
1 CCP, qui autorise l’acheteur à conclure
des avenants dans la limite d’une majoration de 50
% des marchés initiaux.
Sur les 20 marchés analysés, trois sont au-dessus du plafond de 50 %.
IV -
Les ressources humaines
À l’Université des Antilles, la gestion
des ressources humaines est à
renforcer (A).
La cartographie des risques de l’établissement met en
lumière plusieurs
vulnérabilités qu’il convient de corriger (B). Enfin, le
pilotage de la paye et des services d’enseignement connait plusieurs
dysfonctionnements (C).
A -
Une gestion des ressources humaines à renforcer
Sur la période sous revue, les enseignants ont augmenté de 11 %, en
particulier pour les non-titulaires, quand le personnel Biatss diminuait de
6 %, en particulier pour les non-titulaires (cf. tableau n° 7). Pour cette
catégorie, cette situation illustre une difficulté globale à recruter et fidéliser
les agent
s sur contrat malgré les mesures d’incitation de la loi de
transformation de la fonction publique du 6 août 2019. Les plafonds
d’emploi notifiés par le MESR sont en légère augmentation (+ 1,9
%),
quand les plafonds votés par le CA, incluant les effectifs financés sur
ressources propres, sont en diminution (-3,5
%). Le taux d’exécution du
plafond d’emploi est presque de 100
%.
Tableau n° 7 :
évolution des effectifs temps plein (ETP)
de l’Université des Antilles de 2017 à 2022
ETP
2017
2020
2023
Enseignants (Total)
493
539
510
Enseignants titulaires
388
407
396
Enseignants non titulaires
106
132
114
Biatss (Total)
451
417
409
Titulaires
363,8
359
342
Source
: Cour des cmptes d’après l’Université des Antilles
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L’UA a adopté en 2017 une méthode de ventilation de ses
ressources
vers les pôles en suivant les préconisations du rapport de l’IGAENR, soit
une répartition des emplois et de la masse salariale à 70 % au titre de
l’enseignement et à 30
% au titre de la recherche. Cette décision ne s’est
pas traduite par des effets sensibles sur la répartition des effectifs entre les
pôles car les postes devenus vacants ont pour l’essentiel été renouvelés à
l’identique, afin d’éviter de trop fortes tensions.
La DRH applique près de 41 procédures de gestion administrative
et de pa
ye, dont l’essentiel a été rédigé depuis 2018. Font encore défaut les
procédures relatives à la gestion du temps de travail (« charte du temps »),
l’identification et la prévention des conflits d’intérêt ou encore les
conditions d’octroi de la rupture conventionnelle avec l’employeur. Les
lignes directrices de gestion (LDG), corollaire de la refonte des instances
de dialogue social, n’ont pas encore été adoptées à l’exception du régime
indemnitaire des personnels enseignants et de recherche
(RIPEC)
44
.
À
contrario
, des notes sur les autorisations de cumul d’activité et de
rémunérations accessoires existent mais ne sont pas recensées par la DRH.
L’exhaustivité des documents annuels d’entretien n’est pas garantie.
Leur absence cause un préjudice, notamment pour
l’allocation du
complément indemnitaire annuel (CIA), fondé sur la manière de servir.
Certains comptes-
rendus d’entretiens se révèlent difficiles à interpréter
Ainsi, l’ancien président de l’UA a ajouté, postérieurement à l’entretien
d’évaluation 2019
-2020 du DGS adjoint, un «
complément d’information
»
particulièrement défavorable en complète contradiction avec une
appréciation élogieuse de l’agent par le DGS sur plusieurs années. Ce
complément, sur lequel l’agent n’a d’ailleurs pas pu réagir, est irréguli
er.
Le contrôle des 278 comptes-épargne temps (CET) des agents, à
partir de la base de données TIMM déployée depuis septembre 2022,
montre une gestion des comptes conforme aux dispositions réglementaires
en termes de plafond de dépôt des jours, de modalités annuelles
d’alimentation et de paiement (monétisation ou dépôt au RAFP
45
).
Le temps de travail des agents Biatss (cf. annexe n° 4) est inférieur
à la durée légale de 1 607 heures. La durée annuelle effective du temps de
travail est de 1 508 heures, soit un écart de 100 heures par rapport à la durée
légale. L’UA s’appuie sur la circulaire relative à l’aménagement et la
réduction du temps de travail (ARTT) du personnel des Biatss votée le
24 juin 2019
et approuvée en CA le 29 novembre 2019, ce qui n’appelle
pas de remarques à l’exception des trois points que sont l’absence de
44
Les LDG relatives au RIPEC ont été adoptées par
le
CA du 14 mars 2023.
45
Retraite additionnelle de la fonction publique.
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mention de l’obligation de prendre 20 jours de congés annue
ls pour pouvoir
alimenter un CET, la durée particulièrement longue d’une demi
-journée de
travail à l’UA (5
h 59) et la possibilité de cumuler pause méridienne
(45 minutes) et pause quotidienne (20 minutes). Une nouvelle note mettant
en conformité l’UA avec
la réglementation applicable a été adoptée en CA.
La Cour rappelle ses conclusions formulées dans son dernier rapport,
publié en janvier 2024 sur le temps de travail des personnels non
enseignants des universités46.
Le nombre de jours d’absence des personn
els administratifs et des
enseignants a fortement augmenté. En 2022, il était six fois plus important
qu’en 2017 pour les enseignants et huit fois plus important pour les Biatss.
L’UA précise que la dégradation de ces indicateurs sur la période résulte
d’u
ne absence de transmission des congés de maladie ordinaires de 2017 à
2020 de la part du pôle Martinique, ce qui fausserait les données observées.
Depuis la rentrée 2021, la transmission des congés de maladie à la DRH,
pour saisie dans le SIRH, est systématique.
B -
Une organisation fragile de la DRH mise en évidence
par la cartographie des risques
Deux cadres de l’UA, dont la chargée de mission contrôle interne,
ont réalisé une cartographie des risques de l’organisation de la DRH. Dans
sa version d’avril 2022,
celle-ci identifie plusieurs vulnérabilités : la
rupture de certains processus administratifs, la fragmentation et le manque
de fiabilisation des données RH ou encore le manque de relais RH au sein
des pôles et l’absence d’échange avec les instances polai
res
Cette cartographie s’accompagne de propositions pertinentes
:
-
Réviser l’organigramme de la DRH et dresser un état des emplois
ayant trait à la gestion RH dans les deux pôles.
-
Élaborer des procédures internes compilées dans un
Vademecum
pour
diffusion à l'ensemble des personnels RH.
-
Travailler avec les pôles en amont des campagnes (mobilité,
recrutement, entretiens) pour présenter les attendus RH.
46
Rapport d’observations définitives mis en mis en ligne le 10 janvier 2024 «
Le temps
de travail des personnels non enseignants des universités : suivi des suites du référé du
19 septembre 2019 » Cour des comptes (ccomptes.fr).
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-
Sensibiliser, accompagner et former les personnels aux traitements de
données et assurer un contrôle interne annuel en collaboration avec la
DSIN.
-
Repenser la procédure de vérification des contrats avant le début du
service d'enseignement.
C -
Des défaillances du pilotage des services
d’enseignement et de la paye
L’UA n’a pas réussi à éliminer des zones de risque s
ur plusieurs
domaines sensibles de sa gestion RH, notamment en matière de gestion des
services d’enseignement (GSE), pourtant cadrée par une note du 15 mai
2017, qui visait à remédier à des lacunes dans l’articulation des services de
la scolarité (DSCOL),
de la DRH et de l’agence comptable.
Ces difficultés s’expliquent, pour l’essentiel, par l’absence de
pilotage transversal et l’usage défaillant des SI auxquels s’ajoutent des
vacances sur des postes de responsables. Pour les résoudre, la DGS a créé
une cellule qualité des données et un chargé de mission « urbanisation des
SI », ancien adjoint du directeur de la DSIN, a pris ses fonctions fin 2022.
La cellule a pour objectif d’intégrer davantage la dimension métier dans la
stratégie SI. Un comité de pilotage
pour l’amélioration du SI réunit le VP
chargé de la répartition des moyens, la DGS et ses collaborateurs. Ce
comité de pilotage devrait inclure les directions métier directement
concernées (DRH, DSOCL, AC). La mise en place d’un outil pour
dématérialiser le dépôt et vérifier la complétude des dossiers de vacataires
est une avancée utile pour fiabiliser la procédure d’embauche. De même, il
est prévu de réorganiser la DRH, pour améliorer la liaison avec le
comptable et le contrôle des opérations de paye avec, notamment, le
recrutement d’une personne consacrée au SIRH et à la qualité de la donnée.
La DRH devra veiller à ce que les unités qui interviennent en son sein sur
la gestion de la paye et de la GSE se coordonnent.
La gestion de la paye n’est pas encore
sécurisée, malgré la mise en
place d’une gestion intégrée «
administration-paye » depuis 2021, qui a
connu une mise en place difficile, du fait notamment des vacances de poste.
Malgré les engagements de sa présidence, l’UA ne s’est pas donné les
moyens d’assurer un cadrage suffisant et robuste de la GSE puisqu’elle
enregistre à la fois un niveau élevé de sur-services et de sous-services,
phénomène qui tend à s’accroitre sur la période sous revue.
Cette situation résulte d’une fragilité structurelle de la DS
COL, de
l’organisation en trois niveaux de décision (services centraux, pôles,
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63
composantes), d’un manque de coordination entre les directions, d’un
manque de rigueur dans la mise en œuvre des procédures et d’une difficulté
à utiliser le SI. En 2018, les commissaires aux comptes (CAC) constataient
déjà « beaucoup de saisies manuelles à chaque étape du process » et
« aucun déversement automatique entre les différents systèmes ». Le SI,
malgré quelques avancées comme la mise en place de Siham et d’Hélico,
deme
ure cloisonné et défaillant en termes de fiabilité et d’accès à des
restitutions nominatives. L’ajout d’un infocentre, qui collecterait les
données de ces différents outils, est en projet, ce qui constitue une nécessité
pour mieux piloter la GSE. L’UA a décentralisé l’essentiel des tâches vers
ses composantes, sans les mettre en responsabilité. Les services centraux
ne sont pas en mesure de piloter, d’assurer le respect des règles et la
maitrise des risques. Le rôle du niveau polaire, quant à lui, n’est pas
déterminé avec précision sur le plan de la gestion et risque de faire écran
entre le niveau central et les composantes.
La chaine de traitement de la paye repose sur plusieurs services : les
composantes, la DRH, l’agence comptable et la DRFiP de Martiniq
ue, qui
intervient dans le cadre d’une convention pour établir la paye à façon. Le
taux d’anomalie est toutefois élevé. Le taux de rejet des anomalies de paye
non retenues par le service RH oscille de 3,5 % en 2020 à 4,2 % en 2022,
avec un pic de rejet à 9,4
% en mai 2022. S’agissant du comptable, le
pourcentage oscille de 1,1 % en 2020 à 2,3 % en 2022, avec un pic de rejet
à 6,4
% en décembre 2022. Le taux d’anomalie observé sur les opérations
de paie s’est ainsi nettement dégradé en trois ans.
Par ailleurs, le versement des primes de charges administratives
(PCA) a été reporté de 2019 à 2020. Des indus sur salaire, pour des
montants parfois importants, sont versés à des agents ayant quitté l’UA
depuis des mois, voire des années. Ces indus prolongés supposent une
absence de rapprochement entre les données nominatives de paye et les
données administratives. Si le nombre d’indus, particulièrement élevé en
2017, a diminué au cours des trois années suivantes, il a de nouveau
augmenté significativement, en volume et en montant, en 2020 et en 2021.
Un agent a ainsi perçu, à la suite de son départ à la retraite, des salaires
indus de septembre 2017 au 30 juin 2021, pour un montant de 98
170,39 €.
Il existe une absence de cohérence entre les données saisies sur
différents outils. Le rapprochement des données Hélico, outil de suivi des
heures d’enseignement, avec celles du journal de paye, montre l’absence
d’agents (177) présents dans Hélico (exercice 2022/2023) mais absents du
fichier paye et, inversement, quoi qu’en nombre réduit, d’agents dans le
journal de paye absents du fichier Hélico. On relève également l’absence
ou les erreurs de saisie concernant le numéro INSEE, qui rendent difficile
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le contrôle avec les données paye et induit un risque de double paiement :
1
21 agents n’ont pas de numéro INSEE et 114 agents ont un numéro
INSEE incorrect avec un nombre de chiffres inférieur à 15. Les agents
présents dans le fichier Hélico mais absents du journal de paye constituent
potentiellement une dette d’un montant estimé
à 0,45
M€, hors cotisations
sociales patronales. Il s’agit vraisemblablement d’agents déjà en activité
mais qui n’ont pas encore signé leur contrat, en violation des règles de
recrutement. L’amélioration de la GSE et le paiement plus rapide, sécurisé
et mi
eux cadencé des HC mérite une mobilisation importante de l’UA pour
améliorer le traitement de ses agents et vacataires.
V -
Le patrimoine immobilier
Le patrimoine immobilier universitaire présente un caractère
relativement vétuste en raison notamment des aléas climatiques propres
aux Antilles (A). La fonction immobilière est essentiellement assurée
depuis la Guadeloupe (B). La stratégie immobilière de l’établi
ssement est
aujourd’hui pratiquement achevée (C). Enfin, des efforts importants ont été
entrepris en ma
tière de réduction de la consommation d’énergie (D).
L’UA dispose d’une surface de 40,9
hectares, sur laquelle se
trouvent 76 bâtiments, représentant 79 136 m² de surface de plancher
(SDP) et 74 905 m² de surface utile brute (SUB). Ce patrimoine est réparti
sur cinq sites présents dans les deux territoires :
-
Le pôle Guadeloupe (49 363 m²), réparti sur trois sites (Pointe-à-Pitre,
Abymes et Saint-Claude).
-
Le pôle Martinique (36 854 m²), réparti sur deux sites (Schoelcher et
Fort-de-France).
L’État est prop
riétaire majoritaire du bâti, les collectivités
territoriales n’étant propriétaires que de 8,1
% des surfaces. L’occupation
des bâtiments est régie par deux conventions d’utilisation d’une durée de
neuf ans, signées entre l’État et l’UA, valables jusqu’à f
in 2024. Ces
conventions ne comportent pas le même niveau de détail. Elles gagneraient
à être plus explicites et harmonisées, à inclure la signature des tiers
propriétaires (la Région Guadeloupe pour l’IUT et l’INSPé
; la CTM pour
l’INSPé). Seule la convention d’occupation du pôle de Martinique précise
que la CTM est propriétaire du bâti de l’INSPé de Fort
-de-France.
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A -
Un patrimoine vétuste soumis aux contraintes
climatiques et aux risques naturels
Seuls 33 % des bâtiments sont dans un état jugé satisfaisant à très
satisfaisant. Le bâti apparaît en plus mauvais état en Martinique qu’en
Guadeloupe (81,8 % classé peu ou pas satisfaisant contre 55,5 % en
Guadeloupe). La classe énergétique n’a été renseignée dans le référentiel
technique (RT) que pour ¾ des bâtiments et demande donc à être
complétée. Selon les données existantes, 67,3 % du patrimoine est
énergivore (classe D ou inférieure), dont 23 % correspond à des « passoires
thermiques » (classes F et G), concentrées en Martinique.
Les Antilles sont soumises à un climat qui accélère la détérioration
des bâtiments, en raison du niveau élevé d'humidité et des pluies fortes et
fréquentes. L’archipel est également soumis à des épisodes cycloniques
réguliers causant d’importants dégâts
47
ainsi qu’à un fort aléa sismi
que,
alors que les deux INSPé (cf. annexe n° 5), de construction ancienne (1961
pour la Guadeloupe et 1972 pour la Martinique), ne répondent pas aux
normes sismiques. Le SPSI présume logiquement un niveau de risque
« inacceptable » pour la majorité de leur
s bâtiments, mais aussi pour l’UFR
SEN sur le pôle Guadeloupe (campus de Fouillole).
B -
Une fonction essentiellement basée en Guadeloupe
La fonction immobilière est répartie entre la direction du patrimoine
et de l’immobilier (DPI), dont un service central d’une dizaine d’agents
assure la planification stratégique et le pilotage de gros travaux, tandis que
45 agents s’occupent au sein des pôles de la logistique, de la maintenance
et du petit entretien de proximité. En 2022, la DPI comptait 10 agents, dont
huit basés en Guadeloupe et deux en Martinique. Elle a ouvert récemment
un poste de chargé de mission sûreté, occupé par un agent de catégorie A.
Le pilotage immobilier a été renforcé depuis 2017 : la DPI est passée
de sept à 10 agents et le nombre d’agents d
e catégorie A augmenté à six
pour monter en compétences et compenser partiellement la disparition de
l’AMOA
qu’assuraient
les
rectorats.
Les
plus
grands
projets
d’investissements restent traditionnellement sous maîtrise d’ouvrage de
l’État (rectorats) ou d
es collectivités territoriales. Le SPSI reconnait en
effet le manque de compétences nécessaires à la gestion stratégique des
actifs immobiliers et à la gestion bâtimentaire des sites occupés. L’UA
47
L'ouragan Irma aux Antilles en 2017 a causé 2
Md€ de dégâts.
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priorise clairement ses besoins dans son SPSI en ciblant le renforcement
de la compétence juridique pour la préparation et l’exécution des marchés
de travaux, et la maintenance et la règlementation énergétiques
La scission entre service central et pôles en matière immobilière est
problématique dans la mesure où
la direction centrale n’a pas de visibilité
sur l’exécution des travaux nécessaires et leur réalisation effective.
C -
Une stratégie immobilière quasiment achevée
Le dernier schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI)
couvrait la période 2011-2015 et in
cluait l’ex
-pôle Guyane. Dans la période
2015-
2022, l’UA a malgré tout mené de nombreuses réalisations prévues
dans les contrats de plan État-région (CPER) puis les contrats de
convergence et de transformation (CCT), négociés entre l’Etat et les
collectivités
(24 opérations pour un montant de 6,28 M€).
Le SPSI 2023-2027 est quasiment achevé, après sept années sans
SPSI
48
. Les principaux axes stratégiques du SPSI sont cohérents avec le
projet de contrat d’objectifs, de moyens et de performance (COMP)
négocié
entre l’UA et le MESR, à savoir la sécurisation des locaux et
l’amélioration des conditions d’accueil des étudiants. Neuf projets figurent
désormais dans la version définitive du SPSI et représentent un total de
35,3 M€ de travaux programmés jusqu’à décem
bre 2027, dont le
cofinancement par l’État et les collectivités territoriales dans le cadre des
CCT est assuré. Cette situation constitue un indéniable progrès.
Le nouveau SPSI traduit des choix clairs et pertinents. En cohérence
avec le CCT de Martinique, il prévoit notamment la démolition de deux
bâtiments de l’INSPé Martinique, tandis que les locaux de l’INSPé
Guadeloupe
sous
propriété
du
conseil
départemental
seraient
progressivement abandonnés afin de densifier l’occupation du campus de
Fouillole. Ces réductions de surface sont pertinentes pour éviter des coûts
de remise à niveau inabordables, et paraissent acceptables au regard des
taux d’occupation des autres bâtiments. En matière de vie étudiante, le
SPSI prévoit la construction d’un bâtiment multise
rvices en Guadeloupe
(campus de Fouillole) à horizon 2027, estimé à 26 M€
et potentiellement
réalisé sous maitrise d’ouvrage du rectorat étant donné le coût et le montage
juridique envisagé et la reconversion d’un ancien restaurant universitaire
en une nouvelle Maison de la vie étudiante en Martinique.
48
En date du 18 juin 2024, le projet de SPSI nécessite encore l’évaluation de la
Direction de l’immobilier de l’État (DIE).
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67
Sur le plan budgétaire, le projet de SPSI identifie 20,9 M€ de besoins
de travaux, se traduisant par 14,0 M€ de travaux estimés sur la période du
schéma. La capacité à tenir le rythme de réalisation envisagé constitue un
enjeu majeur pour l’UA, dont le renforcement des compétences au sein de
la DPI doit constituer un axe prioritaire. En effet, l’importance des
financements extérieurs s’accompagne d’exigences de redevabilité
élevées. Au total, il est indispensable que le renforcement des compétences
de la DPI se poursuivre, afin d’assurer une mise en œuvre la plus complète
possible du projet de SPSI 2023-2027.
D -
Des objectifs de réduction de la consommation
d’énergie qui se concrétisent
La rénovation énergétique du patrimoine est entamée grâce aux
financements du CCT et du plan de relance et formalisée dans le projet de
SPSI 2023-2027. Aux Antilles, 40 % de la consommation énergétiques
provient de la climatisation et du froid alimentaire. L’UA s’est engagée
dans le
développement de la production d’énergie solaire et dans un plan
de sobriété adopté à l’automne 2022. Il est prévu d’achever d’ici 2024 un
état des lieux précis avec un premier bilan carbone, un bilan de
consommation par bâtiment et une estimation de la facture énergétique.
Pour financer sa rénovation énergétique, l’UA a répondu avec célérité à
l’AAP du plan de relance en soumettant six projets de rénovation
énergétique, dont cinq ont été retenus. Elle a obtenu au total 3,11
M€ de
financements, dont 2,16 M
€ pour le pôle de la Guadeloupe et 0,94
M€ sur
le pôle Martinique. L’UA a également émargé début 2023 à l’AAP
« Résilience 2 », lancé dans le cadre du plan de sobriété décidé par le
Gouvernement en octobre 2022. 620
000 € seront ainsi consacrés au pôle
Mar
tinique. L’ensemble de ces projets doit permettre une économie
d’énergie de 1,253 GWEF
49
/an. Le « manager énergie » aura pour mission
de mesurer les gains réalisés grâce aux travaux réalisés.
VI -
Les systèmes d’information
En ce qui concerne les systèmes d’inf
ormation, la logique de pôle
l’a emporté sur la logique d’établissement (A). De plus, le suivi de l’activité
et la gestion de projet sont affectés par des infrastructures vieillissantes et
49
Gigawatt énergie finale.
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68
des systèmes non opérables (B). Enfin, la sécurité des systèmes
d’information demeure encore un chantier majeur (C).
A -
Une logique de pôle au détriment d’une logique
d’établissement
La direction des systèmes d’information et du numérique (DSIN),
rattachée à l’administration générale de l’UA, a é
té créée en septembre
2018. Elle est issue de la fusion des deux centres de ressources
informatiques de Martinique et Guadeloupe et comprend désormais quatre
unités fonctionnelles
50
. Les services centraux sont domiciliés sur le campus
de Fouillole à Pointe-à-Pitre et rassemblent 34 agents Le principal défi de
cette fusion a été de maintenir les personnels et techniciens informatiques
sur site tout en développant la polyvalence des agents. Les services
informatiques de l’établissement restent éclatés géograph
iquement sur cinq
sites, ce qui complique la cohésion des équipes et le suivi des projets.
B -
Un suivi de l’activité et une gestion de projet
défaillants, dans un contexte d’infrastructures
vieillissantes et de systèmes non interopérables
La DSIN ne dispose pas de visibilité stratégique et financière
actualisée. En effet, le schéma directeur du système d’information et du
numérique (SDSI) 2022-
2025 n’est à ce jour pas rédigé. Un groupe de
travail a été mis en place par l’établissement pour rédiger ce nouveau S
DSI.
L’activité informatique n’est par ailleurs pas retracée par un rapport
d’activité dédié. La DSIN ne dispose pas non plus de vision consolidée et
pluriannuelle des dépenses informatiques. L’UA n’a pas mis en place de
politique commune des achats informatiques. Les services et les
composantes commandent du matériel informatique, sans contrôle ni
homogénéisation préalable de la DSIN, ce qui augmente sensiblement le
risque pour la sécurité des SI. Aucune analyse rétrospective et prospective
des coûts n’est
donc réalisée, générant des aberrations économiques
comme par exemple l’achat d’un logiciel auprès de l’UGAP en avril
2018 pour un montant de 95 975,04
€ TTC, qui n’a jamais été opérationnel.
La gestion de projet n’est pas professionnalisée. L’UA ne disp
ose
pas d’une personne ressource et d’outil consacrés en la matière. Pourtant,
50
Les quatre unités sont
l’unité
Infrastructures,
l’unité Support
,
l’unité Applications
, et
l’unité
T
echnologies de l’information et de la communication pour l’enseignement.
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69
les projets sont nombreux et structurants, comme la refonte du SIRH, la
migration à venir d’Arpège vers Siham, la rénovation des infrastructures
serveur et de sauvegarde ou encore la refonte de la téléphonie. Le SI dédié
à la recherche
51
est quant à lui peu développé avec une offre de services
non homogène, qui se concentre surtout sur le stockage des données.
Les infrastructures sont vieillissantes, limitant les performances du
SI. Chaque pôle gère ses propres infrastructures. Il est indispensable de
tendre vers une seule infrastructure qui rassemble des ressources de calcul,
de stockage et de mise en réseau au sein d’un SI unifié, afin d’avoir une
vision et un pilotage global des ressources informatiques.
Enfin, le SI n’est pas interopérable. La communication entre les
différents SI métiers est défaillante. De nombreux outils métiers ne sont
pas reliés automatiquement aux différents SI de l’établissement. Tel est le
cas de la gest
ion des congés qui n’est pas reliée au SIRH Siham ou de la
gestion administrative des marchés publics qui repose sur l’outil métier
MARCO non connecté à l’outil de gestion financière JEFYCO, ce qui
nécessite des ressaisies manuelles de données sources d’er
reurs.
C -
La sécurité informatique, un chantier d’ampleur
L’UA ne dispose pas de politique de sécurité du système
d’information (SSI) formalisée. Aucun réseau de correspondant sécurité
n’a été développé pour diffuser une culture sécuritaire au sein des servic
es
et des composantes. La sécurité d’accès aux salles des machines et la
sécurité électrique sont variables d’un site à un autre, avec des onduleurs
non performants. La sécurité des accès au SI est également défaillante.
L’UA doit déployer une politique de
sécurisation des identités numériques
et de droits d’accès en distinguant les différents profils utilisateurs. Cela
passe par une réflexion sur le cycle de vie des comptes numériques, une
fiabilisation des données RH dans l’outil Siham et un renforcement
des
échanges entre la DSIN et la DRH sur les entrées et sorties du personnel.
Malgré des actions récentes, des efforts importants doivent se poursuivre,
tels que la mise en place d’une politique de mot de passe sécurisée et
uniforme, une mise à jour systématique des antivirus sur les deux pôles et
une uniformisation de la politique de sécurité des postes de travail.
Malgré un contexte insulaire marqué par des coupures électriques
récurrentes, l’UA n’a toujours pas mis en place de plan de continuité
d’activi
té (PCA), pour organiser le maintien de son activité pendant un
51
La recherche n’est pas présente dans l’organigramme fonctionnel de la DSIN.
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70
sinistre, ni de plan de reprise d’activité (PRA), pour restaurer l’accès à
l’infrastructure après un sinistre. L’UA a fait le choix de renforcer son
système de sauvegarde en implantant un robot de sauvegarde sur bande sur
chaque territoire, augmentant les capacités de stockage des deux pôles.
Enfin, l’UA doit se conformer au règlement général sur la protection
des données (RGPD), entré en application le 25 mai 2018, par la
déclaration auprès de
la Commission nationale de l’informatique et des
libertés (CNIL) de sa déléguée à la protection des données (DPD) et par la
mise en place d’un registre de traitement.
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71
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Même si des progrès réels ont été réalisés au cours des dernières
années, la gestion de l’Université des Antilles demeure fragile. Elle
nécessite un renforcement de son pilotage dans les principaux domaines
de
gestion
de
l’établissement
(ressources
humaines,
systèmes
d’information, immobilier, déontologie, go
uvernance, gestion financière et
comptable, etc.).
La Cour formule en particulier les recommandations suivantes :
3.
c
larifier la répartition des compétences au sein de l’UA et mettre en
place rapidement des procédures écrites visant à assurer une bonne
gestion administrative (
ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche et Université des Antilles ; fin du premier trimestre 2025) ;
4.
mettre en place une procédure budgétaire conforme aux obligations
réglementaires (
ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche et Université des Antilles ; fin 2024) ;
5.
procéder à une revue des régies et adopter un plan de contrôle de
celles-ci (Université des Antilles ; fin du premier trimestre 2025) ;
6.
mener à bien les chantiers résultant de la carte des risques en matière
de ressources humaines (Université des Antilles ; fin du premier
trimestre 2025) ;
7.
f
iabiliser les outils de gestion des services d’enseignement
et mettre en
cohérence les données de paye (Université des Antilles ; fin du premier
trimestre 2025).
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Liste des abréviations
AAP
..............
Appel à projets
AE
................
Autorisations d’engagement
AMI
..............
Appel à manifestation d’intérêt
AMUE
..........
Agence de mutualisation des universités et des établissements
ANR
.............
Agence nationale de la recherche
ANT
.............
Agent non titulaire
APOGEE
......
Application pour l’organisation et la gestion des enseignements
et des étudiants
ATER
...........
Attaché temporaire d’enseignement et de recherche
AENES
.........
Administration de l’
éducation nationale
et de l’
enseignement supérieur
BI
..................
Budget initial
BIATSS
........
Personnels ingénieurs, administratifs, techniques, sociaux
et de santé, et de bibliothèques
BOAMP
.......
Bulletin officiel des annonces de marchés publics
BOP
..............
Budget opérationnel de programme
BR
................
Budget rectificatif
BRGM
..........
Bureau de recherches géologiques et minières
BU
................
Bibliothèque universitaire
CA
................
Conseil d’administration
CAC
.............
Conseil académique
CAC
.............
Commissaire aux comptes
CAF
..............
Capacité d’auto
-financement
CAO
.............
Commission d’appel d’offres
CAP
..............
Cellule d’appui aux projets (de recherche)
CBLA
...........
Contrôleur budgétaire et de légalité académique
CCAP
...........
Cahier des clauses administratives particulières
CCE
..............
Comité électoral consultatif
CCP
..............
Cahier des clauses particulières
CCPANT
......
Commission consultative paritaire pour les agents non titulaires
CCTG
...........
Contrat de convergence et de transformation Guadeloupe
CCTM
..........
Contrat de convergence et de transformation Martinique
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COUR DES COMPTES
74
CCTP
............
Cahier des clauses techniques particulières
CEC
..............
Comité électoral consultatif
CECG
...........
Centre d’excellence caribéen de la géothermie (association)
CET
..............
Compte-épargne temps
CFVU
...........
Commission de la formation et de la vie universitaire
CGE
..............
Conférence des grandes écoles
CHU
.............
Centre hospitalier universitaire
CIFRE
..........
Convention industrielle de formation par la recherche
CMP
.............
Code de la commande publique
CNAM
..........
Conservatoire national des arts et métiers
CNESER
......
Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche
CNIL
............
Commission nationale de l’informatique et des libertés
COMP
..........
Contrat d’objectifs, de moyens et de performance
COP
..............
Convention d’occupation précaire et révocable
CP
.................
Crédits de paiement
CP
.................
Conseil de pôle
CPE
..............
Commission paritaire établissement
CPGE
...........
Classe préparatoire aux grandes écoles
CR
................
Commission de la recherche polaire
C(L)ROUS ...
Centre (local) régional des œuvres universitaires et scolaires
CSA
..............
Comité s
ocial d’
administration
CSAS
............
Comité s
ocial d’
administration spécial
CHSCT
.........
Comité hygiène, sécurité et conditions de travail
CT
................
Comité technique
CTM
.............
Collectivité territoriale de Martinique
CTS
..............
Comité technique spécial
CVEC
...........
Contribution de vie étudiante et de campus
DAF
..............
Directeur des affaires financières
DAJ
..............
Directeur des affaires juridiques
DCE
..............
Dossier de consultation des entreprises
DD et RS
......
Développement durable et responsabilité sociétale
(référentiel de France universités et la CGE)
DFGSM
........
Diplôme de formation générale en sciences médicales
DGCL
...........
Direction générale des collectivités locales
DGESIP
........
Direction générale de l’enseignement supérieur
et de l’insertion professionnelle
DGFIP
..........
Direction générales de finances publiques
DGRI
............
Direction générale pour la
recherche et l’innovation
DGS
..............
Directeur général des services
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LISTE DES ABRÉVIATIONS
75
DGSA
...........
Directeur général des services adjoint
DIE
...............
Direction de l’immobilier de l’État
DOSIP
..........
Direction de l’orientation, des stages
et de l’insertion professionnelle
DPI
...............
Direction du patrimoine et
de l’immobilier
DRARI
.........
Délégué régional académique à la recherche et à l’innovation
DRH
.............
Directeur des ressources humaines
DSCOL
........
Division de la scolarité
DSG
..............
Dialogue stratégique et de gestion
EA
................
Équipe d’accueil
ECOS
...........
Examens cliniques objectifs et structurés
ECTS
............
European credit transfer and accumulation system
ED
................
École doctorale
EDN
.............
Épreuves dématérialisées nationales
EHESS
.........
École des hautes études en sciences sociales
EPHE
............
École pratique des hautes études
EPIC
.............
Établissement public à caractère industriel et commercial
EPSCP
..........
Établissement public à caractère scientifique,
culturel et professionnel
EquipeX
.......
Équipement d’excellence
ERC
..............
European research council
ESR
..............
Enseignement supérieur et recherche
ETPT
............
Équivalent temps plein travaillé
FI / FC(U)
.....
Formation initiale / continue
FCS
..............
Fournitures courantes et services
FDR
..............
Fonds de roulement
FEDER
.........
Fonds européen de développement régional
FSE
...............
Fonds social européen
GBCP
...........
Gestion budgétaire et comptable publique
GER
..............
Gros entretien réparation
GSE
..............
Gestion des services
d’
enseignement
GWEF
..........
Gigawatt énergie finale
H2020
...........
Programme européen de recherche « Horizon 2020 »
HC
................
Heures complémentaires
HDR
.............
Habilitation à diriger des recherches
HSE
..............
Hygiène, sécurité et environnement
IAF
...............
Insuffisance d’auto
-financement
IFREMER
....
Instit
ut français de recherche pour l’exploitation de la mer
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COUR DES COMPTES
76
INRAE
.........
Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation
et l’environnement
INSERM
.......
Institut national de la santé et de la recherche médicale
INSPé
...........
Institut national supérieur du p
rofessorat et de l’éducation
IRD
...............
Institut de recherche pour le développement
ITRF
.............
Ingénieurs et techniciens en recherche et formation
IUT
...............
Institut universitaire de technologie
JEFYCO
.......
Outil de gestion financière développé par l’association Cocktail
JOUE
............
Jou
rnal Officiel de l’Union européenne
LabeX
...........
Laboratoire d’excellence
-outil du PIA de soutien
à une thématique de recherche
LDG
.............
Ligne directrice de gestion (pour les RH)
LMD
.............
Licence-master-doctorat
LTFP
............
Loi de transformation de la fonction publique (6 août 2019)
MAD
............
Mise à disposition
MAPA
..........
Marché passé par procédure adaptée
MCF
.............
Maitre de conférences
MO/MOA
.....
Maitrise d’œuvre / maitrise d’ouvrage assistée
MPFCS
.........
Marché public de fournitures courantes et services
MPT
.............
Marché public de travaux
MS
................
Masse salariale
NAS
..............
Nécessité absolue de service (logement)
OLAF
...........
Office de lutte anti-f
raude (rattaché à l’Union européenne)
ORE (loi)
......
Loi relative à l’
orientation et à la réussite des étudiants
PACES
.........
Première année commune aux études de santé
PARI
............
Politique Antilles de la r
echerche et de l’I
nnovation
PARM
..........
Pôle agroressources et de recherche de Martinique
PCA
..............
Plan de continuité d’activités
PCA
..............
Prime de charges administratives
Pépite
............
Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entreprenariat
PEPR
............
Programme et équipement prioritaire de recherche
PFRA
............
Plateforme régionale des achats de l’État
PIA
...............
Programme d’investissement d’avenir
PIOM
............
Programme d’investissement outre
-mer
PME
.............
Petite et moyenne entreprise
PPI
................
Plan particulier d’intervention
PRA
..............
Plan de reprise d’activit
és
PRAG
...........
Professeur agrégé
PSA
..............
Plan séisme Antilles
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LISTE DES ABRÉVIATIONS
77
PSSI
..............
Politique de sécurité du système d’information
PU-PH
..........
Professeur des universités-praticien hospitalier
PUA
..............
Presses universitaires des Antilles
PUR
..............
Pôle universitaire régional
RAF
..............
Responsable administratif et financier
RAFP
............
Retraite additionnelle de la fonction publique
RAN
.............
Report à nouveau
RCE
..............
Responsabilités et compétences élargies
RI
..................
Règlement intérieur
RIFSEEP
......
Régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions,
de l’expertise et de l’engagement professionnel
RIPEC
..........
Régime indemnitaire des personnels enseignants et chercheurs
RSE
..............
Responsabilité sociétale des entreprises
RUP
..............
Région ultrapériphérique de l’Union européenne
SATT
............
Société d’accélération de transfert de technologies
SCSP
............
Subvention pour charges de service public
SEN
..............
(UFR des) sciences exactes et naturelles
SIHAM
.........
Logiciel de gestion des ressources humaines
SPSI
..............
Schéma pluriannuel de stratégie immobilière
SHON
...........
Surface h
ors œuvre
nette
SJE
...............
(UFR des) sciences juridiques et économiques
STAPS
..........
Sciences et techniques des activités physiques et sportives
SUAPS
.........
Service universitaire des activités physiques et sportives
SUB
..............
Surface utile brute
SUMPS
........
Service universitaire de médecine préventive
et de promotion de la Santé
SVT
..............
Sciences et vie de la terre
TPE
..............
Très petite entreprise
UA
................
Université des Antilles
UAI
..............
Unité administrative immatriculée
UAG
.............
Université des Antilles et de Guyane
UG
................
Université de Guyane
UFR
..............
Unité de formation et de recherche
UMR
............
Unité mixte de recherche
URSSAF
.......
Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale
et d’allocations familiales
VP
................
Vice-président
ZEE
..............
Zone économique exclusive
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Annexes
Annexe n° 1 : axes locaux de recherche
.........................................................
80
Annexe n° 2
: résultats scientifiques de l’Université des Antilles
..................
83
Annexe n° 3
: exécution budgétaire de l’UA
.................................................
86
Annexe n° 4 : situation des deux INSPé
........................................................
87
L'enseignement supérieur et la recherche dans les Outre-mer - novembre 2024
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COUR DES COMPTES
80
Annexe n° 1 :
axes locaux de recherche
L’UA et les organismes de recherche présents dans les Antilles se
sont fixés six axes de recherche ayant pour objectif d’étudier
les
caractéristiques biologique, écologique, sociétale, historique, culturelle du
territoire et de sa population.
1-
La santé en environnement insulaire est une thématique de
recherche qui s’inscrit dans le concept de «
santé globale », qui
appréhende globalement la santé humaine, animale et végétale
pour traiter les maladies infectieuses, y compris émergentes, les
pathologies, les conditions de vie, d’élevage et de culture. Les
unités de recherche de l’UA spécialisées en santé, biologie
végétale et marine mais également en sciences humaines et
sociales y participent tout comme les organismes et structures
de recherche tels le CIRAD, l’INRAE, l’Institut Pasteur
Guadeloupe et les deux CHU.
2-
La biodiversité (observation, protection, restauration des
écosystèmes naturels) en milieu insulaire est un champ
multidisciplinaire impliquant plusieurs unités de recherche de
l’UA et plusieurs établissements publics de recherche. Les
activités du CIRAD Antilles-
Guyane concernent l’agriculture,
la santé animale, la conception de systèmes de culture durables,
les nouvelles variétés et pratiques culturales innovantes,
l’environnement en Guadeloupe ainsi que la gestion des
pollutions agricoles en Martinique. Le centre INRAE Antilles-
Guyane, dont le siège est en Guadeloupe, approfondit deux axes
de recherche : l’agriculture à haute performance économique et
environnementale en milieu tropical ; et la gestion de la
pollution durable des sols par le chlordécone et autres
pesticides. En Martinique, il développe des recherches
zootechniques et en agroécologie qui visent à améliorer les
productions animales dans la zone tropicale humide. Les
chercheurs de l’IRD basé en Martinique participent aux
recherches de l’université autour de la biodiversité et l’écologie
terrestre et marine, la physique des sols, les pollutions, les
risques naturels et le changement climatique. Il est à noter la
présence sur le territoire du seul centre de ressources
technologique (CRT) des Antilles-Guyane, le PARM
52
(Pôle
agro-ressources et de recherche de Martinique), une association
52
Qui porte le PIOM appelé « BIO R » pour 1,91
M€.
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ANNEXES
81
sous la tutelle de la CTM, son principal financeur. L’UA est
également organisme de tutelle du Labex Centre d’études de la
biodiversité amazonienne (CEBA) porté à titre principal par
l’université de Guyane.
3-
La mer et les océans. Le Labex
53
Corail étudie les récifs
coralliens face aux changements globaux de la planète. Aux
Antilles, le projet est porté par l’équipe BOREA qui se
concentre sur les stratégies développées par les populations des
milieux tropicaux insulaires en réponse au changement
climatique mondial ou à des perturbations anthropiques.
L’Observatoire de l’eau et de l’érosion aux Antilles (ObsErA)
implique des équipes de l’Observatoire volcanologique et
sismologique de Guadeloupe, de l’université de Bretagne
occidentale, de l’u
niversité Claude Bernard Lyon 1, du CNRS
et de l'Institut de physique du globe de Paris. Son objectif est de
constituer une base de données des flux d’eau, des flux de
sédiments et de matières organiques dans les rivières et sur les
versants.
L’unité
de
l’
IFREMER
« Biodiversité
et
Environnement »
aborde
plusieurs
thématiques
dont
l’halieutique, l’aquaculture et l’environnement. La station de
Martinique a développé une compétence spécifique sur les
dispositifs de concentration de poissons.
4-
Les risques et l’é
nergie en milieu insulaire. La thématique des
risques
naturels
et
anthropiques,
incluant
les
risques
épidémiques est également présent dans les activités de
recherche. Le BRGM
54
est présent aux Antilles sur les thèmes :
géologie, risques naturels, eau, géothermie, environnement.
Dans le domaine de l’énergie, la concertation établie entre les
collectivités de Guadeloupe, de Martinique et le BRGM vise à
l’émergence d’une filière de recherche industrielle française de
la géothermie haute énergie. Le Centre Commun de
Caractérisation des Matériaux des Antilles et de Guyane
(C3MAG) met à disposition de l’ensemble des équipes de
recherche de l’Université des Antilles et des organismes de
recherche présents dans les régions Guadeloupe, Martinique et
Guyane des moyens de caractérisation (équipements de
microscopie en particulier).
53
Outil du PIA destiné à soutenir la recherche d’équipes de recherche sur une
thématique identifiée. Convention signée en 2021 entre l’École Pratique des hautes
Études, les universités de la Réunion, de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française,
d’Antilles
-Guyane, IRD, Ifremer et École des Hautes Études en Sciences Sociales.
54
Bureau de recherche géologiques et minières.
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COUR DES COMPTES
82
5-
La dynamique des sociétés et territoires caraïbes est l’axe qui
traite les sujets de culture et patrimoine, dynamiques urbaines,
coopérations régionales et relations internationales. Le LC2S
55
,
unité
mixte CNRS dispose d’un solide ancrage dans les
Caraïbes et d’une visibilité internationale selon le HCERES.
Cette UMR est accueillie sur son pôle Martinique par
l’Université avec laquelle le CNRS souhaite échanger
davantage.
6-
Enfin l’axe numérique
développe des recherches et de
l’innovation tant au niveau de l’université que des clusters
numérique Guadeloupe/ Martinique Tech ou des start-ups des
deux territoires. L’université met à la disposition de l’ensemble
de la communauté scientifique et des entreprises des Antilles le
Centre Commun de Calcul Intensif (C3I) - dit supercalculateur.
55
Laboratoire caribéen de sciences sociales.
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ANNEXES
83
Annexe n° 2 :
résultats scientifiques
de l’Université des Antilles
Graphique n° 1 :
catégories de publications des recherches à l’UA
entre 2017 et 2022
Source
: Cour des comptes d’après les
extractions faites sur
InCites-Web of Sciences, mars 2023
Graphique n° 2 :
impact normalité de citations de l’UA
entre 2017 et 2022
Source
: Cour des comptes d’après les extractions faites
sur InCites-Web of Sciences, mars 2022
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COUR DES COMPTES
84
Carte n° 1 :
carte des collaborations de l’UA
Source
: Cour des comptes d’après les extractions faites sur InCites
-Web of Sciences, mars 2022 (plus
la couleur est foncée, plus la collaboration de l’Université des Antilles avec le pays est profonde).
Graphique n° 3 :
collaborations de recherche de l’UA par discipline
et par pays les plus représentés de 2017 à 2022
Source
: Cour des comptes d’après les extractions faites sur InCites
-Web of Sciences, mars 2023
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ANNEXES
85
Schéma n° 1 :
nombre de collaborations de l’UA
en matière de recherche entre 2017 et 2022
Source : Cour des comptes
d’apr
ès les extractions faites sur InCites-Web of Sciences, mars 2023
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COUR DES COMPTES
86
Annexe n° 3 :
exécution budgétaire de l’UA
Tableau n° 8 :
taux d’exécution des recettes de 2017 à 2022 (en €)
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Recettes fonctionnement
prévisionnelles (budget initial)
86 693 273
84 122 665
82 773 000
91 282 706
87 634 232
96 011 414
Recettes fonctionnement
prévisionnelles (dernier budget voté)
92 110 479
96 076 341
97 523 040
101 268 398
113 930 979
102 362 209
Recettes de fonctionnement
exécutées
84 230 401
93 582 557
97 891 950
95 514 055
104 884 038
91 660 351
Taux d'exécution // BI
97,2 %
111,2 %
118,3 %
104,6 %
119,7 %
95,5 %
Taux d'exécution // BR
91,4 %
97,4 %
100,4 %
94,3 %
92,1 %
89,5 %
Recettes d'investissement
prévisionnelles
(budget initial)
1 921 098
1 594 978
2 470 805
321 624
910 262
4 313 533
Recettes d'investissement
prévisionnelles
(dernier budget voté)
2 786 094
1 545 623
3 929 245
4 582 896
7 908 265
5 348 965
Recettes d'investissement exécutées
1 563 403
171 674
Taux d'exécution // BI
0,0 %
98,0 %
6,9 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
Taux d'exécution // BR
0,0 %
101,2 %
4,4 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
Source : Cour des comptes
d’après l’Université des Antilles
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ANNEXES
87
Annexe n° 4 :
situation des deux INSPé
Graphique n° 4 :
évolution du budget des INSPé entre 2017 et 2022
(en €)
Source : Cour des comptes à partir des données transmises par les INSPé Guadeloupe et Martinique
L’analyse de l’évolution du patrimoine d
es deux INSPé montre une
dégradation sensible sur la période 2014-
2021 de l’état du bâti, les
investissements nécessaires à leur maintien en l’état n’ayant pas été
effectués. Les deux INSPé souffrent de la même façon de leur éloignement
des sites principau
x de Schoelcher et de Fouillole, et n’ont un accès ni à la
restauration universitaire
56
ni aux bibliothèques, ni aux activités sportives,
la vie étudiante s’en voit d’autant réduite et contrainte.
Le cas symptomatique de l’INSPé de Martinique
Le patrimoine
de l’INSPé a fait systématiquement depuis
2009
l’objet d’un avis défavorable de la commission communale de
sécurité
57
. Le procès-verbal du 22 janvier 2020 indiquait : « les rapports de
vérification des installations électriques présentés comportent de trop
56
Le CROUS gérait dans le passé des espaces de restauration deux sites qu’il a quittés.
57
Le dernier avis favorable date de 2009.
L'enseignement supérieur et la recherche dans les Outre-mer - novembre 2024
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COUR DES COMPTES
88
nombreuses observations portant notamment sur des risques d’électrisation
et ne permettent toujours pas d’écarter le risque d’éclosion d’un incendie
».
Le conseil de l’école a, devant le risque, décidé à l’unanimité en juillet
2019, de fermer la résidence étudiante qui comptait 104 logements
58
et
rapportait 120
000€ de recettes propres à l’INSPé, qu’il a depuis perdues
sans compensation. L’UA a inscrit à son PPI
59
2023 un projet de mise en
place d’un système de sécurité incendie pour une enveloppe de 131
000
€
60
sur ressources propres, dont seulement 20
000€ sont pour l’heure engagés
en AE/CP et 9
000€ exécutés.
L’INSPé de Martinique avait fait construire, pour un coût de
1,06
M€, un bâtiment de type «
Maison de l’étudiant
», dénommé « Kay
l’INSPé
», comprenant notamment un self-
service qui n’a jamais été utilisé
en tant que restaurant. Le bâtiment a été utilisé partiellement, puis
condamné de manière définitive en novembre 2022 en raison de malfaçons.
Les travaux du bâtiment avaient débuté en 2007 sous maîtrise d’ouvrage
de l’IUFM
61
puis sont passés sous maîtrise d’ouvrage de l’UA en 2011. Le
bâtiment a été réceptionné en mars 2015 et la mise en service a eu lieu à la
rentrée 2015-
2016. La réception des travaux a été problématique, l’UA
mettant en demeure le cabinet d’architecte maître d’œuvre d’y procéder.
Celui-ci avait noté des malfaçons relevant de la garantie décennale. Dès
septembre 2015, des infiltrations d’eau par la toiture était notifiées à la DPI.
La présidente a adressé plusieurs courriers aux entreprises, entre 2015 et
2016, pour faire procéder aux réparations sur la garantie décennale. Ces
travaux n’ont pas été effe
ctués.
En 2021, le conseil de pôle proposait d’utiliser des reliquats de
subvention d’investissement de 340
000€ de la CTM pour deux projets,
dont celui de la rénovation du bâtiment KAY que l’INSPé jugeait
prioritaire. La DPI de l’UA a proposé une envelopp
e de 140
000 € ne
permettant pas de réhabiliter l’entièreté du bâtiment, et de 200
000 € pour
rénover d’anciens logements de personnels en espaces de bureaux.
Finalement, une étude de type diagnostic a été réalisée, au vu des très
nombreuses malfaçons et dégâts relevés
62
et préconise le démantèlement et
la reconstruction du bâtiment à l’identique pour un montant de 1,37
M€.
Le bâtiment est donc condamné pour un temps indéterminé.
58
Les bâtiments 4 et 5 disposaient chacun de 52 chambres de 8,5 m
2
et d’espaces
communs pouvant loger une centaine d’étudiants.
59
Plan particulier d’intervention.
60
Source : PPI 2023
–
« Mise en Place d'un SSI aux bâtiments 2,3,4 et 5 de l'INSPé de
Fort de France ».
61
Institut universitaire de formation des maitres.
62
Source : diagnostic « Réhabilitation de Kay INSPé » - Société Berim
.
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ANNEXES
89
Un projet de réhabilitation globale du site de l’INSPé de Martinique
existait déjà dans le contrat de plan 2008-2013, pour 11,5
M€, puis dans le
contrat de plan État-Région-Département 2015-2020, pour une partie non
précisée d’une enveloppe de 3,5
M€, qui n’ont pas été mis en œuvre. En
2021, l’UA a proposé dans le cadre du contrat de
convergence avec la
CTM, un projet d’investissement de 700
000 €
63
dont 80
000 € visant à
financer une étude de schéma directeur et 280
000 € dédié à un projet de
réaménagement du bâtiment 5 visant à y reloger le CNAM, logé
actuellement sur le campus de Sc
hoelcher. Le conseil de l’INSPé
64
s’est
opposé à ce projet d’aménagement qu’il n’avait pas sollicité et qui ne lui
aurait pas profité directement.
La nouvelle direction de l’Université élue début 2022 avait indiqué
dans sa profession de foi vouloir « utiliser le fonds de roulement de
l’Université
pour
réaliser
d’importants
projets
comme
(…)
un
investissement sur le bâti de l’INSPé de Martinique, afin de réouvrir la
résidence étudiante dès la rentrée prochaine ». Cependant, par courrier du
17 janvier 2023,
le président de l’UA indiquait au directeur de l’INSPé que
l’Université n’avait pas l’hébergement pour mission et que l’institut devrait
renoncer définitivement à cette activité. Il s’engageait par ailleurs à porter
un projet très ambitieux de refondation du campus.
L’étude devant aboutir à un «
schéma directeur du campus de Fort-
de-
France » a été lancée en novembre 2022 par l’UA pour le site
de Fort-
de-
France. L’INSPé n’a été convié qu’à la réunion de lancement et a été
sollicité pour renseigner un tableau de besoins en surfaces. Il est
insuffisamment associé aux réflexions conduites sur le devenir du site. Il
n’avait notamment pas été averti à l’avance du projet de création d’un
institut d’urbanisme porté par la collectivité territoriale. Le livrable de
l
’étude est daté de janvier 2023. L’étude livre quatre
scenarii
d’intervention
possibles
:
premièrement, remise
aux
normes
règlementaires
de
l’ensemble
des
surfaces
utilisées
;
deuxièmement,
rénovation des bâtiments et d’une partie des logements
étudiants sans accueil de nouvelles entités ; troisièmement, démolition et
reconstruction sur la base d’un nouveau programme fonctionnel et accueil
de nouvelles entités : CNAM, SUFC, etc.) ; quatrièmement, fermeture du
campus de Fort de France et déménagement des occupants vers le campus
de Schoelcher.
63
Dont 80 000
€ sur fonds
de l’
État et 620 000
€ sur fonds de la collectivité.
64
Séance du 15/09/2021 -
Vote de 13 votants sur 16 contre l’attribution de 280
000
€
sur le CCT pour l’aménagement de locaux destinés au CNAM.
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L’UA n’a pas partagé les résultats de cette étude avec l’INSPé. Le
président de l’UA a par ailleurs nommé en février 2023 un chargé de
mission « refondation du campus de Fort-de-France » qui aura également
la mission de «
mettre en place sur ce campus un institut d’urbanisme et
d’architecture
».
L’avant
-projet de SPSI 2023-2027 consulté au mois de mars
2023 mentionne un projet de « confortement sismique, désamiantage et
restructuration du bâtiment 6 de l’INS
Pé » qui ne répond pas à la nécessité
de rénover de manière globale le patrimoine de l’INSPé. Cette opération
devrait être déprogrammée compte-tenu des conclusions du livrable qui
prônent une intervention globale et de l’absence de visibilité sur le projet
de « refondation du campus ».
Concernant l’INSPé de Guadeloupe, le contrat de convergence
2019-
2028 signé entre l’État et la Région Guadeloupe prévoit une action
de « rénovation des campus de Saint-Claude et de Fouillole ». Parmi les
actions contractualisées ou valorisées figurent « la transformation de
locaux de l’ESPE existants en bureaux pour l’IUFC et la réhabilitation des
bureaux de l’administration de l’ESPé
» pour 632 000
€ sur financement
uniquement État. Ce projet est partiel et ne correspond pas au besoin global
de rénovation
de l’INSPé.
Les INSPé n’ont pas fait l’objet d’un suivi immobilier sérieux
depuis une décennie, leur état nécessite aujourd’hui un investissement
considérable pour pallier l’absence de maintenance et de gros entretien
adéquats. L’absence de réalisation et
de continuité dans les projets
d’investissement soutenus par l’État et les collectivités, propriétaires des
bâtiments, est regrettable.
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