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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
17 juillet 2023
Entités et politiques publiques
LA GESTION QUANTITATIVE DE L’EAU EN
PÉRIODE DE CHANGEMENT CLIMATIQUE
« [La] protection de l’eau, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable,
dans le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général
»,
souligne l’article L.
210-1 du
code de l’environnement
.
Pour assurer la protection de ce patrimoine, la politique publique
doit préserver le bon fonctionnement du grand cycle de l’eau et favoriser ainsi le
renouvellement de la ressource ainsi que la satisfaction des besoins des milieux naturels et
des besoins humains. La gestion quantitative de l’eau consiste à garantir que les
prélèvements sur la ressource en eau sont compatibles avec le bon état des milieux naturels,
des nappes et des cours d’eau. Parce que la question de cette bonne gestion est devenue,
dans le contexte du changement climatique, une préoccupation aussi importante que celle
de sa qualité, la Cour et les chambres régionales des comptes ont décidé d’y consacrer une
enquête. Les conclusions de ce rapport sont publiées ce jour, quelques mois après la
présentation par le gouvernement, le 30 mars 2023, d’un plan consacré à l’eau.
Mieux évaluer les effets du changement climatique sur la ressource en eau
La réalité du changement climatique affecte d’ores et déjà les ressources en eau et l’ensemble
d
es études prospectives laissent penser que la situation ira en s’aggravant dans
les décennies
qui viennent. En France métropolitaine, la quantité d’eau renouvelable disponible
- celle qui
peut être utilisée pour satisfaire les besoins humains sans compromettre la situation future - a
baissé de 14% entre la période 1990-2001 et la période 2002-2018. Cette réduction résulte
essentiellement de l’élévation du niveau moyen des températures de 0,6 °C au cours de la
décennie 2011-2021 en comparaison de la période 1981-
2010. L’élévation des températures
provoque une évapotranspiration plus imp
ortante que par le passé et un retour rapide de l’eau
vers l’atmosphère au détriment des cours d’eau, des sols et des nappes. 82 % des prélèvements
d’eau sont réalisés sur les eaux de surface. Or
,
ce sont les masses d’eau qui subissent le plus
directement les effets du changement climatique. Les eaux souterraines ne sont pas épargnées.
Près de 11 % des masses d’eaux souterraines font l’objet de prélèvements excessifs. Cette
évolution concerne à des degrés divers tous les pays européens voisins de la France et devrait
conduire l’Union européenne à adapter ses directives et règlements à cette nouvelle réalité.
Piloter
la politique de l’eau au plus près des territoires
La
gouvernance de la politique de l’eau est complexe. Bien structurée au niveau des bassins
versants, autour des comités de bassin, des agences de l’eau et des directions régionales de
l’environnement, de l’aménagement et du logement, l’organisation est beaucoup moins
aboutie à l’échelle des sous
-bassins hydrographiques où pourtant les orientations doivent être
concrétisées. La planification stratégique, qui mobilise beaucoup de moyens, reste
insuffisamment opérationnelle. Les comités de bassins doivent disposer d’un plan d’adaptation
au changement climatique et veiller à la cohérence des document
s qu’ils élaborent avec les
autres documents stratégiques des régions. Au niveau des sous-bassins, des schémas
d’aménagement et de gestion des eaux déclinent le schéma directeur
de bassin, notamment
sous la forme de contrats entre l’État et les collectivit
és locales. Tous ces documents, longs et
techniques, souvent sans objectifs mesurables, restent ignorés des citoyens. Les communes et
leurs groupements devraient constituer des établissements publics à l’échelle des sous
-bassins.
Or, ils font souvent défau
t. Pour assurer la cohérence entre la politique de l’eau et les autres
politiques, la constitution de commissions locales de l’eau devrait être généralisée dans tous
les sous-
bassins hydrographiques. L’État est très présent dans la conduite de cette politi
que,
mais il maîtrise mal l’activité de ses propres services,
notamment dans le domaine de la police
de l’eau qui lui revient pourtant entièrement
, et dont les moyens devraient être renforcés.
Le coût de la politique de l'eau
évalué à 26,4Md€ en 2015
concerne essentiellement la gestion
de l’eau potable et à l’assainissement
, la gestion quantitative de la ressource en représentant
une part marginale et mal connu. Les redevances perçues
sur les prélèvements d’eau
ne
représentent que 10% du financement de
s agences de l’eau
; elles sont inégalement réparties
entre les usagers aux
dépens des ménages et n’incitent pas aux économies d’eau
. Cette
redevance
d’une grande complexité dans la détermination de son assiette
, indifférente à
l’évolution de la disponibil
ité de la ressource,
constitue une simple variable d’ajustement
budgétaire
et non un outil de fiscalité environnementale ayant une influence sur les
comportements. La
transformation de la redevance sur les prélèvements de l’eau en
instrument de protection de la ressource ne sera possible que si le plafonnement global du
produit des redevances des agences de l’eau est supprimé et si une responsabilité plus grande
est donnée aux comités de bassin dans la détermination du montant de ces redevances et de
la charge pesant sur chacune des catégories de redevables.
Réduire les prélèvements d’eau pour une gestion durable de la ressource
La nécessaire protection de la ressource en eau, bien commun essentiel, a tardé à se traduire
en mesures de politique publique. Celles retenues par les autorités locales consistent à essayer
de sécuriser l'approvisionnement en eau par des interconnexions, des infrastructures de
stockage et de transfert de l'eau. Ces solutions anciennes deviennent de plus en plus difficiles
à mettre en œuvre.
Seule, une stratégie déterminée de réduction des prélèvements et
d’utilisation raisonnée de la ressource est susceptible d’apporter une solution de long terme.
La réduction des prélèvements est la condition du retour à l’équilibre dans les zones en tension
et de l
a restauration du bon état des masses d’eau. Tous les outils disponibles doivent être
utilisés dans ce sens. La tarification progressive doit être mise en place partout où cela est
possible pour inciter les gros consommateurs à modifier leurs comportements. Le financement
public d’infrastructures d’irrigation de terres agricoles
doit quant à lui être conditionné à des
engagements de pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement et à la réduction
des quantités d’eau utilisée. La planification str
atégique et les plans territoriaux de gestion de
l’eau devraient comporter des objectifs de réduction des prélèvements.
Lire le rapport
CONTACT PRESSE
:
Eran Guterman
Chargé des relations presse & réseaux sociaux
T
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