Parc d’activités La Providence –
Kann’Opé –
Bât. D - CS 18111
–
97181 LES ABYMES CEDEX
Tél. 05 90 21 26 90
–
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RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
Département de la
Guadeloupe
Exercices 2018 et suivants
Le présent document a été délibéré par la chambre le 31 octobre 2023
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
3
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
4
INTRODUCTION
......................................................................................................................
6
1
LA GESTION DE L’AERO
DROME DE SAINT-FRANÇOIS
...........................................
8
Une gestion très défaillante
.............................................................................................
8
Une prise en gestion communale faute de partenaires intéressés
.....................................
8
La mise en place tardive d’une régie à autonomie financière
...........................................
9
Un budget insincère et irrégulièrement adopté
...............................................................
10
Des négligences graves dans la surveillance et la gestion de l’aérodrome
.....................
12
Une occupation anarchique du domaine public aéroportuaire
......................................
14
Le cadre réglementaire applicable
..................................................................................
14
Une occupation du domaine public aéroportuaire irrégulière
.........................................
15
Une gestion irrégulière des recettes financièrement pénalisante pour la commune
.......
19
Des exigences en termes de sûreté qui ne sont pas respectées, ce qui fait courir des
risques graves aux utilisateurs et occupants de l’aéroport
............................................
21
L’absence de désignation officielle de référent et de contact sûreté
...............................
22
L’absence de manuel d’aérodrome
.................................................................................
22
Un contrôle inexistant des clôtures et accès
...................................................................
22
Les prescriptions en termes d’éclairage des aires de stationnement et de hangars
ne
sont pas respectées
..........................................................................................................
23
L’entretien non contrôlé des espaces enherbées
.............................................................
23
Une sécurité incendie qui n’est pas assurée
....................................................................
24
2
LA POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LES SARGASSES
.............................................
26
La commune ne respecte pas les prescriptions opérationnelles de collecte du plan
sargasses
........................................................................................................................
27
L’incapacité de la commune à mener à bien son plan de gestion
.................................
28
Des achats d’engins coûteux que les services communaux n’utilisent pas
.....................
30
La commune ne suit pas les prescriptions du plan sargasses et fait courir des
risques sanitaires aux populations et de pollution des sols
.............................................
32
La gestion irrégulière, peu contrôlée et très onéreuse des prestations des
entreprises
.....................................................................................................................
33
Un recours aux entreprises en dehors des règles de la commande publique
..................
33
Des prestations d’entreprises aux coûts parfois excessifs, non maitrisés par la
commune et largement financés par l’Etat
......................................................................
36
3
LA TRAJECTOIRE FINANCIERE DE LA COMMUNE NE CESSE DE SE
DEGRADER
.......................................................................................................................
40
Les recettes fiscales, moteur de la hausse des produits de gestion
...............................
42
Les recettes fiscales, ressources principales de la commune
..........................................
42
Des ressources institutionnelles stables et des ressources d’exploitation
insuffisamment mobilisées
.............................................................................................
43
Des charges de gestion qui progressent plus rapidement que les produits
...................
44
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
2
L’absence de maitrise des charges à caractère général hypothèque la couverture des
besoins d’entretien et de maintenance de la collectivité
.................................................
44
Une gestion calamiteuse des ressources humaines qui expose la collectivité à des
risques financiers et juridiques
.......................................................................................
45
Des charges de gestion courante obérées par la prise en charge du prix de revient
très élevé des prestations de cantines de la caisse des écoles de la caisse des écoles
.....
49
Une section d’investissement qui finance irrégulièrement les charges de
fonctionnement
...............................................................................................................
49
Des services publics industriels et commerciaux déficitaires
.......................................
51
La gestion défaillante de la régie du golf aggrave son déficit d’année en année
............
51
La dégradation de la situation financière de la Marina
...................................................
55
4
UNE CARENCE IMPORTANTE DANS LA TENUE DES COMPTES QUI CACHE
LES RISQUES PRIS PAR LA COLLECTIVITE
..............................................................
58
Une qualité de l’information financière, budgétaire et patrimoniale qui nécessite
d’être encore améliorée
.................................................................................................
58
Un suivi patrimonial incomplet
....................................................................................
59
L’absence d’inventaire physique, la méconnaissance de la domanialité publique et
privée, la non correspondance entre l’inventaire comptable et l’actif du comptable
et leurs insuffisances
.......................................................................................................
59
Le non-
respect des règles d’amortissement
....................................................................
60
Le
s principes de sincérité comptable, de prudence et d’indépendance des
exercices et d’annualité budgétaire
...............................................................................
62
Une
comptabilité d’engagement déficiente en raison de dysfonctionnements
organisationnels
..............................................................................................................
62
Les dysfonctionnements dans le processus de rattachement et de comptabilisation
des restes à réaliser de fonctionnement
...........................................................................
64
Des comptes d’attente non apurés
..................................................................................
66
Une amélioration de la comptabilisation des restes à réaliser en investissement
...........
66
Des provisions pour risques et charges partiellement comptabilisées
............................
67
ANNEXES
...............................................................................................................................
71
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
3
SYNTHÈSE
La situation financière de la commune de Saint-
François s’est très nettement dégradée
entre 2018 et 2022, sous l’effet d’une progression de plus du double des dépenses de
fonct
ionnement par rapport à celle des recettes. La collectivité n’a pas d’épargne brute et son
fonctionnement courant est pour partie financé par l’excédent de la section d’investissement,
imputable aux recettes exceptionnelles des ventes immobilières. Les services publics industriels
et commerciaux du golf et du port de plaisance présentent également des situations financières
très dégradées.
Ces résultats découlent des choix de gestion et des négligences de la commune.
A ce titre, les décisions prises en matière de ressources humaines, à contrepieds des
préconisations de la chambre, ont eu pour conséquence d’augmenter les charges de personnel
de plus de 3,2 M€ entre 2018 et 2022.
De nombreuses omissions dans la tenue des comptes peuvent être encore constatées
lesquelles concourent à sous-
estimer le déficit du budget principal fin 2022 de 4,92 M€.
Depuis 2017, la commune assure l’exploitation de l’aérodrome de Saint
-François. Sa
gestion présente des négligences, d’importantes défaillances et comporte des risqu
es graves
pour les usagers et les occupants. Les exigences de contrôle des clôtures et accès, d’éclairage,
de sécurité des véhicules et des personnes qui circulent ou stationnent sur la zone aéroportuaire,
de stockage des carburants, d’entretien des partie
s enherbées et de sécurité incendie, sont
ignorées. Presque tous les occupants sont dans une situation irrégulière. Certains titulaires de
baux emphytéotiques vendent leurs baux ou sous-louent sans autorisation de la commune, ou
encore ne règlent pas leurs loyers. La commune néglige le recouvrement de ses recettes.
La gestion de la politique de lutte contre la pollution des sargasses présente également
de nombreuses insuffisances. Elle fait courir des risques sanitaires aux populations et des
risques environnementaux, notamment de pollution des sols. Cette situation est la conséquence
de l’incapacité de la commune à mener à bien son plan de gestion, alors qu’elle a été financée
à un niveau élevé de plus de 0,4 M€ par l’Etat.
Bien que disposant de moyens matériels adaptés,
ses services n’assurent pas les opérations. La commune recourt donc à des entreprises, sans
respecter les règles de la commande publique. Le prix moyen de collecte et de dépotage des
sargasses supporté est de
59,45 €
TTC/m
3
, soit un tarif très largement supérieur aux référentiels.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
4
RECOMMANDATIONS
(classées dans l’ordre de citation dans le rapport)
Régularité
Totalement
mise en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mise
en œuvre
Page
Recommandation n
o
1 :
Réviser la grille tarifaire des
redevances d’occupation du domaine public et élargir
les sources de revenus afin de respecter les dispositions
d’équilibre budgétaires visées aux articles L. 2224
-2 et
R. 2221-72 du CGCT et L. 2125-3 du CG3P
X
11
Recommandation n
o
2 :
Respecter les obligations de
sincérité et d’équilibre budgétaire mentionné
es aux
articles L. 2224-1 et L. 2224-2 du CGCT
X
12
Recommandation n
o
3 :
Régulariser ses autorisations
d’occupation du domaine public aéroportuaire et
empêcher toute cession. La commune doit procéder à
l’inventaire de ses biens du domaine privé et au
recensement des occupations du domaine public aux
fins de régularisation des titres et de mise en paiement
des loyers et redevances
X
19
Recommandation n
o
4 :
Emettre les titres et s’assurer
de leur exhaustivité
X
20
Recommandation n°5 :
Assurer le rôle d’exploitant et
faire respecter toutes les dispositions de l’arrêté
préfectoral du 10 mai 2017 relatif à la police de
l’aérodrome
X
25
Recommandation n°6 :
Respecter les règles de publicité, de mise en
concurrence et de computation des seuils pour les
achats de prestation de service conformément aux
articles R. 2121-1, R. 2121-6 et R. 2121-7 du code de la
commande publique
X
37
Recommandation n°9 :
Régulariser les titres et procéder à la mise en
recouvrement des loyers et des redevances
X
45
Recommandation n°10 :
Mettre le tableau des effectifs en cohérence avec leur
nombre et prendre une délibération de régularisation
pour
que l’ensemble des postes pourvus et budgétés
soient effectivement créés
X
48
Recommandation n°11 :
Appliquer les règles et procédures de recrutement
conformément à la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984
portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale,
devenue l’article L. 311
-2 du code
général de la fonction publique et se conformer aux
mesures de publicité obligatoires en cas de vacance
d’emploi et respecter les principes généraux d’égalité
de traitement et de transparence envers les candidats
X
49
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
5
Recommandation n°12 :
Mettre en place un suivi automatisé des heures
supplémentaires en application des dispositions de
l’article n°
2 du décret n° 2002-60 du 14 janvier 2022
et, dans l’attente, ne plus procéder au paiement des
heures supplémentaires
X
50
Recommandation n°13 :
Engager un travail
d’inventaire physique de ses biens,
en vue d’ajuster son inventaire comptable, et par la
suite, en collaboration avec le comptable public, et
mettre à jour l’état de l’actif tenu par celui
-ci
X
62
Recommandation n°15 :
Mettre en place la comptabilité
d’engagement en
application des dispositions des articles L. 2342-2 et R.
2311-11 et du CGCT.
X
67
Recommandation n°16 :
Respecter les obligations de provision pour risques et
charges définies à l’article L. 2321
-2 du CGCT.
X
69
Performance
Totalement
mise en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mise
en œuvre
Page
Recommandation n
o
7 :
Poursuivre l’actualisation des
bases fiscales, en relation avec la direction régionale
des finances publiques
X
43
Recommandation n
o
8 :
Mettre en place les contrôles
d’urbanisme aux fins de recensement des constructions
manquantes au cadastre ou devant faire l’objet de
reclassement
X
43
Recommandation n
o
14 :
Procéder aux écritures de
transfert des immobilisations en cours en comptes
définitifs et déclencher les plans d’amortissement des
immobilisations en application des articles L. 2321-2
27° et R. 2321-1 du CGCT, et dans le respect des règles
adoptées par le conseil municipal.
X
62
NOTICE DE LECTURE
SUR L’AVANCEMENT DE
LA MISE EN ŒUVRE DES RAPPELS AU DROIT ET DES RECOMMANDATIONS
Les recommandations de régularité (rappels au droit) et de performance ont été arrêtées après examen des réponses écrites et des pièces justificatives
apportées par l’ordonnateur en réponse aux
observations provisoires de la chambre.
Totalement mise en
œuvre
L’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre la totalité des actions ou un ensemble complet d’actions permettant de répond
re
à la recommandation, même si les résultats escomptés n’ont
pas encore été constatés.
Mise en œuvre en cours
L’organisme contrôlé affirme avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires au respect de la recommandation et indique
un commencement d’exécution. L’organisme affirme, de plus, avoir l’intention de compléter ces actions à l’avenir.
Mise en œuvre
incomplète
L’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires sans exprimer d’intention de les compléter
à l’avenir.
Non mise en œuvre
Trois cas de figure :
-
l’organisme contrôlé indique ne pas avoir pris les dispositions nécessaires mais affirme avoir l’intention de le faire
;
-
ou il ne précise pas avoir le souhait de le faire à l’avenir
;
- ou il ne fait pas référence, dans sa réponse, à la recommandation formulée par la chambre.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
6
INTRODUCTION
Le contrôle des comptes et de la gestion de la commune de Saint-François, à compter
de 2018 jusqu’à la période la plus récente
, a été ouvert le 15 décembre 2022 par lettre du
président de la chambre régionale des comptes de Guadeloupe adressée à M. Bernard
PANCREL, maire et ordonnateur en fonctions. M. Laurent BERNIER, son prédécesseur est
décédé le 4 décembre 2020.
Le contrôle a porté sur les suites du rapport d’observations définitives de la chambre sur
la période 2009 à 2013
1
et de ses avis budgétaires à compter de 2018, la fiabilité comptable, la
situation financière de la collectivité et les politiques de gestion de l’aérodrome et des sargasses.
La chambre constate que l’ordonnateur ne lui a pas transmis dans le délai prévu par
la
loi (article L. 243-9 du code des juridictions financières), le rapport présenté à son assemblée
délibérante, sur les actions qu'il a entreprises à la suite des observations de la chambre régionale
des comptes.
L’entretien de début de contrôle s’est tenu avec l’ordonnateur en fonction le 9 janvier
2023.
La chambre déplore que son présent contrôle se soit déroulé dans des conditions
difficiles, compte tenu des délais de transmission des documents par plusieurs services de la
commune.
En application des articles L. 254-4 et L. 243-1 du code des juridictions financières,
l’entretien de fin de contrôle a eu lieu avec l’ordonnateur le 24 mars 2023.
La chambre, dans sa séance du 12 avril 2023, a arrêté ses observations provisoires qui
ont été communiquées à l’
ordonnateur en fonction.
La réponse de M. PANCREL a été enregistrée au greffe de la chambre le 9 août 2023.
Des extraits ont également été adressés à dix-sept tiers, pour ce qui les concernait. Dix
d’entre eux ont répondu.
Après avoir examiné les réponses obtenues, la chambre, dans sa séance du 31 octobre
2023, a arrêté les observations définitives suivantes.
1
Chambre régionale des comptes de Guadeloupe,
Commune de Saint-François, exercices 2009 à 2013
,
rapport d’observations définitives, août 2015. Avis budgétaires 2018
-2022.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
7
La commune de Saint-François
La commune de Saint-François dont la population est de 11 689 habitants (chiffre en
décroissance) est membre, avec celles de La Désirade, Le Gosier et Sainte-Anne, de la
c
ommunauté d’agglomération « La Riviera du Levant »
(CARL).
Commune rurale de tradition agricole et de pêche, elle est une des destinations
guadeloupéennes prisées des touristes. Elle propose différents services et développe des
activités balnéaires, sportives et de divertissement.
Outre ses compétences classiques, elle gère un golf, un port de plaisance, une gare
maritime, une base nautique et un aérodrome. Elle a délégué la gestion de son casino (fin de
délégation prévue en 2023) et de la station d’avitaillement.
En 2017
2
, la chambre régionale des comptes de Guadeloupe, ayant constaté à la
demande du Préfet le déficit du compte administratif 2016 de la commune, lui a proposé les
mesures nécessaires au rétablissement de son équilibre budgétaire. Depuis, la chambre vérifie
si le budget primitif de chaque exercice comporte les mesures nécessaires à la résorption du
déficit. En 2022, ce n’était toujours pas le cas. Aussi, sur la base des propositions de la chambre,
le représentant de l’État dans le département règle le budget et le rend exécutoire.
2
Avis budgétaires n° 2017-0252 du 8 décembre 2017 par la chambre régionale des comptes de la
Guadeloupe sur le compte administratif de 2016 de la commune de Saint-François et n° 2017-0253 du 8 décembre
2017 sur le budget primitif de 2017.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
8
1
LA GESTION D
E L’AERODROME DE SAI
NT-FRANÇOIS
Une gestion très défaillante
Une prise en gestion communale faute de partenaires intéressés
La commune a acquis un ensemble immobilier comprenant l’aérodrome de Saint
-
François en septembre 2011 pour un montant de 7,8 M€. Sa
superficie était de 16,568 m² et sa
valeur était estimée à 2,7 M€ par les domaines. Le département était le gestionnaire du site au
titre d’une convention conclue avec l’État dont l’échéance était fixée
en mai 2014
3
. La
collectivité territoriale souhaitan
t se désengager et les autres acteurs potentiels n’étant pas
intéressés en l’absence de viabilité économique de l’équipement, la commune est devenue
l’exploitante.
Photo n° 1 :
Vue aérienne de l’aérodrome de Saint
-François
Source
: Site internet de l’aéroclub de
Saint-François
Lors du transfert de compétences entre le département et la commune, une convention
a été signée le 13
février 2017 en application de l’article L.
6321-3 du code des transports entre
le ministre chargé de l’aviation civile et la collectivité
fixant les conditions d’aménagement,
d’entretien et de gestion de l’aérodrome.
3
La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a transféré la gestion des aéroports
de l’État aux collectivités territoriales.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
9
Cet équipement comprend une piste de 584 m. Il est classé en catégorie D au titre de
l’article R.
222-
5 du code de l’aviation civile. Il est destiné à la formation aéronautique
, aux
sports aériens, au tourisme et à certains services de transport à courte distance.
Il est ouvert à la circulation aérienne de jour, sans service de contrôle, mais les dessertes
commerciales sont interdites. Il ne comprend pas de lieux d’accueil du pu
blic, de bureaux pour
les services de l’État et de la commune et ne propose pas de possibilité d’avitaillement.
L’équipement, ouvert depuis 1974, bénéficie à un ensemble d’occupants, parfois
installés depuis plusieurs décennies et regroupés au sein de l’as
sociation pour le développement
de l’aérodrome de Saint
-François (ADASF), dont les statuts sont déposés. Sa dernière
assemblée générale s’est tenue le 15 avril 2022.
Un arrêté relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
-François en date du 10 mai 2017
encadre les conditions de son exploitation. Il est classé dans le groupe 2 des aérodromes
d’aviation secondaire.
La mise en place tardive d’une régie à autonomie financière
Dans son avis budgétaire n° 2017-252, la chambre avait préconisé de
« clarifier le mode
de gestion de l’aérodrome et mettre en place une tarification
». Dans son avis budgétaire n°
2018-0188, elle constatait que les dépenses étant comptabilisées dans le budget principal de la
commune, sa gestion était irrégulière. Ce constat sera réitéré c
haque année jusqu’en 2022, ainsi
que l’injonction de mise en place d’une régie à autonomie financière en application des
dispositions des articles L. 1412-1, L. 2221-1 et suivants du CGCT et R. 2221-1 et suivants du
code précité.
En effet, eu égard à la na
ture commerciale de l’activité, les sommes consacrées à la mise
en place des mesures nécessaires au respect des obligations découlant de la convention du
13
février 2017 fixant les conditions d’aménagement, d’entretien et de gestion et de l’arrêté du
préfe
t du 10 mai 2017 relatif à la police de l’aérodrome, doivent être retracées dans un budget
annexe, non rattaché au budget principal.
La création de la régie à autonomie financière et de son budget annexe aurait dû
intervenir dès la reprise en gestion de l
’aérodrome en 2014. Or, la commune a délibéré dans ce
sens seulement en 2021
4
et elle n’a été formellement constituée qu’avec la désignation d’un
conseil d’exploitation, la nomination d’une directrice par intérim et l’adoption de ses statuts en
2022.
Cepen
dant, la chambre constate que les dispositions mises en œuvre s’écartent du cadre
réglementaire applicable.
4
Délibération n° 2021-02/004 du conseil municipal du 25 février 2021.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
10
Selon les dispositions du CGCT, le directeur est nommé par le maire
5
après délibération
du conseil municipal
6
sur la proposition d’une personne dét
erminée pour prendre ces fonctions.
Le conseil d’exploitation doit également être désigné après décision de l’assemblée
délibérative.
Or, ce dernier l’a été par arrêté du maire n° 2022
-05/130 du 6 mai 2022 et seuls les
représentants de la commune ont été désignés par le conseil municipal. La directrice par intérim
a été nommée par le conseil d’exploitation du 19 mai 2022, sans que le conseil municipal ne
statue et qu’un arrêté entérine sa nomination. De fait, elle ne dispose pas de délégation de
signature
et n’exerce pas les missions qui lui incombent règlementairement.
Ainsi, le volet budgétaire de la régie n’est en particulier pas maîtrisé par celle
-ci
7
.
Contrairement aux dispositions de l’article R.
2221-94 du CGCT, les relevés provisoires des
résultats
d’exploitation devant être arrêtés tous les six mois par le directeur et présentés pour
avis au conseil d’exploitation et au conseil municipal n’ont pas été établis.
Bien que son avis soit consultatif, le conseil d’exploitation délibère obligatoirement su
r
toutes les questions d’ordre général. Or, la chambre constate que ses membres ne disposent pas
de dossiers de séance et ne prennent pas de délibérations formelles.
Un budget insincère et irrégulièrement adopté
Le budget primitif 2022 de l’aérodrome n’es
t pas exhaustif
8
. En effet, il ne retrace que
quelques dépenses et recettes. La commune ne peut donc pas les évaluer de façon sincère
9
.
Début janvier 2023, la chambre constate qu’aucune écriture n’a été comptabilisée et que
le poste comptable n’avait pas
saisi le budget voté dans son applicatif métier. Elle relève
également que le compte de gestion provisoire de l’exercice 2022 transmis mi
-mars 2023 ne
comptabilise que partiellement les recettes et fait état d’aucune charge.
La commune ne connait pas les
charges d’électricité et d’eau de l’aérodrome
10
. Elle n’a
pas non plus répertorié celles inhérentes
à ses obligations d’exploitation contractuelles et celles
issues de l’arrêté préfectoral
11
, malgré le rappel formulé par la chambre dans son avis budgétaire
de 2018. Les dépenses de personnel (agent à temps complet, une quote-part du temps de travail
5
Article R. 2221-67 du CGCT.
6
Article L. 221-14 du CGCT.
7
Selon l’article R.2221
-68 « Le directeur assure le fonctionnement des services de la régie. A cet effet :
1° Il prépare le budget ; 2° Il procède, sous l'autorité du maire, aux ventes et aux achats courants, dans les
conditions fixées par les statuts ; »
8
Disposition des articles R. 2221-85 et suivant du CGCT.
9
L’article 47
-2 de la constitution dispose que « Les comptes des administrations publiques sont réguliers
et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation
financière. »
10
Malgré les relances répétées aux services communaux au cours de l’instruction pour disposer de
l’information.
11
La
convention du 13 février 2017 fixant les conditions d’aménagement, d’entretien et de gestion e
t
l’arrêté du préfet du 10 mai 2017 relatif à la police de l’aérodrome
.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
11
de la directrice) et les charges des services supports n’ont pas toutes été identifiées ni
refacturées
12
.
Le compte de gestion devrait également comptabiliser les immobilisations,
principalement celles relatives à l’acquisition de l’ensemble immobilier et la dette financière
correspondant à la quote-
part relative au financement de l’acquisition, toujours au bilan de la
commune. Le remboursement du capital et des intérêts doit également être inscrit au budget.
La connaissance du montant des charges est indispensable à la détermination des tarifs
appliqués aux usagers. En effet, l’équilibre du budget de l’aérodrome doit être assuré par ses
recettes propres en application des dispositions du CGCT
13
. La prise en charge de ses dépenses
par le budget principal de la commune est interdite
14
.
Les recettes de la régie sont aujourd’hui limitées aux redevances d’occupation du
domaine public qui ne sont que partiellement recouvrées (cf. § 3.1.2). La chambre observe que
celles des usagers ne permettent pas de couvrir les charges de gestion, et encore moins celles
qui découleraient d’une réelle exploitation. En conséquence de quoi, les tarifs des redevances
votés ne sont pas conformes aux dispositions réglementaires
15
.
La commune doit revoir sa grille tarifaire en fixant une partie fixe et une partie
proportionnelle au bénéfice de l’usage du domaine public
16
et en augmentant les tarifs. Elle doit
mettre en place d’autres redevances (sta
tionnement des avions, tarifs de passage, redevances
proportionnelles sur m3 vendus de la future station d’avitaillement, redevances sur les panneaux
publicitaires, redevances pour le stationnement côté ville…).
Recommandation n°1 :
(
Régularité
) Réviser la grille tarifaire des redevances
d’occupation du domaine public et élargir les sources de
revenus
afin
de
respecter
les
dispositions
d’équilibre
budgétaires visées aux articles L. 2224-2 et R. 2221-72 du
CGCT et L. 2125-3 du CG3P
12
Une partie a été comptabilisée en restes à réaliser.
13
Article L. 2224-1 du CGCT.
14
Article L. 2224-2 du CGCT.
15
L’article R.
2221-72 du CGCT stipule dans son alinéa 6 que le conseil municipal après avis du conseil
d’exploitation
« fixe les taux des redevances dues par les usagers de la régie. Ces taux sont établis de manière à
assurer l’équilibre financier de la ré
gie dans les conditions prévues aux articles L. 2224-1, L. 2224-2 et L. 2224-
4. »
.
16
Article L. 2125-3 du CG3P.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
12
Dans sa réponse adressée à la chambre,
l’ordonnateur
précise que la commune
s’est
entourée des services d’un cabinet de conseil afin de réaliser une cartographie des AOT et de
parvenir à leur valorisation par l’élaboration de conventions d’occupation temporaire dont la
prise
d’effet est prévue au 1
er
janvier 2024. La chambre en prend acte.
La gestion de l’aérodrome, comme pour les deux autres SPIC communaux (cf. §3.3.1 et
3.3.2) ne permet pas de respecter les principes de sincérité et d’équilibre budgétaire.
Recommandation n°2 :
(
Régularité
)
Respecter
les
obligations
de
sincérité
et
d’équilibre budgétaire mentionnés aux article
s L. 2224-1 et
L. 2224-2 du CGCT
Des négligences graves dans la surveillance et la
gestion de l’aérodrome
Un agent de surveillance a été recruté en décembre 2016 sur un emploi non permanent
justifié par un accroissement temporaire d’activité de trois mois. Les contrats temporaires de
six mois se sont succédés jusqu’en 2020, année où il a été stagiairisé
,
avant d’être
titularisé en
2021.
Cet agent ayant fait une demande de majoration de son traitement brut indiciaire
17
(non
attribuée aux contrats temporaires), il a été fait droit à sa demande selon les mentions au dossier
en raison de sa situation personnelle. Les éléments sur sa situation ne font pas état de ses
compétences ou de ses états de services pour justifier sa stagiairisation
18
.
Or, les missions attendues de cet agent de surveillance, son parcours professionnel et sa
formation montrent
qu’il ne répond pas aux
besoins de la commune. Il ne dispose pas des
compétences requises : qualification de circulation et de radio, attestations de formation aux
premiers secours (AFPS) et de service de sécurité incendie et aides aux personnes (SSIAP). Il
ne maîtrise pas non plus
l’outil informatique
et le cadre réglementaire et de
gestion d’un
aérodrome. Malgré ce constat, aucun plan de formation ne lui a été proposé par son employeur.
Depuis sa prise de poste, cet agent ne dispose pas de bureau à l’aérodrome, pas plus que
dans le centre technique voisin. Il reste dans sa voiture personnelle, ce qui est inacceptable. Or,
le plan ci-
dessous localise l’emplacement de son bureau dans le local de l’aéroclub. Par ailleurs,
il n’aurait jamais reçu l’ordinateur qui lui a été attribué.
17
Source : emploi.public.fr : « Les fonctionnaires touchent un traitement indiciaire brut majoré de 25 %
(hors congés bonifiés). S’y ajoute un c
omplément dit "temporaire" de 15 % aux Antilles et en Guyane (+ 40 % en
tout) ».
18
Le rapport aux fins de titularisation fait état d’un agent très volontaire, ayant le sens de l’initiative, de
la rigueur et des connaissances techniques et règlementaires.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
13
Photo n° 2 :
Bureau à l’aérodrome
Source
: Convention d’occupation temporaire Aéroclub de Saint
-François et Commune de Saint-François
A l’occasion de son contrôle, la c
hambre a pu constater que cet agent ne remplit pas ses
obligations professionnelles.
Il n’est que très rarement sur site, et lorsqu’il l’est, il s’accorde des dérogations par
rapport aux horaires. Sa présence n’est pas contrôlée, ses absences ne sont ni e
ncadrées, ni
constatées. Elles ne font pas l’objet de retenues sur salaires pour absence de service fait.
Pour la chambre, cet agent est rémunéré en grande partie pour des heures non réalisées,
et en tout état de cause, pour des missions non effectuées. E
lle s’étonne qu’une NBI
19
de
10
points lui ait été attribuée, à sa demande et au motif qu’il aurait des fonctions d’accueil du
public
20
, fonctions qu’il n’exerce pas effectivement et qui ne sont pas évoquées dans sa fiche
de poste. En l’absence de service fait et d’exercice réel de ses missions, la commune doit retirer
l’arrêté d’attribution de NBI et demander la restitution des indemnités indues.
La chambre fait d’autres constats. La commune ne s’assure
pas du respect des
obligations en termes de sûreté par les
occupants de l’aérodrome. Ainsi, des travaux sont
réalisés à leurs initiatives, sans demandes
d’autorisation préalables d’urbanisme
21
.
19
Nouvelle bonification indiciaire : Certains emplois de la fonction publique qui comportent une
responsabilité ou une technicité particulière donnent droit à un complément de rémunération appelé nouvelle
bonification indiciaire (NBI). Source : service-public.fr
20
L’accueil du public n’est pas mentionné sur sa fiche de poste.
21
Tout aménagement, qu’il soit en démontable ou pas, doit faire l’objet de déclaration préalable de
travaux ou de permis de construire selon la superficie et la nature des ouvrages.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
14
L’agent de surveillance ne communique d’ailleurs pas ces éléments aux services
municipaux compétents. La collectivité
perd ainsi des recettes foncières. L’état cadastral des
services fiscaux ne recense en base qu’un logement d’habitation.
La commune n’exerce également pas ses obligations d’exploitant, notamment en termes
d’entretien des ouvrages. Les accès côté ville et
piste ne sont pas assurés, les quelques
équipements se dégradent, l’ancienne aérogare est laissée à l’abandon. Elle n’a pas non plus
remédié aux branchements non autorisés sur une ligne électrique et sur la canalisation d’eau –
la commune ne dispose d’aill
eurs pas des factures liées aux compteurs généraux -
et ne s’est
pas assurée de la mise en place de compteurs individuels. Des risques graves sont pris pour le
stockage du carburant.
La régie ne dispose pas d’une connaissance exhaustive des usagers de l’aé
rodrome. Elle
ne détient pas d’informations utiles comme les m² des différents espaces occupés, les assurances
en responsabilité civile, les attestations des contrôles de sécurité, les autorisations de
construction, étant observé que la plupart de ces documents font défaut.
Le suivi des mouvements sur l’aérodrome, des incidents, des NOTAM
22
et des
réclamations,
exercé jusqu’en 2015 par l’ancien surveillant, n’est pas assuré.
Les préconisations de l’audit dans le domaine CHEA (conditions d’homologation et
pro
cédures d’exploitation des aérodromes) de février 2020, n’ont été suivies d’aucun
plan
d’actions pour remédier aux trois écarts à la réglementation et aux quatre observations relevées.
Aucune suite n’était encore donnée lors du contrôle de la chambre en ma
rs 2023. Ce rapport
soulignait pourtant la nécessité de «
prévoir des modalités de surveillance adaptées en matière
d’inspection de piste et aussi lors des travaux d’entretien, notamment de fauchage
» afin de
«
renforcer la sécurité sur la plateforme
».
Une occupation anarchique du domaine public aéroportuaire
Le cadre réglementaire applicable
L’aérodrome de Saint
-François est un terrain spécialement aménagé pour le décollage,
l’atterrissage et les manœuvres des aéronefs.
L’article L.
2111-16 du code général de la
propriété des personnes publiques (CG3P) dispose que «
Le domaine public aéronautique est
constitué des biens immobiliers appartenant à une personne publique mentionnée à
l'article L. 1 et affectés aux besoins de la circulation aérienne publique. Il comprend notamment
les emprises des aérodromes
et les installations nécessaires pour les besoins de la sécurité de
la circulation aérienne situées en dehors de ces emprises
».
22
L
es NOTAM, de l’anglais notice to airmen, « messages aux navigants aériens », sont des messages
publiés par les agences gouvernementales de contrôle de la navigation aérienne dans le but d’informer les pilotes
d’évolutions sur les infrastructures
(…)
Lors d
e la préparation d’un vol, le pilote doit consulter ces messages afin
d’assurer une sécurité maximale tout au long de son voyage
. Source Wikipédia.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
15
Les emprises au sol dans l’enceinte aéroportuaire relèvent donc du domaine
public
communal et ne peuvent être déclassées dans le domaine privé. En effet, en application des
articles L. 2311-1 et L. 3111-1 du CG3P, les biens qui relèvent du domaine public sont
inaliénables, imprescriptibles et insaisissables. Ils ne peuvent donc être transférés du domaine
public vers un patrimoine privé, être possédés sur un temps prolongé, ni être expropriés. Toutes
les occupations doivent en conséquence être dûment autorisées par la commune. Elles sont par
définition précaires et révocables et ne peuvent être « cédées » sans autorisation explicite de
celle-ci
23
.
Par ailleurs, l’article L. 2125
-1 du CG3P prévoit que
« toute occupation ou utilisation
du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement
d'une
redevance … ».
Dans la situation actuelle, la chambre a constaté que ces principes ne sont pas respectés.
Plusieurs utilisateurs particuliers et entreprises occupent en effet le domaine public
aéroportuaire de manière irrégulières.
Une occupation du domaine public aéroportuaire irrégulière
Lors de la prise en gestion par la commune, la majorité des 14 occupants actuels étaient
déjà
implantés,
pour
certains
depuis
plusieurs
décennies.
Ainsi,
seules
quatre
activités/entreprises se sont établies postérieurement à 2014.
Au regard des principes précédemment énoncés, les titres d’occupation de ces
occupants, lorsqu’ils existent, sont soit obsolètes, soit ne respectent pas les principes ci
-dessus
énoncés :
l’aéroclub
dispose d’une convention caduque d’occupat
ion du domaine public signée
en 2016 ; six locataires ont signé en 2019 des baux emphytéotiques de droit privé ; deux
occupants sont en sous-
location d’un des
titulaires de baux sans autorisation formelle de la
commune
et cinq autres ne disposent d’aucun
titre. Ainsi,
l’ensemble des
usagers du site occupe
irrégulièrement le domaine public aéroportuaire.
Au surplus, trois à cinq avions n’appartenant pas à un des
occupants stationneraient
également sur l’aérodrome, sans qu’ils aient été recensés par la commu
ne.
1.2.2.1
L’aéroclub
: un occupant désormais sans titre régulier et qui n’a pas réglé l’intégralité
de ses loyers
En 2016 et 2017, la commune et
l’aéroclub
ont signé deux conventions d’occupation
temporaire du domaine public concernant deux bâtiments tous les de
ux situés à l’est de la
plateforme aéroportuaire
: l’un d’une superficie de 34m² pour un loyer mensuel de 350 euros,
l’autre d’une superficie de 21,48m² pour un
loyer mensuel de 265,30 euros. La première
23
L’arrêté d’exploitation précité dispose par ailleurs dans son article 41
qu’«
aucune activité industrielle,
commerciale ou artisanale ne peut être exercée sur l’emprise de l’aérodrome sans une autorisation spéciale
délivrée par l’exploitation d’aérodrome et pouvant donner lieu au paiement d’une redevance. Il en est de même
pour l’affichage publicitaire sur les
immeubles et clôtures
».
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
16
convention était en vigueur du 1
er
janvier 2017 au 31 décembre 2020 et la deuxième convention
du 17 octobre 2017 au 13 janvier 2018. Aucun avenant, courrier de reconduction ou nouvelle
autorisation n
’est
depuis intervenu.
La chambre prend acte toutefois de la démarche de régularisation entreprise le 6 février
2023, et réitérée le 31 juillet 2023, par le président de
l’aéroclub
à laquelle l’ordonnateur n’a
pas donné suite à ce jour.
Les loyers de la première convention ont été versés pour les années 2018, 2019 et 2020,
mais pas
l’année
2017 d’un montant de 2
100
euros. Aucun versement n’est intervenu pour la
deuxième convention, qui n’a pas été reconduite.
Si le président de l’aéroclub argue, dans sa réponse, de l’absence d’occupation effective
du local de 21,48m² du 14 janvier 2018 au 30 septembre 2021, il
ne justifie d’aucune démarche
à l’égard de la commune permettant à cette dernière d’en reprendre possession sur cette période.
Aussi, l’aéroclub, qui ne respecte pas ses obligations de locataire, devrait restituer les 21,48 m
2
de la partie droite du bâtiment à la commune
24
. Cette dernière a ainsi subi, consécutivement à
ces occupations, un préjudice financier évalué à 26 162 euros à la date du contrôle.
L’aéroclub qui rappelle aux termes de sa réponse son statut d’association,
explique
s’être
acquitté des sommes réclamées et remplir
une mission d’intérêt général lui permett
ant de
bénéficier de locaux, sinon à titre gratuit, à des conditions préférentielles. En effet, seuls des
rappels effectués par la trésorerie municipale lui sont transmis tous les deux ans. Aucune mise
en demeure ou de restitution des locaux n’a été effectuée par la commune. Aucun appel à
redevance n’a
davantage été réalisé pour le bureau du surveillant. En revanche, la chambre
rappelle que les conditions d’occupation du domaine public s’imposent à tous
, sans préjudice
des possibilités de mise à disposition gratuite prévues expressément par la loi.
Au surplus, d’autres irrégularités ont été relevées
: l’utilisation d’une terrasse aménagée
à l’arrière du bâtime
nt et du jardin attenant
; aucune redevance n’est perçue sur les panneaux
publicitaires, par ailleurs non autorisés, sur les places de parking côté ville et sur celles des
avions côté piste.
1.2.2.2
Une pratique illégale : les baux emphytéotiques de droit privé
La
commune a initié une démarche de régularisation de l’occupation du domaine public
de l’aérodrome en 2018 qui a donné lieu à la signature de six baux emphytéotiques de droit
privé à la fin de l’exercice 2019, soit près de cinq ans après la reprise en gestion de l’aérodrome.
Légalement, il lui était pourtant impossible de signer de tels baux, l’usage du domaine
public de l’aérodrome ne relevant pas d’une des conditions d’application de ce type de contrat.
Il est en outre précisé que les occupants ne peuvent
bénéficier d’un bail emphytéotique
administratif, faute de satisfaire aux prescriptions restrictives de l’article L.
1311-2 du CGCT.
Par application des dispositions de l’article L.
2122-1 et suivants du CG3P, la commune ne
pouvait donc autoriser l’occupation du domaine public aéronautique qu’au moyen d’une
24
Partie correspondant au bureau du surveillant de l’aérodrome
; cf : plan des locaux page 12
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
17
convention d’occupation du territoire, le cas échéant constitutive de droit réel
25
, après mise en
concurrence en cas d’exploitation économique.
Contrairement à ce que soutiennent certains occupants dans leur réponse adressée à la
chambre, les paiements intervenus en exécution d’un bail emphytéotique conclu en violation
des dispositions d’ordre public précitées, ne sont créateurs d’aucun droit sur le domaine public.
De même, en l’absence de titre ayant con
féré des droits réels aux occupants, les titulaires desdits
baux ne peuvent revendiquer aucune propriété sur les installations réalisées, pas plus qu’ils ne
peuvent contracter de sous-
location sur le domaine public aéronautique sans l’autorisation
expresse de la commune.
De surcroît, celle-ci
n’a pas respecté son obligation de publicité, reprise à l’article 10
des baux emphytéotiques. Aucune formalité de publicité foncière a été réalisée par les usagers,
le notaire ayant indiqué que, faute de disposer des m
étrés du géomètre, il n’était pas en mesure
de procéder aux enregistrements qui s’imposaient.
De plus, ce dernier n’a pas remis son étude
à la commune car elle ne l’avait pas payé. En l’absence de publication, les baux n’ont pas
d’existence et la
collectivité perd des recettes foncières.
1.2.2.3
Des sous-locations accordées sans autorisation et sans contrôle de la commune
Deux entreprises ont conclu un contrat de sous location
26
avec le
signataire d’un bail
emphytéotique de droit privé en application de son article 5.7
27
. Le montant des loyers au m
2
versés à la commune est inférieur de 8,5 % aux 4,12 euros au m
2
perçus par le titulaire du bail
emphytéotique. La différence correspond au montant de la TVA.
La chambre constate que ces sous-
locations qui n’ont pas été autorisées par la commune
et qui sont adossées à une occupation irrégulière du domaine public, permettent l’exploitation
économique du domaine public sans aucune mise en concurrence ou procédure de publicité
préalables. En conséquence, les recettes perçues par ces sous-locataires pourraient être
qualifiées de recettes publiques
28
. Ces derniers se sont donc immiscés dans la fonction du
comptable, seul habilité à recouvrer ces recettes.
1.2.2.4
L’absence de décision sur les
cessions de baux emphytéotiques
Un des bénéficiaires des baux emphytéotiques, qui n’a jamais honoré jusqu’en 2023 le
paiement de ses redevances, a fait des travaux d’aménagement de ses locaux sans déclaration
d’urbanisme,
ni même d’autorisation formelle.
La chambre rappelle toutefois
qu’en l’absence
25
L. 2122-20 du CGCT
26
Signés le 1
er
janvier 2022, par reprise du bail d’un précédent gestionnaire, pour 243 m² et un montant
annuel de 12 000
€TTC, et le 14 avril 2022, par reprise du bail d’un précédent entrepreneur pour 49 m² et un
montant annuel de 2 424,32
€
TTC.
27
L’article 5.7 du bail
emphytéotique précise que
« la société aura la faculté de céder son droit au présent
bail et de sous-
louer en totalité ou en partie, mais en restant garante solidaire de l’exécution des conditions du
bail et du paiement de la redevance
».
28
Il est de jurisprudence constante que les recettes domaniales sont des recettes devant être affectées à un
comptable public (C. comptes 21 mars 1996, Musée Rodin) dès lors qu’il ne peut être considéré que les recettes
sont tirées de l’activité de l’association.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
18
de titre conférant de droit réel à cet occupant, il ne peut revendiquer une quelconque propriété
sur les installations incorporées, à son initiative, au domaine public.
Fin 2021, cet usager a informé le maire par courrier recommandé avec accusé réception
qu’il a
vait
l’intention de céder son bail à un des autres occupants de l’aérodrome
pour un
montant de 55 000 euros, et a interrogé la commune sur son droit de préemption, sans réponse
de sa part dans le délai de deux mois impartis à la collectivité.
Toutefois, après la visite des locaux en mai 2022, la directrice par intérim de la régie a
établi une note indiquant que les locaux répondent aux besoins de la commune (bureaux pour
les agents de la régie aérodrome et espace mis à disposition des douanes) et que ceux du rez-
de-
chaussée pourraient être mis à disposition d’un autre usager
.
Selon la direc
trice, il n’est pas d’intérêt communal d’envisager une cession
du bail
emphytéotique au profit de ce candidat
compte tenu des différends qui l’opposent à son voisin.
Sa note n’évoque
cependant
pas l’impossibilité juridique de la cession au regard des règle
s
impératives d’occupation du domaine public.
Une étude juridique postérieure recommande qu’un accord transactionnel soit conclu
entre les parties, compte tenu des irrégularités et des responsabilités partagées considérant
qu’une cession ne peut être envis
agé
e du fait de la nature de l’assiette foncière occupée.
La chambre relève qu’elle n’a été destinataire d’aucune décision de la commune sur la
situation de
l’occupant et que ce dernier a répondu être dans l’impossibilité de céder lesdites
installations en
raison de l’absence de décision de la commune sur le sort réservé à son bail.
1.2.2.5
Des situations d’occupation du domaine public sans autorisation
En 2019, une entreprise, ayant pour activité
la réparation d’avions en Guadeloupe,
a
refusé de signer un bail e
mphytéotique de droit privé avec la commune au motif d’un désaccord
sur l’espace loué. D’après ses dires, elle aurait procédé jusqu’en 2022 au règlement d’un loyer
mensuel de 1 000 euros auprès du précédent occupant
, ce qui n’a pu être vérifié et qui, en t
out
état de cause, est irrégulier.
Une autre entreprise,
dont l’activité aurait démarré en 2020, a également refusé de signer
le projet bail pour des désaccords sur son contenu, celui-ci étant un copier-
coller d’un autre bail
emphytéotique.
Ces deux socié
tés ne peuvent tirer aucun droit d’un accord de principe de la commune
à leur occupation du domaine public, sans justifier d’une convention d’occupation et du
paiement de la redevance obligatoire.
Trois autres particuliers et entreprises sont installés sur
le domaine de l’aéroport sans
autorisation.
L’un d’entre eux s’est vu interdire l’accès à l’aérodrome en raison d’une procédure
judiciaire en cours pour transport illicite de personne. Pour autant, aucune mise en demeure de
restitution de l’emplacement et de retrait de son conteneur n’a été effectuée par la commune.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
19
Un autre
fait valoir un accord, qu’il aurait obtenu du précédent maire en présence du
surveillant de l’aérodrome, l’autorisant à sous
-louer des locaux d
’un occupant de l’aérodrome
entre juillet 2020 et juillet 2022. Son loyer mensuel serait de 100 euros plus un pourcentage de
25 % sur ses propres vols et 30 % sur ceux apportés par
l’occupant
. Pour autant, aucun
document ni autorisation formelle n’a été produit.
Les échanges recueillis par la chambre vont
au contraire dans le sens d’une occupation forcée avec la complaisance des agents en charge du
dossier.
Aucune de ces situations, pourtant connues, n’a fait l’objet de régularisation, aucune
mise en demeure n’a été effectuée
par la
commune. Au contraire, le nombre d’entités
irrégulièrement installées s’est accru.
Tout comme l’aéroclub, l’ensemble des bénéficiaires d’emprises foncières bénéficie
également de la gratuité des places de parking côté ville et des places de stationnement
d’avions
côté piste. Les panneaux publicitaires ne sont pas assujettis aux taxes prévues dans la
convention de gestion.
La chambre rappelle que l’autorisation d’occupation du domaine aéroportuaire ne peut
être, par application de la loi, que temporaire. Elle doit donner lieu à une procédure de publicité
et de mise en concurrence. Lorsque l’autorisation intervient à la suite d’une manifestation
d’intérêt spontanée, le CG3P dispose que «
l’autorité compétente doit s’assurer au préalable
par une publicité suff
isante, de l’absence de toute autre manifestation d’intérêt concurrente
».
La commune est en droit de s’opposer à toute occupation illicite de son domaine public.
Recommandation n°3 :
(
Régularité
) Régulariser les autorisations d’occupation du
domaine public aéroportuaire et empêcher toute cession
Aux termes de sa réponse,
l’ordonnateur
reconnait
que la situation de l’agent
doit être
revue afin qu’il bénéficie d’un bureau au sein du bâtiment abritant l’aéroclub
et qu’il
suive une
formation spécifique lui permettant d’assurer l’i
nterface entre les services de la commune et
l’aérodrome et d’exercer ses mission
s
de surveillance et de gestion de l’aérodrome.
Il admet
que
la gestion de l’aérodrome souffre de carences notamment liées à sa gouvernance, à
l’occupation de ses espaces, à l
eur entretien et à leur maintenance, et
argue d’une mission
confiée à un cabinet sur l’évaluation des redevances dues par les occupants en fonction de leurs
activités qui permettra de vérifier la couverture des coûts de fonctionnement de l’aérodrome
par les ressources tirées des loyers à percevoir. Il
estime qu’aucun projet de cession d’espace
n’est concevable avant les résultats de cette mission
et ajoute enfin que ses services travaillent
à la mise en conformité du réseau électrique afin de déterminer notamment la consommation
de chaque usager. La chambre en prend acte.
Une gestion irrégulière des recettes financièrement pénalisante pour la
commune
1.2.3.1
Des tarifs de redevances d’occupation très favorables aux occupants et très éloignés
de l’estimation des
domaines
Lors de la préparation des autorisations d’occupation temporaires/baux, la direction de
l’immobilier de l’État (DIE) a été sollicitée pour l’estimation des redevances.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
20
Les réponses apportées par la DIE mettent en évidence des divergences entre les m
2
communiqués à la DGFIP et ceux mentionnés dans les baux, avec des écarts pouvant
représenter jusqu’à 17,6 % au détriment de la commune.
Elles conduisent à constater que les redevances annuelles pratiquées (45,60 €/m
2
)
dans
les baux
sont très inférieu
res à celles estimées par la DIE (148,20 €/m
2
). En effet, l’estimation
du service des domaines a été faite en tenant compte de la valeur locative et du bénéfice dont
pouvait disposer chaque occupant.
Les tarifs de sous-locations avancés confortent la sous-évaluation du montant des
redevances appliquées. La délibération
communale relative à l’attribution des baux
emphytéotiques ne cite aucunement les avis sollicités auprès des domaines
29
. En conséquence,
la chambre considère que la division par 3,25 du tarif
proposé par l’administration ne paraît
aucunement justifiée, d’autant qu’elle intervient après une gratuité de plusieurs années
accordées indûment aux occupants.
Aujourd’hui, au regard des métrés occupés (1
807 m
2
)
30
, la perte de recettes annuelles
s’élève selon l’estimation de la chambre à 0,19
M€.
1.2.3.2
Les négligences de la commune dans le recouvrement des redevances des baux
emphytéotiques
La commune n’a seulement émis régulièrement
31
les titres de redevances des exercices
2019 à 2021 qu’à la clôture de l’exer
cice 2021, alors que les baux avaient été signés en 2019.
Elle l’a fait après le rappel de la chambre dans le cadre de son contrôle budgétaire.
Recommandation n°4 :
(
Régularité
)
Emettre les titres et s’assurer de leur exhaustivité
Le manque à gagner pour la collectivité est de 49 202,40 euros par an, soit 246 012 euros
sur cinq ans
32
.
Sur les six titulaires des baux, deux ont régularisé en totalité les montants dus, deux ont
versé des acomptes et deux n’ont rien versé en raison de rejet des titres aux motifs respectifs de
numéro SIRET erroné, de raison sociale erronée et d’absence de RI
B. Les services de la
collectivité n’ont pas fait preuve de célérité pour obtenir les informations manquantes. En effet,
29
L'article L. 2241-1 du CGCT prévoit que «
toute cession d'immeubles ou de droits réels immobiliers
par une commune de plus de 2 000 habitants donne lieu à délibération motivée du conseil municipal, lequel
délibère au vu de l'avis de l'autorité compétente de l'État
». Les articles L. 1311-9 et L. 1311-10 du CGCT
disposent que doivent être précédés d’un avis des domaines les projets d'opérations immobilières
« Les baux,
accords amiables et conventions quelconques ayant pour objet la prise en location d'immeubles de toute nature
d'un loyer annuel, charges comprises, égal ou supérieur à un montant fixé par l'autorité administrative
compétente »
30
Avec ou sans titres d’occupation,
31
En effet, des titres avaient été émis en 2019, mais avaient été rejetés par le comptable sur le motif de la
durée des baux trop longue et l’absence de délibération. En conséquence de quoi, le dossier a été présenté en
conseil municipal et la délibération a été prise pour autoriser la signature des baux.
32
En application de l’article L. 2321
-4 du CG3P,
la prescription quinquennale s’applique en matière de
recouvrement des RODP.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
21
les titres des exercices 2019 à 2022 ont finalement été rattachés à l’exercice 2022 et réémis en
mars 2023 pour un montant de 20 064 euros.
La chambre prend acte de la réponse de
l’ordonnateur
selon laquelle ses services ont
émis, au cours du dernier quadrimestre 2022 des titres de recettes concernant les loyers non
versés de 2013 à 2019 par les six occupants titulaires des baux emphytéotiques. Toutefois, la
chambre n’a pas été destinataire de ces titres.
L’occupation du domaine public doit donner lieu au paiement d’une redevance,
comprenant une partie fixe et une partie proportionnelle à l’usage qu’il en est fait
33
. L’occupant
sans titre doit également verser une indemnité. Selon la jurisprudence en vigueur, la somme
versée est destinée à compenser les revenus auxquels auraient pu prétendre la personne publique
dans le cadre d’occupation régulière.
En l’occurrence, l’application du tarif fi
xé dans les baux peut servir de référence pour
l’évaluation de l’indemnité d’évaluation. Les occupants sans titre (hors aéroclub et sous
-
locataires irréguliers) sont au nombre de cinq pour 672,4 m² occupés
.
Le manque à gagner
annuel est estimé par la chambre à 30
661 euros. L’avantage indu octroyé depuis janvier 2019
aux occupants sans titre est estimé à 0,11
M€.
Au global, sur la base des informations communiquées par les services communaux en
m² de surface occupée, la chambre évalue à un peu moins de 0,4
M€
les pertes de recettes pour
la commune.
Estimation des pertes de recettes liés aux dysfonctionnements dans le suivi de
l’occupation et la facturation du domaine public aéroportuaire
Objet de perte de recette
Montants en euros
Non rétroactivité lors de la signature des baux
246 012
Non facturation aéroclub
26 163
Non facturation de certains bénéficiaires de baux
21 318
Non facturation des occupants sans titre
105 079
Total
398 572
Source : CRC à partir des informations communiquées en matière de
m², d’antécédents d’occupation et tarif
appliqués au niveau des baux.
Des exigences en termes de sûreté qui ne sont pas respectées, ce qui fait
courir des risques graves aux utilisateurs et occupants de l’aéroport
L’arrêté préfectoral relatif à la police de l’aérodrome précédemment évoqué
34
, comprend
plusieurs exigences qui ne sont pas respectées, tant par la commune, en tant qu’exploitante, que
par ses usagers et occupants.
33
Article L. 2125-3 du CG3P.
34
Application de l’article 44 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
-
François
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
22
L’absence de désignation officielle de référent et de contact sûreté
Bien que n’ayant pas été nommé officiellement, le surveillant de l’aérodrome, pourtant
sans qualification, fait office de «
référent sûreté
»
35
.
La commune ne dispose pas d’une liste des «
contacts sûreté
» au sein de chaque entité
utilisatrice présente sur l’aérodrome
36
, bien que la plupart soient en mesure d’en désigner un.
L’absence de manuel d’aérodrome
La commune ne dispose pas d’un manuel d’aérodrome. Ce document, visé notamment
à l’article 12 de l’arrêté de mai 2017, précise les procédures mises en œuvre pour assur
er
notamment sa sûreté. Ce manuel, qui existait jusqu’en 2017, présente l’intérêt de centraliser les
informations nécessaires à l’exploitation de cet équipement. Aussi, la commune doit en établir
un, afin de s’assurer du respect des procédures de gestion de l’aérodrome.
Un contrôle inexistant des clôtures et accès
Selon l’arrêté, le surveillant de l’aérodrome doit effectuer quotidiennement une visite
pour vérifier le bon état des clôtures et accès, pour réparer les dégradations et prévenir les
possibilités
de pénétration d’animaux et de personnes
37
dans l’aire aéroportuaire. Dans les faits,
l’organisation des rondes quotidiennes ne répond pas à l’objectif de fréquence recherché. En
effet, l’absence de voiture sécurisée, d’équipements de réparation et la sous
-
activité de l’agent
déjà décrite rend impossible ce contrôle.
L’aérodrome est divisé en deux zones
: une zone ville et une zone piste qui n’est pas
librement accessible au public. Son accès est en effet soumis à la détention d’une habilitation
valable.
La commune ne dispose pas de la liste des personnes habilitées en raison de leur activité
ou de leurs fonctions, et des clés qui leur sont attribuées (privatifs et communs), pour accéder
côté piste, ce qui rend inopérant la vérification du respect de la fermeture des accès, prévu par
l’article 13 de l’arrêté. Les portes, portillons et la signalétique associée
, visées
à l’article 3 de
l’arrêté
,
ne sont curieusement pas considérées par la commune comme des voies d’entrée et de
sortie.
Les restrictions de l’arrêté en matière de présence sur l’aéroport limité côté piste aux
heures de lever et coucher du soleil augmenté de 30 minutes et côté ville, ne sont pas respectées.
A titre d’exemples, le portail reste ouvert en permanence et de nombreux endroits permetten
t
d’accéder librement à la piste, ce qui illustre bien le fait que le surveillant ne rempli
sse pas sa
35
Article 10 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
-François
36
Article 11 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
-François
37
Article 12 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police
sur l’aérodrome de Saint
-François
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
23
mission et ses obligations. De même, l’ouverture d’un
restaurant en soirée sur
l’aéro
drome
contrevient aux dispositions de l’arrêté préfectoral.
Au surplu
s, la commune n’a pas mis de signalétique routière, de marquage au sol pour
les emplacements de stationnement, et les conditions d’utilisation et d’affectation des
emplacements ne sont pas établies côté ville. L’interdiction de pénétrer ou de séjourner sur
l’aérodrome sans accord de la commune n’est pas respectée.
Côté piste, les dispositions du chapitre 2 du décret ne sont pas respectées. C’est
notamment le cas des règles relatives aux véhicules qui ne sont pas équipés d’un gyrophare
jaune et de radiocommunication aéronautique
38
. Le gilet de sécurité n’est pas porté. Il n’y a pas
de procédure d’autorisation de circulation et de stationnement.
Les prescriptions en termes d’éclairage des aires de stationnement et de
hangars ne sont pas respectées
L’é
clairage des aires communes de stationnement des aéronefs doit être assuré par un
dispositif à déclenchement automatique sur détection de mouvement. L’équipement doit être
assuré par la commune.
Les occupants ont également l’obligation de s’équiper d’un système d’éclairage à
l’intérieur et à l’extérieur de leurs hangars et de leurs aires de stationnement d’aéronefs.
Ces dispositions
39
ne sont pas respectées et la commune ne leur a pas rappelé leurs
obligations.
L’entretien non contrôlé des espaces enherbées
L’entretien des parties enherbées de l’aérodrome est réalisé à titre gracieux par une
société qui bénéfice de l’utilisation des herbes fauchées pour produire des bottes destinées à
l’alimentation animale.
Jusqu’en novembre 2022, ce fonctionnement ne faisait l’objet d’aucun contrat
40
, ni
autorisation spéciale contrairement aux dispositions du code de la commande publique et de
l’arrêté. Depuis, une convention entre la collectivité et l’entreprise oblige cette dernière à
réaliser quatre fauchages par an. La
chambre constate que la commune n’a pas respecté ses
38
Les véhicules ne sont pas équipés d’un système de positionnement radioélectrique qui fonctionne avec
les fréquences VHF (very high frequency).
39
Application de l’article 18 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police
sur l’aérodrome de Saint
-
François.
40
Selon l’article L111
-1 du code de la commande publique «
Un marché est un contrat conclu par un ou
plusieurs acheteurs soumis au présent code avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs
besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, en contrepartie d'un prix ou de tout équivalent
. »
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
24
obligations de mise en concurrence et de publicité pour ce marché. Elle n’est pas non plus en
mesure d’évaluer le coût de cette prestation en nature.
La commune court plusieurs risques et en fait courir à ses usagers en ne contrôlant pas
la qualité du fauchage et en n’assurant pas un suivi formalisé et rigoureux. En effet,
alors même
que la hauteur des herbes conditionne la visibilité sur le site et participe au développement de
la faune, ce qui est contraire aux mesures de prévention du péril animalier
41
, la convention
précitée ne prévoit pas d
’hauteur limite
des végétaux afin de garantir la sécurité des aéronefs
42
.
La chambre a pu constater que le fauchage effectué en février 2023 a été réalisé sans
surveillance des services communaux et sans respect des règles de sécurité (absence de port de
gilet, VHS, gyrophare, manœuvre des avions stationnés sans autorisation formelle ni
surveillance).
Au surplus, le
prestataire entrepose, sans l’autorisation prévue à l’article 40
43
, son
matériel côté piste.
Une telle occupation doit donner lieu à perception d’une redevance dans la
mesure où la gratuité accordée dans les faits n’est pas prévue dans la convention de fauc
hage
et est contraire aux dispositions du CG3P.
La chambre a constaté qu’un particulier fauche à proximité de l’aéroclub, avec l’accord
d’un usager, mais sans que la commune n’en ait connaissance et ne l’ai
t autorisé contrairement
aux dispositions de l’arr
êté.
Une sécurité incendie qui n’est pas assurée
La commune ne s’assure pas du respect des obligations en matière de sécurité incendie
tel que le contrôle périodique des extincteurs. De fait, aucun occupant ne dispose de caisses de
sable et de pelles. L’in
terdiction de fumer dans les hangars recevant des aéronefs et dans les
ateliers où sont manipulées des matières inflammables,
n’est pas respectée.
Le système d’avitaillement sur les aérodromes doit être assuré par des cuves
homologuées et, au cas particulier de celui de Saint-
François, enterrées. En l’absence de cette
infrastructure, les pilotes sont censés venir ravitailler leur avion à l’aéroport de Pointe
-à-Pitre.
Cette obligation n’est pas respectée. Les usagers utilisent des systèmes de stockage
mobile
s ou des bidons d’essence
entreposés dans des conteneurs, ce qui est interdit. La
commune doit impérativement mettre en place la procédure de mise en demeure de la
réglementation auprès des usagers.
L’aéroclub dispose pour sa part d’une cuve homologuée. Elle n’a toutefois pas été
autorisée par la commune.
41
Application de l’article 29 de l’arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
-
François
42
Les textes ne fixent pas de limites.
43
Arrêté du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome de Saint
- François. Selon cet article, le
stockage doit être autorisé.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
25
L’exploitant envisage d’acquérir une cuve à sa charge, dont l’accès serait en priorité
réservé aux usagers basés sur l’aérodrome. La gestion serait assurée par le surveillant. Ce projet
n’est pas encore va
lidé.
Recommandation n°5 :
(
Régularité
) Assurer le rôle d’exploitant et faire respecter
toutes les dispositions de l’arrêté préfectoral du 10 mai 2017
relatif à la police de l’aérodrome.
Dans sa réponse,
l’ordonnateur
informe la chambre qu’une rencontre a été organisée
avec le
s occupants de l’aérodrome au cours de laquelle les
gendarmes exerçant une compétence
sur les zones aéroportuaires ont insisté sur l’exigence de respect des normes en matière de
stockage de produits inflammables et dangereux. Il partage son inquiétude sur les risques pour
les usagers induits par la présence de la cuve à carburant sur la zone aéroportuaire et ajoute
explorer plusieurs pistes pour la mise en conformité de cette installation. La chambre rappelle
que d’autres obligati
ons en matière de sécurité incendie ne sont pas respectées sur le site et
déplore l’absence de mesures concrètes mises en œuvre à ce jour.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Depuis 2017, la commune assure l’exploitation de l’aérodrome de Saint
-François.
Sa gesti
on présente des négligences, d’importantes défaillances et comporte des risques
graves pour les usagers, les occupants et pour elle-même.
Sur le plan financier, le budget de la régie ne retrace pas de façon exhaustive ses
dépenses et ses recettes. Son équi
libre budgétaire n’est pas assuré comme le prévoit la
réglementation par les redevances des occupants et les recettes perçues sur l’usager.
Les baux de ses locataires, lorsqu’ils existent, sont soit obsolètes, soit ne respectent pas
les règles d’occupatio
n applicables à son domaine public aéroportuaire. Certains occupent
sans titre des locaux ou terrains de l’aéroport. Tous les occupants sont dans une situation
irrégulière. Les tarifs appliqués ne sont pas conformes aux dispositions du code général de la
propriété des personnes publiques et sont très avantageux au regard des références établies
par les domaines. Certains titulaires de baux emphytéotiques vendent leurs baux ou sous-louent
sans autorisation de la commune, ou encore ne règlent pas leurs loyers. La commune néglige
le recouvrement de ses recettes.
La commune ne respecte pas et ne fait pas respecter par ses occupants et usagers les
dispositions de sûreté de l’arrêté préfectoral du 10 mai 2017 relatif à la police sur l’aérodrome
de Saint-François. Les exigences de celui-ci en termes de contrôle des clôtures et accès,
d’éclairage, de sécurité des véhicules et des personnes qui circulent ou stationnent sur la zone
aéroportuaire, d’entretien des parties enherbées et de sécurité incendie, sont
ignorées. Les
conditions de stockage des carburants sont particulièrement illustratives de la négligence de
la commune dans la gestion de cet équipement. Cette situation fait courir des risques
accidentels pour ses utilisateurs, en particulier les aéronefs, et occupants.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
26
Origine de la prolifération des sargasses : la mer des sargasses (
Illustration de Mark Garrison).
2
LA POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LES SARGASSES
Depuis 2011, les rivages de Saint-François et son port sont exposés de façon de plus en plus
récurrentes
à l’échouage de bancs d’algues sargasses
.
L’échouage des algues sargasses
Les sargasses sont des algues brunes pélagiques ayant fait l’objet de plusieurs études
scientifiques ces dernières années.
Leur origine serait « la petite mer des sargasses » située au large du golfe du Mexique,
qui,
ayant bénéficié d’un apport important
de nutriments principalement de potassium et de
nitrate provenant des rivières Congo et de l’Amazone
, et associé aux conditions climatiques
(élévation de température, baisses de la pression de l’air),
favoriserait la croissance et le
développement de celles-ci.
Origine de la prolifération des sargasses
Leurs échouements constituent une menace majeure pour la santé, l’environnement et
l’économie, notamment touristique. Au
-
delà d’un délai de 72 h après leur arrivée sur les côtes
et sans ramassage, leur décomposition provoque un dégagement de gaz, notamment de
l’hydrogène sulfuré (H2S) par fermentation, qui à faibles doses, répand une odeur
particulièrement nauséabonde et, à doses plus importantes, peut devenir toxique voire mortel.
La capacité des sargasses à piéger des métaux lourds tel que l’arsenic const
itue un danger
potentiel pour les opérations de traitement et de valorisation de celles-ci et peut avoir des
incidences environnementales non négligeables en termes de pollution notamment.
Ce phénomène a également des conséquences sur l’activité touristiq
ue de pêche et
d’aquaculture. Au rang des dommages subis sont également recensés la détérioration des fonds
marins, de la qualité de l’eau, des machines, des systèmes de climatisation, des composants
électroniques des ordinateurs et l’usure précoce des out
ils de travail. La perturbation des
écosystèmes (mangroves, lieux de pontes) est également observée. Les techniques actuelles de
ramassages y contribuent également.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
27
La lutte contre cette pollution relève en premier lieu des communes, en vertu des pouvoirs
de police des maires
44
. Les pouvoirs du maire de Saint-François en cette matière
qui s’exercent
sur l’ensemble du territoire communal et sur le domaine public maritime jusqu’à la limite des
eaux, sont ainsi de sa compétence exclusive, sans possibilité de transfert à un établissement
public de coopération intercommunale (EPCI) dont le concours ne peut être recherché qu’en
faveur de la mutualisation des moyens dédiés. Les opérations de ramassage, de transport et de
stockage, et les dépenses afférentes (achat
ou location d’équipement matériel, entretien des
équipements, personnel) relèvent donc, au même titre que la surveillance humaine des plages
et zones infralittorales
, de la compétence des communes, comme le soulignait d’ailleurs dès le
mois d’octobre 2018
le plan national de prévention et de lutte contre les sargasses dit plan
sargasses I.
La commune ne respecte pas les prescriptions opérationnelles de
collecte du plan sargasses
Face à l’ampleur du phénomène et à sa récurrence, l’Etat a décidé de venir en
aide aux
collectivités en élaborant le plan sargasses I (2018-2021). Des financements ont été mis en
place. Les dotations en matériel des communes et des EPCI ont été privilégiées. Une
gouvernance spécifique a été choisie, réunissant l’ensemble des acteurs
dans tous les champs
concernés (économique, santé, …).
Aux termes du plan sargasses II (2022-2025), les
interventions se veulent plus pérennes et structurelles (financement, actions préventives,
gouvernance, recherche et développement).
Selon ces prescriptions actuelles, la commune de Saint-François doit donc répondre aux
problèmes d’échouage avec la mise en place d’un processus permanent de collecte et de
traitement des sargasses et des actions plus ponctuelles lors des apports plus massifs.
Ainsi, trois
préoccupations doivent guider l’action communale
: 1) la réduction maximale
de l’exposition des populations, ce qui implique l’efficacité des dispositifs de collecte, une
réactivité et une rapidité d’intervention (en 48 heures)
45
. La commune doit nécessairement
étudier les ruptures de charge et les conditions de transport ; 2) assurer la sécurité des
travailleurs intervenant sur le terrain (d’où la nécessité de la réactivité
d’intervention pour
limiter les risques sanitaires liés au processus de décomposition des algues échouées) ; 3) la
préservation de l’environnement dans l’action curative.
L’enlèvement des algues doit être réalisé à mesure de leurs échouements, alors qu’elles
sont humides, de manière à éviter les situations de débordements. Des dispositifs proches-
côtiers de type préventifs tels que les barrages sont à envisager pour contenir les arrivées ou
dévier les algues vers une zone pré-choisie
. L’acquisition de navires spécialisés et
d’équipements complémentaires aux fins de collecte en mer sont ég
alement possible. Ces
dispositifs proche-
côtiers n’ont toutefois pas vocation à se substituer au ramassage à terre qui
44
Articles L. 2212-1 et L. 2212-2 alinéa 1° et 5 ° du code général des collectivités territoriales.
45
Dans son avis du 10 juillet 2015, le HCSP rappelle que la meilleure action, en termes
sanitaires, est la prévention
par l’enlèvement des algues avant décomposition.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
28
doit faire l’objet d’un plan opérationnel propre à chaque site dans l’attente d’un
amoindrissement des échouements et d’avancées sur la v
alorisation des algues échouées.
La commune est chargée de déterminer un lieu de stockage et d’épandage. Ce site doit
intégrer une gestion séparée des deux types de produits (algues fraîches ou algues en
décomposition ou mélangées). Des aménagements sont à prévoir pour les lixiviats
46
. Une
difficulté réside encore dans l’absence de définition d’un cadre réglementaire sur les conditions
de stockage, épandage, valorisation et de classification de ces algues comme déchets.
Le maire doit également assurer l’info
rmation de sa population et la règlementation de la
baignade, notamment en cas d’échouement important, le représentant de l’Etat et l’ARS
assurant l’information générale des populations sur les risques sanitaires.
Plusieurs mesures du plan sargasse
I l’int
éressaient directement, tels que le renforcement
du réseau de capteurs sur son territoire permettant la veille sanitaire, la surveillance et la
prévision des échouements à l’échelle des Antilles françaises. Le plan prévoyait également le
financement d’un parc d’engins constitués de tractopelles, pelles mécaniques, camions et
cribleuses.
La chambre rappelle que si le plan sargasses II met en place une organisation efficace
et durable, fondée sur la coopération et l’action conjointe de l’Etat et des collectiv
ités
territoriales et déclinée au sein d’un comité de pilotage territorial, le maire n’est pas déchargé
pour autant de sa responsabilité en matière d’actions préventives et consécutives à l’échouage
des algues sargasses et de leur stockage, dans l’élaboration d’un plan opérationnel de collecte
propre à chaque site et la détermination d’un lieu de stockage ou de valorisation des sargasses.
L’incapacité de la commune à mener à bien son plan de gestion
Le «
plan de gestion », qui n’a jamais été adopté formellement par la commune, a été
abandonné après le départ du coordonnateur de l’équipe
dédiée à la gestion des sargasses. Les
études et les moyens ont alors été suspendus.
Si
l’ordonnateur
fait valoir, dans sa réponse, que ce document ne constituait pas un plan
de gestion, la chambre observe néanmoins
qu’il est intitulé
« plan de gestion synthétique du
littoral de Saint-François dans le cadre des arrivages massifs des algues sargasses »
et
qu’aucun autre
document ne vient formaliser l’action de la commune dans la lutte contre les
échouements de sargasse, notamment dans le cadre du plan communal de sauvegarde
communal (PCS), contrairement aux recommandations du plan sargasse I.
En 2019, un plan de financem
ent pour l’acquisition d’un ensemble Sargaplage (1
500
mètres de barrages flottants) et d’un bateau de type Sargator a été adopté. Son coût était estimé
à 0,82 M€ HT et financé à hauteur de 85 % par la région grâce au
fonds européen de
développement régional (FEDER).
46
Les lixiviats sont les jus produits sous l'action de l'eau de pluie et de la fermentation des déchets enfouis.
Ils contiennent de nombreux polluants (ammoniac, déchets organiques, métaux lourds, arsenic).
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
29
Le premier projet n’a pas abouti. Il en est de même du second projet, voté en 2021
47
,
concernant uniquement l’acquisition et la pose de barrages. Les demandes de financement
déposées par la collectivité entre novembre 2019 et avril 2021 ont reçu un avis défavorable,
faute de production à la DEAL des pièces nécessaires à l’autorisation d’occupation temporaire
du domaine public et de « cas par cas » pour la mise en place de barrages déviants.
La chambre cons
tate qu’une entreprise a mis en place sans autorisation d’occupation
temporaire du domaine public et gratuitement un barrage déviant. En juillet 2020, un prestataire
est intervenu à la demande de la commune pour la remise en place de celui-
ci. D’après les
services municipaux, il aurait été retiré par l’entreprise en mai
-
juin 2022 faute d’accord avec la
commune sur la régularisation de la situation. Cette dernière aurait engagé 0,28 M€ de dépenses
pour la mise en place et l’entretien du barrage.
Photo n° 3 :
Barrage dév
iant installé à l’entrée du Port de plaisance
Source : plan de gestion communal
Deux ans plus tard, en décembre 2021, la commune a abandonné son projet initial et le
recours à une assistance à maîtrise d’ouvrage pour réaliser les études préalables (étud
es de
faisabilité technico-
économique, réglementaire…), dont le coût était estimé à 0,38 M€. La
commune a en effet choisi d’intégrer le marché d’études de courantologie et de bathymétrie
lancé par la région. Ses résultats devraient être connus au deuxième semestre 2023. Ce choix
conduit à reporter dans le temps les investissements alors que leurs financements étaient
octroyés.
Ainsi, la commune a réalisé seulement 0,26 M€ d’investissement, sur les 1,2 M€
projetés pour la période 2018 et 2020.
47
Délibération 2021-12/052
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
30
Des achats d’engins coûteux que les services communaux n’utilisent pas
À la
suite de l’échouage massif de 2018, les communes ont été soutenues techniquement
et financièrement par l’Etat pour l’acquisition de matériel de collecte, plus communément
nommé « kit sargasse
». La cellule du plan d’urgence local contre les sargasses (PULSAR)
48
met à disposition des catalogues de matériels et organise des réunions régulières permettant un
partage d’information.
La commune a ainsi acquis une cribleuse, une tractopelle, un tracteur et un épandeur à
fumier. La cribleuse est tombée en panne. L’entreprise, attributaire du marché de maintenance,
n’est pas intervenue car elle n’était payée. Finalement, cette machine a é
té réparée en 2023.
L’épandeur acheté n’est pas adapté
à la tractopelle
. La commune souhaitait faire l’acquisition
d’un «
cane loader
49
» mais son marché a été infructueux.
Coût d’acquisition et financement perçus (en euros)
Acquisition
coût cible
montant facturé
subventions notifiées
Subventions encaissées
Cribleuse
74 247
62 270
69 144
27 658
Tractopelle
359 244
98 500
331 100
362 196
Tracteur
59 950
Épandeuse
38 950
433 490
259 670
400 244
389 854
Source : commune
La chambre a constaté sur place que ces matériels coûteux n’étaient pas utilisés par les
services municipaux. Ils sont entreposés et certains sont déjà recouverts par la végétation (voir
la photo n°4 ci-dessous).
48
La cellule PULSAR est positionnée auprès du sous-préfet de Pointe-à-
Pitre. Elle l’assiste dans la
définition des moyens de lutte contre
les Sargasses dans l’objectif de protéger les populations et d’accompagner
les collectivités.
49
Type de chargeuse utilisée dans les travaux publics.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
31
Photo n° 4 :
La cribleuse de sargasses non utilisée ni entretenue
Source : chambre régionale des comptes
D’après les services communaux, cette situation anormale serait liée à un manque de
moyen. Le nombre d’agents formés et disposant des certifications pour la conduite de ces engins
serait insuffisant. Des demandes de formation auraient été formulée en ce sens. Les
responsables font également valoir qu’ils ne disposeraient pas des Equipements de Protection
Individuelle
50
. La chambre relève pourtant que la cellule PULSAR met à disposition à titre
gratuit des équipements spécifiques « sargasses
», et qu’elle n’a pas été sollicitée par la
commune.
La chambre prend acte de la réponse de l’ordonnateur selon laquelle des démarches
auraient été entreprises en 2023 en ce sens.
Toutefois, la commune n’a plus d’équipe spécialisée. Lorsque des petits échouages sont
prévus, des agents du service « environnement propreté
» réaliseraient le ramassage à l’aide de
fourches, brouettes et râteaux. Lors des gros échouages, son responsable est supposé transmettre
l’information à la direction des services techniques pour qu’une entreprise extérieure
intervienne.
Par ailleurs, la chambre rappelle que si la commune estime que Gwad’Air
51
assure la
diffusion aux collectivités touchées par les sargasses des bulletins de situation relatives aux
échouages, qui sont transférés à l’ensemble de ses services, cette transmission ne peut se
substituer à l’obligation faite aux maires d’assurer la surveillance quotidienne des plages et des
côtes de leur commune, comme rappelé dans le plan sargasses I.
50
Sachant que les valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) d
e
l’H2S sont de 5 ppm
pour 8
heures et 10 ppm pour 15 minutes, les principales préconisations sont les suivantes :
• Chaque travailleur doit être
équipé d’un détecteur portatif de H2S, situé près des voies
respiratoires (dont l’ANSES précise les caractéristiques
techniques).
• Chaque travai
lleur doit porter des équipements de protection individuelle dont des bottes, des gants et
des demi-masques filtrant anti-gaz. Ceux-ci doivent être portés dès que le détecteur signale une concentration
supérieure à 5 ppm.• Si la concentration reste égale o
u supérieure à 5 ppm pendant 15 minutes, le chantier doit être
évacué.
• Les cabines de conduite des engins de ramassage mécanique doivent être isolantes.
51
Association agréée de surveillance de la qualité de l'air en Guadeloupe
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
32
Pour le risque sanitaire, le plan communal de sauvegarde 2022, qui n’a pas été délibéré
par le conseil municipal, précise que l’origine des émissions de gaz ne sont pas les algues
fraîches mais celles en décompo
sition. Avec l’arrivée des bancs, la commune passe en pré
-
alerte et selon les mesures des taux prélevés et mis en ligne par l’ARS, l’alerte peut être
déclenchée. Le recensement de ces pré-
alertes n’est pas effectué par la commune.
La commune ne suit pas les prescriptions du plan sargasses et fait courir des
risques sanitaires aux populations et de pollution des sols
Lors d’épisodes d’échouage massif sur la plage des raisins clairs, la commune déverse
et entrepose les algues fraiches ramassées et égouttées en arrière de la plage. Leur poids est
ainsi réduit. Leur volume diminue de 40 % en 48 h.
Or, cette pratique est contraire aux dispositions du plan départemental de 2018.
En effet, si le ramassage des algues n'est pas réalisé dans les deux jours suivant leur
échouage, elles entrent en putréfaction et libèrent des gaz malodorants et incommodants
(sulfure d’hydrogène et ammoniac notamment) qui peuvent avoir des effets sur la santé des
populations. Au surplus, la commune ne respecte pas les dispositions du plan en termes
d’épandage. Elle devrait le faire sur le site situé entre la route et le littoral de la Coulée à partir
du restaurant le Colombo vers la Pointe des Châteaux, tel que le prévoit le plan départemental.
Or, elle considère que cette zone ne répon
d pas aux critères préconisés par les services de l’État.
Elle est trop petite et inaccessible aux engins en raison de la végétation. Elle a donc décidé
d’utiliser le terrain de l’Anse Champagne (ex
-
méridien). Cette solution provisoire s’est
poursuivie jus
qu’en 2022.
Toutefois, les prestataires de la commune se sont limités au seul dépotage, sans
épandage des algues, favorisant les dépôts sauvages. Selon les prescriptions, les sargasses
collectées devraient être étalées sur une hauteur de 10 cm
52
.
La chambre constate que les entreprises facturent abusivement la prestation complète.
Leurs opérations ne font pas systématiquement l’objet d’un suivi par les services municipaux.
En l’absence de tout contrôle sur les prestations effectuées, de toute pesée ou éval
uation des
tonnages collectés, la commune est dans l’incapacité d’attester du service fait. Ainsi, la facture
des tonnages repose sur les seules déclarations des prestataires en violation des obligations
mises à la charge de l’ordonnateur
.
L’ordonnateur
oppose, dans sa réponse,
l’impossibilité de calculer le tonnage en
l’absence de données sur la densité des algues. La chambre rappelle qu’il
lui appartient, de
mandater le paiement de prestations évaluées en tonne de matière collectée, de satisfaire à son
obligation préalable de certification du service fait, au besoin en déterminant les modalités
d’évaluation de la prestation lui permettant d’en vérifier l’effectivité.
La pratique communale n’assure pas la protection des sols et expose les terrains
concernés
au risque d’une pollution du terrain et des nappes phréatiques à l’arsenic. En
l’absence d’épandage, un risque sanitaire pour les populations est également encouru, sur ce
52
Recommandations de la DEAL.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
33
lieu très fréquenté de l’Anse Champagne où les algues sont seulement déchargées. Au
surplus,
le terrain a été vendu en 2018 et n’est plus la propriété de la commune. Pour autant, cette
situation n’a
pas été anticipée et les dépotages sur ce site se poursuivent depuis.
L
’ordonnateur
objecte sur ce point
l’absence de classification des sar
gasses en déchets.
La chambre relève cependant que les risques sanitaires inhérents à la décomposition des
sargasses font l’objet d’un consensus scientifique. L’absence de définition juridique des
sargasses est donc sans emport sur la responsabilité des maires dans leurs obligations de
surveiller les plages concernées, d’organiser rapidement la collecte des algues échouées et de
prévoir leur stockage dans des conditions empêchant la contamination du sous-sol.
La chambre en déduit que la commune ne suit pas
l’effectivité et les résultats de sa
politique de lutte contre l’échouage et la pollution des sargasses. Au regard des enjeux, elle
déplore ces négligences préjudiciables de la collectivité.
La gestion irrégulière, peu contrôlée et très onéreuse des prestations des
entreprises
Un recours aux entreprises en dehors des règles de la commande publique
La politique de lutte contre la pollution des sargasses illustre les nombreux
dysfonctionnements et irrégularités dans la gestion de la commande publique par la commune
de Saint-François.
La commune ne détermine pas ses besoins globaux annuels de fournitures pour
l’ensemble de la collectivité. A défaut de transmission d’information en provenance des
autres
services, celui de la commande publique ne procède pas aux recensements des achats
nécessaires,
n’établit donc pas leur liste et ne les regroupe pas au moyen de la nomenclature
adéquate dans les grandes familles de produits
53
. Il est donc dans l’inca
pacité de déterminer par
computation les seuils à partir desquels les passations de marchés publics sont formalisées et
donnent lieu à publicité.
En conséquence, les risques de dépassement des seuils et d’irrégularité dans la
procédure de mise en concurrence sont constants. Aussi, la chambre invite la commune à définir
chaque année de manière formalisée la nature et l’étendue des besoins d’achats à satisfaire.
53
Deux documents de travail ont été élaborés (un par la directrice des achats et un par un prestataire
extérieur) sans être finalisés ni servir à la rationalisation des achats.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
34
Les règles de publicité et de mise en concurrence
Les marchés publics inférieurs à 40 000 euros HT
54
(25 000 euros HT jusqu’en
décembre 2019) peuvent être conclus sans publicité ni mise en concurrence préalables, à
condition que l’acheteur public veille à choisir une offre pertinente et à ne pas contracter
systématiquement avec la même entreprise.
Les marchés de travaux d’un montant inférieur à 100 000 euros HT conclus entre le
9 décembre 2020 et le 31 décembre 2022 sont également concernés par cette dispense de
mise en concurrence en application des dispositions de l’article 142 de la loi n° 2020
-
1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (dite
loi ASAP), selon les mêmes conditions.
Entre 40 000 et 90 000 euros HT, les collectivités doivent recourir à une procédure
adaptée dont elles déterminent librement les modalités en fonction des caractéristiques
des besoins à satisfaire, du nombre d’entreprises susceptibles d’y répondre et des
circonstances de l’achat. La publicité doit également être adaptée à celles
-ci.
À partir de 90 000 euros HT, la publicité par ins
ertion d’une annonce au Bulletin
officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ou dans un journal d’annonces
légales est obligatoire. Au-delà de 221 000 euros HT pour les fournitures et services, ou
5 548 000 euros HT pour les travaux, les acheteurs pu
blics doivent recourir à l’une des
procédures formalisées prévues par la règlementation.
La collectivité ne regroupe pas ses achats de prestations de collecte et d’épandage des
sargasses ce qui implique le fractionnement de ses paiements, le non-respect et par voie de
conséquence, la violation des règles de procédures de publicité et de mise en
concurrence prescrites définies par le code de la commande publique
55
.
Face aux importants échouages sur le littoral en 2023, la commune a eu recours aux
dispositi
ons de l’article R.
2122-1
56
du code de la commande publique pour faire appel à des
prestataires en faisant valoir l’urgence et les risques sanitaires de la situation. La chambre
constate que ces arguments sont évoqués de façon récurrente depuis 12 ans et que, par voie de
54
Articles L. 2112-1 et R. 2112-1 du code de la commande publique.
55
Aux ter
mes de l’article R.2121
-1 du code de la commande publique
« L'acheteur procède au calcul de
la valeur estimée du besoin sur la base du montant total hors taxes du ou des marchés envisagés.
Il tient compte des options, des reconductions ainsi que de l'ensemble des lots et, le cas échéant, des
primes prévues au profit des candidats ou soumissionnaires. »,
de
l’article R.2121
-6
« Pour les marchés de
fourniture ou de services, la valeur estimée du besoin est déterminée, quels que soient le nombre d'opérateurs
économiques auquel il est fait appel et le nombre de marchés à passer, en prenant en compte la valeur totale des
fournitures ou des services qui peuvent être considérés comme homogènes soit en raison de leurs caractéristiques
propres, soit parce qu'ils constituent une unité fonctionnelle. »
et de l’article R.
2121-7
« Pour les marchés de
fournitures ou de services qui répondent à un besoin régulier, la valeur estimée du besoin est déterminée sur la
base : 1° Soit du montant hors taxes des prestations exécutées au cours des douze mois précédents ou de l'exercice
budgétaire précédent, en tenant compte des évolutions du besoin susceptibles d'intervenir au cours des douze mois
qui suivent la conclusion du marché ; 2° Soit de la valeur estimée des prestations qui seront exécutées au cours
des douze mois ou de l'exercice budgétaire qui suit la conclusion du marché. ».
56
Selon l’article R.2122
-
1 du même code, l’
acheteur peut dans certains cas conclure un marché sans
publicité ni mise en concurrence préalables lorsqu'une urgence impérieuse résultant de circonstances extérieures
et qu'il ne pouvait pas prévoir ne permet pas de respecter les délais minimaux exigés par les procédures
formalisées.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
35
conséquence, la commune ne peut s’en prévaloir
. Elle relève également que cette pratique est
préjudiciable aux finances de la collectivité, dans la mesure où les seuils de mise en concurrence
sont systématiquement dépassés, ainsi que le met en évidence le tableau n° 3 ci-dessous.
En novembre 2021, la commune
a engagé la rédaction d’un marché public qui n’était
toujours pas finalisée en décembre 2022. Les services municipaux ont indiqué au cours du
contrôle de la chambre qu’il n’était plus nécessaire d’avancer sur ce dossier dès lors qu’un
syndicat mixte regroupant les collectivités concernées par cette pollution prendra en charge la
collecte des sargasses en 2023, ce qu’infirme la cellule PULSAR
.
Un service public de lutte contre les sargasses à l’échelle de la Guadeloupe
Dans le cadre des orientations définies en août 2022 par le comité national de pilotage
des sargasses, un groupem
ent d’intérêt public (GIP)
57
a été créé le 25 avril 2023. Il est
dénommé SARGIP. Il regroupe l’Etat, la région, le département et la chambre de
commerce et d’industrie des Îles de Guadeloupe.
Cet opérateur unique de gestion a pour mission de définir pour l
’ensemble du territoire
guadeloupéen les principes et les priorités de l’action publique dans la lutte contre les
sargasses.
Dans le cadre d’une programmation pluriannuelle, il coordonne pour l’ensemble des
collectivités les opérations de prévention, de r
amassage, de stockage, d’épandage et de
valorisation. Le GIP participe aux instances de concertation, de décision, d’ingénierie
ou d’études visant à réduire la prégnance des sargasses sur l’activité économique et
sociale. Il recueille et diffuse l’ensemble
des données relatives à la prévention, à la
recherche et à la coopération régionale. Son rôle est également d’informer la population.
Ce groupement est doté d’un budget de 0,25 M€, financé à hauteur de 80 % par l'Etat,
de 3 % par la CCI et de 17 % par la région et le département.
Par ailleurs, la création d’un syndicat mixte est envisagée. Regroupant les communes et
les communautés d'agglomérations concernées, il sera en charge des aspects
opérationnels de la lutte contre cette pollution. Pour éviter les échouements, il installera
par exemple les barrages. Il mobilisera et coordonnera l’action des communes de leurs
moyens nécessaires à la collecte et aux autres opérations.
La chambre relève que cet établissement n’est pas créé
et que la commune continue à
ne pas respecter les règles de la commande publique. Or, un accord cadre permettrait de
répondre aux exigences du ramassage des sargasses, sous une forme juridique appropriée, en
intégrant les différents lots selon la nature de la collecte et en permettant de choisir, entre autres,
l’offre économiquement la plus avantageuse.
57
Un groupement d’intérêt public
permet à des partenaires publics et privés de mettre en commun des
moyens pour la mise en œuvre de missions d’intérêt général
. La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification
et d’amélioration de la qualité du droit (dite « loi Warsmann ») a institué un statut législatif des GIP
. Ils concernent
de
nombreux
domaines
de
l’action
publique
(
l’environnement,
la
santé…).
Source
:
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
36
Recommandation n°6 :
(
Régularité
) Respecter les règles de publicité, de mise en
concurrence et de computation des seuils pour les achats de
prestation de service conformément aux articles R. 2121-1, R.
2121-6 et R. 2121-7 du code de la commande publique
La chambre
prend acte cependant de la réponse de l’ordonnateur selon laquelle un
marché public a été publié en mai 2023 et que la commune a recours à deux cabinets de conseil
afin de structurer la fonction achat et
d’accompagner la collectivité dans l’expression de ses
besoins et l’application des règles en matière de marché public
.
Des prestations d’entreprises aux coûts parfois excessifs, non maitrisés par la
commune et largement fi
nancés par l’Etat
Entre 2018 et 2022, la commune aurait engagé, d’après les services municipaux, 0,6 M€
de dépenses pour la lutte contre les sargasses. La chambre émet de sérieuses réserves sur
l’exhaustivité de ce montant (voir le tableau n°3). En effet,
les prestations payées aux
entreprises en 2018 ont été relativement modestes (62 310 euros) alors que les échouages
d’algues sargasses ont été massifs. Plus étonnant encore, aucune charge n’a été constatée dans
la comptabilité en 2021.
Les montants des prestations des entreprises (en euro)
Prestataires
2016
2017
2018
2019
2020
2022
Total par
prestataire
A
4 060
4 060
B
38 150
63 000
101 150
C
1 000
70 500
71 500
D
17 500
17 500
E
40 700
9 800
50 500
F
2 730
2 730
G
94 814
49 302
144 116
H
33 060
80 800
113 860
I
24 750
19 000
43 750
J
62 310
62 310
Total par année
44 980
19 000
62 310
169 574
101 312
214 300
611 476
Source : commune
–
budget principal et budget annexe du port de plaisance.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
37
Le recours à des prestations d’une entreprise sans mise en concurrence, à un coût
très élevé et à l’effectivité non contrôlée
Une entreprise, prestataire de la commune pour la collecte
, le transport et l’épandage
des algues sargasses, est également titulaire du marché notifié en juillet 2018 concernant
la réfection de la toiture du gymnase de la piscine communale « des raisins clairs »
dégradée à la suite de la tempête Irma.
Toutefois, si le marché a été réceptionné avec retard, les réserve
s n’ont pas été levées et
la réfection de la toiture n’est pas finalisée.
Cette entreprise est également l’attributaire d’autres marchés et elle réalise diverses
interventions, en limite du seuil des marchés publics à partir duquel la procédure de mise
en concurrence doit être formalisée et donné lieu à publicité. La commune a ainsi eu
recours à ses services par simples bons
de commande pour l’enlèvement des sargasses
pour 100 000 euros HT.
La chambre constate que les bons de commande sont imprécis. Les décomptes joints
sont forfaitaires, par exemple : 28 900 euros HT pour la
«
récupération des sargasses
par cribleuse et excavatrice 32 tonnes
»
et 9 250 euros HT pour
«
le transport des algues
par camion benne et ampliroll
58
»
, pour un montant total de 38 150 euros HT.
Elle relève aussi qu’en 2022,
ce prestataire a facturé des interventions à hauteur de
12 500 euros HT la journée. Or, aucun motif particulier ne peut justifier ce coût 7,5 fois
supérieur à celui obtenu en moyenne des entreprises dans le cadre de la consultation en
urgence évoquée
supra
pour des prestations identiques.
La chambre a par ailleurs constaté que certains devis de l’entreprise ont été remis en
même temps que sa facture et que les bons de commande initiaux étaient signés par le
directeur général des services ou le maire.
Or, les services techniques communaux n
’ont pas validé le service fait pour les trois
bons de commande de 2022. La constatation du service fait est une opération dont la
finalité est de s’assurer que le prestataire a bien accompli ses obligations. Ce constat
incombe aux services techniques communaux qui doivent attester de la conformité de
la prestation à la commande et de la date d’effet du service fait. Les factures portent
alors la mention de cette validation. Or, la chambre a constaté que sur une majorité
d’entre elles, cette mention n’était
pas portée. En l’absence de cette étape, la réalisation
de la prestation n’est pas certaine.
Jusqu’en 2020, la commune recourait aux services de la seule entreprise qui disposait
d’un bateau spécialisé pour la collecte en mer des sargasse, dénommé
« Sargator »
59
. Les
prestations journalières réalisées sur bons de commande sans mise en concurrence étaient de
2 500 euros HT pour la mise à disposition journalière du bateau et des personnels.
58
«
L’ampliroll
» est un système de bras de levage hydraulique doté d’un crochet pour charger, décharger
ou déposer des caisses ou des bennes.
59
Le bateau « Sargator » dispose
d’un
tapis de ramassage mobile qui collecte les algues en mer, par un
système de motopompe hydraulique. Ce procédé a été mis au point par une société installée en Guadeloupe.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
38
La facturation annuelle comprenait également des prestations de collecte sur plage et de
mise à disposition d’autres équipements pour un prix moyen journalier oscillant entre
3 736 euros HT et 4 306 euros HT.
Prestation « Sargator »
2019
2020
Nombre de jours bateau
10
5
Collecte en mer
4 306
3 736
Facturation
globale (€HT)
43 060
41 100
Facturation TTC
46 720
44 594
Source : facturation entreprise
En 2022, les prix à la journée, facturés dans le cadre de la consultation d’urgence déjà
évoquée, vont de 1 085 euros à 4 383 euros HT.
Détail des prix pratiqués à la journée en 2022 par les entreprises (en euro)
Sereg (lot 5)
Sereg (lot
6) (port de
plaisance)
ELGTP
(Lot 3)
ELGTP
(Lot 2)
lot 1 (elgtp)
lot 4(elgtp)
Collecte sur plage
(MAD
60
tracteur de plage
avec cribleuse de plage,
tractopelle, et personnels)
434
651
760
271
Collecte sur plage (MAD
grue, engin amphibie,
tractopelle, et personnels)
3 038
3 038
Transport d'algues (MAD
camion benne et
personnel)
792
792
434
434
734
488
Épandage en arrière plage
(MAD benne et
personnel)
553
553
326
326
326
326
4 383
4 383
1 194
1 411
1 819
1 085
Source : chambre régionale des comptes à partir des bons de commande
Prix moyen à la journée (en euro)
2014
2015
2018
2019
2020
2022
Prix moyen constaté
1304
3130
1633
2007
2996
2379
Source : chambre régionale des comptes à partir des bons de commande
60
MAD : mise à disposition.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
39
L’adéquation des prix pratiqués par les entreprises au regard de la prestation exécutée
nécessitent de rapporter leur coût au volume en m
3
collecté sur la même période. Ainsi, en 2022,
sur la base de 3 605 m
3
de sargasses collectés selon le rapport
61
de la commune
,
il est évalué un
prix moyen de 59,45 € TTC/m
3 62
, très largement supérieur aux tarifs de référence indiqués dans
le tableau n° 7
infra
du rapport collectif sur
« le phénomène d’échouage des
sargasses dans les
Antilles et en Guyane »
rédigé en juillet 2016 par le conseil général de l’environnement et du
développement durable (CGEDD), le conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des
espaces ruraux (CGAAER) et l’inspection générale de l’administration (IGA).
Si dans sa réponse adressée à la chambre,
l’ordonnateur
objecte que les volumes
collectés en 2022 n’ont pu être comptabilisés dans leur totalité par les différents prestataires et
que le coût au m
3
n’est donc pas fiable, il est rappelé l’obligation pesant sur l’ordonnateur de
s’assurer de la réalité du service fait en contrôlant les quantités facturées.
Rendements et coûts des méthodes de collecte
Source : rapport «
le phénomène d’échouage des sargasses dans les Antilles et en
Guyane (CGEDD, CGAAER,
IGA)
La chambre constate que, de 2018 à 2022, la commune a bénéficié d’un niveau très
élevé de 429
320,72 euros de subventions de l’Etat pour la prise en charge des dépenses de
collecte, lesquelles n’ont pas été utilisées avec efficience compte tenu de l’abandon des
équipements spécifiques dont elle s’est dotée au profit de l’externalisation des opérations de
ramassage des sargasses sans contrôle du service fait par les prestataires.
61
Rapport d’exécution sur la collecte urgente des algues sargasses échouées sur le littoral de la commune
de Saint-François au cours d
e l’année 2022
.
62
Coût calculé selon le total général 2022 du tableau n° 3 supra
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
40
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
La politique de lutte contre la pollution des sargasses présente de nombreuses
insuffisances.
La gestion de la collecte des algues met en exergue l’absence de stratégie territoriale
et de respect des prescriptions du plan sargasses. Elle fait courir des risques sanitaires aux
populations et des risques environnementaux, notamment de pollution des sols.
Cette situation est la conséquence des négligences de la commune et de son incapacité
à mettre en œuvre un plan local de lutte contre les échouements de sa
rgasse,
alors qu’elle a été
financée à un niveau élevé de 429 320,72 euros par l’Etat.
Bien que disposant de moyens matériels adaptés, ses services n’assurent pas les
opérations. La commune recourt donc à des entreprises pour la collecte, le dépotage, le
transport et l’épandage.
Pour ce faire, elle ne respecte pas les règles de publicité et de mise en concurrence.
Elle ne se préoccupe pas de la maitrise des conditions financières de ces prestations. Elle est
en général dans l’incapacité de justifier leur
effectivité, n’assure pas de suivi et ne collecte pas
de données. A titre d’exemple, les entreprises doivent épandre les algues ramassées
,
ce qu’elles
font rarement. Elles facturent pourtant la prestation sans que la commune y trouve à redire. Le
prix moyen de collecte et de dépotage des sargasses supporté est de
59,45 €
TTC/m3, soit un
tarif très largement supérieur aux référentiels.
3
LA TRAJECTOIRE FINANCIERE DE LA COMMUNE NE
CESSE DE SE DEGRADER
En raison de l’absence de fiabilité des comptes de la
commune (cf. chapitre 4), la chambre
a procédé aux retraitements des données principales, en intégrant les restes à réaliser
63
et
d’autres corrections. Le tableau n°
8 présente les chiffres des comptes administratifs définitif
2018 et provisoire 2022, les montants de RAR et les données retraitées.
De 2018 à 2022
64
, les produits et les charges de gestion ont augmenté respectivement de
5,1 M€ et 7,6 M€. Cette progression beaucoup plus soutenue des dépenses (+ 35,6 %) a pour
effet de dégrader l’excédent brut de
fonctionnement, malgré une hausse des produits fiscaux de
presque 5 M€. En 2022, il est négatif (
- 1,53
M€), contre 0,94 M€ en 2018.
63
Les restes à réaliser (RAR) correspondent aux dépenses engagées auprès d’un fournisseur qui n’ont pas
fait l’objet de la constatation du service fait à la fin de l’exercice.
Pour l’investissement, leur montant est pris en
compte pour déterminer le besoin de financement au 31 décembre et l’affectation du résultat de clôture nécessaire
à sa couverture (financement).
64
En 2018, les corrections en section de fonctionnement ont une incidence de -
0,096 M€ sur le résultat.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
41
La collectivité ne maitrise pas ses charges de personnel (+ 3,2 M€) et ses charges à caractère
général (+ 3,7 M€). La capacité d’autofinancement brute
65
est très largement négative
à - 4,26
M€ contre
-
0,73 M€ en 2018. Les dépenses d’équipement réalisées au cours de cette
période représentent en montant cumulé, 6,4 M€. La commune n’ayant pas d’autofinancement,
elles ont été financées par 11
M€
de produits de cessions
d’actifs et 4,5 M€
de subventions
reçues.
L’endettement est de 13,7 M€
.
Évolution de la CAF Brute 2018/2022
en €
2018
RAR
CA2018
2022
RAR
CA 2022*
Données
retraitées
CA2022
retraité
Ressources fiscales propres
(nettes des restitutions)
17,406
0,000
17,406
22,243
0,047
22,290
0,000
22,290
+ Fiscalité reversée
-1,385
0,000
-1,385
-1,294
0,000
-1,294
0,000
-1,294
= Fiscalité totale (nette)
16,020
0,000
16,020
20,949
0,047
20,996
0,000
20,996
+ Ressources d'exploitation
1,040
0,265
1,305
1,304
0,949
2,253
-0,600
1,653
+ Ressources institutionnelles
(dotations et participations)
4,898
0,000
4,898
4,616
0,049
4,665
0,000
4,665
+ Travaux en régie
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
= Produits de gestion (A)
21,958
0,265
22,223
26,868
1,046
27,914
-0,600
27,314
Charges à caractère général
2,706
0,827
3,533
3,610
3,010
6,620
0,578
7,198
+ Charges de personnel
15,045
0,742
15,787
18,476
0,537
19,014
0,000
19,014
+ Subventions de
fonctionnement
1,471
0,000
1,471
1,956
0,000
1,956
0,000
1,956
+ Autres charges de gestion
0,470
0,013
0,483
0,462
0,217
0,679
0,000
0,679
= Charges de gestion (B)
19,693
1,582
21,275
24,504
3,764
28,268
0,578
28,846
Excédent brut de
fonctionnement (A-B)
2,266
-1,317
0,948
2,364
-2,718
-0,354
-1,178
-1,533
en % des produits de
gestion
10,3
4,3
8,8
-1,3
8,8
+/- Résultat financier
-0,82
0,00
-1
-0,39
0,00
0
0,00
0
dont fonds de soutien -
sortie des emprunts à risques
0,00
0,00
0
0,00
0,00
0
0,00
0
+/- Autres produits et charges
excep. réels
0,15
-1,01
-1
-0,52
-0,02
-0,5
-1,798
-2,342
= CAF brute
1,596
-2,325
-0,729
1,454
-2,737
-1,283
-2,977
-4,260
en % des produits de
gestion
7,3
-3,3
5,4
-4,6
-15,6
Source : Chambre régionale des comptes
CA 2022 : Données provisoires
Malgré le plan de redressement de la chambre mis en place depuis 2017, la commune a
dégradé sa situation financière, n’est toujours pas en mesure de financer ses opérations
d’investissement et demeure dépendante des ressources externes ou de recettes exceptionnelles
à l’image de la cession du terrain Anse
-Champagne en 2022.
65
La capacité d’autofinancement (CAF) brute correspond à l’épargne dégagée par l’activité courante de
la collectivité sur un exercice (excédent brut de fonctionnement). Elle est disponible pour couvrir tout ou partie
des dépenses d’investissement, y compris l’amortissement du capital de la dette. La CAF brute moins ce dernier
constitue la capacité d’autofinancement nette.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
42
Les recettes fiscales, moteur de la hausse des produits de gestion
Les recettes fiscales, ressources principales de la commune
Dans un contexte de réformes successives de la fiscalité locale, et notamment la
suppression définitive en 2023 de la taxe d’habitation sur les résidences principales, les taxes
foncières
66
représentent un peu plus de 50 % des recettes fiscales directes des collectivités
67
.
Les ressources principales de la commune proviennent de ces impôts locaux fondés sur
la détention du patrimoine.
La commune a engagé avec les services de la direction régionale des finances publiques
un travail pour améliorer le recensement des bases fiscales (constructions et travaux non
déclarés) et donc s’assurer d’un niveau plus élevé de ressources.
Cette opération, issue de la recommandation n°2 formulée par la chambre lors de son
précédent contrôle,
n’a toute
fois pas été finalisée.
En effet, la commission communale des impôts directs
68
ne s’est pas réunie et aucune
proposition de révision n’a été soumise au directeur départemental des finances publiques
69
.
La chambre estime à 0,68
M€
d’euro le produit potentiel
perdu pour la commune. Elle
souligne également que son inaction est source d’inégalité des contribuables devant l’impôt.
Recommandation n°7 :
(
Performance
) Poursuivre l’actualisation des bases fiscales, en
relation avec la direction régionale des finances publiques
Recommandation n°8 :
(Performance)
Mettre en place les contrôles d’urbanisme aux
fins de recensement des constructions manquantes au cadastre
ou devant faire l’objet de reclassement
Malgré cette inaction, la commune a bénéficié à la fois du dynamisme des bases liées
aux constructions et travaux et de ses décisions de relèvements de taux en 2018 et en 2020
(cf. tableau n° 4 en annexe n° 2).
Entre 2018 et 2022, elles ont progressé de 17,7 % (+ 3 M€), 42 % de cette augmentation
est liée toutefois aux revalorisations forfaitaires annuelles nationales et 58 % à la progression
physique des bases saint-franciscaine évoquée précédemment. Elles devraient encore
progresser en 2023, en raison principalement d’une révision nationale fixée à 7,1 %
70
.
66
Taxes foncières sur les propriétés bâties (TFNB) et les taxes foncières non bâties (TFNB).
67
Rapport
« Les taxes foncières »
de la Cour des comptes publiés le 27 février 2023.
68
Article L1650-1 du code général des impôts.
69
Constat en l’absence de données transmises par la collectivité.
70
Cf. tableau n° 5 en annexe n° 2.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
43
Couplées aux hausses de taux décidés par la commune, les recettes fiscales sur le foncier
ont progressé de 3,89
M€ entre 2018 et 2022. Elles devraient encore augmenter de 1,27
M€ en
2023.
Les autres recettes fiscales ont enregistré une progression de 0,95 M€. Les produits de
jeux, la taxe sur les carburants et la taxe sur les passagers accusent une diminution. Les produits
des autres recettes fiscales sont en hausse : les recettes d’octroi de mer (+
0,67
M€), les droits
de mutation (+ 0,48 M€), la taxe sur l’électricité (+ 0,34 M€).
Pour sa part, la fiscalité reversée (FNGIR
71
+ Attribution de compensation) est restée
relativement stable à 1,29
M€ en 2022 contre 1,39 M€ en 2018.
Ainsi, entre 2018 et 2022,
les produits fiscaux ont progressé de 4,9 M€.
Des ressources institutionnelles stables et des ressourc
es d’exploitation
insuffisamment mobilisées
Malgré la baisse de la population, les dotations restent stables. La dotation globale de
fonctionnement (DGF) progresse de 1 % (+ 0,1 M€), la dotation d’aménagement outre
-mer
(+ 0,24
M€
) compensant la baisse de la dotation forfaitaire (-
0,09 M€) (cf.
tableau n° 6 en
annexe n° 1).
Évolution de la DGF en nombre d’habitants
2018
2019
2020
2021
2022
Variation
Population
14 008
13 262
12 989
12 518
11 849
-15 %
Dotation Globale de
Fonctionnement (en €/hab.)
266
281
295
309
328
5,3 %
Dont dotation forfaitaire
161
167
172
177
184
3,3 %
Dont DACOM
105
114
123
132
144
8,3 %
Source : chambre régionale des comptes
La commune se contente de cette situation plutôt favorable, qui pourrait l’être plus
encore. En effet, elle néglige le recouvrement des recettes qui lui seraient pourtant acquises.
Ainsi, elle n’effectue pas les déclarations pour l’obtention du fonds de compensation de
la TVA (FCTVA) lié au montant des dépenses d’équipement. En ne réglant pas rapi
dement des
restes à réaliser, elle se prive du versement des subventions qui lui sont attribuées et pénalise
ses fournisseurs par ses retards de paiement.
Par ailleurs, la commune pourrait augmenter le montant des produits de gestion en
instaurant la taxe sur la publicité extérieure (TLPE)
72
, ce qui améliorerait son autofinancement.
71
Le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) a été mis en place pour permettre de
faire compenser par les communes bénéficiaires de la réforme de la taxe professionnelle comme Saint-François
les écarts fiscaux des autres communes et établissement publics intercommunaux.
72
Articles L. 2333-6 à L. 23333-16 du CGCT. Cette taxe vise la taxation des supports publicitaires.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
44
De même, elle n’a pas engagé le travail de recensement de ses biens immobiliers, de
mise à jour de ses baux et d’autorisations d’occupation du domaine public. Certains sont
occupés sans titre et souvent sans paiement de loyer, comme sur le domaine aéroportuaire. La
commune perd, selon ses propres estimations, des recettes évaluées à 0,15
M€
.
Dans sa réponse adressée à la chambre, l
’ordonnateur fait valoir d’une part l’émissi
on
de titres de recette à l’encontre des occupants sans titre du domaine public, sans préjudice des
résultats prochains de la mission confiée à un cabinet de conseils sur la cartographie et la
valorisation des AOT, et d’autre part le travail collaboratif a
vec la DRFIP sur le recouvrement
des recettes. Elle espère également optimiser le recouvrement des recettes par l’adhésion au
service de paiement en ligne (Payfip). La chambre
en prend acte et relève toutefois qu’il n’est
pas justifié des premières mesures annoncées.
D’autres recettes pourraient également être envisagées, comme la facturation de
l’utilisation de ses équipements sportifs, de celle des services réalisés par ses équipes
municipales en dehors du domaine communal ou des redevances forfaitaires sur réseau.
D’autres encore pourraient être optimisées par un meilleur contrôle et une gestion contractuelle
plus dynamique (cf. recommandation sur le casino en annexe n° 1).
Sur la période 2018-
2022, les produits d’exploitation, hors refacturation des ch
arges de
personnel aux budgets annexes, ont en conséquence décru et représentent seulement 0,2
M€
en
2022.
Recommandation n°9 :
(
Régularité
) Régulariser les titres et procéder à la mise en
recouvrement des loyers et des redevances
Des charges de gestion qui progressent plus rapidement que les produits
L’absence de maitrise des charges à caractère général hypothèque la
couverture des besoins d’entretien et de maintenance de la collectivité
En 2018, les charges à caractère général s’établissaient à 3,5 M€ (RAR compris). En
2022, selon les résultats du compte administratif provisoire retraité, leur montant aurait doublé
avec 7,2 M€. Une part de ces dépenses comprend des restes à réaliser d’exercices antérieurs, à
l’image du rappel de taxes foncières non payées par la commune de 0
,9
M€, chiffre que conteste
la commune, et des factures impayées pour un montant total de 0,7
M€. L’explication de cette
situation pourrait être le rattrapage de dépenses engagées qui n’avaient pas été prises en charge
pendant la crise sanitaire et surtout la grève de six mois des services municipaux en 2021. Aussi,
la commune ne dispose pas des moyens nécessaires pour faire face aux besoins d’entretien et
de maintenance des voieries et de ses bâtiments.
Dès lors, l’objectif de stabiliser le montant des dép
enses du chapitre 011
« Charges à
caractère général »
à 4 M€ n’est pas tenable, au surplus en période d’inflation, et sans un
recensement des contrats et une responsabilisation des services communaux.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
45
Une gestion calamiteuse des ressources humaines qui expose la collectivité à des
risques financiers et juridiques
La commune de Saint-François emploie, tous établissements confondus, 475 agents au
31 décembre 2022
73
. Son taux d’administration est de 40 agents pour 1 000 habitants
74
,
nettement supérieur à la moyenne nationale. Pour le seul périmètre communal et de ses régies,
les effectifs rémunérés sont de 387 à fin 2022, contre 386 en 2018.
Lors de la mise en plan de redressement de la commune, la chambre avait recommandé
de
« stabiliser les dépenses de personne
l à hauteur de 15,23 M€, en ne procédant plus à aucun
recrutement de quelque nature que ce soit et en ne renouvelant pas les contrats à durée
déterminée ».
Dans son avis budgétaire de 2018, la chambre engageait la commune au
« non
remplacement des agents p
artant à la retraite et l’arrêt de nouveaux recrutements de personnel
de catégorie C et au non renouvellement des contrats d’agents non titulaires de catégorie C à
compter de 2019 »
.
Ces recommandations ont été réitérées dans les avis budgétaires suivants. Une
estimation du non remplacement des départs à la retraite sur les exercices 2022-2025 conduisait
à évaluer l’économie potentielle cumulée à 3,38 M€.
La commune a pris l’exact con
trepied des mesures préconisées par la chambre. Ainsi,
si le poids relatif des charges de personnel diminue (68,1 % des produits de gestion, contre 71%
en 2018), les décisions de gestion ont entrainé une augmentation de 3,23 M€ des charges de
personnel. Le
ur importance obère les marges de manœuvre financière de la commune. Elle
affiche l’objectif de «
contenir » le chapitre 012 «
Charges de personnel
» en deçà de 19 M€,
soit 3,77 M€ de plus que l’objectif proposé par la cham
bre au préfet.
Non seulement, la
commune n’a pas fait d’effort pour le non remplacement des départs
à la retraite (13 en 2021, 9 en 2022), mais, au surplus, elle a procédé à un plan de résorption de
l’emploi précaire par la titularisation des contractuels jusqu’à ceux embauchés en 2020, s
ans
que le recours à l’emploi de contractuel ne diminue dans les mêmes proportions.
Évolution des équivalents temps plein rémunérés (2018-2022)
Statut
2018
2019
2020
2021
2022
Variation
Titulaires
296,59
293,63
306,36
308,27
329,36
+ 33
Contractuels
80,5
86,61
69,32
63,35
54,18
-26
Emplois aidés
8,48
2,96
0,69
-4
PEC
1,23
2,39
3,83
Total
385,57
383,2
377,6
374,01
387,37
+ 2
Source : Chambre régionale des comptes avec les données des ETPR transmises par la commune
73
Données transmises par la collectivité regroupant les ETP de la commune, de la caisse des écoles et du
CCAS.
74
Ce taux ne tient pas compte des agents de la communauté d’agglomération et des syndicats intervenants
sur le périmètre communal. En moyenne, le taux d’administration de la fonction publique territoriale est de 30
agents pour 1 000 habitants.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
46
Ce plan de titularisation intervenu entre 2020 et 2022 a généré un surcoût évalué par la
direction des ressources humaines à 447 561 euros pour 65 mises en stage
75
. Alors que les
services municipaux étaient fermés
ou fonctionnaient au ralenti, la commune n’a pas limit
é le
nombre d’agents contractuels pendant la crise sanitaire et la grève continue pendant six mois
en 2021.
Elle a également procédé à la revalorisation des rémunérations, à la suite de la mise en
place du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, d
es sujétions, de l’expertise et de
l’engagement professionnel (RIFSEEP)
76
, sans
refonte des primes existantes. À la suite d’un
mouvement social et après accord
77
pris à l’encontre des conditions de réexamen du régime
décidées par l’assemblée délibérante, une revalorisation générale de 300 euros mensuel a été
actée.
Cette décision, qui conforte les écarts préexistants, a été prise avec un effet rétroactif au
1
er
janvier 2019. Elle a été suivie de revalorisations complémentaires pour une trentaine
d’agents, non actées en comité technique ni en conseil municipal
, bien que les motifs invoqués
ne répondent pas aux modalités de réexamen autorisées par l’assemblée déli
bérante.
Consécutivement, la revalorisation mensuelle moyenne a été de 308 euros pour les agents de
catégorie C, 544 euros pour les agents de catégorie B et 943 euros pour les agents de catégorie
A. Il en résulte
une augmentation de 1,3 M€ du montant du ré
gime indemnitaire annuel.
Ces choix de gestion concourent à une progression de 20,4 % de la masse salariale sur
la période 2018-2022. Le prévisionnel 2023 transmis par le service des ressources humaines le
18 mars 2023 s’établit à 18,2 M€ et conforte la tr
ajectoire de 2022 sans pour autant intégrer
l’ensemble des conséquences des décisions à intervenir, telle que celle sur le complément
indemnitaire annuel (CIA).
Pour autant, la chambre constate que toutes ces décisions ont été prises sans chiffrage
de leur
s incidences financières et sans étudier d’autres scenarii.
Elles correspondent aux demandes des organisations syndicales, voire de la direction
des ressources humaines qui surévalue les crédits budgétaires nécessaires et maintient des
postes budgétés non
nécessaires pour conserver des marges de manœuvre significatives lui
permettant de gérer les relations sociales sans en référer aux autorités décisionnaires.
Dans son avis de 2020, la chambre alertait déjà sur la nécessité pour le conseil municipal
d’ajuster le tableau des emplois à l’effectif actuel et de s’assurer de l’existence des délibérations
des créations de poste pour chaque poste. Il doit être réduit systématiquement à chaque départ
(retraite, non renouvellement de contrat, etc.). En effet, les créations et suppressions de poste et
les modifications du tableau relèvent du seul arbitrage de l’assemblée délibérante.
Or, ces décisions sont prises par la direction des ressource humaines. En effet, bien
qu’un réajustement du tableau ait été réalisé, ce
dernier comporte toujours un effectif supérieur
75
Les agents contractuels ne bénéficient pas des dispositifs financiers tels que la prime de vie chère ou le
régime indemnitaire. Le coût de leur intégration dans la fonction publique est de 6588 euros en moyenne hors les
impacts financiers des mesures de revalorisation nationale auxquelles sont assujetties les collectivités.
76
Décret n° 2014-
513 du 20 mai 2014 portant création du RIFSEEP dans la fonction publique d’Etat et
décret n° 2020-182 du 27 février 2020 relatif au régime indemnitaire des agents de la fonction publique territoriale
77
Décision du 10 mars 2020.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
47
de 79 postes, soit 20 % des emplois pourvus, la direction n’ayant pas été en mesure de produire
les justificatifs des créations de poste des emplois pourvus et à pourvoir (cf. annexe n° 3).
Recommandation n°10 :
(
Régularité
) Mettre le tableau des effectifs en cohérence avec
leur nombre et prendre une délibération de régularisation
pour que l’ensemble des postes pourvus et budgétés soient
effectivement créés
Les procédures réglementaires de gestion des ressources humaines sont absentes,
irrégulières ou imprécises, ce qui participe aux dysfonctionnements des services communaux.
Ainsi, les règles de procédures de recrutement ne sont pas respectées, voire parfois
contournées pour permettre des recrutements, qui ne correspondent pas aux besoins (ex : le
directeur des services techniques recruté n’avait pas encadré d’agents auparavant, le
responsable de la commande publique n’a pas suivi de formation). Cette pratique nuit à une
gestion efficace et régulière de la commune.
Les constats de la chambre sur le processus de recrutement
POSTE A
POURVOIR
TYPE DE
RECRUTEMENT
DVE
FICHE DE
POSTE
DOSSIER
CANDIDATURE
AGENT RETENU
AUTRES
CANDIDATURES
COURRIER
ENTRETIEN
GRILLE
EVALUATION
RAPPORT
DE JURY
REPONSE
AGENTS
DGS
Externe
✓
✓
✓
✓
X
X
X
✓
DST
Externe
✓
✓
✓
✓
X
X
X
X
DDT
Externe
✓
✓
✓
✓
X
X
X
✓
Assistant
Commande
Publique
Interne
X
✓
✓
X
X
X
X
X
Coopération
Territoriale
Globale
Externe
✓
✓
✓
✓
X
✓
X
X
ASVP
2022
Interne
X
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
ASVP
2021
Interne
X
✓
✓
✓
✓
✓
X
✓
Caddy
polyvalent
Externe
X
X
✓
X
X
X
X
X
Source : Chambre régionale des comptes avec les données transmises par le service ressources humaines (« X »
équivaut à l’absence de pièce)
Recommandation n°11 :
(
Régularité
) Appliquer les règles et procédures de recrutement
conformément à la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale, devenue
l’
article L. 311-2 du code général de la
fonction publique, se conformer aux mesures de publicité
obligatoires en cas de vacance d’emploi et respecter les
principes généraux d’égalité de traitement et de transparence
envers les candidats
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
48
L’organisation mise en place et l’absence de procédure de contrôle interne f
avorise
l’octroi de versement d’accessoires de rémunération et d’éléments variables de paye irréguliers.
C’est notamment le cas pour les indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS), les
indemnités forfaitaires complémentaires pour les élections
(IFCE) ou l’attribution des nouvelles
bonifications indiciaires (NBI) (cf. annexe n°
3). S’agissant des heures supplémentaires, en
l’absence de suivi automatisé du temps de travail, leur paiement est irrégulier.
Enfin, l’application du principe de rémunération après service fait n’est pas respecté.
Seulement la moitié des directions communales produisent les absences des agents. A défaut
de ces informations, les retenues pour absence de service fait ne sont pas effectuées. Cette règle
n’est pas non plus appliquée lors des mouvements de grèves. En 2021, ce sont ainsi 0,5 M€ de
rémunération qui ont été indument payés.
Incidence financière des mesures prises par la commune
En milliers d'€
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Variation
2018/2023
Cumul
2020/2023
Avancements de grade
-
-
-
-
887
44
44
931
Restes à payer
Avancements de grade
2015-2020
-
-
-
-
-
24
24
24
Avancements d'échelon*
-
-
-
-
-
-
-
-
Reconstitution de
carrière
-
-
-
-
55
45
45
100
Mise en stage
-
-
274
346
174
204
204
997
Régime indemnitaire
504
472
1 270
1 700
1 803
1 955
1 451
4 712
IHTS
115
12
72
105
262
-
115
440
IFCE élections
-
-
5
9
10
-
-
23
CNAS
-
-
-
-
-
72
72
72
Chèque-déjeuner
365
284
205
220
330
496
131
166
Total
984
768
1 826
2 380
3 521
2 840
1 856
7 465
*Les avancements d'échelon sont réalisés à cadencement unique
Source : Chambre régionale des comptes avec les éléments transmis par la commune
Recommandation n°12 :
(
Régularité
) Mettre en place un suivi automatisé des heures
supplémentaires en application des dispositions de
l’article
n° 2 du décret n° 2002-
60 du 14 janvier 2002 et, dans l’attente,
ne plus procéder au paiement des heures supplémentaires.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
49
Des charges de gestion courante obérées par la prise en charge du prix de
revient très élevé des prestations de cantines de la caisse des écoles de la caisse
des écoles
Les charges de gestion courante (chapitre 65) demeurent relativement stables sur la
période hormis la subvention de fonctionnement de la caisse des écoles qui croît fortement
(+ 0,994
M€
) pour faire notamment face à des rappels de factures et au prix de revient des
prestations de cantine (27 euros le repas), qui n’est pas couvert par la tarification aux usagers.
Une section d’investissement qui finance irrégulièrement les charges de
fonctionnement
Sur la périod
e de contrôle, la section d’investissement a dégagé 22
M€ de recettes
propres, pour moitié issues des produits de cession d’actifs. La commune a réalisé 6,4
M€ de
dépenses d’équipement, a bénéficié d’1,6
M€ de préfinancement et a mobilisé 1,96
M€ de
financ
ements externes. En conséquence, cette section a dégagé 5,9 M€ d’excédent de
financement, lesquels ont servi à la réduction des encours de dettes d’exploitation et
d’immobilisations. Cet excédent a surtout financé le fonctionnement courant. Ce sont donc de
s
ressources de long terme (y compris les emprunts) qui ont financé les dépenses courantes,
contrairement au principe d’équilibre budgétaire.
La trésorerie retraitée des restes à payer sur le budget principal est de 1,45
M€ et
de -2,13
M€ une fois retraité
e des RAR de fonctionnement et des factures non engagées non
prises en compte en RAR. Cette situation comprend une ligne de trésorerie mobilisée à hauteur
de 0,68
M€ non remboursée en fin d’exercice, ce qui est irrégulier.
Le financement de
l’investissement (2018
-2022)
en €
2018
2019
2020
2021
2022
Cumul sur
les années
TLE et taxe d'aménagement
342 021
666 667
373 526
449 851
769 956
2 602 022
+ Fonds de compensation de la
TVA (FCTVA)
281 633
126 037
329 626
102 131
0
839 427
+ Subventions d'investissement
reçues hors attributions de
compensation
367 190
1 351 168
2 322 300
371 336
77 106
4 489 100
+ Attributions de compensation
reçues en investissement
0
0
0
0
0
0
+ Fonds affectés à l'équipement
(amendes de police en
particulier)
749 113
284 971
130 785
20 178
266 688
1 451 736
+ Produits de cession
0
7 008 200
0
0
4 022 610
11 030 810
+ Autres recettes
0
0
780 038
443 421
375 168
1 598 627
= Recettes d'inv. hors emprunt
1 739 958
9 437 043
3 936 276
1 386 917
5 511 528
22 011 721
- Annuité en capital de la dette
2 103 526
1 868 588
3 112 393
2 038 171
2 215 382
11 338 059
= Financement propre
disponible (hors financement
épargne négative)
-363 568
7 568 455
823 883
-651 254
3 296 147
10 673 662
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
50
- Dépenses d'équipement (y
compris travaux en régie)
1 579 688
1 027 701
1 639 333
1 508 335
651 772
6 406 830
- Participations et inv.
financiers nets
(préfinancements)
-517 708
-268 349
-275 065
-283 887
-254 804
-1 599 814
= Besoin (-) ou capacité (+) de
financement propre
-1 425 548
6 809 103
-540 386
-1 875 702
2 899 179
5 866 646
Nouveaux emprunts de l'année
850 000
0
1 113 151
0
0
1 963 151
Mobilisation (-) ou
reconstitution (+) du fonds de
roulement net global
-575 548
6 809 103
572 765
-1 875 702
2 899 179
7 829 797
Source : Comptes de gestion de la commune
L’encours de dette a diminué de 8,1
M€ pour atteindre 13,7
M€ du fait du faible recours
à l’endettement (0,85 en 2018 et 1,1
M€ en 2020). Le taux moyen des intérêts est de 2,8
%.
La commune souffre d’un déficit de compétence et de maîtrise technique de se
s
opérations d’investissement. Le taux d’exécution 2022 des dépenses d’investissement sur
immobilisation (hors opérations) est de 34,6 % (0,36
M€ sur 1,04
M€ de crédits budgétés).
Celui sur les opérations est à peine de 6,6 % (0,49
M€ sur 7,39
M€ budgétés)
.
La composition des restes à réaliser est révélatrice des difficultés rencontrées par la
commune et de son incapacité à finaliser des opérations lancées depuis plusieurs années. Les
défaillances dans le suivi opérationnel et administratif des dossiers, le r
etard ou l’absence de
mandatement et les défauts de paiement l’exposent au retard d’exécution des travaux et à des
litiges juridiques. Certaines opérations sont anciennes et ne sont pas soldées pour ces motifs.
Pour autant, la commune ne respecte pas ses engagements transactionnels. À titre
d’exemple,
elle
n’a pas honoré la convention passée avec la SEM d’aménagement. Les créances
de 2013 ne sont pas entièrement payées malgré trois protocoles d’accord entre 2014 et 2021.
Elle a également 0,1 M€ d’engagemen
ts sur les exercices 2013 à 2017 pour des réparations sur
les bâtiments communaux, qui sont en attente de paiement.
Ces dysfonctionnements conduisent également la collectivité à verser des intérêts
moratoires dont les montants peuvent correspondent à plus de 70 % du montant initial de
l’opération.
Selon l’état provisoire des restes à réaliser communiqué, la commune bénéficie d’un
montant global de subventions notifiées de 10,2
M€ pour les exercices de 2015 à 2022. En
l’absence de réalisations de travaux, d
e passation de marchés et de caducité des conventions de
subventions, celles non recouvrées
au 31 décembre 2022 s’élèvent à 1,97
M€, soit 19
% du
montant global.
Par ses défaillances, le manque de suivi des subventions et le non traitement des
dossiers, et malgré le travail de demande de prorogation de délais, la commune encourt le risque
de perdre le financement de certaines opérations (ex : réfection de la décharge [0,2
M€],
éclairage public [2,1
M€], acquisition matériel sargasses [0,18
M€]). Pour certai
nes opérations,
elle a perdu des subventions faute de traitement du dossier (ex : école numérique [0,08
M€
],
étude fréquentation OGS [0,02
M€], adaptation des écoles au protocole sanitaire [0,04
M€],
plan eau [0,05
M€]).
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
51
Elle encourt également un risque de demande par ses financeurs de remboursement des
subventions versées sur des opérations non engagées, comme pour l’avance perçue pour la
réhabilitation de l’hôtel de police (0,07
M€) ou le préfinancement des études dans le cadre de
l’OGS (0,03 M€).
La comm
une bénéficie d’avances en préfinancement. Trois opérations datant des
exercices 2018 et 2020 sont encore concernées par des avances non soldées. Une d’entre elles
n’a pas été soldée, les travaux n’étant toujours pas terminés (toiture du gymnase). Aussi, l
a
collectivité doit suivre ses écritures budgétaires. A défaut, elle perd le bénéfice du FCTVA à
raison de la prescription comme c’est le cas pour l’avance sur la réparation du gymnase.
Des services publics industriels et commerciaux déficitaires
Les services publics industriels et commerciaux sont organisés en régie à autonomie
financière. Les dépenses, recettes et éléments de bilan sont retracés dans des comptes annexes
autonomes. Les principes d’équilibre financier doivent être respectés, aucune subvent
ion
d’équilibre (directe ou indirecte) ne pouvant être attribuée par le budget principal. Les conseils
d’exploitation doivent régulièrement être réunis, le débat d’orientation budgétaire et les budgets
devant être présentés par les directeurs de ces services
;
l’avis du conseil d’exploitation, bien
que consultatif, est obligatoire.
Les régies du golf et de la Marina ne respectent pas les obligations en matière d’équilibre
financier.
La gestion défaillante de la régie du golf aggrave son déficit
d’année en a
nnée
Lors de son précédent examen de la gestion, la chambre engageait la commune, aux
termes de sa recommandation n°4, à
« Réduire les charges de personnels du golf avec l'objectif
de ne pas dépasser 50 % du chiffre d'affaire. Rechercher de nouvelles recettes auprès de
partenaires, sponsors et par le développement de programmes avec les tours opérateurs.
Améliorer les prestations du bar restaurant pour les rapprocher des standards internationaux.
Améliorer le site internet ».
Cette recommandation n’a pas é
té suivie par la commune de Saint-François.
En 2013, les charges de personnel s’élevaient à 819
463 euros pour un effectif de
22
employés (représentant 78,5 % du chiffre d’affaire). En 2022, le golf compte désormais
18 employés dont les charges de personne
l s’élèvent à 940 328
78
euros (représentant 96,1 % du
chiffre d’affaire). Ainsi, si le nombre de postes a diminué, les charges supportées progressent
de 8,5 % en moyenne annuelle. La collectivité a accordé aux agents des revalorisations et
indemnités dont
le surcoût pérenne est estimé à 0,22 M€.
78
Source Helios
–
compte de gestion 2022
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
52
Évolution comparative entre le chiffre d’affaires et les charges de personnel
(2018- 2022 ; en euro et %)
2018
2019
2020
2021
2022*
Var. annuelle
moyenne
Chiffre d'affaires
1 204 211
1 145 582
959 625
1 013 482
977 766
-5,1 %
Charges de personnel
679 000
660 227
718 000
1 307 824
940 328
8,5 %
ETPR
17,58
17,02
17
17,48
17,89
Source : chambre régionale des comptes et données ETPR transmises par la collectivité
Nota : données 2022 provisoires du compte de gestion
Le directeur du golf considère qu’il existe des pistes d’économies, le sureffectif de ce
service étant de trois à quatre agents. Une sous-activité est effectivement observée au niveau
des mécaniciens e
t des agents d’entretien et d’accueil. Dans l’attente des décisions de
suppression de postes, aucune mutualisation de moyen n’a été envisagée (ex
: entretien de
l’aérodrome, élagage...).
La chambre prend acte de la réponse de
l’ordonnateur
selon laquelle
il n’a pas été encore
délibéré sur les propositions émises par le directeur.
Toutefois, le directeur, en contradiction avec ses propos, a obtenu de la commune le
recrutement temporaire d’un personnel en qualité de caddy polyvalent. L’agent recruté,
jusqu’a
lors moniteur à son compte sur le golf sans rétribution de la régie pour cette activité,
intervient dorénavant en tant qu’enseignant
, ce qui constitue de nouvelles missions. Il a été
présélectionné
79
sans mise en place d’une procédure de recrutement en viol
ation des
dispositions du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction
publique territoriale, les dispositions de l’article L. 332
-23 du code général de la fonction
publique, invoquées par
l’ordonnateur
dans sa réponse
, ne l’exonérant pas de l’examen d’autres
candidatures.
S’agissant des autres charges, comme pour les autres budgets, la procédure
d’engagement comptable est défaillante. La régie ne ma
itrise aucunement ce processus et se
repose sur les services supports, comme pour les ressources humaines et la commande publique.
Ainsi, elle ne transmet pas les informations indispensables à l’édition de comptes fiables. Il en
résulte une comptabilisation partielle des charges à caractère général, plus particulièrement au
niveau de la consommation de fluides et des locations de crédits-bail. Par ailleurs, les dotations
aux amortissements sont sous-
évaluées, les transferts d’actifs n’ayant pas été réalisés. Ce sont
en effet 6,8
M€ d’immobilisations concernant le golf qui sont
toujours à l’actif du budget
principal de la commune, qui auraient dû être amorties à hauteur de 4,42
M€. La dotation
complémentaire annuelle est estimée, selon les informations communiquées, à 0,45
M€, le
déficit d’exploitation étant augmenté d’autant
80
. Le directeur de la régie, malgré les
préconisations réitérées du comptable public, n’a pas mis en place de comptabilité de stock.
79
Dans sa note sur la réorganisation du golf en date du 7 mai 2022, le nom de la personne est déjà
mentionné avec celui d’un autre agent.
80
Manque le calcul sur les subventions amortissables.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
53
En outre, certaines décisions prises s’avèrent contraires aux intérêts du budget. C’est
notamment le cas du choix de leasing des voiturettes du golf.
Un premier leasing avec option d’achat
81
a été contracté en 2018, pour l’acquisition de
5 voiturettes (34 831 euros HT) et une tondeuse (72 287 euros HT) pour un montant total de
126 397,35 euros dont 19 279 euros de frais. Ces derniers ont été majorés de 58 %
(11 177 euros) pour des intérêts, en raison du retard de paiement de la régie.
Une deuxième convention, établie en 2020 pour une durée de cinq ans, prévoit la mise
à disposition de cinq voiturettes pour un montant annuel de 22 500 euros pour un total de
112
500 euros, soit plus de 3 fois le prix d’achat, sans que le devenir des voitu
rettes ne soit
précisé. Cette acquisition réalisée sans mise en concurrence s’avère particulièrement coûteuse.
En outre, la convention prévoit la reprise des voiturettes en cas de retard de paiement et
en cas de défaut d’entretien, la régie étant tenue de
poursuivre le paiement jusqu’au terme du
contrat. La convention a été dénoncée par le prestataire, étant constaté que, malgré le risque
encouru, la régie n’a pas suivi le mandatement des sommes dues et ne s’est pas assurée de
l’entretien des voiturettes p
as ses deux mécaniciens. Ainsi, le golf pourrait être amené à
poursuivre le paiement pour une prestation dont il ne bénéficie pas.
Photo n° 5 :
Voiturettes en stationnement dans les locaux techniques du golf
Source : chambre régionale des comptes
Au niveau des recettes, les mesures prises ont été très insuffisantes. Les augmentations
tarifaires pour les usagers n’ont été réalisées qu’à la marge. Pourtant,
des possibilités existent
par comparaison aux autres golfs internationaux de la région ou hexagonaux, en précisant
toutefois que ces derniers ne tiennent pas compte du coût de la vie guadeloupéenne et de la
situation monopolistique du golf de Saint-François. Il ressort en outre que le ticket moyen
abonné est en baisse, de même que celui du
green fee
82
.
81
La levée d’option est de 1
162,23 euros.
82
Cf tableau n° 16 en annexe n° 4
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
54
S’agissant des autres mesures préconisées par la chambr
e, le non suivi des redevances
d’occupation du domaine publique ou l’utilisation et la mise en œuvre de procédures
irrégulières lors du dernier appel à manifestation d’intérêt, sont constatés.
Une procédure de sélection irrégulière
La commune a lancé en décembre 2020, un appel à projet relatif à l’exploitation d’une
structure de restauration-
bar et d’animation du club house du golf de Saint
-François.
Si la collectivité objecte à raison que les dispositions du code des marchés publics ne
sont pas applicables aux autorisations d’occupation du domaine public, la loi lui faisait
toutefois obligation d’
« organise
[r]
librement une procédure de sélection préalable
présentant toutes les garanties d'impartialité et de transparence, et comportant des
mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester »
83
.
Suite à la diffusion par la collectivité d’un avis d’appel public à concurrence en vue de
l’occupation temporaire du domaine public concernant l’ «
exploitation du club house
du golf international de la ville de Saint-François »,
neuf entreprises ont fait acte de
candidature.
En premier lieu, l’avis précisait que les critères d’attribution reposaient sur l’offre
économique la plus avantageuse pondérée par la valeur technique (60%), le prix (30%)
et le délai de réalisation (10%). La collectivité ne pouvait
dès lors, après l’examen des
dossiers, la réception des candidats et leur classement par le jury en fonction des
critères publiés, ajouter une nouvelle condition fondée sur leur garantie financière et,
sur cette base, écarter le candidat initialement retenu par le jury après examen des
critères prédéfinis au profit d’un autre.
En second lieu, le règlement de consultation valant cahier des charges prévoit que
l’activité de gestion de la structure de restauration
-
bar et d’animation du club house du
golf de Saint-
François est concédée par le propriétaire (la ville) sous la forme d’une
autorisation temporaire du domaine public (AOT).
À ce titre, le maire et l’entreprise M. ont signé une convention le 3 août 2022.
Or, les espaces dédiés à la restauration et à l
’animation mentionnés dans celle
-ci sont
supérieurs à ceux inscrits dans le cahier des charges. Elle offre dans son article 3
« DESIGNATION ET DESTINATION DES LIEUX OCCUPES »,
la possibilité pour
l’occupant «
de solliciter ponctuellement l’utilisation d’au
tres espaces du golf
».
Les dispositions de l’AOT modifient donc substantiellement le règlement de
consultation sur lequel les candidats se sont basés pour effectuer leur offre.
En conséquence, la commune n’a pas satisfait aux exigences légales d’impartialité et
de transparence au cours de la procédure de sélection préalable à l’autorisation
d’occupation du domaine public pour l’exploitation du club house de son golf
, ce dont
il résulte une rupture d’égalité de traitement entre candidats susceptible d’entacher la
régularité de l’autorisation d’occupation temporaire du domaine publique.
83
Article L.2122-1-1 du CG3P
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
55
En conclusion, la situation financière de la régie du golf se dégrade en raison d’erreur
de gestion et de l’insuffisance des mesures prises pour augmenter ses rece
ttes.
La chambre observe que le projet du maire de créer un établissement public industriel
et commercial irait à l’encontre de la transparence financière et aurait une incidence
significative pour le budget principal en raison de la reprise du déficit de clôture (-
2,8 M€ selon
les comptes provisoires) et du financement du fonds de roulement. En l’absence de modification
organisationnelle et de changement de modèle économique, ce futur satellite de la commune
encourrait le risque de se retrouver en plan de redressement.
La chambre prend acte de la réponse de
l’ordonnateur
selon laquelle il estime nécessaire
le changement de mode de gestion de ce SPIC et qu’
il explore plusieurs options pour y parvenir.
La dégradation de la situation financière de la Marina
Le précédent rapport d’examen de la gestion de la chambre invit
ait la commune, aux
termes de la recommandation n°5, à
« Accroître les recettes du port de plaisance par le
développement de la capacité d'accueil, l'augmentation des places de passage, l'augmentation
des tarifs, l'amodiation de places du port et la mise en place de nouvelles taxations »
.
La collectivité n’a pas suivi cette recommandation, ce qui la prive d’une augmentation
de recettes. Le chiffre d’affaires du port de plaisance enregistre une
diminution en 2022. Pour
mémoire, les recettes d’exploitation s’élevaient en 2013 à 313
705 euros.
L’ordonnateur attribue
cette baisse à la crise sanitaire de la Covid 19, sans toutefois le
démontrer.
Évolution du chiffre d’affaires du port de plaisance (
2018-2022)
En €
2018
2019
2020
2021
2022
Var.
annuelle
moyenne
Chiffre d'affaires
330 878
399 827
344 051
364 066
306 249
-1,9 %
Source : comptes de gestion
Nota : compte administratif provisoire pour 2022 (y compris restes à réaliser)
Dans son avis budgétaire de 2022, la chambre engageait la commune à
« procéder à la
révision tarifaire des places portuaires et des redevances d’occupation du domaine public, en
tenant compte notamment de l’avantage conféré par leur utilisation, et à antic
iper la fin du
contrat d’amodiations
».
Selon les comptes de gestion, les charges restent très élevées par rapport aux recettes
réalisées. La fiabilité de ces données présente en outre des irrégularités entachant la sincérité
des résultats présentés.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
56
Évolution des charges courantes du port de plaisance (2018-2022)
en €
2018
2019
2020
2021
2022
Charges à caractère général
87 612
134 848
237 661
92 996
168 708
+ Charges de personnel
0
265 000
142 000
147 435
168 841
+ Subventions (M43)
0
0
0
0
0
+ Autres charges de gestion
0
3 708
0
0
0
+ Charges d'intérêt et pertes
nettes de change
14 820
11 931
8 923
5 791
1 466
Charges courantes
102 431
415 487
388 584
246 221
310 617
Source : comptes de gestion et compte administratif 2022 provisoire
Les dépenses de personnel et les
annuités d’emprunts ne sont pas systématiquement
comptabilisées. Les charges de structure ne l’ont jamais été et les dotations aux amortissements
ne sont que partiellement enregistrées. L’amortissement complémentaire est éval
ué à un peu
moins de 0,1 M€. Ce sont 1,5 M€ qui auraient dû être affecté au bilan du port de plaisance en
valeur brute. Le retard d’amortissement s’élève quant à lui à 1,08 M€.
Valeur brute, valeur nette retraitée et montant des amortissements manquant à
l’actif de la régie port de plaisance
Référence des comptes
des immobilisations
devant être amorties
Valeur brute
comptabilisée au
31/12/2022
Amortissements
antérieurs à 2022 qui
auraient dû être
comptabilisées
Amortissement de
l'exercice 2022 à
comptabiliser
Valeur nette
retraitée
Comptes 2318 et 2315
1 494 741
1 083 621
99 649
311 471
Source : chambre régionale des comptes
Ainsi, le résultat affiché est très éloigné de sa réalité comptable et le port de plaisance
souffre d’un déficit d’investissement.
D’après les délibérations communiquées, les tarifs appliqués pour la location
d’emplacement au port de plaisance n’ont pas
augmenté depuis 2018. Un tarif pour le mouillage
est ajouté à partir de 2020, mais l’opération permettant l’augmentation du nombre de places est
toujours dans sa phase de conception, la CARL étant désormais le maître d’ouvrage.
Le nombre d’emplacements n’a
pas évolué (211 places). Ceux dédiés à l’accueil de
passage n’a pas été communiqué à la chambre. Or, ce type d’accueil est plus rentable pour le
port qu’une location à l’année. Toutefois, en 2022, la commune n’a pas eu de régisseur pour
encaisser les rece
ttes, l’appel interne à candidature n’ayant pas trouvé preneur.
Aux termes de sa réponse,
l’ordonnateur fait valoir que le conseil d’exploitation a validé
une augmentation des tarifs. Elle ajoute qu’une zone de mouillage permettant d’accroitre la
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
57
capacité
d’accueil de la marina est à l’étude avec la communauté d’agglomération et que des
démarches ont été entreprises avec les services de l’Etat concernant les mauvais payeurs et
l’expiration des contrats d’amodiation et concession du port. La chambre en prend
acte.
A la fin du premier trimestre 2023, aucune AOT n’a été délivrée sur la Marina. Ainsi,
l’ensemble des restaurateurs et commerçants bénéficient de la gratuité et d’une utilisation sans
titre du domaine public.
L’ordonnateur
a indiqué qu’une offre d'un
cabinet d'audit pour aider à
la mise en œuvre des AOT était en cours d’analyse.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
La situation financière de la commune s’est très nettement dégradée entre 2018 et 2022,
sous l’effet d’une progression de plus du double des dépens
es de fonctionnement par rapport à
celle des recettes, dont l’augmentation est liée à la hausse des produits fiscaux et à la stabilité
des dotations, alors que la population baisse. La collectivité n’a pas d’épargne brute et son
fonctionnement courant est
pour partie financé par l’excédent de la section d’investissement,
imputable aux recettes exceptionnelles des ventes immobilières. Dès lors, la commune réalise
peu de dépenses d’équipement (1,28 M€ par an, soit 37 % de la moyenne nationale de la même
strate des communes que Saint-
François). Ce taux très faible s’explique également par le déficit
de compétences techniques et opérationnelles des services municipaux et le suivi insuffisant des
chantiers (ex : réhabilitation de la décharge, éclairage public).
Ces résultats découlent des choix de gestion et des négligences de la commune.
A ce titre, les décisions prises en matière de ressources humaines, à contrepieds des
préconisations de la chambre, ont eu pour conséquence d’augmenter les charges de personnel
d
e plus de 3,2 M€ entre 2018 et 2022. La commune ne fait pas les démarches nécessaires au
versement du FCTVA, ne cherche pas à augmenter ses bases fiscales foncières en recensant
toutes les constructions et ne recouvre pas les loyers et redevances qui lui sont dues. En ne
réalisant pas les travaux, elle prend le risque d’être obligée de rembourser les avances sur
subventions qu’elle a encaissées.
Les services publics industriels et commerciaux du golf et du port de plaisance
présentent également des situatio
ns financières très dégradées. Aucune mesure n’est prise pour
améliorer cette situation. Les recommandations faites lors du précédent rapport de la chambre
n’ont pas été mises en œuvre au détriment des équilibres budgétaires. Les comptes présentés
ne sont pas sincères. Les dispositions réglementaires de gestion en régie à autonomie financière
ne sont pas respectées. L’organisation des services et la direction sont déficientes.
Le projet de création d’une régie à autonomie personnalisée du golf aura pour
co
nséquence la suppression de ce budget annexe. Le conseil municipal n’aura plus à se
prononcer sur son équilibre financier. Toutefois, cela ne rendra pas pour autant rentable cette
structure. En l’absence de changement organisationnel et de sérieux efforts
de gestion, les
défaillances observées et le déséquilibre financier seront reproduits.
___________________________________________________________________________
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
58
4
UNE
CARENCE
IMPORTANTE
DANS
LA
TENUE
DES
COMPTES
QUI
CACHE
LES
RISQUES
PRIS
PAR
LA
COLLECTIVITE
La commune de Saint-François est tenue de se conformer aux dispositions budgétaires
et comptables correspondant à sa strate démographique, en l’occurrence celle des communes
de plus de 3500 habitants, édictées aux articles L. 2311-1, L. 2311-2 et suivants du CGCT et
L. 2312-1, L. 2313-1 et suivants du code précité. Parmi ces règles figurent notamment celle de
l’obligation d’amortissement des immobilisations, le rattachement des charges et produits à
l’exercice, les dotations aux provisions pour risques, la production d’annexes et d’informations
complémentaires dans les budgets et comptes administratifs.
Lors du précédent contrôle la chambre avait relevé plusieurs observations en matière de
fiabilité des comptes qui avaient donner lieu à la recommandation n°1 suivante : «
Améliorer
la fiabilité des comptes par la mise en conformité des annexes des documents budgétaires, la
présentation des documents nécessaires à l’information des élus et des administrés, le
rattachement des charges à l’exercice
, la mise en place de provisions pour dépréciation des
créances, ainsi que la régularisation des mises en services d’immobilisations.
».
Il ressort de ce contrôle de la chambre que la mise en œuvre de la recommandation est
incomplète, plus particulièrement sur les écritures affectant la sincérité des comptes. Si des
efforts ont été réalisés par le service des finances, les choix de gestion ont pu limiter leurs
résultats.
Une qualité de l’information financière, budgétaire et patrimoniale qui
nécessite d’êtr
e encore améliorée
S’agissant de la mise en conformité des documents budgétaires, et notamment des
annexes et du rapport d’orientation budgétaire (ROB)
84
, les informations ne sont pas toutes
mentionnées, même si la complétude des documents s’est améliorée.
S’agissant des annexes, parmi les anomalies identifiées, méritent d’être plus
particulièrement relevés les écarts suivants
: l’absence d’informations sur les participations, des
défaillances dans la ventilation par fonctions des recettes et dépenses, des différences entre
l’état de la dette et le compte de gestion (les soldes de comptes 16 449 et 16
441), que la
commune n’a pas été en mesure d’expliciter. Les tableaux des flux réciproques entre budgets
ne sont pas renseignés, au détriment de la vision agrégée de la situation financière de la
commune. Il en est de même de l’état des provisions. L’annexe relative à leur étalement ne
correspond pas aux soldes du compte de gestion du comptable. En raison de l’insincérité des
restes à réaliser, l’annexe sur l’éq
uilibre à couvrir par des ressources propres est faussée. La
liste des organismes de regroupement auxquels adhère la commune n’est pas complétée.
84
A partir des documents des BP et DOB 2022 et des CA 2021.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
59
Au niveau du ROB, si une amélioration du contenu
85
a pu être constatée, le manque de
prospective financière est
relevé. La commune n’a toujours pas été en mesure d’élaborer un
plan pluriannuel d’investissement. En fonctionnement, l’absence de chiffrage des incidences
des négociations salariales (cf. §3.2.2) et de connaissance de la situation réelle des engagements
(cf. § 4.3.1) rend irréalisable la projection des équilibres budgétaires à venir.
Les manquements à l’information financière affectent également les SPIC. Certaines
annexes ne sont pas renseignées comme les contrats de crédits baux ou les états des
engagements donnés ou reçus. Les informations sur les données pluriannuelles sont également
manquantes dans le DOB. Celles communiquées au conseil d’exploitation sont parcellaires.
La commune ne respecte pas les règles de mise en ligne des informations publiques
prévues à l’article L.
2313-
1 du CGCT, n’ayant pas de site internet mais seulement un compte
« Facebook ». Il en résulte que seuls les citoyens pouvant se déplacer en mairie ont la possibilité
de prendre connaissance des délibérations par la voie d’afficha
ge, sans avoir accès aux rapports
qui les accompagnent.
La fiabilité et la communication financière doivent être améliorées afin de garantir la
diffusion d’une information complète et réglementaire au conseil municipal et aux administrés.
Un suivi patrimonial incomplet
L’absence d’inventaire physique, la méconnaissance de la domanialité publique
et privée, la non correspondance entre l’inventaire comptable et l’actif du
comptable et leurs insuffisances
L’instruction budgétaire et comptable M14 impose de procéder à l’inventaire physique
des biens immobilisés, de manière à disposer d’un état reflétant fidèlement la situation
patrimoniale.
La commune ne dispose pas d’un tel inventaire physique
86
, tant pour son budget
principal que pour ses budgets annexes. Il en résulte que son inventaire comptable, qui se limite
aux immobilisations amortissables, est incomplet et ne correspond aucunement à l’état de son
patrimoine. La mise en correspondance entre l’inventaire de l’ordonnateur et l’actif du
comptable est impossible.
S’agissant du domaine immobilier, cette insuffisance est particulièrement dommageable
dès lors qu’elle se couple avec une méconnaissance de la destination du bien, de son utilisation,
voire de son bénéficiaire.
85
La présentation d’un ROB est obligatoire en application de l’article L.
2312-1 du CGCT. Ordonnance
n° 2005-1027 du 26 août 2005, loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014, art. 93-1, décret n° 2016-841 du 24 juin 2016
et la loi de programmation des finances publiques 2018-2021 est venu en préciser son contenu.
86
La commune n’a pas été en mesure de produire les inventaires physiques demandés.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
60
Les biens mis au rebut ne sont que partiellement comptabilisés et les éléments de sortie
de l’inventaire ne sont pas communiqués au comptable. En conséquence, son état de l’actif
comprend des biens qui n’ont plus d’existence physique.
Ce document présente plusieurs lacunes. En premier lieu, il ne ventile pas les flux
d’amortissements, ce qui rend impossible la connaissance de la valeur nette des biens et la
correcte comptabilisation des amortissements. En second lieu, il comprend des lignes
«
migration vers hélios
» qui ne permettent pas d’ident
ifier le détail des immobilisations
correspondantes. Au surplus, l’actif comprend des immobilisations qui ne devraient plus être
comptabilisées au budget principal, mais dans les budgets annexes, ce qui n’est pas sans
incidence sur la fiabilité du haut de bilan de chacun des budgets.
Recommandation n°13 :
(
Régularité
) Engager un travail d’inventaire physique de
ses
biens, en vue d’ajuster son inventaire comptable, et par la
suite, en collaboration avec le comptable public, et mettre à
jour l’état de l’actif tenu par celui
-ci
La chambre prend acte de la réponse de l
’ordonnateur
selon laquelle les services ont
débuté avec la DRFIP un travail
de fiabilisation et valorisation de l’actif de la collectivité
, ce
qui n’est cependant pas objectivé.
Le non-respect des règles
d’amortissement
En application des dispositions de l’article L. 2321
-2 27° du CGCT, la commune de
Saint-
François doit procéder à l’amortissement de certaines de ses immobilisations, ces
dépenses étant considérées comme des dépenses obligatoires. Or, cette
obligation n’est pas
respectée. En effet, si elle constate les amortissements qui s’imposent pour les biens
comptabilisés en comptes définitifs (comptes 21), elle ne le fait pas pour de nombreuses autres
immobilisations. Ainsi, elle conserve des montants i
mportants en comptes d’immobilisations
en cours (comptes 23), alors que l’instruction budgétaire et comptable prévoit que, lors de la
mise en service, un transfert en comptes définitifs (compte 21) doit avoir lieu.
Les soldes d’immobilisations en cours (c
hapitre 23) ont évolué de 3,05 % sur la période
de contrôle, passant de 61,96 M€ en fin d’exercice 2018 à 63,85 M€ en 2022
87.
Les soldes des
comptes 21 n’ont quasiment pas évoluée sur la même période, faute d’investissement, la
diminution comptabilisée en 2022 étant liée à une cession.
Évolution du volume des immobilisations du budget principal en comptes
définitifs et en comptes d’en cours
en M€
2018
2019
2020
2021
2022
Variation 2018/2022
Chapitre 21
117,13
112,39
112,76
112,97
111,08
-5,16 %
Chapitre 23
61,96
61,01
62,27
63,51
63,85
3,05 %
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes de gestion -
Nota : les données pour 2022 sont provisoires
87
Selon le compte de gestion prévisionnel du 21-03-23.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
61
S’il s’agit de biens amortissables, l’absence de transfert des immobilisations aux
comptes définitifs a pour conséquence de ne pas déclencher le calcul des dotations aux
amortissements. Dans la situation décrite, les résultats de la section de fonctionnement sont
donc artificiellement majorés.
La commune n’ayant pas été en mesure de produire l’état des immobilisations en
comptes 23 devant être amorties, la chambre a procédé à une première évaluation du retard
d’amortissement et de l’amortissement qui aurait dû être comptabilisé en 2022. Ce travail, qui
doit être confortée par une analyse
fine de la commune, a été réalisé à partir des fichiers d’actifs
du comptable et du croisement du fichier d’inventaire de la commune. Le résultat serait un
retard d’amortissement de 23 M€ (incidence sur le déficit cumulé au niveau budgétaire, et dans
le ca
dre d’une reprise, sur la valeur des fonds propres) et de 2,67 M€ sur la valeur de
l’amortissement complémentaire à enregistrer en 2022.
Évaluation des amortissements qui auraient dû être comptabilisés, de
l’amortissement annuel et de la valeur nette retra
itée consécutive.
Référence des comptes
des immobilisations
devant être amorties
Valeur brute
comptabilisée
au 31/12/2022
Amortissements
antérieurs à 2022 qui
auraient dû être
comptabilisées
Amortissements de
l'exercice 2022 à
comptabiliser
Valeur
nette
retraitée
Compte 2312
995 014
766 061
45 883
183 070
Compte 2313
16 946 040
11 057 498
1 059 499
4 829 042
Compte 2315
19 560 489
8 128 750
1 278 405
10 153 333
Compte 2318
4 266 376
3 071 753
282 541
912 083
Sous-total
41 767 918
23 024 062
2 666 329
16 077 528
Biens de faible valeur
20 418,50
20 418,5
0,0
0,0
Total
41 788 337
23 044 480
2 666 329
16 077 528
Source
: Chambre régionale des comptes à partir de l’actif du comptable
De même, la commune ne procède pas à l’amortissement (sur 5 ans) des
études non
suivies de réalisation. Ce sont ainsi 0,01 M€ qui auraient dû être comptabilisés en 2022 à ce
titre et le retard d’amortissement est estimé à 0,25 M€.
Recommandation n°14 :
(
Régularité
)
Procéder
aux
écritures
de
transfert
des
immobilisations en cours en comptes définitifs et déclencher
les plans d’amortissement des immobilisations
, en application
des articles L. 2321-2 27° et R. 2321-1 du CGCT, et dans le
respect des règles adoptées par le conseil municipal
La chambre prend acte de la réponse de l
’ordonnateur
selon laquelle ses services ont
débuté avec la DRFIP un travail de recensement de ses biens, ce qui n’est cependant pas
objectivé.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
62
Les principes de sincérité comptable
, de prudence et d’indépendance
des exercices et d’annualité budgétaire
Une comptabilité
d’engagement déficiente en raison de dysfonctionnements
organisationnels
Les opérations de dépenses sont successivement l’engagement, la liquidation, le
mandatement et le paiement.
L’obligation pour le maire de tenir une comptabilité d’engagement est prévue à l’article
L. 2342-
2 du CGCT. Sa tenue permet en fin d’exercice de déterminer le montant des
charges
et produits à rattacher et de respecter ainsi le principe d’indépendance des exercices.
Si la commune ne suit pas ses engagements, elle ne peut pas vérifier le service fait en
fin d’exercice, et s’assurer que la facture lui est parvenue.
Cette obligation n’est pas respectée par la commune pour plusieurs raisons. D’abord
,
l’ensemble des bons de commande ne font pas l’objet d’un engagement comptable. Ens
uite, le
suivi n’est pas réalisé. Ainsi, en fonctionnement, il n’y a pas de suivi infra
-annuel des
engagements contractuels et des paiements et sommes dues associés. Enfin, le traitement des
engagements en fin d’exercice présente des défaillances comme l’illustre l’absence de fiabilité
des comptes du golf et ses conséquences en matière des rattachements de charge ou les
problèmes encore prégnants de suivi des restes à réaliser (cf. § 4.3.2).
Outre la défaillance en matière de comptabilité d’engagement, de
multiples entorses au
processus de liquidation de la dépense peuvent être observées. Le service fait n’est pas
systématique, au risque de prendre en charge des dépenses qui ne correspondent pas à la
prestation attendue ou pour lesquels aucun service n’a validé l’engagement. L’existence d’un
suivi papier et informatique peut en outre conduire à des doubles paiements, dès lors que la
facture n’est pas ra
ccrochée au
bon de commande. L’apurement des comptes d’attente est très
parcellaire.
Ces défaillances dans
le processus d’engagement, de suivi de la dépense et de non
exhaustivité du service fait affectent la sincérité budgétaire et la fiabilité des comptes, et
conduisent au non-
respect des principes d’indépendances des exercices et d’annualité
budgétaire.
Cet
te situation résulte d’une méconnaissance des agents et directeurs de services des
principes comptables et budgétaires, y compris pour les directeurs de régie. L’organisation
interne au sein de la direction des finances et les fragilités des interactions avec les autres
directions participent à ces insuffisances. L’absence de procédure écrite et de règlement
budgétaire ne permet pas également la sécurisation de la chaîne de dépense.
Or, au-delà des irrégularités observées, ces dysfonctionnements se traduisent par un
retard dans le mandatement, et par voie de conséquence, dans le paiement des fournisseurs et
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
63
le titrage des titres de recettes, et donc de leur encaissement
88
, au risque d’atteindre la
prescription.
Évolution du délai moyen entre la réception de la facture et son mandatement (en
jours)
Budgets
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Budget principal
212
136
156
304
394
460
Régie du Golf
55
76
69
103
521
Régie du port de plaisance
59
40
89
140
138
Source : commune de Saint-François
Nota : Les
données sont celles établies au 24/03/2023 : à la date d’édition des statistiques (fin mars), il n’y avait
pas encore eu de mandatement pour les deux budgets annexes.
Pour autant, les statistiques du nombre de mandats et titres traités en moyenne par agent
n
’attestent
pas
d’
une suractivité du service finances.
Évolution du nombre de mandats et titres émis par budget et du nombre moyen
traité par agent
Budgets
2018
2019
2020
2021
2022
Budget principal
11 180
10 615
9 525
10 099
9 845
Régie du Golf
466
428
616
492
456
Régie du port de plaisance
244
483
368
341
134
Total
11 890
11 526
10 509
10 932
10 435
Nombre d'agents (ETPR)
89
5
5
5
5,5
6,74
Nombre moyen de mandats et
titres par agent et par jour
11,3
11,0
10,0
9,5
7,4
Source : Chambre régionale des comptes à partir des données de la commune de Saint-François
Un audit des processus financier a été commandé par la commune et a donné lieu à un
rapport en décembre 2022
90
. Certaines des préconisations sont en cours de déploiement. A la
date du contrôl
e de la chambre, les changements sont insuffisants pour en percevoir l’incidence
sur la fiabilité des comptes.
La commune doit modifier son organisation, responsabiliser les services prescripteurs
et rationnaliser le fonctionnement du service finances. Elle doit respecter les règles budgétaires
et comptables, les 30 jours de délais de global de paiement, sans quoi la comptabilité
d’engagements restera défaillante.
88
Hors recettes et dépenses perçues avant émission de titre ou mandat.
89
EPTR : équivalent temps plein rémunéré.
90
Dans sa version définitive.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
64
Les
dysfonctionnements
dans
le
processus
de
rattachement
et
de
comptabilisation des restes à réaliser de fonctionnement
En application du principe d’indépendance des exercices et d’annualité, il est procédé
au rattachement et à la comptabilisation des RAR.
Les rattachements correspondent aux dépenses engagées, dont le service a été fait mais
dont
la facture n’est encore pas parvenue. Les restes à réaliser de la section de fonctionnement
correspondent aux dépenses engagées non mandatées et non rattachées (pas de service fait)
telles qu’elles ressortent de la comptabilité des engagements
, et aux rec
ettes certaines n’ayant
pas donné lieu à l’émission d’un titre et non rattachées (article R.
2311-11 du CGCT). Les restes
à réaliser de fonctionnement sont classiquement limités, compte-
tenu du type de dépenses qu’ils
concernent.
Ce n’est pas le cas pour
Saint-François. Le pourcentage des RAR a pu représenter
jusqu’à 16
% des dépenses de fonctionnement. Au niveau des budgets annexes, ils ont
représenté 51 % des dépenses réelles de fonctionnement pour le budget golf tandis que les
rattachements ont atteint 54% pour le budget du port.
Dépenses de fonctionnement du budget principal et poids des rattachements et des
RAR (2018-2022)
Dépenses réelles de
fonctionnement
Rattachement
RAR
2018
En €
22 860 618
64 647
2 710 561
Soit en % des dépenses de fonctionnement
0,3%
12%
2019
En €
23 247 211
1 399
2 275 773
Soit en % des dépenses de fonctionnement
1%
10%
2020
En €
25 982 247
1 083 112
803 331
Soit en % des dépenses de fonctionnement
4%
3%
2021
En €
22 476 973
636 885
3 509 496
Soit en % des dépenses de fonctionnement
3%
16%
2022
En €
28 622 891
613 101
3 865 264
Soit en % des dépenses de fonctionnement
2%
14%
Source : Chambre régionale des comptes
La nature des dépenses enregistrées en RAR met clairement en évidence qu’elles ont
donné lieu à service fait et que la facture a été réceptionnée. Celles-
ci n’ont cependant pas été
engagées ni mandatées contrairement aux règles comptables.
C’est notamment le cas de la majorité des dépenses d’eau et une partie de celles
d’électricité
qui
n’ont pas été engagées pour un montant global de 0,91 M€, alors même que les
crédits avaient été ouverts. Il en résulte, plus particulièrement pour l’eau, que le paiement de
ces charges accuse un retard d’un an.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
65
Dans certains cas, des RAR sont inscrits au
vu d’engagement de marchés à bons de
commande, sans certitude de leur existence et de leur réalisation. Selon le processus normal, le
service finances engage les dépenses, actes juridiques à l’appui. Toutefois, les services
opérationnels émettent des doutes sur les montants comptabilisés en RAR pour 2022. Pour
autant, ils n’assument pas leur rôle de vérification des engagements. Cela est révélateur de
l’insuffisante circulation de l’information entre les services et surtout de la méconnaissance de
la réalité des engagements envers les prestataires extérieurs. Par défaut et mesure de précaution,
la commune a opté pour l’inscription en restes à réaliser.
Dans d’autres cas, elle décide d’inscrire en restes à réaliser des sommes qu’elle ne juge
pas devoir. Ainsi, les avis de taxes foncières 2017-
2022, d’un montant de 0,96
M€ n’ont pas
été inscrits en décision modificative au budget, la commune ayant considéré qu’elle aurait dû
bénéficier d’un dégrèvement dès lors que l’assujettissement concerne des bâtiments
administratifs. Cette approche est contraire aux règles de comptabilité et de gestion des
réclamations par l’administration fiscale.
Enfin, il y a le cas des RAR constatés après la clôture de l’exercice et qui résultent du
défaut de pilotage budgétaire et de suivi des dépenses engagées, comme pour ceux
comptabilisés à hauteur de 0,54 M€ en charges de personne
l.
Au final, une part importante des RAR aurait dû être mandatée et à défaut, faire l’objet
de rattachement. A l’inverse, d’autres
sont incertains. La méconnaissance par les services
opérationnels des règles de gestion budgétaire et des obligations comptables participe à
l’insincérité budgétaire, sans que les quelques actions mises en œuvre y remédient.
Malgré le poids des factures comptabilisées en RAR
faute d’engagement, il reste des
factures non engagées qui n’ont pas été prises en compte dans ceux
-ci pour un montant de
0,58
M€. Si leur nombre et montant diminuent, ces factures hors comptabilité représentent
encore 1,8 % des dépenses courantes.
Par ai
lleurs, certaines charges à payer n’ont
ni
été recensées, ni fait l’objet d’une
valorisation financière. C’est notamment le cas des droits acquis en matière de congés annuels
en fin d’exercice ou le paiement d’heures supplémentaires.
En recette, les RAR co
rrespondent pour la plupart à des recettes en compte d’attente
pour lesquelles le service finance n’a
pas établi les titres. Dans certains cas, ils ne sont pas en
capacité de justifier l’origine comme pour les recettes comptabilisées en produits de gestion
courante (0,83 M€).
Recommandation n°15 :
(
Régularité
) M
ettre en place la comptabilité d’engagement
, en
application des dispositions des articles L. 2342-2 et R. 2311-
11 et du CGCT
L
’ordonnateur
a fait valoir, dans sa réponse, que la commune tenait une comptabilité
d’engagement, ce que la chambre n’a pas constaté de matière exhaustive à l’occasion de son
contrôle, et qu’elle poursuit son travail d’apurement des comptes transitoires d’attente, ce dont
la chambre prend acte.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
66
Des comptes d’attente non apurés
Les comptes d’attente
sont des comptes où sont enregistrées les opérations comptables
qui ne peuvent être imputées de façon certaines à un compte et nécessitent une information
complémentaire. Toutes les opérations portées sur le compte 47 «
Comptes transitoires
d’attente
» doivent être imputées rapidement aux comptes définitifs. En tout état de cause, ils
doivent être apurés en fin d’exercice, sans quoi le résultat de fonctionnement est faussé puisqu’il
ne comprend pas les recettes et dépenses imputables à l’exercice.
Ces comptes présentent des montants significatifs pour la commune de Saint-François.
Au compte de gestion 2022 provisoire, les recettes à classer représentent 3,4 % des produit de
gestion courante tandis que les dépenses à classer équivalent à 4 % des charges de gestion
courante.
Évolution 2018-
2022 des recettes et dépenses à classer (En €)
2018
2019
2020
2021
2022
Recettes à classer
9 682 238
2 750 189
1 188 075
959 657
1 009 352
Dépenses à classer
1 029 132
1 833 980
1 036 441
2 033 091
1 052 307
dont remboursement d'emprunt
19 985
1 260 592
131 646
128 956
0
Source : comptes de gestion
L’absence d’apurement résulte de la défaillance du service finances dans le suivi des
écritures comptables enregistrées, mais également du non rapprochement de certaines écritures
avec les mandats et titres émis. Ainsi, en fin d’exercice 2022, sont notamment comptabilisées
des recettes à hauteur de
0,65 M€
concernant des
subventions et 0,14 M€
concernant des ventes
de parcelles.
Lorsque le solde des dépenses à classer est supérieur aux recettes, le résultat de
fonctionnement est artificiellement majoré :
à l’inverse, comme en 2021, il a été artificiellement
minoré d’1 M€.
La direction des finances doit organiser un suivi régulier des comptes d’attente et se
rapprocher régulièrement du comptable public pour traiter les écritures non soldées.
Une amélioration de la comptabilisation des restes à réaliser en investissement
Les règles budgétaires imposent de comptabiliser l’ensemble des dépenses et recettes
engagées en investissement. Selon la définition, les RAR de cette section arrêtée à la clôture de
l'exercice correspondent aux dépenses engagées non mandatées et aux recettes certaines n'ayant
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
67
pas donné lieu à l'émission d'un titre au 31 décembre de l’année considé
rée, celles-ci devant
être dûment attestées par une pièce justificative
91
.
L’investissement public a pour objet de financer la réalisation d’équipements
nécessaires au développement collectif, qui répondent aux besoins de l’intérêt général et des
usagers du service public
92
.
Les dépenses d’équipement comprennent essentiellement des opérations qui se
traduisent par une modification de la consistance ou de la valeur du patrimoine de la commune.
En principe, elles peuvent être auto-financées et/ou financées en partie par les subventions de
l’État
93
, de la région, du département
94
et des établissements publics de coopération
intercommunale
95
, sous réserve du respect des dispositions réglementaires et de la justification
de réalisation du projet subventionné.
En l’espèce, les dépenses d’investissement de la commune restant à réaliser au
31
décembre 2022 s’élèvent à 5,5 M€.
La chambre constate positivement que les préconisations du précédent contrôle
budgétaire en matière de suppression des opérations ne donnant pas lieu à engagement et pour
lesquelles aucun projet ne sera lancé dans l’exercice suivant ont été respectées. Ainsi, le
montant de celles-ci est de 44 % inférieur à celles du budget primitif 2022.
Cette position permet de tendre sensiblement vers un rééquilibrage de la section
d’investissement. Il peut cependant être observé que les restes à réaliser comportent encore une
opération ne donnant pas lieu à engagement juridique strictement, même si des discussions sont
en cours avec le titulaire du marché initial pour sa reprise, ce qui induit des risques. Sans
méconnaître ces derniers, il peut être observé qu’au 31 décembre 2022, l’opération ne devrait
pas figurer en restes à réaliser. En recettes, les règles budgétaires ont été respectées.
Des provisions pour risques et charges partiellement comptabilisées
Les règles comptables prudentielles imposent aux collectivités d’enregistrer en
comptabilité une provision sur l’exercice en cours, en raison de la réalisation probable d’un
risque ou d’une charge nécessitant un
e sortie de ressources dans le futur. Le résultat comptable
se trouve ainsi cohérent avec la réalité de ses obligations financières.
Certaines provisions prévues par la nomenclature comptable sont obligatoires, en
application de l’article L. 2321
-2 du CGCT. Ainsi, des provisions doivent être constituées par
91
Application des dispositions des articles R. 2311-11 et D. 5217-12 du CGCT et des instructions
budgétaires et comptables.
92
Article L. 1111-4 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) : « Les communes, les
départements et les régions financent par priorité les projets relevant des domaines de compétences qui leur ont
été dévolus par la loi ».
93
Décret n° 99-
1060 du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l’État pour des projets
d’investissement.
94
Article L. 1111-10 du CGCT.
95
Articles L. 5217-8, L. 5215-26, L. 5216-5 et L. 5214-16 du CGCT.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
68
délibération de l’assemblée délibérante dès l'ouverture d'un contentieux en première instance
contre la collectivité, dès qu’une procédure de règlement judiciaire ou de liquidation judiciaire
est engagée
vis à vis d’un organisme bénéficiant d’une garantie d’emprunt, enfin lorsque le
recouvrement des restes à recouvrer sur compte de tiers est compromis malgré les diligences
faites par le comptable public.
Sur la période sous contrôle, la commune a constitué les provisions à raison de litiges à
hauteur de 3,7 M€ (dont 1,44 M€ en 2022)
: cependant, ces écritures ont été inscrites sans que
les délibérations n’aient été adoptées par l’assemblée délibérante. Le montant est conforme au
tableau de suivi des contentieux de la commune (soit en RAR, soit mandaté).
Les créances présentant un risque de non recouvrement doivent faire l’objet d’une
provision. Lors que le recouvrement est irrémédiablement compromis, les créances font l’objet
d‘une procédure d’admission en
non-
valeur à l’initiative du comptable qui s’accompagne, dans
la comptabilité de la collectivité, de la constatation d’une charge au compte de perte sur
créances irrécouvrables.
Sur la période de contrôle, la collectivité n’a constaté aucune admission en n
on-valeur
et, contrairement aux dispositions à l’article du code précité, elle n’a pas non plus constitué de
provision pour dépréciation des comptes de tiers, ce qui nuit à la fiabilité et la sincérité de ses
états financiers.
Selon les états transmis par la collectivité, le total des restes à recouvrer du budget
principal s’élève à 9,23 M€ au 31 décembre 2022, soit près de 27 % des recettes de
fonctionnement.
Parmi ces créances, plusieurs titres sont antérieurs à 2018 et se trouvent
vraisemblablement prescrits au vu des diligences exercées. Pour ces derniers, il est préconisé
96
leur admission en non-
valeur, pour un montant de 1,8 M€, contre 0,22 M€ comptabilisés en
RAR au compte administratif 2022. À défaut de diligence du comptable dans ce sens, une
provision devra être constituée. Elle ne comprend pas la couverture des risques postérieurs à
2017, en l’absence de communication par celui
-
ci des taux d’irrécouvrabilité.
La commune et le comptable public doivent se rapprocher afin de déterminer ce taux
pour déterminer le montant des provisions à constituer et identifier le montant des admissions
en non-valeur.
Recommandation n°16 :
(Régularité)
Respecter les obligations de provision pour
risques et charges définies à l’article L. 2321
-2 du CGCT
96
Avis budgétaire n° 2022-0054 Commune de Saint-François
–
Chambre régionale des comptes de
Guadeloupe.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
69
Dans sa réponse,
l’ordonnateur
soutient que les écritures de provision ont été
régularisées. La chambre en prend acte et rappelle qu’il appartiendra à la collectivité d’en
justifier leur adéquation avec la réalité de ses obligations financières.
L’ensemble des irrégularités comptables relevées, sous réserve d’éventuelles
informations non communiquées par la commune, ont une incidence financière sur le résultat,
dont les montants sont évalués par la chambre à 4,92 M€. Ce montant aboutit à la minoration
des résultats de clôture présentés dans les comptes des budgets de la commune.
Après retraitement et ajustement, le déficit du résultat de clôture de 2,11 M€ est en
réalité de 7,03 M€
97
.
Détail des ajustements préconisés ayant une incidence sur le résultat de la section de
fonctionnement
En
M€
Retraitement en minoration du résultat
Provisions pour contentieux :
0
Provisions sur créances irrécouvrables
1,58
Admission en non-valeur
Nd*
Dotation complémentaire aux amortissements
2,67
Factures non engagées
0,58
Heures supplémentaires
Nd**
Congés annuels
Nd**
Autres évènements RH
0,099
Total retraitement en minoration du résultat
4,92
Retraitement en majoration du résultat
Subventions d'investissement
0
Produits à recevoir
0
Total retraitement en majoration du résultat
0
Incidence de la fiabilisation des comptes sur le résultat de fonctionnement
4,92
Source : chambre régionale des comptes
Nota : * absence de réponse du comptable public
Nota (2) : ** absence de réponse du service ressources humaines
97
Compte administratif provisoire du 4 avril 2023 retraité au niveau des ANC du doublon « 0,97
M€
».
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
70
Résultats de fonctionnement et de clôture 2022, avant et après retraitement
En M€
Résultat reporté
- 0,42
M€
Résultat de l'exercice
0,86 M€
Résultat de clôture 2022
0,44 M€
Résultat réajusté
-
4,48 M€
Source : chambre régionale des comptes
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Lors de son précédent contrôle en 2015, la chambre avait émis une recommandation en
matière de fiabilité comptable, dont la mise en œuvre est incomplète.
La présentation des comptes 2022
comporte des améliorations, notamment au niveau
de la comptabilisation de certaines provisions et des restes à réaliser en investissement.
L’information donnée au conseil municipal est également
davantage conforme aux textes en
vigueur.
Toutefois, celle-
ci doit encore être améliorée et faire l’objet d’une
diffusion complète et
élargie. Au niveau des comptes, de nombreuses omissions peuvent être encore constatées
lesquelles concourent à sous-
estimer le déficit du budget principal de 4,92 M€.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
71
ANNEXES
Annexe n° 1. Suivi des recommandations
..............................................................................................
1
Annexe n° 2. Données financières du budget principal
........................................................................
76
Annexe n° 3. Les dysfonctionnements dans la gestion des ressources humaines
.................................
80
Annexe n° 4. Données financières du golf
............................................................................................
89
Annexe n° 5. Données financières du port de plaisance
.......................................................................
91
Annexe n° 6. Glossaire
.........................................................................................................................
93
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
73
Annexe n° 1.
Suivi des autres recommandations émises lors du précédent rapport
Recommandations
Totalement
mise en
œuvre
Mise en
œuvre
incomplète
Mise en
œuvre en
cours
Non mise
en œuvre
Devenue
sans objet
Refus
de mise
en
œuvre
Recommandation n°3 :
Appliquer
rigoureusement le principe de la
taxe de séjour par un recensement
complet
des
capacités
d’hébergement et un suivi attentif du
recouvrement.
X
Recommandation n°6 :
Effectuer
les
diligences
nécessaires
au
recouvrement régulier des recettes
de la commune auprès du casino et
organiser le partenariat pour que cet
établissement
participe
à
l’animation culturelle et touristique
au travers d’une programmation
contrôlée.
X
Recommandation
n°7
:
Régulariser la situation des agents
mis à disposition des associations et
conditionner
le
versement
des
subventions aux associations par le
respect
de
leurs
obligations,
y
compris
pour
l’association
Matamba
X
NOTICE DE LECTURE
SUR L’AVANCEMENT DE LA MISE EN ŒUVRE DES RAPPELS AU DROIT ET DES RECOMMANDATIONS
Les recommandations de régularité (rappels au droit) et de performance ont été arrêtées après examen des réponses écrites et des pièces justificatives
apportées par l’ordonnateur en réponse aux observations provisoires de la chambre.
Totalement mise en
œuvre
L’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre la totalité des actions ou un ensemble complet d’actions permettant de répond
re
à la recommandation, même si les résultats escomptés n’ont pas encore été constatés.
Mise en œuvre en cours
L’organisme contrôlé affirme avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires au respect de la recommandation et indique
un commencement d’exécution. L’organisme affirme, de plus, avoir l’intention de compléter ces actions à l’avenir.
Mise en œuvre
incomplète
L’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires sans exprimer d’intention de les compléter
à l’avenir.
Non mise en œuvre
Trois cas de figure :
-
l’organisme contrôlé indique ne pas avoir pris les dispositions nécessaires mais affirme avoir l’intention de le faire
;
-
ou il ne précise pas avoir le souhait de le faire à l’avenir
;
- ou il ne fait pas référence, dans sa réponse, à la recommandation formulée par la chambre.
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
74
Précisions sur le suivi des recommandations non mentionnées dans le corps du rapport
Les recommandations devenues sans objet
La recommandation n°3
« Appliquer rigoureusement le principe de la taxe de séjour
par un recensement complet des capacités d’hébergement et un suivi attentif du recouvrement
»
est devenue sans objet en raison du transfert de cette compétence à la CARL.
La recommandation n°7
« Régulariser la situation des agents mis à disposition et
conditionner le versement des subventions aux associations par le respect de leurs obligations,
y compris pour l'association MATAMBA »
est devenue sans objet en suite de la reprise par la
commune en régie directe
98
d
es activités anciennement conventionnées par l’association
OMCSL à partir de 2019.
De ce fait, les agents communaux ne sont plus mis à dis
position de l’association et ont
bien réintégré l’effectif communal. Depuis 2020, la liste des concours attribués à des tiers, en
annexe du compte administratif de la commune, ne mentionne aucune subvention versée à des
associations.
Les recommandations incomplètes
La recommandation n°6
:
« Effectuer les diligences nécessaires au recouvrement
régulier des recettes de la commune auprès du casino et organiser le partenariat pour que cet
établissement participe à l'animation culturelle et touristique au travers d'une programmation
contrôlée »
a été partiellement
mise en œuvre
.
En effet, le prélèvement communal ainsi que le reversement légal sont justifiés et
reversés à la commune mensuellement. Le taux de prélèvement communal a été fixé lors des
négociations en 2005 à 8
% du produit brut des jeux (PBJ), il n’a jamais fait l’objet d’une
revalorisation de la part de la commune pourtant permise dans la convention. Les données 2022
n’ont pas été communiquées par la commune ou par l’association gérant le casino. La
commune
n’effectue aucun contrôle des produits déclarés à partir des comptes de l’association, qui ne lui
sont pas communiqués et qu’elle ne réclame pas.
Évolution du reversement à l’Etat et à la commune du produit des jeux par le Casino
de Saint-François
01/11/2017 -
31/10/18
01/11/2018
–
31/10/19
01/11/2019 -
31/10/20
01/11/2020 -
31/10/21
01/11/2021 -
31/10/22
Produit brut des jeux
10 698 528
10 944 649
8 029 756
5 517 844
nd
Reversement État/commune
354 507
358 955
250 199
160 096
nd
Prélèvement communal
618 970
639 384
447 422
285 286
nd
Total reversements
973 477
998 339
697 621
445 382
nd
Source : Commune de Saint-François
98
Délibération N° 2014/2020
COMMUNE DE SAINT-FRANCOIS
75
Le casino n’a pas communiqué l’état des recettes «
supplémentaires » (tracées dans le
compte 471 de la comptabilité du casino), conformément à l’article L. 2333
-56 du CGCT. Ces
recettes sont destinées à des travaux d’investissement pour l’amélioration de l’équipement
touristique de la ville.
Enfin, l’article 19 du cahier des charges stipule que le casino doit investir chaque année
dans des actions d’animation culturelle et touristique de la commune, à hauteur de 2,5 % du
produit brut des jeux, et produire un bilan de ses activités culturelles et artistiques. Or, les
sommes réinvesties restent insuffisantes par rapport aux clauses du cahier des charges, sur la
période 2018-
2019. À partir de 2020, les actions de communication et d’animation ont é
té
freinées par la crise sanitaire de la Covid 19 indépendamment de la volonté du casino.
Montants investis en application de l’article n°19 du contrat
Montant investi
% sur PBJ
Objectif contractuel
(2,5 % du PBJ)
Somme due par le
casino à la
commune
2017/2018
301 000
2,8%
267 463
0
2018/2019
206 000
1,92%
273 616
67 616
2019/2020
106 948
1,33%
200 744
93 796
2020/2021
nd
nd
137 946 -
2021/2022
nd
nd
-
-
Total
Source : Chambre régionale des comptes à partir des données communiquées par la commune.
Les rapports du délégataire 2020/2021 et 2021/2022 n’ont pas été communiqués à la
commune de Saint-
François. Les comptes rendus du délégataire n’ont que très peu évolué entre
2015 et 2020. Ils se limitent toujours à l’énumération des anima
tions réalisées et des
associations sponsorisées sans précision des montants, ni des actions financées. Ils ne
permettent pas à la commune de s’assurer de l’effectivité des obligations contractuelles du
casino. Le contrôle de la commune est défaillant sur cet aspect.