RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES CONCERNÉS
LES FINANCES
PUBLIQUES LOCALES
2023
Rapport sur la situation financière
et la gestion des collectivités territoriales
et de leurs établissements
Fascicule 2
Les perspectives financières
pour 2023, la libre administration
sous un angle financier
Octobre 2023
•
RÉPONSES
DES
ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES
CONCERNÉS
Réponses reçues
à la date de la publication (24/10/2023)
Réponse de la Première ministre
................................................................
5
Réponse de la présidente des Régions de France
........................................
6
Réponse du président de Départements de France
....................................
16
Réponse du président d’Intercommunalités de France
.............................
22
Réponse de la présidente de France Urbaine
............................................
25
Réponse du président de Villes de France (VdF)
.....................................
33
Destinataires n’ayant pas répondu
Monsieur le président de l'Association des maires de France (AMF)
Monsieur le président de l'Association des petites villes de France (APVF)
Monsieur le président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF)
RÉPONSE DE LA PREMIÈRE MINISTRE
Par courrier en date du 15 septembre 2023, vous m’avez transmis
votre rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics - Fascicule 2. Celui-ci
appelle de ma part les observations suivantes.
Le Gouvernement prend bonne note des «
perspectives d’évolution
des finances publiques locales
» pour l’année 2023 dressées par la Cour, qui
souligne les incidences de la « dégradation de la conjoncture économique »
ainsi que la divergence de la situati
on financière du bloc communal d’une
part et des départements et régions d’autre part. Toutefois, cette observation
doit être analysée avec prudence, les remontées comptables accessibles à ce
jour demeurant provisoires et les recettes encaissées n’étant pa
s
nécessairement toutes titrées. Par ailleurs, la « dégradation » analysée par
la Cour intervient dans un contexte marqué par la situation financière « très
favorable » des collectivités mise en exergue par tous les indicateurs :
épargnes brute et nette, t
résorerie, investissement au terme de l’année 2022.
Enfin, si le moindre dynamisme des recettes s’explique en partie par
le ralentissement de l’inflation, ce dernier réduit également la pression à
la hausse qu’elle a pu exercer sur certaines dépenses loca
les au cours des
derniers mois.
Dans ce contexte, et au regard du nécessaire rétablissement des
finances publiques pour l’ensemble des administrations publiques, les
développements de la Cour sur les modalités de la contribution des
collectivités à cette ambition ont retenu mon attention. Dans le contexte de
l’examen parlementaire, en cours, du projet de loi de programmation des
finances publiques (PLPFP) pour les années 2023 à 2027, il importe de
rappeler l’intérêt de la maîtrise des dépenses de fonctionn
ement des
collectivités, sans pour autant remettre en place de mécanismes de
coercition ou de contractualisation.
En plus de renforcer leur résilience et de contribuer à l’atteinte des
objectifs de finances publiques de la France, une telle maîtrise est en effet
susceptible de leur permettre de dégager les marges nécessaires au
financement des investissements dans des priorités comme la transition
écologique et énergétique.
Je souscris pleinement à l’appréciation générale qui soutient
l’institution d’un
mécanisme de résilience financière pour faire face aux à-
coups de la conjoncture et conforter l’autonomie de gestion financière des
collectivités. Dans le cadre des Assises des finances publiques, le ministre
de l’économie, des finances et de la souveraine
té industrielle et numérique
COUR DES COMPTES
6
a annoncé, dans cette logique, engager une réflexion sur un « principe
d’auto
-assurance des recettes des collectivités territoriales ».
Le Gouvernement partage le propos de la Cour relatif au
renforcement de la dimension péréquatrice des concours financiers de
l’État aux collectivités.
À l’instar de la Cour, le Gouvernement partage le constat émis sur la
possibilité de renforcer les dispositifs de péréquation horizontale, aussi bien
au niveau du bloc communal
–
fonds de péréquation des ressources
intercommunales et communales, fonds de solidarité des communes de la
région d’Île
-de-France -, que régional. Les mécanismes de solidarité que
peuvent instaurer les intercommunalités comme les pactes financiers et les
dotations de solidarité communautaire pourraient également être renforcés.
Par ailleurs, le rapport fait le constat d’un « saupoudrage » de la
péréquation verticale qui intervient principalement par l’intermédiaire de
la dotation globale de fonctionnement, dont il préconise une plus grande
concentration. La dispersion des attributions au sein des dotations de
péréquation doit pourtant être relativisée. S’agissant de la dotation de
solidarité urbaine et de cohésion sociale, bien qu'elle soit attribuée à deux
tiers des communes de plus de 10 000 habitants, elle demeure très
concentrée. Chaque année, son mode de calcul conduit à concentrer les
hausses d'attribution sur les collectivités les plus fragiles. Ainsi, les
attributions varient de 4
€
par habitant (Castelnau-le-Lez, 34) à 719
€
(Clichy-sous-Bois, 93).
Par ailleurs, la poursuite du redéploiement des dotations forfaitaires
vers de la péréquation, au sein de la DGF des communes, semble
difficilement soutenable. Cette évolution a en effet pour inconvénient de
reporter désormais sur des communes aux indicateurs de richesse moins
élevés le financement de la hausse de la péréquation verticale (DSU, DSR)
par écrêtement de la dotation forfaitaire. Toute réforme de la DGF doit donc
s’appréhender à l’aune du manque de lisibilité
et d’équité des dotations
forfaitaires du bloc communal, mais en préservant néanmoins l’équilibre des
budgets locaux des différentes collectivités.
RÉPONSE DE LA PRÉSIDENTE DES RÉGIONS DE FRANCE
Les observations formulées par la Cour appellent de ma part les
réponses suivantes sur la situation financière des régions en 2023 (I), la
contribution des collectivités territoriales au redressement des finances
publiques
(II),
sur
la
péréquation
financière
(III)
et
sur
la
contractualisation (IV).
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
7
I - La situation financière des régions en 2023
La Cour relève que les collectivités territoriales dans leur ensemble
ont connu en 2021 et 2022 une « situation financière très favorable sur un
plan global » : cette affirmation
n’est toutefois pas exacte s’agi
ssant des
régions. Dans une exigence de précision, il conviendrait donc de nuancer
le constat selon lequel cette situation « a été partagée par toutes les
catégories de collectivités (communes, établissements publics de
coopération intercommunale, départements et régions) ». En effet, comme
la Cour a pu le souligner dans ses précédents rapports consacrés aux
finances locales, les régions ont constitué la seule catégorie de collectivité
à ne pas retrouver en 2021 et 2022 le niveau d’épargne brute ni la capac
ité
de désendettement constatés en 2019 : leur situation
n’a donc pas évolué
« très favorablement » sur la période.
Il me semble tout aussi inexact d’affirmer que «
Les collectivités du
bloc communal sont celles qui supportent le plus fortement les conséquences
directes et indirectes de l’infla
tion, compte du poids des dépenses de
personnel (38 % de leurs charges de fonctionn
ement en 2022) et d’achats de
biens et de services (25,3 %)
». Afin d’éclairer ce
tte conclusion, il aurait été
utile que la Cour présente une analyse globale des coûts directs et indirects
liés à l’infla
tion supportés par chaque catégorie de collectivité. En effet, les
régions continu
ent d’être significa
tivement impactées en 2023 par la forte
hausse des prix de l’énergi
e, principalement dans les lycées, les transports
ferroviaires et les transports interurbains et scolaires
1
, se traduisant par une
hausse de leurs dépenses atteig
nant près d’un milliard d’euros et ne
ttement
supérieur au rythme constaté de l’infla
tion. Dans sa note de conjoncture
publiée en septembre 2023, la Banque Postale relève notamment que, pour
2023, les charges à caractère général des régions «
d’un montant de
4,7
Md€, augmenteraient à un rythme plus dynamique qu’en 2022 (+7,5
%
après 4,4 %), les effets de la hausse des prix 2022 se faisant ressentir avec
un peu de décalage, les prestataires de service des régions réévaluant leurs
tarifs progressivement ».
Je tiens également à rappeler que la « hausse des prélèvements sur
recettes exceptionnels » constatée par la Cour consécutive à la mise en
œuvre de dispositifs visant à atténuer les conséquences de l’inflation sur
1
Source : enquête déclarative réalisée à l’automne 2022 auprès des
régions et
actualisations des données relatives aux évolutions de charges des TER selon les devis
SNCF actualisés pour 2022 et 2023. Ces chiffres n’incluent pas l’Ile de France dans la
rubrique « transports » qui dépend d’IDFM et qui subit aussi pleinement les
conséquences de l'inflation.
COUR DES COMPTES
8
les dépenses des collectivités territoriales ne concerne que marginalement
les régions. En effet, si « La loi de finances rectificative du 16 août 2022
avait créé trois prélèvements sur recettes à caractère exceptionnel, dotés
de 568
M€ au total, afin de soutenir les collectivités dans le contexte
d’inflation », les Régions ont seulement bénéficié d’une dotation de 18
M€
au titre de la revalorisation des rémunérations versées aux stagiaires de la
formation professionnelle, soit environ 3 % du montant total.
Par ailleurs, en 2023 « un nouveau prélèvement sur recettes
exceptionnel
(« filet de sécurité ») d’un montant de 1,5
Md€ est créé afin
de soutenir les collectiv
ités face aux conséquences de l’infla
tion sur leurs
dépenses. Par rapport à celui créé par la loi de finances rectificative
d’août
2022 (pour un montant de 430
M€), l’objet de ce nouveau prélèvement est
recentré sur la seule croiss
ance du prix de l’énergie, à l’exclusion de la
revalorisation
du point d’indice, son champ d’applica
tion est étendu à
l’ensemble
des
collec
tivités
et
ses
conditions
d’a
ttribution
sont
assouplies ».
Si l’inten
tion du législateur était louable, le décret
d’a
pplication de ce filet de sécurité examiné le 18 avril par le comité des
finances locales rend inopérant ce dispositif pour les régions. En effet, ni
les dépenses de transports scolaires et interurbains, ni l’impact de
l’infla
tion
sur les prix de l’énergie
dans les lycées ne relèvent de ce filet de
sécurité, dont la mise en œuvre gagnerait à être évaluée pour souligner
l’écart entre l’ambi
tion affichée et la réalité de la mobilisation.
S’agissant des prévisions de recettes, après une hausse du produit
de TVA de + 8,56 % en 2022, la Cour note que « La DGCL indique
anticiper une augmentation de l’ordre de 5
% des recettes de TVA des
collectivités territoriales en 2023 » et que « Si cette prévision et celle
d’inflation de l’Insee de début juin (+ 4,5
%) se réalisent, les recettes de
TVA des collectivités territoriales connaîtraient une légère progression en
volume ». Toutefois, le projet de loi de finances pour 2024, présenté
ultérieurement à la transmission de ce projet de rapport abaisse la
progression des recettes de TVA des collectivités territoriales de + 3,7 %
en 2023 (contre une prévision de + 5,1 % inscrite en LFI 2023, soit une
différence de près de 210
M€ par rapport aux prévisions budgétaires des
Régions) et une inflation de + 4,9 %, soit une baisse en volume de - 1,2 %
des recettes de TVA des collectivités territoriales.
La Cour relève de nouveau que « Les recettes liées aux taxes sur les
« cartes grises » devraient continuer à diminuer ». Le produit de cette taxe
n’a en effet a
tteint que 1,9
Md€
en 2022, soit une chute de 300
M€
(- 12,6 %) par rapport à 2021, correspondant à une baisse plus importante
que celle enregistrée en 2020. Le produit de cette taxe est en recul de
–
17 % entre 2019 (2,3
Md€) et 2022, se traduisant par une
perte de
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
9
rendemen
t de l’ordre de 400
M€, liée notamment à la chute du nombre de
véhicules vendus et à l’exonéra
tion de droit sur les véhicules 100 %
électriques depuis 2020 sans prévoir de compensation de cette perte de
recette aux régions (Régions de France estime la perte cumulée liée à cette
exonération à 120
M€ entre 2020 et 2022). En raison de la suppression
d’exonéra
tions régionales sur les véhicules dits « propres » (notamment
les hybrides) et du relèvement par certaines régions du tarif du cheval-
vapeur, les recettes de la taxe sur les certi
ficats d’immatricula
tion sont en
légère hausse de + 4 % entre janvier et août 2023 par rapport à la même
période en 2022. Toutefois, le projet de loi de finances pour 2024 prévoit
une nouvelle baisse de son produit de - 5,6 % en 2024. Régions de France
partage ainsi le constat de la Cour émis dans le cadre du premier fascicule
de son rapport annuel, consacré aux finances locales, et estimant que « Le
produit de cette taxe est appelé à décroitre de manière continue ».
S’agissant
des parts variables de TICPE perçues par les régions (près
d’un
quart de la fraction de TICPE leur revenant), leur produit est en baisse de
- 2,8 % entre janvier et août 2023 par rapport à la même période en 2022.
Cette situation crée une discordance de plus en plus profonde entre
la nature des recettes et celle des investissements attendus de la
collectivité. Il apparaît ainsi de plus en plus incohérent que les régions
continuent de percevoir des recett
es carbonées liées à l’automobile alors
même
qu’elles
sont
a
tte
ndues
par
l’État
pour
cofinancer
les
investissements au titre de la transition énergétique et dans le secteur des
transports et des mobilités, investissements qui conduisent mécaniquement
à réduire leurs recettes. Régions de France partag
e ainsi l’une des
propositions de la Cour émises dans son rapport relatif aux scénarios de
financement des collectivités, visant à recentraliser les parts régionales de
TICPE et la taxe sur les certif
icats d’immatricula
tion et à les remplacer
par une fraction de fiscalité dynamique.
La Cour note par ailleurs que « les recettes liées aux dotations et aux
participations ont connu une forte contraction, pour des motifs qui restent à
préciser ». Ce constat découle notamment du gel de la dotation de 107
M€
prévue par l’ar
ticle 95 de la LFI 2023 visant à compenser aux régions la
baisse des frais de gestion relatifs à la CVAE et à la CFE et qui leur avait
été également versée en 2022. Régions de France a enjoint le Gouvernement
par courrier en date du mois de juin dernier de ne pas attendre la fin de
l’année 2023 pour verser ce
tte compensation due aux régions.
La Cour souligne qu’au cours «
du premier semestre 2023, les
dépenses de personnel ont connu une progression notable par rapport à la
même période de
l’année 2022 (+ 7,6
% pour les départements, + 7,0 %
COUR DES COMPTES
10
pour les intercommunalités, + 4,1 % pour les communes et + 3,7 % pour
les régions) » et que cette évolution «
traduit notamment l’effet en année
pleine de la revalorisation de 3,5
% du point d’indice au
1
er
juillet 2022 ».
Pour les r
égions, la revalorisation du point d’indice s’est traduite en 2022
par une hausse de 54
M€ de leur masse salariale, avec une prévision d’une
hausse de 120
M€ en année pleine dès 2023. Par ailleurs, la revalorisation
désormais annuelle de la rémunération des stagiaires de la formation
professionnelle selon l’inflation se traduit en 2023 par une augmentation
des dépenses des Régions de près 36
M€.
En 2023, la Cour note que «
Compte tenu de la persistance d’une
inflation élevée, plusieurs mesures salariales ont été accordées aux agents
des fonctions publiques » et que ces dernières « seront financées par les
budgets des collectivités territoriales. Après un coût de l’ordre de 2,2
Md€
en année pleine 2023 pour celle de 2022, la nouvelle revalorisation du
point d’indice pèserait sur les budgets des collectivités à hauteur de
1,0
Md€ en année pleine
2024 ». Ainsi, en prenant en considération les
revalorisations salariales annoncées par le Gouvernement en juin 2023
sans concertation préalable des employeurs territoriaux, de manière
cumulée entre 2022 et 2024,
l’impact pour les
r
égions s’élève à près d’un
demi-
milliard d’euros.
En raison de la perte de dynamisme d’une partie des recettes
régionales, d’une forte hausse des dépenses en raison de l’inflation et
d’une inadaptation des mécanismes de soutien, ainsi que le relève la Cour,
les données comptables des collectivités au 30 juin 2023 font apparaître,
s’agissant de l’épargne brute, « une chute pour les régions (de l’ordre de
17 %) ». Dans sa note de conjoncture publiée en septembre 2023, la
Banque Postale anticipe également une baisse de l’épargne brute des
Régions de près de
–
2 % en 2023. Les conseils régionaux pourraient ainsi
être confrontés à devoir baisser leur niveau d’investissement, afin de
réguler leur perte d’épargne brute sans accroître la dette. En pareille
hypothèse, leurs dépenses d’investissement pourraient const
ituer la
principale variable d’ajustement alors même que les besoins en termes
d’investissement pour la transition énergétique, et notamment dans le
secteur des mobilités et des transports, n’ont jamais été aussi importants.
II - La contribution des collectivités territoriales au redressement
des finances publiques
La Cour estime que « Compte tenu de leur poids financier dans
l’ensemble des administra
tions publiques, les collectivités territoriales
doivent apporter une contribution au redressement
d’ensemble des finances
publiques ».
Toutefois,
comme
la
Cour
le
relève
par
ailleurs,
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
11
«
Contrairement à l’État, les collec
ti
vités ne peuvent recourir à l’emprunt
que pour financer des dépenses d’inves
ti
ssement, à l’exclusion de dépenses
de fonctionnement ». Les collectivités territoriales ont ainsi dégagé un solde
positif conti
nu depuis 2015 (qui s’est notamment élevé à 4,7
Md€ en 2021 et
4,8
Md€ en 2022). Par ailleurs, comme la Cour des comptes a pu le constater
dans son rapport annuel public 2023 consacré aux 40 ans de la
décentralisation, le léger accroissement du poids des finances locales au sein
des finances publiques (17 % en 1980 et 19
% en 2021) ne s’est pas traduit
par une augmentation de la dette locale où cette dernière « a été
progressivement maîtrisée et son poids ramené de 9,4 points de PIB en 1993
à 8,4 points en 2021 ». Ainsi que la Cour avait pu le constater, «
l’
État porte
l’essen
ti
el de l’augmenta
ti
on de l’ende
ttement public au cours des trente-
cinq dernières années ». Il revient donc à
l’État d’apporter en premier lieu
une « contribution notable »
à l’équilibre des comptes publics, alors que
ceux des collectivités territoriales ne sont pas déficitaires.
S’agissant plus par
ticulièrement des régions, avant la crise
sanitaire,
leurs dépenses de fonctionnement se trouvaient en 2019 au même
niveau qu’en 2015, pour les Régions fusionnées comme pour les autres
régions, hors transports transférés et gestion des fonds européens
2
.
L’épargne brute des Régions a également enregistré une évolu
tion
moyenne de 5,7 % entre 2015 et 2019 et la capacité de désendettement a
enregistré une baisse continue depuis 2016 (5,5 ans) pour atteindre 4,3 ans
en 2019, soit une baisse de près de 22 %.
Les collectivités ont ainsi fait la démonstration de leur capacité de
bonne gestion : elles maîtrisent leurs dépenses et leur endettement, tout en
produisant un effort sans précédent de hausse de leur investissement. Elles
ont su démontrer leur capacité à piloter en responsabilité leurs finances
comme en attestent les équilibres budgétaires évoqués précédemment.
La Cour estime que « la diminution du poids financier des dépenses
des collectivités rapportées à la richesse nationale est susceptible
d’emprunter deux modalités : un encadrement direct de l’évolution des
dépens
es des collectivités par l’État ou un ralentissement induit par celui
de ses transferts financiers aux collectivités
» en précisant qu’elle
« e
xplore cette seconde voie en soulignant qu’elle requiert un
élargissement du périmètre de l’objectif de maîtrise
des transferts
financiers, aujourd’hui étroit, à l’ensemble des transferts financiers de
l’État, notamment aux transferts de TVA visant à compenser la suppression
2
BIS 150 DGCL - «
Les dépenses de fonctionnement des régions se trouvent en 2019 au
même niveau qu'en 2015, pour les régions fusionnées comme pour les autres régions
».
COUR DES COMPTES
12
d’impôts locaux
». Il est ajouté que «
Cette voie paraît d’autant plus
justifiée que les modalités de la compensation de la suppression de la taxe
d’habitation sur les résidences principales et de la cotisation sur la valeur
ajoutée des entreprises par des recettes de TVA pourraient engendrer, de
manière permanente, un gain net pour les collectivités »
et qu’il
« conviendrait de mettre en place par catégorie de collectivités des
dispositifs de résilience collective, alimentés par une fraction de la
dynamique positive des recettes de TVA qui leur sont affectées ».
Je tiens à rappeler en premier lieu que la Cour ne mentionne pas
que
les régions ont pleinement subi les conséquences de la crise sanitaire
alors qu’elles sont, de surcroît, l’échelon de collec
tivité qui a le plus
augmenté son niveau d’inves
tissement pour accompagner le plan de
relance
de l’État. Ainsi, au cours de l’année 2020, en neutralisant la
recentralisation de la compétence apprentissage, les régions ont enregistré
une baisse de 206
M€ de leur frac
tion de TVA, de 100
M€ de leur frac
tion
de TICPE et de 208
M€ de la taxe sur les cer
ti
ficats d’immatricula
tion. A
ces pertes se sont également ajoutées des baisses de recettes dans le secteur
du transport public de voyageurs, accompagnées d’une hausse sensible des
charges supportées par les r
égions, sans que l’État n’apporte aucune
compensation financière. Les régions ont ainsi vu leur épargne brute
chuter de 21,6 % en 2020 et leur capacité de désendettement se dégrader
de 4,3 à 6 ans.
Les r
égions s’opposent fermement à tout encadrement de la
dynamique des fractions de TVA qui leur ont été allouées (ce raisonnement
s’appliquant également à tout fonds de réserve mutualisé s’appliquant sur
ces
fractions
de
TVA).
Les
collectivités
territoriales,
et
plus
particulièrement les régions, se voient progressivement privées de tout
levier fiscal leur permettant de disposer de ressources avec un pouvoir de
taux et / ou d’assie
tte. Ainsi que la Cour le rappelle dans ce rapport
provisoire, les r
égions ne disposent plus en effet d’une autonomie fiscale
que sur 8,5 % de leurs recettes de fonctionnement, à savoir la taxe sur les
certi
ficats d’immatricula
tion et la part Grenelle de TICPE, qui sont par
ailleurs
confrontées
à
une
baisse
structurelle
comme
rappelé
précédemment. Les recettes de TVA produisent en outre un effet
péréquateur entre l’ensemble des
régions.
Je tiens également à souligner que les affectations de fractions
d’impôts na
tionaux aux collectivités territoriales résultent principalement
de décisions de l’État visant à compenser la suppression d’impôts locaux
dynamiques.
Ainsi, la dynamique de fracti
ons d’impôts na
ti
onaux s’est
substi
tuée à la dynamique d’impôts locaux supprimés. Dans un contexte
inflationniste, se traduisant par une hausse des charges des Régions dans
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
13
les lycées et les transports de près d’un milliard d’euros en 2023,
tout
encadrement de la dynamique de TVA aurait pour conséquence de
dégrader durablement l’épargne brute des Régions qui ne disposent plus
par ailleurs d’autres rece
ttes dynamiques. Enfin, les collectivités
territoriales ne sont pas responsables de l’affecta
tion de fraction de TVA
aux organismes de sécurité sociale (61,2
Md€
3
) et à l’audiovisuel public
(3,8
Md€), visant à compenser des baisses et des suppressions de
cotisati
ons et d’impôts.
La Cour estime par ailleurs que « La diminution de la DGF entre
2014 et 2017 (à hauteur de 10,6
Md€) s’est ainsi accompagnée d’une
diminution du poids financier des dépenses publiques locales par rapport
à la richesse nationale mesurée par le PIB (à hauteur de 0,7 point, voir
graphique n° 1 supra) ». Une telle affirmation occulte deux constats qui
démontrent son caractère parti
el : d’une part, ce
tt
e baisse de la DGF s’est
traduite par une contraction automatique de 11
% de l’inves
tissement
local, ce qui est néfaste à l’économie et à l’emploi ; d’autre part, elle s’est
révélée sans impact sur la dette publique qui a augmenté au cours de cette
même période (passant de 76 % à 79,6 % du PIB pour les administrations
centrales quand celle des administrati
ons publiques locales s’est
maintenue à 8,8 % du PIB). Ce constat atteste une nouvelle fois que les
collecti
vités territoriales ne sont pas responsables de l’ende
ttement massif
de notre pays.
En note liée au graphique de l’évolution des dépenses des
collectivités territoriales au cours des dernières années, la Cour précise
que «
contrairement à des périodes antérieures, l’évolution des dépenses
des collectivités depuis 2011 n’a pas été affectée par de nouveaux
transferts de compétences de l’État
». Si, au niveau global, il n’y a pas eu
de nouveaux transferts de compétences de l’Ét
at vers les collectivités
territoriales, les transferts de compétences entre catégorie de collectivités
comme le transfert aux régions des compétences transports scolaires et
interurbains et développement économique pourraient utilement être
rappelés. Il c
onviendrait également de souligner l’impact croissant du
poids des normes décidées par l’État pour les collectivités, dont le coût est
estimé par le CNEN à 2,5
Md€ pour 2022 après une augmentation cumulée
de 1,9 Md€ entre 2017 et 2019, selon un rapport de
la délégation aux
collectivités territoriales du Sénat. Ces données, couplées à l’impact des
mesures salariales pour les agents de la fonction publique décidées par
l’État, relativisent l’analyse de la Cour estimant que «
les collectivités
disposent de capacités de décision sur leurs dépenses plus étendues que
sur leurs recettes ».
COUR DES COMPTES
14
La Cour relève que « Les règles de compensation des transferts de
compétences, par référence au coût historique, conduisent à ne pas
actualiser les montants des compensations en
fonction de l’évolution du
coût des compétences transférées, même quand les collectivités n’ont que
peu de leviers sur celui- ci
». En effet, à titre d’illustration, les dotations
générales de décentralisation et dotations à résilience collective, alimentés
par une fraction de la dynamique positive des recettes de TVA qui leur sont
affectées.
III - La péréquation financière
Au sein de son développement consacré à la péréquation, la Cour
estime que « la péréquation horizontale des régions a un caractère
symbolique ».
Je conteste ce dernier point qui ne reflète pas la réalité du
nouveau mécanisme de péréquation régionale et du rebasage de la fraction
de TVA s’étant substituée à la part régionale de CVAE.
La loi de finances initiale pour 2022 a en effet réformé en
profondeur le système de péréquation régionale. À la suite de la
suppression de la part régionale de CVAE et de son remplacement par une
fraction TVA, les r
égions s’étaient engagées à définir un nouveau fonds de
péréquation régionale avec une traduction législative au sein du PLF
2022. Il s’agissait plus par
ti
culièrement d’arrêter entre elles, à la demande
du Premier ministre, la manière de répartir leurs ressources issues de la
réforme de la taxe professionnelle.
Comme la Cour le souligne désormais, les régions ont considéré
dans un premier temps que la substitution de la TVA à la part régionale de
CVAE « fait disparaitre les écarts de croissance de cette ressource entre
les régions, au profit d’une progression uniforme
». Les régions ont
également cherché à gommer les disparités issues de la réforme antérieure
et qui pouvaient générer des différentiels artificiels. Dans ce cadre, les
régions ont intégré dans la fraction de TVA -ex-CVAE- les montants issus
de l’ancien fonds de péréqua
tion régionale et les prélèvements au titre du
FNGIR. Par ailleurs, le redécoupage des régions intervenu en 2016 a
conduit à niveler les inégalités entre régions.
Ainsi, ce nouveau système de péréquation horizontale permet de
gommer les écarts à la croissance moyenne de la ressource de TVA, qui
représente 89% des ressources qui se sont substituées à l’ancienne taxe
professionnelle. Les r
égions ont également proposé la création d’un
dispositif supplémentaire de solidarité au bénéfice de la Corse et des
régions e
t collectivités d’Outre
-Mer, compte tenu des spécificités liées à
leur insularité ou à leur situation ultra-marine. Cette proposition prend la
forme d’un fonds de solidarité inédit, auxquels contribuent seules les
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
15
Régions de métropole. Ce fonds a été doté
en 2022 d’un montant égal à
0,1% de la fraction de TVA ex-CVAE, soit près de 10
M€.
À compter de
2023, ce fonds montera en charge chaque année à hauteur de +1,5 % de
la dynamique cumulée (en complément de la péréquation régionale portant
sur le rebasage de la fraction TVA) dont le montant pourrait atteindre
22
M€ en 2023, soit une augmentation de 130 % par rapport à 2022. Il
s’agit, là encore, d’un effort de solidarité conséquent, complémentaire de
celui que l’État doit, en premier lieu, à l’endroit de ces
collectivités. Pour
toutes ces raisons, je m’oppose ainsi à l’invitation de la Cour proposant de
«
réexaminer l’ampleur et les modalités de la péréquation financière entre
les régions ».
Enfin, au sein du chapitre portant sur « la péréquation verticale » il
serait utile de
rappeler que, contrairement à son principe, qui s’entend
comme les
concours financiers directs de l’État visant à
réduire les
disparités de richesse entre collectivités, une partie significative de son
augmentation au cours des dernières années a été financée par un
écrêtement de la dotation globale de fonctionnement et par une
mobilisation des « variables d’ajustement », entrainant une baisse cumulée
de 315 M€ de leur DCRTP et DTCE, entre 2017 et 2022. Les collectivités
se retrouvent ainsi mises à contribution pour financer des orientations
décidées par le seul Gouvernement.
IV - La contractualisation
L’analyse de la Cour sur cette problématique est particulièrement
précise et complète. Les régions en partagent les grandes lignes et
notamment le fait que la multiplication des dispositifs contractuels a
souvent conduit à rendre l’action publique peu lisible mais aussi peu
efficace et peu efficiente.
À cet égard, les régions ne peuvent que regretter les modalités
d’élaboration et de mise en œuvre par l’État des CRTE. Elles regrettent
que ce dispositif, qui n’a pas fait l’objet d’une véritable concertation avec
le niveau régional, complexifie un peu plus le paysage contractuel
notamment par rapport à leur intervention en faveur des territoires de
projets compte tenu de leurs compétences et prérogatives historiques en
matière d’aménagement du territoire en général, de cohésion territoriale
en particulier.
Plus globalement, les r
égions partagent l’analyse de la Cour selon
laquelle une clar
ification des compétences entre l’État et les collectivités
d’une part, entre les collectivités d’autre part ainsi qu’un renforcement du
rôle de chef de file sur les compétences partagées est fortement souhaitable
COUR DES COMPTES
16
dans les meilleurs délais. À cet égard, les r
égions sont prêtes à s’impliquer
pleinement dans une démarche de concertation dans ce domaine si l’État
décidait de la mettre en place dans l’intérêt général de notre pays.
Tels sont les éléments de réponse dont je souhaitais vous faire part
en vue de leur prise en compte dans le projet de rapport du fascicule 2
portant sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements.
RÉPONSE DU
PRÉSIDENT DE DÉPARTEMENTS DE FRANCE
Départements de France (DF) remercie la Cour pour les travaux
actuellement conduits sur les finances publiques locales et se tient à sa
disposition pour toute information complémentaire.
Chapitre I : Les perspectives d'évolution des finances publiques
locales et de leur gouvernance
I-
Des facteurs d'incertitude sur l'évolution des résultats des
collectivités en 2023
La Cour évoque l'hypothèse retenue par le programme de stabilité
d'une diminution de 6% des recettes de DMTO pour l'année 2023. Celle-ci
est contredite par les récentes remontées réalisées par Départements de
France auprès de ses membres. Ainsi, au 13 septembre 2023, 53
Départements ont communiqué leur produit DMTO encaissé au 31 août
2023. Le produit DMTO 2022 de ces Départements représentait 47,9% du
produit total de cette même année. Le produit consolidé des DM TO 2023
des Départements ayant répondu est inférieur de 18,1 % au produit 2022.
S'agissant des prélèvements sur recettes visant à atténuer les
conséquences de l'inflation sur les dépenses des collectivités territoriales,
DF tient à rappeler que les Départements étaient exclus du dispositif en
2022 et que les conditions associées au mécanisme pour 2023 rendaient
dès le départ assez faible la probabilité que les Départements puissent
percevoir une telle aide. En ce sens, il avait été demandé au Gouvernement
la prise en compte d'un certain nombre de dépenses indirectes (SDIS,
collèges plus particulièrement) sans qu'aucune réponse n'ait été apportée
sur le fond.
Concernant l'évolution des dépenses sociales, DF observe comme
la Cour une évolution constante des dépenses d'APA et une augmentation
importante des dépenses PCH. En sus des observations émises, les
Départements sont plus particulièrement attentifs à la progression,
particulièrement forte dans certains territoires, des dépenses d'ASE. DF
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
17
partage également les inquiétudes de la Cour quant à l'exposition des
Départements à un « effet-ciseau défavorable » en 2023
.
II-
Une contribution des collectivités territoriales au
redressement des finances publiques à définir
DF regrette que la Cour puisse préconiser « d'étendre le
périmètre
de l'objectif pluriannuel de maîtrise des transferts financiers de l'État aux
collectivités à l'ensemble de ces transferts afin de peser plus efficacement
sur l'évolution des dépenses des collectivités ». Une telle mesure ne ferait
qu'accroître la défiance entre l'État et les collectivités territoriales,
d'autant DF rappelle son opposition constante vis-à-vis des réformes
fiscales successives qui les ont conduits à la perte du foncier bâti et de la
CVAE. En parallèle, DF réitère son accord de principe quant à une
participation des Départements à la poursuite d'un objectif concerté, et
non de type « Cahors », de maîtrise de ses dépenses publiques pilotables
(à la demande de DF, la loi de programmation des finances publiques
prévoit à ce stade de son examen le retraitement des dépenses AIS et ASE.
Les relations État/collectivités territoriales souffrent déjà suffisamment
des signaux contradictoires consistant à requérir, en même temps, une
contribution au redressement des finances publiques (de l'Etat) et une
prise en charge toujours accrue au titre de la transition énergétique et
écologique (sans compter les mesures décidées par l'Etat mais financées
en tout ou partie par le secteur local
revalorisations salariales,
indexation du RSA, avenant 43, etc.).
De telles décisions inédites s'agissant des cotisations soulèvent des
questions de principe qui doivent être préalablement traitées. DF émet à
ce stade les plus grandes réserves quant aux propositions de la Cour.
Chapitre II : L'autonomie financière des collectivités territoriales :
une notion débattue, un dialogue avec l'État à mieux structurer
I-
Une approche quantitative de l'autonomie en recettes
peu opérante
DF ne peut que partager (et regretter !) le constat de la Cour
s'agissant de « la définition extensive de la notion de « ressources propres
» » (qui) prenant en compte des recettes sur lesquelles les collectivités
n'ont pas de pouvoir de décision, a amoindri la portée de l'article 72-2 (de
la Constitution) ».
COUR DES COMPTES
18
II-
Un pouvoir fiscal érodé, désormais concentré sur le
bloc communal
Si tant est que ce soit nécessaire, DF réaffirme son opposition à la
proposition de la Cour s'agissant du scénario d'évolution du financement
des collectivités territoriales mentionné dans son rapport de septembre
2022 et qui consisterait notamment à attribuer au bloc communal les
recettes DMTO.
III-
Une autonomie en dépenses délicate à apprécier, mais
plus forte que l'autonomie en recettes
S'agissant « des ressources supplémentaires pour les départements
au-delà du droit à compensation du transfert du RMI/RSA », la Cour
mentionne à ce titre le relèvement du taux maximal de DMTO que peuvent
fixer les Départements et la rétrocession de la totalité des frais de gestion
qu'il percevait au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties en 2014.
DF rappelle que ces ressources étaient initialement destinées à compenser
l'évolution des trois AIS (RSA mais également APA et PCH). En
l'occurrence, c'est suite à plusieurs contentieux relatifs à la compensation
du RSA que l'État a modifié en loi de finances l'objet initial des ressources
mentionnées en faveur uniquement du RSA et alors que la notion de « reste
à charge » s'entend à l'égard de l'ensemble des allocations individuelles
de solidarité.
DF conteste l'analyse de la Cour des comptes s'agissant de lier les
DMTO au financement des dépenses sociales. En effet, les DMTO,
ressource certes évolutive au regard d'un cycle qui est différent de celui
de l'économie, ont vocation à soutenir le financement des investissements
des Départements, les montants étant par ailleurs presque équivalents.
C'est d'ailleurs dans l'objectif de lisser le financement des plans
pluriannuels d'investissement qu'a été demandé, et obtenu, par DF la mise
en place d'un mécanisme de réserve individuelle des DMTO. La Cour
mentionne d'ailleurs plus loin en ce sens (p 77) « compte tenu des aléas
affectant cette recette, des mécanismes de mise en réserve prudentielle des
produits des DMTO des départements ont été mis en place. Ils ont pour
objet de lisser les recettes perçues les années favorables afin de garantir
la capacité de ces collectivités à faire face à leurs engagements,
notamment pluriannuels s'agissant des investissements, en cas de
conjoncture défavorable du marché immobilier ».
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
19
IV-
Faire évoluer les objectifs et les modalités du dialogue
entre l'État et les collectivités
La Cour évoque la nécessité de responsabiliser plus fortement les
collectivités face aux aléas de la conjoncture économique. Elle ajoute par
ailleurs que « la demande d'autonomie financière qu'expriment les
collectivités territoriales peut sembler contradictoire avec le recours
régulier au soutien de l'État en cas de pertes inhabituelles de recettes ou
de hausse exceptionnelle des dépenses Il semble à DF que cette
observation serait très juste si tant est que l'État, en ce qui concerne les
Départements, ne les avaient pas privés de toute capacité à lever l'impôt
en cas de difficultés conjoncturelles. DF rappelle en ce sens que
l'augmentation du taux de taxe foncière, quitte à le diminuer ensuite, avait
permis à un certain nombre de collectivités départementales de traverser
la crise de 2008/2009. Les Départements ont qui plus est très peu bénéficié
des « soutiens de l'État devant les aléas » mentionnés...
L'analyse de la Cour s'agissant des justifications apportées à
l'augmentation du montant des recettes de DM TO mises en réserve fait
abstraction des dépenses supplémentaires subies par les Départements, du
fait du contexte inflationniste et surtout des décisions récemment prises
par l'État mais financées en toute ou partie par les collectivités. Cette
situation a conduit les Départements lors du dernier CFL à demander la
répartition intégrale des recettes perçues au titre du fonds globalisé de
péréquation DM TO.
DF rappelle son attachement à ce que les mécanismes d'auto-
assurance demeurent facultatifs et soient activés sur une base volontaire
dictée par la situation financière distincte de chaque Département.
Chapitre III : La péréquation financière : un effort à amplifier et à
mieux cibler
Si les dispositifs de péréquation sont perfectibles, il est
inenvisageable pour DF de réfléchir à une évolution de la péréquation
horizontale entre Départements avant que l'État ne pallie aux carences de
la péréquation verticale qui placent un certain nombre de Départements
en difficulté.
Par ailleurs, il apparaît difficilement acceptable de renforcer la
péréquation au sein de la DGF sans revalorisation de cette dernière. DF
rappelle que la non-indexation de la DGF a ainsi « coûté » aux
Départements 438 millions d'euros en 2022 et 865 millions d'euros en 2023.
COUR DES COMPTES
20
DF a néanmoins quelques précisions à apporter à la lecture des
observations de la Cour.
La Cour mentionne que « seul le fonds national de péréquation des
DM TO a connu une forte augmentation sur la période (+ 88 % entre 2016
et 2022), en raison de la forte progression du produit de cette imposition
». DF rappelle que l'augmentation du fonds globalisé n'est pas uniquement
dû au dynamisme des recettes associées mais également à la décision de
ses membres de procéder à une réforme du mécanisme (2019 : création du
fonds de soutien interdépartemental, 2020 : mise en place du fonds
globalisé avec évolution du dispositif de prélèvement).
La Cour évoque la nécessité de « corriger les biais du potentiel
financier ». Si les Départements reconnaissent la nécessité de faire
évoluer le potentiel financier, il s'oppose à une telle réforme dans le PLF
pour 2024 dès lors que ne peuvent être simulées dans leur entièreté les
conséquences d'une telle réforme dans l'attente d'une évolution (en cours
de discussion) des dotations CNSE.
DF n'est pas favorable à l'accroissement du volume financier de la
péréquation des DM TO entre les Départements dans le contexte incertain,
tant en termes de ressources que de dépenses, qu'ils rencontrent
actuellement.
S'agissant du fonds de sauvegarde, des travaux sont conduits au
sein de la Commission des Finances de Départements de France, ainsi
qu'avec le Gouvernement, pour davantage cibler les Départements les plus
en difficulté.
Chapitre IV : La contractualisation : un mode d'action publique
incontournable, une efficience à renforcer
Départements de France partage le diagnostic concernant la
politique contractuelle de l'État qui forme un ensemble très complexe, peu
lisible, et insuffisamment cohérent. Ainsi, le rapport souligne à juste titre
un manque de pilotage, un trop grand nombre de contrats (auquel il faut
ajouter les AMI), des calendriers et mandats de négociation inadaptés, le
manque de suivi et d'évaluation ainsi qu'une absence d'articulation entre
CRTE et CPER. La préconisation consistant à vouloir réduire le nombre
de dispositifs relève du bon sens, mais c'était déjà l'ambition des CRTE
dont on a vu qu'ils sont dans les faits peu intégrateurs avec un accès aux
financements qui ne sont pas simplifiés (AMI, demandes de DETR, etc.).
Le rapport souligne que la contractualisation est un moyen pour
l'État d'influencer les collectivités dans les choix de leurs projets. On
pourrait compléter ce constat en soulignant qu'aux origines de la
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
21
décentralisation routière il avait été convenu d'un décroisement des
financements, l'État finançant son réseau et les Départements le leur. Or,
via les CPER, les Départements ont été appelés à cofinancer les projets de
développement et de modernisation du réseau national sur leur budget
propre. La contractualisation est donc également pour l'État un moyen de
faire financer par les collectivités les projets qui relèvent de ses propres
compétences.
La Cour se dit favorable à une nouvelle phase de décentralisation
et pour une répartition des compétences entre collectivités plus
rationalisée dans la logique de bloc de compétences. Départements de
France partage la volonté de renforcer la décentralisation, mais conteste
la logique rigide et artificielle des blocs de compétences qui ne correspond
pas aux besoins des territoires et à l'efficacité des politiques territoriales.
Celles-ci nécessitent en effet de prendre en compte les différentes échelles
territoriales. Ainsi, Départements de France tient particulièrement à
garder le tourisme en compétence partagée et continue à revendiquer la
possibilité d'aider les entreprises locales surtout en cas de crise (sanitaire,
climatique...).
Une décentralisation basée sur le strict principe des blocs de
compétences serait finalement fondée sur une conception théorique et
artificielle de l'action publique qui réduirait les Départements à un unique
rôle social et de financeur du bloc local. Or, dans les faits, les domaines
d'intervention ont des limites poreuses et sont complémentaires (à titre
d'exemple les domaines de l'insertion, la formation, le développement
économique, le développement local...). Par ailleurs, l'articulation des
échelles géographiques doit également être prise en compte (les enjeux de
développement et de mobilités par exemple ne sont pas les mêmes au
niveau régional et départemental de même le périmètre des nouvelles
Régions ne correspond pas à des identités touristiques et pourtant l'aide
aux entreprises touristiques relève de leur compétence).
Le rapport préconise le renforcement du rôle des collectivités chefs
de file et des conventions territoriales d'exercice des compétences (CTEC).
Le rapport regrette que la notion de chef de filât soit de portée limitée et
que CTAP et CTEC fonctionnent mal. Départements de France revendique
la notion de chef de filât. Cependant son renforcement se heurte au
principe de non-tutelle d'une collectivité sur une autre et de manière
pragmatique à la question des moyens financiers et des compétences
techniques mobilisables.
COUR DES COMPTES
22
Le rapport préconise une meilleure articulation des CPER et CRTE
en associant davantage les Départements à ces derniers. Concernant les
CPER, Départements de France demande depuis longtemps que les
Départements soient mieux associés aux négociations des CPER, ce qui
dans les faits est très inégal. Les Départements ne peuvent pas être
simplement les co-financeurs des projets choisis par l'État et les Régions.
Départements de France demande donc la création de contrats de Plan
État/Région/Département.
Départements de France partage avec la Cour le souhait de
circonscrire le recours aux appels à projets et appels à manifestation
d'intérêt qui désavantagent les collectivités disposant de peu de moyens
techniques et financiers.
La Cour préconise de faciliter l'accès des collectivités du bloc local
aux financements notamment par le biais d'une plate-forme en cours de
montage par l'ANCT. Elle préconise également de mettre en place des
documents communs entre les financeurs pour simplifier la recherche de
financements par les collectivités. Les Départements pourraient constituer
expérimentalement dans un premier temps un guichet unique instructeur des
demandes de financements (au titre de leur vocation de solidarité
territoriale) complété par un appui en ingénierie (pour lequel Départements
de France demande un chef de filât) qui pourrait inclure un appui à la
recherche des financements mobilisables (ce qui existe déjà dans certains
Départements). Dans cet esprit, Départements de France a d'ailleurs adopté
une résolution demandant de confier aux Départements les moyens
consacrés par l'État à l'ingénierie de proximité (recrutement de chefs de
projets dans les territoires) dans une logique de véritable décentralisation
de l'ingénierie et pas seulement de simple déconcentration.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT D
’
INTERCOMMUNALITÉS DE
FRANCE
Le
rapport s’intéresse plus particulièrement aux
perspectives
financières des collectivités territoriales et à leur gouvernance.
Je souhaite saluer le travail de la Cour, dont les analyses,
conclusions et recommandations qui concernent les intercommunalités
appellent de notre part certaines observations.
Concernant
les
perspectives
financières
des
collectivités,
Intercommunalités de France souhaite nuancer l'appréciation des
magistrats sur les capacités financières des collectivités du bloc local en
2023.
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
23
Si en 2022, les recettes des communes et des intercommunalités ont
connu une forte croissance, après deux années difficiles, de nombreux
facteurs d’incertitude pèsent sur la dynamique de leur panier de ressources
pour 2023 ainsi que sur les prévisions pour 2024.
Les recettes de TVA annoncées à hauteur de +5,1 % dans le projet
de PLF pour 2023 devraient finalement connaitre en fin d’année une
croissance plus faible évaluée à +3,7 % dans le PLF 2024. Des
régularisations négatives pourraient intervenir sur les douzièmes de 2023
et de 2024. Rappelons que désormais la TVA représente près de la moitié
(41
%) des ressources fiscales des intercommunalités et près d’un tiers
(27
%) de l’ensemble de leurs recettes. En outre, en 2024, les prévisions
économiques laissent présager une évolution des recettes de TVA plus
modeste (+4,5
% dans le PLF 2024) inférieure à l’inflation.
En parallèle, les charges vont conserver une certaine dynamique.
Le fléchissement de l’inflation annoncé pour fin 2023 et surtout 2024
(prévisions Banque de France / Insee) pourrait se faire avec retard sur les
dépenses des collectivités dont une partie relève d’accords contractualisés
au moment où l’inflation était forte. Selon plusieurs témoignages
d’intercommunalités, des paliers de niveau de prix ont été franchis.
Surtout, les effets des hausses attendues concernant les charges de
personnel vont se faire durablement
sentir : effet en année pleine (2023)
de la revalorisation de la hausse de 3,5
% du point d’indice actée en juillet
2022 (coût évalué à 2,26
Md€ pour une année complète)
auquel
s’ajoute
une nouvelle hausse de 1,5 % pour le dernier semestre 2023 annoncé par
le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, ainsi que la
prime pouvoir d’achat pour les petits salaires qui, même si elle n’a pas de
caractère obligatoire, sera difficile à repousser. Pour mémoire, les
charges de personnel représentent 27 % des dépenses de fonctionnement
des groupements à fiscalité propre et 53 % pour les communes.
La moindre progression des recettes et la dynamique renforcée des
dépenses pourraient déboucher sur un effet de ciseaux préjudiciable à
l’engagement attendu des collectivités du bloc local en investissement. Il
pourrait surtout creuser les écarts déjà existant entre collectivités
concernant la solidité de leur situation financière.
La situation, des communes pourrait être un peu plus favorable.
Elles ont en effet bénéficié d’une bonne évolution de la taxe foncière tirée
à la hausse par un coefficient de revalorisation des valeurs locatives de
+7,1 %. Pour autant cette dernière ne concerne que les locaux
COUR DES COMPTES
24
d’habitation, l’évolution des bases des locaux commerciaux est bien plus
modeste et il faut s’attendre une baisse des DMTO.
En conséquence notre association récuse vivement les conclusions
de la Cour sur le fait que «
l’épargne des co
llectivités du bloc communal
pourrait continuer à augmenter et leur permettrait de participer au
redressement des comptes publics soit sous une forme d’encadrement des
dépenses, soit par une limitation des dotations ».
En première ligne pour investir dans la transition écologique et
énergétique dans le cadre, notamment, de la planification écologique
engagée par le Gouvernement, les collectivités du bloc local sont appelées
à fournir pour les 10 prochaines années un effort financier majeur qui
dépasse largement le niveau des investissements réalisé jusqu’alors.
Intercommunalités de France considère que cet effort de financement doit
être mieux pris en compte dans les solutions proposées par la Cour.
Concernant l’autonom
ie fiscale et financière des collectivités
locales, Intercommunalités de France alerte sur son recul régulier depuis
plusieurs années. De nombreux dispositifs participent à rogner les
capacités d’actions et d’initiative des collectivités.
En témoignent le recul de la fiscalité territorialisée et généraliste au
profit d’une fiscalité dédiée, le remplacement progressif des dotations
globales libres d’emploi par des subventions ciblées en particulier vers les
projets environnementaux, le développement de tech
niques d’appel à
projet qui laissent de côté les collectivités les moins bien outillées en
ingénierie.
Nous partageons le constat de la Cour sur le caractère très peu
protecteur du principe d’autonomie financière. Le concept de ressources
propres s’est révélé trompeur et doit être redéfini. En effet, il n’a pas
prémuni la fiscalité locale contre des prélèvements conduite par l’État
pour financer ses propres politiques, comme en témoignent les nombreux
allégements fiscaux catégoriels (suppression de moitié des valeurs
locatives des locaux industriels, suppression de la TH, exonération de droit
de la TFPB des bailleurs sociaux pour la remise aux normes énergétiques
de leurs logements dans le projet de loi de finances pour 2024…).
La Cour oppose la demande acc
rue d’autonomie financière de la
part des collectivités à la multiplication de dispositifs d’aides pour
surmonter les aléas (crise sanitaire, inflation…). Ces dispositifs n’ont
toutefois concerné qu’un nombre limité de collectivités et les montants
finalement distribués se sont révélés inférieurs aux enveloppes annoncées.
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
25
Intercommunalités de France ne partage pas non plus la conclusion
que fait la Cour considérant que « le resserrement souhaitable de ces
dispositifs devrait avoir pour corollaire un développement des mécanismes
d’auto
-assurance des collectivités ».
En effet, les collectivités en difficultés financières n’ont pas
forcément les moyens d’alimenter un fonds d’auto
-assurance. De plus le
fonctionnement de ce dernier tel qu’il existe actuel
lement pour les
départements est beaucoup plus contraint que l’utilisation classique des
réserves comptables (excédents), ce qui en limite largement l’intérêt. Au
final, les mécanismes d’auto
-assurance ne semblent pas contribuer à
l’amélioration de l’auton
omie financière des collectivités.
Si les collectivités entendent se montrer responsables, aux côtés de
l’État, pour maitriser la dépense publique, elles doivent également pouvoir
pleinement jouer leur rôle en matière de transitions écologique et
énergétique et réaliser les investissements correspondants.
Concernant la contractualisation, Intercommunalités de France
salue les conclusions des magistrats appelant à privilégier le CRTE comme
contrat intégrateur.
Ce renforcement de ces contrats devra s’appuye
r sur des annexes
financières de manière à donner aux collectivités la visibilité et la
prévisibilité nécessaires pour investir et participer activement au
développement du pays. Les CRTE pourraient notamment s’adosser à des
engagements pluriannuels regrou
pant et consolidant l’ensemble des
financements publics (fonds vert, fonds ministériels dédiés, DSIL, DETR,
dotation relance …).
Une loi de finances spécifique aux collectivités serait un gage de
clarification et de transparence. Elle permettrait en outre de restaurer la
confiance dans les relations financières entre l’État et les collectivités.
RÉPONSE DE
LA PRÉSIDENTE DE FRANCE URBAINE
Par courrier en date du 15 septembre, vous nous avez adressé le
rapport intitulé « La situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements
–
Fascicule 2 ». Ce rapport appelle
de notre part les observations exprimées dans le présent courrier.
1- La remise en question des transferts correspondant à la
compensation de la suppression d’impôts locaux : une perspective
incompréhensible et inacceptable
COUR DES COMPTES
26
Alors que, rapport après rapport, la Cour ne cesse, à juste titre,
d’appeler à une plus grande maturité dans les relations financières entre
l’
État et les collectivités, il est pour le moins paradoxal de proposer
(cf. page 11 et page 40) une minoration des transferts correspondant à la
compensation de la suppression d’impôts locaux. Sachant que la
responsabilisation des parties est un objectif partagé, comment considérer
qu’il ne serait pas déresponsabilisant de faire supporter aux collectivités
une part toujours plus importante des conséquences financières des
décisions d’amputations des impôts locaux dont elles subissent par ailleurs
les nombreuses conséquences néfastes (délitement du lien fiscal,
diminution de leur capacité de résilience budgétaire, …) ?
Un tel scenario
ne pourrait qu’être synonyme de perte de confiance
des exécutifs locaux dans la parole de l’
État, alors même que les
collectivités ont démontré qu’elles ne contribuaient aucunement au déficit
des finances publiques : si l’on prend la seule situation des co
llectivités au
sein des APUL, elles ont su dégager un solde positif de 4,8
Md€ en 2022,
de 4,5
Md€ en 2021, de 0,2
Md€ en 2020, de 1,2
Md€ en 2019 et de
4,2
Md€ en 2018
3.
La remise en question de la légitimité de l’affectation aux
collectivités de la dynamique de la TVA est tout particulièrement
choquante dans la mesure où elle serait synonyme de double peine : la
perspective de perte de ressource après l’effectivité de la perte du lien
fiscal (que d’ailleurs le rapport mentionne en des termes explicites e
t
partagés : «
En outre, les entreprises contribuent moins à la couverture
des charges des collectivités et les habitants locataires de leur logement
plus du tout. De manière générale, la perte de pouvoir fiscal des élus
semble remettre en cause l’un des a
ttendus des lois de décentralisation,
selon lequel le transfert d’impôts aux collectivités devait renforcer la
démocratie de proximité et le consentement à l’impôt
» (page 64).
Elle est étonnante alors qu’est enfin imminente la publication du
texte d’application du l’article 55 de la loi de finances pour 2023 relatif au
« fonds national d’attractivité
économique des territoires » (projet de
décret FNAET présenté au Comité des finances locales du 26 septembre).
La décision du législateur d’affecter au FNAET
la croissance du produit
de quote-part de TVA venant compenser la CVAE ne peut être assimilé à
une soi-disant « surcompensation
». Le FNAET est le fruit d’un objectif
partagé de politique publique, à savoir : inciter les exécutifs
intercommunaux (mettant
en œuvre des moyens budgétaires et fonciers en
3
Page 86 du rapport 2023 de l’OFGL
.
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
27
faveur des entreprises) à agir au service des priorités nationales visant la
réindustrialisation du pays (cf. page 55).
En substance, France urbaine récuse avec la plus grande fermeté
l’idée de minoration des
quote-
part d’impôts partagés alloués aux
collectivités en compensation de fiscalité locale supprimée. Pour conforter
la maîtrise des charges publiques locales dans un contexte où, par ailleurs,
une accélération des dépenses des grandes villes, grandes communautés et
métropoles en faveur de la transition écologique est exigée, France urbaine
estime que la voie à privilégier consiste à ce que soit mis un terme aux
incessantes injonctions de l’
État
de demande d’accompagnement financier
des décisions budgétivo
res qu’il n’a de cesse de décider unilatéralement.
2- Autonomie financière et autonomie fiscale : des clarifications
bienvenues
France urbaine rejoint la formation inter juridictions (FIJ) dans ses
analyses relatives aux confusions découlant des notions, trop souvent mal
comprises, d’autonomie financière, d’autonomie fiscale et d’autonomie en
dépenses :
-
« La définition extensive de la notion de « ressources propres » a pu
ainsi créer un malentendu quant à la portée de la garantie donnée aux
collectivités en 2003 ».
-
« La logique qui prévaut à la détermination du ratio peut conduire à
des dévolutions paradoxales du point de vue des collectivités. Ainsi,
toutes choses égales par ailleurs, la baisse de la DGF entre 2013 et
2017 a mécaniquement favorisé l’augmentation du ratio d’autonomie
financière ».
-
« Des dépenses relevant de compétences obligatoires sont fortement
contraintes par la loi (comme les allocations individuelles de solidarité
à la charge des départements). Mais des dépenses facultatives (comme
celles liées au temps périscolaire) apparaissent tout aussi contraintes,
en raison d’une forte demande sociale ou d’exigences réglementaires
(normes d’encadrement ou relatives à la res
tauration) ».
COUR DES COMPTES
28
Sur ce sujet, France urbaine :
-
Regrette que le Gouvernement se soit affranchi des dispositions de
l’article 16 de la loi de finances initiale pour 2020 relatives à la
suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales
prévoyant, avant le 1
er
mars 2023, la remise d’un rapport du
Gouvernement au Parlement visant à évaluer le dispositif de
compensation aux collectivités de la suppression de la THRP
4
.
-
Souscrit à la recommandation n° 2 de la récente note du rapporteur
général
d
u
budget
de
l’Assemblée
nationale
intitulée
«
Communication relative à l’autonomie financière et à l’autonomie
fiscale des collectivités territoriales à l’issue des réformes des
finances locales
5
», à savoir : « Étudier la pertinence et les modalités
de la
constitutionnalisation d’un niveau minimal d’autonomie fiscale
pour le bloc communal »
3- Auto-assurance et mises en réserves : de fortes réserves
s’agissant des grandes villes, grandes communautés et métropoles
En ce qui concerne l’idée d’auto
-assurance, France urbaine
rejoint
la Cour s’agissant des mises en réserves individuelles
« (...) une extension
aux recettes de TVA du dispositif de mises en réserve individuelles des
recettes de DMTO par les départements ne semble pas constituer une piste
à privilégier, compte tenu de l’absence de solidarité financière entre
collectivités inhérente à ce dispositif et de la moindre exposition des autres
collectivités que les départements à des effets de ciseau en recettes et en
dépenses ». D’autant que comme la Cour le relève, les fonds mis en réserve
subissent l’érosion monétaire.
Quant à la mise en réserve collective des recettes, nous persistons à
douter de la pertinence qu’il y aurait à dupliquer aux EPCI, et s’agissan
t
de la TVA, le mécanisme en vigueur pour les départements en matière de
4
« H.- Une évaluation du dispositif de compensation prévu au présent IV est réalisée au cours du
premier semestre de la troisième année suivant celle de son entrée en vigueur.
En vue de cette évaluation, le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er mars de cette même
année, un rapport qui présente les effets du dispositif de compensation prévu au présent IV,
notamment :
1° Les conséquences sur les ressources financières des communes, en distinguant les communes
surcompensées et sous-compensées, et sur leurs capacités d'investissement ;
2° Les conséquences sur les ressources financières consacrées par les communes à la construction
de logements sociaux ;
3° L'impact sur l'évolution de la fiscalité directe locale et, le cas échéant, les conséquences de la
révision des valeurs locatives des locaux d'habitation ;
4° L'impact sur le budget de l'État. »
5
file:///F:/Telechargements
_FC/Autonomie%20financi%C3%A8re%20VDEF.pdf
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
29
DMTO. D’une part, parce que la TVA n’a jamais souffert de « baisses à
deux chiffres » malheureusement observées en matière de DMTO (c’est
d’ailleurs un des arguments mis en avant par
le gouvernement pour
« vendre
» aux élus locaux la suppression de la CVAE). D’autre part, parce
que le bloc communal bénéficie d’une assiette de ressources bien plus
diversifiée et stable que ne l’est celle des départements.
C’est à l’aune de ces considérants qu’il nous semblerait souhaitable
de repréciser les termes de la recommandation n° 16.
4- Péréquation : priorité à la correction des biais
Tout comme la Cour, France urbaine appelle de ses vœux la
poursuite de la dynamique de péréquation.
Mais, surtout, tout comme la
Cour, France urbaine estime qu’« il convient tout d’abord de corriger les
biais qui affectent les critères de potentiel financier et de revenu pris en
compte pour attribuer les concours de péréquation ».
Le rapport analyse ces différents biais et formule opportunément des
propositions qui rejoignent largement celles exprimées par notre
association. Ainsi, nous convergeons :
-
Sur le fait que « l’indicateur du potentiel financier par habitant ne
suffit pas à caractériser les communes défavorisées » et que « la
fiabilité de la référence au potentiel fiscal, et donc également au
potentiel financier, est affectée par des bases fiscales très anciennes
et désormais très peu représentatives de la richesse des territoires ».
-
Sur la proposition consistant à ce que le revenu fiscal de référence
remplace systématiquement le revenu imposable en tant que critère de
charge. Ainsi que sur le bien-
fondé d’une « prise en compte du revenu
médian, (... qui), permettrait de mieux objectiver la pauvreté relative
des habitants des territoires et les besoins en services publics qui en
découlent ».
Au-delà de la question des indicateurs, des évolutions que le Cour
appelle de ses vœux sont partagées par France urbaine, tant en ce qui
concerne la DSR, laquelle relève plus du saupoudrage que de la
péréquation (98% des communes de 500 à 10 000 habitants étant
6
« Afin de prémunir les collectivités des conséquences de conjonctures économiques
dégradées, mettre en place ou renforcer des mécanismes complémentaires de mises en
réserve individuelle et collective de recettes ; réserver en conséquence le soutien de
l’État à des situations exceptionnelles (ministères de l’économie et des finances et de
l’intérieur et des outre
-mer) ».
COUR DES COMPTES
30
éligibles), qu’en ce qui concerne la DNP, dont les montants devraient être
intégré au sein de la DSU et de la DSR (
« les règles d’éligibilité de cette
dotatio
n conduisent à s’interroger sur la justification de ce concours
financier »).
À notre sens, le renforcement du ciblage de la DSR, que le Cour
recommande, mérite d’autant plus d’être priorisé que « la progression plus
forte de la DSR que de la DSU, y compris en 2023 (en cumul, + 46 % contre
+ 27
% pour la DSU entre 20217 et 2023) affecte l’équité de traitement
des communes urbaines défavorisées par rapport à la plupart des
communes rurales ».
Par contre, il nous semble que la formulation de la recommandation
n° 2 (Sans accroître le montant global de la DGF renforcer les dotations
de péréquation verticale ...) ne devrait pas ignorer la réalité des obstacles
techniques. À savoir, que dès lors que le « gisement » que représentait la
DGF de Paris s’est tari, i
l devient difficile de justifier un financement par
écrêtement de la dotation forfaitaire conduisant à ce que les communes les
mieux loties (en situation dite de « DGF nulle ou négative ») soient exclues
de l’effort. Le rapport s’en fait d’ailleurs
au chapitre 3 (
« L’exclusion de
l’effort d’écrêtement des communes qui ‘ont plus de dotation forfaitaire
(...) suscitent une difficulté d’acceptation des communes écrêtées »).
Enfin, s’agissant du FPIC, il y a à notre sens deux conditions
préalables à son augmentation. La première est une requalification du
FPIC en un fonds de péréquation de correction des inégalités de
ressources, mais, également, de charges (ce que le rapport mentionne en
ces termes : « Par ailleurs, la prise en compte non seulement d’un critère
de ressources (potentiel financier), mais aussi d’un critère de charges
(revenu) pour déterminer ceux des ensembles intercommunaux qui
contribuent au FPIC renforcerait le caractère péréquateur de ce
dispositif ». La seconde est la correction des biais des indicateurs eux-
mêmes (cf. supra). Ceci, sachant que, par ailleurs, nous convergeons pour
considérer qu’il conviendrait d’assouplir les règles de majorité afin de
facil
iter les répartitions dites dérogatoires. En d’autres termes, une
«
refondation » du FPIC doit précéder l’augmentation de son montant.
5. Contractualisation : des contrats sans engagements.
France urbaine partage la grande majorité des formulations et
préconisations de la Cour : un évidement progressif du caractère
programmatique des contrats pour se résumer à de la valorisation de
crédits ; la persistance délétère et systématique de logiques d’appels à
projets en silos ministériels qui doivent conduire
l’ensemble des
administrations
–
au-delà des efforts précieux du ministre de la transition
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
31
écologique pour faire bouger les lignes
–
à s’interroger sur leur mode de
dialogue avec les territoires. Et surtout, une absence persistante de tout
engagement finan
cier sur le temps long au service d’une vision partagée
de l’aménagement du territoire (à laquelle se substituent des programmes
sectoriels qui ne font que peu de place au fait urbain : Petites villes de
demain, Action cœur de ville, Villes moyennes, Villages d’avenir…).
Car au-
delà de l’ambition intégratrice, inachevée à ce stade, des
exercices contractuels de type « contrats de réussite de la transition
écologique », France urbaine veut d’abord appuyer fortement le constat
de la Cour suivant lequel « sauf exception, les dispositifs contractuels ne
bénéficient pas d’enveloppes spécifiques ».
Si, comme le rappelle la Cour, les contrats conclus entre l’
État et
les territoires ont historiquement porté une vocation programmatique
–
ce
que rappelle la Cour en évoquant l’enjeu initial des CPER : identifier les
« actions co-financées » et permettre aux territoires « de programmer des
opérations importantes »
–
force est de constater que du point de vue des
territoires urbains, la notion de contrat s’est détournée de cet objectif
central pour se limiter à un discours de la méthode, mobilisateur de temps
et de moyens sans aucune contrepartie financière gage d’engage
ment
opérationnel.
Et si France urbaine partage l’objectif de rationalisation du
paysage contractuel défendu par la Cour, elle souhaite tout de même
indiquer que ce n’est plus l’objectif premier. Ce discours de la méthode,
qui voudrait en quelque sorte construire une tuyauterie théorique parfaite
devient le prétexte à repousser perpétuellement le dialogue démocratique
relatif aux engagements financiers pluriannuels réels (par ailleurs
défendus par la Cour) dont conviennent l’
État et les territoires pour
assurer la transition écologique et sociale. Il en résulte que les grandes
villes et agglomérations sont dans l’incapacité de sécuriser des
programmations pluriannuelles d’investissement (PPI) ambitieuses, à la
hauteur des défis. Or sur les territoires urbains, les CRTE devraient avant
tout, dans un contexte de planification écologique, avoir l’ambition de
constituer
de
véritables
CPER
métropolitains,
avec
un
volet
interterritorial.
France urbaine partage à ce titre le constat que l’articulation entre
CRTE
et CPER n’a pas eu lieu, parce que les CPER, élaborés dans un
temps et une méthode contraints, ont insuffisamment pris en compte les
réalités territoriales (ce qui s’est notamment vu à travers l’insuffisance des
volets métropolitains, pourtant obligation légale).
COUR DES COMPTES
32
Nous constatons également, à la lecture de la récente circulaire
relative aux nouveaux « contrats de réussite de la transition écologique »,
une déconnexion potentiellement démobilisatrice entre les attendus
formels de méthode (projet de territoir
e, débats, orientations, objectifs…)
et l’urgence de trouver des solutions de financement conjoint. Et, au
-delà
des efforts du ministère de la t
ransition écologique d’inscrire nommément
un principe de « pluri annualité d’engagement » demandé par France
urb
aine, le risque de limiter cette approche à la seule possibilité d’un
financement pluriannuel par projet, et pas par contrat.
France urbaine souhaite également alerter la Cour : oui, des
collectivités ont plus de mal que les autres à accéder aux démarches
contractuelles. Mais la grille de lecture de l’ingénierie (qui sous
-entend
que les « gros » sont favorisés par rapport aux « petits ») n’est pas
suffisante. La méthode de territorialisation du Fonds vert a confirmé un
risque avéré de saupoudrage, bien identifié par la Cour, et qui ne met pas
l’accent sur les opérations d’envergure, et qui confronte donc notre pays à
des équations financières insolubles. France urbaine ne peut donc que
pleinement souscrire aux deux recommandations formulées par la Cour,
c’e
st-à-dire par ordre de priorité, le fait de donner une réelle dimension
financière (« en précisant notamment dans une annexe financière les
engagements pris par chacun des signataires et en évaluant régulièrement
leur mise en œuvre ») et d’intégrer l’ensem
ble des ministères dans une
logique territoriale qui s’extirpe de la croyance tenace dans les appels à
projets comme outil d’existence symbolique (« autour des CPER et des
CRTE, en leur intégrant autant que possible les autres dispositifs
contractuels (min
istères de l’intérieur et des outre
-mer et de la transition
écologique et de la cohésion des territoires) ». Le ministère de la transition
écologique est aujourd’hui pleinement engagé pour faire évoluer cette
culture mais se trouve bien seul face à la tentation persistante des autres
ministères de conserver des dispositifs à leur main.
Autre
point
d’alerte
qui
pourrait
faire
l’objet
d’une
recommandation complémentaire salutaire, et qui vise à réaffirmer un
principe intercommunal aujourd’hui battu en brèche
par les évolutions
contractuelles qui se dessine. La nouvelle circulaire CRTE positionne en
effet le CRTE, de fait, comme une liste de projets qui pourraient être
remontés à la fois par les maires ou les intercommunalités, sans
reconnaître la pertinence d
’une approche intercommunale en tant que telle
dans la planification écologique.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance.
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
33
RÉPONSE
DU PRÉSIDENT DE VILLES DE FRANCE (VDF)
Villes de France - qui rassemble les maires de villes de 10 000 à
100 000 habitants et leurs présidents d'intercommunalités - défend la
place et le rôle des villes infra-métropolitaines, charnières entre les
grandes métropoles et les espaces ruraux, qui bénéficient du programme
«
Action cœur de ville
» prolongé jusqu'en 2026. Je tenais à vous
remercier d'avoir invité Villes de France à formuler ses remarques à
propos de ce second fascicule du rapport public 2023, qui est consacré
aux perspectives d'évolution des finances publiques locales pour l'année
en cours, aux thèmes de l'autonomie et de la péréquation financière, et à
la contractualisation.
S'agissant des perspectives financières pour 2023, au niveau des
Villes de France, les taux d'épargne brute ont été les plus impactés en
2022 au sein des communes (notamment pour les strates 10 et 11 qui
correspondent aux villes de 20 000 à 50 000 habitants) par rapport à
2021. Cette tendance devrait se reproduire en 2023, en dépit du
coefficient de revalorisation des valeurs locatives, la TFPB ne
représentant que le tiers de nos recettes de fonctionnement en moyenne.
Cette baisse de l'épargne brute dans nos villes est révélatrice des
charges de centralité qui pèsent sur nos budgets locaux, avec des dépenses
de
fonctionnement par habitant difficilement compressibles (dépenses liées
aux écoles, à la petite enfance, aux services culturels, sportifs et de loisirs).
II faut souligner que dès 2022 les villes moyennes ont été plus que toutes les
autres strates de communes, impactées par la reprise des coûts de l'énergie
(avec un filet de sécurité sans effet pour celles-ci), les mesures salariales
intervenues en 2022 sur le point d'indice (avec 80 % d'agents de catégorie
C), et l'augmentation des dépenses courantes liées à l'inflation.
Avec les dernières mesures prises par l'État en matière de politique
salariale, la proportion élevée d'agents de catégorie C dans la pyramide
de nos effectifs, et l'importance des bas salaires dans les villes moyennes,
nous anticipons aussi une dégradation de nos charges de personnel, dans
les mêmes proportions qu'en 2022, et cela en 2023 comme en 2024.
Le quasi gel en volume de la DGF, et tes politiques de
compensation des réformes fiscales passées souvent non indexées,
aggravent ce phénomène pour les Villes de France, qui ont une
dynamique de leurs recettes de fonctionnement très relative dans le
COUR DES COMPTES
34
contexte inflationniste actuel. En 2023, le tassement de l'épargne brute
devrait donc se confirmer dans les villes moyennes.
Les capacités de désendettement des Villes de France se situaient
globalement comprises entre 5 et 7 ans, avec un ratio qui s'est dégradé
dans pratiquement toutes les strates correspondant aux villes de 10 000 à
100 000 habitants entre 2022 et 2021. Compte tenu de ce qui précède sur
l'évolution de l'épargne brute et de la poursuite des investissements à mi-
mandat (année de reprise traditionnelle des investissements dans le cycle
électoral), le ratio de désendettement devrait se dégrader également en
2023.
À titre prévisionnel, au niveau des villes moyennes, la fiscalité
historiquement élevée (avec un effort fiscal proche de 1,5 pour les villes
adhérentes à Villes de France) ne permettra pas - sauf exceptions locales
- une utilisation accrue du levier fiscal sur les ménages ; un recours au
levier fiscal qui sera en revanche plus étendu dans les EPCI (TEOM,
Gemapi...).
Vis-à-vis du programme de stabilité, les villes moyennes pourront
donc difficilement s'accorder avec l'objectif d'une progression de leurs
DRF inférieure de 0,50/0 de l'inflation, dans un contexte de forte attente
de revalorisation du traitement de base dans la fonction publique (et de
déficit d'attractivité) : pour les Villes de France cet objectif n'est pas
tenable en 2023 et celui-ci sera sans doute difficile à tenir en 2024.
Au-delà de l'adéquation de nos recettes à nos dépenses, du
caractère limité de nos ressources fiscales par rapport au revenu médian
des habitants de nos villes, le contexte inflationniste rend nécessaire
d'aligner sur l'évolution des prix, les transferts financiers de l'État comme
la dotation globale de fonctionnement, dont l'enveloppe globale est
pratiquement gelée depuis 2018, avec à la clef une réelle perte de pouvoir
d'achat pour le bloc local.
La DGF pourrait faire l'objet d'ajustements conjoncturels, le cas
échéant ciblés, sans préjudice d'une réforme de cette dotation à moyen
terme. En résumé, il est important de souligner l'existence des disparités
qui peuvent affecter le bloc local derrière une situation d'ensemble
favorable, et les mécanismes de solidarité nécessaires qui en découlent
pour les villes moyennes.
Vis-à-vis d
’
une « auto-assurance » de nos ressources - au-delà de
l'intérêt de ce principe à titre facultatif et individuel - Villes de France
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
35
exprime des réserves sur l'utilité et l'efficacité d'un tel dispositif, qui
priverait de recettes les collectivités locales en période favorable.
Pour ce qui est de l'autonomie financière, de ses rapports avec le
principe de libre administration, et des garanties apportées par le niveau
des « ressources propres », Villes de France estime que celle-ci a été
sérieusement malmenée ces dernières années, et que les villes moyennes
ne disposent en réalité plus que d'une autonomie de gestion pour exercer
des compétences générales au niveau du bloc communal.
Les réformes fiscales et financières intervenues depuis une
quinzaine années, ont conduit à réduire considérablement l'autonomie
fiscale des collectivités, avec la disparition progressive des impôts directs
locaux liés aux compétences exercées avec un pouvoir de taux comme la
TP et la TH, puis la perte de la dynamique liée à la CVAE. Le déphasage
entre inflation et ressources compensées aboutit à réduire même notre
autonomie financière, avec la remise en cause possible de dotations et de
compensations dans les lois de finances successives.
Villes de France estime en outre que les transferts de charges de
l'État à destination des collectivités locales, sont de moins en moins bien
compensés, et de plus en plus réguliers (passeports biométriques,
missions de police...), ce qui aboutit dans les faits à dénaturer la libre
administration des collectivités locales. Chaque transfert de compétences
doit normalement être évalué et compensé, selon le triptyque «
compétences - ressources moyens ».
Quelle que soit la tendance affectant l'évolution des ressources des
collectivités du bloc local pour cette seconde partie de mandature, il est
indispensable d'assurer surtout une prévisibilité des ressources, à travers
une loi de finances spécifique, ou bien à défaut un pacte ou contrat
pluriannuel.
S'agissant des mécanismes de péréquation abordés dans votre
relevé d'observations, Villes de France estime que l'intercommunalité ne
doit pas être le lieu d'organisation de la réduction des inégalités entre
communes. Les Maires sont plutôt favorables à une intensification de la
péréquation verticale, qui permet d'utiliser des critères nationaux
objectifs, et d'éviter les difficultés de redistribution à l'échelle de I'EPCI,
quand les règles de représentativité isolent de facto la ville-centre. Pour
cette raison, Villes de France est très réservée sur la possibilité de mettre
en place des mécanismes qui privilégieraient une redistribution par
l'EPCI d'une DSC obligatoire ou d'une DGF locale.
COUR DES COMPTES
36
Afin d'intensifier la péréquation, Villes de France estime toutefois
préférable de consacrer des abondements externes, et non de privilégier
une politique de redistribution interne (cf. écrêtement de la dotation de
base), en ce qui concerne la DSU.
La politique passée de rattrapage de la DSR sur la DSIJJ depuis
2018, nous interpelle aussi au regard des charges de centralité, et de
l'équité qu'impose les différences de structure des dépenses et des recettes
entre communes. A minima, une restriction du nombre de communes
bénéficiaires à la DSR, permettrait effectivement une intensification des
dotations d'aménagement et un rééquilibrage au profit des villes
intermédiaires de plus de 10 000 habitants,
En ce qui concerne la contractualisation, Villes de France est de
même favorable à une rationalisation du paysage contractuel entre l'État
et les collectivités territoriales autour des CPER et des CRTE, en leur
intégrant autant que possible les autres dispositifs contractuels. Une
meilleure articulation entre les CPER et CRTÇ dans le temps serait
souhaitable, de même qu'une diminution du nombre d'appels à projets ou
à manifestation d'intérêt lancés par les ministères ou les Agences
dépendantes de l'État.