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C
OUR DES
C
OMPTES
Les aéroports français
face aux mutations
du transport aérien
Juillet 2008
L
a présente synthèse est destinée à faciliter la lecture et
le commentaire du rapport de la Cour des comptes qui,
seul, engage la juridiction.
Les réponses des administrations et des organismes
intéressés sont insérées dans le rapport public.
J
Avertissement
Synthèse
du
Rapport public thématique
Sommaire
3
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Présentation
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Défis et contraintes de l’adaptation
des aéroports français . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
2
Les réformes de 2004 et 2005 :
vers un Etat régulateur
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9
3
Les performances d’Aéroports de Paris . . . . . . . .11
4
La situation des aéroports de province . . . . . . . .15
5
La réponse aux préoccupations
environnementales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17
6
La difficile optimisation de l’infrastructure
aéroportuaire française . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .19
Recommandations prioritaires . . . . . . . . . . . . . . . . .20
Présentation
5
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Le secteur aéroportuaire a connu récemment une profonde réforme en deux étapes.
La première, au travers de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales, a décentralisé près de 150 aéroports au profit de différentes
collectivités territoriales ou groupements. La seconde étape, intervenue avec la loi du
20 avril 2005 relative aux aéroports, a transformé Aéroports de Paris (ADP) en
société anonyme et ouvert la voie à son introduction en Bourse. Cette loi a aussi engagé
une transformation profonde des douze grands aéroports régionaux non décentralisés en
permettant la création de sociétés aéroportuaires au capital desquelles peuvent entrer les
collectivités territoriales, les chambres de commerce et d'industrie et l'Etat, ainsi que des
intérêts privés par la suite. Enfin, la loi a revu le mécanisme de régulation économique
pour ADP et les grands aéroports régionaux.
Trois ans après cette réforme d'ampleur, les effets des deux lois de 2004 et 2005
commencent à se matérialiser : le transfert de propriété est devenu effectif
en mars 2007
pour les aéroports décentralisés et les trois premières sociétés aéroportuaires ont vu le
jour en 2007 (Lyon, Bordeaux et Toulouse). Nice devrait être constitué en société en
2008 et Montpellier en 2009.
A ce moment charnière, les juridictions financières ont examiné les potentialités
et les risques inhérents au nouveau cadre institutionnel mis en place. La Cour a ainsi
examiné les comptes et la gestion d'ADP tandis que 25 chambres régionales et
territoriales des comptes contrôlaient la gestion de 57 aéroports de province et d'outre-
mer. Ce large échantillon couvre plus de 96 % du trafic de passagers et la quasi-totalité
du trafic fret en France métropolitaine. Il présente un éventail diversifié de situations,
aussi bien sous l'angle financier que pour les modes de gestion
(
l'aéroport de Bâle-
Mulhouse n'a pas été inclus dans l'échantillon contrôlé en raison de la spécificité de son
statut. Créé par une convention entre la France et la Suisse, il n'entre pas dans la
compétence des juridictions financières françaises).
J
Le décret n° 2005-1070 du 24 août 2005 fixe la liste des aérodromes civils appartenant à l'Etat
exclus du transfert aux collectivités territoriales ou à leur groupement. Ceci concerne les aérodromes
de Bordeaux-Mérignac, Lyon-Saint-Exupéry et Lyon-Bron, Marseille-Provence, Aix-Les Milles
et Marignane-Berre, Montpellier-Méditerranée, Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire-Montoir,
Nice-Côte d'Azur et Cannes-Mandelieu, Strasbourg-Entzheim, Toulouse-Blagnac, Cayenne-
Rochambeau, Fort-de-France-Martinique-Aimé-Césaire, Pointe-à-Pitre-Le Raizet, Saint-Denis-
Gillot. Certaines de ces dix-sept plates-formes étant du ressort de mêmes gestionnaires, seules douze
entités sont à distinguer, huit en métropole et quatre outre-mer.
Cour des comptes
7
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
Défis et contraintes
de l’adaptation
des aéroports français
1
Un secteur aérien
en pleine évolution
Il incombe avant toute chose aux
aéroports d'accompagner la croissance
du trafic en satisfaisant aux demandes
de leurs clients, passagers et compagnies
aériennes, sous une pression concurren-
tielle accrue. A cette fin, ils réalisent
d'importants investissements et trans-
forment leur offre pour l'enrichir sous
deux aspects :
- mettre en place l'organisation et
l'infrastructure nécessaire aux presta-
tions de plaques tournantes pour les
passagers
en
correspondance
qui
répondent aux besoins d'optimisation
des grandes compagnies regroupées en
alliances internationales ;
- offrir des conditions d'accueil
spécifique pour les compagnies à bas
coûts,
notamment
des
conditions
tarifaires aménagées ou l'ouverture
d'aérogares “bas coûts”.
L'accueil des compagnies à bas
coûts représente une véritable oppor-
tunité pour certains aéroports mais elle
n'est pas sans risques. En effet, les
gestionnaires d'aéroports signent des
contrats fréquemment déséquilibrés
avec les compagnies à bas coûts pour
obtenir l'implantation de ces dernières.
Ils mettent en place de coûteux dispo-
sitifs spécifiques pour accueillir ces
compagnies dans des conditions juridi-
ques parfois contestables et réalisent des
investissements importants sans assu-
rancequant à la pérennité et la fréquence
des dessertes aériennes.
Les statuts des aéroports ont évolué
dans tous les pays pour favoriser leur
adéquation à un contexte de plus en plus
libéralisé. Il n'existe toutefois pas de
modèle statutaire unique pour les
aéroports bien que l'on assiste à une
certaine convergence en Europe, avec
l'ouverture du capital et l'entrée en
Bourse des aéroports de stature mon-
diale. Les adaptations du statut d'ADP
et des grands aéroports
régionaux
français s'inscrivent dans ce mouve-
ment général.
Des marges d’action
nationales de plus
en plus réduites
Les
marges
de
manoeuvre
de
l'intervention publique nationale dans le
domaine aéroportuaire tendent à se
réduire dans un contexte de libérali-
sation et de montée en puissance de la
réglementation communautaire, aussi
bien au plan opérationnel et technique
que pour l'encadrement des subvention-
nements publics. Progressivement, la
réglementation communautaire cons-
titue un ensemble cohérent, que les
pouvoirs publics doivent faire respecter.
Défis et contraintes de l’adaptation
des aéroports français
8
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les dispositions qui s'imposent dans
le domaine de la sûreté (prévention des
actes délictueux) rendent la gestion
aéroportuaire plus complexe et plus
coûteuse. Les dépenses ont quadruplé
depuis 2001 pour atteindre 563 M€ en
2007 et représentent une part de plus en
plus importante des charges d'exploita-
tion. Le recours mal maîtrisé à la sous-
traitance, couplé à la faible concurrence
entre intervenants dans ce secteur, se
traduit fréquemment par des dérives de
coûts et de prestations.
Les préoccupations environnemen-
tales montent en puissance et la maîtrise
des nuisances que subissent les riverains
est devenue l’une des conditions
essentielles de l’avenir aéroportuaire des
grandes agglomérations, tout particuliè-
rement s’agissant des nuisances sonores.
9
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
Les réformes de 2004
et 2005 : vers un Etat
régulateur et la
responsabilisation des
collectivités
2
Les évolutions
statutaires
Les statuts des aéroports ont évolué
dans tous les pays pour favoriser leur
adéquation à un contexte de plus en plus
libéralisé. Il n'existe toutefois pas de
modèle statutaire unique pour les
aéroports bien que l'on assiste à une
certaine convergence en Europe, avec
l'ouverture du capital et l'entrée en
Bourse
des
aéroports
de
stature
mondiale. Les adaptations du statut
d'ADP
et
des
grands
aéroports
régionaux français s'inscrivent dans ce
mouvement général. Les adaptations du
cadre juridique français ont été inscrites
dans les lois du 13 août 2004 et du
20 avril 2005. Elles distinguent les cas
d’Aéroports de Paris,
des grands
aéroports régionaux et des aéroports
décentralisés
(1)
.
La loi de 2004 a transféré aux
collectivités territoriales ou à leurs
groupements la propriété et la gestion
de 150 aéroports.
Ces collectivités
auront à effectuer des choix quant à
l'avenir de ces plates-formes, notam-
ment en prenant en compte les aspects
financiers. Elles disposent pour cela de
la plénitude de propriété et d'une grande
latitude quant aux modes de gestion et à
la tarification des services aéropor-
tuaires.
La loi de 2005 a donné aux grands
aéroports
régionaux,
qui
restent
propriété de l'Etat, un nouveau cadre
juridique sous la forme de “sociétés
aéroportuaires”. Leur
création a été
engagée en 2007. Les règles nouvelles
clarifient
les
rôles
respectifs
du
concessionnaire
et
du
concédant,
ramènent le cahier des charges vers le
droit commun des concessions et
permettent la conclusion de contrats
d'une durée suffisante pour donner la
visibilité nécessaire aux gestionnaires.
Cette transformation, effective pour
quatre
plates-formes
en
2008,
interviendra pour les autres au fur et à
_______
(1)
Le trafic se répartit entre ADP (57 % du trafic passagers national), les grands aéroports
régionaux pour 30 % (dont 4 % pour ceux d’outre-mer) et les aéroports décentralisés pour 13 %
(dont 3 % pour l’outre-mer).
Les réformes de 2004 et 2005 :
vers un Etat régulateur et la
responsabilité des collectivités
10
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
mesure de l'expiration des concessions
en
cours.
L'Etat,
les
collectivités
territoriales
et
les
chambres
de
commerce et d’industrie (CCI) pourront
ainsi,
à terme,
cohabiter avec des
investisseurs privés porteurs de capitaux
et de nouvelles méthodes entrepre-
neuriales dans l'actionnariat de ces
sociétés gestionnaires.
Il reviendra à l'Etat régulateur,
propriétaire des plates-formes et action-
naire des sociétés aéroportuaires, d'évi-
ter la constitution de positions domi-
nantes parmi les nouveaux exploitants et
prestataires de ces aéroports.
La transformation de l'établissement
public ADP en société anonyme lui
permet de répondre à ses besoins de
financement, liés notamment à son
important programme d'investissement.
La transformation en société anonyme
s'est accompagnée de la définition d'un
contrat de régulation économique.
Vers de nouvelles
modalités de
régulation
La régulation économique d'ADP et
des aéroports d'Etat est désormais
formalisée dans le cadre de contrats qui
fixent pour une durée de cinq ans le
rythme d'évolution des redevances
aéronautiques en contrepartie d'ob-
jectifs en matière de qualité de service et
d'investissement. ADP est le premier à
être soumis à un tel contrat de régu-
lation, les grands aéroports régionaux
devant suivre progressivement.
Les nouvelles modalités de régula-
tion posées par la loi du 20 avril 2005 ne
remettent pas en cause le modèle dit de
“caisse unique”. Dans ce schéma, les
recettes tirées des activités extra-
aéronautiques (revenus des commerces,
des parkings, etc.) viennent réduire le
montant des redevances aéronautiques
nécessaire à la couverture des charges
aéronautiques. Ce mécanisme profite
aux compagnies aériennes, et en fin de
compte aux passagers, pour lesquels le
prix des billets est moindre. Il minore
néanmoins artificiellement le coût de
l'utilisation d'infrastructures aéropor-
tuaires qui tendent vers la saturation.
Ceci est donc peu satisfaisant au regard
de l'émergence d'une “vérité des coûts”
du transport aérien. Il faut toutefois
souligner les risques liés à l'adoption
d'un système de “double caisse”. Celle-
ci bénéficierait aux aéroports mais
pourrait
conduire
à
des
hausses
tarifaires trop abruptes si elle n'était pas
accompagnée de gains de productivité
sur les activités aéronautiques.
La mise en place d'un système
intermédiaire, dit de “caisse unique
aménagée”, devra trouver, au cas par
cas, l'équilibre entre ces différentes
considérations.
11
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Une situation
financière meilleure
ADP est depuis 2006 une société
cotée
en
bourse
détenue
majori-
tairement par l'Etat. Le redressement de
ses résultats et la diminution de son
endettement
sont
notables.
Cette
amélioration est notamment liée à
l'opération d'optimisation de bilan qui a
été effectuée avant l'ouverture du
capital. L'intégralité du domaine foncier
et immobilier a été transférée en pleine
propriété à ADP pour porter l'actif
correspondant
à
un
montant
de
4,5 milliards d'euros, soit la moitié de
l'actif total.
Le choix de transférer en pleine
propriété la société ADP les biens du
domaine public de l'Etat
prive ce
dernier des avantages liés à la propriété
de ces actifs sur le long terme. Ce qui est
d’autant plus critiquable du point de vue
de la préservation de son intérêt, qu’il
existait la possibilité d'opter pour une
solution consistant à ne céder que
l'usufruit de ces biens domaniaux.
Le contrat de
régulation
économique
La fixation du rythme d’évolution
des redevances dans le contrat de
régulation économique (CRE) d'ADP
en garantissant celles-ci sur cinq ans a
contribué à l'attractivité du titre en
bourse. Elle a surtout fait apparaître
l'ambiguïté de la position de l'Etat,
partagé entre ses prérogatives de
régulateur et ses motivations d'action-
naire majoritaire d'ADP et minoritaire
d'Air France-KLM. Le dispositif
institu-
tionnel de fixation n'a pas clarifié la
position de l'Etat, contrairement à la
motivation première de la réforme.
Pivot du dispositif de régulation, le
CRE ne reflète pas un engagement
ambitieux en matière de gains de
productivité, malgré les progrès effecti-
vement atteints par l'entreprise : ADP
ne prévoit en effet qu'un rattrapage sur
la période 2006-2010 de la perte de
productivité constatée sur la période
2000-2005. Le taux élevé d'augmen-
tation des redevances retenu dans le
CRE vise en priorité la réalisation des
investissements nécessaires à l'accueil du
trafic et à l'amélioration de la qualité de
service.
Les performances
d’Aéroports de Paris
3
Les performances
d’Aéroports de Paris
12
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Une qualité de
service insuffisante
Bien
qu’ADP
bénéficie
d’une
situation favorable du fait de sa position
de “passage obligé” pour une grande
partie du trafic, il devrait maintenir un
niveau de qualité élevé pour ses
passagers.
Or la qualité de service
demeure insuffisante malgré certaines
améliorations et les efforts mis en
oeuvre.
De nombreux points noirs
persistent comme la facilité de circula-
tion à l'intérieur des terminaux, l'infor-
mation donnée aux passagers, la gestion
des
files
d'attente,
le
rapport
qualité/prix des boutiques et des
bars/restaurants,
les conditions de
passage des contrôles transfrontières de
la police aux frontières aux heures
d'affluence, les conditions de transport
des passagers par autobus entre les
avions et les aérogares lorsque les avions
ne sont pas directement accessibles. Le
“taux de contact”
(2)
est faible par
rapport aux aéroports comparables.
Enfin, certains partis pris architecturaux
ne facilitent pas l'exploitation des termi-
naux.
La conception de l'aéroport
comme lieu de prestige a parfois primé
sur la fonctionnalité des installations,
rendant leur réaménagement désormais
difficile et coûteux.
Cependant les leviers d'amélioration
n'ont
pas
tous
été
suffisamment
explorés. A cet égard, les clauses du
premier contrat de régulation économi-
que constituent un outil insuffisant pour
améliorer significativement la qualité du
service rendu aux passagers et aux
compagnies. Les indicateurs ne rendent
pas compte de manière suffisamment
globale de la qualité de service ; les
objectifs quantifiés qui leur sont
associés reflètent une ambition modeste.
Le système de bonus malus qui est très
innovant a toutefois une incidence
limitée du fait de son dispositif,
notamment le choix des bornes et les
modalités de son déclenchement.
Par
ailleurs,
la
mission
de
coordination des différents intervenants
sur les plates-formes (services de l'Etat,
compagnies aériennes), confiée à ADP
par la loi du 20 avril 2005, se heurte
toujours à des difficultés qui constituent
un obstacle majeur à l'obtention d'un
haut niveau de qualité. En effet, ADP ne
contrôle pas tous les éléments qui ont
un impact sur la qualité perçue par les
usagers. Il en va ainsi par exemple de
l'inadaptation des effectifs de la Police
aux frontières par rapport aux variations
du flux de passagers.
Le nombre
d'agents aux postes de contrôle demeure
quasiment stable tout au long de la
_________
(2) Un avion traité “au contact” est celui dont le débarquement ou l'embarquement ne nécessitent
pas de transport par bus jusqu'à l'aérogare mais s'opèrent directement par une passerelle menant
de l'avion à l'aérogare. Dans la situation inverse, l’avion est traité “au large”.
Les performances
d’Aéroports de Paris
13
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
journée sans s'adapter aux pics de trafic.
Cette absence de réactivité entraîne un
allongement des files et du délai de
passage des contrôles. Cette inadap-
tation des effectifs a pu aller jusqu'au
maintien de la présence d'agents de la
DPAF 24h sur 24 à l'aérogare CDG1
alors que le trafic aérien y était
interrompu entre 23h et 5h du matin.
Enfin,
la
liaison
ville-aéroport
souffre de fortes carences, aussi bien
pour Roissy que pour Orly. La réalisa-
tion dans les délais prévus du projet de
CDG-Express ainsi que l'amélioration
de la desserte de Paris-Orly représentent
un enjeu crucial, tant pour les passagers
que pour les plates-formes dans leur
ensemble.
15
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
La situation des aéroports
de province
4
Au total, il apparaît que le montant
cumulé de toutes les subventions
d'exploitation et d'équipement (hors
mission de sécurité-sûreté) perçues par
les grands aéroports régionaux et les
aéroports
décentralisés
les
plus
importants atteint près de 370 M€ sur la
période 2000-2006, dont 200 M€ pour
les aéroports décentralisés.
A ces
chiffres s’ajoute la prise en charge
directe par certaines collectivités de
dépenses d’investissement qui n’appa-
raissent donc pas dans les comptes des
aéroports bénéficiaires.
La faiblesse des
résultats des grands
aéroports régionaux
Les
douze
grands
aéroports
régionaux sont pour la plupart tout juste
en équilibre financier alors que le
nombre de passagers accueillis devrait
leur permettre de dégager des profits.
L’Aéroport de Strasbourg risque de se
trouver dans une situation difficile en
raison de l’érosion de son trafic
consécutive à l’arrivée du TGV Est.
Pratiquement tous dégagent cependant
une capacité d'autofinancement positive
significative sur la période 2001-2006.
En revanche, les investissements
(hors sécurité-sûreté) des grands aéro-
ports régionaux donnent lieu dans tous
les cas (à l'exception de Nice et de
Bordeaux) à des subventions des
collectivités territoriales. L'incidence des
subventions
d'exploitation
sur
la
capacité d'autofinancement est mineure
pour l'ensemble de ces aéroports, une
fois neutralisé l'impact des éléments liés
à la sécurité-sûreté. La situation à Lyon
demeure la moins favorable des grands
aéroports de métropole : l'encours de
dette, supérieur à cinq fois le montant
des fonds propres (somme des capitaux
propres, des provisions et des droits du
concédant) a quasiment doublé depuis
2001.
Le déficit chronique
de la quasi-totalité
des aéroports
décentralisés
Dans la quasi-totalité des cas, ces
plates-formes
au
faible
trafic
ne
dégagent
pas
un
autofinancement
positif
en l'absence de subventions
d'exploitation.
La capacité d'endet-
tement
est
très
faible
et
les
investissements sont très fréquemment
financés
prioritairement
pas
les
subventions des collectivités territo-
riales. Ces subventions dépassent dans
plusieurs cas un montant de cent euros
par passager et atteignent parfois des
montants très élevés. Sauf
en cas de
profil
de trafic atypique, ce constat
conduit à s'interroger sur le maintien en
activité de certaines plates-formes.
Cependant leurs retombées économi-
ques locales ne font pas l'objet d'études
permettant de les quantifier de façon
sûre
et
d'établir
un
bilan
coûts/avantages fiable.
17
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
La réponse aux
préoccupations
environnementales
5
Les nuisances environnementales
font l'objet d'un encadrement tant
communautaire que national portant sur
la prévention, la lutte et la réparation des
nuisances subies.
La lutte contre les nuisances sonores
est menée depuis plusieurs années ; c'est
l'aspect auquel les populations sont le
plus sensibles.
La maîtrise de
l'urbanisation
La loi du 11 juillet 1985 relative à
l'urbanisme au voisinage des aéro-
dromes a institué les plans d'exposition
au bruit (PEB) qui permettent de limiter
la construction dans les zones affectées
par des nuisances sonores. Le PEB est
défini en fonction du trafic de l'aéroport
et de ses hypothèses de développement
à court, moyen et long terme.
Les résultats positifs de cette action
préventive tendent à “s'autodétruire”.
En effet, une attention suffisante n'est
pas toujours portée à l'exposition aux
nuisances sonores lors de la délivrance
des
permis
de
construire.
Ainsi,
l'amélioration des niveaux de bruit
autour des aéroports a pu parfois
conduire à des situations paradoxales :
alors que les contours de la diffusion du
bruit
se
rétractaient
du
fait
de
l'amélioration constante des perfor-
mances sonores des flottes et de la
modification des trajectoires des avions,
l'étendue des bâtiments et le nombre de
personnes jugées fortement exposées au
bruit ont continué d'augmenter. La
révision des plans d'exposition au bruit
rendue obligatoire par la loi de 2002 a
montré les difficultés de l'exercice ;
plusieurs plans n'ont pu être adoptés
dans les délais fixés par la loi ; celui de
Roissy ne repose pas sur un accord
en
matière de projections à vingt ans du
nombre de mouvements aériens.
La réduction des
nuisances sonores
Des restrictions d'exploitation peu-
vent être décidées par le gestionnaire de
l'aéroport ou par l'autorité de tutelle. Les
vols de nuit sont les premiers visés par
ces restrictions. Une autorité adminis-
trative indépendante, l'ACNUSA, peut
infliger des sanctions aux compagnies
aériennes en cas de non respect des
règles définies dans ce domaine. Les
pouvoirs de l'autorité ont été récem-
ment renforcés, mais le montant des
amendes pourrait être accru pour être
plus dissuasif.
La réponse aux préoccupations
environnementales
18
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les processus d'aide à l'insono-
risation des habitations situées dans les
zones les plus exposées au bruit sont
complexes et parfois d'une longueur
excessive pour résorber le stock des
habitations ouvrant droit à indemni-
sation. En raison de l’insuffisance du
taux de la taxe sur les nuisances sonores
aériennes (TNSA),
certaines plates-
formes ont souffert d'un important
déficit en moyens de financement pour
faire face à leurs besoins. Ceci découle
aussi de l'insuffisante maîtrise de
l'urbanisation des zones riveraines des
aéroports et de l'accroissement du trafic.
Une réforme du dispositif
d'aide à
l'insonorisation
semble
nécessaire,
passant notamment par une révision du
processus de gestion des dossiers d'aide
et des modalités de leur attribution. De
plus,
l'éventuelle participation des
collectivités territoriales au financement
de la TNSA, au côté des passagers et des
compagnies aériennes,
pourrait être
étudiée au vu de leur responsabilité en
matière d'urbanisme.
A
plus
long
terme,
l'aide
à
l'insonorisation ne devrait constituer
qu'un moyen de dernier ressort. Les
réductions des nuisances à la source,
tant par l'amélioration des performances
acoustiques des appareils accueillis sur
les aéroports que par l'adaptation des
modalités d'approche des avions, et en
outre,
par une gestion adaptée de
l'urbanisation,
doivent
rester
une
priorité de l'action publique.
19
Cour des comptes
La difficile optimisation
de l’infrastructure
aéroportuaire française
6
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les défauts de
l'implantation des
aéroports
La carte des aéroports français est le
produit de l'histoire et d'initiatives
dispersées plus que d'une politique
affirmée. Il n'y a pas de “réseau” au sens
d'organisation structurée répartissant la
demande de transport aérien, celle-ci ne
correspondant pas à l'organisation du
transport aérien ni à la gestion de ses
flux. Pour autant, la mise en place d'une
certaine cohérence dans le maillage des
aéroports français apparaît nécessaire
pour une utilisation rationnelle des
deniers publics et une approche soute-
nable de l'aménagement du territoire.
Or, elle se heurte à différents obstacles,
notamment le manque de concertation
entre gestionnaires de plates-formes
proches les unes des autres et le
maintien en activité de petits aéroports à
très faible trafic.
La décentralisation fait désormais
reposer la responsabilité principale de la
rationalisation des infrastructures sur les
collectivités territoriales. Leurs interven-
tions multiformes ne procèdent pas
pour l'heure d'une démarche coor-
donnée.
Au surplus,
le risque de
requalification en “aides d'Etat” de
certaines subventions doit inciter à plus
de rigueur. Plus globalement, la défini-
tion d'une stratégie de gestion de la part
des collectivités territoriales, nouvelles
propriétaires de ces plates-formes, est
désormais nécessaire.
Les modestes
résultats de
l'intermodalité
L'Etat a quant à lui fait preuve de
constance en maintenant une priorité au
réseau ferré par rapport au réseau aérien
pour les liaisons “courtes”. Toutefois,
l'intermodalité entre les réseaux ferré et
aérien reste encore très en deçà de ses
possibilités, en particulier à Lyon et à
Paris où des gares TGV ont été
construites dans les aéroports de Saint-
Exupéry et de Roissy-CDG.
La situation d'ADP
La
planification
des
capacités
aéroportuaires fait intervenir des critères
de long terme liés au taux de croissance
du trafic aérien, aux évolutions techno-
logiques des aéronefs, à la navigation
aérienne ainsi que des considérations
telles que le niveau de nuisances sonores
et environnementales acceptable pour
un aéroport donné. Cette complexité
s'observe particulièrement pour l'aéro-
port de Roissy-Charles de Gaulle. En
dépit de l'incertitude sur l'horizon exact
de saturation de Roissy, envisagé aux
alentours de 2025,
l'Etat ne peut
s'abstenir de prendre dès à présent les
dispositions préservant sa capacité
d'offrir, le moment venu, une réponse
aux besoins du trafic en région
parisienne.
20
Recommandations prioritaires
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Sur chacun des aspects de la
politique aéroportuaire qu'elles ont
examinés, les juridictions financières
ont formulé des recommandations.
Aux chambres de
commerce et d'industrie
(CCI) :
x
Accélérer la mise en place des
sociétés aéroportuaires
: les grands
aéroports
régionaux
d'Etat
sont
appelés à être gérés par des sociétés
aéroportuaires dans lesquelles l'action-
nariat public pourra cohabiter avec des
sociétés
privées.
Cette
évolution
pourra être porteuse de nouvelles
opportunités au gré du renforcement
d'une culture entrepreneuriale au sein
des gestionnaires. Afin de tirer au
mieux parti des potentialités de cette
réforme, il est souhaitable que les CCI
utilisent la faculté, que leur a conférée
la loi du 20 avril 2005, d'anticiper la
création de ces sociétés aéroportuaires
avant l'expiration des concessions en
cours.
x
R
enf
or
cer la tr
anspar
ence des
comptes
. Des pratiques comptables
contes-tables rendent des retraitements
néces-saires avant toute analyse et
brouillent l'image que devraient offrir
les comptes sur l'activité des aéroports.
Il est nécessaire d'améliorer la fiabilité
des comptes et l'information finan-
cière, notamment en établissant une
comptabilité analytique indispensable
pour la fixation des redevances
A l'Etat :
x
Améliorer le rôle de l'Etat
régulateur. Les contrats de régulation
économique doivent être précis et
contraignants notamment en termes de
gains de productivité. Les méthodes de
fixation des redevances et d'encadre-
ment de leur évolution à moyen terme
sont à perfectionner.
En matière de qualité de service,
les objectifs poursuivis devraient être
plus exigeants. Les indicateurs pris en
compte devraient aussi être plus
orientés vers les résultats tels que
perçus par les passagers et les
compagnies,
et
moins
vers
la
réalisation d'obligations de moyens. Ils
devraient être accompagnés de clauses
de bonus-malus plus significatives.
x
En matière d'environnement,
étudier une ada
pta
tion des dispositifs
de prév
ention et de répar
a
tion des
n
uisances imputa
b
les aux aér
opor
ts
:
réduction des nuisances sonores à la
source,
restriction
effective
des
constructions en zone sensible, prise
en compte plus marquée du principe
“pollueur payeur”, simplification et
accélération des aides à l'insonorisation
des logements existants.
21
Recommandations prioritaires
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
x
En ma
tièr
e de sûr
eté-sécurité
,
assurer
cette
fonction
régalienne
essentielle
avec
une
a
ttention
par
ticulièr
e à l'ef
f
icience de la dépense
.
A l'Etat et/ou aux
collectivités
territoriales et aux
gestionnaires
d'aéroports
:
x
Promouvoir la qualité de
service d'ADP
:
- pour la direction générale de
l'aviation civile, définir précisément le
rôle de coordination dévolu à ADP par
la loi du 20 avril 2005 et mettre en
oeuvre les moyens nécessaires à sa
concrétisation ;
- pour la direction de la police aux
frontières, adapter les effectifs aux
volumes du trafic, en tenant compte
notamment
des
périodes
durant
lesquelles l'aéroport n'accueille pas de
passagers ou,
à l'inverse,
lors des
pointes d'affluence ;
- pour ADP, renforcer la gestion
des marchés de sous-traitance,
en
particulier en appliquant systématique-
ment les modalités de bonus-malus ;
-
pour
ADP,
renforcer
la
sensibilisation et la mobilisation aux
objectifs de qualité de service à tous les
niveaux hiérarchiques de l'entreprise.
x
R
ecourir en tant que de besoin à
une e
xper
tise juridique e
xter
ne
lors des
négociations avec les compagnies
aériennes à bas coûts. Le déséquilibre
entre les compagnies aériennes et les
petites plates-formes, la concurrence
que se livrent celles-ci pour attirer les
transporteurs,
les
investissements
qu'elles sont conduites à engager,
justifieraient qu'un appui juridique soit
recherché avant la signature des
conventions
entre
aéroports
et
compagnies.
x
V
aloriser
les
a
touts
de
l'infr
astr
uctur
e
.
Clarifier les différents
choix
face
aux
perspectives
de
saturation des aéroports parisiens à
moyen terme ;
Rechercher des synergies d'exploi-
tation entre plates-formes géographi-
quement proches, de même que le
développement de solutions intermo-
dales pour contribuer à une utilisation
plus
efficace
des
infrastructures
existantes.