Sort by *
Chambre régionale des comptes Corse, CS 60305, 20200 BASTIA
www.ccomptes.fr
Le
présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec
les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 18 octobre 2022.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
COLLECTIVITÉ DE CORSE
EXERCICE
DE LA COMPÉTENCE RELATIVE À LA
GESTION DES RESSOURCES EN EAU
Exercices 2017 et suivants
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
AVANT-PROPOS
Le présent rapport d’observations définitives est
adressé aux représentants légaux des
collectivités ou organismes contrôlés afin qu’ils apportent, s’ils le souhaitent, une réponse qui
a vocation à l’accompagner lorsqu’il sera rendu public.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
4
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
6
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
7
1
LA PROCÉDURE
.................................................................................................................
9
2
L’EAU EN CORSE
...............................................................................................................
9
3
LA MISE EN ŒUVRE DE
LA COMPETENCE
...............................................................
14
3.1
Une organisation administrative éclatée, qui peine à se structurer
...............................
14
3.2
Le champ d’intervention de la mission eau
..................................................................
15
3.3
Les relations avec l’office d’équi
pement hydraulique de la Corse
...............................
16
3.3.1 Un partage des rôles peu lisible
......................................................................................
16
3.3.2 Un contrat de concession non mis à jour depuis 1987
....................................................
17
3.3.3 Un déficit en matière de pilotage
....................................................................................
18
4
LA GOUVERNANCE DE L’
EAU
.....................................................................................
19
4.1
Le comité de bassin de Corse
........................................................................................
19
4.1.1
La composition de l’instance manque de lisibilité
..........................................................
19
4.1.2 Une représentativité insuffisante au regard des enjeux du changement climatique
........
20
4.1.3 Une activité soutenue mais un degré de participation hétérogène
..................................
23
4.2
La planification locale est inadaptée aux enjeux
..........................................................
25
4.2.1 Une mobilisation locale limitée
......................................................................................
25
4.2.2
L’absence de projets de territoire pour la gestion de l’eau
.............................................
28
4.2.3 La difficulté à désigner des structures porteuses
............................................................
29
5
LES ORIENTATIONS DE
LA POLITIQUE DE L’EA
U
..................................................
31
5.1
Le SDAGE 2016-2021 : des objectifs ambitieux qui ont manqué de portage pour
les atteindre
...................................................................................................................
31
5.1.1 Des objectifs incomplets sur le volet quantitatif
.............................................................
31
5.1.2
L’absence d’identification des bassins en déséquilibre
..................................................
36
5.2
Des résultats modestes et d’importantes marges de progrès
.........................................
36
5.2.1 Des objectifs environnementaux non atteints
.................................................................
36
5.2.2 Des outils de suivi à améliorer et à mettre à jour
............................................................
38
5.2.3
Des indicateurs en baisse mais une amélioration du suivi des masses d’eau
.................
39
5.3
Le SDAGE 2022-2027
: les apports du plan de bassin d’adaptation au changement
climatique
......................................................................................................................
40
5.3.2
Le plan de bassin d’adaptation au
changement climatique : un outil concret pour
améliorer les connaissances
............................................................................................
42
5.3.3 Le SDAGE 2022-2027, des dispositions qui restent imprécises et faiblement
contraignantes
.................................................................................................................
45
5.4
La cohérence du SDAGE 2022-
2027 avec les autres documents d’aménagement
......
47
5.4.1
La compatibilité avec les documents d’urbanisme
.........................................................
47
5.4.2
La compatibilité avec les politiques portées par le plan d’aménagement et de
développement durable de la Corse (PADDUC)
............................................................
48
5.4.3
L’articulation avec le schéma hydraulique Acqua Nostra
2050
.....................................
51
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
5
6
LES FINANCEMENTS ALLOUES A LA POLITIQUE
DE L’EAU
................................
54
6.1
Des financements en matière d’eau brute centrés sur la réhabilitation des ouvrages
existants
.........................................................................................................................
55
6.2
Des
financements en matière d’eau potable ciblés sur la remise à niveau et la
réhabilitation des ouvrages
...........................................................................................
58
6.3
Une sous-
mobilisation et des retards dans l’utilisation des crédits
...............................
60
7
DES MARGES DE MANŒUV
RE IMPORTANTES
........................................................
61
7.1
Des réseaux aux rendements médiocres
.......................................................................
61
7.2
La tarification de l’eau agricole
....................................................................................
62
7.3
L’animation en faveur des projets de territoire pour la gestion de l’eau est
insuffisante
....................................................................................................................
63
7.4
La nécessité de développer l’assistance technique aux collectivités
............................
63
7.5
La production des connaissances : une démarche transversale à renforcer
..................
65
7.5.1
Un suivi quantitatif des masses d’eau à conforter
..........................................................
65
7.5.2
L’absence de diagnostics précis au niveau des bassins
-versants, point de départ des
démarches de concertation
..............................................................................................
66
7.5.3
Des retards dans la réalisation d’études et d’outils à l’échelle du bassin
.......................
66
8
CONCLUSION
...................................................................................................................
69
ANNEXES
...............................................................................................................................
70
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
6
SYNTHÈSE
La loi attribue à la collectivité de Corse des compétences étendues dans le domaine de
la gestion de l’eau
. Dans ce cadre, elle approuve les documents de planification comme le
schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE)
ainsi que le plan de bassin
d’adaptation au changement climatique (PBACC).
La collectivité
s’appuie sur
le comité de bassin, dont la compos
ition mériterait d’évoluer
afin que les territoires identifiés comme vulnérables aux enjeux de la ressource en eau soient
mieux représentés.
De même, les intercommunalités, appelées à jouer un rôle majeur dans
l’élaboration des projets de territoire pour la gestion de l’eau
,
pourraient utilement l’intégrer.
La planification locale accuse des retards importants. Malgré
l’intérêt
exprimé par la
collectivité de Corse en faveur des
projets de territoire pour la gestion de l’eau
, un seul est en
cours
d’élaboration,
depuis juillet 2022
. Seuls deux schémas d’aménagement et de gestion des
eaux (SAGE) couvrent 10 % du territoire et un peu plus de la moitié de la population.
Le bilan du schéma directeur
d’aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE) pour la
période 2016 à 2021 est modeste : les objectifs environnementaux
n’ont pas été atteints
et les
indicateurs sur l’équilibre quantitatif
des masses
d’eau
ont été revus à la baisse. Les territoires
particulièrement vulnérables n’ont fait l’objet d’une identifi
cation
formelle qu’en
2022.
Le nouveau SDAGE pour la période 2022-2027 contient des améliorations par rapport
au schéma précédant. Il reste cependant un document de portée générale,
souffrant d’un manque
d’objectifs quantifiables et d’indicateurs de suivi.
Il est par ailleurs faiblement contraignant.
Son
articulation avec les autres documents stratégiques adoptés à l’échel
on territorial est
affectée par la question de la réalisation de nouveaux ouvrages de stockage.
Le niveau des connaissances reste globalement
insuffisant, tant en ce qui concerne l’état
des milieux que sur les pressions qui s’y exercent, ce qui n’est pas sans conséquence
s sur la
fiabilité des données contenues dans les documents stratégiques.
J
usqu’en
2020, les opérations structurantes portées par la collectivité de Corse se sont
inscrites dans le cadre du « programme hydraulique 2006-2015 » adopté en avril 2005. Elles
ont principalement consisté à sécuriser les capacités de prélèvement existantes.
L’analyse des
opérations aidées montre une sous-consommation des crédits disponibles et des retards
importants dans la réalisation des travaux.
Le
schéma d’équipement hydraulique «
Acqua Nostra 2050
», adopté par l’
Assemblée
de Corse le 30 juillet 2020, prévoit le doublement des capacités de stockage, en contradiction
avec les objectifs prioritaires contenus dans le SDAGE 2022-2027. Le
plan d’investissement
qui y est attaché, estimé à 600
millions d’euros (M€
),
n’est pas financé
pour l’essentiel
.
Les résultats de la collectivité de Corse pour
la mise en œuvre de la gestion équilibrée
de la ressource en eau sont contrastés, voire insuffisants. Des marges de progrès existent
cependant. L
a mise en œuvre d’
actions volontaristes pour développer les projets territoriaux de
gestion de l’eau
et
l’assi
stance technique apportée aux communes et à leurs groupements
devraient contribuer à la préservation des ressources, dans un contexte marqué par la fragilité
du territoire insulaire face aux effets du changement climatique.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
7
RECOMMANDATIONS
Recommandation n°
1 :
rationnaliser
l’organisation
administrative
des
services
qui
interviennent dans la mise en œuvre de la gestion des ressources en eau.
Page 14
Recommandation n°
2 :
formaliser la répartition de la maîtrise d’ouvrage entre la collectivité
de Corse et l’office d’équipement hydraulique de la Corse pour les opérations d’investissement
structurantes.
Page 17
Recommandation n°
3
: achever la régularisation du régime juridique des biens issus de
transferts anciens et formaliser
les conditions d’aménagement et d’exploitation des ouvrages
hydrauliques par
l’office d’équipement hydraulique de la Corse
.
Page 18
Recommandation n°4 :
faire évoluer la composition du comité de bassin en vue d'améliorer la
représentativité des intercommunalités, en particulier celles sises dans des territoires
particulièrement vulnérables aux conséquences du changement climatique.
Page 23
Recommandation n°
5 :
accélérer la mise en œuvre des projets de territoire pour la gestion de
l’eau dans les cinq micro régions identifiées par le plan de bassin d’adaptation au changement
climatique comme les plus vulnérables au changement climatique.
Page 29
Recommandation n°
6 :
élaborer et diffuser le guide « schéma directeur d'aménagement et de
gestion des eaux (SDAGE) et urbanisme ».
Page 48
Recommandation n°
7 :
mettre en cohérence le plan d’aménagement et de développement
durable de la Corse (PADDUC) avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE) 2022-
2027 sur la question des capacités de stockage de l’eau.
Page 51
Recommandation n°
8 :
généraliser
l’assistance
technique
aux
communes
et
aux
groupements, prévue à
l’article L.
3232-1-1 du code général des collectivités territoriales.
Page 64
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
8
Recommandation n°
9 :
renforcer la production de connaissances sur l’état des milieux ainsi
que sur les pressions qui s’y exercent afin de fiabiliser les données contenues dans les
documents de planification.
Page 67
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
9
1
LA PROCÉDURE
Le contrôle des comptes et de la gestion de la collectivité de Corse
sur l’exercice de
la compétence relative à la gestion des ressources en eau porte sur les exercices 2017 et
suivants. Il a été ouvert par lettre du 17 janvier 2022 de la présidente de la chambre au
président du conseil exécutif de Corse, ordonnateur depuis le 1
er
janvier 2017.
Le rapport d’observations provisoires a été adressé à l’ordonnateur en fonction qui
en a accusé réception le 13 juillet 2022. Des extraits ont été transmis aux personnes
nominativement ou explicitement mises en cause.
Après avoir analysé les réponses reçues, la chambre a arrêté le 18 octobre 2022 les
observations définitives ci-
après, qui portent sur l’organisation de la compétence et la
gouvernance de la politique de l’eau ainsi que ses orientations et son financement.
Elles ont
été adressées le 27 octobre 2022 à M. Simeoni, ordonnateur, qui en a accusé réception le
même jour. Aucune réponse n’est parvenue à la chambre.
Le contrôle s’inscrit dans le cadre des travaux de la formation commune aux
juridictions financières portant sur
la gestion quantitative de l’eau en période de changement
climatique.
2
L’EAU EN CORSE
Les ressources en eau, soit «
l’ensemble
des sources
d’approvisionnement potentiel
permettant de satisfaire des besoins liés à certaines activités humaines par l’intermédiaire
d’actions de prélèvements
1
», fon
t l’objet d’une gestion par bass
ins hydrographiques,
délimités par les lignes de partage des eaux superficielles
2
.
La Corse est un bassin hydrographique
3
, au sens des articles L. 212-1 à L. 212-6 du
code de l'environnement, qui
s’étend sur 8
722 km
2
. Il compte 234
masses d’eau
superficielles, dont 210
cours d’eau, regroupées au sein d’une quarantaine de bassins
versants
4
. Une quinzaine de
masses d’eau souterraines
est également recensée.
1
Source
: service d’administration nationale des données et référentiels sur l’eau (SANDRE).
2
Aux termes de l’article R.
1321-
37 du code de l’environnement,
les eaux douces superficielles
utilisées ou vouées à être utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine sont celles
des cours d'eau, des canaux, des lacs et des étangs appartenant ou non au domaine public.
3
Les informations chiffrées sont principalement issues du schéma directeur d'aménagement et de
gestion des eaux (SDAGE) établi pour la période 2022 à 2027
et de son rapport d’évaluation environnementale.
Le document est préparé par le comité de bassin.
4
Zone géographique de collecte des eaux par un cours d'eau et ses affluents et limitée à l'amont par
une ligne de partage des eaux qui correspond majoritairement à une ligne de crête.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
10
Masses d’eau superficielle
s en Corse, territoires et bassins versants
Source : schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 2022-2027
La Corse se distingue au sein du bassin méditerranéen par des précipitations
abondantes
5
, de l’ordre de
huit milliards de mètres cubes (m
3
) par an. La ressource est
toutefois
inégalement répartie dans le temps et dans l’espace, en lien avec la morphologie
du territoire et le climat méditerranéen. Les précipitations sont soumises à de fortes
variations saisonnières. Elles sont plus faibles sur le littoral, sur lequel se concentre la
population
6
. Peuplée de 350 000 habitants
7
, la Corse accueille près de trois millions de
visiteurs par an.
5
En Corse, les précipitations annuelles présentent une légère baisse depuis 1959. Elles sont
caractérisées
par une grande variabilité d’une année sur l’autre.
Source : Cerema, « Analyse des effets du
changement climatique en Corse » Rapport final d'étude
Mars 2021.
6
Aux termes de l’article L.
4424-9 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la
collectivité territoriale de Corse élabore le plan d'aménagement et de développement durable de Corse
(PADDUC). Le plan, approuvé en 2015 et modifié en 2020, définit une stratégie de développement durable du
territoire en fixant les objectifs de la préservation de l'environnement de l'île et de son développement
économique, social, culturel et touristique. Selon le PADDUC, le linéaire côtier rassemble 81 % de la
population de l’île.
7
Au 1
er
janvier 2022, la Corse compte 349 465 habitants. Entre 2013 et 2019, la population a
augmenté en moyenne de 1
% par an, soit près de trois fois plus qu’au niveau national (+
0,4 %). Source : Insee.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
11
Le
nombre limité d’unités industrielles et
la faible densité démographique limitent
les atteintes à la qualité de l’eau
.
En application de la
directive cadre européenne sur l’eau de 2000
8
, une évaluation de
l’état chimique
des eaux superficielles et souterraines est réalisée tous les six ans. Au plan
national
, la part des masses d’eau superficielles évaluées en
« bon état chimique » est de
62,9 % en 2015 (66,9 % en 2019
9
). L
’état écologique des masses d’eau est également
évalué
selon la même périodicité. M
oins de la moitié des cours d’eau et des plans d’eau sont
qualifiés en « bon état » écologique (45 % en 2015 et 43,1 % en 2019).
L
état écologique
des masses d’eau superficielles
du bassin de Corse est qualifié de
« bon » ou « très bon »
par l’agence de l’eau Rhône
-Méditerranée-Corse pour 88 % des
masses d’eau
en 2019
10
. Le « bon état chimique » est atteint par 97
% des masses d’eau en
2015, 98 % en 2019.
La publication de décembre 2020 du ministère de la transition écologique intitulée
« Eaux et milieux aquatiques
11
, » indique toutefois que la présence de pesticides dans les
cours d’eau, en baisse de 20
% au plan national entre 2008 et 2018, évolue défavorablement
en Corse, par une hausse de 31 % et plus de
l’indice
« pesticides »
dans les cours d’eau
.
En Corse, les prélèvements
12
annuels en eau sont de 838 millions de m
3
. La
production d’énergie
13
(eaux turbinées des barrages) utilise 87 %
de l’eau
prélevée. La
consommation en eau potable (46,7 millions de m
3
) et
l’eau
à destination de
l’agriculture
(58,3 millions de m
3
) forment
l’essentiel
du solde (110 millions de m
3
). Ces quantités
n’intègrent pas les
prélèvements et forages privés,
non déclarés à l’
a
gence de l’eau
14
.
Le nombre de captages en Corse est important lorsqu’il est rapporté à la population
15
.
8
Directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre
pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau
.
Les règles d’évaluation de l’état des eaux de
surface sont définies au plan national par l
arrêté du 27 juillet 2018 modifiant l'arrêté du 25 janvier 2010 relatif
aux méthodes et critères d'évaluation de l'état écologique, de l'état chimique et du potentiel écologique des eaux
de surface pris en application des articles R. 212-10, R. 212-11 et R. 212-18 du code de l'environnement.
9
Les données pour 2019 sont publiées par Eaufrance (service public d’information sur l’eau) dans son
Bulletin n°4 « Synthèse 2019 des états des lieux des bassins », février 2022.
10
Source
: Agence de l’eau Rhôn
e-Méditerranée-Corse, «
L’état des lieux des bassins
Rhône-Méditerranée et de Corse », mars 2020.
11
Source : Ministère de la transition écologique, DATALAB « Eaux et milieux aquatiques »,
décembre 2020.
L’indice
« pesticides »
dans les cours d’eau exprime
le niveau de contamination chronique des
cours d’eau par les produits phytopharmaceutiques. Il ramène notamment la concentration de chaque substance
composant cet indice à son écotoxicité dans les milieux aquatiques.
12
Constitue un prélèvement d'eau, toute action ou opération humaine consistant à soutirer, extraire ou
dévier un volume d’eau provenant d’une ressource en eau, à l’échelle d’un ouvrage de prélèvement, ou bien à
l’échelle de chaque point de prélèvement constitutifs d’un ouvrage de prélèvement, p
our une période donnée.
Le prélèvement,
associé à un volume d’eau exprimé en mètres cubes, à une période donnée
, est réalisé en vue
d’
usages particuliers (irrigation, alimentation en eau potable, industrie). Source
: service d’administration
nationale des
données et référentiels sur l’eau
(SANDRE).
13
Un quart de l’énergie produite en Corse est issue de l’hydroélectricité, cette dernière représentant
60
% de la production d’énergie renouvelable. Source
: État des lieux du bassin de Corse 2019.
14
Données 2019 de la Banque nationale des prélèvements en eau (BNPE), outil national dédié aux
prélèvements sur la ressource en eau, dont les informations sont issues de la gestion des redevances pour
prélèvement d’eau par les agences de l’eau.
15
1178 captages sont recensés en Corse en 2017, soit 7 fois plus que la moyenne nationale.
Source : Cerema, « Analyse des effets du changement climatique en Corse » Rapport final d'étude
Mars 2021.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
12
Prélèvements en eau par usages en Corse en 2019 (avec et hors secteur énergie)
Source : Banque nationale des prélèvements en eau (BNPE), retraitements Chambre régionale des comptes
Corse.
Entre 2012 et 2018, les prélèvements, hors
secteur de l’
énergie, augmentent de
manière modérée en Corse alors
qu’ils ont
tendance à diminuer au plan national
16
, en
moyenne.
L’ordonnateur rappelle l’importance du volume d’eau turbinée dans le total des
prélèvements et précise que cette eau est restituée dans le milieu naturel. La chambre observe
toutefois que cette utilisation n’est pas sans effets sur la continuité écologique des
milieux
concernés.
Variation annuelle
des prélèvements d’eau
, tous usages confondus*
Années
Variation annuelle des
volumes prélevés en Corse
(%)
Variation annuelle des
volumes prélevés en France
2012-2013
65,63 %
15,94 %
2013-2014
- 19,52 %
- 9,56 %
2014-2015
- 25,90 %
- 11,38 %
2015-2016
31,16 %
8,38 %
2016-2017
- 16,94 %
- 20,31 %
2017-2018
64,98 %
18,92 %
*Secteur de la production d’énergie inclus.
Source
: Chambre régionale des comptes, d’après les données de la BNPE.
16
Source : données produites par la BNPE.
87,0%
5,6%
7,0%
0,1%
0,4%
Energie (eaux turbinées)
Eau potable
Irrigation
Industrie
Canaux
43%
53%
1%
3%
Eau potable
Irrigation
Industrie
Canaux
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
13
Variation annuelle des prélèvements d’eau
, hors secteur de la production
d’
énergie
Années
Variation annuelle des
volumes prélevés en Corse
(%)
Variation annuelle des
volumes prélevés en France
(%)
2012-2013
- 3,87 %
- 0,06 %
2013-2014
- 10,17 %
- 8,25 %
2014-2015
9,72 %
5,08 %
2015-2016
- 5,45 %
- 0,99 %
2016-2017
24,00 %
0,06 %
2017-2018
- 4,98 %
- 0,31 %
Source : chambre régionale des comptes, à partir des données de la BNPE.
Le p
lan d’
aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC),
adopté par l’Assemblée de Corse en 2015 et
modifié en 2020, prévoit une augmentation de
la demande en eau agricole
17
, sans
apporter d’
autres précisions.
La population en Corse est desservie à 90 % par une eau répondant aux exigences de
qualité bactériologique. Cependant, des
réseaux de l’intérieur
de l’île,
concernant 10 % de
la population, ne parviennent pas à garantir la fourniture d’une eau conforme.
La situation
est liée à la vétusté des réseaux, à l’absence de filières de traitement adaptées et à une
insuffisance d’entretien des ouvrages.
L’or
donnateur précise que la présence de métaux liés
à la géologie peut rendre l’eau impropre à la consommation.
Selon le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et
l'aménagement
18
(Cerema), la Corse est exposée aux conséquences du changement
climatique. Une baisse sensible des débits annuels moyens des cours d’eau ainsi que
l’allongement et la précocité des périodes d’étiage sont observés depuis
plusieurs années
19
.
Or, les trois-quarts de la ressource prélevée proviennent des eaux de surface, dont la totalité
de l’eau à usage agricole.
Les projections issues des modèles de Météo-France tendent vers
une modification du cycle hydrologique avec une baisse des cumuls annuels (- 5 % à 2030,
- 10 % à 2050, de - 10 à - 40 % à horizon 2070).
Certains territoires
de l’île sont particulièrement vulnérables, tels que le Cap Corse,
la Balagne ou le Sud-Est.
Le bassin de Golo et Tavignano Fium’Orb
u sont les bassins les
plus exposés aux baisses de débits d’étiage.
Les périodes de sécheresse, de plus en plus marquées, sont susceptibles
d’
accentuer
les conflits
d’usage, en y intégrant
les besoins des milieux aquatiques, alors que la ressource
en eau est le plus souvent perçue comme abondante en Corse.
17
«
L’augmentation de la demande en ea
u agricole dans les années à venir pourrait provenir de la
mise en culture de 1 100 ha de fourrages supplémentaires ou encore de 7 600 ha de céréales destinées à
l’alimentation des cheptels insulaires. Ceci implique une
mobilisation des ressources naturelles hydrologiques
permettant une irrigation rationnelle et maîtrisée. ».
Source : PADDUC, livret I, Diagnostic stratégique
territorial, 2 octobre 2015.
18
Rapport du Cerema
« Analyse des effets du changement climatique en Corse »,
mars 2021.
19
En particulier
dans les bassins de Golo et Tavignano Fium’Orbo. Selon les projections, la
diminution des débits annuels moyens
des cours d’eau devrait être de l’ordre de 10
% à 40
% à l’horizon
2070.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
14
3
LA
MISE EN ŒUVRE DE LA
COMPETENCE
Aux te
rmes de l’article L.
4424-36 du code général des collectivités territoriales
(CGCT), l
a collectivité de Corse met en œuvre une gestion équilibrée des ressources en eau.
Un élu, conseiller exécutif, est en charge de la
politique de l’eau.
Il est également président
de l’Office d’équipement hydraulique de Corse (OEHC) et vice
-président du comité de
bassin
20
, instance présidée par le président du conseil exécutif de Corse.
Le cadre juridique et institutionnel qui entoure la mise en œuvre de la
politique de
l’eau par la collectivité de Corse est présenté en annexe n°
1.
3.1
Une organisation administrative éclatée, qui peine à se structurer
La compétence relative à la gestion des ressources en eau est administrée au sein de
la direction générale adjointe en charge de l’aménagement et du développement territorial.
La
mise en œuvre de la
compétence est répartie entre la « mission eau », elle-même
déclinée en quatre missions
21
, et deux directions
22
, non directement rattachées à la mission
eau
et par ailleurs compétentes pour la mise en œuvre d’autres politiques territoriales.
Dans ces directions, trois services sont impliqués dans la gestion des ressources, leur
organisation
n’a pas évolué depuis
la disparition des anciens départements
23
. Le service des
aides à l’eau et à l’assainissement (SEAE) et les services d’assistances techniques (SAT)
assistent les collectivités compétentes pour l
a mise en œuvre des services publics de l’
eau
potable, l
assainissement des eaux usées ainsi que la gestion des milieux aquatiques et la
prévention des inondations (GeMAPI). Sans remettre en cause leur intérêt pour les services
publics concernés, ces activités ne sont pas en lien direct avec la gestion des ressources en
eau, au sens des articles L. 4424-36 et suivants du CGCT.
Vingt-deux agents sont affectés à la
mise en œuvre de la compétence
. L
’organisation
actuelle des services n’est ni lisible à l’extérieur de la collectivité de Corse, ni favorable à
une mise en
œuvre efficace des décisions prises par les élus.
La chambre prend note de la nouvelle organisation présentée
par l’ordonnateur,
laquelle repose principalement sur la création d
’une direction du cycle de l’eau.
Recommandation n°
1 : rationnaliser
l’organisation
administrative des services qui
interviennent dans
la mise en œuvre de la gestion de
s ressources en eau.
20
Lors de sa séance du 4 mai
2022, le comité de bassin a reconduit le président de l’OEHC dans ses
fonctions de vice-président.
21
Les missions « secrétariat technique du comité de bassin » ; « gestion durable des services » ;
«
système d’information et de
gestion des eaux de Corse
SIGEC » et « animation du
plan de bassin
d’adaptation au changement climatique –
PBACC ».
22
L
a direction de l’attractivité, des dynamiques territoriales, de la politique de l’habitat et du logement
et la direction des milieux aquatiques et sécurité sanitaire.
23
Le service « assistance technique » est dédoublé entre la Corse-du-Sud et la Haute-Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
15
3.2
Le champ d’intervention de la
mission eau
La mission eau
coordonne l’action des différents services
de la collectivité de Corse
et de ceux des agences
et offices concernés, sans toutefois qu’ils soient placés sous son
autorité. Elle intervient dans quatre domaines et pilote les relations
avec l’
a
gence de l’
eau
Rhône-Méditerranée-Corse.
Organisation de la mission eau de la collectivité de Corse
Source : collectivité de Corse
La mission a également
pour rôle d’animer et d’assurer la mise en œuvre des actions
prévues par le « p
lan de bassin d’adaptation
au changement climatique dans le domaine de
l’eau
» (PBACC), adopté en 2018 par le comité de bassin. Il lui revient
d’accompagner la
réalisation des projets de territoire
et la création d’un système d’information et de gestion
des eaux de Corse (SIGEC).
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
16
Elle participe au secrétariat technique
24
du comité de bassin, assuré par l’
agence de
l’eau e
n collaboration avec la collectivité. Le secrétariat technique, composé de représentants
de la mission e
au, de l’
a
gence de l’eau et de la
direction régionale de l'environnement, de
l'aménagement et du logement
25
(DREAL)
permet de coordonner les travaux d’élaboration
et de suivi des différents schémas et plans relatifs à la politique de l’eau.
Il a notamment pour
fonctions
d’assurer la cohérence d’ensemble de la planification à l’échelle du bassin
de
Corse
26
. Il participe aux réunions des
commissions locales de l’eau
27
(CLE) et accompagne
l’élaboration des documents de planification loca
le (
schéma d’aménagement et de gestion
de l’eau
28
- SAGE et projet de territoire pour la gestion de l'eau
29
- PTGE).
3.3
Les relations avec l’
offi
ce d’équipement hydraulique
de la Corse
3.3.1
Un partage des rôles peu lisible
Les missions de
l’
o
ffice d’équipement hydraulique de la Corse
(OEHC),
établissement public de la collectivité de Corse, sont définie
s à l’article L.
112-12 du code
rural et de la pêche maritime. Depuis 2007
30
,
la situation financière dégradée de l’
office a
amené la collectivité à reprendre la maî
trise d’ouvrage des grands projets d’infrastructures
hydrauliques
31
,
en matière d’eau brute
notamment, sans que le dispositif ait été soumis à
l’assemblée délibérante.
Les opérations mineures, relatives aux travaux de renforcement et
d’extension de
s réseaux
d’
eau potable, restent
sous maîtrise d’ouvrage de
l’OEHC.
Cette organisation apparaît contraire aux statuts de
l’
établissement et aux missions
qui lui sont attribuées par la loi, selon lesquelles il
aménage et gère l’ensemble des ressources
hydrauliques pour le compte de la collectivité
32
. En outre, le processus de décision est alourdi
par les nombreuses étapes inhérentes
à l’exercice d’une responsabilité partagée s’agissant
des opérations portées par la collectivité.
La collectivité de Corse a créé un comité de pilotage en 2019
dont l’un des objectifs
est
de permettre à l’OEHC de retrouver la ma
îtrise des investissements structurants.
La chambre observe que les conclusions du comité n’ont pas été produites.
24
Les activités consistent en
l’
organisation et la planification des réunions du comité de bassin.
25
D’autres acteurs peuvent y être associés selon les besoins, notamment les autres services et
établissements de l’État ainsi que les agences et offices de la collectivité de Corse.
26
Il veille également à la coordination entre le SDAGE et le plan de gesti
on des risques d’inondation
(PGRI), élaboré
par la DREAL sous l’autorité du préfet coordonnateur de bassin, pour la rédaction des
dispositions communes aux deux documents.
27
Article L. 212-
4 du code de l’environnement.
28
Article L. 212-
3 du code de l’envir
onnement.
29
Instruction du Gouvernement du 7 mai
2019 relative au projet de territoire pour la gestion de l’eau.
30
Ce choix
a été explicité dans une note technique de l’OEHC et lors du vote d’une opération par
délibération n° 07/139 du 26 juillet 2007, relative à la réhabilitation de la réserve de Guazza.
31
L’octroi de subventions
au titre du p
lan exceptionnel d’investissement pour la Corse (PEI) pour la
Corse était conditionné à
une participation du maître d’ou
vrage
, que l’OEHC n’était pas en mesure d’apporter
.
32
Article L. 112-12 du code rural et de la pêche maritime.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
17
Recommandation n° 2 : formaliser la répartition de la
maîtrise d’ouvrage entre
la collectivité de Corse et
l’office d’équipement hydraulique de la Corse
pour les
opérations d’inv
estissement structurantes.
3.3.2
Un contrat de concession non mis à jour depuis 1987
L’aménagement et la gestion des infrastructures hydrauliques par l’OEHC s’appuie
sur une convention générale de travaux d’aménagement hydraulique
33
datée du 12 mai 1987,
dont l’
échéance est fixée au 31 décembre 2058.
Depuis 1987, la convention n’a fait l’objet
d’aucune mise à jour, en dépit des transferts de la tutelle des offices en 1991 puis des biens
de l’État en 2002 à la collectivité territoriale de Corse, devenue collectivit
é de Corse en 2018.
A
ux termes de l’article L.
4424-25
du CGCT, les biens mis à disposition de l’OEHC
par l’
État sont transférés dans le patrimoine de la collectivité territoriale de Corse qui en
assure l'aménagement, l'entretien, la gestion et, le cas échéant, l'extension. Le transfert des
biens
, débuté en 2002 entre la collectivité de Corse et l’établissement, est
inachevé. Les
biens, propriété de la collectivité
figurent à l’actif
du bilan de
de l’OEHC qui en assure la
gestion, en l’absence de convent
ion ou de dispositions statutaires venant préciser ce point.
En outre, le régime de propriété
des biens gérés par l’OEHC n’est pas unifié
:
-
à
l’issue de l’acte de partage des biens de la SOMIVAC entre l’OEHC et
un autre office
de la collectivité, certains
d’entre eux
sont toujours réputés appartenir
à l’
OEHC alors
qu’ils sont dévolus à
la collectivité ;
-
d
’autres
biens, ne figurant pas à
l’acte de partage, sont toujours la propriété de la
SOMIVAC ;
-
certains biens sont encore portés au nom de l’
État.
En réponse au rapport public annuel 2020 de la Cour des comptes sur les agences et
offices de Corse, le président du conseil exécutif
de la Corse s’est
engagé à sécuriser les liens
au plan juridique
entre l’établissement et
la collectivité de Corse, dans le cadre du comité de
pilotage créé en 2019, précité.
U
n travail d’inventaire
a permis de répertorier 788 biens dont 361 ne sont pas titrés
au nom de la collectivité
34
. Les travaux du comité ont été interrompus en 2020. La mise à
disposition des biens n’est toujours pas entièrement formalisée.
33
La convention est annexée au décret n° 97-319 du 12 mai
1987 portant cession à l’office de la
concession générale de travaux d’aménagements hyd
rauliques accordée à la société pour la mise en valeur
agricole de la Corse (SOMIVAC) par le décret n° 73-229 du 12 février 1973.
34
Sur le total des 361 biens, 317
appartiennent à l’OEHC
; 31 à la SOMIVAC et 13 à l’État.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
18
Recommandation° 3
:
achever la régularisation du régime juridique des biens
issus de transferts anciens et formaliser les c
onditions d’aménagement et
d’exploitation des ouvrages hydrauliques
par
l’office d’équipement hydraulique
de la Corse.
3.3.3
Un déficit en matière de pilotage
Le contrôle opéré par la collectivité sur
la gestion de l’OEHC
est inexistant.
L’office produit le
rapport annuel
d’activité de l’établissement.
Bien que détaillé, le
document ne retrace pas les opérations menées au titre de la concession. La collectivité ne
dispose pas des derniers comptes rendus annuels
d’activité (CRAC).
L
’OEHC transmet les données
annuelles règlementaires de suivi afférentes au parc
de barrages de la concession. Les versions périodiques des rapports de surveillance,
d’auscultation et de contrôle sont transmises annuellement de sorte à compléter
les éléments
servant à asseoir les con
trats d’assurance portés par la collectivité de Corse
en couverture
des risques du fait des barrages.
En dépit de la recommandation de la chambre dans son rapport de 2019 sur la gestion
des ressources humaines dans les agences et offices, aucun
contrat d’objectifs et de
performance n’a été établi entre la collectivité et l’OEHC.
Aux termes de l’
article R. 112-32 du code rural et de la pêche maritime
, l’
office a
pour mission l'aménagement et la gestion de l'ensemble des ressources hydrauliques de
Corse pour les usages autres qu'énergétiques.
Jusqu’en 2020, les investissements structurants
de la collectivité se référaient au programme hydraulique pour la période 2006 à 2015,
adopté le 27 avril 2005
35
.
En juillet
2020, le schéma d’aménagement «
Acqua Nostra 2050 », élaboré par
l’OEHC, a été adopté par l’
Assemblée de Corse. Le document fixe les grandes orientations
en matière d’aménagement hydraulique à l’horizon
2050. Il propose des actions et des
équipements en vue de faire face au changement climatique et plus spécifiquement aux
besoins en eau.
La chambre observe que
l’élaboration
du
schéma a été portée par l’office. Les
services de la collectivité, et notamment, la direction générale adjointe en charge de
l’aménagement et du développement des terri
toires, qui comprend la mission eau,
n’ont pas
été associés aux travaux préparatoires du plan « Acqua Nostra 2050 ».
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ____________________
La collectivité de Corse exerce des missions étendues qui incombent en France
continentale aux
agences de l’eau et aux préfets coordonnateurs de bassin.
Pour mettre
en œuvre
sa stratégie, la collectivité
dispose d’une vingtaine d’agents,
dispersés dans les services
d’
une direction générale adjointe,
dont l’organisation n’est pas
parachevée depuis la disparition des anciens départements.
35
Délibération n°05-69 AC adoptant
les orientations pour une politique régionale de l’eau.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
19
L
a collectivité s’appuie également sur
l
’un de ses établissement
s publics, l
office
d’équipement hydraulique de Corse (OEHC)
, créé par la loi,
sans qu’
un pilotage concerté
soit apparent. Les évolutions institutionn
elles intervenues depuis 1987 n’ont pas été prises
en compte et le régime juridique
des biens transférés par l’État
, nécessaires à la réalisation
des missions de l’office,
est toujours incertain.
4
LA GOUVERNANCE DE L’
EAU
4.1
Le comité de bassin de Corse
La composition du comité de bassin de Corse figure
à l’annexe n°
2.
4.1.1
La composition
de l’instance
manque de lisibilité
Depuis sa création par la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse
36
, la composition
du comité de bassin de Corse est définie par les dispos
itions de l’article L.
4424-36, II. du
code général des collectivités territoriales
37
, selon lesquelles l’Assemblée de Corse fixe par
délibération la composition et les règles de fonctionnement du comité. Ce même article
prévoit trois collèges, composés respectivement :
-
de représentants de la collectivité de Corse et des communes ou de leurs groupements ;
-
de représentants des usagers et de personnalités compétentes ;
-
de membres désignés pour moitié par le représentant de l'État et pour moitié par la
collectivité de Corse, notamment parmi les milieux socioprofessionnels.
Les membres des deux premiers collèges doivent détenir au moins deux tiers du
nombre total des sièges.
36
Le comité de bassin de Corse a été créé par la loi du 22 janvier 2022 relative à la Corse, il a été
installé le 10 octobre 2003. Les autres comités des bassins métropolitains datent quant à eux de la première loi
sur l’eau de
1964.
37
Selon l’article D.
213-18
du code de l’environnement
:
« La composition du comité de bassin de
Corse est arrêtée par l'Assemblée de Corse dans les conditions définies au II de l'article L. 4424-36 du code
général des collectivités territoriales. ».
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
20
Depuis
2017, l’
Assemblée de Corse a modifié plusieurs fois la composition et les
règles de fonctionnement du comité, en référence aux réformes législatives et réglementaires
applicables aux bassins de France métropolitaine, intervenues durant la période
38
. Si ces
dernières n’étaient pas directement applicables au comité de bassin
de
Corse, l’
Assemblée
de Corse s’en est
néanmoins inspirée, notamment pour intégrer de nouveaux acteurs. Le
nombre de membres est ainsi passé de 40 à 45 en 2018, puis à 50 en 2022.
Les délibérations prévoient en outre que la désignation des membres, dont la durée
de mandat est de six ans
39
, fasse
l’objet d’un arrêté du président du conseil exécutif de Corse.
Depuis 2017, la liste des personnalités désignées a été mise à jour au gré des changements
de fonctions et des résultats des deux élections qui se sont tenues au cours de la période
40
.
L
es modifications ont fait l’objet d’arrêtés du président du conseil exécutif.
4.1.2
Une représentativité insuffisante au regard des enjeux du changement
climatique
La composition du comité entre 2018 et 2022, bien que régulière, présente des
déséquilibres en matière de représentativité.
Les deux premiers collèges regroupent ainsi 80 %
de l’ensemble
des membres,
au-delà du minimum des deux tiers prévus par la loi.
Au sein de l’instance, la collectivité de Corse est fortement rep
résentée. Ses membres
composent la moitié du collège des élus. Tous collèges confondus, la collectivité et les
représentants de ses offices et agences représentent plus de 30 % des membres du comité.
38
En particulier la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation de la République (NOTRe) et la
loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Ces textes ont modifié
certaines règles de fonctionnement et de composition des comités de bassin métropolitains, mais pas
directement celles du comité de bassin de Corse.
39
Conformément à l’article
3 de la délibération n°17/293 du 22 septembre 2017.
40
Les deux élections territoriales de 2017 et 2021 et les élections municipales de 2020.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
21
Répartition des membres du comité par catégories entre 2018 et 2022
Source
: Chambre régionale des comptes, à partir des délibérations de l’
Assemblée de Corse fixant la
composition et les règles de fonctionnement du comité de bassin.
Plusieurs territoires ne sont pas représentés, parmi lesquels certains sont identifiés
comme très sensibles aux enjeux de la ressource en eau, tels que le Sud-Est et la Balagne
jusqu’à fin
2020
41
.
41
Un élu de Balagne a été désigné en décembre 2020.
33%
20%
11%
36%
De 2018 à 2021
CdC et ses offices
Autres collectivités et groupements
Etat et ses EP
Autres (usagers, personnalités qualifiées)
31%
20%
12%
37%
A compter de 2022
CdC et ses offices
Autres collecitivités et groupements
Etat et ses EP
Autres (usagers, personnalités compétentes)
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
22
Collectivités et groupements
représentés au comité de bassin jusqu’en
2021 et
territoires les plus sensibles à la disponibilité en eau (SDAGE 2022-2027)
Carte n° 1
Carte n°2
Carte n° 1 : collectivités et groupements
représentés au comité de bassin jusqu’en
2021.
Carte n° 2 : t
erritoires prioritaires pour l’élaboration du SDAGE
2022-2027, selon les préconisations du plan
de bassin d’adaptation au changement climatique
de 2018.
Source : chambre régionale des comptes
, d’après le
SDAGE 2022-2027.
Trois établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sont représentés
en 2022 (quatre auparavant). Or, les EPCI sont des acteurs essentiels au regard des
compétences exercées, notamment celle relative à la gestion des milieux aquatiques et la
prévention des inondations (GeMAPI) ou dont le transfert est à venir (services publics de
l’
eau et
de l’
assainissement). Ils sont également identifiés comme des territoires privilégiés
pour porter la mise en œuvre des
projets de territoire pour la gestion de l’eau
.
L’ordonnateur
fait valoir que seules trois communautés de communes ont reçu le
transfert de la compétence relative au
service public de l’eau.
La chambre rappelle toutefois que depuis 2018, la loi attribue de plein droit la
compétence en matière de GeMAPI aux EPCI, avec pour objectif le développement
d’une
approche intégrant le grand et le petit cycle de l'eau.
Si la responsabilité de nommer les représentants des collectivités locales a été en
partie dévolue aux associations des maires et présidents de communautés de communes, le
nombre de sièges qui leur est réservé ne favorise pas la représentation des différents
territoires.
À compter de 2018
Décembre 2020
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
23
En ce qui concerne la représentation des usagers et personnalités compétentes, un
effort de diversité est visible, avec l’intégration progressive de nouveaux acteurs liés à la
biodiversité
42
.
Cependant, l’équilibre entre les catégories d’usagers est difficile à évaluer car
les
dispositions applicables au comité de bassin de
Corse n’opèrent pas de distinction entre les
usagers dits économiques et non économiques de l’eau (auxquels sont associé
es les
personnalités q
ualifiées). L’
A
ssemblée de Corse n’a pas souhaité s’inspirer de
s évolutions
législatives récentes pour faire évoluer la composition du comité de bassin de Corse
43
.
Recommandation n°
4 : faire évoluer la composition du comité de bassin en vue
d'améliorer la représentativité des intercommunalités, en particulier celles sises dans
des territoires particulièrement vulnérables aux conséquences du changement
climatique.
4.1.3
Une activité soutenue mais un degré de participation hétérogène
Les règles de fonctionnement du comité de bassin de Corse sont fixées par
délibération de l’
Assemblée de Corse et détaillées dans son règlement intérieur
44
. Elles
reprennent pour l’essentiel les dispositions du code de l’environnement applicables aux
autres comités de bassin.
Le comité de bassin doit se tenir au moins une
fois dans l’année, mais en pratique,
celui-ci se réunit plus régulièrement, en moyenne de trois à quatre fois par an. En 2020,
malgré le contexte de crise sanitaire, il a siégé à deux reprises. Le quorum, fixé à la moitié
des membres, est atteint.
Les procès-verbaux et relevés de décisions du comité de bassin sont publiés sur le
site de l’
a
gence de l’eau Rhône
-Méditerranée-Corse
45
. Les règles destinées à prévenir les
conflits d’intérêts ont été reprises en
2018 dans le règlement intérieur
46
. Aucune situation de
lien ou conflit d’intérêt n’a été déclarée depuis
2017.
La
composition
resserrée
du
comité
facilite
l’expression
des
membres.
L’unanimisme
des décisions
peut s’expliquer par le fait que les documents soumis à
valida
tion font l’objet d’une large discussion en amont, dans le cadre du secrétariat technique
et des groupes de travail.
42
À compter de
2018, des représentants du Conservatoire d’espaces naturels de Corse ont été intégrés.
L’association I
nterbio Corse et le Centre régional de la propriété forestière sont également représentés depuis
2022. Un représentant de l’Agence française pour la biodiversité (AFB), devenue l’Office français de la
biodiversité (OFB) a également été nommé en 2018 puis en 2022.
43
La loi du 8 août 2016 relative à la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a
modifié l’article L.
213-8
du code de l’environnement pour créer trois
sous collèges
d’usagers
: les usagers non
professionnels de l'eau, les usagers professionnels du secteur agriculture pêche et les usagers professionnels du
secteur industriel et
de l’
artisanat. La loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action
publique crée un 4
ème
collège pour distinguer usagers économiques et non économiques de l'eau, représentés à
parts égales.
44
Adopté le 25 avril 2016
et plusieurs fois amendé par l’Assemblée de Corse.
45
Certains, parmi les plus récents, s’avèrent toutefois manquants.
46
Par délibération n°17/293 du 22 septembre 2017, une charte de déontologie a été annexée au
règlement.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
24
Le
niveau de participation est contrasté. D’une manière générale, si les présences
varient d’un comité à l’autre, les acteurs institutionnels (représentants de l’Etat et ses
établissements publics, ainsi que des agences et offices de la collectivité de Corse) occupent
plus souvent leurs sièges que les autres participants.
Taux d’occupation des sièges par catégories de membres
Source : Chambre régionale des comptes
, d’après
des procès-verbaux des comités de bassin et des données
transmises par la collectivité de Corse.
Par ailleurs, certains membres n’ont pas été désignés
durant plusieurs années
47
.
D’autres
sont souvent absents ou
n’ont jamais pris part aux séances
depuis
2019. C’est
notamment le cas des représentants du conseil régional nautique et de la chambre régionale
de commerce et d’industrie.
Pour ces membres, la collectivité a fait le choix de ne pas appliquer les règles
spécifiques prévues par le règlement intérieur du comité pour demander leur
remplacement
48
. Elle a préféré attendre le renouvellement des membres en 2022 en
modifiant la composition du comité pour nommer à leur place d’autres organismes.
Ce niveau contrasté de participation a eu tendance à accentuer les déséquilibres de
représentativité, notamment la faible représentation des élus locaux.
47
Le représentant du comité de massif a été désigné en mars 2022.
48
Selon l’article
20 du règlement intérieur, à partir de trois absences, le secrétariat saisit l'instance qui
a procédé à la désignation et lui demande de confirmer ou de proposer un autre membre. À défaut de réponse
dans un délai de trois mois, le membre est déchu de son mandat.
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Usagers non économiques/ personnalités…
Usagers économiques de l'eau
Etat et ses EP
Autres élus/collectivités
Offices et agences de la CdC
Elus de la Collectivité de Corse
Taux moyen d'occupation des sièges lors des comités de 2019 et 2021
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
25
4.2
La planification locale est inadaptée aux enjeux
4.2.1
Une mobilisation locale limitée
La création d’instances locales est liée à l’existence de démarches de planification à
l’échelle des bassins et sous
-bassins versants.
La mise en œuvre des
schémas d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE) au
niveau local dépend des orientations du schéma directeur d'aménagement et de gestion des
eaux (SDAGE)
, qui en fixe le périmètre et le délai d’élaboration.
À défaut, la collectivité de
Corse
peut, par délibération de l’
Assemblée de Corse, arrêter ces dispositions. Elle peut
également élaborer directement le projet de SAGE si celui-
ci n’est pas élaboré dans les délais
impartis
49
.
Actuellement, seuls deux SAGE ont été préconisés en Corse
50
, dont l’un est encore
en cours d’élaboration
:
-
l
e SAGE de l’étang de Biguglia, situé au nord
-
est de l’île, dans l’un
des secteurs les plus
urbanisés voire industrialisés de Corse
51
, a été approuvé le 24 avril 2014 ; son périmètre
a été arrêté par le préfet de la Haute-Corse en 1994 ;
-
le
SAGE Gravona, Prunelli, golfes d’Ajaccio et de Lava (GPGAL), à proximité de la
région ajaccienne, est en cours d’élaboration
; son périmètre a été établi par l’
Assemblée
de Corse en 2012.
Ces deux SAGE devaient être approuvés au plus tard avant fin 2015
52
. Le SAGE
GPGAL a reçu un avis favorable du comité de bassin le 3 février 2021.
À la suite de
son adoption par la commission locale de l’eau en décembre 2021,
l’
A
ssemblée de Corse projette d’organiser l’enquête publique en septembre
-octobre 2022,
pour une
adoption définitive avant la fin de l’année. L’élaboration du schéma aura donc pris
six années de retard et aura mis près de dix ans à se concrétiser. Ce délai est toutefois proche
de la moyenne nationale
53
.
Le SAGE de l’étang de Biguglia doit faire l’objet d’une modification ou révision
depuis 2019, afin d’être rendu compatible avec le SDAGE 2016
-2021 et désormais, avec le
SDAGE 2022-2027
54
.
49
Article L. 4424-36, III. du CGCT.
50
En parallèle, trois contrats de milieux ont également été élaborés : le contrat de baie du Valinco et
les contrats de rivière du Fango et de la Gravone.
51
Le SAGE couvre 180 km
2
et sept communes dans le sud de la région bastiaise : Furiani, Biguglia,
Borgo, Lucciana, Olmeta di Tuda, Murato et Rutali.
52
Selon la disposition 4-02 du SDAGE 2010-2015.
53
Selon le rapport d’évaluation nationale des SAGE
du ministère de la transition écologique
(octobre 2021
), à partir des données GEST’EAU, il faut en moyenne 9 ans pour finaliser un SAGE. La
dynamique générale est impactée par la durée de
la procédure et la difficulté à maintenir l’intérêt des membres
tout au long de la procédure.
54
Les SAGE doivent être compatibles ou rendus compatibles avec le SDAGE dans un délai de trois
ans suivant la mise à jour du schéma directeur.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
26
Périmètre des SAGE en Corse et leur état d’avancement
Source
: Documents d’accompagnement du SDAGE
2022-2027
Les documents représentent seulement 10 % du territoire contre 54 % du territoire
métropolitain. Ce faible maillage en Corse résulte du choix, opéré dans le SDAGE, de ne
pas généraliser la démarche au-delà des agglomérations.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
27
Couverture des bassins par les SAGE (en %)
Source
: Rapport d’évaluation nationale des SAGE
,
à partir des données GEST’EAU de
193 SAGE,
octobre 2020.
D
eux commissions locales de l’eau (CLE), instances de concertation chargées
d’élaborer et suivre les
schémas, sont installées en Corse :
l
a CLE du SAGE de l’étang Biguglia, créée par arrêté préfectoral du
15 décembre 1995
55
;
l
a CLE du SAGE Gravona, Prunelli, golfes d’Ajaccio et de Lava (GPGAL), créée par
délibération de l’
Assemblée de Corse 12/028 AC du 20 février 2012 et modifiée par
délibération n°17/340 AC du 26 octobre 2017.
Leur fonctionnement et leur composition fon
t l’objet en Corse de règles
dérogatoires
56
fixées par la collectivité de Corse. Quatre collèges sont comme ci-après
composés :
-
1° Pour 40 %, des représentants des collectivités territoriales, autres que la collectivité
de Corse, ou de leurs groupements ;
-
2° Pour 20 %, des représentants de la collectivité de Corse ;
-
3° Pour 20 %, des représentants des usagers, des propriétaires riverains, des
organisations professionnelles concernées et des associations de protection de
l'environnement ;
-
4° Pour 20 %, des représentants de l'État et de ses établissements publics.
La nomination des membres des CLE est arrêtée par le président du conseil exécutif
de Corse. La durée de leur mandat est de 6 ans. Leur président est élu parmi les représentants
du premier collège.
55
À la suite des transferts de compétences de 2
002, l’
Assemblée de Corse a fixé la composition et les
règles de fonctionnement de la CLE par délibération 06/067 AC du 10 avril 2006, modifiées par délibération
n°18/252 du 26 juillet 2018.
56
Fixées par l’article L.
4424-36
du CGCT précité et non l’article R.
212-30 du code de
l’environnement.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
28
À compter de 2018
57
, la CLE du SAGE de Biguglia est composée de 35 membres et
celle du SAGE de GPGAL de 40 membres.
La composition des commissions
58
respecte la répartition fixée par les dispositions
du CGCT.
4.2.2
L
’absence de
projets de territoire
pour la gestion de l’eau
En parallèle des SAGE, la mise en place de projets de territoire pour la gestion de
l’eau est encouragée par le
Gouvernement depuis 2015 et plus encore, depuis l
’instruction
du Gouvernement du 7 mai 2019. Les projets permettent
de définir un programme d’action
à l’échelle des territoires et d’aboutir à la répartition
concertée
des volumes d’eau par usage
.
Le SDAGE 2016-2021 du bassin de
Corse préconisait des plans d’action visant
au
partage de la ressource en eau à l’échelle des sous
-bassins
59
, sans toutefois en définir
précisément le contenu. À
la suite de l’adoption du plan de bassin d’adaptation au
changement climatique (PBACC) en 2018, la première disposition du SDAGE 2022-2027
place les projets
au cœur de la politique de l’eau et encourage leur généralisatio
n. Ils doivent
permettre d’identifier, plus rapidement et
via
un processus allégé de gouvernance, des règles
de partage de l’eau entre les besoins du milieu et les usages, ainsi que les objectifs
quantitatifs associés.
Néanmoins, à ce jour, ces dispositions n’ont jamais été mises en œuvre en Corse.
Ce n’est que par délibération du
25 octobre 2019, à la suite de
l’instruction du
Gouvernement du 7 mai 2019 indiquant que la collectivité de Corse est compétente pour
définir les situations dans lesquelles la conduite de projets doit être favorisée, que
l’
Assemblée de Corse en a précisé les modalités de gouvernance et de pilotage. Leur
élaboration est mise en œuvre sous l’autorité de la
collectivité et doit être accompagnée par
un comité technique, composé de représentants de la collectivité
et de l’
État, et de
personnalités qualifiées
de l’
Université de Corse. Un comité de pilotage, formalisé par arrêté
du président du c
onseil exécutif de Corse, a pour objet d’organiser la concertation entre les
acteurs locaux, dans les territoires qui ne disposent pas de CLE
60
.
Le comité technique n’a été in
stallé que le 23 février 2022. Aucun comité de pilotage
n’a encore été établi, y compris pour les territoires prioritaires.
57
La nomination des nouveaux membres a été effective par arrêté du Président du conseil exécutif de
Corse du 19 décembre 2018.
58
Le mandat actuel des m
embres de la CLE du SAGE de Biguglia court jusqu’en juin
2022 ; celui
des membres de la CLE du SAGE de GPGAL jusqu’en 2024.
59
Disposition 1-03 du SDAGE 2016-2021 sur la mise en place de « p
lans d’action
» pour le partage
de la ressource.
60
Selon l’instruc
tion du gouvernement de 2019 précitée :
«
En présence d’un SAGE, la CLE, étendue
aux parties intéressées non membres de la CLE, constitue le cadre du comité de pilotage du PTGE […] Les
différences de périmètres entre SAGE et PTGE induisent une adaptation de la composition du comité de
pilotage ».
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
29
Les projets de territoire pour la gestion de l’eau
Source : Chambre régionale des comptes.
En comparaison, 62 plans de gestion de la ressource en eau ont été adoptés dans le
bassin de Rhône-Méditerranée et
d’autres
sont
en cours d’élaboration
61
.
La chambre prend note du calendrier produit par
l’ordonnateur
selon lequel les PTGE
seront engagés à l’horizon 2024
dans les cinq territoires prioritaires, identifiés comme
particulièrement vulnérables au changement climatique. Il fixe en outre la validation des
plans
d’action
avant 2027.
Recommandation n°
5 : accélérer
la mise en œuvre des
projets de territoire pour la
gestion de l’eau
dans les cinq micro régions identifiées par le plan de bassin
d’adaptation au changement climatique
comme les plus vulnérables au changement
climatique.
4.2.3
La difficulté à désigner des structures porteuses
La
collectivité de Corse a privilégié le fait de s’appuyer sur l
es maîtres
d’ouvrages
locaux plutôt que de créer un établissement public spécialisé tels que les établissements
publics territoriaux de bassin (EPTB)
62
.
4.2.3.1
Le portage des
commissions locales de l’eau
Pour leur secrétariat et l’animation de
s travaux liés aux SAGE, les commissions
locales de l’eau
peuv
ent s’appuyer sur des structures dotées de la personnalité morale
63
, en
capacité de porter juridiquement et financièrement les études et les actions nécessaires à la
mise en œuvre des SAGE. Cette structure porteuse peut égal
ement être amenée à conduire
certaines actions pour lesquelles il n’existe pas de ma
î
trises d’ouvrage locales.
61
Données issues du site internet de l’Agence de l’eau Rhône
-Méditerranée-Corse.
62
Établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) ou é
tablissements publics d’
aménagement et
de gestion de l’eau (EPAGE), définis à l’article L. 213
-
12 du code de l’environnement, chargés de rassembler
tous les niveaux de collectivité pour faciliter l’exercice de leurs compétences à l’échelle du bassin. Un EPAGE
est plus spécialisé dans la prévention des inondations (compétences GEMAPI).
63
L’article R.
212-
33 du code de l’environnement dispose que l
a commission
« peut confier son
secrétariat ainsi que des études et analyses nécessaires à l'élaboration du schéma d'aménagement et de gestion
des eaux et au suivi de sa mise en œuvre à u
ne collectivité territoriale, à un établissement public territorial de
bassin ou à un groupement de collectivités territoriales ».
SDAGE 2016
Des"plans
d'actions" pour le
partage de l'eau
sont préconisés
Instruction
de mai
2019
Oct 2019 :
l'Assemblée de
Corse fixe les
modalités des
PTGE
Fin 2021 : SDAGE
2022 : PTGE, outil
phare de la
politique de l'eau
Fév 2022 :
Installation
du 1
er
comité
technique
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
30
Le SDAGE 2016-2021 a fait le choix de privilégier les EPCI
64
pour animer les
démarches de planification locale.
La CLE du SAGE Gravona,
Prunelli, golfes d’Ajaccio et de Lava est portée depuis
2009, par la communauté d'agglomération du pays ajaccien (CAPA)
. L’établissement
a
désigné un chef de projet dédié à l’animation de la commission. Dans la mesure où le
périmètre du SAGE ne correspond pas au seul territoire de la CAPA, une entente
intracommunautaire avec les communautés de communes du Celavu Prunelli et de la Piève
d’Ornan
o a été instituée en 2019
65
.
Pour la CLE du SAGE de Biguglia, cette stratégie s’est avérée plus difficile à mettre
e
n œuvre. Initialement portée par le
conseil départemental de Haute-Corse, propriétaire de
la réserve de l’étang de Biguglia, la CLE ne dispose plus de structure porteuse depuis la
création de la collectivité unique le 1er janvier 2018.
Près de cinq ans ap
rès la disparition du département, et à l’heure où le SAGE doit
faire l’objet d’une révision,
les initiatives sont interrompues. Les enjeux prioritaires
identifiés par les membres du
SAGE de l’étang de Biguglia n’ont pas été suivis d’effets
depuis cinq ans.
4.2.3.2
Le portage des
projets de territoire pour la gestion de l’eau
: une stratégie mal
définie
Le choix des EPCI comme l’échelon
de référence des démarches locales a été
réaffirmé pour la mise en œuvre des
projets territoriaux par le SDAGE 2022-2027.
Toutefois
, la délibération de l’
Assemblée de Corse relative aux modalités de mise en
œuvre des PTGE, ainsi que d’autres dispositions du SDAGE, n’évoquent pas les EPCI
comme les seuls porteurs possibles
66
. Les CLE et les « autres référents du territoire » sont
également mentionnés.
Depuis
la délibération précitée de l’Assemblée
de Corse en 2019, seule la
communauté de communes du Cap-
Corse a décidé d’engager, en juillet 2022, l’élaboration
d’un PTGE en lien avec la collectivité de Corse
. La prochaine étape devrait consister en la
désignation d’un comité de pilotage.
La chambre observe toutefois que
la pertinence du choix de s’appuyer sur les EPCI
plutôt que sur la création d’un établissement spécialisé, n’est pas démontrée
. Seuls quatre
EPCI en Corse dépassent le seuil de 15 000 habitants : les deux communautés
d’agglomération
du Pays Ajaccien et de Bastia ainsi que les communautés de communes de
Marana-Golo et du Sud Corse. Les moyens techniques et financiers des autres EPCI sont
limités.
64
Disposition 4-01.
65
La convention d’entente a été signée le
20 juin 2019
pour l’élaboration et le portage du SAGE.
66
La disposition 4-01 du SDAGE recommande
«
pour garantir une gestion locale efficiente […] que
les différentes collectivités impliquées mettent en place autour des EPCI, les moyens d’une concertation
réelle »
avant de préciser que
« les instances locales de bassi
n s’appuieront pour ces démarches sur une
structure publique adaptée (EPCI, CLE de SAGE…)
»
. La délibération indique quant à elle
« Un porteur local
du PTGE sera désigné avec son accord : communauté de communes, commission locale de l’eau de SAGE,
autre référent du territoire ».
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
31
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ____________________
La composition du comité de bassin, renouvelée en 2022,
mériterait d’évoluer afin
que les territoires identifiés comme vulnérables aux enjeux des ressources en eau soient
mieux représentés
au sein de l’instance
. De même, les EPCI appelés à jouer un rôle majeur
dans l’élaboration des
projets de territoire
pour la gestion de l’eau
pourraient utilement
l’
intégrer.
La planification au plan local se résume
à l’existence de
deux commissions locales
de l’eau, chargée d’élaborer
et de suivre les deux SAGE, lesquels couvrent 10 % du
territoire. Aucun projet de territoire
n’
a été mis en place alors que par délibération
d’octobre 2019,
la collectivité de Corse a approuvé
les modalités de leur mise en œuvre
.
La faible structuration d
es maîtres d’ouvrages locaux et les difficultés liées au choix
de structures porteuses expliquent l
es retards pris dans l’élaboration d’une
planification
locale efficace et adaptée.
Ces atermoiements ne sont pas de nature à améliorer la gestion locale des ressources
en eau, dans un contexte de fragilisation des équilibres en Corse.
5
LES ORIENTATIONS DE
LA POLITIQUE DE L’EA
U
5.1
Le SDAGE 2016-2021 : des objectifs ambitieux qui ont manqué de
portage pour les atteindre
5.1.1
Des objectifs incomplets sur le volet quantitatif
Conformément à l’article L.
212-1
du code de l’environnement, le SDAGE fixe les
objectifs à atteindre pour la qualité des eaux ainsi que les orientations fondamentales pour
une gestion équilibrée de la ressource dans le bassin.
Le schéma prévoit des objectifs de non dégradation, mais ambitionne également
d’atteindre d’ici
2021 le bon état écologique pour 25
masses d’eau superficielles
supplémentaires. En conformité avec la loi
67
, seule la situation des eaux souterraines est
assortie d’un ob
jectif quantitatif. Ces eaux étant déjà en équilibre en 2015,
à l’exception des
nappes alluviales de la plaine de la Marana-Casinca, le SDAGE prévoit un objectif de 100 %
d’ici
2021.
67
Article L. 212-1.
IV du code de l’environnement précité.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
32
Au total, sept
masses d’eaux font l’objet d’un report d’échéance à
2027 et huit sont
assorties d’un objectif moins strict au sens de la directive cadre européenne et du VI de
l’article
L. 212-1 précité
68
.
Objectifs de bon état des masses d’eau du SDAGE
2016-2021
Bon état/potentiel* écologique
Bon état/potentiel* chimique
Eaux superficielles
2015
2021
2027
2015
2021
2027
Nombre
de
masses
d’eau
(objectifs moins stricts inclus)
203
228 (+25)
234 (+6)
228
228 (=)
234 (+6)
En % du total des masses
d’eau
87 %
97 %
100 %
97 %
97 %
100 %
Nombre de
masses d’eau
avec
objectifs moins stricts
8
2
Bon état quantitatif
Bon état chimique
Eaux souterraines
2015
2021
2027
2015
2021
2027
Nombre de masses d’eau
14
15 (+1)
15
15
15 (=)
15 (=)
% du total de
s masses d’eau
93 %
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
*Le bon potentiel concerne les masses d’eau fortement modifiées.
Source : Chambre régionale des comptes, à partir du SDAGE 2016-2021
L’analyse détaillée des dérogations par masse d’eau figure dans les documents
techniques qui ont servi à l’élaboration d
u SDAGE
69
.
L’
argumentaire est parfois identique
pour justifier un report d’échéance ou motiver un objectif moins strict. Le choix entre ces
deux options n’appara
ît donc pas toujours explicite
70
.
68
Article L.212-1 VI. :
« Lorsque la réalisation des objectifs mentionnés aux 1°, 2° et 3° du IV est
impossible ou d'un coût disproportionné au regard des bénéfices que l'on peut en attendre, des objectifs
dérogatoires peuvent être fixés par le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux en les
motivant ».
69
Les documents sont publiés sur le site du comité de bassin de Corse.
70
Ainsi, les objectifs du golfe de Sain
t Lorent, qui fait l’objet d’un report d’échéance à
2021, et des
golfes de Santa-Manza et de Porto-
Vecchio, qui font l’objet d’un objectif moins strict, sont justifiés par le fait
que :
« Les mouillages forains et le piétinement génèrent des dégradations des petits fonds côtiers et en
particulier entrainent la disparition de certaines espèces. Jusqu'à ce jour, aucune donnée scientifique ne
démontre la recolonisation des fonds après la mise en place de mesures ».
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
33
Par ailleurs, l’arrêté du
17 mars 2006 relatif au contenu des schémas directeurs
d'aménagement et de gestion des eaux, modifié le 2 avril 2020, apporte des précisions sur
les éléments devant figurer dans le SDAGE, parmi lesquels la définition d’objectifs
quantitatifs plus précis pour les différentes masses d’eau
:
Pour les eaux superficielles : des objectifs de quantité constitués :
-
de débits de crise en dessous desquels seules les exigences de la santé, de la salubrité
publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population et les
besoins des milieux naturels peuvent être satisfaits ;
-
de débits objectifs d'étiage, dans les zones du bassin où un déficit chronique est constaté,
permettant de satisfaire l'ensemble des usages en moyenne huit années sur dix et
d'atteindre le bon état des eaux.
Pour les eaux souterraines : des niveaux piézométriques de crise ou des volumes
maximums prélevables, lorsque des zones de répartition des eaux « ZRE » (zones en
déficit chronique)
71
ont été arrêtées par le préfet.
Aucune zone de répartition des eaux
n’étant arrêtée en Corse, le SDAGE ne définit
pas de volumes prélevables dans les eaux souterraines. Cette circonstance n’est pas
évoquée
dans le document pour expliquer l’absence d’indicateurs.
Toutefois, le SDAGE 2016-2021
ne détermine pas non plus d’obj
ectifs de quantité
en période d’étiage pour les masses d’eau superficielles, notamment celles déficitaires (débit
de
crise
et
débits
d’objectifs
d’étiage).
En
comparaison,
le
SDAGE
Rhône-Méditerranée 2016-2021
définit plus d’une centaine de valeurs, couvra
nt près
de 90% des points stratégiques de référence du bassin
72
.
Pour la définition de ces différents objectifs, le document se borne à rappeler la
méthodologie à mettre en œuvre durant la période d’application du schéma
73
.
Ainsi, si les objectifs généraux de bon état
des masses d’eau
prévus par le SDAGE
témoignent de standards élevés en matière de protection de la ressource en eau, le document
pâtit de
l’
inexistence
d’objectifs quantitatifs précis
, avec pour conséquence un suivi
insuffisant
des masses d’eau sur le volet quantitatif
.
À ce titre, l’ordonnateur rappelle la
connaissance encore imparfaite de l’état des milieux.
Parmi les orientations dites fondamentales
nécessaires à l’atteinte des objectifs
environnementaux, le SDAGE 2016-2021 précise
l’enjeu d’une meilleure gestion de la
ressource.
La première orientation vise à «
assurer l’équilibre quantitatif de la ressource en eau
en anticipant les conséquences du changement climatique, les besoins de développement et
d’équi
pement ».
D’autres orientations concourent indirectement à l’amélioration de la
gestion quantitative, en particulier l’orientation n°
3, relative à la préservation et restauration
des milieux et l’orientation n°
4, relative à la gouvernance, à caractère transversal.
71
Au sens de l’article R.
211-71 du code de l
’environnement.
72
Sur les 129 points de référence retenus par le SDAGE, 114 sont assortis de valeurs de débits
d’objectifs d’étiage et/ou accompagnés de débit de crise (tableau
7C), soit près de 90 %.
73
Cette définition fait l’objet des dispositions
1-08
pour les débits d’objectifs «
Poursuivre la
définition de régimes hydrauliques fonctionnels aux points stratégiques de référence des cours d’eau
»
et 1-09 pour les volumes prélevables « Poursuivre la définition de niveaux piézométriques de référence et de
volumes prélevables globaux pour les eaux souterraines ».
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
34
Orientations fondamentales du SDAGE 2016-2021
Source : SDAGE 2016-2021 du bassin de Corse
La première orientation se décline en dix dispositions, dont plus de la moitié est liée
à l’amélioration des connaissances. Sont aussi prévues des actions sur le partage de l’eau,
les économies d’eau, l’optimisation des ouvrages existants et la création de ressources. Les
différents volets de la gestion quantitative sont ainsi couverts.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
35
Liste des dispositions de l’orientation fondamentale n°1
Source : SDAGE 2016-2021 du bassin de Corse
U
n effort de présentation a été réalisé afin de faciliter l’appréhension des différentes
dispositions. Celles-ci demeurent cependant imprécises et ce constat est en contradiction
avec le SDAGE, qui mentionne expressément que la qualité de la formulation adoptée doit
éviter de prêter à interprétation.
Certaines dispositions se limitent à la reprise des obligations réglementaires, sans
investir les marges de manœuvre laissées au bassin pour préciser ou renforcer les objectifs
attendus. La disposition 1-01
relative à l’optimisation des ouvrages vise ainsi les articles du
code de l’environnement relatif
s au respect des débits réservés et affectés, sans autres
précisions.
Les
leviers stratégiques identifiés ne sont que rarement assortis d’objectifs ou de
valeur de référence permettant de clarifier les finalités poursuivies. Seules deux dispositions
(1-08 et 1-09) comportent des éléments chiffrés et/ou cartographiés
74
.
Aucune échéance n’est mentionnée, si ce n’est pour la création de stations
hydrométriques complémentaires (disposition 1-08) et la mise en place du service
hydro-climatologique (disposition 1-07)
qui doivent être effectives d’ici à
2021.
74
La disposition 1-08
prévoit, durant la période de mise en œuvre du SDAGE, la création de
7 stations
hydrométriques supplémentaires et la disposition 1-09
la mise en œuvre d’études de niveaux piézométriques
sur 9 points stratégiques.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
36
Ce
manque
de
lisibilité
concerne
également
la
création
de
ressources
complémentaires (disposition 1-04). Les conditions de recours à de nouvelles capacités de
stockage, pourtant structurantes en matière de gestion des ressources en eau, ne sont pas
explicitées
: le SDAGE préconise à la fois la mise en œuvre des orientations du PADDUC,
qui prévoient la création de nouvelles ressources, et la réalisation d’un diagnostic sur les
économies d’eau possibles dans l
es microrégions déjà en déséquilibre, sans toutefois
subordonner la première action à la seconde. Cette rédaction ne permet pas de prioriser la
stratégie à mener.
5.1.2
L’absence d’identification de
s bassins en déséquilibre
Les articles L. 4424-26. III du CGCT et L. 212-1.
X du code de l’environnement
prévoient que les SDAGE identifient les zones pour lesquelles un SAGE est nécessaire, ainsi
que les délais dans lesquels ils doivent être élaborés.
Le SDAGE de Corse 2016-2021
ne prévoit pas l’élaboration de nouv
eaux SAGE
75
.
Le schéma évoque seulement cinq masses d’eau pour lesquelles le retour à l’équilibre
quantitatif doit être assuré (les alluvions de la plaine de la Marana, Barraci, le Reginu aval,
les ruisseaux
d’Erco et de Luri
,
à l’aval de Luri
) et pour lesquelle
s un plan d’action doit être
établi (disposition 1-03).
Or, l’absence d’identification formelle de
sous-bassins en déséquilibre est apparue
comme un frein à la mise en œuvre de démarches locales pour l’élaboration de diagnostics
et de bonnes pratiques en matière de partage de la ressource. Il faut attendre 2018 pour
obtenir des avancées sur ce point.
5.2
Des résultats modestes et d
’importantes
marges de progrès
Selon les termes des délibérations de l’
Assemblée de Corse approuvant les SDAGE,
la mise en œuvre des schémas est dévolue au président du
conseil exécutif de Corse. Le
comité de bassin reconnaît également le rôle essentiel de la collectivité dans la réalisation du
programme pluriannuel de mesures, aux côtés des collectivités
76
.
5.2.1
Des objectifs environnementaux non atteints
Le SDAGE 2016-2021 fixait un objectif de bon état/bon potentiel écologique
pour 97
% des masses d’eau superficielle
s en 2021. En 2019, 88
% des masses d’eau avaient
atteint cet objectif (soit 12
de plus qu’e
n 2015).
L’état écologique de
16
masses d’eau s’
est
amélioré mais il s
’est
dégradé pour quatre autres. Les objectifs de bon état chimique sont
déclarés atteints pour
l’ensemble des
masses d’eau
(98
% des masses d’eau en 2019)
.
75
L
es documents d’acco
mpagnement présentent uniquement une cartographie des SAGE arrêtés lors
des cycles précédents.
76
Délibération n° 2018-18 du 3 décembre 2018 du comité de bassin.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
37
Sur le volet quantitatif, le
bon état des masses d’eau souterraine
s, fixé à 100 %
pour
2021, n’est pas atteint et s’est même dégradé
: alors que le SDAGE 2016-2021
indiquait que 14 des 15
masses d’eau
concernées étaient en bon état en 2015, 13 le sont
en
2020, une masse d’eau étant i
dentifiée en déficit quantitatif.
La dégradation de l’état quantitatif des alluvions de la Plaine
-
Orientale, qui s’ajoutent
à ceux de la plaine de la Marana-
Casinca, s’expliquerait par des périodes exceptionnelles de
sécheresse et la difficulté à mettre e
n œuvre certaines actions de réduction des pressions
77
.
Pour les masses d’eau superficielles, l’absence d’objectifs quantitatifs ne permet pas
de conclure sur leur évolution.
L
’état des lieux du bassin en
2019 fait apparaître une forte augmentation du nombre
de masses d’eau, superficielles comme souterraines, concernées par un risque de non atteinte
des objectifs environnementaux (RNAOE) d’ici
2027, du fait des pressions liés aux
prélèvements en eau : celles-ci passent de cinq en 2013 à 16 en 2019
78
.
77
Source : état des lieux du bassin de 2019.
78
Le même document indique que ces résultats pourraient être liés pour partie
à l’amélioration des
connaissances sur l’état des masse
s
d’eau, sans apporter d’autres précisions.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
38
Mass
es d’eau concernées par un risque de non atteinte des objectifs
environnementaux du fait de prélèvements significatifs
Source : état des lieux du bassin 2019, comité de bassin de Corse (secrétariat technique).
5.2.2
Des outils de suivi à améliorer et à mettre à jour
Selon l’arrêté du
17 mars 2006 modifié, relatif au contenu des SDAGE
79
, le schéma
doit intégrer un dispositif de suivi comportant au moins 14 indicateurs, éventuellement
complétés d’indicateurs
propres au bassin, et renseignés a minima lors de la mise à jour du
schéma directeur.
Le dernier tableau de bord de suivi du SDAGE de Corse disponible concerne le bilan
à mi-parcours du SDAGE 2016-2021, adopté en septembre 2019. Il est basé sur des données
de 2017.
Le tableau de bord comprend au total 37 indicateurs. Six sont liés à la gestion
quantitative de la ressource en eau et vont au-
delà des trois prévus par l’arrêté sur ce volet.
79
Dans ses articles 1.II-5° et 12-V.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
39
Les indicateurs ont été complétés et améliorés par rapport à 2016. Le suivi quantitatif
de la ressource en eau a été décomposé pour mieux identifier le milieu auquel il se réfère.
Un indicateur relatif à l’équilibre quantitatif a été créé, afin d’évaluer certaines mesures du
PBACC (notamment la mise en œuvre des
projets de territoires), mais son intitulé mériterait
d’êtr
e précisé.
Indicateurs de suivi du tableau de bord volet « Gestion quantitative »
Indicateur
Types de mesures
1.1. Prélèvements bruts d'eau superficielle et
souterraine (point
8° de l’arrêté)
Volumes prélevés annuellement en Mm3
(déclarés à l’Agence de
l’eau, hors petits prélèvement)
1.2. Volumes prélevés annuellement par usage
Volumes prélevés annuellement en Mm3
1.3. Régularisation des prélèvements d'eau
Nombre de contrôles et nombre de prélèvements conformes
1.4. Suivi quantitatif de la ressource en eau aux points stratégiques du bassin (point
7° de l’arrêté) :
1.4.1. Points stratégiques équipés sur les cours
d'eau
Points stratégiques équipés de stations hydrométriques
1.4.2.
Débits des cours d'eau du réseau de suivi
Evolution des débits moyens annuels sur 10 ans (moyenne
interannuelle des stations dont les données sont > à 30 ans)
Evolution des débits mensuels sur 10 ans
1.4.3. Niveaux piézométriques aux points
stratégiques de références (eaux souterraines)
*
Nombre de nappes faisant l’objet d’une définition des niveaux
piézométriques de référence d’ici
2020
1.5. Suivi de l'équilibre quantitatif
*
Nombre de nappes faisant l’objet d’un suivi piézométrique
Nombre de plans de gestion optimisée (dont PTGE) formalisés
1.6. Actions d'économie d'eau :
Amélioration du rendement des réseaux de
distribution d'eau potable
*
Nombre de CT soumises à redevance qui ont transmis le rendement
de leur réseau à l’Agence de l’eau
Rendement moyen des réseaux d’eau potable
Nombre de CT et de réseaux avec un rendement cible atteint
Amélioration du rendement des réseaux d'eau
brute gérés par l'OEHC
Rendement moyen brut annuel
* Indicateurs ajoutés en 2019
Source : Tableau de bord mi-parcours SDAGE 2016-2021
L
a valeur à atteindre n’est pas
indiquée pour tous les indicateurs, ce qui remet en
question l’appréciation des résultats
.
Le secrétariat technique du comité de bassin a mis en place un autre tableau de suivi
afin de préciser, les chantiers à mener en priorité pour chaque orientation fondamentale et
leur état d’avancement. Pour ces chantiers, un porteur de projet
est identifié. La mise à jour
du tableau a été interrompue en 2017 pour plusieurs chantiers puis en 2019.
5.2.3
Des indicateurs en baisse mais une amélioration du suivi des masses d’eau
Concernant l’évolution des prélèvements d’eau, le tableau de bord du SDAGE, sur
la base des données disponibles jusqu’en
2017, conclut sur le fait qu’aucune t
endance
d’évolution ne se dégage, malgré une augmentation de
11 % entre 2012 et 2017. Cette
évolution s’expliquerait par la sécheresse exceptionnelle qu’a connu la Corse en
2017.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
40
Toutefois, l’analyse des données de la Banque nationale des prélèvements en e
au
démontre une hausse nette des prélèvements par rapport au cycle précédent du SDAGE :
entre 2016 et 2019, les volumes annuels moyens prélevés étaient de 110,2 millions de m
3
,
contre 102,2 entre 2010 et 2015 (soit une augmentation de 7,8 %)
80
.
L
’indicateur
relatif aux débits des cours d’eau
du tableau de bord ne porte pas
spécifiquement sur le cycle du SDAGE 2016-2021, mais est évalué sur une période de dix
ans. L’évolution de la moyenne interannuelle
observée sur dix ans montre des débits en
diminution entre les décennies 1970-1979 et 2010-2018.
En revanche, l
e suivi des masses d’eau, permettant d’améliorer les connaissances sur
l’état quantitatif des ressources, a été amélioré. L’ensemble des
neuf points stratégiques des
cours d’eau identifiés par le SDAG
E (D1-08) sont à ce jour équipés de stations
hydrométriques, une seule station nécessite une réhabilitation. L
’ensemble des points
stratégiques (actualisés) permettant la surveillance des eaux souterraines fait désormais
l’objet d’un suivi piézométrique.
5.3
Le SDAGE 2022-2027 : les apports du p
lan de bassin d’adaptation au
changement climatique
5.3.1
Une consultation élargie mais un faible taux de participation
Les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) doivent être
mis à jour tous les six ans
81
. Le SDAGE 2022-2027 du bassin de Corse a été adopté à
l’unanimité
par le
comité de bassin et approuvé par délibération de l’Assemblée de Corse
le 17 décembre
2021. La Corse a ainsi été le premier bassin métropolitain à se doter d’un
schéma directeur pour la période 2022-2027.
L’article L.
4424-36 I. du CGCT précise que le schéma est élaboré par le comité de
bassin, à l'initiative de la collectivité de Corse ou du représentant de l'État, le cas échéant.
Ce dernier organise la participation du public, conformément aux dispositions de l'article
L. 212-2 du code de l'environnement.
La participation des acteurs de l’eau et du public est prévue à chaque étape de la
procédure. Le comité de bassin met à disposition par voie électronique les documents
constitutifs du projet de SDAGE, pendant une durée minimale de six mois.
La mise en œuvre de
s consultations a été confiée au comité de bassin de Corse, via
le secrétariat technique. Malgré le contexte de crise sanitaire, qui a impliqué le report de
l’entrée en vigueur des SDAGE
82
, le calendrier a été respecté.
80
La moyenne annuelle a été calculée sur quatre ans.
81
Article L. 212-2
du code de l’environnement.
82
L’échéance réglementaire fixée par la DCE pour l’entrée en vigueur des SDAGE a été reportée de
trois mois, du 22 décembre 2021 au 22 mars 2
022, comme l’a confirmé le ministère de la
transition
écologique.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
41
Les travaux ont été engagés dès le mois d’avril
2018. Deux phases de consultation
de six mois
83
ont été menées
84
. Conformément aux textes applicables, les consultations ont
été engagées r
espectivement trois ans et un an avant la date d’entrée en vigueur du SDAGE,
intervenue le 16 février 2022.
Le comité de bassin a organisé une large consultation à chaque étape d’élaboration
du SDAGE. De nombreux acteurs ont été associés en complément de ceux prévus par les
textes. L
’avis du public a été recueilli sous la forme d’un questionnaire
dématérialisé. Deux
réunions d’information ont été organisées avec les
associations des maires et présidents
d’EPCI
.
Les consultations se sont cependant traduites par un faible taux de participation. Sans
ignorer le contexte de crise sanitaire, un effort supplémentaire aurait été nécessaire pour
mobiliser les répondants et obtenir une représentativité accrue des opinions recueillies
85
,lors
de la seconde consultation.
L’analyse des réponses montre un
consensus sur les différentes dispositions
contenues dans le SDAGE ainsi que sur les mesures du programme pluriannuel. Les
répondants interpellent sur les actions concrètes à mener.
Ces conclusions rejoignent les observations de
l’Autorité environnementale
du
Conseil général de l’environnement et du développement durable
86
dans son avis rendu le
23 décembre 2020
. L’
instance propose
plusieurs axes d’améliorations
parmi lesquels la
conduite d’une analyse plus poussée de la compatibilité du plan d’aménagement et de
développement durable de la Corse (PADDUC) avec le SDAGE et la nécessité de préciser
les
moyens d’accompagnement nécessaires à l’émergence des projets de territoire pour la
gestion de
l’eau.
Les suites à donner aux consultations ont été présentées par le comité de bassin
87
.
Les avis des contributeurs institutionnels ont été pour partie pris en compte : sur
les 95 remarques formulées, une quarantaine a donné lieu à des ajustements des documents.
Les autres observations dépassaient le cadre des documents ou étaient déjà traitées.
83
Plus précisément, les consultations du public se sont déroulées sur 6 mois, tandis que celles des
acteurs de l’eau sur
4 mois, conformément aux articles L. 212-2 (II) et R. 212-6
du code de l’environnement.
84
La première
phase s’est déroulée
du 2 novembre 2018 au 2 mai 2019, sur la synthèse des questions
importantes et le programme de travail ; la seconde, du 15 février 2021 au 15 juin 2021 portait sur le projet de
SDAGE et de programme pluriannuel de mesures, ainsi que sur l’évaluation environnementale.
85
Notamment celles des agriculteurs, des jeunes et des ouvriers. Le bilan de la consultation présenté
par le comité de bassin le 6 octobre 2021 montre une très faible participation des moins de 35 ans et de certaines
catégories socio-professionnelles. Un seul agriculteur a répondu.
86
L’
instance donne des avis, rendus publics, sur les évaluations des impacts des grands projets et
programmes sur l’environnement et sur les mesures de gestion visant à éviter, atténuer ou compenser ces
impacts.
87
Les remarques relatives à la synthèse des questions importantes ont été prises en compte par le
comité de bassin lors de sa séance du 19 novembre 2019, celles relatives aux projets de SDAGE et de PdM
lors de sa séance du 6 octobre 2021.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
42
5.3.2
Le
plan de bassin d’adaptation au changement climatique
: un outil concret
pour améliorer les connaissances
Le comité de bassin de Corse est le dernier des bassins à avoir adopté un plan de
bassin
d’
adaptation au changement c
limatique (PBACC) dans le domaine de l’eau
88
. Le
document stratégique qui vise à intégrer le changement climatique dans la gestion de l’eau
89
a été adopté le 24 septembre 2018
Dépourvu de portée réglementaire, le plan a vocation à constituer une référence pour
les différentes démarches de planification, SDAGE, PADDUC et
documents d’urbanisme.
Il apporte des améliorations en matière de connaissances et d’outils à mobiliser.
Le PBACC propose le découpage du bassin de Corse en 13 territoires
hydrologiquement cohérents. Il considère que
l’ensemble
des territoires de Corse est
vulnérable, à des degrés et pour des enjeux distincts. Les territoires du plan ne recoupent pas
totalement ceux du SDAGE, au nombre de huit.
88
En 2011, le plan
national d’adap
tation au changement climatique (PNACC) a été lancé par la
ministre, avec pour objectif de proposer des mesures concrètes et opérationnelles pour préparer la France à
faire face au changement climatique.
Déclinés en régions dans le domaine de l’eau, l
es plans de bassin doivent
permettre d’élaborer les éléments de stratégie à intégrer
dans le SDAGE.
89
Le PBACC du bassin Rhône-Méditerranée a été adopté en 2014.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
43
Sous-
bassins d’étude de la vulnérabilité au changement climatique
Source : PBACC du bassin de Corse, adopté le 24 septembre 2018.
Une graduation de la vulnérabilité est établie de manière à identifier les secteurs
prioritaires pour cinq enjeux environnementaux majeurs : la disponibilité en eau, le bilan
hydrique des sols agricoles, la biodiversité, le niveau trophique des eaux et les risques
naturels. Les niveaux de vulnérabilité ont été caractérisés par des indices obtenus en croisant
la sensibilité
90
et l’exposition
91
des territoires.
À
l’issue du
diagnostic, cinq microrégions ont été identifiées comme prioritaires car
particulièrement vulnérables, toutes pressions confondues : la Balagne ; le Cap Corse ; le
Bastia Bevinco ; le Sud Est et le Baracci.
90
La sensibilité caractérise les facteurs de fragilité d’un territoire vis
-à-
vis d’une variation
hydro-climatique donnée.
91
L’exposition correspond aux variations climatiques auxquelles le système est exposé et varie en
fonction de la régionalisation des sc
énarios climatiques et d’impacts utilisés.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
44
Secteurs identifiés comme les plus sensibles dans le PBACC et repris dans le
SDAGE 2022-2027 et m
asses d’eau identifiées en déséquilibre dans le SDAGE
2016-2021
Sources : SDAGE 2022-2027 et SDAGE 2016-2021 du bassin de Corse.
Au total, le PBACC recense 57 actions à engager afin de réduire les vulnérabilités.
La gestion quantitative est la plus souvent ciblée parmi les priorités (45 % des actions).
Contrairement au SDAGE 2016-2021, les actions sont majoritairement assorties
d’une
échéance temporelle
92
mais elles sont dépourvues
d’
indicateurs de suivi. Il
n’existe pas de
tableau de bord dédié au suivi des réalisations, alors que le document précise les valeurs à
atteindre. Un bilan du plan est toutefois prévu en 2024.
Les diagnostics et outils proposés par le plan constituent une avancée en faveur de la
caractérisation des pressions face au changement climatique. Ils ont permis
d’améliorer
la
stratégie et les actions à mener dans le cadre du SDAGE 2022-2027.
92
Parmi ces 57 mesures, 25 sont assorties d’une échéance temporelle
et 16 sont
à réaliser d’ici 2022.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
45
5.3.3
Le SDAGE 2022-2027, des dispositions qui restent imprécises et faiblement
contraignantes
Sur base du diagnostic formulé par le plan de bassin
et de l’état des lieux du bassin
réalisé en 2019, le nouveau SDAGE contient quelques améliorations et pallie certaines
lacunes du document précédent.
Dans ses objectifs environnementaux, le document
pose l’ambition d’attein
dre le bon
état écologique pour 99 % des eaux superficielles et le bon état quantitatif pour 100 % des
masses d’eaux souterraines d’ici à
2027.
Deux
masses d’eau font l’objet d’un report de l’atteinte de l’objectif
après 2027. Une
seule (contre 8
auparavant) est assortie d’un objectif moins strict
. Elle concerne les herbiers
de posidonie du golfe de Santa-Manza.
Objectifs de bon état des masses d’eau
du SDAGE 2022-2027
Bon état/potentiel écologique
Bon état/potentiel
chimique
Eaux superficielles
2015
2021
2027
Post 2027
2021
2027
Nombre de masses d’eau (hors
objectifs moins stricts)
191
206(+ 15)
231 (+ 25)
233 (+ 2)
230 (+ 7)
234 (+ 4)
En % du total des masses d'eau
82 %
88 %
99 %
100 %
98 %
100 %
Nombre de masses d'eau avec
objectifs moins stricts
1
0
Bon état quantitatif
Bon état chimique
Eaux souterraines
2015
2021
2027
2015
2021
2027
Nombre de masses d’eau
13
13 (=)
15 (+ 2)
15
15 (=)
15 (=)
En % du total des masses
d’eau
88 %
88 %
100 %
100 %
100 %
100 %
Source : Chambre régionale des comptes
, d’après le
SDAGE 2022-2027
Le SDAGE 2022-2027 comporte six orientations fondamentales, dont cinq ont été
reportées du document précédent. La nouvelle orientation fondamentale se rattache à
l’anticipation et à l’adaptation au changement climatique
.
L’orientation relative à la gestion quantitative tend désormais à privilégier les
mesures d’économie d’eau
préalablement à toute autre action
93
.
93
Conformément à la séquence « Eviter
Réduire
Compenser
» dont le principe est inscrit à l’article
L. 110-1, II.
du code de l’environnement depuis
2016.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
46
L’u
ne des principales avancées concerne l
’ouverture sur la mise en œuvre des projets
de territoire pour la gestion de l’eau.
Évoqués dans trois orientations fondamentales, les
projets doivent intégrer la gestion quantitative de la ressource
ainsi que l’ensemble des
enjeux d’un territoir
e pour atteindre les objectifs de bon état et d
’adaptation au changement
climatique.
Le processus d’élaboration réaffirm
e le rôle central des intercommunalités pour
assurer la cohérence entre aménagement et gestion durable
de l’eau.
Sur le plan de l’améli
oration des connaissances, les points de prélèvement pour le
suivi des masses d’eau ont été complétés
94
. La création d’un système d’information et de
gestion des eaux de Corse (SIEG) est également annoncée.
Le SDAGE précise les modalités de création de « ressources de substitution
95
», qui
doivent désormais s’inscrire dans le cadre d’une démarche
de projets de territoire et être
envisagées à l’aune des actions d’économie d’eau possibles (disposition
1-03).
Cependant, le document ne formule aucune condition à la création de stockages
nouveaux hors substitution. Pour obtenir des précisions sur ce point, il est nécessaire de se
référer à d’autres dispositions
,
qui évoquent la nécessité, pour tout projet, d’intégrer une
étude d’impact et un volet de recherche de
sobriété (dispositions 1-01 et 3A-08).
Les objectifs exposés dans la nouvelle version du SDAGE sont imprécis et ne tirent
pas toutes les conséquences des actions préconisées par le PBACC.
Aucun objectif de
débit d’étiage et volumes prélevables par masse d’eau ne sont
fixés, bien que le chapitre 3 apporte des précisions sur la manière dont les indicateurs doivent
être déterminés. La définition des objectifs quantitatifs est renvoyée aux diagnostics à opérer
dans le cadre de chaque projet de territoire, sur la base des données consolidées fournies par
la collectivité de Corse
et l’OEHC (dispositions
1-02 et 1-06 à 1-09).
En outre, plusieurs objectifs chiffrés et échéances contenus dans le PBACC ne sont
pas rep
ris, notamment en matière d’amélioration et d’optimisation des réseaux, comme ceux
visant à :
« Atteindre 85 % de rendement sur trois-quarts des réseaux d'adduction en eau
potable
d’ici
2030 »
(action A.8 du PBACC) et A.9
« Atteindre un rendement de 70 % sur
les réseaux de distribution d’eau brute
d’ici
2025
» (A.9)
96
.
94
Les points stratégiques de référence des cours d’eau sont ainsi passés de
16 dans le
SDAGE 2016-2021 à 19 dans le SDAGE 2022-2027.
95
Stockages ou transferts permettant d’alléger les pressions (saisonnières ou
structurelles) sur les
masses d’eau en limite d’exploitation via des prélèvements en hiver, à des périodes où l’eau est abondante, ou
via des transferts, à partir de sources en équilibre.
96
Par comparaison, le SDAGE 2016-2021 Rhône-Méditerranée propose l
’atteinte d’un rendement sur
la totalité des réseaux d’eau potable du bassin d’ici à
2020, objectif en référence au PBACC et aux textes
applicables.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
47
5.4
La cohérence du SDAGE 2022-2027 avec les autres documents
d’aménagement
Le SDAGE s’impose dans un rapport de compatibilité aux programmes et décisions
administratives dans le domaine de
l’eau
97
ainsi qu’
aux SAGE
98
. Il doit également s’articuler
avec les schémas et documents d’aménagement du territoire, notamment les documents
d’urbanisme
99
.
En tant qu’autorité approuvant les SDAGE et les SAGE, la collectivité de Corse est
garante de l
articulation globale des documents,
par l’action
du secrétariat technique du
comité de bassin.
A la suite de l’avis émis par l’
Autorité environnementale, le SDAGE a
fait l’objet de
précisions afin
d’améliorer
son articulation avec les autres démarches de planification
100
.
5.4.1
La compatibilité avec l
es documents d’urbanisme
Le SDAGE 2022-2027 prévoit plusieurs dispositions permettant
d’assurer
la
compatibilité entre les
documents d’urbanisme
et les orientations
dans le domaine de l’eau
.
Le schéma recommande notamment que les documents
d’urbanisme
prennent en
compte la vulnérabilité des milieux et la disponibilité de la ressource (disposition 0-04) en
ce qui concerne
l’analyse des capacités d’accueil. Les SCOT et PLU peuvent aller jusqu’à
« limiter ou conditionner le
développement de l’urbanisation […] dans les secteurs en déficit
chronique de ressources en eau »
.
Le SDAGE préconise également
l’élaboration d’un
guide « SDAGE et urbanisme »
à destination des décideurs et donneurs d’ordre. La chambre observe qu’
aucun guide
spécifique à la Corse n’a été élaboré.
En pratique, ce sont les services l’Etat, au travers de leurs activités de police de l’eau
et de contrôle de légalité, qui sont garants de la compatibilité des projets de construction et
d’aménagement avec le SDAG
E et les
SAGE. L’avis de l’
Autorité environnementale est en
outre obligatoirement requis dans le cadre de l’évaluation environnementale des schémas de
cohérence territoriale (SCoT) et plans locaux d’urbanisme (PLU).
L’Agence d’aménagement durable, d’urbanisme et d’énergie de la Corse (AUE),
établissement de la collectivité de Corse, peut également accompagner les collectivités et
leur groupement dans le cadre de l’élaboration de leurs documents.
97
Article L. 212-1
XI du code de l’environnement.
98
Article L. 212-3 du même code. La notion de compatibilité est moins contraignante que celle de
conformité puisqu’il s’agit d’un rapport de non contradiction avec les orientations fondamentales du SDAGE.
99
Article L. 131-1 9
° du code de l’urbanisme pour les SCOT, article L.
131-6 du même code pour les
PLU, les documents en tenant lieu et les cartes communales (en l’absence de SCOT).
100
L’avis de l’autorité environnementale recommandait notamment que le SDAGE
2022-2027 fasse
mieux apparaître ses incidences sur les documents d’urbani
sme et la compatibilité du PADDUC avec ses
objectifs.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
48
La faible proportion de collectivités dotées d’un PLU ou d’
un SCoT en Corse
101
apparaît comme un frein à la prise en compte des orientations du SDAGE dans le domaine
de l’urbanisme. Ainsi que le relève le rapport d’évaluation environnementale du
SDAGE 2022-2027, seulement 16
% des communes sont dotées d’un PLU et
24
% d’une
carte communale. Plus de la moitié des communes (60 %) sont ainsi encore soumises au
règlement national d’urbanisme.
Recommandation n°
6 : élaborer et diffuser le guide « SDAGE et urbanisme ».
5.4.2
La compatibilité avec les politiques portées par le p
lan d’aménagement e
t de
développement durable de la Corse (PADDUC)
La loi du 22 janvier 2002
relative à la Corse, reprise à l’article L.
4424-9 du CGCT,
a confié à la collectivité de Corse la compétence pour élaborer le
plan d’aménagement et de
développement durable de la Corse (PADDUC). Le PADDUC a été approuvé
le 24 novembre 2015
par délibération de l’Assemblée de Corse
102
. Il a comme objectif
d’aménager, développer mais aussi préserver le capital environnemental de l’île
au cours des
25 années à venir. Il lui appartient notamment de déterminer :
« les sites et paysages à
protéger ou à préserver, l'implantation des grandes infrastructures de transport et des
grands équipements ».
Le PADDUC doit être compatible avec le SDAGE
103
. Par délibération du
28 novembre 2019
, l’Assemblé
e de Corse a confirmé son souhait que les orientations
définies dans le PADDUC soient prises en compte pour la révision du SDAGE.
En matière d’hydroélectricité, le PADDUC reprend les orientations du
schéma
régional climat-air-énergie (SRCAE), déclinées dans la programmation pluriannuelle de
l’énergie (PPE) 2016
-2023, propre à la Corse. La PPE encourage le développement des
énergies renouvelables, via la petite hydraulique (avec une augmentation de 12
MW d’ici
2023) et le lancement d’études pour de nouveaux
aménagements à vocation mixte (agricole,
eau potable et hydroélectricité). Le PADDUC prévoit notamment la création de ces ouvrages
dans les régions dotées de ressources
« peu exploitées et abondantes »,
comme le Taravo.
Le SDAGE prend en compte dans ses di
spositions le développement de l’énergie
hydroélectrique.
101
Les deux communautés d’agglomération de l’île ne disposent ni d’un schéma de cohérence
territorial (SCOT) ni du transfert de la compétence plan local d’urbanisme (PLU).
102
Il a été modifié par délibération n° 20/149 AC du 30 novembre 2020.
103
L’article
L. 4424-9 précité précise que le PADDUC doit être compatible avec le PGRI, qui
lui-même doit être compatible avec le SDAGE. En outre, le
2° de l’article L.
4251-2 du CGCT dispose que le
SRADDET (document stratégique comparable au PADDUC dans les autres régions) est compatible avec le
SDAGE. Enfin, selon
l’article L.
4424-10,
le PADDUC recense les cours d’eau dont la préservation concour
t
aux objectifs fixés par le SDAGE.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
49
Les objectifs opérationnels retenus dans le PADDUC qui consistent à
« gérer
durablement la ressource en eau »
, participent d’une vision équilibrée du développement et
de la pérennité de la ressource, cohérente avec les orientations fondamentales du SDAGE
104
.
PADDUC et SDAGE se rejoignent aussi concernant les conditions d’extension de
l’urbanisme
.
En revanche, en matière d’infrastructures hydrauliques,
le PADDUC prévoit de
nouveaux aménagements permettant des stockages interannuels
d’eau
et
l’extension de
réseaux d’irrigation
là où les besoins agricoles le justifient ainsi que l’augmentation de
réserves de stockages décentralisées (hors lit de rivière) dans chaque microrégion.
104
Le PADDUC préconise des actions de protection (« Participer à la protection des zones
remarquables dans le cadre
[…]
du SDAGE », « Restaurer la continuité écologique lorsque les ouvrages ne
sont plus indispensables »), d’économies d’eau (« réduction des fuit
es et élimination des branchements illégaux
sur les réseaux, changement des compteurs vieillissants ») et
d’amélioration des connaissances
et de
sensibilisation.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
50
Aménagements hydrauliques préconisés par le PADDUC
Source : Livret II du PADDUC
Projet d’Aménagement et de développement Durable (PADD)
Le SDAGE 2022-2027 reprend les orientations du PADDUC mais encadre de
manière plus restrictive la création de capacités de stockage, lesquelles ne doivent pas
remettre en cause l’atteinte des objectifs environnementaux.
Les projets doivent en priorité
consister à substituer la ressource à partir de zones ou périodes excédentaires et s’inscrire
dans le cadre de mesures d’économies d’eau et d’une concertation préalable
établie dans le
cadre des projets de territoire pour la gestion de l’eau.
Le PADDUC n’est plus en cohérence avec le SDAGE sur ce point.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
51
Recommandation n°
7 : mettre en cohérence le
plan d’aménagement et de
développement durable de la Corse (PADDUC) avec le schéma directeur
d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 2022-2027 sur la question des
capacités de stockage de l’eau.
5.4.3
L’articulation
avec le schéma hydraulique Acqua Nostra 2050
Le schéma « Acqua Nostra 2050
», élaboré à l’initiative de l’OEHC, a été adopté par
l’
Assemblée de Corse le 31 juillet 2020. L
e document n’a pas été présenté en comité de
bassin ni aux autres partenaires institutionnels, dont l’
État. Son élaboration a été menée en
interne par l’office.
Tantôt présenté comme un
schéma d’aménagement, tantôt comme une «
feuille de
route
», il propose un diagnostic de l’existant à partir des zones où l’OEHC a vocation à agir
ainsi que des actions visant à répondre aux besoins en eau durant les trente prochaines
années.
Le document prévoit le doublement des capacités de stockage actuelles
de l’OEHC,
qui passeraient de 44,7 millions de m
3
(hors droit d’eau d’EDF
105
, établi à 35 millions de m
3
)
à 84,7 millions de m
3
, hors convention EDF, en 2050.
En se basant sur une estimation du caractère insuffisant de la production actuelle
dès 2030, la stratégie « Acqua Nostra 2050 » se concentre sur la création de capacités de
stockage supplémentaires, par la réhausse des ouvrages existants (à court terme) et la
création de nouveaux équipements (à plus long terme). Plusieurs aménagements vont ainsi
plus loin que ceux identifiés par le PADDUC et le PBACC.
105
En tenant compte des volumes mis à disposition par EDF par convention
avec l’
OEHC portant sur
l’ensemble des ouvrages de stockage appartement à
EDF, soit 35 millions de m
3
, le volume disponible actuel
pour l’OEHC est de
79.7 millions de m
3
.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
52
Aménagements envisagés par Acqua Nostra 2050
Source : Support de présentation du schéma Acqua Nostra 2050
en vue de la session de l’
Assemblée de Corse
Le
document s’appuie sur un diagnostic qui conduit à maximiser les besoins en eau
et en particulier, les besoins en termes de stockage des eaux superficielles. Les besoins en
eau potable de la population se basent notamment sur une consommation journalière
de 200 litres par jour par habitant (L/jour/hab.), moyenne qui faisait autorité en 2002 mais
qui est bien supérieure à la moyenne annuelle actuelle, ramenée à 145 L/jour/hab.
106
.
En ce qui concerne
l’eau agricole, l’estimation des besoins spécifiq
ues à chaque
culture
remonte à une vingtaine d’années
(2003). Elle ne prend pas en compte les nouvelles
pratiques et l’adaptation des cultures à la raréfaction de la ressource.
Le document
ne précise pas la manière dont les aménagements envisagés s’articul
ent
avec les orientations définies dans le SDAGE, et notamment, la démarche des projets de
territoire
pour la gestion de l’eau, ces derniers ne faisant l’objet que d’un
court propos
introductif
, alors qu’ils sous
-
tendent la mise en œuvre de la stratégie du
nouveau SDAGE.
Le schéma n’exploite pas les pistes d’économies d’eau définies par le SDAGE et
l’instruction
du Gouvernement du 7 mai 2019 relative au projet de territoire pour la gestion
de l’eau
, comme le préalable indispensable avant toute création de nouveau stockage. Il
estime pour sa part qu’aucune marge de manœuvre en termes d’optimisation des
performances n’est possible sur les ouvrages de l’OEHC.
106
144,6 litres par jour et par habitant en 2014. Données : SISPEA (Onema) - DDT(M) - 2014 /
Source : Observatoire des services publics d'eau et d'assainissement - Panorama des services et de leur
performance en 2014, 2017
. D’autres sources statistiques évoquent pour les pays comme la France, une
moyenne comprise entre 130 et 160 litres par jour et par personne (Sources Eurostat ; Ifen ; Conseil mondial
de l’eau
).
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
53
Le plan précise ainsi :
«
l’objet du présent document est de prouver de manière forte
que la production est cohérente avec les usages et les besoins et que les réseaux gérés par
l’OEHC présentent des taux de fuites tout à fait contenus. Par voie de conséquence, on
montrera qu’il n’existe pas de ressource implicite résultant d’une hypothétique améliorati
on
des rendements physiques des réseaux. »
. Le document souligne les
« bons rendements »
des
équipements en matière d’eau destinée à la potabilisation, et
évoque un
« problème de
fiabilité métrologique »
qui
« fausserait »
les résultats obtenus
pour l’eau
agricole, sans
apporter plus de précisions sur les points soulevés.
Estimé à 600
millions d’euro
(M€)
, le plan
n’est
pas financé pour 75 % de son
montant (450
M€)
. Il intègre en outre dans cette estimation la modernisation et la mise aux
normes réglementai
res des barrages gérés par l’OEHC, chantiers qui relèvent d’une
problématique distincte, en lien avec la sécurité des ouvrages.
Le plan de financement du programme interroge quant à la capacité de la collectivité
de Corse et de son office à engager ces investissements
à l’aune des
retards constatés pour
certaines opérations
d’investissement.
Répartition de la nature des financements pour l’ensemble du schéma
d’aménagement hydraulique
Source : Acqua Nostra 2050.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ____________________
Jusqu’en 202
1, le SDAGE
n’identifie pas de bassins en déséquilibre quantitatif,
permettant d’inciter la mise en œuvre d’actions à l’échelle locale. Même si le
SDAGE 2022-2027 connaît des améliorations par rapport au schéma précédant, il reste un
document de portée générale, peu prescriptif,
souffrant d’un manque
d’objectifs
quantifiables
et d’indicateurs de suivi. Il est par ailleurs faiblement
contraignant.
L’articulation avec les autres documents stratégiques adoptés à l’échelle
territoriale
est affectée par la question importante de la réalisation de nouveaux ouvrages de stockage.
Les objectifs du PADDUC et ceux du SDAGE devront être harmonisés sur ce point
, à l’aune
des connaissances apportées par le
plan de bassin d’adaptation au changement climatique
,
adopté par le comité de bassin de Corse fin 2018.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
54
Le schéma hydraulique « Acqua Nostra 2050 »
, préparé par l’office d’équipement
hydraulique de la Corse, établissement public sous tutelle de la collectivité, et adopté en
juillet
2020 par l’Assemblée de Corse
, est en décalage avec les objectifs stratégiques
contenus dans le SDAGE 2022-2027.
Le diagnostic permettant de déterminer les besoins de stockage des eaux
superficielles
s’appuie sur des données
contestables.
Le programme, d
’un montant de
600
M€
, non financé à hauteur de 75 %, intègre la modernisation et la mise aux normes des
barrages gérés par l’OEHC,
travaux qui ne relèvent pas de la gestion des ressources en eau
mais de la mise en sécurité des ouvrages.
Une clarification entre les documents stratégiques est nécessaire au regard des
enjeux du changement climatique, alors que
cinq
territoires, dont l’agglomération de Bastia,
sont d’ores et déjà
identifiés comme particulièrement vulnérables, toutes pressions
confondues.
6
LES FINANCEMENTS ALLOUES A LA POLITIQUE DE
L’EAU
Entre 2019 et 2021, les dépenses cumulées
d’investissement
réalisées par la
collectivité de Corse
dans le domaine de la gestion quantitative de l’eau
, que ce soit sous
maî
trise d’ouvrage
propre ou
sous la maîtrise d’ouvrage de l’
OEHC, sont évaluées
à 30,5
M€
107
. Ce montant ne comprend pas les dépenses en matière d’assainissement.
L
’essentiel de l’
effort financier (29
M€) s’est concentré sur les infrastructures en eau
brute de l’OEHC et sur l’aide à l’équipement des communes et
de leurs groupements. Le
solde
a été consacré aux services d’assistance technique aux communes et EPCI, aux
mesures de protection des milieux aquatiques (notamment pour l’étang de Biguglia
)
directement par la collectivité ou par
l’office de l’environnement de la Corse
108
(OEC), aux
missions d’animation des démarches locales et à l’amélioration des connaissances.
107
Crédits de paiement, à partir des données transmises par la collectivité de Corse.
108
Les domaines d’intervention de l’OEC sont variés
: l’office finance les actions en faveur des zones
humides, il s
outient les travaux dans le cadre du SAGE de Prunelli Gravona ainsi que des études d’amélioration
des connaissances et volumes prélevables. Selon les données fournies par la collectivité de Corse, les dépenses
sur ces trois volets entre 2017 et 2021 se sont élevées respectivement à 36 825
€,
74 275
€ et
145 004
€.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
55
Dépenses (crédits de paiement) allouées à la gestion quantitative de l’eau par la
collectivité de Corse entre 2019 et 2021
en M€
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après les
données transmises par la collectivité de Corse.
6.1
D
es financements en matière d’eau brute
centrés sur la réhabilitation
des ouvrages existants
Le montant cumulé
des dépenses d’investissement réalisé
entre 2017 et 2021 (crédits
de paiement) s’
élève à 34,8
M€, dont 14,1
M€ sous ma
î
trise d’ouvrage
de la collectivité de
Corse et 20,7
M€ sous ma
î
trise d’ouvrage de l’
OEHC.
Evolution des dépenses d’investissement (crédits de paiement)
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après les
données transmises par la collectivité de Corse.
8,20
5,44
3,41
4,81
3,40
3,70
0,00
2,00
4,00
6,00
8,00
10,00
12,00
14,00
16,00
2021
2020
2019
Investissements en ouvrages hydrauliques OEHC
Aides aux communes
Services d'assistance technique de la CdC
Protection des réserves naturelles CdC
Actions de l'OEC
Animation SDAGE/PTGE et études transversales
0 €
1000 000 €
2000 000 €
3000 000 €
4000 000 €
5000 000 €
6000 000 €
2017
2018
2019
2020
2021
Dépenses sous maitrise d'ouvrage CdC
Dépenses sous maitrise d'ouvrage OEHC subventionnées par la CdC
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
56
En comparaison du rythme prévu par le programme hydraulique 2006-2015, le
montant des dépenses structurantes réalisées sous maitrise d’ouvrage
par la collectivité est
inférieur aux objectifs fixés. Sur la base de la « fourchette basse » des investissements
estimée à 135
M€ sur
10 ans, les dépenses moyennes engagées annuellement auraient dû
approcher les 13,5
M€ par an.
Plusieurs opérations, votées il y a plus de 10 ans pour certai
nes d’entre elles,
et en
cours de réalisation durant la période de contrôle, témoignent de retards importants dans
l’exécution des travaux
, sans que ces retards soient expliqués. La réhabilitation de la réserve
de Guazza, approuvée par délibération de l’
Assemblée de Corse en 2007, a été réceptionnée
le 28 février 2020.
Un retard important affecte
les deux projets d’amélioration des rendements des
réseaux dans le Sud-Est et le sud de la Plaine-Orientale. Votées en 2013, les premières
dépenses de travaux ne sont
intervenues respectivement qu’en
2019 et 2021.
Par ailleurs, certaines opérations structurantes prévues par le programme 2006-2015
n’ont jamais vu le jour, telle que la réalisation du barrage du Cavu dans le Sud
-Est.
L’abandon de ces opérations n’est p
as documenté par la collectivité.
L
’absence de
projets de territoire pour la gestion
de l’eau
ne permet pas de débloquer
les financements
dédiés par l’
a
gence de l’eau à la réalisation d’ouvrages de substitution.
Cette dernière peut en effet financer les investissements permettant de réduire les
prélèvements dans les secteurs déficitaires ou en période d’étiage, comme les ouvrages de
stockage hivernaux, à la condition que les opérations aient été préalablement discutées dans
le c
adre d’un
projet.
En application de la convention de cofinancement établie avec la collectivité
le 26 août 2019, le dispositif est assoupli pour la Corse, puisque seul
l’engagement
d’élaboration d’un
projet peut suffire à mobiliser
les aides de l’
agence
109
.
Les opérations en matière d’infrastructures en eau brute sont réalisées sous ma
îtrise
d’ouvrage
par la collectivité de Corse ou
portées directement par l’OEHC. Dans les deux
cas, sauf exception, la collectivité prend en charge le financement des investissements, via
sa participation directe ou par des subventions vers
ées à l’office.
Jusqu’en
2020, les opérations structurantes, portées par la collectivité se sont
inscrites dans le cadre du programme hydraulique 2006-2015, adopté par
l’Assemblée de
Corse par délibération n° 05-69 du 27 avril 2005.
Entre 2017 et 2021, les investissements ont été exécutés dans le cadre des
conventions du PEI, « troisième convention » (2014-2016) et « quatrième convention »
(2017-2020). Le taux de participation de la collectivité était fixé à 30 % du coût de
l’opération,
complétant la participation
de l’Etat
, de 70 %.
109
Point 1.2 de la convention relative au cofinancement des opérations de gestion durable des services
d’eau et de rattrapage structurel au titre de la solidarité des territoires, sur la base de l’Accord
-cadre signé au
titre du 11
ème
programme d’intervention de l’Agence.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
57
Les investissements votés
110
durant la période sous revue ont principalement consisté
à sécuriser les capacités de prélèvement existantes et à améliorer les transferts des ressources
entre sous-
secteurs hydrauliques. L’essentiel des travaux a porté sur les secteurs de la
Plaine-Orientale.
Listes des principales opérations votées par l’
Assemblée de Corse entre
2017 et 2021
Objectif
principal
poursuivi*
Secteur
Objet de l'opération
Référence
de la
délibération
Date de la
délibération
Améliorer les
débits et
renforcer les
capacités de
prélèvement
instantané
Plaine
orientale
Nord
Sécurisation et mise en conformité de la prise du Golu
13-273
17-015
20/12/2013
27/01/2017
Sécurisation prise du Golu : réalisation d'un dessableur
ichtyocompatible
19-470
19/12/2019
Plaine
orientale
Sud
Renforcement de la conduite de transfert des eaux
prélevées sur le Fium’Orbu _Tranches
1, 2 et 3
16-188
20-043
20-080
06/09/2016
01/07/2020
29/07/2020
Développer les
interconnexions
et les transferts
Plaine
Orientale
Nord et
Centre
Amélioration des transferts d'eau entre la Plaine
Orientale Nord et la Plaine Orientale Centre (Alesani,
Peri) : Surpresseur de Tagliu Isulacciu Tranches 1 et 2
18-253
19-254
26/07/2018
25/07/2019
Sud-Est
Réalisation d’un surpresseur sur la commune de
Porto-Vecchio
20-040
14/02/2020
Substituer les
prélèvements en
période d'étiage
Plaine-
Orientale
Sud
Réhabilitation de la station de pompage d'Alzitone (pour
substituer le volumes d'eau issus du barrage d'Alzitone
aux prélèvements sur le Tavignano en période d’étiage)
13-234
15-137
17-339
08/11/2013
25/06/2015
26/10/2017
Sécurisation du site d'Alzitone
20-039
14/02/2020
Plaine-
Orientale
Centre et
Sud
Remplacement de la station de pompage au pied de la
réserve de Peri, avec possibilités de déploiement vers la
Plaine-Orientale Sud (pour substitution partielle au
barrage d'Alesani)
17-108
27/04/2017
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après les
délibérations transmises par l’OEHC et publiées sur le
site internet de l’
Assemblée de Corse.
Les opérations menées directement par l’office
ont porté sur la réhabilitation des
ouvrages et la densificatio
n des réseaux existants, ainsi que sur l’amélioration des
rendements.
Les capacités de stockage
n’ont pas été augmentées
entre 2017 et 2021.
110
Chaque opération portée par la collectivité a fait l’objet d’une délibération de l’Assemblée de
Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
58
6.2
Des financements
en matière d’eau potable
ciblés sur la remise à
niveau et la réhabilitation des ouvrages
Dans la cadre de sa stratégie globale, la collectivité de Corse affirme faire de
l’équipement des communes dans le domaine de l’eau et de l’assainissement l’une de ses
priorités, notamment face à la difficulté rencontrée par certaines
d’entre elles
pour accéder
à
l’eau potable.
Le soutien de la collectivité
à la politique de l’eau passe essentiellement par le
dispositif de cofinancement établit avec l’
agence
de l’eau
. Le 11
ème
programme de l’
agence,
intitulé «
Sauvons l’eau
»,
prévoit un montant total d’aides pour
la Corse de 75
M€ sur six
ans (2019-2024), soit une baisse de 26 % par rapport au 10
ème
programme (2013-2018).
Programmes de l’
a
gence de l’eau pour la Corse
Programmes de
l’Agence de l’eau
Période d’application
Montants initiaux
(autorisations
d’engagement
) prévus
pour la Corse (
en M€
)
Montants (autorisations
d’engagement
)
effectivement attribués
(situation en 2021)
(
en M€
)
10
ème
programme
2013-2018
92
91,2
11
ème
programme
2019-2024
75
38,3
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après le
bilan du 10
ème
programme d’intervention et du bilan à
mi-parcours du 11
ème
programme.
Sur cette base, l’accord
-cadre signé par la collectivité
et l’
a
gence de l’eau le
27 août 2019
et sa convention d’application ont fixé les priorités d’actions s
uivantes :
-
l
a réalisation d’opérations contribuant à l’atteinte des objectifs fixés par le SDAGE
;
-
l
a mise en œuvre du PBACC et l’accompagnement face au changement climatique
;
-
le rattrapage structurel en zone de revitalisation rurale ;
-
l
’assistance techni
que aux communes rurales ;
-
l
a maitrise d’ouvrage de la
collectivité et de ses offices, notamment en matière
d’amélioration des connaissances et de préservation des milieux aquatiques.
L’
accord comporte cinq objectifs environnementaux fixés pour le bassin de Corse en
lien avec le SDAGE, dont celui d’économiser ou substituer
400 000 m
3
d’eau
par an.
L’analyse des aides sollicitées et attribuées montre la prépondérance des projets
financés au titre du «
petit cycle de l’eau
»
, c’est
-à-dire en faveur des services publics de
l’eau potable et de l’assainissement, en particulier dans les zones de revitalisation
rurale.
Au titre du 11
ème
programme, sur les 25,7
M€ d’aides allouées par l’
agence entre
2019 et 2021 (hors programmes exceptionnels liés notamment à la crise sanitaire), 22,1
M€
(92
%) l’ont été pour l’
eau potable
et l’assainissement, dont
20,4
M€ (80
%) dans le cadre
du dispositif d’aide au rattrapage structurel en zone de revitalisation rurale.
Les opérations
en matière d’eau potable et d’assainissement
avaient déjà représenté 76 % des aides
attribuées dans le cadre du 10
ème
programme.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
59
Le financement est facilité par le fait que la majeure partie du territoire insulaire (en
dehors des pôles urbains d’Ajaccio et
de Bastia) se situe en zones de revitalisation rurale,
pour lesquelles le taux de participation de l’
a
gence peut être porté jusqu’à 70
% du coût de
l’opération.
Entre 2019 et 2021, les aides en matière d’eau potable (travaux et études)
, versées
par la collectivité dans le cadre du partenariat avec
l’agence,
ont représenté 8,76
M€, soit
66 % du montant total des dépenses (évaluées à 13,2
M€).
Aides attribuées par la collectivité de Corse en
partenariat avec l’
agence de
l’eau
Source : Collectivité de Corse.
Parmi les opérations aidées, certains projets en eau potable comprennent des travaux
de réhabilitation et d’amélioration des rendements permettant de
réduire la pression de
prélèvement sur les milieux et générer ainsi
des économies d’eau. Selon l’Agence de l’eau
:
-
au titre du 10
ème
programme, ces travaux ont permis de réaliser 3 millions de m
3
d’économies d’eau, représentant un rythme annuel (500
000 m
3
), supérieur aux
objectifs fixés par l’
accord-cadre (100 000 m
3
par an) ;
-
Au titre du 11
ème
programme, entre 2019 et 2021, selon les données issues du rapport à
mi-parcours,
les économies d’eau potentielles associées aux opérations programmées
sont comprises entre 319 000 et 350 000 m
3
sur trois ans, soit un rythme nettement
inférieur à l’objectif fixé de
400 000 m
3
par an.
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Travaux assainisement
5052 630
4073 924
4716 341
380 438
942 492
2677 323
Travaux eau potable
3880 866
4455 897
5413 776
1393 685
2303 413
4620 532
Etudes eau potable
202 280
46 513
39 433
161 945
40 560
238 790
Etudes assainissement, REUT, Eaux
pluviales
157 242
57 877
40 654
60 200
127 162
221 400
Gemapi
-
-
133 000
-
-
66 500
-
2000 000
4000 000
6000 000
8000 000
10000 000
12000 000
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
60
Les aides versées par la collectivité peuvent être évaluées à près de 3
M€ entre
2019
et 2021. Dans ce cadre, le taux de participation moyen de la collectivité
s’est élevé à
20 %
de la dépense subventionnable, contre 70
% pour l’
a
gence de l’eau, sur la base d’un taux de
financement public ne pouvant excéder 90 %
111
.
Par ailleurs, la collectivité est intervenue ponctuellement
en matière d’eau potable
en
complément des participations de l’
État au titre du PEI, qui par la 4
ème
convention
d’application
2017-2020, a également ciblé en priorité les opérations visant à traiter des
situations de non-potabilité, de protection de la ressource, et de faible taux de rendement des
réseaux.
6.3
Une sous-
mobilisation et des retards dans l’utilisation des crédits
L
’analyse des opérations aidées témoigne d’une sous
-consommation des crédits et
de retards importants dans la réalisation effective des travaux.
En 2018, au titre du 10
ème
programme, seuls 24
M€ d’aides de l’
agence avaient été
versés sur les 91,2 engagés. En 2021, selon le bilan à mi-parcours du 11
ème
programme, un
quart des montants engagés entre 2019 et 2020
ont fait l’objet de paiement.
La tendance est
identique pour les montants versés par la collectivité.
Paiements effectués par la collectivité de Corse par rapport aux engagements au
titre du partenariat avec l’
a
gence de l’eau
Années
Montants engagé (
en €
)
Montants payés
(
en €
)
Montants payés
sur montants
engagés (en %)
2017
8 634 211,20
3 268 969,83
38 %
2018
10 343 204,00
4 390 060,00
42 %
2019
1 299 433,00
400 735,88
31 %
2020
3 413 632,00
200 319,30
6 %
2021
7 824 545,00
228 025,80
3 %
TOTAL
31 515 025,20
8 488 110,81
27 %
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après les
données transmises par la collectivité.
111
L’a
rticle L. 1111-10 du CGCT fixe en effet la participation minimale du
maître d’ouvrage à
20 %,
ramenée à 10
% les projets d’aides à l’eau et à l’assainissement.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
61
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ____________________
Les financements en matière de stockage et de transfert d’eau brute se concentrent
sur les infrastructures en eau brute de la collectivité de Corse
et sur l’aide à l’équipement
des communes et leurs groupements
en faveur des services publics d’adduction en
eau
potable et dans le domaine de l’assainissement des eaux usées
.
Certaines opérations structurantes du programme 2006-2015
n’ont pas été mises en
œuvre
, sans que leur abandon soit documenté. D
’autres
opérations ont pris un retard
important.
Le montant des investissements réalisés au cours de la période 2017-2021 est en
dessous des objectifs prévus et ne mobilise pas les financements disponibles.
L
’analyse des opérations aidées met en exergue une sous
-consommation des crédits
et des retards importants dans la réalisation effective des travaux, dont certains permettent
de réduire efficacement les prélèvements sur les milieux et de générer des économi
es d’eau
.
La chambre observe que l’exécution des programmes d’investissement est en
constant décalage avec les engagements formulés dans les documents stratégiques, sans que
les retards puissent
s’expliquer par le manque de financements extérieurs.
7
DES MA
RGES DE MANŒUVRE IMP
ORTANTES
7.1
Des réseaux aux rendements médiocres
S
elon les données de l’
a
gence de l’eau
112
, les travaux de réhabilitation des ouvrages
d’eau potable ont permis de générer des économies d’eau importantes
entre 2013 et 2018
(de l’ordre de
500 000 m
3
par an, soit plus de 1
% des prélèvements consacrés à l’eau potable
en 2019). Certains projets
portant sur le service public de l’
eau potable comprennent des
travaux de réhabilitation et d’amélioration des rendements permettant de réduire la pre
ssion
de prélèvement sur les milieux. La tendance est toutefois en baisse entre 2019 et 2021,
atteignant au maximum 350 000 millions de m
3
pour la période, résultats bien en deçà des
objectifs fixés.
112
Indicateur suivi par l’agence de l’eau dans le cadre de ses
10
ème
et 11
ème
programme d’intervention
et communiqués lors des bilans (finaux et à mi-parcours) de ces programmes.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
62
En 2019, selon les données SISPEA
113
, le rendement moyen des réseaux de
distribution d’eau potable est de l’ordre de
72,7 % en Corse contre une moyenne nationale
de 80,4 %. Ce taux est à comparer au seuil minimum de 85 %
pour les réseaux d’eau potable
fixé par le décret n° 2012-97 du 27 janvier 2012
114
. La situation masque des disparités
importantes selon les collectivités
115
. En ce qui concerne les réseaux d’eau brute gérés par
l’OEHC, les rendements moyens bruts plafonnent à
55 %
116
, avec de grandes disparités d’un
territoire à l’autre.
Ces chiffres sont à prendre avec prudence car un nombre important de collectivités
ne transmet pas l
es données relatives aux réseaux d’eau potable. En outre, les dispositifs de
comptages d’eau brute agricole de l’OEHC présentent des défaillances importantes.
7.2
La tarification de
l’e
au agricole
En 2019, l
es prélèvements d’eau brute à destination de l’agriculture
sont estimés à
58,3 millions de m
3
chaque année contre 46,7 millions de m
3
pour la transformation en eau
potable. La politique de soutien de la collectivité de Corse aux agriculteurs date de 1995.
Elle n’a pas fait l’objet d’adaptation
s.
En
1995, l’Assemblée de Corse a demandé à l’
OEHC de consentir une réduction de
moitié du prix de l’eau agricole en faveur des agriculteurs ayant conclu avec l’OEHC un
plan d’apurement de
leurs dettes. Dans les faits, cette diminution des tarifs a été généralisée
un an plus tard à
l’ensemble des
agriculteurs et l’aide attribuée à l’office a été forfaitisée puis
intégrée dans la subvention de fonctionnement versée par la collectivité à partir de 2001.
La politique perdure et le tarif agricole a conservé la même base (hors révisions
annuelles et réajustements) contrevenant au principe de «
l’eau paie l’eau
117
», selon lequel
les dépenses des collectivités doivent être équilibrées par les recettes perçues auprès des
usagers. D’une manière générale, cette politique n’est pas de nature à assurer l’équité de la
répartition de la charge financière entre les usagers et à inciter ces derniers à faire évoluer
leurs comportements, à l’heure où la ressourc
e est vulnérable.
113
Observatoire national des services d’eau et d’assainissement.
114
Si la valeur de 85
% n’est pas atteinte par le service, le rendement seuil est alors fixé à la somme
d'un terme fixe égal à 65 et du cinquième de la valeur de l'indice linéaire de consommation.
115
Selon le tableau de bord à mi-parcours du SDAGE 2016, en 2017, parmi les collectivités qui ont
déclaré leurs chiffres à l’agence de l’eau, 42
% n’atteignaient pas le niveau cible défini réglementairement
(65 % à 85
% selon l’indice linéa
ire de consommation sur chaque réseau).
116
Selon les derniers chiffres communiqués par l’OEHC.
117
L’article L210
-
1 du code de l’environnement indique
: Les coûts liés à l'utilisation de l'eau, y
compris les coûts pour l'environnement et les ressources elles-mêmes, sont supportés par les utilisateurs en
tenant compte des conséquences sociales, environnementales et économiques ainsi que des conditions
géographiques et climatiques.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
63
7.3
L’
animation en faveur des projets de territoire pour la gestion de
l’eau
est insuffisante
En
2018, l’adoption du PBACC a marqué la première étape d’une prise de conscience
sur la nécessité de mieux partager la ressource.
Le rapport du président du conseil exécutif de Corse annexé à la délibération
du 25 octobre 2019 relative aux PTGE, soulignait que :
« [le]
chantier d’élaboration et de
mise en œuvre des PTGE est une des actions phares dans la réalisation du PBACC dans le
domaine de l’eau. Il s’agit d’un exercice à mener dans des délais rapprochés et qui repose
sur un travail d’animation et de concertation qui est à la fois crucial et structurant ».
Peu après, dans sa délibération n°19/423 AC du 28 novembre 2019, la collectivité a
confirmé devoir
«
jouer un rôle moteur de l’ensemble de la démarche
»
et que les PTGE
seraient mis en œuvre sous l’autorité et l’animation de ses services. Cette même délibération
a autorisé la création d’un programme
budgétaire (3225) dédié à la mise en œuvre
des actions
du PBACC, dont 59 600
sont consacrés aux missions
d’appui à l’élaboration
des PTGE.
Le
s annonces n’ont pas été suivies d’effets
: le plan
n’a fait l’objet d’aucun
accompagnement auprès des élus des collectivités et groupements et aucune action concrète
n’a été menée par la
collectivité de Corse pour animer les démarches de projets sur les
territoires.
Le recrutement d’un agent
affecté
à l’animation des PTGE est intervenu début
2022.
Les moyens humains et en ingénierie mobilisés par la collectivité de Corse
apparaissent insuffisants pour soutenir l’animation des PTGE dans les cinq microrégions
identifiées comme prioritaires et les plus vulnérables à la disponibilité en eau, et a fortiori,
dans l’ensemble des
13 territoires qui ont vocation à être couverts par un projet.
7.4
La nécessité de développer
l’assistance technique
aux collectivités
La
majorité des actions en matière de politique de l’eau dépend des communes et de
leur groupement. Ceux-ci disposent de moyens limités. Le faible taux de mutualisation et de
transfert des compétences « eau et assainissement » aux EPCI accentue les difficultés.
En
2019, seules les deux communautés d’agglomération et trois communautés de
communes
118
, sur les 19 intercommunalités que compte la Corse, exerçaient les deux
compétences.
118
Au total, les EPCI du territoire portent la compétence assainissement pour 70 % de la population,
et la compétence eau potable pour 55 %. Source
: Stratégie d’organisation des compétences locales en eau
(SOCLE), document accompagnant le SDAGE 2022-2027.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
64
Le 27 août 2019, une convention «
relative au financement de l’assistance technique
dans le domaine de la lutte contre la pollution, de l’alimentation en eau potable, de l’entretien
et de la restauration des milieux a
quatiques et des missions d’animation et d’évaluation
territoriales », a été établie
avec l’
a
gence de l’eau au titre de son
11
ème
programme
d’intervention.
La
convention permet de bénéficier des aides de l’
agence sur deux volets :
-
l
’assistance technique a
ux collectivités à proprement parler, en matière
d’
eau potable et
d’assainissement, de GeMAPI et de protection des captages d’eau potable
;
-
des « missions transversales » destinées à améliorer les connaissances et animer les
démarches locales dans les trois domaines précités, ainsi que pour les PTGE.
Depuis le 1
er
janvier 2018, les premières dépenses de la collectivité en la matière sont
intervenues en 2020, pour un montant total de 0,9
M€ sur deux ans.
Assistance technique et missions transversales en faveur des communes et de
leurs groupements
Services
Missions concernées
Montant 2020
(
en €
)
Montant 2021
(
en €
)
SAT AEP Collectivité de
Corse
Assistance technique
140 404, 20
79 534, 00
Missions transversales
59 332, 51
40 414, 00
SAT Milieux Aquatiques
de la collectivité de
Corse
Assistance technique
246 250, 01
271 636, 00
Missions transversales
30 472, 62
21 665, 00
TOTAL
476 749,34
413 249,00
Source : Chambre régionale des comptes,
d’après les informations produites par
la collectivité de Corse.
Face au retard pris dans l’exécution des opérations aidées par l’
a
gence de l’eau et des
actions prévues par le programme de mesures, la collectivité de Corse doit renforcer ses
moyens d’action en faveur des communes et
des EPCI, acteurs de la protection des
ressources en eau
, comme le prévoit l’article
L. 3232-1-1 du CGCT.
L
’ordonnateur
précise que les moyens actuels de la collectivité de Corse ne
permettent pas la généralisation
d’un apport d’assistance technique aux communes et
aux
EPCI.
La chambre rappelle que les dispositions citées répondent à des objectifs de solidarité
et d'aménagement du territoire, dirigés notamment vers les communes rurales et celles
situées en zone de montagne. Il serait dommageable que ces communes ne bénéficient pas
de la part de la collectivité de Corse d’un dispositif d’aide prévu par la loi.
Recommandation n°
8 : généraliser
l’assistance technique
aux communes et aux
groupements, prévue par
l’article L.
3232-1-1 du code général des collectivités
territoriales.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
65
7.5
La production des connaissances : une démarche transversale à
renforcer
Ainsi que le soulignent les différents documents de planification, le niveau des
connaissances
reste globalement insuffisant, aussi bien concernant l’état des milieux que les
pressions qui s’y exercent.
La situation se traduit par un manque de fiabilité des données contenues dans les
documents de planification
: d’un SDAGE à l’autre, l’état de certaines masses d’eau est
réévalué à la hausse ou à la baisse, remettant en cause une partie des constats et objectifs
contenus dans les précédents documents
119
.
Par ailleurs, l’absence d’études sur les volumes prélevables
globaux (EVPG) à
l’échelle des bassins
versants a constitué l’un des freins à la mise en œuvre des projets de
territoire.
Acteurs intervenants
dans l’élaboration des connaissances pour la définition
d’objectifs quantitatifs
Source : Chambre régionale des comptes.
7.5.1
Un suivi quantitatif des m
asses d’eau à conforter
La collectivité de Corse apporte, via l’OEHC, son concours à l’amélioration des
connaissances sur l’état des eaux, permettant de définir des objectifs quantitatifs.
Un service d’hydro
-climatologie a été créé en 2016
au sein de l’of
fice qui gère à ce
jour un réseau de 17 stations hydrométriques. Depuis 2018, la cellule a intensifié son suivi
des cours d’eau avec la création de sept nouvelles stations.
119
12
masses d’eau en bon état écologique ont ainsi été déclassées entre
2015 et 2021. De même, une
masse souterraine supplémentaire a été déclarée en mauvais état quantitatif (alluvions des fleuves côtiers de la
plaine
orientale).
Le
bilan
effectué
par
les
documents
d’accompagnement
du
SDAGE 2022-2027 précise :
«
L’analyse de l’évolution des méthodes d’évaluation et des données de base
prises en compte explique en grande partie que l’état n’évolue pas aussi rapidement que souhaité » « le nombre
de rejet et de prélèvement pris en compte [étant] plus importants que lors de l’évaluation pr
écédente
en 2013
[…] l’état des masses d’eau a pu être revu à la baisse […] sans qu’il y ait eu en fait de dégradation
par une nouvelle activité ni d’amplification de la pression exercée par une activité existante
».
Données de
s
uivi quantitatif
des eaux
OEHC,
DREAL et
BRGM
Définition bassins
en déséquilibre
(SDAGE)
ZRE (Préfet)
CdC
(SDAGE)/
Préfet
Définition de
débits
biologiques/
écologiques
CdC
(OEC)
Définition des
volumes
prélevables et
objectifs
quantitatifs
SAGE/PTGE
ou à défaut
Etat
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
66
Depuis
2021, le réseau de suivi des eaux superficielles de l’OEHC et de la DREAL
c
ouvre
l’ensemble
des
bassins
versants
préalablement
identifiés
dans
le
SDAGE 2016-2021 pour un suivi hydrologique tendanciel et/ou quantitatif des débits.
Néanmoins, le réseau de mesure doit encore être étendu pour combler le
sous-
équipement des cours d’ea
u constaté en Corse. Le
rapport du Cerema relatif à l’analyse
des effets du changement climatique en Corse, paru en mars 2021, met en lumière le manque
d’équipement en limnigraphes des cours d’eau de l’île (seulement 20 pour 50 cours d’eau).
7.5.2
L’absence de d
iagnostics précis au niveau des bassins-versants, point de
départ des démarches de concertation
La réalisation de diagnostics à l’échelle des territoires est complexe et impose
plusieurs démarches préalables, notamment la définition de débits minimaux biologiques
(DMB), permettant de quantifier les besoins des « milieux ».
Désormais, l’approche statistique
est privilégiée et la définition de débits
écologiques
120
ne sera
entreprise que sur les cours d’eau identifiés par les PTGE.
En parallèle, les diagnostics à l’échelle locale, et notamment, les études d’évaluation
des volumes prélevables (EVPG), peinent à émerger en Corse. Une seule action a été
engagée dans le cadre du SAGE de l’étang de Biguglia, avec l’appui du BRGM, pour
l’hy
drosystème du Bevincu (rivière et aquifère). Alors que des objectifs quantitatifs devaient
être définis au plus tard fin 2015
121
, l’étude préalable n’a été engagée qu’en 2016. Ses
conclusions devraient bientôt être rendues publiques.
Pour les masses d’eau s
outerraines, des efforts plus importants ont été entrepris. Dans
le cadre d’une étude transversale confiée au BRGM, dix
nappes ont fait l’objet d’une
définition des niveaux piézométriques de référence, dont les conclusions seront
prochainement rendues publiques. Une deuxième phase concernant sept autres nappes
alluviales a été lancée en juillet 2022.
Le faible nombre de diagnostics engagés révèle une difficulté à mobiliser les acteurs
pour la production de connaissances. La création de partenariats avec le monde scientifique
et l’Université de Corse serait une première étape permettant de mieux appréhender les
milieux et les spécificités de la ressource en Corse.
7.5.3
Des retards dans la réalisation d’études et d’outils à l’échelle du bassin
En 2019, la collectivité de Corse a prévu de porter directement plusieurs études et
chantiers transversaux
préconisés par le PBACC à l’échelle du bassin. Les montants alloués
se sont élevés au total à 490 000
€ et font l’objet d’une participation de l’
a
gence de l’eau
de 50 % du coût HT. A ce jour, seuls deux des cinq chantiers ont été engagés.
120
Débits qui englobent les DMB mais aussi des débits « acceptables », déterminés à une fréquence
mensuelle et non instantanée, à l’échelle du bassin et non d’un ouvrage
.
121
Il s’agissait d’une demande explicite du comité de bassin de Corse, dans sa séance
du 2 octobre 2011 portant avis sur le
projet de SAGE de l’étang de Biguglia.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
67
C
hantiers prévus pour la mise en œuvre du PBACC (volet amélioration des
connaissances) en 2019
Chantiers collectivité de Corse approuvés
en 2019
AP en € TTC
Echéance cible
PBACC
Paiements à ce
jour en € TTC
Etat des lieux de la ressource en eau
souterraine de Corse
230 400
2021
184 320
Etude d’opportunité de la désalinisation
100 000
2019
Non engagé
Etude cout/bénéfices de la REUT
70 000
2022
19 032
Inventaire des techniques innovantes et
filières à réorganiser
50 000
2020
Non engagé
Prestations d’appui SIGEC
40 000
2022
Non engagé
Total
490 400
Source : Délibération n° 19/423 AC du 28 novembre 2019
relative à la mise en œuvre du PBACC
L’état des lieux de la ressource en eau souterraine a été lancée en
2020 dans le cadre
d’une convention
établie avec le BRGM. Les résultats sont attendus courant 2022. La
réalisation d’un premier diagnostic des opportunités de réutilisation des eaux usées
traitées
(REUT) a fait l’objet d’un marché de prestations intellectuelles notifié le
18 juin 2021. Les
premières conclusions ont été présentées lors du comité de bassin du 4 mai 2022.
Les trois autres actions, préconisées depuis
2018, n’ont pas encore été
engagées. En
particulier, le projet de créer un système partenarial d’information et de gestion des eaux de
Corse (SIGEC), piloté par la collectivité, devrait être lancé en
2022, avec l’objectif de
consolider les données sur les milieux aquatiques.
En 2020 et 2021, la collectivité
et ses offices ont engagé d’importantes campagnes
de communication à destination du grand public, afin de sensibiliser à la sécheresse et aux
bonnes pratiques
122
. Sur les deux ans, l’achat d’outils et d’espaces publicitaires a
représenté
près de 60 000 euros et la campagne a été fortement relayée sur les réseaux sociaux
123
.
Nonobstant ces efforts de communication, il appartient à la collectivité de renforcer
son action en matière de production des connaissances sur les trois volets identifiés ci-avant.
Recommandation n°
9 : r
enforcer la production de connaissances sur l’état des
milieux ainsi que sur les pressions qui s’y exercent afin de fiabiliser les données
contenues dans les documents de planification.
122
« L
’acqua hè a nostra richezza, risparemula »
. «
L’eau est notre richesse, préservons
-la ».
123
La collectivité rapporte qu’en 2021, la publication sponsorisée par Facebook et Instagram a été vue
près de 364 000 fois par près de 125
000 personnes différentes, auxquelles s’ajoutent plus de 28
000 vues des
publications non sponsorisées sur les réseaux.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
68
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ____________________
Les actions menées pour préserver la ressource restent insuffisantes,
à l’instar des
programmes de
travaux de réhabilitation des ouvrages d’eau potable qui
ont permis de
générer des économies d’eau, mais ne sont pas suivis d’une action volontariste pour
améliorer le rendement
des réseaux d’eau brute et d’eau potable,
qui restent en dessous de
la moyenne nationale.
Le taux de réalisation des actions reprises dans le programme pluriannuel de
mesures est faible.
Plusieurs marges de progrès sont identifiées. À
l’échelle des territoires, l’animation
par la collectivité de Corse
pour la mise en œuvre des projets territoriaux de gestion de l’eau
est indispensable
, de même que l’assistance technique aux communes
, à leur groupements,
compétents en matière d’eau potable et d’assainissement,
ainsi qu’aux
EPCI, lesquels sont
insuffisamment structurés pour la plupart d’entre eux pour répondre à des enjeux complexes
.
Les prélèvements en eau brute à destination de l’eau agricole excédent de plus de
10 millions de m
3
ceux destinés à la potabilisation (58,3 millions de m
3
contre
46,7 millions de m
3
en 2019). La tarification appliquée est inchangée, dans sa structure,
depuis une trentaine d’années. Elle contrevient au principe «
l’eau paie l’eau
».
Le niveau des connaissances reste insuffisant, tant en ce qui concerne
l’état des
milieux que sur
les pressions qui s’y exercent, ce qui n’est pas sans conséquence sur la
fiabilité des données contenues dans les documents de planification. Ces approximations
freinent l
’identification
des actions à mener sur les territoires, dans un contexte qui évolue
de manière défavorable pour au moins cinq d’entre eux
.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
69
8
CONCLUSION
Des territoires vulnérables et une animation locale insuffisante
Jusqu’en 20
21, le SDAGE
n’identifie pas de bassins en déséquilibre quantitatif,
permettant d’inciter la mise en œuvre d’actions à l’échelle locale.
La planification se résume
à l’existence des
commissions locales de l’eau, chargée d’élaborer
et de suivre les deux
SAGE qui couvrent 10 % du territoire. Aucun
projet de territoire pour la gestion de l’eau
n’
a
été mis en place alors que la collectivité de Corse a approuvé les modalités de leur mise en
œuvre
en octobre 2019.
La
faible structuration des maîtres d’ouvrages locaux
(intercommunalités) conjuguée
au manque d’animation par la collectivité expliquent en partie les
retards pris dans
l’élaboration d’une
planification locale efficace et adaptée.
Par ailleurs, la production des connaissances reste insuffisante, tant en ce qui
concerne
l’état des milieux
que sur
les pressions qui s’y exercent
.
Un programme d’investissement aidé, dont les réalisations sont en
-deçà des
objectifs
Le montant des investissements réalisés au cours de la période 2017-2021
n’atteint
pas les objectifs prévus. L
examen des opérations montre une sous-consommation des
crédits et des retards importants dans la réalisation des travaux, dont certains permettent de
réduire efficacement les prélèvements sur les milieux et de
générer des économies d’eau
.
L’exécution des programmes d’investissement est en constant décalage avec les
engagements formulés dans les documents stratégiques, sans que les écarts s’expliquent par
le manque de financements extérieurs.
Une programmation portée par l’OEHC, en contradiction av
ec le SDAGE
2022-2027
La collectivité s’appuie sur l’office d’équipement hydraulique de Corse (OEHC),
établissement créé par la loi, sans qu’un pilotage concerté soit apparent.
Le schéma
hydraulique « Acqua Nostra 2050
», préparé par l’office, et adopté en
juillet 2020 par
l’Assemblée de Corse, est en
contradiction avec les objectifs stratégiques contenus dans le
SDAGE 2022-2027.
Le plan
de financement, d’un montant de 600
M€,
intègre la modernisation et la mise
aux normes des barrages gérés par l’OEHC,
travaux qui ne relèvent pas de la gestion des
ressources en eau mais de la mise en sécurité des ouvrages. Le diagnostic permettant de
déterminer les besoins de stockage des eaux superficielles
s’appuie sur des données
contestables.
Des résultats modestes e
t des pistes d’amélioration
Les travaux qui permettent
de générer des économies d’eau
significatives, ne sont
pas suivis d’une action volontariste pour
améliorer le rendement
des réseaux d’eau brute et
d’eau potable, dont les performances
restent en dessous de la moyenne nationale.
L
a chambre maintient que l’
assistance technique due aux communes et à leur
groupements, compétents en matière d’eau potable et d’assainissement,
ainsi qu’aux
EPCI,
peu
structurés pour la plupart d’entre eux pour répondre à des
projets complexes, doit être
mise en œuvre
.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
70
ANNEXES
Annexe n° 1.
Le cadre juridique et institutionnel de la politique de l’eau en Corse
................
71
Annexe n° 2. Composition du comité de bassin
......................................................................
79
Annexe n° 3. Glossaire
............................................................................................................
81
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
71
Annexe n° 1.
Le cadre juridique et institutionnel
de la politique de l’eau en
Corse
1.
Le contexte réglementaire européen et national
1.1.
Les lois sur l’eau
En France, la politique de l’eau est fondée sur quatre grandes lois et encadrée par la
Directive cadre européenne sur l’eau (DCE).
Depuis 1964
124
, le territoire métropolitain est divisé en six bassins hydrographiques
125
. Chaque bassin est doté :
-
d
’un comité de bassin, instance de concertation qui élabore la politique de l’eau
et est
consulté sur l’opportunité des travaux et aménagements envisagés dans le bassin
;
-
d
’une
a
gence de l’eau, établissement public de l’
É
tat chargé d’exécuter et
financer cette
politique via un programme pluriannuel d’interventions. Pour ce faire, elle perçoit des
redevances auprès des usagers.
La loi sur l’eau du
3 janvier 1992
a instauré les schémas directeurs d’aménagement
de gestion des eaux (SDAGE). Elaborés par les comités de bassin, ces documents fixent pour
six
ans les orientations permettant d’atteindre les objectifs de gestion équilibrée de la
ressource et ceux de qualité et de quantité des eaux au niveau du bassin. Selon le même
principe, des schémas d’
aménagement de gestion des eaux (SAGE) peuvent être institués à
l’échelle des bassins versants et sous
-bassins
126
.
La directive-
cadre sur l’eau (DCE), adoptée le
23 octobre 2000 et transposée par la
loi n° 2004-338 du 21 avril 2004, constitue le cadre de ré
férence de la politique de l’eau.
La
loi
introduit l’obligation pour les
états membres de parvenir au bon état de toutes les masses
d’eau d’ici
2015, objectifs auxquels les SDAGE doivent contribuer.
L’évaluation de l’état des masses d’eau repose sur des p
aramètres spécifiques,
écologiques et chimiques pour les eaux de surface, chimiques et quantitatifs pour les eaux
souterraines. Si le délai ne peut être respecté, un report d’échéance est autorisé
jusqu’en
2021, voire 2027.
En 2006, la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006
sur l’eau et les milieux
aquatiques (LEMA) rénove et modernise l’ensemble de la politique de l’eau
127
. L’Office
national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA), qui deviendra en
2019
l’Office
français de la biodiversité (OFB), est créé
et intervient dans la connaissance et l’appui à la
police de l’eau.
124
Loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 sur le régime et la répartition des eaux et la lutte contre la
pollution.
125
Les bassins hydrographiques sont des territoires cohérents d’un point de vue hydrologique. Ils
correspondent généralement au bassin-
versant (surface d’alimentation d’un cours d’eau) d’un grand fleuve.
126
Les sous-bassins sont une subdivision des bassins-versants, correspondant à la surface
d’alimentation de chacun des affluents se jetant dans le cours d’eau principal.
127
La loi modernise la composition des comités de bassin, renforce la portée juridique des SDAGE et
SAGE et améliore la gestion des prélèvements. Elle instaure une gestion collective de l'eau en agriculture, avec
la création des organismes uniques de gestion collective (OUGC) dans les secteurs en tension (les zones de
répartition des eaux ZRE).
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
72
Les principales lois sur l’eau
Source : Chambre régionale des comptes.
L
’instruction du
Gouvernement du 7 mai 2019 relative au projet de territoire pour la
gestion de l’eau (PTGE)
128
introduit
un nouvel outil de concertation à l’échelle locale,
en
faveur de la gestion quantitative. Les PTGE permettent de définir une répartition des
prélèvements par usage et d’atteindre
un équilibre entre les ressources disponibles et les
besoins, en respectant les écosystèmes aquatiques, en anticipant le changement climatique
et en s’y adaptant.
1.2.
Les documents d’objectifs nationaux
Avec les préoccupations liées au changement climatique, plusieurs objectifs ont été
définis au niveau national. La loi Grenelle II du 12 juillet 2010 et son décret d’application
du 27 janvier 2012 fixent notamment un seuil de rendement minimum de 85 % pour les
réseaux d’eau potable.
Le plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC),
adopté en 2011, fixe l’objectif d’une diminution de 20 % des prélèvements d'eau
sur le
milieu, hors stockage hivernal, d'ici 2020. Plus récemment, en 2019, le second volet des
Assises de l’eau dédié au climat et au grand cycle de l’eau définit plusieurs axes ambitieux,
parmi lesquels :
-
r
éduire les prélèvements d’eau de 10 % en 5 ans et de 25 % en 15 ans ;
-
é
laborer au moins 50 projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) d’ici 2022 et
100 d’ici 2027 ;
-
tripler le v
olume d’eaux non conventionnelles utilisées d’ici 2025 ;
-
d
oubler d’ici 2030 la superficie de milieux humides relevant des aires protégées ;
-
g
énéraliser les SAGE d’ici 2025.
128
Instruction qui remplace celle du 4 juin 2015 r
elative au financement par les agences de l’eau des
retenues de substitution.
Création des 6 bassins hydrographiques
Création des comités de bassin et Agences de l'eau
Loi du 16 décembre 1964
Eau reconnue "Patrimoine commun de la nation"
Création des SDAGE et SAGE
Régime d'autorisation des prélèvements (IOTA)
Loi du 3 janvier 1992
Objectifs d'atteinte du bon état des eaux d'ici 2015
Identification des actions clés dans un programme de mesures
(PdM)
Suivi de l'atteinte des objectifs via un "programme de
surveillance " et un "Etat des lieux" de bassin
Participation du public
DCE et loi du 21 avril 2004
Modernisation de la composition des comités de bassin
Renforcement de la portée juridique des SDAGE/SAGE
Création de l'ONEMA et des OUGC (organismes collectifs)
Loi "LEMA"
du 30 décembre 2006
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
73
Les conclusions du «
Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement
climatique » lancé le 28 mai 2021, rendues publiques le 2 février 2022, réaffirment le
principe d’étendre le recours aux PTGE en en faisant un préalable à toute construction
nouvelle d’ouvrage de stockage ou de retenue.
2.
La politique de l’eau en Corse
: un cadre à plusieurs acteurs
2.1. La compétence élargie de la collectivité de Corse
Depuis la loi du 22 janvier 2002
129
, la Corse constitue un bassin hydrographique, au
sens des articles L. 212-1 à L. 212-6
du code de l’environnement. Ce bassin a la particulari
de correspondre à la circonscription administrative de la collectivité de Corse. Il reste
cependant rattaché à l’Agence de l’eau Rhône
-Méditerranée-Corse.
Selon l’article
26 de la
loi, codifié à l’article L.
4424-36 du code général des
collectivités territoriales, il appartient à la collectivité de Corse
de mettre en œuvre «
une
gestion équilibrée de la ressource en eau ». À ce titre, elle exerce des missions étendues,
attribuées en métropole aux a
gences de l’eau et aux préfets coordonnateurs de bassin.
En matière de planification, la collectivité
assure un rôle d’impulsion en
engageant
et en approuvant le SDAGE. Elle adopte également le plan de bassin d’adaptation au
changement climatique (PBACC).
Pour élaborer ces documents et en suivre la mise en œuv
re, le comité de bassin de
Corse est créé, il est présidé par le président du conseil exécutif de Corse.
L’Assemblée
de
Corse en fixe la composition et les règles de fonctionnement. Le premier SDAGE spécifique
à la Corse a été adopté en 2009, pour la période 2010-2015.
En application de l’article L.
4424-9 du code général des collectivités territoriales,
l’
Assemblée de Corse est
par ailleurs chargée d’adopter
le plan d'aménagement et de
développement durable de Corse (PADDUC), qui fixe les priorités de développement de la
Corse à long terme,
et notamment les orientations en matière d’implantation des
infrastructures et ouvrages hydrauliques.
L
’Assemblée de Corse est compétente à l’échelle des sous
-bassins ou groupement de
sous-bassins, pour créer et fixer la composition et les règles de fonctionnement des
commissions locales de l’eau (CLE). Ces
instances sont chargées
d’élaborer et suivre les
schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), déclinaison du SDAGE au niveau
local, qui font également l’objet
d’une approbation par l’
Assemblée de Corse
.
Le pilotage des projets de territoire pour la g
estion de l’
eau (PTGE)
130
relève aussi
de la collectivité de Corse. Ces projets ont vocation à supplanter les SAGE pour la
déclination de la politique de l’eau sur l
e territoire.
Par ailleurs, la loi de 2002 confirme les compétences de la collectivité de Corse dans
le domaine des infrastructures hydrauliques. L'article L. 4424-25 du CGCT précise que la
collectivité de Corse
, par l’intermédiaire de son Office d’Équipem
ent Hydraulique (OEHC)
« en assure l'aménagement, l'entretien, la gestion et, le cas échéant, l'extension »
.
129
Loi n°2002-92 relative à la Corse.
130
Cf. Instruction du Gouvernement du 7 mai 2019 relative aux projets de territoire pour la gestion de
l’eau.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
74
L’OEHC,
intervenant pour le compte de la collectivité de Corse, assure notamment
une mission de production d’eau agricole et fournit à plusieurs collectivités de l’eau brute,
voire potable, à des fins de distribution aux usagers.
La collectivité de Corse apporte une assistance technique et financière aux
communes et à leurs groupements
dans les domaines de l’eau potable
, de l'assainissement et
de la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GeMAPI).
Depuis le 1
er
janvier 2018, la collectivité exerce de plein droit les compétences que
les lois attribuent aux départements et aux régions, et en particulier, leur mission d’aide e
t
d’assistance aux communes rurales
131
.
Cette mission se traduit par l’existence de différents
services :
-
l
e service d’assistance technique et d’exploitation des stations d’épuration (SATESE),
confié à l’OEHC
;
-
l
e service d’assistance technique à l’eau pota
ble (SATEP) ;
-
l
e service d’assistance technique aux milieux aquatiques (SATEMA).
2.2. Les prérogatives
des services de l’
État
La
collectivité de Corse partage des responsabilités avec les services de l’
État pour
la mise
en œuvre
des documents
de planification
et l’atteinte
des
objectifs
environnementaux.
Le préfet de Corse, préfet coordonnateur de bassin
132
, arrête, après avis du comité de
bassin, le programme de mesures (PdM)
133
, qui recense les mesures nécessaires à l’atteinte
des objectifs du SDAGE. Il
élabore le plan de gestion des risques d’inondation (PGRI).
En 2016, il a approuvé la «
stratégie d’organisation des compétences locales de l’eau
»
(SOCLE), désormais annexée au SDAGE.
131
Au titre notamment des articles L. 3232-1-1, L. 3232-1 et R. 3232-1 et suivants du CGCT (aide à
l’équipement rural et assistance technique).
132
Aux termes de l’article L.
213-7
du code de l’environnement
, « Dans chaque bassin, le préfet de
la région où le comité de bassin a son siège anime et coordonne la politique de l'Etat en matière de police et
de gestion des ressources en eau ».
Selon l’article R.
213-14
du code de l’environnement, le préfet
coordonnateur de bassin constitue l'autorité administrative prévue aux articles L. 212-2 et suivants du même
code.
133
En l’absence de dispositions distinctes dans le CGCT, les dispositions de l’article L.
219-9 du code
de l’environnement s’appliquent également au bassin de Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
75
L’exercice du pouvoir de police de l’eau est du ressort des services de l’
État. Ces
derniers instruisent les demandes relatives aux « installations, ouvrages, travaux et
activités » (IOTA) et aux «
installations classées protection de l’environnement
» (ICPE)
susceptibles d’avoir un impact sur les milieux aquatique
s. Les rejets et les prélèvements en
eau douce font notamment l’objet d’un régime de déclaration ou d’autorisation spécifique
134
.
En outre, le préfet en
cadre les études d’évaluation des volumes prélevables et approuve la
répartition de ces volumes par usage. Il dispose également de pouvoirs
135
de « gestion de
crise ».
Des «
Missions Interservices de l’Eau et de la nature
» (MISEN), composées des
services de l’
É
tat, dont des membres de l’Office Français de la biodiversité (OFB),
coordonnent les contrôles de poli
ce et déclinent le programme de mesures à l’échelle du
département.
2.
3. Des champs d’intervention partagés
Les règles de fonctionnement du comité de bassin sont fixées par la collectivité de
Corse, l’
a
gence de l’eau en assure le
secrétariat en collaboration avec les services de la
collectivité. Les membres du secrétariat technique du comité, la collectivité de Corse,
l’agence de l’eau et
la
DREAL sont associés à l’élaboration des différents documents de
planification (SDAGE, PBACC) et d’exécution (
programme de mesures, tableaux de bord).
L
’assistance financière aux collectivités
, dévolue à la collectivité de Corse, a lieu en
partenariat avec l’
a
gence de l’eau. L’
État participe aussi au financement de certains projets
via le PEI (programme exceptionnel d’in
vestissement) pour la Corse et le PTIC (plan de
transformation et d’investissement pour la Corse) qui lui a succédé en
2021.
La double compétence des services de l’
État et de la collectivité de Corse est
également présente dans le domaine du suivi des mas
ses d’eau et de la production de
connaissances sur les milieux. Selon les articles L. 219-9 et R. 212-22 du code de
l’environnement, le préfet établit un programme de surveillance de l’état des eaux, qui a pour
objet de suivre et contrôler les masses d'eau, notamment celles risquant de ne pas atteindre
les objectifs de bon état. Sur le volet quantitatif, ce programme s’appuie sur les données
fournies par un réseau de partenaires, gestionnaires de réseau, que sont la DREAL, l’OEHC
et le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières).
Depuis 2017
136
, la DREAL a transféré à l’OEHC la ma
î
trise d’ouvrage d’une grande
partie des stations hydrométriques, avec pour vocation principale le suivi des étiages, tandis
que la DREAL a conservé le réseau des stations visant en priorité à prévenir les inondations.
134
Selon l’a
rticle R. 214-1
du code de l’environnement, les principau
x prélèvements sont soumis à
déclaration dès lors que le volume total prélevé dépasse 10 000 m
3
par an, et à autorisation lorsque le volume
est égal ou supérieur à 200 000 m
3
par an.
135
Ces pouvoirs ont récemment été précisés par décret n° 2021-795 du 23 juin 2021 relatif à la gestion
quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse.
En période de
sécheresse, il lui appartient de prendre les mesures de restriction de la consommation qui s’imposent
.
136
Depuis le 1
er
septembre 2017, par une convention relative à l’amélioration de la connaissance
quantitative des ressources en eau sur la région Corse, signée entre la DREAL et la collectivité de Corse, OEHC
le 11 juillet 2017.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
76
Au travers des informations dont il
dispose sur le débit des cours d’eau et les volumes
prélevés, l’Office participe aux comités ressource en eau (ex comités sécheresse), instances
de concertation préalables à l’adoption de mesures de restrictions et chargées d’exercer une
veille sur la situation hydrologique. Ces instances se réunissent sous la coprésidence du
p
réfet et du président de l’OEHC.
La collectivité de Corse
porte par ailleurs, avec l’appui de l’
a
gence de l’eau et des
services de l’
État, plusieurs études visant à améliorer les connaissances sur les milieux et les
solutions alternatives.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
77
La répartition des compétences
Répartition des compétences
dans le domaine de l’eau en Corse
Domaine
Collectivité de Corse
Services de l’Etat
Agence de l’eau
INSTANCES DE
CONCERTATION
Comité de bassin et CLE :
Création
Règles de fonctionnement
Secrétariat
Participation
Participation aux
différentes instances (via
des membres désignés et le
secrétariat technique)
Comité de bassin :
Secrétariat
Dépenses
PLANIFICATION
Approbation SDAGE, SAGE,
PBACC, PTGE
Approbation SOCLE, PdM
Adoption du programme
pluriannuel d’interventions
Appui à l’élaboration des
autres documents
FINANCEMENTS
Aides aux zones rurales
Cofinancement de projets
avec Agence de l’eau
Participation via PEI /
PTIC
Cofinancement avec la
collectivité de Corse dans
le cadre du programme
pluriannuel d’interventions
Participation via PEI
assainissement
POLICES DE
L’EAU
Police administrative et
judiciaire
SUIVI DES EAUX
OEHC : suivi de stations
hydrométriques
pour l’analyse
des débits de cours d’eau
Responsables du
programme de surveillance
des eaux
Suivi des stations
hydrométriques pour la
prévention des crues
EQUIPEMENTS
HYDRAULIQUES
Collectivité de Corse /
OEHC : aménagement et
gestion
Contrôles des ouvrages
(sécurité, débit réservé)
ASSISTANCE
TECHNIQUE AUX
COLLECTIVITES
Collectivité de Corse /
OEHC : SATEP, SATESE
Source : Chambre régionale des comptes.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
78
Répartition des compétences au sein du bassin de Corse
Domaine
Bassin de Corse
Autres bassins métropolitains
FONCTIONNEMENT
DES INSTANCES DE
CONCERTATION
Collectivité de Corse
Agence de l’eau
(pour le secrétariat du
comité de bassin conjoint avec la
collectivité de Corse)
Préfet
coordonnateur / DREAL
Agence de l’eau
(pour le secrétariat du
comité de bassin)
APPROBATION
PLANIFICATION
*
Collectivité de Corse
: SDAGE, SAGE,
PBACC, PTGE, SOCLE
Préfet :
PdM
Préfet :
SDAGE, SAGE, PBACC,
PTGE, PdM
FINANCEMENTS
Agence de l’eau
et
collectivité de Corse
Agence de l’eau,
en partie conseils
régionaux et départementaux
POLICES DE L’EAU
MISEN, DDTM, DREAL, OFB
MISEN, DDTM, DREAL, OFB
SUIVI
QUANTITATIF DES
EAUX
Préfet, DREAL, OEHC et BRGM
Préfet, DREAL
et
BRGM
EQUIPEMENTS
HYDRAULIQUES
Collectivité de Corse / OEHC, EDF
Sociétés
d’aménagement
régional
,
Associations
syndicales autorisées
,
Sociétés privées,
CNR, EDF…
ASSISTANCE
TECHNIQUE AUX
COLLECTIVITÉS
Collectivité de Corse / OEHC :
SATEP,
SATESE
Conseils départementaux
* Après avis ou adoption (selon les cas) par les instances de concertation
Source : Chambre régionale des comptes.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
79
Annexe n° 2.
Composition du comité de bassin
Délibérations de l’
Assemblée de Corse fixant la composition du comité de bassin sur la
période 2017-2022 et arrêtés de désignation du président du Conseil exécutif
Délibérations de l'Assemblée de Corse relatives à la composition
du comité
Arrêtés du président du conseil exécutif portant
désignation des membres du comité
Date de la
délibération
N° de la
délibération
Objet de la délibération
Date de
l'arrêté
N° de
l'arrêté
Objet de l'arrêté
28/05/2009
09/093 AC
Passage de 36 à 40 membres
Modifications du fonctionnement
suite aux élections territoriales
29/03/2016
1600674 CE
Nominations suite aux
élections territoriales pour
un mandat de 6 ans
(jusqu’au
29 mars 2022)
15/02/2017
1701117 CE
Remplacement d'un membre
22/09/2017
17/293 AC
A compter de 2018, passage
à 45 membres avec :
-Intégration des acteurs de la
biodiversité (loi du 8 août 2016)
-Prise en compte de la loi NOTRe
(nouveaux périmètres EPCI et
collectivité de Corse)
15/02/2018
180808 CE
Remplacement d’un membre
28/02/2018
180902 CE
Désignations suite à résultats
des élections territoriales
(suite à la fusion de la
collectivité de Corse en 2018)
26/06/2018
26/02/2019
02/07/2019
28/04/2020
15/09/2020
18/142 CE
19/043 CE
19/374 CE
20/1174 CE
20/1466 CE
Remplacement de membres
15/12/2020
23/02/2021
20/1850 CE
21/1945 CE
Nouvelles désignations suites à
élections municipales
30/04/2021
21/094 AC
Prise en compte de l'article 134 de
la loi Asap
du 7 décembre 2020 sur la parité
Hommes-Femmes
31/08/2021
21/080 CE
Modification des membres
suite à élections territoriales
10/12/2021
21/242 CP
(commission
permanente
de l'AC)
A compter du 1er janvier 2022 :
rééquilibrage des collèges et
élargissement à de nouveaux
acteurs : passage à 50 membres
26/10/2021
21/283 CE
Remplacement d’un membre
08/03/2022
22/084 CE
Nominations pour un
nouveau mandat de 6 ans
Source : Chambre régionale des comptes à partir des délibérations et arrêtés transmis par la collectivité de Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
80
Composition du comité de bassin de Corse fixée par délibérations 2018-2022
Composition de 2018 à 2021 (délibération n°17/293 AC)
Nb
Composition à compter de 2022 (délibération
n°21/242 AC)
Nb
1. Collectivités et leurs groupements
18
1. Collectivités et leurs groupements
18
Collectivité de corse
9
Collectivité de corse
(dont 3 représentants des
offices : OEHC, OEC, ODARC)
10
Représentants désignés par les associations des
maires et présidents des communautés de communes
5
Représentants désignés par les associations des
maires et présidents des communautés de communes
6
Communautés d'agglomération
2
Communautés d'agglomération
2
Parc naturel régional de Corse
1
Parc naturel régional de Corse
1
Représentant désigné par l'association corse des élus
de montagne : collectivité du comité de massif
1
Représentant désigné par l'association corse des élus
de montagne : collectivité du comité de massif
1
2. Usagers et personnalités compétentes
18
137
2. Usagers et personnalités compétentes
20
EDF et Entreprise de distribution d'eau
2
EDF et Entreprises de distribution d'eau
(+ OEHC)
3
Chambres régionales d'Agriculture - Commerce et de
l'Industrie - de Métiers de Corse
3
Chambres régionales d'Agriculture - Commerce et
de l'Industrie - de Métiers de Corse
3
Associations agréées de protection de la nature et de
défense de l'environnement
2
Associations agréées de protection de la nature et de
défense de l'environnement
2
Fédération interdépartementale des associations de
pêche et de pisciculture
1
Fédération interdépartementale des associations de
pêche et de pisciculture
1
Fédération régionale des coopératives agricoles
corses
1
Fédération régionale des coopératives agricoles
corses
1
Conservatoire d'espaces naturels de Corse
1
Conservatoire d'espaces naturels de Corse
1
Office de l'environnement de la Corse (OEC), dont
Parc naturel marin du Cap Corse et de l'Agriate
2
Parc naturel marin du Cap Corse et de l'Agriate
1
Conseil nautique régional
1
Fédération des industries nautiques
1
Agence du tourisme de la Corse
1
Comité régional des pêches maritimes et des
élevages marins de Corse
1
Office d'équipement hydraulique de la Corse (OEHC)
1
Université de Corse
1
Office de développement agricole et rural de Corse
(ODARC)
1
Conseil économique, social, environnemental et
culturel de Corse
1
Agence d'aménagement durable, d'urbanisme et
d'énergie de la Corse (AUE)
1
Associations de défense des consommateurs
1
Interbio Corse
2
Centre régional de la propriété forestière
1
3. Personnes qualifiées ou socio professionnels
désignés par moitié par la collectivité de Corse et par
moitié par le préfet de Corse
9
3. Personnes qualifiées ou socio professionnels
désignés par moitié par la collectivité de Corse et
par moitié par le préfet de Corse
10
Conseil économique, social, environnemental et
culturel de Corse
1
Directeur de l'OEHC ou son représentant
1
Université de Corse
1
Directeur de l'OEC ou son représentant
1
Comité régional des pêches maritimes et des élevages
marins de Corse
1
Directeur de l'ODARC ou son représentant
1
Union nationale des industries de carrières et
matériaux de construction
1
Directeur de l'AUE ou son représentant
1
Représentant de la délégation interrégionale de l'AFB
1
Directeur de l'ATC ou son représentant
1
Préfet de Corse et représentants désignés par lui
4
Préfet de Corse et représentants désignés par lui
5
* En bleu
: les nouveaux membres ou membres déplacés d’un autre collège
.
Source
: Chambre régionale des comptes à partir des délibérations de l’
Assemblée de Corse.
137
La délibération n° 17/293 présente certaines erreurs de rédaction. 44 membres sont listés, alors que
l’article
1
er
de la délibération prévoit que le comité de bassin est composé de 45 membres.
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
81
Annexe n° 3.
Glossaire
AEP
:
Alimentation en eau potable
BNPE
:
Banque nationale des prélèvements en eau
BRGM
:
Bureau de Recherches Géologiques et Minières
CGCT
:
Code général des collectivités territoriales
CLE
:
Commission locale de l’eau
DCE
:
Directive-
cadre sur l’eau
DREAL
:
Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du
logement
EPCI
:
Etablissement public de coopération intercommunale
ESA
:
Espaces stratégiques agricoles
GeMAPI
:
Gestion des Milieux Aquatiques et la Prévention des Inondations
ICPE
:
Installations classées protection de l’environnement
IOTA
:
Installations, ouvrages, travaux et activités
MISEN
:
Missions Interservices de l’Eau et de la nature
MOA
:
Maitrise d’ouvrage
MOE
:
Maitrise d’œuvre
ODARC
:
Office du développement agricole et rural
OEHC
:
Office d’équipement hydraulique de Corse
OFB
:
Office français de la biodiversité
PADDUC
:
Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse
PBACC
:
Plan de bassin d’adaptation au changement climatique
PdM
:
Programme de mesures
PEI
:
Programme exceptionnel d’investissement
PTIC
:
Plan de transformation et d'investissement pour la Corse
PTGE
:
P
rojet de territoire pour la gestion de l’eau
SAGE
:
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux
SAR
:
Société d’aménagement régional
SATEMA
: S
ervice d’assistance technique aux milieux aquatiqu
es
SATEP
:
Service d’assistance technique à l’eau potable
SATESE
:
Service d’assistance technique à l’exploitation des stations d’épuration
SDAGE
:
Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux
SIGEC
:
S
ystème d’information et de gestion des
eaux de Corse
SIVOM
:
Syndicat intercommunal à vocation multiple
COLLECTIVITE DE CORSE
COMPETENCE GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU
82
SOCLE
:
Stratégie d’organisation des compétences locales en eau
Chambre régionale des comptes Corse
Quartier de l’Annonciade
CS 60305
20297 Bastia Cedex
adresse mél. : corse@crtc.ccomptes.fr
www.ccomptes.fr/fr/crc-corse
« La société a le droit de demander compte
à tout agent public de son administration »
Article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen
Les publications de la chambre régionale des comptes Corse
sont disponibles sur le site :
www.ccomptes.fr/crc-corse