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Direction générale
de l’offre de soins
Direction générale de l’offre de soins
La Directrice générale
Tél. 01 40 56 44 64
dgos-dir@sante.gouv.fr
Pégase : D-23-015124
La
Directrice générale de l’offre de soins
à
Madame la Présidente de la sixième chambre
Cour des comptes
13 rue Cambon
75100 PARIS 01 SP
Paris, le 13 juillet 2023
Objet : R
elevé d’observations définitives
sur l
a tarification à l’activité
.
Madame la Présidente,
Par votre courrier du 13 juillet 2023
, vous m’avez transmis le relevé d’observations
définitives faisant suite à votre enquête sur
la tarification à l’activ
ité (T2A). Si la DGOS partage
de nombreux constats formulés par la Cour dans son relevé, elle souhaite néanmoins apporter des
précisions sur certains éléments à la lecture de ce relevé.
Sur les objectifs initiaux de la tarification à l’activité au regard de la situation actuelle
La DGOS
souhaite tout d’abord réaffirmer l’apport indubitable qu’a constitué la mise en
place à partir de 2005 d’un système de tarification à l’activité unifié entre les secteurs pour les
activités de médecine, chirurgie et obstétrique. Au regard des modèles précédents, ce système a
ainsi permis une allocation de ressources plus équitable, puisque reposant sur des référentiels de
coûts objectivés, plus dynamique, puisqu’en lien direct avec l’activité de soins effectivement
réalisée, et plus efficiente, puisqu’incitant les établissements les moins efficient
s à ajuster leurs
coûts plutôt qu’à ajuster leur production de soins.
Bien que certains biais aient pu progressivement
se faire jour, ce mode d’allocation des ressources figure toujours
pour la DGOS parmi les piliers
de
la réactivité de l’offre hospitalièr
e aux besoins de soins des patients dans les territoires.
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La Cour rappelle à ce propos, à juste titre, que
l’introduction de la tarification à l’activité
avait pour ambition initiale d’ajuster au mieux le niveau de ressources des établissements à leur
niv
eau d’activité et donc de charges réelles. Si cette ambition initiale a bien été mise en œuvre au
moment de la bascule dans le système de tarification à l’activité, l
a DGOS souhaite souligner que
le niveau des tarifs hospitaliers ne peut se lire
aujourd’hui qu’
au regard de la trajectoire des
dépenses d’assurance maladie consacrées aux soins hospitaliers depuis
2005, sur laquelle une
contrainte particulièrement forte s’est exercée tout au long de la décennie ayant précédé la COVID.
Ainsi, le lien entre niveau des coûts et niveau des tarifs a pu se distendre avec le temps, en
particulier du fait que l’évolution de l’enveloppe tarifaire découle de la fixation annuelle de
l’ONDAM par le Parlement et non de l’observation des niveaux de charges réell
es des
établissements de santé.
Plus généralement, la DGOS attire l’attention de la Cour sur la distinction fondamentale qui
doit
être faite entre, d’une part, un modèle d’allocation des ressources, certes perfectible mai
s
relativement performant, et, d’autre part, un niveau de ressources allouées au fonctionnement des
établissements de santé à une date donnée. Il semble que nombre des critiques adressées par les
acteurs au système de tarification à l’activité
portent surtout sur le sous-financement global ressenti
plutôt que sur une réelle opposition sur la répartition des ressources par activités.
Sur la distorsion actuelle des tarifs vis-à-vis des coûts
S’agissant du diagnostic de distorsion des tarifs actuels par rapport
à un niveau de coûts
théorique réalisé par la Cour, la DGOS souscrit à cet état des lieux. Toutefois, elle est plus nuancée
sur l’opportunité d’un retour éventuel à une stricte correspondance des tarifs avec les coûts
« réels ».
Tout d’abord, l
a parfaite recomposition de niveaux de coûts hospitaliers ayant vocation à être
couverts par le seul outil tarifaire constitue en soi une cible théorique vers laquelle la méthodologie
de constitution des tarifs issus des coûts (TIC) a pour ambition de tendre sans que cela soit toujours
possible du fait de la complexité du système de financement actuel des activités de médecine,
chirurgie et obstétrique (mêlant en particulier financement
de l’
AMO au séjour, au coût fixe
annuel, à la mission d’intérêt général, à l’euro l’euro pour certaines dépenses et financement
de
l’
AMC/patients au séjour ou à la journée).
Par ailleurs, la hiérarchie des coûts issue de ces travaux s’apprécie
actuellement de façon
relative et non comme un niveau absolu à comparer directement au niveau des tarifs publiés. Dès
lors, la convergence du niveau des tarifs vers le niveau des charges, que la Cour appelle de ses
vœux au travers de la neutralité tarifaire, emporte
rait
d’autres conséquences, notamment en termes
d
’accroissement des
dépenses publiques, que la simple révision de la hiérarchie des tarifs. En effet,
comme mentionné
supra
,
l’ONDAM hospitalier, et par conséquent l’enveloppe tarifaire, n’évolue
pas chaque année en fonction de l’évolution réelle des coûts hospitaliers mais en fonction des
possibilités de financement accordées par le Parlement au travers de la loi de financement de la
sécurité sociale. Dès lors, la DGOS souligne qu’il ne peut y avoir d’adéquation mécanique du
niveau des tarifs fixés d’une part et du niveau des coûts observés
d’autre part. Tout au plus, la
politique tarifaire peut faire en sorte de tendre vers une cohérence entre la hiérarchie des tarifs
fixés par le régulateur et la hiérarchie des coûts tels qu’
estimée par les tarifs issus des coûts.
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Enfin, un retour à une stricte correspondance des tarifs avec cette évaluation des coûts réels
pose la question de la place laissée à la concertation des fédérations hospitalières dans le processus
annuel d’élaboration des tarifs. En effet, la DGOS rappelle
que les fédérations adoptent
globalement
une position conservatrice lorsque qu’il
était proposé par le régulateur de moduler le
niveau des tarifs afin de tendre vers une correspondance entre l’échelle des tarifs et celle des TIC
,
du fait des effets revenus entre leurs adhérents que ces rectifications emportent nécessairement.
Cette recommandation, dont le principe apparaît bien en phase avec les objectifs originels de la
tarification à l’activité, induirait donc une réduction drastique de la
surface de concertation avec
les fédérations hospitalières lors de la préparation des campagnes tarifaires.
Sur la lourdeur actuelle du recueil des informations relatives aux séjours
La Cour souligne, à raison, la charge parfois importante que représente, pour les
établissements, le recueil des très nombreuses informations nécessaires à la valorisation de
l’activité dans le cadre actuel de la T2A.
La DGOS partage cette recommandation et soutient, en
lien avec le sujet du codage des activités, la nécessité d
’une simplification des recueils, d’une
amélioration des systèmes d’information y compris en adjoignant l’utilisation de l’IA. Il s’agit
ainsi de veiller à ne pas mobiliser plus de temps médical et soignant que ce qui est strictement
indispensable au codage.
Aussi, même si elle est sensible au souhait de la Cour de voir généraliser l’enquête nationale
des coûts (ENC) à l’ensemble des établissements et partage pleinement l’intérêt de renforcer la
représentativité des résultats de l’ENC, la DGOS rappelle tou
tefois qu'un des principaux freins à
la participation à l’ENC
reste
la capacité des établissements à mettre en œuvre cette collecte de
données exigeante. Cette procédure demeure, malgré les simplifications successives mises en
œuvre par l’ATIH, chronophage
et donc peu propice à la libération du temps médical et soignant
dont les structures hospitalières ont besoin en période de tensions RH.
De même, la DGOS partage pleinement l’objectif de disposer d’un PMSI qui retranscrive au
mieux la charge en soins des différentes prises en charges hospitalières mais attire néanmoins
l’attention
de la Cour sur la lourdeur que constitue par exemple, pour les établissements de soins
de suite et de réadaptation, le recueil systématique de temps paramédicaux (parfois non prévu dans
les logiciels de gestion hospitalière).
L’enjeu pour la DGOS
est
d’identifier
le meilleur équilibre entre une amélioration continue
de la qualité du codage de l’activité et la libération maximale des temps médicaux et soignants au
profit de la prise en charge directe des patients.
La DGOS réaffirme donc son attachement aux
enjeux de simplification du codage de l’a
ctivité par les personnels hospitaliers, en particulier les
personnels médicaux et soignants. Toutefois, la pérennité d’un codage exhaustif et de haute qualité
lui paraît indispensable, tant pour des raisons de pilotage et de connaissance de l’activité
hospitalière que pour des enjeux de santé publique et de connaissance épidémiologique, comme
est venue le rappeler encore récemment la crise sanitaire.
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Sur l’enjeu de la transparence vis
-à-vis des acteurs
La DGOS partage par ailleurs pleinement la recommandation de la Cour de diffusion et de
plus grande transparence relative au dispositif de collecte des coûts. Si le résultat de cette collecte
a une utilité indéniable pour éclairer l’action du régulateur (et notamment
dans la fixation de
l’échelle tarifaire), sa transparence participe clairement d’une culture du suivi et du pilotage des
coûts au sein de chaque établissement de santé. En ce sens, toute action en faveur d’une meilleure
compréhension des enjeux et des méthodes de ce dispositif par les acteurs hospitaliers eux-mêmes
parait opportune.
Cette exigence de transparence ne saurait en revanche s’opposer au processus
annuel de concertation avec les fédérations hospitalières représentative en amont de la campagne
tarifaire puis
d’arbitrage politique s’inscrivant
dans
le cadre d’un ONDAM
fixé par le Parlement.
Sur l’enjeu de la régulation des dépenses de soins hospitaliers
En effet, la DGOS ne peut que souligner
, comme l’a fait la Cour dans son rapport, l’articulation
étroite de
la tarification à l’activité avec le cadre de régulation financière que constitue l’ONDAM.
D
epuis l’introduction de la T2A, le régulateur s’est
effectivement
beaucoup appuyé sur l’outil
tarifaire pour limiter la progression des dépenses d’assurance maladi
e en matière de soins
hospitaliers. La trajectoire de réduction du déficit maastrichtien impose effectivement une
vigilance accrue sur la définition
ex ante
de l’évolution annuelle de l’ONDAM (construction
budgétaire et tarifaire) ainsi que sur son respect
ex post
(politique prudentielle). Du fait du poids
que représente l’enveloppe tarifaire au sein de l’ONDAM ES mais également du fait de l’aléa que
fait peser au moment de la fixation des tarifs l’incertitude du niveau d’activité constatée
in fine
,
l’évolu
tion tarifaire a historiquement représenté un instrument privilégié de la régulation des
dépenses d’assurance maladie
de l’ONDAM
.
Le travail de bilan de la T2A qu’a réalisé la Cour a
donc également pu pâtir de cette quasi impossibilité à dissocier les effets propres à la mise en
œuvre du système de tarification à l’activité de ceux spécifiques à la régulation financière
importante opérée au cours de la période, en particulier sur la décennie 2010.
Sur les perspectives actuelles de réforme de la tarifi
cation à l’activité
En conclusion, le chantier de réforme du financement des activités de médecine, chirurgie et
obstétrique, lancé par le Président de la République en janvier dernier et que viennent éclairer les
travaux de la Cour, constitue une opportunité
d’
adresser ces enjeux. La LFSS pour 2024 permettra
de poser les principes d’un modèle de financement plus équilibré articulé autour de trois
composantes principales: un financement à la mission reposant sur des dotations socles ou
populationnelles gara
ntissant la pérennité de l’accès à des services fondamentaux (
soins critiques,
maternité) et à des soins de recours très spécialisés ; un financement sur objectifs de santé publique
afin d’inciter
à la qualité, la pertinence et de valoriser la réponse aux besoins des populations les
plus fragiles,
et le maintien d’une part de financement à l’activité
qui permet de conserver les
principaux apports de la T2A en matière
de réactivité de l’offre aux besoin
s de santé et
d’efficienc
e
et d’équité pour les établissements.
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La mise en place de ce nouveau modèle sera progressive et s’accompagnera d’une rénovation
du cadre de gouvernance et de pilotage tant national que régional afin d’assurer aux établissements
davantage de lisibilité et de prévisibilité de leurs financements.
La Directrice générale de l’offre de soins
Marie DAUDÉ