RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
CENTRE COMMUNAL D’ACTION
SOCIALE DE FORT-DE-FRANCE
(département de la Martinique)
Exercices 2015 et suivants
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 8 septembre 2022
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
......................................................................................................................
3
RECOMMANDATIONS
.................................................................................................
4
INTRODUCTION
............................................................................................................
5
1
LE CCAS DE FORT-DE-FRANCE EXERCE SES MISSIONS AVEC DES
MOYENS CONTRAINTS
..........................................................................................
7
1.1
Il exerce ses missions obligatoires et cible les populations vulnérables et âgées . 7
1.1.1 Une population marquée par des vulnérabilités sociales et des fragilités
économiques
...........................................................................................................
7
1.1.2
Une stratégie à définir sur la base de l’analyse des besoins sociaux et des
missions obligatoires exercées avec des moyens surdimensionnés
........................
7
1.1.3
L’action sociale facultative cible les foyers en grande précarité et la population
âgée
.......................................................................................................................
10
1.2
Une situation financière sous tension
..................................................................
12
1.2.1
L’information budgétaire, la fiabilité des comptes et la gestion des régies sont
perfectibles
...........................................................................................................
13
1.2.2 Un équilibre financier de plus en plus précaire
....................................................
14
2
LE PILOTAGE DE L’ETA
BLISSEMENT EST A RENFORCER
..........................
18
2.1
La commune de Fort-de-France a été impliquée dans la gouvernance du CCAS
au-delà du cadre réglementaire
...........................................................................
18
2.1.1
Un fonctionnement du conseil d’administration à parfaire
..................................
18
2.1.2 Le CCAS, un établissement public administratif autonome, intégré comme un
simple service au sein de la commune
..................................................................
20
2.1.3 Une mutualisation de fait, sans contreparties financières, à formaliser pour plus
de transparence dans une convention avec la commune
.......................................
21
2.2
La gestion des ressources humaines est partagée avec la commune
...................
22
2.2.1 La GRH présente certaines irrégularités, pour partie transposées de la commune
22
2.2.2 Un excès de recours aux emplois de contractuels
................................................
25
2.2.3 Certains défis en matière de GRH sont propres au CCAS
...................................
28
2.3
La fonction achat reste à structurer pour sécuriser la commande publique
........
29
2.3.1
Un manque de compétence interne et de mobilisation d’outils disponibles en
matière de commande publique
............................................................................
29
2.3.2 Les règles de la commande publique ne sont pas respectées
................................
30
2.3.3 Le CCAS a passé plusieurs protocoles transactionnels
........................................
30
3
LES SERVICES MEDICO-SOCIAUX DEDIES AUX PERSONNES AGEES
SONT EN DESEQUILIBRE
.....................................................................................
33
3.1
Le sous-
financement structurel du service d’aide à domicile ne permet pas
d’appo
rter une réponse suffisante aux besoins
....................................................
34
3.1.1
Le service d’aide à domicile est un service historique
.........................................
34
3.1.2 Ce service est structurellement déficitaire
............................................................
35
3.1.3
Plusieurs leviers d’action sont à mobiliser
...........................................................
37
3.2
La
Yole gran moun
offre des services réduits pour un coût élevé
.......................
37
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
2
3.2.1
L’ancien foyer
-logement relève
désormais d’une catégorie d’établissement
médico-social par défaut
.......................................................................................
37
3.2.2 La Yole gran moun présente un coût élevé
..........................................................
38
3.2.3
L’ancien foyer logement présente des excédents structurels
................................
39
4
DES INSUFFISANCES DE
GESTION DE L’EHPAD
SONT EN COURS DE
RESOLUTION
..........................................................................................................
41
4.1
Un Ehpad récent pour répondre à un besoin de prise en charge avéré
................
41
4.1.1
L’Ehpad ouvert en 2012 répond à un bes
oin identifié
..........................................
41
4.1.2
La stratégie de l’établissement n’est pas formalisée et son pilotage a montré des
insuffisances
.........................................................................................................
43
4.1.3
La prise en charge des résidents dépendants s’est améliorée progressivement
....
44
4.1.4
Un pôle d’activité et de soins adaptés (PASA) est financé mais non mis en œuvre
45
4.1.5 Le bâtiment loué offre des conditions hôtelières satisfaisantes mais se dégrade
rapidement
............................................................................................................
46
4.1.6 Les recrutements répondent aux critères réglementaires
......................................
47
4.2
L’évolution de la prestation de restauration
est représentative des difficultés de
gestion
.................................................................................................................
47
4.2.1
Un manque d’anticipation et une mauvaise appréciation des besoins caractér
isent
les commandes liées à la restauration
...................................................................
47
4.2.2 La prestation de restauration, assurée à un coût élevé, est payée avec retard
.......
48
4.3
La fragilité financière de l’Ehpad s’explique par des charges de structure élevées
et une gestion défaillante des produits
................................................................
49
4.3.1
L’Ehpad présente une fragilité financière
.............................................................
49
4.3.2 La tarification ne permet pas de couvrir les coûts
................................................
50
4.3.3 Le circuit de facturation, qui a présenté des défaillances significatives, est en voie
d’amélioration
.......................................................................................................
52
RECOMMANDATIONS*
.............................................................................................
55
ANNEXES
.....................................................................................................................
56
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
3
SYNTHÈSE
Le CCAS répond à des besoins sociaux
d’une
population marquée par la précarité et le
vieillissement. Son continuum de services médico-sociaux en faveur des personnes âgées est
un atout. Toutefois, ses choix de gestion, accompagnés d
’
insuffisances administratives
significatives, se sont avérés coûteux, notamment pour les services médico-sociaux. La
montée en compétence dans ces secteurs est à poursuivre pour tenir compte des spécificités
des métiers du champs médico-social. Le recours quasi exclusif à des agents contractuels
n’assure pas la qualité du service rendu aux usagers.
L
a stratégie d’intervention
du CCAS doit reposer sur une analyse actualisée des besoins
sociaux du territoire, impliquant les partenaires locaux conformément à la règlementation.
En 2020, le budget de fonctionnement consolidé du CCAS
, financé à hauteur d’un tiers par
la commune, est de 8,5
M€
. Son équilibre financier est fragilisé par la diminution de la
subvention communale, par
le déficit structurel du service d’aide à domicile et les tensions
sur le budget de l’Ehpad. L’état de sa trésorerie ne lui permet pas de payer régulièrement ses
fournisseurs dans les délais légaux.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
4
RECOMMANDATIONS
RECOMMANDATIONS DE REGULARITE
Recommandation n°
1
Réaliser l’analyse des besoins sociaux prévue à l’article
R. 123-1
du CASF avec l’ensemble des partenaires et la présenter au
conseil d’administration
Recommandation n°
4 Mettre fin au régime de prime de retraite, dénué de base
réglementaire, aux aides ménagères
Recommandation n°
5 Appliquer les critères de recours aux contractuels prévus au code
général de la fonction publique (articles L. 332-8 à L. 332-14 et
L. 332-23)
Recommandation n°
6 Surveiller et respecter les seuils pour appliquer les procédures de
commande publique adéquates conformément aux dispositions
de l’article
L. 2120-1 du code de la commande publique
Recommandation n°
7
Mettre en place conformément aux dispositions de l’article
R.°314-
78 du CASF le budget annexe du service d’aide à
domicile.
RECOMMANDATIONS DE PERFORMANCE
Recommandation n°
2
Définir la stratégie du CCAS sur la base de l’analyse des besoins
sociaux
Recommandation n°
3
Etablir une convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens
entre la commune et le CCAS
Recommandation n°
8 Facturer mensuellement et titrer systématiquement les produits
à charge des résidents
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
5
INTRODUCTION
Conformément à l’article
R. 243-1 du code des juridictions financières, le contrôle des
comptes et de la gestion du centre communal d’action sociale (CCAS) de Fort
-de-France pour
les années 2015 et suivantes a été ouvert par lettre du président de la chambre régionale des
comptes de la Martinique du 26 mars 2021 adressée à Monsieur Didier Laguerre, président et
ordonnateur en fonction.
L’entretien de début de contrôle a eu lieu le 8
juin 2021 avec le vice-président dans les locaux
du CCAS conformément aux normes professionnelles III.15 à III.17.
L’entretien de fin d’instruction prévu par l’article L.
243-1 du code des juridictions financières
a été sollicité auprès de l’ordonnateur le 17 février 2022. Il s’est déroulé le 9
mars 2022, tel
que prévu par l’article L
. 243-1 du code des juridictions financières.
Dans sa séance du 1
er
avril 2022, la chambre a arrêté des observations provisoires qui ont été
communiquées à l’ordonnateur le
1
er
juin 2022 et dont il a pris connaissance le 7 juin 2022.
Des extraits ont également été adressés à des tiers pour ce qui les concernaient. L’un d’eux a
répondu.
Après avoir examiné les réponses obtenues, la chambre, dans sa séance du 8 septembre 2022
a arrêté les observations définitives suivantes.
Présentation du CCAS
Le CCAS est un établissement public administratif local agissant dans le domaine de l’action
sociale. Il est rattaché à la commune mais il est géré par un conseil d’administration propre.
Le maire est le président de droit du conseil d
’administration. Sa personnalité morale est
distincte de la commune et il bénéficie de ressources propres. Certaines décisions concernant
la gestion du CCAS relèvent toutefois du conseil municipal (dévolution des biens immobiliers
par exemple). La création
d’un CCAS dans chaque commune
est une obligation posée par la
loi du 6 janvier 1986.
Ses missions sont fixées aux articles R. 123-1 à R. 123-
6 du code de l’action sociale et des
familles (CASF). Son rôle est, en premier lieu,
d’orienter et de conseiller l
e public sur les
démarches à effectuer dans le domaine social. Aux missions obligatoires (élaboration d’une
analyse des besoins sociaux, contribution à l’élaboration des dossiers d’admission à l’aide
sociale, tenue du registre des personnes bénéficiaires d
’une prestation d’aide sociale),
s’ajoutent des missions facultatives décidées par le conseil d’administration. Le CCAS peut
ainsi intervenir au moyen de prestations en espèces ou en nature et gérer des établissement ou
services à caractère social ou médico-social.
Le CCAS de Fort-de-France remplit les missions obligatoires (analyse des besoins sociaux,
accompagnement des demandeurs dans l’élaboration de leurs demandes d’aides sociales,
domiciliation des sans-abri).
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
6
Il assure également des missions sociales facultatives avec des «
aides aux personnes
précarisées
»,
notamment des aides d’urgence, la prise en charge d’impayés en lien avec le
logement (loyer et charges), de l’aide alimentaire
ou des aides ponctuelles. Il gère trois
services médico-sociaux : un
service d’aide à domicile (SAAD),
un établissement
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de
64 places ouvert en 2012,
l’«
Espace Gran Moun
», et un foyer de 20 logements, la «
Yole Gran Moun
».
Fort-de-France
Chef-lieu de la collectivité territoriale de la Martinique, Fort-de-France a une position centrale
sur l’île de la Martinique et concentre les fonctions administratives et économiques. Etendue
(44 km²), elle possède de nombreux quartiers, parfois éloignés du centre-ville (Balata) et
p
opulaires (Trenelle ou Texaco). Le nombre d’habitants de la ville s’élève à 77
410 habitants
en 2019
1
, un cinquième de la population
totale de l’île. Elle connaît
un déclin démographique
depuis les années 1990
2
, lié notamment au départ de jeunes actifs, qui
s’accompagne du
vieillissement de la population. Les moins de vingt ans représentent près de 21 % de la
population et les soixante-cinq ans et plus près de 22 %.
Evolution de la population de Fort-de-France par tranche d'âge
Source : Insee, RP2008, RP2013 et RP2018, exploitations principales, géographie au 01/01/2021.
1
INSEE, population légale 2019, paru le 29/12/2021
2
La ville comptait 100 080 habitants en 1990
0
5 000
10 000
15 000
20 000
0 à 14 ans
15 à 29 ans
30 à 44 ans
45 à 59 ans
60 à 74 ans
75 ans ou
plus
2008
2013
2018
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
7
1
LE CCAS DE FORT-DE-FRANCE EXERCE SES MISSIONS
AVEC DES MOYENS CONTRAINTS
1.1
Il exerce ses missions obligatoires et cible les populations vulnérables
et âgées
1.1.1
Une population marquée par des vulnérabilités sociales et des fragilités
économiques
La population de Fort-de-France combine des vulnérabilités sociales et des fragilités
économiques. En 2019
3
, son taux de pauvreté est de 24,7 %. Il est de 25 % pour la population
de plus de 75 ans, contre 10 % au niveau national et de 49 % pour les moins de 30 ans. Le
revenu médian
4
est de 19 690
€ en 2019, plaçant Fort
-de-France dans les 15 % des communes
où il est le plus faible.
En 2019, les prestations sociales représentent 11,2 % des revenus disponibles, contre 5,8 %
au niveau national. Les minimas sociaux en représentent 6,6 % contre 2,5 % au niveau
national. 44 % des ménages sont imposés contre 57,6 % en moyenne nationale et 39,2 % en
Martinique. En 2018, le taux de chômage de 24 % de la population foyalaise était élevé. Les
familles monoparentales représentent 25,9 % des ménages, contre 9,8 % au niveau national.
1.1.2
Une stratégie
à définir sur la base de l’analyse des besoins sociaux
et des
missions obligatoires exercées avec des moyens surdimensionnés
Le CCAS de Fort-de-France remplit les
missions obligatoires fixées par le code de l’action
sociale et des familles (CASF)
, notamment l’analyse des besoins sociaux
5
, l’accompagnement
des demandeurs dans l’élaboration de leurs demandes d’aid
es sociales
6
et la domiciliation des
personnes sans domicile stable
7
. Toutefois, des lacunes formelles restent à rectifier.
1.1.2.1
L
a stratégie du CCAS ne s’appuie pas sur l’analyse des besoins sociaux
L’analyse des besoins sociaux
: une exigence réglementaire
Les dispositions obligeant les CCAS à élaborer une analyse des besoin sociaux (ABS) sont
codifiées à l
’article R.
123-1
du code de l’action sociale et des familles
(CASF) :
3
INSEE, Revenus et pauvreté des ménages en 2019, Fichier Localisé Social et Fiscal, 2022
4
Revenu tel que la moitié de la population considérée gagne moins et l'autre moitié gagne plus.
5
Article R. 123-1 du CASF
6
Articles L. 123-5 et R. 123-5 du CASF
7
Article L. 264-2 du CASF
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
8
«
I. Les centres communaux et intercommunaux d'action sociale produisent une analyse des
besoins sociaux de l'ensemble de la population du territoire de leur ressort.
II.- L'analyse des besoins sociaux consiste en un diagnostic sociodémographique à partir des
données d'observation sociale du territoire. Ce diagnostic est établi avec l'ensemble des
partenaires, publics ou privés, qui participent à la mise en œuvre des actions de prévention et
de développement social telles que mentionnées à l'article L. 123-5.
III.- L'analyse des besoins sociaux fait l'objet d'un rapport présenté au conseil
d'administration au cours de l'année civile qui suit chaque renouvellement général des
conseils municipaux. Les années suivantes, des analyses complémentaires, notamment
thématiques, peuvent être présentées au conseil d'administration lors du débat d'orientations
budgétaires ou, à défaut, lors du vote du budget.
»
L
e centre communal d’action sociale (CCAS) de Fort
-de-France a produit une seule analyse
des besoins sociaux (ABS) en 2016. Elle répond trop partiellement aux attendus du CASF.
Elle a été réalisée par un prestataire extérieur, sans association des partenaires du CCAS. Cette
ABS est un portrait détaillé du territoire et des évolutions de la structure des ménages, de la
pauvreté, de la précarité, de
l’enfance,
des jeunes, des seniors et des personnes en situation de
handicap. Un livret thématique consacré à cette catégorie de la population a également été
élaboré.
Toutefois, l’ABS
n’
a pas été présentée au
conseil d’administration
comme le prévoit la
réglementation. Les constats
n’ont pas été partagés
avec les partenaires publics et privés du
CCAS. Certaines informations statistiques ont été reprises dans les rapports d’orientation
budgétaire
de l’établisse
ment.
L’ABS
n’a pas été
utilisée comme
outil d’aide à la décision
. Il
n’
a pas servi de socle à la définition des orientations stratégiques et des actions ciblées sur les
besoins identifiés qui en découlent.
En 2021, après le
renouvellement du conseil d’adm
inistration de 2020
, l’ABS n’a pas été
réalisée du fait de la crise sanitaire et des mouvements sociaux. Elle
ne l’a pas non plus été
car un projet de mutualisation avec les autres CCAS de la Martinique est en préparation. Cette
initiative
présente l’avantage de limiter les coûts et d’unifier les méthodologies.
Elle comporte
toutefois le risque de ne pas y associer les acteurs et partenaires locaux. Cette analyse,
désormais attendue
dans le courant de l’année
2022, devra être utilisée pour actualiser la
stratégie et le positionnement du CCAS de Fort-de-France.
Recommandation n°
1 :
Réaliser l’analyse des besoins sociaux prévue à l’article R.
123-1
du CASF
avec l’ensemble des partenaires et la présenter au
conseil d’administration
(régularité).
Recommandation n°
2 : Définir la stratégie du CCAS sur la base
de l’
analyse des besoins
sociaux (performance).
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
9
1.1.2.2
Le service des aides légales est surdimensionné
Le rôle du CCAS en
matière d’aides sociales légales consiste à recevoir les demandeurs
, à
constituer leurs dossiers
8
, puis à les
transmettre à l’autorité en charge de l
es instruire,
notamment la collectivité territoriale de Martinique (CTM). Dans ce cadre, l
’établissement
public participe
à l’instruction des
prestations de la compétence de la CTM, dont celles pour
les personnes âgées et handicapées.
Un service de dix agents assure cette fonction. Son activité se réduit, en particulier aux aides
pour les personnes âgées (APA) et aux allocations de solidarité aux personnes âgées (ASPA).
Ce service prépare les arrêtés de soins psychiatriques sans consentement, de domiciliation, de
recensement des personnes âgées isolées et
d’
obligations alimentaires.
Evolution du nombre de dossiers pour certaines aides légales.
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
APA
258
148
122
107
75
67
100
ASPA
51
24
25
26
12
14
23
Portage de
repas
12
11
25
4
0
1
2
Téléassistance
25
23
24
8
5
6
17
Admission en
Ehpad
85
73
117
109
58
73
115
Eligibilité/
actua.. RSA
109
62
21
14
21
27
Source
: Rapports d’activité du CCAS de
Fort-de-France (2015, 2016, 2017, 2018) et données complétées par
le CCAS pour les années 2019, 2020 et 2021
L
’activité du service décroît. En 2020, il
a géré 1 318 contacts relatifs aux aides légales contre
1
037 sur les dix derniers mois de l’année 2019.
Cela représente moins d’un contact tous les
deux jours travaillés par agent. Pour la chambre, la crise sanitaire ne permet pas de justifier
cet état de fait, même si e
lle s’est accompagné
e
d’une légère hausse de l’ordre de 6
% des
demandes. Le directeur c
onsidère, sans l’objectiver, que
la charge de travail a augmenté avec
la gestion des inscriptions en ligne assurées auparavant par la CTM.
La procédure de domiciliation
9
permet à toute personne sans domicile stable ou fixe, ayant un
lien avec la commune, d
e disposer d’une adresse administrative où recevoir son courrier et
faire valoir certains de ses droits et prestations. Le décret n° 2016-632 du 19 mai 2016 clarifie
et élargit la typologie des liens que peut avoir une personne avec une commune. Afin de
8
Conformément à l
’article L.
123-5 du CASF « [-]
L’établissement du dossier e
t sa transmission
constituent une obligation, indépendamment de l’appréciation du bien
-fondé de la demande
»
9
Articles L. 264-1, L. 264-2 et D. 264-1 et suivants du CASF
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
10
contribuer à établir un état des lieux sur le département, le CCAS doit rendre compte de son
activité en la matière
au représentant de l’État
10
, ce qui n’est pas fait.
Toutefois, les rapports
d’activité
annuels d
e l’
établissement recensent une partie de
l’information
. Ils font état de 31
demandes à ce sujet en 2019
11
et de 9
sur l’année 2020.
Domiciliations par le CCAS de Fort-de-France
2015
2016
2017
2018
2019
2020
« Sans résidence stable (inscrits) »
160
145
« Domiciliation »
45
47
31
9
Source
: Rapports d’activité du CCAS de Fort
-de-France
Compte tenu des besoins sociaux significatifs du territoire, la chambre
s’étonne de la faiblesse
du nombre de bénéficiaires suivis. Les locaux du CCAS, situés en centre-ville, sont les seuls
à accueillir le public depuis la crise sanitaire
. Elle constate qu’ils
ne sont pas repérables depuis
la rue.
1.1.3
L’action sociale facultative cible les foyers en grande précarité et la population
âgée
Chaque CCAS détermine
ses propres modalités d’intervention afin de développer les missions
qui lui sont confiées par la loi, à savoir animer
«
une action générale de prévention et de
développement social dans la commune en liaison étroite avec les institutions publiques et
privées
12
[-] »
fondée sur «
une analyse des besoins sociaux de l’ensemble de la population
du territoire du ressort du CCAS »
définie à l’article R.
123-1 précité du CASF.
Trois principes président à la détermination des actions engagées par le CCAS au titre de
l’action sociale facultative
13
: le principe de spécialité territoriale,
l’établissement
ne pouvant
intervenir qu’au profit des personnes résidant sur la commune ;
le principe de spécialité
matérielle,
le CCAS ne pouvant intervenir que sur la base d’acti
vités à caractère social ; le
principe d’égalité devant le service public
impliquant que toute personne dans une situation
objectivement identique a droit aux mêmes secours que tout autre bénéficiaire.
Ainsi, il centre son action sociale facultative sur les aides aux personnes âgées et aux
personnes précarisées et sur
l’information des populations.
Ces axes répondent à certains des
besoins identifiés dans
l’ABS
de 2016 tels le vieillissement de la population,
l’
isolement
croissant et la précarisation.
10
Article D. 264-8 du CASF
11
De mars à décembre 2019
12
Article L. 123-5 du CASF.
13
Pr
incipes rappelés dans le préambule du règlement de l’aide facultative adopté par délibération du conseil
d’administration le 24 mars 2016.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
11
1.1.3.1
Les aides facultatives
relèvent désormais d’un règlement
interne
Le dispositif d’«
aides aux personnes précarisées
» inclut notamment les
aides d’urgence,
alimentaires
, la prise en charge d’impayés (loyer et charges),
les aides ponctuelles
(déplacement/voyage en métropole, aménagement du logement). Il est géré par les services
du CCAS. A contrario, les
aides à l’enfance
le sont par le département «
enfance et éducation
»
de la commune de Fort-de-France. Les jeunes eux sont prioritairement dirigés vers la mission
locale. Le CCAS intervient cependant ponctuellement pour cette catégorie de bénéficiaires
quand ils sont précarisés.
Il appartient au conseil d’administration de déterminer les différents types de secours et d’en
définir les conditions d’attribution
, dont les plafonds applicables. Sur la période examinée, ils
ont été définis dans un
règlement de l’aide facultative adopté
le 20 mars 2018 et modifié le
26 octobre 2020
par délibérations du conseil d’administration
. Ce document offre une plus
grande
lisibilité à l’action sociale facultative du CCAS et g
arantit un traitement homogène des
demandes. Il
ne fait l’objet d’aucune diffusion auprès du public.
En 2020, 1
070 attributions ont été décidées, pour l’alimentation (467), l’équipement (123),
les det
tes de loyer (112), d’eau (100) et d’électricité (35), les billets d’avion (42)
et autres
interventions
14
(191). La part budgétaire des secours est en repli depuis 2018 et représente
10 % des charges de gestion en 2020.
Evolution du compte 656 «
secours
» (en euro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Secours
d’urgence
50 804
41 709
86 737
86 790
52 009
50 811
65 150
Aides
69 842
124 823
99 105
105 894
75 461
78 833
164 162
Autres secours
344 818
402 962
331 056
339 095
324 604
269 687
373 145
Total
465 464
569 493
516 898
531 779
452 074
399 331
602 457
% charges de
gestion du BP
10,9 %
12,5 %
12,3 %
13,4 %
10,8 %
10,2 %
17,2 %
Source : comptes de gestion
En 2019, 89 bénéficiaires ont bénéficié de 52 009 euros de
secours d’urgence
, soit en moyenne
584
€
. En 2020, ils étaient 74 et ont perçu chacun en moyenne 686 euros.
1.1.3.2
Un service logement non rattaché au CCAS
Le service «
Logement
» est rattaché à l’organigramme du CCAS depuis
2018. Ce choix
consiste à regrouper
l’action sociale et l’accompagnement social pour l’attribution des
logements sociaux par les bailleurs. Toutefois les sept agents de ce service sont rémunérés par
14
Funéraire, cantine, santé, amélioration de l’habitat, formation …
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
12
le budget de la commune. L
’ordonnateur reconnai
t que «
d’un point de vue juridique, cette
démarche n’est pas encore finalisée […].
Le transfert du personnel doit se faire avec l’accord
de chacun des agents.
».
Les rapports d’activité du CCAS font état de l’activité du service
logement. Ainsi en 2020, 804 demandeurs étaient inscrits au Fichier Municipal du Logement
et 125 personnes ont été
relogées durant l’année.
1.1.3.3
Une offre large et complémentaire de services sociaux et médico-sociaux en faveur
des personnes âgées
L’
«
aide aux personnes âgées
» est notamment déployée par trois services médico-sociaux
gérés par le CCAS : le service d
’
aide à domicile (SAAD), la
« Yole Gran Moun »
, ancien
foyer-
logement, désormais établissement d’hébergement pour personnes âgées (EPHA)
de
20 logements
et l’
« Espace Gran Moun » de 64 places, ouvert en 2012,
pour personnes âgées
dépendantes (Ehpad). Ces structures offrent une gamme large et complémentaire de services.
Ceux-ci répondent au vieillissement de la population de Fort de France, à la précarité et à
l’isolement croissant des personnes âgées mis en évidence dans l’analyse des besoins sociaux
de 2016 et dans les différents diagnostics portant sur le territoire.
Dès mars 2020, l’établissement a été mobilisé. Il s’est adapté au contex
te sanitaire pour
maintenir l’accueil des publics les plus fragiles, conserver le fonctionnement des services
indispensables et faire face aux besoins spécifiques. Ses interventions ont
permis d’assurer la
continuité d’activité et de soutenir les populatio
ns vulnérables et isolées.
L’insertion des
services médico-sociaux du CCAS dans les réseaux locaux et la cohérence, à renforcer
toutefois, de ses dispositifs en faveur des personnes âgées et dépendantes sont réelles. La
présence du médecin coordonnateur de
l’Ehpad, également en fonction au CHU de la
Martinique, a permis le déploiement de protocoles sanitaires actualisés.
Le versement aux agents du CCAS
des primes spécifiques à la crise du covid s’est fait
avec
les financements octroyés.
1.2
Une situation financière sous tension
En 2019, les dépenses du budget principal du CCAS de Fort-de-France représentent 52
€ par
habitant. Elles sont au niveau de la médiane des établissements de sa strate démographique
15
.
L’analyse de la
situation financière a porté sur les exercices 2015-2021.
15
Source : Cap sur les enjeux financiers portés par les CCAS et les CIAS, n° 13, octobre 2020,
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Pour la strate, le premier quartile est de
30 €
par habitant et le troisième quartile de
97 € par habitant
.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
13
1.2.1
L
’information budgétaire
, la fiabilité des comptes et la gestion des régies sont
perfectibles
La fiabilité des comptes des administrations publiques est un principe constitutionnel
depuis 2008 (article 47-2 de la c
onstitution). Les citoyens doivent disposer d’une
information générale, complète, lisible et fiable concernant les actions et les décisions
engageant les finances locales.
La sincérité des comptes publics locaux participe également de la
recherche d’une
allocation optimale des ressources. Sans sincérité comptable, le niveau de performance
de l’action publique ne peut être mesuré.
Les dispositions relatives au débat
d’orientation budgétaire s’appliquent aux établissements
publics administratifs des communes de 3 500 habitants et plus, conformément à
l’article
L. 2312-1 du CGCT. Dans ce cadre, un rapport sur les orientations budgétaires est
présenté chaque année au
conseil d’administration (
CA).
La publicité d
es documents d’information budgé
taire est insuffisante. Ils ne sont pas diffusés
sur le site internet en méconnaissance de
l’article L.
2313-1 du CGCT qui prévoit la mise en
ligne des notes explicatives de synthèse annexées au budget primitif et au compte
administratif. De plus, pour devenir exécutoires, les délibérations du conseil d’administration
doivent faire l’objet d’une publicité conformément à l’article L.
2131-1 du CGCT. La
diffusion sur le site internet, sans être exclusive, serait pour le CCAS la modalité la plus
efficace pour un accès permanent et gratuit du public à l’
information.
La fiabilité des comptes a été vérifiée. La chambre a relevé plusieurs manquements
significatifs.
D
’important
es dépenses
n’ont pas ét
é constatées et réglées
sur l’exercice budgétaire
correspondant.
A titre d’exemple,
les comptes du budget principal en 2020 contenaient
toujours un reste à recouvrer de 230 828,95
€
datant de 2013 sur le
budget annexe de l’
Ehpad,
qui n’avait toujours pas h
onoré sa dette. De la même manière, le CCAS engage les sommes
dues à la commune de Fort-de-France avec plusieurs années de retard. Ces pratiques font
courir des risques financiers à l’établissement.
Entre 2015 et 2019, l
’établissement n’a constitué
aucune provision. En 2020, il a provisionné
une somme de 71 826,89
€ pour dépréciation des comptes de tiers
sur son budget principal
16
.
Cette provision couvre le risque d
’une insuffisance
de paiement par une ancienne régisseuse,
suite à la mise en jeu de sa responsabilité de comptable délégué. Le CCAS ne constate pas
régulièrement ses pertes. Ainsi, les seules admissions en non-valeur réalisées sur
l’exercice
2020 sur son budget principal
, l’ont été
à hauteur de 22 786,78
€
, alors que la
délibération du cons
eil d’administration prévoyait
un montant de 61 827,50
€ pour l’
Ehpad et
de 94 972,73
€ pour l’Ehpa
.
Les comptes définitifs pour 2021 transmis en réponse aux
observations provisoires par l’ordonnateur montrent qu’aucune admission en non
-
valeur n’a
été réalisée en 2021.
1616
Délibération n° 34-2020
du conseil d’administration.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
14
Le CCAS dispose de deux régies de recettes
, pour le service d’aide à domicile et pour l’
Ehpad,
et de deux régies d’avances, pour les chèques d’accompagnement personnalisés et pour les
menues dépenses de l’
Ehpad. Leurs régisseurs «
sont soumis au contrôle du comptable public
assignataire et de l’ordonnateur ou de leurs délégués
»
17
. L
’instruction codificatrice n°
06-31-
A-B-M du 21 avril 2006 définit les règles relatives à l'organisation, au fonctionnement et au
contrôle des régies. Celles-ci prévoient
le contrôle sur place de l’ordonnateur ou de son
délégué
en particulier pour se prémunir des risques d’erreurs ou de fraude
. Or les régies du
CCAS ne sont pas contrôlées.
L’ordonnateur
a seulement produit des procès-verbaux de
vérifications effectuées par le comptable et expliqué que des contrôles étaient effectués, sans
pouvoir expliquer lesquels ni fournir de procédure écrite. L
a chambre relève également qu’en
l’absence de guide rappelant la réglementation, les documents à utiliser et les référ
ents utiles,
le
fonctionnement des régies n’est pas homogène.
1.2.2
Un équilibre financier de plus en plus précaire
Le budget du CCAS comprend un budget principal soumis à la nomenclature M14 et
deux budgets annexes relevant d’une autre nomenclature comptable (M22) pour l’Ehpad
d’une part et à l’ancien foyer
-
logement la Yole gran moun d’autre part. Le service d’aide à
domicile ne dispose pas d’un budget annexe propre (voir infra). En 2021, l’ensemble des
budgets agrégés s’élève à 7
596 339
€ en produits de gest
ion, dont 3,6
M€ pour le budget
principal, 3,5
M€ pour le budget de l’Ehpad et 0,5
M€ pour le budget de l’Ehpa. Les
principales données budgétaires sont reprises dans le tableau ci-dessous.
Poids de chaque budget en 2021
Source : compte de gestion
17
Article R. 1617-17 du CGCT.
47%
47%
6%
CCAS BP
EHPAD
EHPA
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
15
Structure du budget (arrondi à l’euro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Budget principal
Produits de
gestion (A)
4 646 288
4 171 022
3 945 400
3 501 512
4 116 657
3 812 265
3 591 506
dont dotations
3 894 304
3 478 324
3 157 641
2 654 375
3 306 353
2 923 806
2 851 709
Charges de
gestion (B)
4 259 620
4 539 721
4 218 386
3 970 465
4 170 187
3 930 700
3 500 709
dt charges de
personnel
3 476 628
2 991 184
3 498 929
3 220 576
3 532 377
3 254 143
2 715 388
Excédent brut
fonction. (A-B)
386 668
-368 698
-272 986
-468 952
-53 530
-118 435
90 797
CAF brute
477 364
-269 220
-269 930
-287 010
169 846
-64 311
91 221
Budget annexe EHPAD
Produits de
gestion - (C)
2 458 647
2 566 552
2 998 192
3 354 160
2 499 356
4 195 601
3 563 786
Charges de
gestion - (D)
2 476 969
3 195 530
2 954 232
2 960 490
2 921 222
3 003 141
3 560 546
Excédent brut
d'exploit- (C-D)
-18 322
-628 978
43 961
393 671
-421 866
1 192 460
3 239
CAF brute
-16 679
-315 974
46 823
388 708
-42 463
1 271 199
-255
Budget annexe EHPA
Produits de
gestion - (E)
426 264
379 676
372 871
367 953
514 856
531 572
464 048
Charges de
gestion - (F)
202 052
251 797
273 411
277 856
272 100
221 788
258 532
Excédent brut
d'exploit- (E-F)
224 212
127 879
99 460
90 097
242 756
309 785
205 516
CAF brute
224 212
126 642
99 460
90 612
312 377
169 689
105 125
Source : comptes de gestion 2015 à 2021
Le financement du CCAS repose avant tout sur la subvention communale. Elle représente
77 % des recettes de fonctionnement en 2019, contre en moyenne, 55 % pour les CCAS de la
même strate démographique que Fort-de-France
18
.
18
OFGL, «
Cap sur les enjeux financiers portés par les CCAS et les CIAS
», octobre 2020
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
16
Subvention de la commune de Fort-de-
France (arrondi à l’euro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Engagement
commune
3 300 000
3 250 500
3 100 000
2 950 000
2 950 000
2 800 000
NC
Compte 7474
3 300 000
3 250 500
3 096 000
2 654 375
3 195 830
2 800 000
2 720 830
Source : délibérations et comptes de gestion
Depuis 2015, celle-ci a baissé de 17,5 %, soit 3 % en moyenne par exercice. Cette tendance
n’est pas spécifique
à
l’établissement public foyalais
19
. Toutefois, sa situation est plus délicate,
dans la mesure où son principal financeur connait un déficit structurel de 61
M€
. Dans le cadre
du plan de
retour à l’équilibre budgétaire de la chambre régionale des comptes de l
a
Martinique, la commune de Fort-de-France est en effet soumise
à des mesures d’économie
drastiques. Elle a
signé avec l’Etat un
contrat de redressement en Outre-Mer (COROM). Dans
ce cadre, la baisse de la subvention au CCAS est un levier pour
l’amélioration de la situation
financière de la commune.
La part des produits de vente de biens et de services est de 20 % contre 21,5 % en moyenne
pour
ce type d’établissements publics
. Toutefois, ce résultat ne reflète pas la réalité dans la
mesure où les dépenses et recettes
du service d’aide à domicile
(SAAD), sont retracées dans
le budget principal. Après retraitement de ces derniers, en 2020, la subvention de la commune
représente 94 % des recettes du budget principal et un tiers des produits du budget consolidé,
incluant les établissements médico-sociaux.
Jusqu’en 201
5, l
’établissement
bénéficiait
d’une subvention
du conseil régional de près de
300 000
€ par an
pour la gestion de dispositifs d’action sociale en faveur des personnes en
difficulté. Puis, la collectivité régionale a signé avec la ville de Fort-de-France un contrat de
progrès afin
d’accompagner
cette dernière
dans sa démarche d’amélioration du cadre de vie,
de cohésion sociale et de prévention de l’exclusion
. Ce contrat prévoit un programme
pluriannuel de trois ans, et
une participation financière de la région d’un million d’euros par
an.
Le CCAS est partenaire dans ce programme et intervient au titre d’une action intitulée
«
rompre l’isolement
». Par ailleurs, il développe une action partenariale avec des acteurs
locaux et des associations. Elle repose sur
de l’appui humain et logistique,
sans générer de
produits retracés dans les comptes de l’entité.
Le budget du CCAS supporte d’
importantes charges de personnel en raison de ses activités
axées sur
l’
accompagnement des personnes en difficulté, âgées ou en situation de handicap.
Elles représentent 83 % des dépenses de fonctionnement du budget principal, contre 62,9 %
en moyenne nationale. Elles ont baissé de 1,3 % en moyenne par an de 2015 à 2020.
L
e montant des dépenses d’
investissement du CCAS et de ses établissements sociaux et
médicosociaux (ESMS)
est faible, ce qui s’explique en partie par
son objet social et par
19
«
L’atonie globale des budgets des CCAS
-CIAS est davantage liée aux choix opérés et aux contraintes
financières pesant sur le bloc communal depuis plusieurs années
. » OFGL, «
Cap sur les enjeux
financiers portés par les CCAS et les CIAS
», octobre 2020
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
17
l’absence de portage de biens immobiliers sur son budget. En outre,
il
n’a pas d’endettement
bancaire.
Dans les années à venir, la trajectoire financière de l’établissement devrait encore se dégrader,
sous l’effet de la baisse de la subvention communale, mais également des déficits structurels
des budgets annexes de l’E
hpad et du SAAD. Le premier est également exposé à des risques
d’impayés et le second subit une tarification des prestations décidées par la collectivité
territoriale de Martinique insuffisante pour couvrir le coût du service
jusqu’en 2021
. Ce
constat aurait déjà dû conduire le CCAS à de sérieuses difficultés de trésorerie, mais les
excédents de l’ancien foyer
-logement (Ehpa) permettent de la maintenir encore en 2020
20
.
Afin de conserver
son niveau d’intervention, le CCAS devra à l’avenir
rechercher
d’autres
ressources et développer des actions partenariales, mais il devra également maîtriser
l’évolution de sa masse salariale.
La trésorerie nette du CCAS au 31 décembre (en euro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Cpte 515
BP
972 659
552 218
1 193 516
918 391
1 077 336
1 247 777
1 489 480
dont BP
1 830 073
837 672
1 188 163
1 053 951
970 645
311 231
-189 369
dont Ephad
-857 414
-285 454
5 353
-135 560
97 000
-598 657
190 560
dont Ehpa
9 691
1 535 203
1 488 289
Cpte 515
Ehpa
732 812
800 402
983 590
1 125 156
1 332 228
Total
1 705 471
1 352 620
2 177 105
2 043 547
2 409 563
1 247 777
1 489 480
Source : comptes de gestion
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE _____________________
Pour répondre à des besoins sociaux importants, mais insuffisamment définis, le CCAS
de Fort-de-France doit formaliser une stratégie cohérente et ciblée et la partager. Pour ce
faire, la réalisation
de l’analyse des besoins sociaux à venir est une opportunité de consolider
des lignes stratégiques déjà ébauchées et d’évaluer certaines actions
au regard des besoins
renouvelés et de ses moyens contraints.
L’élaboration puis l’actualisation du «
règlement de l’aide sociale facultative
» ont
permis de clarifier les procédures et les leviers d’action
. Face à la crise sanitaire, le CCAS a
assuré la continuité de ses activités et de ses prestations. Ses actions ont été adaptées et il a
mis en place des dispositifs spécifiques au profit des habitants isolés et vulnérables.
20
En effet, le budget annexe du foyer-logement avait été géré avec un compte au trésor (compte 515)
autonome j
usqu’en
2019, dissous en 2020.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
18
La trajectoire financière du CCAS
se dégrade sous l’effet de la baisse durable
de sa
principale ressource, la subvention de la commune, et des déficits structurels de l
’
Ehpad et
du
service d’aide à domicile
, qui
mettent la trésorerie de l’établissement sous tension.
2
LE PILOTAGE
DE L’
ETABLISSEMENT EST A RENFORCER
2.1
La commune de Fort-de-France a été impliquée dans la gouvernance
du CCAS au-delà du cadre réglementaire
2.1.1
Un fonctionnement
du conseil d’administration
à parfaire
2.1.1.1
Une composition conforme aux dispositions réglementaires
Conformément aux dispositions de l’article
R. 123-7 du CASF
21
, la commune de Fort-de-
France a, dans sa séance du 15 avril 2014, fixé
à 17 le nombre d’administrateurs du CCAS,
soit le maire de Fort-de-France, président de droit, huit conseillers municipaux et huit
membres non élus nommés par le maire. La réglementation prévoit que parmi ces derniers
doit figurer «
un représentant des associations qui œuvrent dans le domaine de l'insertion et
de la lutte contre les exclusions, un représentant des associations familiales désigné sur
proposition de l'union départementale des associations familiales, un représentant des
associations de retraités et de personnes âgées du département et un représentant des
associations de personnes handicapées du département
. »
22
. Ce critère est respecté. Les
membres nommés doivent parti
ciper à des actions de prévention, d’animation ou de
développement social menées dans la commune.
La chambre constate toutefois que les représentants au titre des associations de personnes
âgées et retraités, d’une part, et des associations familiales, d’autre part, n’ont pas siégé une
seule fois au conseil d’administration du CCAS
sur la période 2015-2020. Le Maire
n’a pas
utilisé sa faculté de les déclarer démissionnaires
d’office
23
. En 2020, les nouveaux membres
représentant les associations sont davantage présents. Une administratrice, ancienne
représentante élue de la majorité municipale, siège désormais au titre des associations de
personnes âgées. La publicité sur le renouvellement du
conseil d’administration (
CA)
n’est
21
« Le conseil d'administration du centre communal d'action sociale est présidé par le maire. Il
comprend en nombre égal, au maximum huit membres élus en son sein par le conseil municipal et
huit membres nommés par le maire parmi les personnes non membres du conseil municipal
mentionnées au quatrième alinéa de l'article L. 123-6. / Le nombre des membres du conseil
d'administration est fixé par délibération du conseil municipal.»
22
Article L. 123-6 du CASF
23
Article R. 123-14 du CASF
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
19
pas attestée, notamment
parce qu’il n’y a pas eu d’affichage public
24
. Seule
l’Union
départementale des associations familiales a proposé un candidat. Il
n’est
donc pas certain que
les «
associations qui
œuvrent
dans le domaine de l'insertion et de la lutte contre les
exclusions, les associations de retraités et de personnes âgées et les associations de personnes
handicapées
» aient proposé «
au maire une liste comportant, sauf impossibilité dûment
justifiée, au moins trois personnes répondant aux conditions prévues par le quatrième alinéa
de l'article L. 123-6
». L
’équilibre paritaire
au sein du
conseil d’administration
est ainsi
affaibli.
La commission permanente
25
, prévue par le règlement intérieur, respecte le principe de parité.
Sa mission est «
d’attribuer les aides servies par
le CCAS ; de gérer certains dossiers entre
la convocation de deux conseils d’administration
; de prendre toute disposition pour faire
face aux situations d’urgence
».
2.1.1.2
Des irrégularités à corriger
Ledit règlement fixe les modalités de fonctionnement du co
nseil d’administration (CA).
Depuis 2015, il a été revu, ce qui démontre une appropriation progressive des modalités
propres à la gouvernance d’un CCAS. L’actuel,
transmis au contrôle de légalité le 4 août 2020,
déroge au droit commun. En cas d’absence de
quorum, le CA doit être convoqué trois jours
après. «
En cas d’urgence
», un délai franc d’un jour, sans quorum et avec une possibilité de
modification de l’ordre du jour, suffit.
A l’exception de l’
année 2020, en raison de la crise sanitaire, le CA
s’est réuni au moins une
fois par trimestre. Le directeur, qui assiste à ses séances, en assure réglementairement
désormais le secrétariat
, ce qui n’a pas été toujours le cas.
Certaines décisions ont été prises dans des conditions ne respectant pas les délais
réglementaires de convocation.
Lors d’une réunion l
e 7 décembre 2015 à 10h pour approuver
un protocole transactionnel
, l’absence de
quorum a été constatée. Une nouvelle réunion a eu
lieu le même jour à 14h. Or pour délibérer valablement, le président devait reconvoquer ses
membres, en respectant un délai de trois jours. Le caractère d’urgence ne permet pas de
déroger à ce délai.
Bien que le CCAS justifie la disposition par la nécessité de répondre à certaines situations
d’urgence
, la chambre considère
qu’elle n’est
conforme à la réglementation applicable aux
CCAS. Elle demande donc
au conseil d’administration de modifier
son règlement intérieur.
24
Article R. 123-11 du CASF, «
dès le renouvellement du conseil municipal, les associations
mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 123-6 sont informées collectivement par voie d'affichage
en mairie et, le cas échéant, par tout autre moyen, notamment par voie de presse, du prochain
renouvellement des membres nommés du conseil d'administration du centre d'action sociale ainsi
que du délai, qui ne peut être inférieur à quinze jours, dans lequel elles peuvent formuler des
propositions concernant leurs représentants »
25
Article R. 123-19
25
du CASF
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
20
Ce dernier règle par ses délibérations les affaires du CCAS. Il fixe notamment les différentes
prestations en nature et/ou en espèces, remboursables ou non, ainsi que les critères et
conditions d’octroi de celles
-ci.
En 2015, le CA a octroyé une subvention de 65 000
€
à une association
26
dont le représentant,
qui n’a pas siégé pendant t
oute la période sous revue, était, au titre des personnes âgées et des
retraités, un de ses membres.
Un membre du collège des élus, et de la commission permanente
27
qui statue sur les aides
facultatives, est par ailleurs coordinateur recouvrement
d’une régie communautaire
. Or cette
dernière
perçoit une somme significative au titre des secours d’urgence.
Ses décisions
d
’attribution des secours sont génériques et globales.
La participation de cet administrateur
n’est pas systématique, mais avérée d’une à trois fois par an
. Sa présence pourrait le placer
dans une situation de
conflit d’intérêt
s
28
. Aussi la chambre invite le
conseil d’administration
à prévenir ce risque pour
toutes les décisions d’attribution d’aide
concernant
l’
employeur de
l’intéressé
.
L’ordonnateur s’
y est engagé
sans démontrer la mise en œuvre dans sa réponse
aux observations provisoires.
2.1.2
Le CCAS, un établissement public administratif autonome, intégré comme un
simple service au sein de la commune
2.1.2.1
Des délégations de signature désormais conformes à la réglementation
Selon l’article
123-21 du CASF, «
le conseil d'administration peut donner délégation de
pouvoirs à son président ou à son vice-président dans les matières suivantes :1° Attribution
des prestations dans des conditions définies par le conseil d'administration
[…]
». Celui du
CCAS de Fort-de-France délègue son pouvoir «
au président ou au vice-président
» pour
l’ensemble des matières déterminées à l’article
R 123-21 du CASF, mais a limité les
attributions de l’ordonnateur
«
…aux
cas d’urgence et pour un montant ne dépassant pas
2 500,00
€
».
Pour la période 2014 à 2020, une administratrice a reçu délégation du Premier adjoint au nom
du Maire
29
Celle-ci a fait usage de ce pouvoir, non conforme à la réglementation
30
, pour
plusieurs engagements, dont certains excédaient les attributions du président du conseil
26
La subvention
n’
a par la suite pas été versée, ayant
fait l’objet d’un mandat d’annulation.
27
En 2014 et renouvelé à ces fonctions en 2020
28
L’article 2 de la loi n° 2013
-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique
dispose que «
constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et
des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice
indépendant, imp
artial et objectif d’une fonction.
».
29
Arrêté n° 60-14 portant délégation de signature en date du 18 septembre 2014 «
en cas d’absence ou
d’empêchement du président délégué du CCAS » pour « signer tous les actes relatifs au bon
fonctionnement du Centre Co
mmunal d’Action Sociale
».
30
Article R 123-23 du CASF, «
le président du conseil d'administration […] peut, sous sa surveillance
et sa responsabilité, déléguer une partie de ses fonctions ou sa signature au vice-président et au
directeur
»
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
21
d’administration
31
. Celui-ci souligne que la bénéficiaire «
était également ordonnateur-
adjoint de la commune de Fort-de-Fra
nce et avait, de ce fait, l’entière confiance du Maire
».
Pour lui, il
s’agissait de permettre «
plus de réactivité et d’efficacité du service public à la
personne et aux familles dans un contexte social tendu en permanence.
». Cette situation a été
régularisée en 2020.
Le directeur du CCAS dispose également
d’une délégation de signature
pour les actes de
gestion administrative courante et ne relevant pas des matières déléguées par le conseil
d’administration au Président ou au Vice
-Président. Les pièces comptables portant liquidation
des dépenses relevant des ordonnateurs suppléants en sont ainsi exclues.
2.1.2.2
Le CCAS est
intégré à l’organigramme municipal
Le CCAS est
dans l’
organigramme municipal, plus précisément rattaché à la «
direction
actions sociales
» au sein du département «
politiques sociales et vie des aînés
» de la
«
direction générale des politiques sociales et territoriales et vie des aînés
». Le centre dispose
de cinq services et d’une cellule rattachée spécifiquement à son directeur.
D’aprè
s son contrat de travail, celui-ci dépend hiérarchiquement du directeur général des
services (DGS) et du directeur général adjoint (DGA), ce qui est également le cas des autres
agents
et est susceptible d’entretenir la confusion entre les services communaux et ceux de
l’établissement public.
Cette situation est également illustrée par le rattachement au CCAS
du service logement dont les agents sont pourtant rémunérés sur le budget principal de la
commune sans convention de mise à disposition.
Cette situation doit faire l’objet d’une
régularisation.
2.1.3
Une mutualisation de fait, sans contreparties financières, à formaliser pour
plus de transparence dans une convention avec la commune
Les a
ctions du CCAS s’inscrivent pleinement dans
les orientations de la commune. Cette
cohérence est obtenue par une mutualisation des moyens souhaitables mais avec une mise en
œuvre irrégulière
.
La commune met à disposition
de l’établissement
ses fonctions support. Cette organisation est
un levier d’efficience dans la mesure où elle limite les coûts de cette petite structure et permet
des économies d’échelle. Le CCAS
bénéficie ainsi, de logiciels communs pour la gestion des
ressources humaines et des finances et de la mise à disposition gratuite du bâtiment de
l’ancienne école Trenelle
, propriété de la commune. En centre-ville, cette dernière loue
également pour le compte du CCAS le site de Garnier-Pagès, sans délibération et convention
d’occupation.
Les
dépenses d’entretien des deux sites sont également
prises en charge par la
commune.
31
Deux exemples
: le renouvellement d’un contrat de travail court pour un accroissement temporaire de
l’activité accordée à la responsable de l’Ehpad, et ce après échéance de la délibération créant le poste
de cette dernière. La prise en charge d’un secours
de billets d’avion pour un montant de 2
900
€.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
22
La chambre constate que ces mises à disposition de services et de locaux se font sans
contreparties financières. Elles ne sont pas encadrées par une convention
32
entre les deux
entités qui listerait les avantages en nature, les valoriserait et établirait les règles de
remboursement. Cette situation a pour conséquence un manque de clarté. Hormis le montant
de la subvention de la commune de Fort-de-France, l
’effort financier ré
el de la collectivité
n’est pas connu
.
La chambre recommande au CCAS
d’é
tablir avec la commune une convention pluriannuelle
d’objectif
s et de moyens. Elle permettra, en toute transparence, de fixer les objectifs de
l’établissement
et de déterminer le nive
au de l’effort de maîtrise des charges attendu pour
respecter la trajectoire de redressement financier de la commune de Fort-de-France.
Recommandation n°
3 :
Etablir une convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens
entre la commune et le CCAS (Performance)
2.2
La gestion des ressources humaines est partagée avec la commune
2.2.1
La GRH présente certaines irrégularités, pour partie transposées de la
commune
2.2.1.1
Des instances du dialogue social mutualisées
Conformément à la réglementation
33
, les délibérations concordantes du conseil municipal et
du conseil d’administration de l’établissement
ont mis en œuvre
le rattachement des instances
du dialogue social du CCAS. Le directeur général des services assure la responsabilité des
relations avec les organisations syndicales. Les délibérations sont appliquées par décision
concordante du CA. En revanche,
l’établissement
assure directement la constitution et le suivi
des dossiers de ses agents. Les évènements de carrière des agents titulaires, les contrats des
agents contractuels, les formations et les comptes rendus
d’entretiens professionnels des
agents rémunérés figurent dans leurs dossiers.
A partir d’
un échantillon de dix-huit dossiers,
la chambre s’est
assurée de la tenue effective et de bonne qualité des dossiers de ceux-ci.
L’effort d’o
ptimisation et de rationalisation des instances du dialogue social ne prend pas en
compte les spécificités du CCAS. Pendant la période sous revue, un seul de ses adjoints
administratifs
a bénéficié d’une évolution de grade par inscription sur liste d’aptit
ude. De plus,
aucun agent susceptible de relever des corps des filières sociale ou médico-
sociale n’est
titulaire de la fonction publique territoriale, aucun recrutement par concours ou examen
professionnel n’ayant été organisé.
32
Une convention cadre applicable au 2 mai 2011 et valable pour trois ans avait formalisé ces relations
entre le CCAS et la commune. Elle n’a pas été renouvelée.
33
Articles 32 pour le comité technique, 33-1 pour le CHSCT et 28 pour les commissions administratives
paritaires de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale, dans sa rédaction en vigueur en 2015 et jusqu’au 8
août 2019.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
23
La loi n° 2019-828 du 6 août
2019 de transformation de la fonction publique fixe l’obligation
pour les employeurs publics de définir des lignes directrices de gestion selon les modalités
définies par le décret n° 2019-1265 avant le 31 décembre 2020.
L’étab
lissement ne souscrit
pas encore à cette obligation. Celles définies pour la commune ont été soumises au conseil
municipal en décembre 2021.
L’ordonnateur
du CCAS
s’est engagé à tenir compte des
spécificités des métiers médico-sociaux pour leur transposition à son établissement, sans
démontrer la mise en œuvre dans sa réponse aux observations provisoires.
Le CCAS
n’a pas élaboré de stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines. En
matière de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC) et
de valorisation des parcours professionnels, il fait pourtant face à des enjeux propres.
2.2.1.2
Aucun bilan social annuel produit depuis 2017
Pour la période sous revue, seul le bilan social 2017 a été transmis. Le rattachement au comité
technique de la commune a mis fin à la publication
d’un rapport spécifique
. Or, la production
du rapport social unique constitue une obligation désormais annuelle
34
. Aussi
, l’information
et la
communication sur l’évolution des ressources humaines et sur
certains enjeux propres à
l’établissement
sont quasi inexistantes
35
. Compte tenu de l’importance de
s ressources
humaines, de la spécificité de certains des métiers et de la prépondérance du poids de ces
charges et cotisations dans le budget, la
présentation d’un bilan social s’impose et offre au
conseil d’administration les éléments nécessaires à ses débats
.
2.2.1.3
Des mises à disposition
d’agents entre le CCAS et la commune
sont partiellement
retracées dans les comptes
Au 31 décembre 2020, un adjoint administratif était encore mis à disposition de la commune,
sur la base d’une
convention périmée, signée le 9 mai 2019 et pour une période
« à compter
du 1
er
septembre 2016 pour une durée de 3 ans »
. Au surplus,
l’établissement n’a pas sollicité
le remboursement prévu de la rémunération de cet agent
36
.
En parallèle, la commune a émis cinq titres
de recettes d’un montant total de
167 718,13
€
pour obtenir le remboursement de celle
d’un agent mis
à disposition du CCAS entre
2013 à 2017. Au 31 décembre 2020, le CCAS lui devait encore 156 849,62
€.
Dans son
compte administratif de la même année, c
ette somme a fait l’objet
d’un
rattachement partiel
de 110 698,19
€
37
, et son mandatement a eu lieu le 24 novembre 2021.
L’établissement
doit
34
Article n° 9 bis A de la loi n° 83-634 et du décret n° 2020-1493 du 30 novembre 2020 relatif à la base
de données sociales et au rapport social unique dans la fonction publique, figurant désormais aux
article L. 231-1 à L. 231-4 du code général de la fonction publique
35
C
ertains axes sont mentionnés dans les rapports d’orientation budgétaire. Toutefois
, les annexes des
documents budgétaires sont manquantes ou incomplètes.
36
S
elon l’article
5 de la convention de mise à disposition «
la ville de Fort-de-France remboursera au
Centre Communal d’Action Sociale l’intégralité du montant de la rémunération et des charges
sociales
».
37
Au compte 671-8 «
autres charges exceptionnelles sur opération de gestion
».
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
24
donc encore à la commune 46
151,43 €
. Ainsi les charges de personnels du CCAS de 2015 à
2018 ne retracent pas cette dépense.
2.2.1.4
Un temps de travail pour les agents inférieur à la réglementation
Les agents du CCAS de Fort-de-France travaillent sur la base de trente-cinq heures
hebdo
madaires, correspondant aux horaires d’ouverture au public.
Ceux
de l’E
hpad font des
journées de sept heures. Les aides à domicile sont rémunérées à l’heure travaillée.
Le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 transpose à la fonction publique territoriale les règles
applicables à l’État fixant la durée annuelle du travail à 1
607 heures sur la base d’un temps
de travail hebdomadaire de 35 heures
. L’établissement ne respecte pas ces dispositions
, dans
la mesure où il applique le cadre communal
38
. En effet, outre les jours fériés et chômés
nationaux et propres à la Martinique (le 22
mai pour l’abolition
de l’esclavage), la commune
a accordé en 2020 à ses agents «
pour tenir comptes des usages et des coutumes locales
»,
plusieurs jours supplémentaires
39
et un jour de congé exceptionnel le 13 juillet. En
conséquence, le temps de travail effectif est de 1 561 heures, ce qui équivaut à une perte de
2,1 équivalents temps plein pour le CCAS (base 2020).
2.2.1.5
Un congé illégal pour les agents partant à la retraite
Jusqu
’à fin
2020, la commune de Fort-de-France accordait deux mois de congés payés à
l’agent partant à la retraite
en plus des congés annuels et réglementaires. Ce régime irrégulier
a été transposé au CCAS, sans délibération de son
conseil d’administration.
Il représente une
charge indue
pour l’établissement. A titre d’exemple, s
ept agents au moins en ont bénéficié
entre mars 2017 et novembre 2020, pour un coût employeur de 67 931
€.
Selon l
’ordonnateur,
ce congé n’a plus été attribué depuis le 1
er
janvier 2021 conformément à
la recommandation de la chambre dans son dernier rapport d’observations définitives sur la
commune de Fort-de-France. Toutefois, dans la mesure où
aucun départ à la retraite n’est
intervenu au CCAS (hors aide-ménagère), la chambre attire
l’
attention de ce dernier sur la
nécessité de respecter le cadre légal.
2.2.1.6
Une prime non-réglementaire versée aux aides à domiciles pour leur départ en
retraite
Une prime exceptionnelle est versée aux aide-
ménagères à l’occasion du départ à la retraite.
Elle ne dispose pas de base légale en application du principe de parité du régime indemnitaire
des agents avec celui des fonctionnaires d’État conformément à l’article
88 de la loi du
26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
38
Décision n°S-30/01/2020-154
39
Trois jours pour le carnaval, le vendredi saint et trois après-midi (veilles du vendredi saint, du 24
décembre et du 31 décembre).
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
25
Un relevé de décision de réunion syndicale signé par le président du CCAS, le 18 mai 1998
mentionne un «
Accord pour une prime exceptionnelle de départ [à la retraite]
[…]
conformément aux dispositions du code du travail
»
40
.
Depuis 2015, au moins huit aides ménagères en ont bénéficié pour un coût pour
l’établissement
de 33 866,11
€. Ce montant équivaut à plus de 1
830 heures facturées
d’aide
à domicile, soit la prise en charge de cinq usagers pendant un an à raison de huit heures par
semaine.
L
’article
29.2, titre IV, chapitre VI de la convention collective nationale de la branche de
l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile du 21
mai 2010 fixe, à des
conditions plus favorables que celles du CCAS, le montant de
l’indemnité conventionnelle de
départ en retraite ou de mise à la retraite. Toutefois, la chambre constate que ni le droit du
travail ni cette convention collective ne trouvent à s’appliquer en l’espèce
. Le CCAS est en
effet un établissement public administratif communal.
L
’établissement
a fait valoir que «
l'indemnité versée est un avantage acquis lors d'une
revendication syndicale. […] En conséquence, à ce jour, il n'est pas prévu de date de fin.
».
Pour la chambre, ce dispositif ne peut être assimilé à un «
avantage collectivement acquis
»,
dans la mesure où sa
date de mise en œuvre
est postérieure à celle du statut de la fonction
publique territoriale. Elle demande donc au CCAS de mettre fin à ce régime coûteux et
irrégulier.
Recommandation n°
4 : Mettre fin au régime de prime de retraite, dénué de base
réglementaire, aux aides ménagères (régularité)
2.2.2
Un excès de recours aux emplois de contractuels
2.2.2.1
Depuis 2015, 98
% des recrutements réalisés l’ont été par contrat
Du 1
er
janvier 2015 au 31 décembre 2021, le CCAS a procédé à cinquante recrutements, dont
49 sous contrats. Parmi ceux-ci, se trouvent 15 aide-ménagères pour le SAAD et 21 agents
pour l’E
hpad, dont six agents de restauration et hébergement. Dans le budget de
l’établissement, la
rémunération des non-titulaires représentait 45 % du total des
rémunérations en 2019, contre 10,5 % en moyenne au plan national.
L’affectation au budget
principal des aides ménagères, toutes contractuelles, ne permet pas à elle seule de justifier cet
écart à la moyenne.
La loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 assouplit les conditions de
recrutement des agents contractuels dans le respect du principe d’égal accès à l’emploi public.
40
-
¼ mois de salaire après 5 ans d’ancienneté
;
½
«
«
10 ans
«
«
1 mois
«
«
15 ans
«
«
1 mois ½
«
20 ans
«
«
2 mois
«
30 ans
«
«
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
26
Celui-ci prévoit que les emplois permanents sont occupés, sauf dérogation, par des
fonctionnaires. Or,
la chambre constate qu’une part importante
des emplois permanents est
occupée par des agents non titulaires. En novembre 2021, ils ne représentent que 31 % des
agents rémunérés par le CCAS, tous budgets confondus. A l’E
hpad, ils ne représentent que
6 %.
L
e directeur explique la prévalence de l’emploi contractuel à l’Ehpad
par des recrutements en
l’absence de concours ouvert sur les catégories d’emploi des métiers médico
-sociaux, en
particulier pour les auxiliaires de soins territoriaux. Le CCAS a préféré ne pas en organiser,
dans la crainte que les agents contractuels en fonction ne le réussissent pas.
Ceux-ci
bénéficient pour partie de l’extension des avantages et des indemnités servis aux
agents titulaires. La prime de 40 % dite «
de vie chère
» leur
est versée à l’exception
toutefois
des aide-
ménagères et des agents de renfort de l’Ehpad.
2.2.2.2
Un recours systématique aux recrutements de non titulaires entaché
d’irrégularités
La publication des postes est une obligation qui a été formellement respectée pour trois
recrutements de cadres examinés. Toutefois dans un cas, le calendrier de publication de la
fiche de poste a limité sa portée pratique
en termes de transparence et d’égal accès à l’emploi
public. En effet, elle est intervenue neuf jours calendaires avant la signature du contrat, ce qui
montre que le processus de recrutement était déjà finalisé.
Aussi, le CCAS doit veiller à respecter les dispositions du décret n° 88-145 du 15 février 1988
modifié concernant les modalités de publication des postes. Il doit également être en capacité
de prouver le caractère infructueux de sa recherche d’un fonctionnaire lorsqu’il souhaite
recruter un agent contractuel sur la base de l’article
3-3 de la loi du 26 janvier 1984 portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale codifié depuis le 1
er
mars
2022 aux articles
L. 332‐8, L. 332‐9 du code général de la fonction publique.
De plus, l
’établissement
fait un usage fréquent de contrats pour faire face à des besoins
temporaires au titre de l’article
3-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique territoriale codifié depuis le 21 novembre 2021. Il est inadapté
dans certains dossiers examinés.
Le poste de chargé de mission «
en charge de la coordination de la gestion et du
fonctionnement de l’espace la Yole Gran Moun comprenant un Ehpad de 64 places et un Ehpa
de 20 logements
» a été créé pour trois ans par la délibération n° 30/2014 du 25 septembre
2014. Il a été pourvu par un contrat de trois ans à compter du 1
er
octobre 2014 sur la base de
l’article 3
-
3 de la loi du 26 janvier 1984. A l’issue
de la période, l
’agent
, identifié dans
l’organigramme
comme «
directrice
» de
l’
espace, a bénéficié de deux renouvellements
respectivement de trois mois à compter du 1
er
octobre 2017 puis d’un mois à compter du 1
er
janvier 2018 «
pour faire face à un accroissement temporaire d’activité
». Ses conditions de
rémunérations n’ont pas changé
. Dans un autre exemple, le «
responsable gestion des
établissements et structures (Ehpad-Ehpa)
» a bénéficié de trois CDD
d’un an également
fondés sur l’article 3
-1 de la loi du 26 janvier 1984 alors que ce poste ne répond manifestement
pas à un besoin temporaire mais bien à un besoin permanent d
e l’établissement.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
27
Les besoins
d’agents de renfort pour le service d’aide à domicile et pour l’Ehpad donnent lieu
à des recrutements fréquents. Ils ne peuvent pas toujours être rattachés à une vacance
ponctuelle d’un emploi ou à une augmentation de l’acti
vité. Une aide à domicile a ainsi
bénéficié de quatorze contrats
successifs et sans interruption d’août 2016 à avril 2022, sur le
fondement du 3-2 (deux mois) puis du 3-1 de la loi précitée.
La précarité des aide-ménagères récemment recrutées contraste avec la situation des agents
employés de longue date par le service d’aide à domicile
. Elles
bénéficient d’un
CDI,
rémunéré à la vacation. Une grille de rémunération propre à ces emplois a été modifiée le
18 mai 1998 suite à une négociation avec les organisations syndicales. La rémunération de
certains agents est
fixe en nombre d’heures et à un niveau plafond. Trois agents sont
rémunérés alors qu’ils n’interviennent plus à domicile pour des restrictions de santé. En
octobre 2021, le montant, cotisations employeur comprises, correspondant à ces trois salaires
était de 9 456
€, soit près de 20
% du déficit constaté du SAAD. Ces agents qui ont entre 53
et 63
ans, pourraient utilement bénéficier de mesures de reclassement. A l’inverse, le
recrutement et la rémunération des aide-ménagères recrutées depuis 2015 sont précaires. Alors
que les contrats sont signés pour des «
temps complets
», elles sont rémunérées
à l’heure
travaillée.
Recommandation n°
5 : Appliquer les critères de recours aux contractuels prévus au
code
général
de
la
fonction
publique
(régularité
-
articles L. 332-8 à L. 332-14 et L. 332-23)
41
2.2.2.3
Cette gestion présente des risques juridiques et financiers
Plusieurs risques sont associés à ces modalités de recrutement. Le CCAS doit anticiper, pour
la gestion des agents non titulaires, les possibles droits à CDI
et les indemnisations d’un
préjudice en cas de licenciement, et donc les recours éventuels. En effet, il incombe au juge
administratif «
pour apprécier si le recours à des contrats à durée déterminée successifs
présente un caractère abusif, de prendre en compte l'ensemble des circonstances de fait qui
lui sont soumises, notamment la nature des fonctions exercées, le type d'organisme employeur
ainsi que le nombre et la durée cumulée des contrats en cause.
»
42
.
Les contrats des aide-ménagères signés le sont pour un temps complet alors que les agents
sont rémunérés à la vacation. L
’écart de rémunération peut s’avérer significatif.
Ainsi, la
chambre constate que les treize contrats courts signés en janvier 2020 ont donné lieu à des
41
Code général de la fonction publique conformément à l’ordonnance n°
2021-1574 du 24 novembre
2021
- Contrats conclus pour répondre à des besoins permanents (Articles L 332-8 à L. 332-12)
- Contrats conclus pour répondre à des besoins temporaires sur emploi permanent (Article L. 332-13
(remplacement de fonctionnaire) et L. 332-14 (vacance temporaire))
- Cont
rats conclus pour accroissement temporaire d’activité (Article L.
332-23)
Anciennes références : Article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique territoriale, modifié par loi n° 2019-828 du 6 août 2019 et abrogé par
l’ordonnance n°
2021-1574 du 24 novembre 2021.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
28
rémunérations au mois de janvier à hauteur de 1 871 heures, soit 92 heures de moins que
prévues.
L’ordonnateur
fait valoir qu’il s’agit «
d’une erreur purement «
matérielle »
» et
s’engage à «
modifier par avenant le titre des contrats concernés
», ce dont la chambre prend
note. Il convient de relever par ailleurs
qu’auc
une aide-
ménagère n’est titulaire
de la fonction
publique territoriale
43
. Payées sur une base horaire, elles ne bénéficient pas de la prime dite
«
de vie chère
».
Le CCAS assure la prise en charge des allocations chômage en fin de contrat. Le nombre de
CDD constitue donc
un risque financier pour l’établissement. L’examen des aides au retour à
l’emploi versées durant la période sous revue
montre qu
’il
a été
maîtrisé, à l’
exception des
agents concernés
de l’Ehpad. La chambre
invite le CCAS à constituer une provision pour
risque à hauteur des indemnisations effectivement dues. En outre, les agents en contrats courts
depuis le 1
er
janvier 2021 sont éligibles à une indemnité de fin de contrat
44
conformément à
l’article
136 modifié de la loi du 26 janvier 1984 et à
l’article
39-1-1 du décret n° 88-145 du
15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale.
Enfin, la mise en place et le renouvellement de contrats courts mobilisent les équipes
administratives du CCAS sans garantir la fidélisation et la montée en compétence des agents
recrutés.
Pour la chambre, la pratique du recours quasi exclusif aux recrutements de non titulaires sur
des contrats précaires fait non seulement prendre des risques financiers à
l’établissement
, mais
traduit également sa mauvaise gestion des ressources humaines, fonction pourtant essentielle
à la qualité des services rendus.
2.2.3
Certains défis en matière de GRH sont propres au CCAS
Le CCAS est face à une perspective de rotation rapide de son effectif. En décembre 2020, leur
moyenne d’âge (hors
Ehpad et Ehpa) était supérieure à 55 ans, contre 46 ans
45
au niveau
national. Seuls quatre agents sur les soixante-dix-neuf rémunérés sur le budget principal ont
moins de quarante-cinq ans, soit 5
% de l’effectif.
L’établissement
a bien identifié l’opportunité des départs à la retraite pour adapter ses
recrutements à ces besoins en compétence. Le
rapport d’orientation budgétaire 2021
le
souligne «
nous devons mettre en place une stratégie de non-remplacement lorsque cela ne
s’impose pas. Ce non
-renouvellement doit nous permettre de dégager de nouvelles sources
d’économie mais aussi d’adapter les compétences aux nouveaux besoins en redéfin
issant les
profils des agents.
». Le COROM de la commune de Fort-de-France prévoit un taux de
remplacement de 29 % des départs
d’agents
pour le CCAS
46
.
Au-
delà d’
une stratégie de non-remplacement des départs à la retraite,
l’établissement
doit
mettre en place une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
(GPEC) au service de ses objectifs stratégiques et opérationnels. Elle devra intégrer les enjeux
43
Le
cadre d’emploi d’agent social territorial
pourrait être appliqué
44
Articles L. 554-3 à L. 554-4 du code général de la fonction publique
45
OFGL, «
Cap sur les enjeux financiers portés par les CCAS et les CIAS
», octobre 2020.
46
Annexe 3.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
29
spécifiques des métiers sociaux et médico-sociaux. Les besoins en formation, la prévention
des risques liés à l’inaptitude physique et les modalités de reclassement s
eront à aborder.
Par ailleurs, l
’établissement
a accepté en 2020 une rupture conventionnelle pour une aide-
ménagère contractuelle. La procédure fixée par le décret n° 2019-1593 a été respectée.
L’indemnité de
rupture conventionnelle a été octroyée au seuil de la fourchette fixée par le
décret n° 2019-
1596. L’agent vacataire disposait d’une ancienneté supérieure à 28
ans et a
ainsi bénéficié
d’un montant de
19 663,21
€.
La convention a été signée le 15 décembre 2020,
pour une date de fin de contrat au 30 novembre 2020. Toutefois, cet agent
s’est vu verser
une
paie complète en décembre 2020. Il a par la suite reçu du CCAS une indemnisation chômage
de 27 jours sur les 1095 possibles
47
, ce qui est contenu. Dans le cadre de sa stratégie de GRH,
l
’
établissement gagnerait à définir les critères de recours à la rupture conventionnelle. En effet,
le coût pris en charge par le SAAD est significatif.
2.3
La fonction achat reste à structurer pour sécuriser la commande
publique
2.3.1
Un manque de compétence interne et de mobilisation d
’
outils disponibles en
matière de commande publique
Le montant des achats du CCAS
est de l’ordre de
2
M€ par an
48
. Il
ne dispose pas d’une
direction ou d’un service de la commande publique.
Cette mission est dévolue à sa responsable
financière qui n’a pas de formation dans le domaine.
Quand il recourt à une procédure
formalisée, il fait appel au service de la commande publique de la commune.
Conformément à l’article R
123-21 du CASF
, le conseil d’administration
de l’établissement
a donné délégation
49
permanente au président ou au vice-président pour la «
préparation,
passation, exécution et règlement des marchés de travaux, de fournitures et de services passés
selon la procédure adaptée prévue au code des marchés publics
». L’ordonnateur dispose
ainsi d’une très grande latitude mais il doit rendre compte à chaque conseil d’administration
des décisions prises en matière de marchés publics.
Le CCAS
n’a pas réalisé de recensement de ses besoins. Il
n’a
pas adopté de nomenclature
pour ses achats lui permettant de vérifier, par famille de prestations homogènes, la
computation des seuils, qui permet de choisir la bonne procédure adaptée de commande
publique. Le caractère homogène des marchés de fournitures et de services est un critère
d’appréciation variable
. Il nécessite que le pouvoir adjudicateur élabore une classification
propre à ses achats, ce qu
e l’établissement n’a pas fait
Le CCAS dispose pourtant
d’
un progiciel de gestion budgétaire et comptable intégrant une
liste des familles de marchés qui pourrait lui permettre de le faire et de se prémunir de
47
Droits à indemnisation pour un agent de plus de 55 ans.
48
Budget agrégé de l’établissement.
49
Délibération n° 12/2014 du 16 juin 2014 et délibération n° 03/2020 du 16 juillet 2020.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
30
dépassements des seuils.
L’utilisation de logiciels différents pour le secte
ur Ehpad-Ehpa
entraîne l’absence de suivi consolidé des achats et des seuils à l’échelle de l’établissement.
Au surplus, s
es services n’ont pas à leur disposition de note générale sur les
modalités internes
de la commande publique. Seule la procédure
d’
achat hors marché, sur la base de trois devis
a fait l’objet d’une instruction en juin 2021
.
Afin de sécuriser les procédures de passation des marchés publics, la chambre invite le CCAS
à élaborer puis à utiliser une nomenclature des achats indispensable au contrôle des seuils.
L’établissement
doit en outre mettre en place une organisation permettant de procéder au
recueil des besoins pour retenir
la procédure d’achat ad
équate ou mutualiser cette fonction
avec la commune.
2.3.2
Les règles de la commande publique ne sont pas respectées
Dans les faits, le CCAS lance très peu de procédures formalisées
, notamment parce qu’il ne
recense pas globalement ses besoins et ne compute pas les seuils. Depuis 2021, seuls les
marchés de fourniture de denrées alimentaires pour l’E
hpad
ont fait l’objet d’une
telle
procédure.
Depuis 2017, l’établissement
a également recours à un groupement de commandes
pour les marchés d’assurance
, gérés pour lui et la Caisse des écoles, par la commune.
La chambre constate que les commandes ont été r
éalisées en l’absence de procédure
adéquate
50
:
De 2015 à 2021, le CCAS a versé 895 939
€
à un fournisseur correspondant à des commandes
de chèques d’accompagnement personnalisé destinés aux bénéficiaires des aides
alimentaires ;
Entre 2015 et 2020,
l’établissement
a également réglé au total près de 400
000 €
à trois sociétés
pour des prestations d’agents de sécurité
;
Entre 2016 et 2018, il a également versé 284
812,34 €
à une société pour des prestations de
location et le blanchissage de linge.
2.3.3
Le CCAS a passé plusieurs protocoles transactionnels
Aux termes de l’article
2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties,
par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une
contestation à naître. La
conclusion d’un protocole transactionnel constitue donc un mode de
50
Pour mémoire évolution des seuils au-dessous desquels la collectivité peut passer des marchés sans
publicité ni mise en concurrence pour les fournitures et services :
-
Jusqu’au 30 septembre 2015
: 15
000 € HT
-
Au 1
er
octobre 2015 : 25
000 € HT
-
Au 1
er
janvier 2020 : 40
000 € HT
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
31
règlement alternatif des litiges qui peut, sous certaines conditions, être utilisé par les
collectivités locales et leurs groupements. Une transaction peut être conclue dans tous les cas
o
ù l’existence d’une créance est certaine, la collectivité s’engageant alors dans une démarche
ayant pour finalité d’éviter aux parties concernées de devoir porter le différend devant une
juridiction. Au cours de la période sous revue, trois protocoles transactionnels ont été signés.
Le premier a été signé le 24 mars 2015 avec un fournisseur pour la livraison de repas à
l’E
hpad. Le plafond du marché à procédure adapté (MAPA)
51
passé le 22 janvier 2014 a été
atteint fin août 2014. Pendant la période de septembre 2014 à mars 2015,
en l’absence de
notification d’un nouveau marché,
le CCAS a continué à faire appel au prestataire hors
marché.
L’établissement
n’a pu
honorer les factures
d’
un montant total de 166 838,17
€
TTC
(7 factures). Un protocole transactionnel a été établi pour «
solder […] les devoirs et
obligations nés entre les parties suite à la livraison des repas à l’expiration du marché
». Il
contient pour seule concession de la part du commanditaire de régler sa dette tandis que le
fournisseur renonce «
à toutes demandes complémentaires au titre de ses prestations, et
renonce notamment à tous les intérêts et au remboursement des frais financiers
». Ce contrat
de transaction a permis
à l’établissement
de mettre en paiement les dépenses en l’absence
de
procédure de commande publique adéquate.
Cette transaction entérine l’octroi d’un avantage
injustifié au prestataire.
Un deuxième protocole a été signé le 17 décembre 2015, conformément à une délibération du
7 décembre 2015 prise alors que les règles
formelles de réunion du conseil d’administration
n’étaient pas réunies.
Cette transaction faisait suite à un
contrat d’accompagnement signé le
6 avril 2010, ayant pour objet une mission
d’
optimisation des charges sociales. Ce dernier
n’avait pas fait l’objet d’une mise en concurrence.
Le montant de la rémunération de la société
était indexé à celui des économies
d’un montant de 399
658
€
réalisées entre 2008 et 2010. Le
prestataire a facturé la somme
de 280 555,50
€
52
. Le contrat stipule que
la mission s’achève à
l’obtention
des économies auxquelles peut prétendre le client, mais également que celui-ci est
renouvelé pour une durée de trois ans, sauf dénonciation. Or, il
n’a pas été dénoncé
et la
société a présenté trois nouvelles factures
d’u
n montant total de 255 389,48
€
53
pour les années
2011 à 2013. Les deux parties ont toutefois par protocole transactionnel arrêté la somme à
verser par le CCAS à 200 000
€
. Il a donc réglé pour cette prestation au total 480 555,50
€.
51
F
ixé par la règlementation de l’époque à 207
000
€
HT.
52
Calculée uniquement sur les exonérations des aides à domicile obtenues, sans tenir compte des
redressements opérés pour 112 792
€
53
Pour des économies estimées par le prestataire à 470 765
€
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
32
Bilan du contrat d’
optimisation de charges sociales
(arrondi à l’€)
2008
–
2009 - 2010
2011
2012
2013
TOTAL
Economies (A)
*
399 658
176 638
168 091
126 036
870 423
Coût (B) **
280 555
200 000
480 555
Ratio (B/A)
70 %
42,5 %
55 %
Source
: Lettre d’observations de la CGSS du 25/10/2011
; Factures 2013280056/042 du 20/01/2013,
2013280406/042 du 30/01/2013, E028-VFA2014000918 du 23/01/2014 ; Protocole transactionnel signé le
17/12/2015
* par période de cotisation à laquelle se rappor
te l’économie
** par période à laquelle correspond le coût, sa prise en charge ayant lieu sur des exercices postérieurs.
Compte tenu de la date de signature du contrat avec la société, en 2010,
la chambre n’
a pas
examiné les conditions de passation de ce contrat. Malgré les résultats obtenus et la clôture
par ce protocole transactionnel, le coût de cette mission est excessif au regard des économies
réalisées et des principes de gestion des deniers publics. Il représente près de six mois de
recettes pour le
service d’aide à domicile
ou encore, pour le seul protocole de 2015, 80 % de
l’insuffisance d’autofinancement cumulée de 2015
à 2020. La rémunération du cabinet de
conseil équivaut,
in fine,
à 55 % de la totalité des économies réalisées par
l’établissement
. La
chambre relève que l
a montée en compétence d’un agent du CCAS ou l’appui de la commune
de Fort-de-France aurait conduit à un résultat équivalent à moindre coût.
Un dernier
protocole d’accord
transactionnel a été signé le 16 mars 2020 avec un opérateur de
logement social
dans le cadre d’un litige
sur des loyers
de l’Ehpa et de l’Ehpad.
Le montage
signé le 12 décembre 2011 prévoit que le CCAS loue les bâtiments
destinés à l’hébergement
des personnes âgées par le biais de deux conventions. Or, depuis 2012,
l’établissement
éprouve des difficultés à payer ses loyers. Ainsi, au 31 décembre 2018, la créance calculée
depuis
2012, s’
élevait à 188 977,58
€ pour l’Ehpa
et 1 002 087
€ pour l’Ehpad
.
L’accord
transactionnel a prévu que la société annule la dette du premier et ramène celle du second à la
somme de 650 000
€. De son côté, le CCAS s’
est engagé à payer ses loyers, à travailler avec
son loueur à
la définition d’un nouveau mode de coopération pour les résidences et à honorer
le paiement des échéances prévues dans les conventions initiales.
La fréquence des protocoles transactionnels pour des sommes importantes traduit la faiblesse
de la gestion de la commande publique. Cette pratique conduit le CCAS à ne pas respecter les
principes fondamentaux de la commande publique : égalité de traitement, liberté d'accès et
transparence des procédures. Selon une jurisprudence constante
54
, le fait de conclure une
transaction pour se soustraire aux règles du code des marchés publics est contraire à l'ordre
public. Il ne préserve pas
l’établissement
du risque de poursuites pénales et ne peut constituer
un mode de gestion.
54
TA Lyon, 6 oct. 1999, Préfet de la Région Rhône Alpes, Préfet du Rhône
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
33
Recommandation n°
6 : Surveiller et respecter les seuils pour appliquer les procédures
de
commande
publique
adéquates
conformément
aux
dispositions
de l’
article L. 2120-1 du code de la commande
publique
55
(régularité).
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE _____________________
Le CCAS met en œuvre le projet politique de la commune dans le domaine social. Son
autonomie est restreinte du fait des liens institutionnels, organisationnels et financiers
qu’il
entretient avec elle. Il convient de clarifier et de formaliser ces derniers. Le règlement
intérieur du conseil d’administration
est à mettre en conformité avec la réglementation
relative aux délais de convocation.
En matière de gestion des ressources humaines, des irrégularités subsistent quant au
temps de travail effectif
qui n’
atteint pas les 1 607 heures réglementaires et aux modalités de
départ à la retraite.
L’emploi contractuel prévaut
, en particulier parmi les métiers médico-
sociaux. Ces modalités de recrutement emportent des risques juridiques et financiers
insuffisamment pris en compte.
La mise en place d’une stratégie de ressources humaines et
d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est nécessaire pour pérenniser
ces compétences métiers spécifiques.
A plusieurs reprises, l’établissement n’a pas respect
é les principes de la commande
publique. Ces insuffisances empêchent
de mobiliser l’achat comme levier d’efficience.
3
LES
SERVICES
MEDICO-SOCIAUX
DEDIES
AUX
PERSONNES AGEES SONT EN DESEQUILIBRE
Deux services médico-sociaux historiques du CCAS, le service
d’aide à domicile et l’ancien
foyer-logement, doivent répondre à des besoins renouvelés, soulignés, par exemple, dans le
rapport dit Libault issu de la concertation grand âge et autonomie
56
.
55
Les marchés sont passés, selon leur montant, leur objet ou les circonstances de leur conclusion :
1° Soit sans publicité ni mise en concurrence préalables, dans les conditions prévues au chapitre II ;
2° Soit selon une procédure adaptée, dans les conditions prévues au chapitre III ;
3° Soit selon une procédure formalisée, dans les conditions prévues au chapitre IV.
56 «
Il faut […]
engager un changement profond
du modèle d’accompagnement. Le défi consiste à
concrétiser un principe simple : la personne âgée doit se sentir « chez soi », quel que soit son lieu de
vie. […] Cette priorité accordée au domicile exige de répondre à la fragilité économique des services
d
’aide et d’accompagnement à domicile. Ce nouveau modèle suppose également […], de sortir d’un
choix binaire entre l’Ehpad et le domicile
. »
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
34
3.1
Le sous-financement structurel du
service d’aide à domicile
ne permet
pas d’apporter une réponse suffisante
aux besoins
3.1.1
Le service d’aide à domicile est un service historique
Le CCAS de Fort-de-
France assure la gestion d’un service d’aide et d’accompagnement
à
domicile (SAAD) qui est un service social et médico-social
au sens de l’article
L. 312-1 du
CASF. Créé en 1982, il avait pour double objectif de permettre aux personnes âgées de rester
à leur domicile, mais aussi de créer de l’emploi local.
Ce service est un des quarante-neuf
recensés en Martinique, dont dix-neuf localisés à Fort-de-France. Il se trouve donc dans un
contexte concurrentiel.
Le régime juridique des SAAD a été modifié par la loi du 28 décembre 2015 relative à
l’adaptation de la société au vieillissement.
Ceux intervenant auprès des publics fragiles
relèvent du régime de l’autorisation délivrée par le président du conseil départemental
ou
territorial. Ils sont soumis aux règles de fonctionnement prévues par le CASF
57
et par le cahier
des charges national annexé au décret n° 2016-502 du 22 avril 2016. Le renouvellement
d’agrément
pour le mode mandataire a été octroyé en 2021 par la DIECCTE. Même si le
CCAS dispose
d’un agrément pour un volet prestataire
58
et un volet mandataire
59
, son SAAD
ne se place qu’en position de prestataire.
Il a employé
jusqu’à
55 aides à domicile pour près de 400 bénéficiaires. A la date du contrôle
de la chambre, il en compte 33 pour 130 bénéficiaires.
L’équipe administrative est de
trois
agents fin 2021. L
‘établissement
restreint la prise en charge de nouveaux bénéficiaires, afin
de ne pas aggraver son déficit. L
es demandeurs sont réorientés vers d’autres services du
territoire, notamment de l’ADARPA
, structure associative placée en liquidation judiciaire en
février 2022.
57
Articles L. 311-4, L. 311-5, L. 311-5-1, L. 312-1 II ; L. 313-1-2 et L. 313-1-3 ; L. 313-11-1 du CASF.
58
Le volet prestataire est le
mode d’intervention le plus répandu. Le particulier recourt à l’
opérateur de services
à la personne qui est l’employeur de l’intervenant à domicile. Le
bénéficiaire contracte avec le SAAD, qui lui
facture la prestation.
59
Dans un volet mandataire, le bénéficiaire a recourt à un opérateur de services à la personne pour la sélection
de l’intervenant à domicile
et la gestion des formalités administratives. L
’employeur reste le bénéficiaire qui
conclut un contrat de travail avec
l’intervenant.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
35
3.1.2
Ce service est structurellement déficitaire
De 2015 à 2021, le tarif fixé par le CCAS pour ses usagers payants est de 18,44
€
.
Comme la plupart des SAAD, celui-ci est déficitaire. Cumulé sur les exercices 2015 à 2020,
le déficit
peut être estimé à 2M€
, en tenant compte des remboursements de charges patronales.
Cela équivaut à 33 % des produits cumulés de cette période.
Equilibre de fonctionnement
du service d’aide à domicile (en e
uro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Charges
1 354 919
1 244 959
1 484 526
1 465 142
1 387 730
1 176 300
Produits*
1 051 384
826 918
922 173
845 003
880 403
850 715
Résultat
-303 534
-418 041
-562 353
-620 139
-507 327
-325 584
Source : suivi interne du CCAS
* Hors remboursement au titre de l’exonération des charges employeur
Ces déficits sont imputables à certains coûts (indemnité de départ à la retraite
supra
, absence
de politique de reclassement, mission de conseil sur les charges patronales), mais également
au prix de revient horaire. Celui-ci
, qui n’a pas été communiqué par le CCAS,
n’est pas
intégralement couvert par les principaux contributeurs : CTM, caisses de retraite et
mutuelles
60
.
L’établissement
a fait le choix de limiter le reste à charge des usagers du SAAD.
S’agissant des déséquilibre
s financiers auxquels sont confrontés ces services, la Cour des
comptes a relevé trois facteurs dans son rapport de 2016
61
. Le SAAD est concerné par
l’un
60
Le tarif horaire a varié de 18,94
€ à 21,00
€ selon l’année et la caisse.
61
Cour des comptes,
Le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie
, rapport public
thématique, juillet 2016
Financement du
service d’aide sociale à domicile
Les ressources d’un SAAD proviennent de la facturation aux usagers des heures de
prestations à domicile :
1)
L’heure peut être facturée directement au bénéficiaire, à titre payant
;
2)
Le département, en
l’occurrence la CTM, prend en charge tout ou partie de la facture
;
-
si l’usager bénéficie de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), dans la limite d’un
tarif horaire de référence fixé par le Président de la CTM
jusqu’en 2021
;
-
si l’usager bénéficie
de la Prestation de Compensation du Handicap (PCH),
dans la limite d’un
tarif horaire de référence fixé au niveau national ;
-
si l’usager bénéficie de la prestation d’aide
-
ménagère au titre de l’aide sociale, ce tarif est arrêté
par le Président de la CTM.
3)
Des caisses de retraite et des mutuelles
financent des heures d’aides à domicile, chacune
fixant les tarifs afférents.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
36
d’entre eux
: la
baisse d’activité,
en partie choisie. En effet, s
on niveau d’heures improductives
se situe dans les moyennes nationales et les plannings ont été optimisés de sorte à réduire les
temps de déplacement entre prestation.
Une enquête
62
sur les pratiques des départements en matière d'allocation personnalisée
d'autonomie (APA) publiée en 2018 relève de profondes inégalités dans les prises en charge.
Elles s’élèvent à
13
€ en Martinique
contre 22,43
€ en Haute
-Marne. Les tarifs de référence
de l’
APA fixés par les conseils départementaux sont systématiquement inférieurs au coût réel
des services. En 2016
63
, le coût moyen constaté d’une heure d’aide à domicile pour une
personne âgée était évalué à 24,24
€
. Ces inégalités se manifestent également entre types de
structures : une entreprise est facturée en moyenne 19,92
€
; un CCAS, 20,45
€
; une
association 21,12
€
.
Une partie des déficits des SAAD est aussi liée au décalage entre les heures rémunérées et les
heures facturées. Dans un rapport IGAS/IGF de 2010, la mission évaluait à «
22,44 % le
standard de temps global rémunéré non facturable aux usagers.
»
64
.
L’examen du
planning
de décembre 2019
des aides ménagères permet d’identifier 3
591
heures d’intervention
facturables (présence au domicile), 467 heures de trajet des aides à domicile du CCAS entre
les interventions et 4 594 heures rémunérées
65
. Pour le mois de décembre 2019, le nombre
d’heures rémunérées non facturables représentaient ainsi 21,8
%, au niveau des taux constatés.
L
’activité du SAAD
et son déficit sont intégrés au budget principal, et
n’appara
issent donc
pas dans celui du CCAS, ce qui nuit à la bonne information financière. Cette activité devrait
être retracée de façon distincte dans un budget annexe
de l’établissement. La situation actuelle
contrevient aux dispositions de
l’article R
. 314-78 du CASF selon lequel «
chaque activité
sociale ou médico-sociale relevant du I de l'article L. 312-1 qui est gérée par une collectivité
territoriale ou un centre communal ou intercommunal d'action sociale est retracée dans un
budget annexe de cette collectivité ou de cet établissement.
». Une délibération n° 27/2019 a
été adoptée par le
conseil d’administration
en ce sens le 22 octobre 2019, mais le budget
annexe n’
a toujours pas été créé.
Recommandation n°
7 : Mettre en place conformément aux dispositions de
l’article
R.°314-78 du CASF le budget annexe du
service d’aide à
domicile (régularité)
62
Observatoire national du domicile dépendant de la Fédération française des services à la personne et
de proximité (Fédésap).
63
Une étude nationale de coûts, menée par Ernst & Young et Eneis conseil sous l’égide de la CNSA et
de la DGCS sur les prestations d’aide et d’accompagnement à domic
ile entre septembre 2014 et
février 2016 sur un échantillon de 44 structures dans dix départements, relève un coût horaire médian
de 23,55 € et un coût moyen de 24,24 €.
64
Rapport IGAS/IGF-mission relative aux questions de tarification et de solvabilisation des services
d'aide à domicile en direction des publics fragiles-octobre 2010.
65
Sur la paie de janvier 2020
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
37
3.1.3
Plusieurs
leviers d’action
sont à mobiliser
La maîtrise des charges nécessite pour le CCAS
d’améliorer la gestion des ressources
humaines. En effet, la volonté affirmée de les réduire
a été vectrice d’iniquités et
d’irrégularités. L’intervention d’
un prestataire extérieur
66
pour optimiser les charges
patronales
du service s’est avérée coûteuse
. Aussi, l
’établissement
, éventuellement avec
l’appui de la commune de Fort
-de-France, doit définir une gestion prévisionnelle des emplois
et des compétences (GPEC) tenant compte des spécificités des métiers du médico-social.
Celle-ci
doit s’accompagner d’une politique de prévention des risques profes
sionnel et de
mesures de reclassement professionnel en cas d’inaptitudes. En outre
, la suppression des
régimes de départ à la retraite est nécessaire pour équilibrer les financements.
En février 2020, la collectivité territoriale de Martinique a relevé le tarif de référence de l'aide
personnalisée à l'autonomie (APA) de 13
€
à 19
€
. Par ailleurs
, l’arrêté du 30
décembre 2021
relatif au tarif minimal mentionné au I
de l’article
L. 314-2-1 du CASF fixe à 22
€
celui de
l’heure d’intervention pour l’
APA et la prestation de compensation du handicap (PCH). La
couverture par
l’APA
de l’heure d’aide
-ménagère
est donc passée en deux ans de 13 € à 22 €,
soit une évolution de 70 %.
Depuis 2015, le CCAS de Fort-de-France a fait le choix de maintenir son tarif, afin de ne pas
augmenter le reste à charge des bénéficiaires. Il a de ce fait assumé les déficits du service.
L’évolution d
es niveaux de financement des prestations doit permettre de redresser la
trajectoire financière et d
’ainsi
solvabiliser ce service. Pour assurer le suivi et garantir
l’information financière des administrateurs et de la tutelle,
la mise en place
d’un budget
annexe
s’impose
.
3.2
La
Yole gran moun
offre des services réduits pour un coût élevé
3.2.1
L’ancien foyer
-logement relève désormais
d’u
ne
catégorie d’établissement
médico-social par défaut
Le foyer-
logement a été créé en 1985. Le CCAS a obtenu l’agrément n°
83-2418 pour la
création d’un foyer logement de 52 places en décembre
1983. En mai 2010, le conseil général
de la Martinique a émis un avis favorable pour réduire le capacitaire à 20 places, une partie
de ces places ayant été transférée pour l’ouverture de l’E
hpad.
66
En application de l’article
L. 241-10 III du code de la sécurité sociale, les rémunérations des aides à
domicile employées par les associations, les entreprises agrées ou les centres communaux ou
intercommunaux d'action sociale bénéficient d’une exonération des cotisations patronales.
L’exonération «
aide à domicile
» porte sur l’ensemble de la rémunération versée aux aides à domicile
employées sous contrat à durée indéterminée (CDI) ou contrat à durée déterminée (CDD) pour
remplacer les salariés absents ou dont le travail est suspendu.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
38
L’ancien
foyer-logement, est désormais un
établissement d’hébergement pour
personnes
âgées (Ehpa). Contrairement au foyer-logement
de l’hexagone, il n’a pas été
transformé en
résidence autonomie compte tenu de la dérogation appliquée à l’outre
-mer
67
. Toutefois, ce
service est identifié comme résidence autonomie dans les typologies
68
et les sites de recherche
d’établissement accessibles au grand public, par exemple sur l’annuaire
de pour-les-
personnes-agees.gouv.fr, porté par la Caisse na
tionale de solidarité pour l’autonomie (CNSA
).
Cela nuit à la bonne information du public dans la mesure où les prestations diffèrent.
En janvier 2017, son autorisation de fonctionnement a été renouvelée avec difficultés. La date
limite de transmission de
l’évaluation externe était fixée au 3 février 2015
. Après relance et
mise en demeure de la transmettre, celle-ci a été réalisée en mai 2016. Cette évaluation externe
ne mentionne pas de dysfonctionnement significatif tout en relevant l’absence de projet
d’
établissement ou de service, de règlement de fonctionnement, de document unique
d'évaluation des risques professionnels. Elle souligne la bonne maîtrise de la gestion
financière de l’
Ehpa tout en reconnaissant la confusion antérieure entre les budgets Ehpa et
Ehpad. Ces éléments caractérisent pourtant une insuffisance de gestion substantielle.
3.2.2
La Yole gran moun présente un coût élevé
La
Yole gran moun
répond désormais aux exigences réglementaires minimales
d’un
Ehpa.
Ces structures accueillent des usagers dans des proportions inférieures à 15 % de GIR 1 à 3 et
inférieures à 10 % de GIR 1 et 2 de leur capacité autorisée. Seuls deux anciens foyer-
logements existent en Martinique, la
Yole Gran Moun
et Casimir Léotin, gérée par
l’ADARPA, qui a un statut privé
non lucratif et a été placée en liquidation judiciaire le
1
er
février 2022. Au sein de cette offre restreinte, le tarif proposé par
l’E
pha est faible :
1 252,80
€ par mois pour un F1 contre
1 830,55
€ pour un F1
dans l’autre résidence
.
Toutefois, comparé
au tarif national ce coût est élevé. En 2019, le tarif médian d’un F1 en
résidence autonomie était de 688
€ en France hexagonale, le neuvième décile s’élevant à
1 419
€
69
. Le prix moyen d’un F1 dans une résidence autonomie relevant d’un CCAS était de
706
€,
toujours sur le périmètre hexagonal. Dans sa réponse aux observations provisoires, la
CTM justifie cet écart par les coûts liés aux indemnités dites de «
vie chère
» et à l’insularité
mais ces derniers ne suffisent pas à
l’
expliquer
d’autant que l’Ehpa n’est pas soumis au socle
de prestations minimales des résidences autonomies
70
non applicable outre-mer.
Pour des raisons historiques
71
,
l’Ehpa
reçoit un forfait soin, notifié par l’ARS et mis en
paiement par la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique (CGSS), alors que les
67
Conformément à l
’article
9 du décret n° 2016-696 du 27 mai 2016 relatif aux résidences autonomie.
68
Code 202 du répertoire FINESS, STATISS.
69
CNSA,
Analyse statistique n° 10 : Les prix des résidences autonomies 2018 et 2019
,
25 novembre 2021.
70
Annexe 2-3-2 du décret du 27 mai 2016 relatif aux résidences autonomie et portant diverses
dispositions relatives aux établissements sociaux et médico-sociaux pour personnes âgées.
71
Le décret n° 2007-793 du 9 mai 2007 relatif aux modalités de médicalisation et de tarification des
établissements mentionnés au I bis de l'article L. 313-12 du CASF indiquait en son article 3 que «
ces
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
39
dépenses afférentes sont pour moitié engagées par l’établissement lui
-même avec la prise en
charge d’un auxiliaire de soin.
Sous la période sous revue, aucun évènement indésirable n’a été transmis à l’ARS. Cependant,
un résident a fait une chute dans son logement le 7 février 2020. Il est resté à terre une heure
avant d’être pris en charge par SOS médecin puis les pompiers et transféré au CHU de la
Martinique. Il ressort d’un compte
-
rendu interne que deux infirmiers de l’Ehpad
ont refusé de
porter secours à cette personne âgée au motif qu’ils n’intervenaient pas à la
Yole gran moun
,
pourtant contigu. Cet évènement n’a pas été transmis à l’ARS en dépit de la réglementation
72.
Dans sa réponse, l
a CTM a indiqué que ses services n’av
aient eu connaissance de cet indicent
qu’à
la lecture des observations provisoires de la chambre.
Ces deux agents n’ont pas vu
renouveler leur contrat.
3.2.3
L’ancien foyer logement présente des excédents structurels
Le budget
annexe de l’ancien foyer logement, qui s’est élevé à 464
047
€ en
2021, est
structurellement excédentaire. Sa capacité d’autofinancement minimale représentait 22,7
%
des produits de gestion en
2021. Un tel niveau d’épargne n’est pas nécessaire dans la mesure
où le service dispose de locaux en location à un bailleur social. Pour la période de 2015 à
2021, en répondant à des exigences réglementaires minimales, en l’absence d’investissement,
en percevant des forfaits soins et en fixant des loyers élevés, l’abondement cumulé au fond de
roulement
s’est élevé à 1
148 117
€
.
forfaits soin correspondent aux dépenses relatives à la rémunération et aux charges sociales et
fiscales y afférentes des personnels de soins salariés par les établissements
».
72
L’article L.
331-8-1 du CASF dispose que «
les établissements et services et les lieux de vie et
d’accueil informent sans délai (…) les autorités administratives (…) de tout dysfonctionnement grave
dans leur gestion ou leur organisation susceptible d’affecter la prise en charge des usagers, leur
accompagnement ou le respect de leurs droits et de tout évènement ayant pour effet de menacer ou
de compromettre la santé, la sécurité ou le bien-être physique ou moral des personnes prises en
charge ou accompagnées
».
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
40
Equilibre financier de l’ancien foyer logement –
Ehpa (arrondi à l’euro)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Produits de gestion
426 264
379 192
372 871
367 953
514 854
531 571
464 047
Charges de gestion
202 052
251 797
273 411
277 856
272 100
221 788
258 532
Excédent brut
d'exploitation
224 212
127 879
99 460
90 097
242 756
309 785
205 516
+/- Résultat
exceptionnel
0
-1 237
0
515
69 621
-140 096
-100 392
CAF brute *
224 212
126 642
99 460
90 612
312 377
169 689
105 125
en % des produits
de gestion
52,6 %
33,4 %
26,7 %
24,6 %
60,7 %
31,9 %
22,7 %
Recettes d'inv.
0
0
0
0
0
20 000
0
Dépenses d’inv.
0
0
0
0
0
0
0
Reconstitution du
fonds de roulement
net global
224 212
126 642
99 460
90 612
312 377
189 689
105 125
Source : CRC, Anafi et comptes de gestion
*Equivalant à la CAF nette en l’absence d’emprunt
Le fonds de roulement net global de l’Ehpa s’élève au 31
décembre 2021 à 1 772 199
€,
correspondant à 2 502 jours de fonctionnement. Or, il est généralement admis que cette
variable est satisfaisante lorsqu’elle se situe aux environs de 60 jours et est excessive au
-delà
des 90 jours, ce qui le cas de l’établissement. De ce fait, sa trésorerie est importante et couvre
notamment l’insuffisance de trésorerie de l’Ehpad. Le directeur du CCAS a fait valoir que des
résidents ont été accueillis dans les locaux de ce dernier lors d’une phase de travaux antérieure
à la période sous revue, et l’imputation des charges et des produits entre les deux budgets re
ste
à régulariser. Cet élément conjoncturel ne permet pas de justifier à lui seul les excédents
structurels de l’Ehpa. En effet, de 2015 à 202
1 son fond de roulement a presque triplé
(+ 1,15
M€, soit +
184 %).
Les objectifs d’adaptation des services et de l’offre de prise en charge et d’accompagnement
seront à fixer dans le cadre des négociations avec la CTM et l’ARS pour définir les objectifs
et les moyens alloués. Un CPOM unique pour les services médico-sociaux, incluant également
l’E
hpad, pourra utilement être déterminé avec ces tutelles.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE _____________________
Le
service d’aide à domicile et l’ancien foyer logement, aujourd’hui E
pha composent
l’offre historique du CCAS de Fort
-de-France en faveur des personnes fragiles et âgées. Ils
répondent à des besoins toujours importants. Toutefois, leur gestion
manque d’efficience : le
SAAD limite son offre de prise en charge en raison de la perte sèche que représente chaque
heure de prestation, la Yole gran moun propose des services restreints à un coût relativement
élevé.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
41
Les évolutions tarifaires applicables au service d’aide à domicile d’une part et
l’adaptation des prestations du foyer logement d’autre part
favoriseront leur soutenabilité
financière et leur pérennité au sein de la plateforme médico-sociale portée par le CCAS.
4
DES INSUFFISANCES DE
GESTION DE L’EHPAD S
ONT EN
COURS DE RESOLUTION
4.1
Un Ehpad récent pour répondre à un besoin de prise en charge avéré
4.1.1
L’
Ehpad ouvert en 2012 répond à un besoin identifié
Le besoin de structures de prises en charge institutionnelle des personnes âgées dépendantes
en Martinique a été identifié dans les différents
schémas d’organisation, à l’instar du schéma
départemental en faveur des personnes âgées 2009-2013 du département de la Martinique.
Celui-ci identifie un besoin de création de 309 lits pour le secteur «
centre agglomération
»
de l’Île
, en plus des 585 autorisés en 2008, dont 158 lits à créer en 2010-2013 à Fort-de-
France. Le besoin de place en Ehpad est toujours
présent dans le schéma de l’autonomie 2018
-
2023
, la Martinique se caractérisant par un taux d’équipement
deux fois moins élevé que la
moyenne nationale
73
.
L’autorisation de création d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées
dépendantes de 64 places
74
est intervenue juste avant la réforme du régime des autorisations
à compter du 1
er
août 2010
75
. La demande a ainsi été examinée par le comité régional de
l’organisation sociale et médico
-sociale (CROSMS). Le besoin était identifié dans le schéma
départemental, les critères fixés au cahier des charges étaient remplis, la localisation était
optimale (en ville, accessible et à proximité du foyer-logement) et le bailleur était partie au
projet, avec des financements déjà obtenus pour la construction. La soutenabilité financière
de l’E
hpad
et l’impact sur le prix de journée n’ont pas été spécifiquement examinés
73
Le nombre de places d’Ehpad pour 1
000 personnes de 75 ans et plus est de 42,6 en Martinique contre
97,3 en France hexagonale (STATISS 2020).
74
A
rrêté conjoint du Directeur Général de l’agence régionale de santé et du Président du Conseil Général
n° 1152 du 29 juin 2010 pour 64 places, dont 6
0 places d’hébergement permanent et 4
places
d’hébergement temporaire
.
75
La loi n° 2009-879 du 21 juillet
2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé
et aux territoires (HPST) et son décret d’application n°
2010-870 du 26 juillet 2010 fixent la nouvelle
procédure d’autorisation en vigueur à partir du 1er août 2010. A compter de cette date, les projets de
création, de transformation ou d’extension s’inscrivent dans des réponses à des appels à projets lancés
par les financeurs.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
42
conformément aux procédures alors en vigueur.
L’établissement est habilité à recevoir des
bénéficiaires de l’aide sociale pour
45
places d’hébergemen
t permanent
76
.
Les niveaux d’activité attestent un besoin
de prise en charge. Ainsi pour l’hébergement
permanent, les taux d’occupation approchent
les 95
%. A l’inverse, les lits d’hébergement
temporaire sont faiblement occupés.
Activité de
l’E
hpad
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Hébergement permanent (60 places)
Taux d’occupation
92,1 %
94,4 %
96,0 %
91,6 %
93,8 %
94,5 %
NC
Résidents au 31 déc.
57
57
58
59
57
56
NC
Hébergement temporaire (4 places)
Taux d’occupation
36,7 %
36,7 %
39,9 %
19,7 %
21,9 %
6,3 %
NC
Résidents au 31 déc.
1
1
2
0
0
0
NC
Source
: rapports d’activité du CCAS
Le GIR moyen pondéré (GMP)
77
Le niveau de dépendance d’un résident est mesuré à partir de la grille Aggir, codifiée en
annexe 2-
1 du code de l’action sociale et des familles (CASF), qui permet de mesurer
notamment la possibilité pour chaque résident d’effectuer des gestes quotidiens c
omme
s’alimenter, faire sa toilette, ou se déplacer.
Celui-ci est positionné dans un des six groupe iso-
ressources (GIR) de la grille à partir d’un nombre de points attribués pour chaque item. Un
GIR 6 correspond à une autonomie totale et un GIR 1 est rattaché à une absence quasi-totale
d’autonomie. Le GMP est une moyenne des points GIR des résidents présents dans
l’établissement à un instant donné. Un GMP élevé renseigne sur une perte d’autonomie
importante.
L’E
hpad prend en charge des résidents en moyenne moins dépendants. Fin 2020, les résidents
de GIR 1-2, les plus dépendants, représentaient 61 % de la population accueillie, ceux de GIR
3-4 30 %, ceux de GIR 5-6, les plus autonomes, 8 %. Toutefois le niveau de dépendance
moyen est inférieur à la moyenne départementale et nationale : le GMP, qui permet de mesurer
le niveau moyen de perte d’autonomie des résidents est de 643 depuis
2018. En 2021, le GMP
moyen en Martinique
s’élève à 764.
76
Arrêté de la CTM n° AR 15-12-17
–
6938 du 15 décembre 2017, modifiant l’arrêté
n° 918 du
10 avril 2012 modifié le 17 décembre 2015.
77
«
La prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad, un nouveau modèle à construire
»,
Cour des compte, février 2022.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
43
4.1.2
La
stratégie de l’établissement n’est pas formalisée et son pilotage
a montré
des insuffisances
Les outils réglementaires de définition et de suivi de la stratégie de l’établissement sont
obsolètes et ne permettent pas de fixer le cadre d’action des équipes.
Ces manquements sont
antérieurs à la survenue de la crise de la COVID 19.
La convention tripartite est un contrat signé entre un Ehpad, le département
et l’agence
régionale de santé applicable entre 2003 et 2017. A compter de 2017, les contrats pluriannuels
d’objectifs et de moyens (CPOM)
78
se substituent aux conventions tripartites. Ce document
stratégique
détermine les objectifs de l’établissement avec
une dimension pluriannuelle. Il
permet de structurer le pilotage interne et
constitue un levier d’amélioration de la qualité et de
la sécurité des accompagnements.
Les organismes gestionnaires assurant l’accompagnement
des personnes âgées sont tenus de signer un tel contrat
avec l’agence régionale de santé et la
collectivité territoriale. Cette signature devait intervenir à la date de renouvellement de la
convention tripartite, et au plus tard en 2021. Le calendrier de signature du CPOM a été
repoussée à 2024
79
.
Pour «
l’espace gran moun
», l’unique
convention tripartite a été signée le 13 décembre 2013
pour une durée de cinq ans. Elle est donc caduque. Ses objectifs ont été partiellement remplis
par l’établissement. Au nombre des engagements suivis d’effet
s, il convient de souligner
qu
’un
projet d’établissement
a été rédigé en 2014 et que les embauches de personnel répondant
aux conditions de formation fixées par le CASF ont été respectées. Toutefois, nombre des
objectifs
n’ont pas été respecté
s. Par exemple, le conseil de vie sociale
(CVS) n’est plus
effectif depuis 2016
. Les évaluations internes et externes n’ont pas été réalisées.
Le niveau de
dépendance des résidents est inférieur au seuil fixé
. L’établissement ne dispose pas de
plan de
formation pluriannuel ni de cahier de doléances ou de réclamations.
La démarche
d’élaboration du CPOM n’est pas engagée
. Les ESMS rattachés au CCAS de
Fort-de-France ne faisaient pas partie des premiers services pour lesquels les négociations ont
été ouvertes
par l’ARS et la CTM
.
L’établissement n’a pas
non plus engagé les premières
phases de diagnostic.
L’E
hpad
est ainsi privé de cadre stratégique d’intervention, à l’instar
des deux autres services médico-sociaux.
L’élaboration et la mise en œuvre d’un CPOM
commun à ces trois services dans un délai raisonnable permettra de fixer un cadre stratégique
conjoint et contribuera à favoriser leur fonctionnement en plateforme.
78
A
rticle 58 de la loi d’adaptation de la société au vieillissement
;
IV ter de l’article
L. 313-12 et article
L. 313-12-2 du CASF.
79
L
’instruction n° DGCS/5C/DSS/1A/CNSA/DESMS/2021/229 du 16
novembre 2021 précise ainsi «
un retard important dans la mise
en œuvre de cette mesure a été pris, s’expliquant à la fois par
l’ampleur de l’impact de la démarche de contractualisation sur le secteur médico
-social et aussi par
la crise sanitaire. Aussi, dans l’attente d’un vecteur législatif adapté, et pour mener à b
ien cette
réforme structurante pour le secteur médico-social, il vous est demandé de desserrer de trois ans le
calendrier de signature des CPOM précités soit jusqu’au 31
décembre 2024
. »
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
44
Le
projet d’établissement de l’
Ehpad réalisé en mars 2014 est caduc depuis mars 2019
80
. Sa
mise à jour est nécessaire pour définir la stratégie, ses objectifs en termes de prise en charge
des résidents et son positionnement. Elle permettrait de définir des objectifs concrets et
mesurables et d’y intégrer le projet médical
, non présenté, à ce jour, aux instances du CCAS.
Il n’y a pas eu d’évaluation interne ou externe
jusqu’à fin
2021
. L’ARS a confirmé que celle
qui devait intervenir en 2017 n
’a pas eu lieu. L’évaluation interne,
engagée fin 2021, a donné
lieu à un rapport inscrit à l’ordre du jour du
conseil d’administration le
29 mars 2022.
Toutefois, en réponse aux observations provisoires,
le CCAS n’a pas produit la délibération
afférente et la CTM indique ne pas voir reçu le document définitif.
Le conseil de la vie sociale (CVS) est une instance obligatoire
81
qui réunit des représentants
des personnes accueillies et de leurs familles, du personnel et de l’organisme gestionnaire. Il
se réunit au moins trois fois par an. Or celui de
l’
Ehpad ne se réunit plus depuis juin 2016.
Suite à la démission du précédent président, aucun candidat à sa succession
ne s’est présenté
.
L’établissement fait valoir que les résidents sont représentés à la commissi
on de restauration
et à la commission d’animation sans satisfaire pour autant à l’obligation réglementaire.
La CTM a indiqué dans sa réponse aux observations provisoires que «
lorsque le conseil de
la vie sociale ne peut être installé faute d’élus au sein
des groupes représentatifs, le
gestionnaire doit avoir recours aux enquêtes de satisfaction auprès des familles et des
personnels. On peut toutefois souligner la difficulté pour un grand nombre d’établissements
de mettre en place leur Conseil de Vie Socia
le en l’absence de candidat à la présidence de
cette instance obligatoire
». L
e caractère obligatoire de l’instance demeure.
La chambre relève
que, selon le récent rapport de la cour des comptes
82
,
le CVS n’était pas installé pour
moins
de 4
% de l’échantillon d’EHPAD examinés
, qui plus est depuis moins longtemps que
l’EHPAD du CCAS.
4.1.3
La prise en charge des résidents dépendants
s’est
améliorée progressivement
Plusieurs plaintes et signalements en 2015 et 2016 ont abouti à une inspection contrôle
conjointe de
l’ARS et de la CTM sur place le 19
janvier 2017. Elle
n’a pas donné lieu à compte
rendu alors que des dysfonctionnements ont été constatés. Toutefois la direction de
l’
Ehpad a
80
L’article L.
311-8 du CASF
prescrit l’élaboration, pour tout établi
ssement médico-
social, d’un projet
d’établissement. Il définit, pour une durée maximale de cinq ans, ses objectifs, notamment en matière
de coordination, de coopération et d’évaluation des activités et de la qualité des prestations, ainsi que
ses modalités
d’organisation et de fonctionnement. La consultation du conseil de la vie sociale est
obligatoire.
81
Articles L. 311-6 et D. 311 15 du CASF. Il «
donne son avis et peut faire des propositions sur toute
question intéressant le fonctionnement de
l’établissement ou du service notamment sur l’organisation
intérieure et la vie quotidienne, les activités, l’animation socio
-culturelle et les services
thérapeutiques, les projets de travaux et d’équipements, la nature et le prix des services rendus,
l’affectation des locaux collectifs, l’entretien des locaux, (…), ainsi que les modifications
substantielles touchant aux conditions de prises en charge
».
82
«
La prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad, un nouveau modèle à construire
»,
Cour des compte, février 2022, p. 58
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
45
été remplacée l’année qui a suivi
.
L’A
gence régionale de santé
n’a pas été
destinataire de
nouvelles plaintes depuis lors.
Des insuffisances demeurent quant à la mise en œuvre effective des outils garantissant les
droits et la participation des personnes accompagnées.
L’
Ehpad
dispose d’un livret d’accueil
.
Un contrat de séjour, au modèle conforme à la réglementation
83
,
est signé à l’entrée d’un
nouveau résident. Le règlement de fonctionnement a été approuvé par le conseil
d’administration le 23
mars
2012 et n’a pas fait l’objet de l’actualisation
dans le délai
maximum de cinq ans
84
.
L’
accompagnement individualisé est à améliorer.
L’article
L. 311-3 du CASF prévoit parmi
les garanties accordées aux personnes âgées
, au titre de l’exercice de leurs droits et libertés,
une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité, favorisant l’autonomie de
la personne, adaptée à ses besoins, respectant son consentement éclairé. Le projet personnalisé
est un outil
de coordination des actions de l’équipe pluridisciplinaire
dans cet objectif. Or, au
28 juillet 2021, trente-trois projets de vie étaient référencés sur le logiciel pour cinquante-neuf
résidents présents, les autres projets étant en cours de réalisation. Les difficultés de
recrutement d’un psychologue par l’
Ehpad expliquent pour partie les retards de ces projets
personnalisés. En 2021, leur
élaboration associe le psychologue, l’infirmière coordinatrice, le
médecin coordonnateur et les responsables restauration et animation.
Enfin
l’
Ehpad ne dispose pas du plan
d’organisation à mettre en œuvre en cas de crise
dit
«
plan bleu
»
85
. Une seule pièce est climatisée, et est actuellement dédiée aux serveurs
informatiques.
L’établissement ne respecte ses
obligations réglementaires depuis son
ouverture. Le directeur a mentionné
l’existence
d'un plan de prévention des risques
, d’
un
protocole canicule et de fiches de suivi d'hydratation des résidents.
4.1.4
Un pôle d’activité et de soins adaptés (PASA)
est financé mais non mis en
œuvre
Le pôle d’activité et de soins adaptés (PASA)
86
est un dispositif qui contribue à une prise en
charge renforcée de résidents présentant un trouble du comportement modéré résultant d’une
maladie neurodégénérative. Il propose, durant la journée, des activités individuelles ou
collectives, qui concourent au maintien ou à la réhabilitation de leurs capacités fonctionnelles
et cognitives, à la mobilisation de leurs fonctions sensorielles et au maintien du lien social
entre les personnes âgées concernées. Les espaces doivent offrir un environnement
confortable, rassurant et stimulant pour les résidents. Il doit aussi procurer des lieux de vie
83
Articles L. 311-4 D. 311 du CASF, il fixe notamment les objectifs de la prise en charge, les prestations
mises en œuvre dès la signature du contrat, la description des conditions de séjour et d’accueil ainsi
que les condition
s de participation financières et de facturation, y compris en cas d’hospitalisation ou
d’absence pour convenance personnelle
.
84
Article R. 311-33 du CASF
85
Articles D. 312-160 et D. 312-161 du CASF et arrêté du 7 juillet 2005 fixant le cahier des charges du
plan d'organisation à mettre en
œuvre
en cas de crise sanitaire ou climatique
86
Un cahier des charges de 2009 établissait des critères, auxquels se sont substitués les «
conditions
minimales de fonctionnement et d’organ
isation des PASA
» figura
nt à l’article
D. 312-155-0-1. -I. du
CASF.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
46
sociale pour le groupe, notamment pour l’accueil des familles et
proposer une ouverture sur
l’extéri
eur par un prolongement sur un jardin ou sur une terrasse sécurisée, librement
accessibles.
La visite sur site et les entretiens ont permis de constater que, si une unité de vingt places
d’hébergement est dédiée aux résidents souffrant de troubles Alzheim
er et apparentés, le
PASA n’est pas fonctionnel. Or
pour les exercices 2015 à 2021,
l’ARS a
alloué un total de
496 417
€ de crédits
pour les douze places de
l’
Ehpad.
4.1.5
Le bâtiment loué offre des conditions hôtelières satisfaisantes mais se dégrade
rapidement
La construction du bâtiment a été conduite par une société HLM qui a bénéficié de subventions
pour l’opération. Lors des visites de conformité préalables à l’ouverture des adaptations ont
été demandées par
l’ARS
, pour tenir compte de sa vocation médico-sociale. La superficie est
conséquente et se situe dans la fourchette haute des constructions réalisées à la même période
selon une étude de l
’observatoire des coûts de la construction
dans le secteur médico-social
87
.
Des espaces importants sont inutilisés
, à l’instar d’un logement de fonction inoccupé depuis
plusieurs années et d’espaces prévus pour les activités des résidents et l’accueil des familles.
La convention de
location d’une
durée de douze ans en date du 12 décembre 2011 fixe la
redevance à 298 800
€ par an
88
, ce qui est défavorable au CCAS
. L’avis de l’administration
des domaines, obligatoire pour la prise de bail d’un tel montant, n’a pas été produit
. Les
conditions financières intègrent tous les coûts supportés par un propriétaire qui aurait
contracté un emprunt pour financer la totalité des travaux, des charges de gros entretien et de
renouvellement des composants et des frais généraux à un niveau significatif.
L’établissement
supporte toutefois des charges du propriétaire, comme la taxe foncière. Les frais locatifs de
l’
Ehpad
, s’ils avaient été mandatés mensuellement, auraient représenté plus de 10
% de ses
charges courantes moyennes, ce qui représente un niveau élevé.
Les conditions hôtelières sont satisfaisantes avec des espaces disponibles et ventilés.
Toutefois, le bâtiment pose des problèmes de gestion. Dix ans après sa mise en service, il
présente des marques de vieillissement précoce. En décembre 2021, la chambre constate que
deux chambres d
e l’unité dite protégée étaient inutilisables et inutilisées en raison de fuites
d’eau. Les contraintes architecturales limitent l’évolution de l’établissement. Ainsi
, le dernier
87
ANAP, Observatoire des coûts de la construction dans le secteur médico-social, 2011, p. 24 : le ratio
surface dans l’œuvre (SDO) par lits et places de l’Ehpad du CCAS est 68 m², contre
une médiane de
57 m² et un 9
e
décile de 74
m² pour 51 opérations immobilières d’Ehpad publics conduites entre 2005
et 2011.
88
Pour ce faire elle «
tient compte : -
du montant des annuités (intérêt et amortissements) […] et de la
rémunération des fonds prop
res investis […] ;
- du montant de la participation pour la couverture
des dépenses de gros entretiens et de renouvellement des composants fixé à un montant qui
correspond à 0,6
% du prix de revient prévisionnel de l’
Ehpad
[…] ;
- du coût annuel des frais
g
énéraux fixé à quatre euros et quarante centimes, par m² de surface habitable de l’opération,
actualisé tous les ans sur la base de la variation de l’indice INSEE du coût de la construction ;
- du
montant des primes d’assurances multirisque habitations, pa
yées annuellement ; -des impôts et taxes
non récupérables, notamment la Taxe Foncière sur les propriétés bâties, qui atteint progressivement
le montant prévu, au terme de la période d’exonération.
».
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
47
étage est desservi par un unique ascenseur. Les résidents admis à cet étage doivent donc être
parfaitement valides et mobiles. Cette contrainte contribue en partie à expliquer le niveau de
dépendance relativement faible constaté au sein de
l’
Ehpad. La mise en place effective de la
terrasse du
pôle d’activité et de soins adaptés
(PA
SA) a pris du retard et pourrait s’avérer
impossible compte-tenu des dénivelés existants. Au final, ce bâtiment récent se révèle à
l’usage peu adapté aux besoins d’un établissement pour personnes dépendantes.
4.1.6
Les recrutements répondent aux critères réglementaires
Bien que recrutés par contrats, les agents répondent aux qualifications fixées par le CASF.
Ainsi les deux directeurs de
l’
Ehpad et de
l’
Ehpa, chargés de mission contractuels disposent
de diplôme conformes à l’article
D. 312-176-10 du CASF applicable au CCAS. De la même
manière, les auxiliaires de soins territoriaux à des fonctions d’aide
-
soignant (AS) ou d’aide
médico-psychologique (AMP) répondent aux critères du décret n° 92-866 concernant
l’obligation de diplôme.
Un médecin coordonnateur est employé par
l’
Ehpad pour une quotité de 40 %, conforme à la
convention tripartite mais inférieure aux dispositions de
l’article
D. 312-156 du CASF. Pour
64 places, la quotité devrait atteindre 50 %. Or le médecin est sous contrat pour 15 heures
hebdomadaires. Par ailleurs employé par le CHU de Martinique, le médecin est impliqué dans
la prise en charge des résidents. Il a ainsi permis une adaptation rapide des protocoles dans le
cadre de la crise de la COVID 19, en lien avec les adaptations mises en place au CHU. Le
CCAS relève en revanche des difficultés de recrutement sur le poste de psychologue (50 %),
qui connaît un taux de vacance et de rotation significatif.
4.2
L’évolution de la prestation de restauration est représentative des
difficultés de gestion
La restauration est reconnue comme un élément déterminant du bien-vivre et de la qualité de
la prise en charge des résidents. Cependant, le CCAS a rencontré des difficultés pour apprécier
les besoins et faire face à des coûts significatifs.
4.2.1
Un
manque d’a
nticipation et une mauvaise appréciation des besoins
caractérisent les commandes liées à la restauration
Faute d’évaluation adéquate des besoins et par manque d’anticipation, le CCAS a commandé
à plusieurs reprises hors marché les repas des résidents de
l’
Ehpad.
En effet, le 22 janvier 2014, le CCAS a passé un marché en procédure adapté (MAPA) pour
la fourniture et la livraison de repas
à son établissement d’hébergement de personnes âgées
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
48
dépendantes. Or, en raison du rythme de commande, le plafond de ce marché
89
, a été atteint
dès août 2014.
La collectivité a lancé une procédure formalisée
afin d’assurer la continuité des livraisons à
compter du 1
er
septembre 2014, marché notifié en avril 2015. De septembre 2014 à mars 2015,
le CCAS a alors continué à faire appel au fournisseur précédent. Les factures correspondantes
pour un montant total de 166 838,17
€
HT
ont fait l’objet d’un protocole transactionnel.
Le marché de restauration de 2015 a été notifié le 2 avril 2015 avec une nouvelle société. Sa
durée d’un an reconductible trois fois
est arrivée à échéance le 1
er
avril 2019. Ce terme
n’a
pas été anticipé
, aucun nouveau marché n’étant notifié à cette date.
Un avenant a été signé le
17 avril 2019 afin de permettre la continuité de la prestation du 2 avril au 15 aout 2019. Puis,
le CCAS a continué de faire appel à cette société
jusqu’au 29 octobre 2019
en établissant un
certificat administratif pour régler les factures correspondantes.
En 2019, la délibération n°20/2019 a autorisé le lancement d’une
consultation pour la
fourniture de repas et de pains et de viennoiserie pour la restauration de
l’espace Gran Moun
,
ainsi que la signature des marchés dans le cadre d’un accord
-
cadre (deux lots) d’une durée
d’une année renouvelable trois fois (estimation
de 380 000
€ par an).
Cette procédure a été
lancée tardivement.
La chambre constate que le CCAS
n’a pas anticipé ses besoins de renouvellement de marchés
pourtant essentiels à son fonctionnement.
4.2.2
La prestation de restauration, assurée à un coût élevé, est payée avec retard
Les charges relatives à l’alimentation des résidents sont élevées. En
2020, le prix unitaire
pratiqué dans le cadre du marché était de 8,63
€ pour un déjeuner et de 7,99
€ pour un dîner.
Ces coûts s’expliquent en partie par le surcoût d’
approvisionnement outre-mer et par le
volume restreint de commande de
l’
Ehpad. Les petits déjeuners et la collation sont pris en
charge en sus.
Charges d’alimentation de l’
Ehpad (en euros)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Compte
6063*
14 676
44 476
50 388
37 016
36 590
49 741
26 278
Compte
6282
**
223 190
518 968
300 490
377 797
413 577
498 981
400 539
Source : comptes de gestion
*
Alimentation
–
achats
**
Prestations d’alimentation à l’extérieur
Le rythme d’engagement des factures d’alimentation n’est pas régulier
. Ainsi le compte 6282
«
Prestations d'alimentation à l'extérieur
» inclut en 2015 deux factures mensuelles et, en
89
F
ixé par la règlementation de l’époque à 207
000
€
HT
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
49
2016, 18 factures mensuelles, dont une rattachée. Les retards de paiement sont récurrents. Au
31 décembre 2021, la somme qui reste due
au prestataire s’élevait à 506
220,92
€,
dont
98 498,48
€ d’intérêts moratoires qui n’étaient pas mandatés. Le délai de paiement de l’
Ehpad
dépasse parfois les 365 jours alors que le délai règlementaire est fixé à 30 jours.
4.3
La fragilité financière de
l’
Ehpad
s’explique par des charges de
structure élevées et une gestion défaillante des produits
4.3.1
L’
Ehpad présente une fragilité financière
Les produits de la tarification
s’élèvent à
3
M€ en
moyenne annuelle. Leur évolution annuelle
est irrégulière, en raison notamment de retard et de rattrapage de facturation.
L’imputation
comptable a présenté des anomalies. En 2016,
l’
Ehpad a bénéficié
d’une subvention
d’équilibre du CCAS de 562
281
€
en raison de ses difficultés budgétaires.
L’exercice
2020
enregistre un rattrapage important de facturation.
Les charges de personnel (1,9
M€ en 20
20) représentent 63 % des charges courantes, un ratio
inférieur à la moyenne nationale (67 % pour les Ehpad tous statuts confondus et 69,6 % pour
les établissements
publics relevant d’un CCAS). Leur progression
annuelle moyenne de 2015
à 2019 de 1,3 % est maîtrisée.
L’année 2020, marquée par la crise
de la COVID 19, la
progression a été de 6,9 %.
De 2015 à 2021, quatre des sept exercices montrent une insuffisance d
’autofinancement
, qui
illustre la fragilité financière de la structure.
Indicateurs financiers du budget annexe de l’E
hpad (en euros)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Produits courants
2 458 647
2 566 552
2 998 192
3 354 160
2 499 356
4 195 601
3 540 785
Charges
courantes
2 476 969
3 195 530
2 954 292
2 961 340
2 921 613
3 003 161
3 560 546
Résultat excep.l
1 643
313 003
2 801
-5 813
379 012
78 719
-3 494
CAF brute/nette
*
- 16 679
- 315 974
46 823
388 708
- 42 463
1 271 199
-255
Résultat
comptable
- 34 173
- 333 168
29 629
365 245
- 64 202
1 254 736
-11 289
Source : CRC -
Anafi d’après les comptes de gestion
* La CAF brute et la CAF nette sont équivalentes
en l’absence d’emprunt
L’
Ehpad
ne réalise pas d’investissement. De 2015 à 2017
, s
es dépenses cumulées s’élèvent à
23 020,45
€
. Entre 2018 et 2020,
il n’en a engagé
aucune. De 2015 à 2020, le montant engagé
correspond à 0,13 % des dépenses de fonctionnement
de l’établissement
. L
’absence
durable
d’investissement
est préoccupante. En 2020, Un financement de 100 000
€
lui a été accordé.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
50
4.3.2
La tarification ne permet pas de couvrir les coûts
Conformément à la réglementation,
l’
Ehpad bénéficie trois sources de financements pour
l’hébergement, la dépendance et le soin.
Les trois sources de f
inancement d’un Ehpad
90
Le tarif relatif à l’hébergement doit couvrir les charges liées aux prestations hôtelières
(restauration, animation, accueil) ainsi que celles de la structure (administration générale,
entretien). L’E
hpad
étant habilité à l’aide sociale, le tarif hébergement est fixé par le président
de la collectivité territoriale de Martinique. Il est à la charge du résident sauf si ce dernier,
bénéficie - totalement ou partiellement -
de l’aide sociale à l’hébergement (
ASH).
L
e forfait relatif à la dépendance doit couvrir les dépenses liées à la perte d’autonomie,
notamment pour accomplir les actes du quotidien. Il concerne ainsi essentiellement les
prestations d’aide et de surveillance des personnes âgées en finançant la présence d’un
personnel qualifié (aides-soignants, aides médico-psychologiques) mais également de
matériel lié à la perte d’autonomie. Son montant est fixé par le président de la collectivité
territoriale de Martinique. La CTM prend en charge une partie de ce forfait en fonction du
niveau de ressources et de dépendance des résidents (via l’APA), le reste étant à la charge des
résidents.
Le forfait relatif aux soins doit couvrir les dépenses relatives à la prise en charge médicale des
résidents. Outre les équipements médicaux et les médicaments prescrits, il sert aussi à financer
la rémunération du médecin coordonnateur, des infirmières, des aides-soignantes et le cas
échéant à l’intervention d’autres professionnels de santé extérieurs. Il est fixé par le
directeur
général de l’ARS et mis en paiement par la CGSS.
Concernant la section hébergement, le dialogue de gestion avec la CTM pour la fixation du
tarif hébergement est réduit. Jusqu’
en 2021, les délais de transmission des documents par le
CCAS n’ont pas permis d’échanges contradictoires
et la collectivité territoriale a relevé
plusieurs insuffisances. Ainsi par un courrier en date du 25 janvier 2016, le président du
conseil exécutif de la CTM a rappelé au CCAS les dispositions réglementaires applicables aux
budgets du foyer-logement et de
l’
Ehpad, notamment les disposi
tions de l’article
R. 314-13
du CASF dans sa rédaction alors applicable entraînant la présentation «
en trois sections
tarifaires étanches
» et précisant le contenu de chaque section.
Concernant la section dépendance, le niveau de financement est contenu du fait du moindre
niveau de dépendance relevé servant de base à son calcul. Ainsi le GMP moyen en Martinique
en 2021
s’élève à 764 et celui
de «
espace gran moun
» était de 676 de 2015 à 2018 puis de
643 à compter de 2018. La direction n’a pas transmis d’e
stimation actualisée des GIR attestant
d’une
augmentation du GMP des résidents depuis 2018. La valeur du point GIR territorial
90
Extrait adapté de «
La prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad, un nouveau modèle
à construire
», Cour des compte, février 2022
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
51
s’élève à 8,86
€ en Martinique.
Stable depuis 2017, elle se situe en 2021 parmi les plus élevés
de France après la Guyane et la Corse
91
.
Certaines charges liées à la dotation soin n’ont pas été prises en charge. Ainsi le PASA n’est
pas fonctionnel et le demi-poste de psychologue est fréquemment vacant.
L’affectation d
e résultats sur les sections hébergement et dépendance
par l’autor
ité de tutelle
a obéré les capacités de redressement des comptes. En effet, l
’
imputation d
’une partie des
résultats des sections hébergement et dépendance par le conseil général de la Martinique puis
par la CTM au compte 114 «
dépenses refusées par
l’autorité de tarification
» exclut ces
déficits antérieurs.
Lors de sa mise en service,
l’
Ehpad a
connu des difficultés de tarification. Il n’y a pas eu de
facturation dans les délais au département et aux résidents ni de constitution des dossiers
d’aide
sociale entrainant un défaut de recettes. Ce déficit a été imputé au compte 114 par le
financeur à hauteur de 2 087 513,84
€
pour les années 2012, 2013, 2015 et 2016.
Le conseil d’administration du CCAS a suivi
c
es demandes d’affectation
pour les déficits
2012, 2013 et 2016, mais pas en 2015. Cette demande
n’est
pas conforme aux
articles R. 314-51
92
et R. 314-52
93
du CASF.
En l’espèce l’autorité de tarification n’a pas
«
écarté de dépenses manifestement étrangères
[…]
à celles envisagées pendant la procédure
de fixation du tarif
» mais a imputé un déficit
lié à l’insuffisance de
recettes au compte 114.
En l’absence de réserves de compensation, le déficit de la section hébergement aurait d
û être
affecté aux charges d’exploitation, éventuellement avec une repris
e étalée sur trois ans. De ce
fait, le budget annexe
de l’
Ehpad comporte à son bilan un déficit de 1,95
M€
94
dont les
perspectives
et les modalités d’apurement ne sont pas fixées à ce jour
95
.
91
Valeurs du point GIR des Ehpad par département, CNSA, data.gouv.fr, mis en ligne le 28 octobre
2021
92
Point III : «
Le déficit est couvert en priorité par reprise sur le compte de réserve de compensation,
le surplus étant ajouté aux charges d'exploitation de l'exercice au cours duquel le déficit est constaté,
ou de l'exercice qui suit. En cas de circonstances exceptionnelles, la reprise du déficit peut être étalée
sur trois exercices.
»
93
Version en vigueur du 26 octobre 2004 au 01
er
janvier 2017 : «
L'autorité de tarification peut, avant
de procéder à l'affectation d'un résultat, en réformer d'office le montant en écartant les dépenses qui
sont manifestement étrangères, par leur nature ou par leur importance, à celles qui avaient été
envisagées lors de la procédure de fixation du tarif, et qui ne sont pas justifiées par les nécessités de
la gestion normale de l'établissement »
.
94
2,08
M€ en tenant compte de l’ensemble des notifications du financeur, dont 1,57
M€ pour la section
hébergement et 0,52
M€ pour la section dépendance.
95
L’instruction interministérielle no DGCS/5C/DGCL/DGFIP/170 du 12
juillet 2018
relative à l’état
des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD) des établissements et services sociaux et médico-
sociaux publics gérés en M22 et à la mise à jour du plan comptable M22 indique que «
le compte 114
sera apuré ultérieurement lorsqu’un trava
il de fiabilisation de son solde aura été effectué (instruction
interministérielle à venir)
» sans qu’aucune précision n’ait été apportée depuis
.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
52
4.3.3
Le circuit de facturation, qui a présenté des défaillances significatives, est en
voie d’amélioration
4.3.3.1
Le circuit de facturation et le fonctionnement en régie de recette présentent des
fragilités importantes
La facturation aux résidents était assurée de 2015 à 2017 par un agent administratif, également
régisseur de recettes. Il a reçu un blâme en mai 2018.
Lors de la vérification de cette régie en 2016, la DRFIP relevait «
des anomalies significatives
qui ne permettent pas de donner une assurance raisonnable sur la maitrise des opérations
».
Elle soulignait que «
les enjeux liés à l’activité de cette régie instituée en 2012 n’ont pas été
pris en compte tant sur le plan de l’organisation et sur le plan comptable notamment en terme
de recettes.
».
Ces anomalies n’ont pas été corrigées
. En effet, l
ors de l’examen de cette régie
sur place, en
juillet 2021, diverses anomalies ont été relevées par la chambre, en présence du régisseur et
du régisseur suppléant
. L’encaisse dans le coffre dépassait les 13
000
€ tandis que le montant
maximal autorisé est de 4 200
€. Le
tableau de suivi ne permettait pas de chiffrer le montant
de
l’encaisse et aucune comptabilité des sommes figurant dans les enveloppes stockées dans
le coffre n’était tenue.
Le régisseur a procédé à la remise des fonds en espèces le 30 juillet 2021, soit une semaine
après la vérification de la chambre pour un montant de 15 696,66
€
. L
’une des
copies de
factures
96
transmise comporte la mention «
réglée
» et l
a date d’encaissement,
au
17 juin 2020. Elle permet de constater que des
fonds n’ont pas été déposés sur le compte du
trésor pendant plus d’un an. Le comptable public a diligenté un contrôle le 31
janvier 2022
mais n’a
pas relevé de difficultés majeures.
La chambre constate que le régisseur est chargé uniquement du recouvrement spontané des
recettes prévues dans l’acte constitutif d’une régie de recettes et n’a qualité ni pour accorder
des délais de paiement ni pour exercer des poursuites. Il est tenu dès la réception des fonds à
leur versement immédiat à la trésorerie.
Les dépôts au Trésor, intervenant parfois avec un retard significatif, sont suivis
de l’émission
des titres correspondant à ces seuls fonds. En revanche les factures émises et non réglées ne
font pas l’objet de
titres de recettes réguliers.
Cette situation s’appa
rente à un fonctionnement
en régie prolongée,
ce qu’elle n’est pas
. L
’établissement n’a pas pu démontrer
que les impayés
faisaient l’objet d’un titre individuel dans un délai raisonnable.
4.3.3.2
Les risques sont potentiellement significatifs mais non chiffrables
Cette organisation présente deux risques majeurs.
En premier lieu, la concentration sur un seul agent des tâches de facturation et de régisseur de
recette présente un risque
d’erreur voir
e de fraude.
L’agent régisseur en fonction jusqu’en
96
Datant de janvier 2019 à juillet 2021 pour c
inq résidents de l’
Ehpa et de juin 2020 pour un résident
de l’
Ehpad.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
53
2017 ne disposai
t pas des outils et de la formation adéquate comme l’a relevé la DRFIP en
2016 et
l’ordonnateur n’a procédé à aucun contrôle
non plus.
En second lieu, cette organisation compromet fortement le recouvrement des recettes. La
vérification précitée a relevé un écart de 299 142,60
€
entre le montant facturé et le montant
effectivement encaissé, soit un défaut d’encaissement de près de 40
%. Les factures impayées
ne sont pas titrées de manière régulière ce qui compromet leur recouvrement. Or, la célérité
est cruc
iale auprès d’une population âgée et/ou de ses obligés alimentaires. Outre la caducité
réglementaire, la conduite de démarches de recouvrement
s’avère d’autant plus compliquée
lorsque le résident a quitté l’établissement ou que le comptable doit recouvrer
une créance
dans le cadre de la succession.
En avril 2021, le serveur informatique a été piraté et crypté
97
. L
’intégralité des fichiers
informatiques a été perdue
. La chambre a pu constater que l’établissement ne disposait pas
d’archivage physique des
factures antérieures à 2019, ce qui aurait pu
limiter l’effet de cette
perte de bases de données
98
. En conséquence, le rapprochement entre la facturation réalisée et
les produits effectivement titrés et
enregistrés dans la comptabilité de l’organisme n’est
plus
réalisable. Cela
rend impossible l’estimation d’un
éventuel manque de recettes
pour l’
Ehpad.
Dès mars 2018, son directeur avait demandé au comptable public la marche à suivre pour
mettre fin à la régie de recettes sur site,
ce dernier n’a pas répondu
à cette sollicitation. Cette
demande a été renouvelée toujours sans suite effective à la date du contrôle de la chambre.
Pour faire face aux difficultés en matière administrative et comptable, le CCAS a fait appel à
un prestataire extérieur
pour assurer la clôture de l’exercice
2017.
Le recrutement d’un nouvel
agent en 2020 a permis de mener un important travail de fiabilisation et de rattrapage de la
facturation pour les exercices 2019 et 2020. Toutefois, cela
a été fait sur l’année courant
e et
non sur
l’
exercice antérieur, complexifiant le suivi du budget réalisé et le dialogue de gestion
avec la tutelle.
Suivi de la facturation et des restants dû au 31 juillet 2021
2019
2020
2021 (au 31/07)
Montant facturé aux résidents
1 005 291
1 014 973
524 521
Reste dû au 31/07/2021
388 836
589 073
354 281
Taux de restant dû
38,7 %
58,0 %
67,5 %
Source :
fichier de suivi de facturation interne à l’E
hpad (au 31/07/2021)
4.3.3.3
La gestion des résidents bénéficiant de l’aide sociale à l’hébergement
L’
Ehpad du CCAS de Fort-de-
France bénéficie d’une habilitation partielle de ses places à
l’aide sociale à l’hébergement
à hauteur de 45
places d’hébergement permanent
. Ce plafond
est régulièrement atteint. La directrice de la planification et de la programmation des
équipements sociaux et médico-sociaux de la CTM relève que cette habilitation partielle
97
Le cryptage des données consiste à les convertir
de telle manière qu’elles soient
inintelligibles.
98
Dans le cadre du procès-verbal de contrôle de la régie dressé par le comptable.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
54
garantit la mixité sociale dans l’établissement et la soutenabilité financière de la création de
nouvelles places.
Jusqu’à l’année 2017, la CTM procédait aux versements des frais d’hébergement au titre de
l’aide sociale par avance. N’obtenant que rarement les informations des établissements pour
procéder aux rattrapages, l’assemblée
de la collectivité territoriale a adopté par la délibération
n° 17-232-1 de nouvelles modalités de versement, sur la base des informations transmises par
l’établissement.
L
’avance de la CTM
pour 2022 a été définie sur la base de
l’état 2021 des
frais de séjour en hébergement des résidents bé
néficiaires de l’aide sociale
transmis par le
CCAS. Toutefois ce dernier inclut les recettes prévisionnelles et non les ressources
effectivement perçues des hébergés. De ce fait,
l’établissement
porte le risque de non-
recouvrement de ces sommes. Il appartient à
l’
Ehpad
de mettre en œuvre, en lien avec le
comptable public, les dispositions de l’article
L. 132-4 du CASF permettant un versement
direct au comptable public de la part contributive du résident sous certaines conditions.
4.3.3.4
Des améliorations complémentaires sont nécessaires
Afin de limi
ter les écueils de l’organisation actuelle, il convient de d
écrire et ainsi de
formaliser la procédure de facturation, en fixant les échéances, les responsabilités de chaque
acteur et les contrôles et vérifications réciproques. A défaut de contrôle interne, il est
nécessaire de tracer les contrôles croisés.
La suppression de la régie de recettes de
l’
Ehpad et de
l’
Ehpa pourra utilement être examinée
par l’ordonnateur et le comptable.
En effet, l
a mise en place d’avis de sommes à payer
compatibles avec les paiements pris en charge par le Trésor Public (TIP, prélèvement,
virement ou paiement en ligne) est susceptible de réduire le traitement de recettes au niveau
de la régie tout en préservant les habitudes des usagers et de leurs familles, à l’exception des
paiements sur site en numéraire. Les risques identifiés pourront ainsi être limités.
Recommandation n°
8 : Facturer mensuellement et titrer systématiquement les produits
à charge des résidents (performance).
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE _____________________
L’établissement
n’a pas défini son cadre d’action stratégique et la convention
tripartite est obsolète. Il
a mis en place les outils d’accueil du résident, conformément à la
réglementation. Toutefois, le conseil de la vie sociale est inactif depuis six ans. La mise en
place des projets d’accompagnement
personnalisé demeure inaboutie et la démarche qualité
s’amorce avec la conduite d’une première évaluation interne en cours. La mise en œuvre de
la prestation de restauration dénote des fragilités de gestion. Outre les insuffisances dans
l’appréciation des besoins, elle se caractérise par un coût toujours élevé.
La soutenabilité financière de
l’
Ehpad est conditionnée à une amélioration marquée
et durable de la chaîne de facturation et de recouvrement mais également à la maîtrise des
charges liées à l’hébergement
.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
55
RECOMMANDATIONS*
(classées dans l’ordre de
citation dans le rapport)
Recommandations (régularité)
Totalement
mis en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mis
en œuvre
Page
Recommandation n
o
1 :
Réaliser l’analyse des besoins
sociaux prévue à l’article R.
123-1 du CASF avec
l’ensemble des partenaires et la présenter au conseil
d’administration
X
9
Recommandation n
o
4 :
Mettre fin au régime de prime
de retraite, dénué de base réglementaire, aux aides
ménagères
X
26
Recommandation n
o
5 :
Appliquer les critères de
recours aux contractuels prévus au code général de la
fonction publique
X
28
Recommandation n
o
6 :
Surveiller et respecter les
seuils pour appliquer les procédures de commande
publique adéquates conformément aux dispositions de
l’
article L. 2120-1 du code de la commande publique
X
34
Recommandation n
o
7 :
Mettre en place conformément
aux dispositions de l’article R.°314
-78 du CASF le
budget annexe du service d’aide à domicile
X
37
Recommandations (performance)
Totalement
mise en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mise
en œuvre
Page
Recommandation n
o
2 :
Définir la stratégie du CCAS
sur la base de l’analyse des besoins sociaux
X
9
Recommandation
n
o
3 :
Etablir
une
convention
pluriannuelle d’objectifs et de moyens entre la commune
et le CCAS
X
23
Recommandation n
o
8 :
Facturer mensuellement et
titrer systématiquement les produits à charge des
résidents
X
55
* Voir notice de lecture en bas de page.
NOTICE DE LECTURE
SUR L
’AVANCEMENT DE LA MISE EN ŒUVRE DES RAPPELS AU DROIT ET DES RECOMMANDATIONS
Les recommandations de régularité (rappels au droit) et de performance ont été arrêtées après examen des réponses écrites et des pièces justificatives
apportées par l
’
ordonnateur en réponse aux observations provisoires de la chambre.
Totalement mise en
œuvre
L
’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre la totalité des actions ou un ensemble complet d’
actions permettant de répondre
à la recommandation, même si les résultats escomptés n
’
ont pas encore été constatés.
Mise en œuvre en cours
L
’organisme contrôlé affirme avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires au respect de la recommandation et indique
un commencement d
’
exécution. L
’
organisme affirme, de plus, avoir l
’
intention de compléter ces actions à l
’
avenir.
Mise en œuvre
incomplète
L
’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires sans exprimer d’
intention de les compléter
à l
’
avenir.
Non mise en œuvre
Trois cas de figure :
-
l’
organisme contrôlé indique ne pas avoir pris les dispositions nécessaires mais affirme avoir l
’
intention de le faire ;
- ou il ne précise pas avoir le souhait de le faire à l
’
avenir ;
- ou il ne fait pas référence, dans sa réponse, à la recommandation formulée par la chambre.
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
56
ANNEXES
Annexe n° 1. Glossaire des principaux sigles et acronymes employés
......................................
57
Annexe n° 2. Organigrammes de la commune et du CCAS de Fort-de-France
.........................
58
Annexe n° 3.
CDD d’une aide à domicile (catégorie C)
.............................................................
60
Annexe n° 4. Mesures prises lors des vagues 1 et 2 de la COVID-19
........................................
61
Annexe n° 5. Données sur les ressources humaines
...................................................................
62
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
57
Annexe n° 1.
Glossaire des principaux sigles et acronymes employés
APA
aide aux personnes âgées
ARS
agence régionale de santé
ASH
aide sociale à l’hébergement
ASPA
allocation de solidarité aux personnes âgées
BOAMP
Bulletin officiel d'annonces des marchés publics
CA
conseil d’administration
CCAS
centre communal d’action sociale
CASF
code de l’action sociale et des familles
COROM
contrat de redressement outre-mer
CGCT
code général des collectivités territoriales
CGSS
caisse générale de sécurité sociale
CHSCT
comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail
CIAS
centre intercommunal d'action sociale
CTM
collectivité territoriale de Martinique
DIECCTE
direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du
t
ravail et de l’
emploi
DRF
dépenses réelles de fonctionnement
DRH
direction des ressources humaines
Ehpa
établissement d’hébergement pour personnes âgées
Ehpad
établissement d’hébergement pour
personnes âgées dépendantes
ETP
équivalent temps plein
GIR
La grille AGGIR (Autonomie, Gérontologie Groupe Iso Ressources) est
un outil permettant d'évaluer le degré de dépendance des personnes
âgées
GMP
GIR moyen pondéré
GPEC
gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
GRH
gestion des ressources humaines
JOCE
journal officiel de
l’union
européenne
MAPA
marché à procédure adaptée
PASA
pôle d'activités et de soins adaptés
PCH
prestation de compensation du handicap
RH
ressources humaines
SAAD
service d’aide
et d'accompagnement à domicile
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
58
Annexe n° 2.
Organigrammes de la commune et du CCAS de Fort-de-France
Organigramme de la commune de Fort-de-France
Source : Commune de Fort-de-France, www.fortdefrance.fr/ma-mairie/services-municipaux, consulté le
13 décembre 2021
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
59
Organigramme du CCAS de Fort-de-France (Direction actions sociales et
solidarités)
Source : CCAS de Fort-de-France, décembre 2021
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
60
Annexe n° 3.
CDD d
’une
aide à domicile (catégorie C)
Période
Date de signature
Fondement
99
01/11/2021
30/04/2022
29/10/2021
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/08/2021
31/10/2021
09/07/2021
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/05/2021
31/07/2021
19/04/2021
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/02/2021
30/04/2021
25/01/2021
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/11/2020
31/01/2021
22/10/2020
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/08/2020
31/10/2020
15/07/2020
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/05/2020
31/07/2020
28/04/2020
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/04/2020
30/04/2020
03/04/2020
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/01/2020
31/03/2020
13/01/2020
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/11/2019
31/12/2019
04/11/2019
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/10/2019
31/10/2019
25/09/2019
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/07/2019
30/09/2019
04/07/2019
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/04/2019
30/06/2019
25/03/2019
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/01/2019
31/03/2019
03/01/2019
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/10/2018
31/12/2018
04/10/2018
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/09/2018
30/09/2018
03/09/2018
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/07/2018
31/08/2018
03/07/2018
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/04/2018
30/06/2018
05/04/2018
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/01/2018
31/03/2018
04/01/2018
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/10/2017
31/12/2017
09/10/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/09/2017
30/09/2017
14/09/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/06/2017
31/08/2017
03/07/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
03/04/2017
28/04/2017
21/04/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
02/03/2017
31/03/2017
02/03/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
01/02/2017
24/02/2017
10/02/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
18/01/2017
31/01/2017
02/03/2017
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
12/12/2016
17/01/2017
22/12/2016
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
03/11/2016
18/11/2016
10/11/2016
article 3-1 : remplacement d'agents en congé annuel
29/08/2016
30/09/2016
29/08/2016
article 3-2 : accroissement saisonnier d'activité
05/08/2016
26/08/2016
11/08/2016
article 3-2 : accroissement saisonnier d'activité
99
Article 3-1 ou 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la FPT
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
61
Annexe n° 4.
Mesures prises lors des vagues 1 et 2 de la COVID-19
Objectifs
Réponses opérationnelles
Les mesures d’isolement
dans les EHPAD seront
accompagnées
d’initiatives favorisant le
maintien du lien social et
lutter contre l’isolement
Ehpad
Appel vidéo pour maintenir le lien avec les familles en l’absence de visites
(reprise des visites à la demande du résident selon un protocole sanitaire
strict)
Toutes les chambres sont équipées en prises téléphoniques et l’équipement
en téléphone se fait avec l’accord du résident
Les mesures prises pour
accompagner les
personnes isolées à
domicile
Mise en place d’une veille sociale 7j/7j
Mise en place d’un numéro dédié pour les problématiques sociales
rencontrées par la population
Mise en relation selon la problématique avec les partenaires institutionnels
ou associatifs
Mise en place d’une cellule d’appelants pour les personnes âgées, fr
agiles,
vulnérables et isolées
Mise en place d’une cellule pour le soutien psychologique des administrés
repérés
Mise en place du portage de repas
Mise en place de livraison de colis alimentaire
Participation à la cellule territoriale d’appui à l’isolemen
t et à la
quatorzaine
Soutenir les initiatives
Conventionnement avec des associations qui favorisent le lien social et la
distribution de colis alimentaires
Garantir la continuité
des soins et
l’accompagnement au
domicile des personnes
âgées ou dépendantes.
Maintien de l’activité d’Aide à domicile
Sécurisation des sorties d’hospitalisation du CHUM
Mise en place d’un dispositif de portage de médicaments dans le cadre du
renouvellement des ordonnances
Actions pour les publics
précaires
Distribution des masques grand public (dotation Etat)
Source
: CCAS, Rapport d’activité 2020
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
62
Annexe n° 5.
Données sur les ressources humaines
Pyramide des âges des agents du CCAS en décembre 2020 (hors Ehpad et Ehpa)
Source : Chambre régionale des comptes, fichier de paie de décembre 2020
Nombre et statut des agents rémunérés par service en novembre 2021
Titulaires
Non-titulaires
Total
Part des
titulaires
DIRECTION CCAS
2
1
3
67 %
ACTIONS SOCIALES
11
2
13
85 %
AFFAIRES GENERALES
12
1
13
92 %
AIDES LEGALES
9
1
10
90 %
AIDES A DOMICILE
2
34
36
6 %
SERVICE EHPAD
3
47
50
6 %
EHPA
1
2
3
33 %
Total général
40
88
128
31 %
Source : Chambre régionale des comptes à partir du fichier de paie de novembre 2021
Versement de l’allocation de retour à l’emploi (ARE) par le CCAS
En €
2015
2016
2017
2018
2019
2020
CCAS (BP)
0
0
7 663
20 883
17 719
21 380
EHPAD
16 248
41 215
64 461
59 635
63 935
27 991
EHPA
0
0
0
0
0
0
TOTAL
16 248
41 215
72 124
80 518
81 654
49 371
Source : Comptes de gestion
1
2
1
8
13
16
23
2
1
3
3
4
2
30-34
35-39
40-44
45-49
50-54
55-59
60-64
65-69
F
H
CCAS DE FORT-DE-FRANCE
63
Chambre régionale des comptes de la Martinique
Parc d
’
activités La Providence
–
Kann
’
Opé
–
Bât. D - CS 18111
97181 LES ABYMES CEDEX
adresse mél. :
antillesguyane@crtc.ccomptes.fr
www.ccomptes.fr/fr/antilles-guyane