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avis n° 2023-0252
Avis n°2023-0252
Séance du 20 décembre 2023
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ème
section
AVIS
Article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales
COMMUNE DE VIC-LE-COMTE
Département du Puy-de-Dôme
LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES AUVERGNE-RHÔNE-ALPES
VU
le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 1612-15, L. 1612-
19 , R. 1612-14 et R. 1612-32 et suivants, ainsi que les articles L. 2123-12 et suivants ;
VU
le code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-3, L. 211-11 et
R. 232- 1;
VU
les lois et règlements relatifs aux budgets des communes et des établissements publics
communaux et intercommunaux ;
VU
l’arrêté
du président de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes fixant
la composition des sections et l’arrêté portant délégation de signature aux
vice-président et
présidents de section ;
VU
la saisine au titre de l’article L.
1612-15 du CGCT du préfet du Puy-de-Dôme, en date du
27 octobre 2023, enregistrée au greffe le 2 novembre 2023 ;
VU
la lettre du 9 novembre 2023 adressée par le président de la chambre régionale des
comptes Auvergne-Rhône-Alpes au maire de la commune de Vic-le-Comte,
l’i
nformant de la
saisine
et l’in
vitant à présenter ses observations au plus tard le 15 novembre 2023 ;
VU
les précisions apportées par les services de la commune, notamment la transmission le
8 décembre 2023 de la mise en demeure du 9 mai 2022 notifiée à la commune par le Fonds
pour
l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique
;
VU
l’ensemble des pièces du dossier
;
Sur le rapport de Monsieur Jean-Marc DANIELE, premier conseiller ;
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VU
les conclusions du ministère public ;
Après avoir entendu le rapporteur, ainsi que M. LARRIBAU, représentant du ministère public,
en ses observations ;
CONSIDÉRANT CE QUI SUIT :
1.
Par lettre en date du 27 octobre 2023, enregistrée au greffe le 2 novembre suivant, le préfet
du Puy-de-Dôme, a saisi la chambre sur le fondement de
l’article L.
1612-15 du code général
des collectivités territoriales concernant une contribution réclamée par le F
onds pour l’insertion
des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) à la commune de Vic-le-
Comte.
SUR LA COMPÉTENCE DE LA CHAMBRE
2.
La
chambre régionale des comptes est compétente, en vertu de l’article L.
1612-15 du code
général des collectivités territoriales, pour statuer sur le caractère obligatoire des dépenses, à
l’exception prévue à l’article
L. 1612-
17 du même code, de celles résultant d’une décision de
justice passée en force de chose jugée, ce dont ne relève pas le cas d’espèce.
3.
La commune de Vic-le-Comte appartenant à son ressort territorial, la chambre régionale
des comptes Auvergne-Rhône-Alpes est compétente pour examiner une demande
d’inscription d’une dépense obligatoire
au budget de ladite commune.
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA SAISINE ET LE DÉLAI IMPARTI À LA CHAMBRE POUR
STATUER
4.
Aux termes de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales : «
Ne sont
obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l'acquittement
des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé.
La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'État dans le
département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt,
constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme
insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et
adresse une mise en demeure à la collectivité territoriale concernée.
Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la chambre
régionale des comptes demande au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget
et propose, s'il y a lieu, la création de ressources ou la diminution de dépenses facultatives
destinées à couvrir la dépense obligatoire. Le représentant de l'Etat dans le département règle
et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. S'il s'écarte des propositions formulées
par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une motivation explicite »
.
5.
Aux termes de l'article R. 1612-34 du code général des collectivités territoriales : «
La
chambre régionale des comptes se prononce sur la recevabilité de la demande. Elle constate
notamment la qualité du demandeur et, s'il y a lieu, l'intérêt qu'il a à agir
».
6.
Par l’effet des dispostitions de l’article
L. 1612-15 précité, le préfet du Puy-de-Dôme a
qualité et intérêt à agir ; la saisine préfectorale est par ailleurs explicitement motivée.
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7.
L’
article R. 1612-8 du code général des collectivités territoriales dispose que : «
Lorsque la
chambre régionale des comptes est saisie par le représentant de l'Etat d'une décision
budgétaire ou d'un compte administratif, le délai dont elle dispose pour formuler des
propositions court à compter de la réception au greffe de l'ensemble des documents dont la
production est requise selon le cas par les articles R. 1612-16, R 1612-19, R. 1612-23,
R. 1612-24 et R. 1612-27. Ces dispositions sont applicables lorsque la chambre est saisie
d'une demande d'inscription d'une dépense obligatoire au budget d'une collectivité ou d'un
établissement public local
».
8.
En l’espèce, l
e dossier joint à la saisine préfectorale a été complété par plusieurs
documents
recueillis en cours d’instruction par le
rapporteur à partir du 14 novembre 2023, en
particulier
le budget communal ainsi qu’
un courrier en date du 9 mai 2022 de mise en demeure
du FIPHFP, enjoignant à la commune de Vic-le-Comte
d’effectuer
dans le délai d’un mois
sa
déclaration annuelle obligatoire, sous
peine d’application d’une contr
ibution forfaitaire en
application de la réglementation alors en vigueur, document de mise en demeure produit le
8 décembre 2023.
9.
Recevable, la saisine préfectorale se présente comme complète à cette dernière date du
8 décembre 2023.
SUR LE CARACTÈRE OBLIGATOIRE DE LA DÉPENSE
10.
Il résulte des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales que la
chambre régionale des comptes constate qu’une dépense est obligatoire pour une commune,
et met celle-
ci en demeure de l’inscrire à son bu
dget en ce qui concerne les dépenses
nécessaires à l’acquittement des dettes dites exigibles, c’est
-à-dire qui sont échues, certaines,
liquides, non sérieusement contestées dans leur principe et dans leur montant, quelle que soit
l’origine de l’obligation
dont procède la dette, ainsi que pour les dépenses pour lesquelles la
loi l’a expressément déc
laré.
11.
Au cas d’espèce, le Fond pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction
publique (FIPHFP) a adressé le 12 juillet 2022 à la commune de Vic-le-Comte un titre de
recette
s d’un montant
de 16 768
€
. Ce titre de recettes a été émis en application de l
’article 36
de la loi 2005-102
du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation
et la citoyenneté des personnes handicapées. Aux termes de cet article en effet, «
Les
employeurs mentionnés à l'article L. 323-2 déposent, au plus tard le 30 avril, auprès du
comptable du Trésor public une déclaration annuelle accompagnée du paiement de leur
contribution. Le contrôle de la déclaration annuelle est effectué par le gestionnaire du fonds.
A
défaut de déclaration et de régularisation dans le délai d'un mois après une mise en demeure
adressée par le gestionnaire du fonds, l'employeur est considéré comme ne satisfaisant pas
à l'obligation d'emploi. Le montant de la contribution est alors calculé en retenant la proportion
de 6 % de l'effectif total rémunéré. Dans cette situation ou dans les cas de défaut de paiement
ou de paiement insuffisant, le gestionnaire du fonds émet un titre exécutoire qui est recouvré
par le comptable du Trésor public selon les règles applicables au recouvrement des créances
étrangères à l'impôt et au domaine »
. Le titre de recettes objet de la saisine a été émis par le
FIPHFP
sur le motif de l’absence de
dépôt par la commune de Vic-le-Comte de la déclaration
relative à l’année
2022,
dans le délai d’un mois après mise en demeure
notifiée le 9 mai 2022.
12.
Il ressort des éléments recueillis en cours d’instruction auprès de la commune que l
e
maire de Vic-le-Comte refuse de régler la somme réclamée par le FIPHFP, considérant que
sa commune n’est pas redevable de la contribution forfaitaire exigée. Si la collectivité reconnaît
ne pas avoir effectué sa déclaration au 30 avril 2022, date limite de dépôt, en raison de
désordres organisationnels au sein de ses services, elle estime avoir satisfait à cette obligation
le 9 juin 2022, soit dans un délai d’un mois à compter de la mise en demeure délivrée par le
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FIPHFP. En conséquence, par suite de la réception du titre de recettes, la commune a introduit
une réclamation auprès du FIPHFP le 1
er
septembre 2022, tendant à l’annulation du titre, avec
à l’appui une saisie d’écran faisant ressortir les informations renseignées le 9 juin 2022.sur la
plate-forme informatique dédiée du Fonds, et indiquant que la contribution communale exigible
était nulle. Cette intervention a été rejetée le 6 décembre 2022 par le Fonds d’insertion, aux
motifs que la commune n’avait pas validé sa déclaration et avait été considér
ée en
conséquence en défaut au regard de ses obligations légales, et par suite soumise à une
procédure de taxation d’office. La commune n’a pas alors prolongé sa démarche par une
réclamation formelle, ni introduit de recours devant le juge administratif aux fins de contester
la créance et le titre de recettes du FIPHFP.
13.
La commune a ensuite introduit un recours gracieux en date du 12 décembre qui a fait
l’objet d’un rejet le 9 février 2023 (reçu le 13 février)
par le FIPHFP, ce dernier faisant valoir
que
les copies d’écran produites ne permett
aient pas, à son estime, de déterminer si la
déclaration avait été validée ou non. Le Fonds a cependant reconnu que les fonctionnalités de
sa plate-forme informatique ne permettaient pas
à l’usager
de distinguer les déclarations
validées de celles restées en mode « brouillon », toutes deux comportant la même mention
« voici la synthèse de la déclaration effectuée le ». Il invitait donc la collectivité à fournir tout
autre élément établissant la validation de la déclara
tion, telle qu’une copie d’écran
attestant
du statut de
l’intervention/déclaration effectuée sur l’applicatif
.
14.
En réponse, le 1
er
mars 2023, la commune a introduit une deuxième demande de remise
gracieuse aux termes de laquelle elle mettait en cause la fiabilité de la plate-forme informatique
de déclaration et invoquait
l’impossiblité financière
pour elle de régler la sommes réclamée.
Elle a de nouveau joint à son courrier
les copies d’écran de la déclaration saisie le 9 juin
2022.
Le Fonds
pour l’insertion des personnes handicapées n’a donné aucune suite à cette dernière
intervention du maire de Vic-le-Comte.
15.
S’agissant de l’appréciation du caractère certain, liquide, exigible et non contesté de la
créance, il ressort des éléments examinés par la chambre que le titre de recettes de 16 768
€,
notifié le 12 juillet 2022 à la commune de Vic-le-
Comte, fait explicitement référence à l’article
36 de la loi n° 2005-102 du 11 février précité.
16.
De fait, le courrier que le Fonds a adressé à la commune le 9 mai 2022 constitue la mise
en demeure prévue par l’article 36 de la loi du 11 février 2005 précité, la commune n’ayant
pas effectué de déclaration au 30 avril 2022. Or,aux termes de la loi, la déclaration devait être
préalablement effectuée pour le 30
avril de l’année de la campagne (2022) ou à défaut, dans
le délai d’un mois d’une mise en demeure. Au cas d’espèce donc, la créance dont se prévaut
le FIHFP découle de la loi en son principe.
17.
De même le caractère liquide de la créance résulte de l’applicat
ion directe des
dispositions législatives et règlementaires en vigueur. Le Fonds a considéré, conformément
au dispositif légal ci-
dessus exposé, qu’en raison de l’absence (à son sens) de déclaration, la
commune devait être regardée comme n’ayant employé au
cun travailleur en situation de
handicap ;
il n’a donc retenu aucune dépense déductible de la contribution communale. Le
montant de la contribution forfaitaire, soit 16 768
€, a ainsi été déterminé selon les modalités
règlementaires applicables, sur la bas
e d’un effectif
connu de 77 agents rémunérés.
18.
La chambre observe cependant que les dispositions du code du travail n’imposent pas
aux collectivités locales de devoir procéder par télédéclaration, ni a fortiori de modalités de
validation spécifiques pour qu
’il soit considéré qu’il a été satisfait à l’obligation légale de dépôt
d’une déclaration. En n’offrant aucune faculté de déclaration manuelle (en format papier)
, le
FIPHFP restreint les modalités de renseignement et de constatation de la matérialité de la
déclaration à une seule procédure dématérialisée, sur un outil spécifique, mis en place et géré
par lui. Il s’agit de surcroît d’un
e exigence de déclaration particulière, réservée aux seuls
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employeurs publics, le support unique d’identification et de décl
aration annuelle de travailleur
handicapé suffisant, dans le secteur privé, pour valoir déclaration sociale nominative depuis le
1
er
janvier 2020.
19.
Au cas d’espèce
, si la créance objet du titre de recettes émis par le FIPHFP découle de
la loi en son princip
e, le caractère certain de la créance n’apparaît pas établi. En effet, le fait
générateur de la créance tient à l’absence de déclaration par l
a collectivité, suite à sa mise en
demeure. Or, l’applicatif de saisie des informations ne dispose pas d’une fonct
ionnalité
permettant à l’usager de savoir, in fine, si sa déclaration a été correctement saisie, enregistrée
et validée en tant que telle auprès du Fonds. A priori
de bonne foi (question qui n’a jamais
donné lieu à discussion), la commune de Vic-le-Comte ignorait donc que son intervention du
9 juin 2022 n’avait pas été correctement menée et demeurait inaboutie pour être considérée
par le FIPHFP comme une déclaration valablement accomplie, lui permettant de régulariser
sa situation et d’éviter la mise à sa charge d’une contribution forfaitaire. Au vu des éléments
produits par les services du FIPHFP,
et notamment l’état retraçant la «
synthèse de la
déclaration effectuée au 9 juin 2022 » et faisant ressortir une contribution exigible de 0
€, il
n’est donc pas
attesté que le
fait générateur de la contribution forfaitaire, tenant à l’absence
de déclaration par la commune effectuée dans le mois de la mise en demeure, soit établi.
20.
Dans ces conditions, à défaut de caractère certain de la créance objet du titre de recettes
émis par le FIPHFP à l’encontre de la commune de Vic
-le-Comte, la dépense correspondante
n’est pas obligatoire pour ladite commune.
SUR LA DISPONIBILITE DES CRÉDITS AU BUDGET COMMUNAL
21.
La dépense n’étant pas obligatoire, il n’
y a pas lieu de
s’assurer de la disponibilité des
crédits nécessaires à son règlement ni d’enjoindre à la commune d’y veiller, par quelque
décision modificative au besoin.
PAR CES MOTIFS
Article 1 : DÉCLARE
recevable la saisine du préfet du Puy-de-Dôme visant la commune de
Vic-le-Comte, introduite sur le fond
ement de l’article L.
1612-15 du code général
des collectivités territoriales.
Article 2 : DIT
que la dépense de 16 768
€
objet de la saisine ne présente pas de caractère
obligatoire pour la commune de Vic-le-Comte.
Article 3 :
Article 4 :
Article 5 :
DIT
qu’il n’y a pas lieu en conséquence de se prononcer sur la question de la
disponibilité des crédits nécessaires au règlement de la dépense, déclarée non
obligatoire.
DIT
que la procédure est close.
DIT
que le présent avis
sera notifié au préfet du Puy-de-Dôme et au maire de la
commune de Vic-le-
Comte, et qu’une
ampliation en sera adressée au comptable
public sous couvert du directeur des finances publiques du département du Puy-
de-Dôme.
Article 6 : RAPPELLE
que le présent avis sera communicable aux tiers dès lors que se sera
tenue
la première réunion de l’assemblée délibérante
, après réception par la
collectivité, en appl
ication des dispositions de l’article R.
1612-14 du code général
des collectivités territoriales.
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Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, quatrième
section, le 20 décembre 2023.
Présents : Mme Geneviève GUYÉNOT, présidente de section, présidente de séance ;
MM. Nacer BERNOU et Elliot TWITCHELL, premiers conseillers ; Mme Charlotte DEVAUX,
conseillère, et M. Jean-Marc DANIELE, premier conseiller, rapporteur.
La présidente de séance
Geneviève GUYÉNOT
Voies et délais de recours (article R. 421-1 du code de justice administrative) : La présente
décision peut être attaquée devant le tribunal administratif territorialement compétent dans un
délai de deux mois à compter de sa notification.