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Le présent
document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec
les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre les 11 et 12 janvier 2022
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
ET SA RÉPONSE
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE
CHARTRES AMÉNAGEMENT
(Département
d’Eure
-et-Loir)
Exercices 2014 et suivants
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
3
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
5
INTRODUCTION
......................................................................................................................
6
1
UN CADRE D’INTERVENT
ION À SÉCURISER
..............................................................
8
1.1
L’objet social de la SPL est adapté à la réalisation des compétences de ses
actionnaires et à l’évolution de l
eurs besoins
.................................................................
8
1.2
Le fonctionnement de la SPL doit associer davantage l’ensemble des actionnaires
en vue d’une évaluation préventive
et partagée des risques
.........................................
10
1.2.1 Les garanties de transparence vis-à-
vis des assemblées d’actionnaires sont à
renforcer
..........................................................................................................................
10
1.2.2
Le conseil d’administration doit se donner les moyens d’exercer effectivement ses
missions de surveillance et de contrôle
...........................................................................
13
1.2.3
Les modalités d’exercice de la direction générale ne sont pas entourées de garanties
suffisantes pour prévenir les risques de conflits d
’intérêts
.............................................
21
2
UNE ACTIVITÉ INSUFFISAMMENT PILOTÉE
............................................................
26
2.1
Les activités sont conformes au cadre légal et statutaire, à l’exception de celles
liées à l’image de marque de la société
.........................................................................
26
2.1.1
Les opérations d’aménagement et les études confiées à l’entreprise sont conformes
à son objet social
.............................................................................................................
26
2.1.2
La valorisation de l’image de marque de la société ne présente qu’un lien indirect
avec l’objet social
...........................................................................................................
29
2.2
Les modalités du contrôle analogue sont insuffisamment sécurisées
...........................
29
2.2.1 Plusieurs études ont été indûment soustraites aux règles de mise en concurrence,
faute d’être soumises à un contrôle effectif des collectivités adjudicatrices
..................
29
2.2.2
Les actionnaires minoritaires ne sont pas à même d’exercer une influence décisive
sur les décisions essentielles de la société
......................................................................
32
2.3
L’exécution des opérations d’aménagement emporte des risques financiers et
juridiques significatifs
...................................................................................................
34
2.3.1
Les opérations d’aménagement concédées à la société se caractérisent par des
cycles d’investissement longs sur des emprises foncières importantes, intégrant le
plus souvent la construction d’équipements publics
.......................................................
35
2.3.2 Les opérations du pôle gare et du plateau nord est concentrent les principaux défis
financiers et opérationnels à relever pour le modèle d’affaires de la
société
.................
36
2.3.3 La conduite du programme des cessions des ZAC de la roseraie, du jardin
d’entreprises et des pôles ouest doit être
mieux suivie et anticipée
................................
48
3
UNE SITUATION FINANCIÈRE PRÉOCCUPANTE
......................................................
55
3.1
Les documents comptables délivrent une image fidèle des risques financiers, à
l’exception des pertes sur opérations qui n’ont pas été provisionnées
.........................
55
3.2
L’exploitation demeure déficitaire alors que les opérations parviennent en
moyenne aux deux tiers de leur durée
...........................................................................
55
3.3
Les besoins financiers croissants de la société ont été comblés par des « avances »
des personnes publiques actionnaires
...........................................................................
57
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
2
3.3.1
L’octroi de prêts par les collectivités actionnaires, majoritairement sans
rémunération, dissuade la société d’améliorer la performance de sa gestion
.................
57
3.3.2 Les différés de remboursement des « avances » conduisent à reporter le besoin de
financement dans le temps, sans y apporter de réponses structurelles
............................
60
3.4
La SPL pourrait être confrontée à une situation d’emballement de sa dette, si ses
déséquilibres financiers persistent
................................................................................
61
4
DES CHOIX DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES QUI FRAGILISENT
LE FONCTIONNEMENT DE LA SOCIÉTÉ
....................................................................
63
4.1
La SPL supporte un niveau de dépenses de personnel proche d’autres entreprises
du secteur, mais se distingue par la structure de ses effectifs
.......................................
63
4.1.1
La société ne s’écarte pas des références du secteur en ce qui concerne le poids des
rémunérations, leur évolution et leur distribution
...........................................................
63
4.1.2 La SPL accueille, parmi ses cadres dirigeants, des agents des collectivités
actionnaires « en temps partagé
» ou d’anciens cadres publics de haut niveau
..............
65
4.2
Le recrutement d’agents publics « en temps partagé » et d’anciens
cadres publics
de haut niveau emporte un risque de confusion entre l’intérêt social de la société
et les finalités des collectivités actionnaires
.................................................................
66
4.2.1
Le recrutement d’agents publics par une société publique locale est soumis à des
règles visant à préserver ses intérêts et son objet statutaire
............................................
67
4.2.2 Le recrutement du DGS de la ville de Chartres et de Chartres Métropole comme
directeur délégué est porteur de risques pour la SPL
......................................................
70
4.2.3
Le recrutement d’agents publics des collectivités actionnaires sur des postes
d’expertise de haut niveau est susceptible de générer un biais dans le circuit d’aide
à la décision
....................................................................................................................
72
4.3
L’accompagnement et un dialogue social mis en œuvre au sein de la SPL
garantissent une meilleure gestion prévisionnelle des compétences
............................
74
5
DES ACHATS SÉCURISÉS MAIS COMPORTANT ENCORE DES MARGES
D’EFFICIENCE
..................................................................................................................
76
5.1
La société apporte une attention satisfaisante à la formalisation des achats, mais
insuffisante à la définition des besoins
.........................................................................
76
5.2
Des groupements de commandes réalisés sous forme d’accords
-cadres
permettraient de tirer parti d’économies d’échelle
.......................................................
77
ANNEXES
...............................................................................................................................
79
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
3
SYNTHÈSE
Créée le 7 septembre 2009, la société publique locale (SPL) Chartres Aménagement
réalise des opérations d’aménagement, des constructions et des études liées à ces opérations.
Les 21
concessions d’aménagement dont elle assure l’exécution présentent une durée moyenne
de 13 ans. Elles ont commencé entre 2009 et
2011 pour les plus importantes d’entre elles. Le
contrôle couvre une période où la société entre dans une phase avancée de son exploitation : au
31 décembre 2019, les opérations concédées ont atteint 60 % de leur durée contractuelle en
moyenne.
Le capital social de la SPL
, d’un montant inchangé de 5,85
M€ sur la période, est détenu
à hauteur de 53,7 % par la ville de Chartres, de 46 % par Chartres Métropole et de 0,3 % par
seize
communes membres de cette communauté d’agglomération. Au 31
décembre 2019, la
société emploie 32
salariés et enregistre un chiffre d’affaires de
26,8
M€. Son actif avoisine
170
M€, dont 154
M€ au titre des stocks de biens en cours d’aménagement.
Le recours à une SPL en matière d’aménagement urbain et foncier présente un double
avant
age. Cet outil d’intervention spécialisé peut à la fois tirer parti de la liberté conférée par le
droit privé et garantir à ses actionnaires publics la maîtrise du programme des opérations, au
regard de leurs objectifs de développement économique ou d’équi
libre du logement. Il permet
également de bénéficier du régime des prestations intégrées. Par son actionnariat intégralement
public, et sous réserve de respecter des garanties de transparence, cette entité s’assimile aux
services propres des personnes publ
iques qui l’ont constituée pour l’application des règles de
la commande publique. Des opérations peuvent ainsi lui être confiées en dérogeant aux règles
de publicité et de mise en concurrence.
Ce choix de gestion exige cependant une organisation équilibrée et des contrôles
effectifs. Le manque de transparence au sein de la société ne permet pas de sécuriser son cadre
d’intervention. Le contrôle exercé par les organes statutaires demeure largement formel.
L’information donnée aux actionnaires sur la gestion
des concessions, leur situation de
trésorerie et l’avancement des programmes fonciers ne permet pas d’apprécier en totalité les
risques encourus. Le cumul de mandats sociaux et de fonctions électives implique un effort de
transparence accru ainsi que des règles claires de déport et de suppléance. La direction de la
société rend insuffisamment compte de son acti
on au conseil d’administration ainsi qu’aux
actionnaires minoritaires qui
ne sont pas à même d’exercer une influence décisive sur les
principales ori
entations de l’entreprise.
Cette organisation défaillante contribue à fragiliser l’activité et le modèle d’affaires de
la SPL. Les cessions de biens aménagés accusent des retards conséquents alors que la société a
dû exposer des dépenses très importantes pour le lancement des travaux. Ce décalage temporel,
inévitable s’agissant de cycles d’aménagement longs, est
accru par le défaut
d’anticipation sur
les perspectives commerciales. Pour cinq concessions couvrant 80 % des enjeux financiers, à
savoir les opérations du pôle gare, du plateau nord-
est, du jardin d’entreprises, des pôles ouest
et de la roseraie, le manque de pilotage rend peu probable un rattrapage en l’état.
Pour le pôle gare, la priorité donnée aux équipements publics (pôle multimodal,
complexe culturel et sportif, passerelle au-dessus des voies ferroviaires) a conduit à la réduction
des ambitions sur le programme commercialisable. Les besoins de financement non anticipés
ont dû être comblés au coup par
coup au moyen « d’avances » (70
M€ au 31
décembre 2019),
sans s’assurer qu’elles ne surcompensaient pas les coûts des équipements publics. Certaines ont
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
4
été abandonnées à la société qui n’était pas en mesure de les rembourser, faute de recettes
propres. Pour le plateau nord-est, une nouvelle programmation a dû être définie à la suite de
l’échec du projet de centre commercial initialement prévu. Par ailleurs, les faibles perspectives
de débouché sur les pôles ouest hypothèquent
les prévisions de recettes. Enfin, l’état du marché,
notamment du fait de la suroffre immobilière, rend difficile le comblement des retards de
commercialisation et des moins-
values des opérations du jardin d’entreprises et de la roseraie.
Au-
delà des projets relevant du cœur de métier de la société, certains s’écartent de son
objet social, sans motif commercial évident. Ainsi la conclusion d’un contrat de parrainage
sportif, à des fins de promotion et de mise en valeur de l’image de marque, apparaît sans lien
manifeste avec l’intérêt social, tout en étant onéreuse.
Ces difficultés pèsent sur la situation financière de la société. Son exploitation est
déficitaire sur l’ensemble de la période. Sa trésorerie a été abondée par les deux principales
collectivités actionnaires jusqu’à 13,9
M€ de la part
de la ville de Chartres et 79,9
M€ pour
Chartres Métropole fin 2019, soit respectivement 45 % et 155 % de leurs ressources fiscales
respectives. Ces liquidités, mises à disposition de la société sur une durée supérieure à un an et
le plus souvent sans intérêts, tendent à devenir un mode de financement récurrent qui, faute
d’accélération des entrées en recettes, fait courir un
r
isque d’emballement de la dette
.
La gestion des ressources humaines a contribué à fragiliser le
pilotage de l’activité. La
société a recruté des cadres dirigeants des collectivités actionnaires ou des agents publics
antérieurement investis de fonctions de surveillance ou de contrôle de la SPL. Si la démission
des agents concernés a permis de mettre un terme à ce ris
que de confusion entre l’objet
social
de l’entrepri
se et les intérêts
de la ville de Chartres ou de Chartres Métropole, il n’existe
toujours aucun dispositif de prévention
(code de bonne conduite, procédure d’alerte éthique,
référent dédié aux questions de conformité, etc.). La chambre invite la SPL à se doter sans
attendre d’un dispositif visant à détecter et à prévenir les situations
à risque au plan
déontologique.
En ce qui concerne les risques en matière d’achat, des progrès ont été réalisés dans la
formalisation des procédures. Des évolutions récentes marquent la volonté de l’entreprise de
professionnaliser le processus de mise en concurrence. Cependant l’examen d’échantillons de
marchés révèle une évaluation des besoins insuffisamment structurée, une approche cloisonnée
par opération et un faible recours à des achats mutualisés.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
5
RECOMMANDATIONS
Recommandation n°
1 :
Garantir un contrôle conjoint de l’ensemble des actionnaires sur les
objectifs stratégiques et les décisions importantes de la société.
Recommandation n°
2 :
Actualiser
les
bilans
(financiers,
immobiliers,
fonciers
et
commerciaux
) des opérations d’aménagement et garantir la transparence de leur
suivi.
Recommandation n°
3 :
Définir et mettre en œuvre les actions et outils permettant de maitriser
les risques identifiés des opérations d’aménag
ement menées et en assurer le suivi périodique.
Recommandation n°
4 :
Tenir un plan de trésorerie pluriannuel et consolidé.
Recommandation n°
5 :
Instaurer un dispositif visant à détecter et à prévenir les situations à
risque au plan déontologique.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
6
INTRODUCTION
La chambre régionale des comptes Centre-Val de Loire a procédé au contrôle de la
société publique locale (SPL) Chartres Aménagement sur le fondement
de l’article L.
211-8 du
code des juridictions financières. Son examen a porté sur les comptes des exercices 2014 à
2019.
Chartres Aménagement
est une SPL d’aménagement régie par l’article L.
327-1 du code
de l’urbanisme. Comme le prévoit l’article L.
1531-1 du CGCT, elle a été constituée sous forme
de société anonyme. À ce titre elle est soumise aux dispositions du code de commerce et au
droit de la concurrence.
Cependant son actionnariat est intégralement public. Son objet social prévoit une
intervention exclusive pour le compte des collectivités actionnaires. Ses activités d’intérêt
général et notamment les c
oncessions d’aménagement confiées par les personnes publiques
actionnaires impliquent l’assujettissement à certaines règles du droit public. Il en résulte un
régime dual invitant la société à concilier l’objectif de rentabilité économique, dans les limites
déterminées par son objet social, et les finalités d’intérêt général poursuivies par les actionnaires
publics. Si l’intérêt social de la SPL et les objectifs de ses actionnaires publics se recoupent en
partie, ils ne sauraient être confondus. La recherche
de cet équilibre est au cœur de la gestion
d’une SPL. Les choix de gouvernance et l’organisation des relations financières avec les
actionnaires supposent donc des garanties de transparence et de contrôle interne.
Spécialisée en matière d’aménagement urba
in et foncier, la société a la charge de cycles
d’investissements longs dont le dénouement en termes de recettes intervient après plusieurs
années. Cette contrainte de financement génère, par construction, un facteur de risque
particulier sur les équilibres du bilan, notamment du fait de stocks importants.
La soutenabilité de la gestion d’une SPL en charge d’opérations d’aménagement et
d’équipements publics est donc étroitement dépendante de sa capacité à gérer sur le long terme
ce décalage de trésorerie et à rembourser ses dettes par des ressources propres en fin
d’opération. Elle suppose un plan de financement pluriannuel solide, assis sur une évaluation
fiable des produits à venir.
La SPL Chartres Aménagement a été conçue à sa création en 2009
1
comme un « outil
opérationnel d’intervention
» au service de la politique d’aménagement de la ville de Chartres,
de Chartres Métropole et de deux syndicats mixtes.
2
Nombre d’opérations d’aménagement
confiées à la SPL constituent ainsi la déclinaison du schéma de cohérence territoriale (SCOT)
de l’agglomération chartraine. Elles revêtent, de ce fait, un caractère multidimensionnel, en
combinant des projets de requalification urbaine, des équipements et des constructions au
1
Les statuts constitutifs de la société ont été établis le 7 septembre 2009 entre la ville de Chartres, Chartres
Métropole, le Syndicat mixte du pôle Ouest
et le Syndicat Mixte d’étude, de développement et de gestion
du Jardin
d’Entreprises
. Ces deux derniers établissements publics ont été dissous au 1
er
janvier 2011. La communauté
d’agglomération Chartres métropole s’est substitu
ée à ces syndicats dans tous leurs droits et obligations et a
bénéficié du transfert de leur actif et de leur passif à cette même date.
2
Les choix stratégiques poursuivis par les actionnaires majoritaires, lors de la création de la société, sont rappelés
à l’annexe n° 2.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
7
service de la
politique de l’habitat e
t du cadre de vie, des orientations en matière
d’aménagement commercial ou d’attractivité économique.
Le schéma de cohérence territoriale de l’agglomération chartraine
Créé par la loi SRU du 13 décembre 2000, le schéma de cohérence
territoriale (SCOT) est un
document d’urbanisme
. Il retranscrit la vision stratégique
et partagée d’un territoire dans le cadre d’un projet d’aménagement et de
développement durable. Il précise les orientations en mati
ère d’habitat, de transport,
d’aménagement commercial, d’environnement
et de paysage et définit un cadre de
référence pour garantir la cohérence des documents d’urbanisme communaux
.
Le 15 mai 2006, le comité syndical du Syndicat m
ixte d’
études et de
progra
mmation (SMEP) de l’agglomération chartraine s’est doté d’un SCOT.
Toutes les communes membres du SMEP se trouvant incluses dans le périmètre de
la nouvelle c
ommunauté d’
agglomération de Chartres Métropole, cette dernière
s’est substituée au syndicat à com
pter du 1
er
janvier 2011. Ce document décline
trois axes à l’horizon 2040
: « Axe 1 - encourager et assurer la croissance
démographique », « Axe 2 - Bâtir un territoire solidaire » et « Axe 3 - valoriser le
cadre de vie et l’environnement »
. Plusieurs opérations concédées à la SPL Chartres
Aménagement sont expressément désignées, dans le bilan du SCOT réalisé en 2016,
comme des réalisations au service de la stratégie territoriale définie par ce
document. Ainsi les zone
s d’aménagement commerci
al du « Plateau Nord-est » et
des « pôles ouest » visent à «
structurer et valoriser l’offre commerciale
» en
adaptant « les pôles commerciaux périphériques ». De même les ZAC de la
Roseraie et de Rechèvres sont mises au nombre des projets urbains ayant pour objet
de « maintenir une offre résidentielle attractive » et de « développer une urbanité et
un cadre de vie en réponse aux nouvelles attentes des habitants et des usagers du
territoire. ».
Enfin l’opération du
pôle gare est à la croisée de plusieurs orientations
du SCOT. Ce projet repose à la fois sur une « ambition de désenclavement par le
rail », la volonté de « faciliter les déplacements multimodaux », le choix
d’
«
équiper l’agglomération chartraine
d’un complexe plurifonctionnel
» et de
« dynamiser
l’attractivité économique du quartier gare
».
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
8
1
U
N CADRE D’INTERVENTI
ON À SÉCURISER
Chartres Aménagement a connu une double extension de son champ d’intervention.
D’une part, son objet social, d’abord circonscrit aux opérations d’aménagement au sens de
l’
article L. 300-
1 du code de l’urbanisme, a été élargi, notamment pour permettre la «
réalisation
d’opérations de construction
». D’autre part, sans remettre en cause la participation majoritaire
de la ville de Chartres, son actionnariat s’est ouvert à plus
ieurs communes membres de Chartres
Métropole, offrant de nouvelles opportunités de développement de l’activité.
1.1
L’objet social de la SPL est adapté à la réalisation des compétences de
ses actionnaires et à l’évolution de leurs besoins
La SPL Chartres A
ménagement est régie par les dispositions de l’article L
. 1531-1 du
code général des collectivités territoriales (CGCT). Conformément à cet article, elle revêt « la
forme [d’une] société anonyme régie par le livre II du code de commer
ce » dont la totalité du
capital est détenu par des « collectivités territoriales et leurs groupements. »
L’objet social de l’entreprise est défini par les statuts. Il a connu deux principales
évolutions depuis la création de l’entreprise.
À la suite de
l’entrée en vigueur de l
a loi n° 2010-
559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales, la forme juridique
de la société a été modifiée au 1
er
juillet 2011. La remise en cause de son statut de SPLA et sa
transformation en SPL a permis d’étendre l’objet soci
al à la «
réalisation d’opérations de
construction ». Au-
delà d’opérations d’aménagement au sens strict, les actionnaires
s’accordaient ainsi la possibilité de confier à Chartres Aménagement la construction, la
rénovation, voire l’entretien, d’«
équipements culturels et sportifs
», d’infrastructures de
« stationnement et déplacement » et de « bâtiments publics ».
Par ailleurs l’assemblée générale extraordinaire réunie le 1
er
juillet 2011 a reconnu à la
société la faculté
d’«
exploiter tous services publics à caractère industriel ou commercial ou
toutes autres activités d’intérêt général » attachés aux
« équipements culturels et sportifs », aux
infrastructures de « stationnement » et aux « bâtiments publics » dont la construction lui est
confiée. Cette évolution était motivée, notamment, par la possibilité de confier à Chartres
Aménagement
l’exploitation de services publics en lien avec les équipements à venir aux abords
de la gare. Cette nouvelle composante étant demeurée inappliquée, l
’assemblée générale
extraordinaire a fini par revenir sur cette modification statutaire le 3 mars 2017.
Depuis lors, l’objet social de l’entreprise n’a subi aucun nouveau changement. Sa
définition est en adéquation avec les compétences de ses actionnaires
3
. Au 31 décembre 2019,
16 communes, un établissement public de coopération intercommunal et le département
d’Eure
-et-Loir
4
participent au capital de Chartres Aménagement. Le syndicat intercommunal
3
L’annexe n°
7 détaille la composition du capital social et son évolution dans le temps.
4
Par une délibération du 27 septembre 2021, le conseil départemental
d’Eure
-et-Loir a approuvé le retrait du
capital de la SPL Chartres Aménagement.
L’action détenue par le département a été vendue à la commune de
Lucé.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
9
de regroupement pédagogique et de ramassage scolaire de Dangers et de Vérigny-
Mittainvilliers
(SIRP) en a été actionnaire jusqu’en 2018.
La ville de Chartres et les 15 autres communes actionnaires sont détentrices de la clause
générale de compétence et ne se sont pas dessaisies de leurs prérogatives en matière
d’urbanisme et d’aménageme
nt. Sur le fondement de ses statuts et en vertu du principe de
spécialité, la commu
nauté d’agglomération Chartres M
étropole est habilitée à recourir aux
services de la SPL en matière de transports, de développement économique ainsi que pour les
aménagements nécessaires
aux infrastructures d’intérêt communautaire
. Ainsi, pour ces
actionnaires, l’
objet social de la SPL « concourt à l'exercice d'au moins une compétence de
chacune des collectivités territoriales et de chacun des groupements de collectivités territoriales
qui en sont actionnaires
», en application du cinquième alinéa de l’article L
. 1522-1 du CGCT
5
.
La définition de l’objet social de l’entreprise s’accorde également avec le niveau de
capital, l’évolution de l’actionnariat et la nature des besoins
satisfaits. Le montant du capital
social de la société est demeuré inchangé durant la période étudiée. Il est fixé à 5 852 000
€,
divisé en « 5 852 actions de 1 000 euros chacune », depuis la modification statutaire de 2013.
Ce niveau est conform
e à l’art
icle L. 1522-3 du CGCT, qui prévoit un seuil minimal de capital
fixé à « 225 000 euros pour les sociétés ayant dans leur objet la construction d'immeubles à
usage d'habitation, de bureaux ou de locaux industriels, destinés à la vente ou à la location, et à
150 000 euros pour celles ayant dans leur objet l'aménagement. »
L’ouverture du capital à d’autres communes, dont certaines à dominante rurale,
implique également un champ d’intervention large. L’aménagement de cœurs de village
suppose la capacité à construire des équipements de voirie, des aires de stationnement ou des
bâtiments publics. En ce sens l’évolution de l’objet statutaire est cohérente avec la modification
de la répartition du capital opérée depuis 2014
, avec la cession d’actions par Chartres
Métropole
aux communes de Dangers, Mignières, Amilly, Bailleau-
l’Evêque et
Morancez en 2015 et à
Poisvilliers en 2016. L’action détenue par le SIRP de Dangers a été cédée à la commune de
Mittainvilliers-Vérigny et la commune de Maintenon est devenue actionnaire en 2019.
Les modifications opérées dans la répartition du capital se reflètent dans la composition
du portefeuille d’opérations concédées à la SPL. L
a prépondérance de la ville de Chartres et de
la communauté d’agglo
mération Chartres Métropole
y est marquée, à l’instar de leur part dans
le capital de la société (respectivement 53,71 % et 46,04 % des actions en valeur au
31 décembre 2019). Mais ces deux actionnaires « historiques
» n’absorbent pas l’intégralité de
l’activité de l’entreprise. Plus
ieurs actionnaires minoritaires recourent aux services de la SPL.
Le poids de leurs opérations dans le portefeuille total excède même leur niveau de participation
au capital social. Il s’agit en majorité d’aménagements de village ou de lotissements, opérat
ions
qui entrent dans la définition de l’objet social.
5
L’application de cette disposition, relative à la réalisation de l'objet social des sociétés d’économie mixte, a été
étendue aux sociétés publiques locales en vertu du dernier alinéa
de l’article L
. 1531-1 du CGCT.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
10
1.2
Le fonctionnement de la SPL doit associer davantage l’ensemble des
actionnaires en vue d’une évaluation préventive et partagée des risques
1.2.1
Les garanties de transparence vis-à-
vis des assemblées d’actio
nnaires sont à
renforcer
Les assemblées générales ordinaires sont destinataires d’une information
détaillée dont le contenu et la lisibilité gagneraient à être renforcés
En application de
l’article L.
225-100 du code de commerce, l'assemblée générale
ordinaire est réunie au moins une fois par an, dans les six mois de la clôture de l'exercice. Elle
approuve les comptes de l’exercice précédent,
accompagnés du rapport de gestion y afférent.
Ce dernier document doit comprendre, en application des dispositi
ons de l’article L
. 225-100
du code de commerce, en vigueur du 1
er
janvier 2014 au 13 juillet 2017 et codifiées à compter
du 14
juillet 2017 à l’article L
. 225-100-1 du même code, « une analyse objective et exhaustive
de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation financière de la société, notamment de
sa situation d'endettement, au regard du volume et de la complexité des affaires ». Il doit
également comporter, « dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des
affaires, des résultats ou de la situation de la société, des indicateurs clefs de performance de
nature financière et, le cas échéant, de nature non financière ayant trait à l'activité spécifique de
la société, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de
personnel » et « une description des principaux risques et incertitudes auxquels la société est
confrontée ». Enfin le rapport de gestion contient « des indications sur ses objectifs et sa
politique concernant la couverture de chaque catégorie principale de transactions prévues pour
lesquelles il est fait usage de la comptabilité de couverture, ainsi que sur son exposition aux
risques de prix, de crédit, de liquidité et de trésorerie ».
En outre l’assemblée générale ordinaire doit être destin
ataire du rapport du commissaire
aux comptes sur l’exercice clos ainsi que du rapport spécial sur les conventions réglementées,
prévu par
l’article L.
225-40 du code de commerce. Celui-ci recense les « conventions
intervenant directement ou par personne interposée entre la société et son directeur général, l'un
de ses directeurs généraux délégués, l'un de ses administrateurs, l'un de ses actionnaires
disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 %. »
Durant la période contrôlée, l’assemblée générale ordinaire s’est réunie chaque année,
avant le 30 juin, pour approuver les comptes annuels, le rapport de gestion du conseil
d’administration, le rapport sur le gouvernement d’entreprise, prévu par le dernier alinéa de
l’article L.
225-37 du code de commerce depuis 2017, ainsi que le rapport du commissaire aux
comptes sur les comptes annuels. Elle s’est prononcée annuellement sur l’affectation du résultat
de l’exercice, conformément à l’article L.
232-12 du code de commerce, sur le montant
maximal des
jetons de présence et sur l’autorisation donnée au PDG d’effectuer les formalités
de dépôt des comptes. Enfin des rapports spéciaux sur les conventions réglementées lui ont été
soumis à l’appui des comptes clos au 31
décembre, pour être approuvés. L’assem
blée générale
ordinaire a systématiquement « approuvé, après connaissance prise du rapport spécial du
commissaire aux comptes, l’exécution des conventions qui y sont énoncées
».
Si les documents prévus par la réglementation ont bien été produits et ont donné lieu à
un vote, ils appellent plusieurs observations en termes de présentation et de contenu.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
11
D’une part, si les rapports de gestion exposent les événements survenus durant
l’exercice, leur incidence sur la formation du résultat et les équilibres du bil
an, ils ne comportent
aucun indicateur de performance de la société, ni au plan financier, ni sur le plan des activités
spécifiques de la société (par exemple, le taux de réalisation moyen des produits sur les
concessions d’aménagement ou le taux de marge sur les opérations d’aménagement et les
prestations de service). Par ailleurs, dès lors que la question du remboursement des avances de
trésorerie s’inscrit pleinement dans la politique de couverture des risques de trésorerie, il
apparaît essentiel, au vu
des montants en jeu, qu’il en soit rendu compte auprès de l’assemblée
générale des actionnaires. La SPL considère que les rapports établis par les organes dirigeants
contiennent toutes les informations requises par la législation et que la communication continue
entre ses services et ceux des collectivités actionnaires garantit une transparence suffisante sur
le financement des opérations. La chambre observe que l’information délivrée dans les rapports
de gestion gagnerait à être éclairée par une présentation lisible et accessible par tous les
actionnaires. En outre elle invite la société à clarifier la gestion des avances financières,
notamment en ce qui concerne les dates d’échéance et le respect des calendriers de
remboursement.
D’autre part, le contenu du rapport sur la gouvernance n’offre pas de garanties
suffisantes en matière de gestion et de prévention des risques. Si l
’effort de transparence
sur les
cumuls de fonctions électives et de mandats d’administrateurs
est certain, il apparaît lacunaire
pour les gérances de SARL ou de SCI. Le quatrième alinéa de
l’article L.
225-102-1 du code
de commerce, en vigueur du 1
er
janvier 2014 au 13 juillet 2017 et codifié à compter du 14 juillet
2017 à
l’article
L. 225-37-4 du même code, prévoit que le rapport annuel du conseil
d’administration présente «
la liste de l’ensemble des mandats et fonctions exercés dans
toute
société par chacun de ces mandataires durant l’exercice
».
6
L’obligation d’information ne se
limite donc pas au poste d’administrateur d’une SA, mais s’étend à la gérance d’une SARL, à
la présidence d’une holding ou d’une SAS ainsi qu’au statut d’associé d’une SCI.
La partie des rapports de 2017 et de 2018, dédiée aux « conventions intervenues », ne
fait pas apparaître certains engagements pris avec la SEM Chartres développements
immobiliers. Il en va ainsi de la mise à disposition à titre gracieux de terrains pour son opération
de promotion immobilière de l’
îlot « Casanova » dans le périmètre du pôle gare. Or l
’article
L. 225-37-4 du code de commerce rend obligatoire la mention « des conventions intervenues,
directement ou par personne interposée, entre, d'une part, l'un des mandataires sociaux ou l'un
des actionnaires disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % d'une société et,
d'autre part, une autre société dont la première possède directement ou indirectement plus de la
moitié du capital, à l'exception des conventions portant sur des opérations courantes et conclues
à des conditions normales. »
Enfin aucune précision n’apparait
au sein du rapport de gestion quant aux modifications
apportées par la résolution d
u conseil d’administration du 8
novembre 2018 aux pouvoirs
accordés au président, lesquelles concernent la passation de marchés et les conditions
d’acquisitions et cessions im
mobilières. Sans être juridiquement requise, la transparence sur les
opérations réalisées au titre de cette résolution apparaîtrait souhaitable.
6
Cette obligation a été intégrée aux dispositions relatives au « rapport sur le gouvernement d'entreprise joint au
rapport de gestion
» prévues par l’article
L. 225-37-4 du code de commerce. La liste complète des fonctions et
mandats sociaux des administrateurs est présentée à
l’annexe n°
8 du présent rapport.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
12
Les assemblées générales extraordinaires ont été régulièrement consultées pour
l’approbation des modifications
statutaires de 2017 et de 2018
L’article
L. 225-96 du code de de commerce
dispose que l’assemblée générale
extraordinaire est seule habilitée pour « modifier les statuts dans toutes leurs dispositions. »
Durant la période contrôlée, l’assemblée générale extraordinaire (AGE) s’est prononcée
à deux reprises sur des modifications des documents statutaires de la société. Elle s’est réunie
une première fois le 3 mars 2017, sur convocation en date du 15 février 2017, conformément à
l’article
26 des statuts
. Elle s’est prononcée sur une seconde modification statutaire le
15 novembre 2018, sur convocation préalable adressée le 31 octobre 2018.
Dans les deux cas, les procès-verbaux font apparaître le respect des règles de quorum et
de majorité définies respectivement aux alinéas premier et second
de l’article
29 des statuts.
Les résolutions y ont été adoptées à l’unanimité, dans le respect des règles fixées par l’article
L. 225-96 précité et des statuts.
Le contenu des rapports des administrateurs doit être enrichi et dûment
communiqué à l’ensemble des actionnaires
En application de
l’article L.
1524-5 du CGCT,
applicable aux SPL par l’effet de
l’article L.
1531-1 du même code, « les organes délibérants des collectivités territoriales et de
leurs groupements actionnaires se prononcent sur le rapport écrit qui leur est soumis au moins
une fois par an par leurs représentants au conseil d'administration ou au conseil de surveillance,
et qui porte notamment sur les modifications des statuts qui ont pu être apportées à la société
d'économie mixte. Lorsque ce rapport est présenté à l'assemblée spéciale, celle-ci assure la
communication immédiate aux mêmes fins aux organes délibérants des collectivités et
groupements qui en sont membres
». Pour une SPL, cette obligation contribue à l’exercice par
les collectivités d’un contrôle de la société analogue à celui réalisé sur leurs propres services.
Ce suivi continu est nécessaire pour justifier l’octroi de concessions d’aménagement
à la SPL
en dérogeant aux règles de mise en concurrence.
Les mandataires de la ville de Chartres et de Chartres Métropole au conseil
d’administration ont produit des «
rapports d’activités
» annuels durant la période. Toutefois
seuls les rapports de 2015 et 2016 ont été présentés en séance et approuvés. Bien que cette
démarche relève de l’initiative des administrateurs concernés, la chambre prend note de la
volonté affichée par la SPL de veiller à leur rappeler leurs obligations en la matière.
De plus, le c
ontenu de ces documents ne répond que partiellement à l’objectif
d’information des collectivités actionnaires.
En particulier « les modifications des statuts »
opérées en 2017 et en 2018 n’y sont pas présentées.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
13
Rapport des représentants du conseil d’admi
nistration
Rapport des représentants
au Conseil
d’administration de
Chartres Aménagement
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Représentants de la ville
de Chartres
Rapport d'activités
non transmis par la
SPL
Rapport d'activités
approuvé lors du
CM du 12/12/2016
Rapport d'activités
approuvé lors du
CM du 21/09/2017
Rapport d'activités
non soumis au CM
Rapport d'activités
non soumis au CM
Rapport d'activités
approuvé lors du
CM du 10/07/2020
Représentants de Chartres
Métropole
Rapport d'activités
non transmis par la
SPL
Rapport d'activités
approuvé lors du
CC du 19/12/2016
Rapport d'activités
approuvé lors du
CC du 28/09/2017
Rapport d'activités
non soumis au CC
Rapport d'activités
non soumis au CC
Rapport d'activités
approuvé lors du
CC du 16/07/2020
Représentants de
l'Assemblée spéciale
Consultation de
l'AS du
22/06/2015
Consultation de
l'AS du
27/06/2016
Consultation de
l'AS du
19/10/2017
Rapport approuvé
lors de l'AS du
14/06/2018
Rapport approuvé
lors de l'AS du
06/06/2019
Consultation de
l'AS non justifiée
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des rapports des administrateurs et des rapports de gestion
En ce qui concerne l’information des actionnaires minoritaires, les rapports de gestion
produits à l’appui des comptes annuels sont
succincts. Ils font mention des dates de réunion de
l’assemblée spéciale (AS) qui réunit l’ensemble des actionnaires détenant moins de 9
% du
capital social. Mais ils ne précisent pas le niveau d’information délivré par son représentant au
sujet de l’activ
ité, de la situation financière et de la vie sociale.
L’examen des dossiers fournis à l’AS
en 2018 et en 2019 révèle que son représentant
n’élabore pas un rapport en tant que tel
. Il se borne à reprendre à son compte le rapport de
gestion de l’année, le ra
pport du commissaire aux comptes, et les projets de résolution
accompagnant ces documents. Ces éléments ne sont pas communiqués aux organes délibérants
des collectivités et des établissements actionnaires.
Il n’est donc pas tenu compte des besoins
spécifiques des actionnaires minoritaires, notamment par une information adaptée et accessible
leur permettant d’appréhender les principales orientations stratégiques de la société.
Selon le représentant légal de la SPL, la présentation aux actionnaires minoritaires
réunis en assemblée spéciale du rapport de leur
représentant au conseil d’administration
constitue une simple faculté. La chambre estime toutefois
qu’une telle mesure est de nature à
conforter le contrôle analogue et constitue une bonne pratique en matière de transparence. Elle
invite la société à sensibiliser le représentant
de l’assemblée spéciale
au conseil
d’administration
à
l’intérêt de délivrer
une information accessible et lisible à chaque collectivité
territoriale actionnaire minoritaire
de la SPL de façon à ce qu’elle puisse
la communiquer à son
assemblée délibérante.
1.2.2
Le conseil d’administration doit se donner les moyens d’exercer effectivement
ses missions de surveillance et de contrôle
À l’instar de toute société anonyme, une société publique locale est administrée par un
conseil d’administration. Les administrateurs, pris individuellement, n’ont pas de pouvoir de
gestion propre. Seul l’organe social qui les réunit est chargé collectivem
ent de gérer la société.
Sa collégialité et sa composition revêtent donc une dimension essentielle. Elles sont
fondamentales pour l’exercice de la compétence que lui reconnaît l’article L.
225-35 du code
de commerce pour déterminer « les orientations de l'activité de la société et [veiller] à leur mise
en œuvre, conformément à son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
14
environnementaux de son activité. » Sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux
assemblées d'actionnaires et dans la limite de l'objet social,
le conseil d’administration peut se
saisir « de toute question intéressant la bonne marche de la société et règle par ses délibérations
les affaires qui la concernent. » Il lui est également loisible de procéder « aux contrôles et
vérifications qu'il juge opportuns. Le président ou le directeur général de la société est tenu de
communiquer à chaque administrateur tous les documents et informations nécessaires à
l'accomplissement de sa mission. »
Afin de donner à ces prérogatives leur plein effet, les statuts définissent les règles de
composition et de fonctionnement du conseil d’administration. Leur contenu est précisé par un
règlement intérieur. Il doit permettre au conseil d’administration d’exercer ses missions légal
es
et statutaires.
La composition du conseil d’administration ne correspond qu’en partie
aux
quotes-parts de capital détenues par les collectivités représentées
Conformément à
l’article L.
225-17 du code de commerce, le nombre maximum de
membres du conseil
d’administration d’une SPL
doit être compris entre trois et dix-huit. La
durée de leurs fonctions est déterminée par les statuts sans pouvoir excéder six ans.
L’article
L. 1524-5 du CGCT prévoit, pour les SPL, que « toute collectivité territoriale
ou groupement de collectivités territoriales actionnaire a droit au moins à un représentant au
conseil d'administration ou au conseil de surveillance, désigné en son sein par l'assemblée
délibérante concernée ». Le nombre de sièges revenant à chaque collectivité ou établissement
public local actionnaire doit être fixé par les statuts. Il est calculé « dans une proportion au plus
égale à celle du capital détenu par l'ensemble des collectivités territoriales ou de leurs
groupements actionnaires par rapport au capital de la société. ». Lorsque la faible participation
au capital de certains actionnaires ne leur permet pas de disposer d’un siège d’administrateur,
les statuts doivent leur réserver une possibilité de représentation au sein d’une assemblée
spéciale : « un siège au moins » doit leur être attribué.
Aux termes de l’article
14 de ses statuts
, le conseil d’administration
de Chartres
Aménagement se compose de « 11 représentants des personnes morales actionnaires ». Les
actionnaires qui détiennent plus de 9 % du capital social « désignent leurs représentants au
conseil d’administration par décision de leur assemblée délibérante.
» Pour les actionnaires
détenant moins de 9 % du capital social, un siège leur est réservé en assemblée spéciale. Ils
désignent un « représentant commun », chargé de siéger
au conseil d’administration.
La durée
du mandat des administrateurs est fixée par référence à la durée de «
celui de l’assemblée
délibérante qui les a désignés ». Par construction il ne peut excéder six ans, conformément aux
dispositions de l’article
L. 225-18 du code de commerce.
La ville de Chartres et Chartres Métropole étant seules à disposer de plus de 9 % du
capital social, elles bénéficient
d’une représentation directe
au conseil d’adm
inistration. Les
autres collectivités participant au capital sont représentées indirectement par un représentant
commun aux actionnaires minoritaires.
Au 1
er
janvier 2014, la ville de Chartres et Chartres Métropole détiennent respectivement
53,71 % et 46,14 % du capital social. La ville de Chartres aurait donc dû disposer de six
administrateurs au plus parmi les 11 sièges prévus par les statuts.
Or la composition du conseil d’administration
observée entre le 1
er
janvier et le 15 mai
2014
s’écarte de cette répartition. La ville de
Chartres y dispose de sept représentants, alors que
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
15
Chartres Métropole dispose de trois administrateurs et les actionnaires minoritaires comptent
un seul représentant. Le renouvellement du conseil d’administration
intervenu le 16 mai 2014
n’a pas permis d
e rectifier cette situation. La ville de Chartres y dispose toujours de
sept représentants
, alors qu’aucune augmentation de sa part de capital social ne justifie un
nombre d’administrateur supérieur à six.
Répartition du capital social et composition du
conseil d’administration
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après
les statuts et la réponse 1.2 de la SPL Chartres Aménagement
Cette situation a peu incidence sur les équilibres en termes de majorité ou sur le calcul
de minorités de blocage. Cependant elle affaiblit le caractère collégial nécessaire au plein
exercice du pouvoir d’orientation et de surveillance conféré au conseil d’administration.
La chambre invite la société et ses actionnaires à régulariser la situation, en limitant à
six le nombre d’admin
istrateurs de la ville de Chartres. La SPL indique avoir saisi ces
collectivités par courrier pour leur demander de bien vouloir inscrire à l’ordre du jour d’une
prochaine assemblée municipale et communautaire les délibérations nécessaires à la
régularisation de la situation.
Par ailleurs il serait de bonne administration d’associer davantage les actionnaires
minoritaires. Si l’assemblée générale des actionnaires est libre de choisir les modalités qui lui
semblent les plus appropriées (nomination en qualité
de censeur du représentant d’une
commune actionnaire minoritaire, augmentation du nombre de représentants de l’assemblée
spéciale, etc.), la diversité des membres du conseil d’administration est le plus sûr moyen de
stimuler son rôle d’évocation et de sur
veillance.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
16
Les règles de limitation du nombre de mandats d’administrateurs ont été
méconnues et certaines situations de cumul appellent une vigilance particulière
L’article L.
225-21 du code de commerce dispose
qu’«
une personne physique ne peut
exercer simultanément plus de cinq mandats d'administrateur de sociétés anonymes ayant leur
siège sur le territoire français.
» L’article L.
225-77 du même code prévoit également
l’interdiction d’«
exercer simultanément plus de cinq mandats de membre de conseil de
surveillance de sociétés anonymes ayant leur siège social sur le territoire français. » En vertu
de l’article L.
225-94, la limitation à cinq du nombre de mandats « est applicable au cumul de
sièges d'administrateur et de membre du conseil de surveillance ».
En cas de non-
respect du nombre maximal fixé par les textes, l’intéressé doit se démettre
de l'un de ses mandats dans les trois mois de sa nomination. À l'expiration de ce délai, il est
réputé
être démis d’office
et doit restituer les rémunérations perçues, sans que soit, de ce fait,
remise en cause la validité des délibérations auxquelles il a pris part.
L
’
article L. 225-95-1 du code de commerce dispose que les mandats de président, de
directeur général, de directeur général unique, de membre du directoire ou d'administrateur
d'une société d'économie mixte locale (SEML), exercés par un représentant d'une collectivité
territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales ne sont pas pris en compte pour
l'application des règles relatives au cumul d
es mandats sociaux. Cette dérogation s’applique
aux seuls mandats relatifs aux SEML au sens strict. La règle de limitation du nombre de mandat
est applicable aux
autres catégories d’entreprises publiques locales.
Pour les SPL, elle
s’accorde
avec
l’exigence de contrôle analogue qui gouverne leur fonctionnement. De même, pour les
SEMOP, elle est en cohérence avec leur objet spécifique qui nécessite, par un mode de
gouvernance adapté, une capacité de contrôle continue du partenariat.
En outre la déro
gation ne s’applique pas aux articles L.
225-77 et L. 225-94 du code de
commerce. Les mandats de membre de conseil de surveillance ne sont donc pas écartés de
l’application de la règle de cumul.
Enfin seuls les mandats « exercés par un représentant d'une collectivité territoriale ou
d'un groupement de collectivités territoriales » sont exemptés de la règle de cumul. Les
administrateurs désignés dans le cadre de participations croisées ne sont pas concernés par la
dérogation prévue à l’article L.
225-95-1 du code de commerce.
Durant la période sous revue,
l’actuel et l’ancien PDG de la société
ont disposé chacun de
plus de
cinq mandats d’administrateur ou de membre de conseil de surveillance d’une société anonyme.
Le premier cumule six
mandats d’administrateurs d’entreprises publiques locales chartraines
sans interruption depuis 2016, auxquels s’ajoute celui de membre du conseil d’orientation et de
surveillance
d’un établissement bancaire
7
. Mais, en retirant les mandats d’administrateur de SEML,
il ne reste pl
us que quatre sociétés entrant dans le champ d’application de la règle de cumul.
7
Pour l’appréciation des plafonds définis aux articles L. 225
-21 et L. 225-
77, il n’est pas tenu compte des fonctions
d’administrateurs d’établissements publics, tels que les syndicats intercommunaux, les hôpitaux de Chartres ou
l’office public de l’habitat de Chartres, d’associations ou de sociétés civiles, tels que le Racing Club Chartrain (devenu
C’Chartres Sports à compter de 2019)
ou les sociétés civiles immobilières. En application de
l’article 98 de la loi du
17 mai 2011
de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, un groupement d’intérêt public «
est une
personne morale de droit public dotée de l'autonomie administrative et financière.
» Le poste d’administrateur ou de
président du GIP Chartres Métropole Restauration ne peut donc s’assimiler à celui d’«
administrateur de sociétés
anonymes.
» Il échappe donc au champ d’application des articles précités du code de co
mmerce.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
17
Mandats du président-directeur général entre 2014 et 2019
Fonctions et
mandats exercés par
l’actuel PDG
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Ville de Chartres
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
2
ème
adjoint au
maire chargé des
finances
CA Chartres
Métropole
vice-président
délégué aux
finances
vice-président
délégué aux
finances
vice-président
délégué aux
finances
vice-président
délégué aux
finances
vice-président
délégué aux
finances
vice-président
délégué aux
finances
Département
d'Eure-et-Loir
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Conseiller
départemental
(canton de Chartres
2)
Office public de
l'habitat de Chartres
(Chartres métropole
habitat)
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Hôpitaux de
Chartres
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Établissement
bancaire privé
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
Membre du conseil
d'orientation et de
surveillance
SPL Chartres
Aménagement
Administrateur
(
Jusqu’au
15 mai
2014)
PDG (à partir du 16
mai 2014)
Président directeur
général
Président directeur
général
Président directeur
général
Président directeur
général
Président directeur
général
SPL Chartres
métropole transports
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SPL Chartres
métropole énergie
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres
Développements
immobiliers
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres
métropole
innovations
numériques
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM SYNELVA
collectivités
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres
Métropole
Valorisation
Administrateur
Administrateur
Racing Club
Chartrain (C'
Chartres sports)
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Trésorier
Trésorier
Trésorier
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des rapports sur la gouvernance ; en jaune, mandats
d’administrateurs
retenus pour le contrôle de la règle de cumul prévue au code de commerce ; en gris, mandats dans des
établissements publics ou des associations et fonctions électives non retenus pour l’appréciation de la règle de
cumul prévue au code de commerce
Au 31 décembre 2019,
l’ancien PDG de la société
, toujours administrateur de la SPL
exerçait onze mandats sociaux autres que celui occupé au sein de Chartres Aménagement.
Même après avoir écarté les mandats d’administrateur de SEML, il cumule six m
andats dans
des SPL et des SEMOP qui entrent dans le champ d’application de la règle de cumul.
Il est donc
susceptible d’être
réputé démissionnaire d’office
de l’un d’entre eux. La
situation gagnerait à être clarifiée dans les meilleurs délais, afin de sécuriser le fonctionnement
du conseil d’administration de Chartres Aménagement.
La chambre invite
l’intéressé
à se mettre en conformité avec la réglementation et à ne
conserver que cinq des mandats parmi ceux détenus actuellement dans des SPL et des SEMOP.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
18
Le prochain rapport sur la gouvernance devra apporter des précisions sur les régularisations
apportées au regard du plafond de cumul.
Mandats
détenus par l’ancien PDG de la société
entre 2014 et 2019
Fonctions et mandats exercés
par l’ancien PDG de la SPL
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Mandat électif national
Député (depuis le
20 juin 2012)
Député (première
circonscription)
Député (première
circonscription)
Député (jusqu'au
20 juin 2017)
Ville de Chartres
Maire
Maire
Maire
Maire
Maire
Maire
CA Chartres Métropole
Président
Président
Président
Président
Président
Président
Syndicat mixte d'études
Président
Maison des entreprises et de
l'emploi
Président
OPH de Chartres
(Chartres métropole habitat)
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Hôpitaux de Chartres
Président du
conseil de
surveillance (CS)
Président du CS
Président du CS
Président du CS
Président du CS
Président du CS
SPL Chartres Aménagement
PDG (jusqu'au
15/05/2014)
Administrateur (à
partir du
16/05/2014)
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SPL Chartres métropole
transports
PDG (à partir du
17 octobre 2014)
PDG (jusqu'au
11 décembre 2015)
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SPL Chartres métropole
énergie
PDG (du 4
septembre au 6
novembre 2015)
Président du CA
(à partir du
7/11/2015)
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Président du CA
SEMOP Chartres Métropole
Eau
Président du CA
Président du CA
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEMOP CM Assainissement
(créée le 30 nov 2017)
Président du CA
Président du CA
Président du CA
SPL C Chartres Tourisme
(créée le 28 nov 2019)
Administrateur
SEM Chartres
Développements immobiliers
PDG (jusqu'au
15/05/2014)
Administrateur
(depuis
16/05/2014)
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres Expo
(Chartres Métropole
Évènements)
Président du
conseil
d'administration
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres métropole
innovations numériques
Président du CA
(depuis
15/12/2015)
Président du CA
Président du CA
Président du CA
Président du CA
SEM SYNELVA collectivités
Administrateur
Administrateur
Administrateur
Administrateur
SEM Chartres Métropole
Valorisation
Président du CA
GIP Chartres Métropole
Restauration
Administrateur
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des rapports sur la gouvernance ;
en jaune, mandats d’administrateurs
retenus pour le contrôle de la règle de cumul prévue au code de commerce ; en gris, dans des établissements
publics ou des associations et fonctions électives
non retenus pour l’appréciation de la règle de cumul prévue a
u
code de commerce
Au-delà de ces cumuls constituant des irrégularités permanentes et exigeant une mise
en conformité globale, d’autres situations soulèvent des risques latents, susceptibles de se
révéler à l’occasion de l’adoption d’actes particuliers ou de l’approbation de certains contrats.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
19
Par exemple, la vice-présidente de la SPL Chartres Aménagement siège en qualité
d’administrateur au sein
de la SPL Chartres Métropole Énergies ainsi que de la SEM Chartres
Métropole Innovations numériques et exerce la vice-présidence de la SEM Chartres
Développements Immobiliers et de la SPL Chartres Aménagement. Elle cumule les fonctions
de vice-présidente de Chartres Métropole en charge de la commande publique et de
l’urbanisme, celles de présidente de la commission d’appel d’offres de la ville de Chartres et de
Chartres Métropole, de présidente de la commission des marchés de la SEM Chartres
Développements Immobiliers, de la SPL Chartres Aménagement et de la SPL Chartres
Métropole Énergies.
L’
intéressée se trouve vir
tuellement en situation de conflit d’intérêts dans
de nombreux cas de figure et est exposée structurellement à un risque juridique élevé dans
l’exercice de son mandat d’administrateur.
Un risque analogue pèse également sur les administrateurs exerçant simultanément des
fonctions d’adjoint ou de vice
-président dont la délégation se réfère expressément à une
opération confiée à la SPL. Il en va ainsi
de l’
adjoint au maire de Chartres en charge « du pôle
gare »,
d’un
vice-président de Chartres Métropole délégué aux «
zones d’activité d’intérêt
communautaire » et notamment du « pôle ouest »,
d’une
vice-présidente en charge « des grands
équipements », de « la salle culturelle et sportive sur le site pôle gare et [du] Parc des
expositions sur le plateau nord-est ».
Les cumuls de mandats avec d’autres entreprises publiques locales chartraines et, en
particulier, avec la SEM Chartres Développements Immobiliers, font également courir des
risques juridiques notables. Chaque administrateur de la SPL Chartres Aménagement détient
au moins un autre mandat social dans l’une de ces sociétés. Cinq des onze administrateurs
assurent la présidence ou vice-
présidence du conseil d’administration d’une autre SPL ou SEM.
En dépit du renouvellement du conseil d’administration
intervenu le 25 juin 2020, ces
constats demeurent en partie d’actualité.
Enfin il y a lieu de souligner la nécessité d’identifier en toute transparence les autres
intérêts privés susceptibles d’interférer avec l’exercice des fonctions d’administrateur. Les
risques en la matière ne se limitent pas aux mandats détenus dans d’autres entreprises
chartraines, mais s’étendent à des fonctions de gérance d’une société ou d’associé d’une SCI,
dès lors que ces organismes sont susceptibles d’entrer en relation d’affai
res avec la SPL,
notamment par
voie d’acquisition immobilière.
La chambre appelle à la plus grande vigilance sur ces situations de cumul qui, sans être
prohibées par le code de commerce, peuvent présenter des risques déontologiques. La
prévention des situa
tions de conflits d’intérêts implique de s’intéresser à la fois aux
dysfonctionnements potentiels ayant une incidence sur la légalité des actes et ceux relatifs aux
règles de comportement. Pour cela il y a lieu de distinguer les précautions à prendre au regard
de l’article L.
1524-5 du CGCT
8
–
qui protègent la légalité des actes collectivités actionnaires
–
8
Les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein
du conseil d'administration des sociétés publiques locales et exerçant les fonctions de membre ou de président du
conseil d'administration, de président-directeur général ou de membre ou de président du conseil de surveillance,
ne sont pas considérés comme étant intéressés à l'affaire, lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur ses
relations avec la société. Toutefois, ils ne peuvent participer aux commissions d'appel d'offres ou aux commissions
d'attribution de délégations de service public de la collectivité territoriale ou du groupement lorsque la société
publique locale est candidate à l'attribution d'un marché public ou d'une délégation de service public.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
20
de celles qui,
d’une part,
résultent des exigences de la loi du 11 octobre 2013 relative à la
transparence de la vie publique et,
d’autre part, sont
requises pour écarter le risque pénal
–
qui
sécurisent
l’élu dans la prise de décision au sein de la société et de la collectivité actionnaire
.
Comme le souligne la SPL dans sa réponse à la chambre, un élu siégeant comme
administrateur d’une SPL peut fort bie
n ne pas être regardé comme étant potentiellement
intéressé à l’affaire, parce que la dérogation prévue à l’article L.
1524-
5 du CGCT s’applique.
9
Pour autant la chambre relève que sa participation aux décisions de la société et de la collectivité
peut pot
entiellement contrevenir à l’article
2 de la loi du 11 octobre 2013. Les chevauchements
de fonctions peuvent faire naître,
à l’occasion de l’adoption d’actes particuliers ou de
l’approbation de certains contrats
, une « situation d'interférence entre un intérêt public et des
intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice
indépendant, impartial et objectif d'une fonction ». Pour cette raison, un meilleur encadrement
déontologique apparaît
indispensable pour
sécuriser
le
fonctionnement
du
conseil
d’administration.
L
’information du conseil d’administration gagnerait à être renforcée afin qu’il
soit pleinement à même d’assurer ses missions de contrôle et de surveillance
L’article
18
des statuts prévoit que le conseil d’administration se réunit «
sur la
convocation de son président, soit au siège social, soit en tout endroit indiqué par la
convocation.
Lorsque le conseil d’administration ne s’est pas réuni depuis plus de deux mois,
le tiers au moins de ses membres peut demander au président de convoquer celui-ci sur un ordre
du jour déterminé. »
Le règlement intérieur
du conseil d’administration, adopté
le 19 septembre 2013, ne
prévoit pas la périodicité des réunions. Sa nouvelle version, approuvée le 8 novembre 2018,
n’apporte pas davantage de précisions sur ce point.
En 2014 et en 2015, le conseil
d’administration s’est réuni une dizaine de fois. À partir de 2016, le nombre de réunions
diminue
: neuf en 2016 et jusqu’à six en 2019.
D’
autres facteurs ont également contribué à affaiblir le rôle de « contrepoids » dévolu
au conseil d’administration, alors que son pouvoir d’évocation et de surveillance et la séparation
des fonctions constituent des principes cardinaux posés par le droit des sociétés.
Ainsi la modification du règlement intérieur
du conseil d’administration, opérée en
novembre 2018, met fin au dispositif «
lui permettant d’être informé de la gestion de la
trésorerie des six derniers mois, de la gestion prévisionnelle des six prochains mois [et] de la
prospective financière à un an.
» De même, elle abroge l’article prévoyant qu’ «
un point de
situation sur la vie sociale et le fonctionnement de la société est présenté lors de chaque
réunion.
» Les obligations d’information régulière de l’exécutif se trouvent ainsi réduites à
«
l’examen préalable des opérations
» et à leur « suivi technique ».
L’allègement du règlement intérieur semble intervenir à contretemps. L’extension des
pouvoirs du président-directeur général, intervenue en novembre 2018 en matière
d’acquisitions ou de cessions foncières notamment, semblait exiger, à l’inverse, des possibilités
de contrôle accrues du conseil d’administration.
9
Cf. annexe n° 3.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
21
Il aurait été de bonne administration de prévoir des mesures visant à ce qu’il soi
t rendu
compte, à des échéances précises et selon des modalités claires, des actes et des bilans financiers
échappant à la validation du conseil d’administration à partir de novembre 2018.
L
’
élargissement des pouvoirs reconnus au PDG
doit s’accompagner d’u
ne information adaptée
pour permettre
au conseil d’administration d’assurer ses missions statutaire
s de contrôle et de
surveillance.
1.2.3
Les modalités d’exercice de la direction générale ne sont pas entourées de
garanties suffisantes pour prévenir les risques
de conflits d’intérêts
L’article
20 des statuts prévoit que « la direction générale de la société est assumée, sous
sa responsabilité, soit par le président du conseil d’administration, soit par une personne
physique nommée par le conseil d’administration
et portant le titre de directeur général. Le
choix entre ces deux modalités d’exercice de la direction générale est effectué par le conseil
d’administration qui doit en informer les actionnaires et les tiers dans les conditions
réglementaires. La délibérat
ion du conseil d’administration relative au choix de la modalité
d’exercice de la direction générale est prise à la majorité des administrateurs présent ou
représentés. »
Le cumul de mandats exercés par le PDG expose la société à des situations de
conflits
d’intérêts
Lors de la
création de l’entreprise
,
la présidence du conseil d’administration et la
direction générale étaient exercées par deux personnes distinctes. Cette situation a perduré
jusqu’en
décembre 2012. Depuis le 1
er
janvier 2013,
le conseil d’a
dministration de la SPL a fait
le choix de réunir les fonctions de président et de directeur général. Ce choix a été maintenu par
décision du 16 mai 2014. Cette décision a été réitérée à la suite du dernier renouvellement du
conseil d’administration du
25 juin 2020.
Le choix de ce mode de gouvernance est intervenu selon une procédure régulière. Il a
fait l’objet «
d'un avis inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales dans le
département du siège social », comme le dispose
l’article R.
225-27 du code de commerce. Il a
également donné lieu à un dépôt au greffe du tribunal de commerce.
Les statuts investissent la direction générale « des pouvoirs les plus étendus pour agir
en toutes circonstances au nom de la société. »
Ses pouvoirs s’exe
rcent, en conformité avec
l’articl
e L. 225-56 du code de commerce, dans les seules limites «
de l’objet social et sous la
réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées
d’actionnaires
et au conseil
d’administration.
» La ligne de démarcation définie par la décision du 16 mai 2014 est celle
habituellement fixée au profit des organes de surveillance des entreprises publiques locales. Le
PDG ne peut empiéter sur les « pouvoirs réservés à la commission des marchés, compétente
pour les achats de plus de 90 000
€ hors taxes, à la commission des financements […], au
conseil d’administration, en ce qui concerne la conclusion de contrats avec les collectivités
actionnaires, l’arrêtés des comptes rendus financiers annuels à produire aux collectivités
clientes dans le cadre des contrats conclus, la conclusion de tous contrats de financement, les
acquisitions immobilières d’un prix excédant de plus de 10
% l’avis de France Domaine ou hors
périmètre des opérations confiées à la société [et] les cessions i
mmobilières d’un prix inférieur
de plus de 10 % à celui prévu dans les documents contractuels. »
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
22
Ce large champ d’attribution donne une capacité d’action au PDG, dont il n’appartient
pas à la chambre de discuter le principe. Toutefois il revient à la
juridiction de vérifier s’il est
entouré de garanties suffisantes
et s’il ne limite pas excessivement l’exercice par
le conseil
d’administration de ses missions d’orientation et de surveillance.
Les fonctions de PDG ont été occupées par des personnes exerçant des fonctions
électives et cumulant
d’autres mandats sociaux. Si l’exercice des fonctions de PDG par un élu
local au sein d’une société publique locale n’est pas prohibé, il doit être entouré de garanties
particulières. Les précautions requises doivent
se matérialiser, d’une part, par des dispositifs de
prévention des conflits d’intérêts
(abstention, délégations, etc.)
et, d’autre part, par un certain
nombre de déclarations réglementaires. D’autres mesures préventives sont également
indispensables en ca
s de cumul de mandats sociaux dans d’autres entreprises.
Or le règlement intérieur laisse subsister des incertitudes sur les règles déontologiques
applicables. Aucune précision n’
y est apportée sur les règles de déport ou de suppléance pour
la signature des contrats conclus avec la ville de Chartres, Chartres Métropole et les sociétés
dans lesquelles le PDG exerce les fonctions d’administrateur ou de membre du conseil de
surveillance.
La SPL indique apporter une attention suffisante à la prévention des risques de non-
conformité, notamment au moyen d’un suivi trimestriel de l’activité et d’
une revue mensuelle
des projets. Toutefois la chambre relève que
l’archivage et la traçabilité de ce
s contrôles ne sont
pas entièrement assurés
et qu’ils ne s’intègrent pas
dans une démarche globale d’
audit interne.
L’absence de réalisation de risques par le passé, notamment en matière de
litiges juridiques, ne
prémunit pas la société contre d’autres aléas futurs.
La société aurait tout intérêt à réaliser une cartographie des risques
, afin d’identifier son
niveau d’exposition aux aléas et de prévenir la réalisation des plus significatifs d’entre eux. Elle
pourrait
également sécuriser davantage son fonctionnement en se dotant d’un code de bonne
conduite et d’une organisation a
daptée à cet effet. Un dispositif de contrôle et d'évaluation
interne des mesures mises en œuvre
aurait ainsi pu utilement alerter les PDG successifs sur les
situations à risque et notamment celles illustrées dans les développements à suivre.
La cession d’
un bâtiment à la SEM Chartres développement immobiliers illustre
les dysfonctionnements liés au cumul de mandats d’autres entreprises publiques
locales chartraines
Par deux résolutions du 17 mai et du 20 décembre 2018
, le conseil d’administration de
la SPL « a autorisé » son PDG à signer avec la SEM Chartres Développements immobiliers les
documents préparatoires et
l’acte de cession
d’un bâtiment sis
36 rue Bellangères au Coudray.
Cette vente d’un bien immobilier situé dans l’emprise de la concession d’aménagement du
CM 101 a été conclue pour un prix de vente de 2 413 332,00
€
TTC. Le commissaire aux
comptes a fait figurer l’acte correspondant au nombre des conventions
réglementées dans le
rapport de 2018 prévu par
l’article L.
225-40 du code de commerce, dans la mesure où le PDG
de la SPL Chartres Aménagement siège également au conseil d’administration de la SEM
Chartres Développements immobiliers. Par résolution adoptée le 28 juin 2019
, l’assemblée
générale ordinaire a approuvé « après connaissance prise du rapport spécial du commissaire
aux comptes, l’exécution des conventions [réglementées] qui y sont énoncées.
».
La chambre relève que le PDG de la SPL a directement pris part au vote de la résolution
n°10 du 17 mai 2018 et a signé le procès-
verbal, sans faire mention d’un quelconque déport.
Il
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
23
s’est abstenu de participer à la deuxième décision du 20 décembre 2018
. En revanche les
documents joints à l’annexe de l’acte d
e vente révèlent que le PDG de la SPL a bien participé
au vote du
conseil d’administration de la SEM du
20 décembre 2018, au cours duquel le
principe de la transaction immobilière et son montant ont été approuvés.
L’adoption d’une
« convention de domiciliation » témoigne des risques pris en
cas de participation du PDG aux décisions des collectivités actionnaires
Parmi les actes recensés au titre des conventions réglementées et mentionnées dans le
rapport du commissaire aux comptes depuis 2017, une convention dite « de domiciliation »
concentre les indices d’une gouvernance dysfonctionnelle. Conclue le 3
février 2017, elle autorise
la SPL Chartres Aménagement à utiliser l’hôtel de ville comme «
adresse de siège social » et
« garantit la réception, le stockage et éventuellement la réexpédition du courrier quotidien. » La
ville de Chartres s’y engage à «
faire bénéficier l’entreprise domiciliée des prestations suivantes
:
domiciliation sociale, domiciliation postale, reprographie, accueil général, accueil téléphonique,
orientation des publics et usagers [et] salle de réunions et d’instances
». En contrepartie de ces «
prestations », la SPL doit s’acquitter d’un «
tarif annuel de 100 000 euros HT. »
La convention a été signée, d’une part, par
l
e président directeur général de la SPL et, d’autre
part, par le directeur général des services sur délégation du maire de Chartres. Le représentant de la
ville de Chartres a été « dûment habilité à cet effet par délibération du conseil municipal
CM2016/346 du 21 novembre 2016 ». Cette délibération a été examinée en conseil municipal
« sous la présidence du maire » également administrateur de la société. Le PDG de la SPL, étant
par ailleurs adjoint chargé des finances, a « exposé » les motifs et le projet de délibération.
Les deux
élus sont comptés parmi les conseillers municipaux « présents
». Il n’apparaît pas qu’ils se sont
abstenus de prendre part au vote de cette délibération, celle-ci ayant été adoptée par « le conseil
municipal, après en avoir délibéré, à la majorité de 32 voix pour, 5 voix contre ».
Le PDG a signé la convention de domiciliation s
ur le fondement d’une décision du
conseil d’administration de la SPL du 26
janvier 2017. L
’examen du procès
-verbal révèle que
le maire de Chartres et lui-même sont comptés parmi les « administrateurs présents ou
représentés ». Si « les représentants de la ville de Chartres ne [prennent] pas part au vote », le
conseil d’administration
s
’es
t prononcé sur la convention de domiciliation, « connaissance prise
des informations présentées par le Président-directeur général relatives aux prestations
mutualisées délivrées par la ville de Chartres à Chartres Aménagement ».
Au-
delà de la question du risque de conflit d’intérêts, l’
exécution de la convention
n’apparaît pas directement utile au fonctionnement de la société. L’accueil physique ou
téléphonique est assuré dans l
es locaux occupés avec la SEM et non à l’hôtel de ville, lieu de
domiciliation purement juridique.
La SPL acquitte déjà par ailleurs une quote-part des « frais communs » exposés avec la
SEM Chartres développements immobiliers. La « fourniture de moyens communs »
(reprographies, etc.) donne lieu à des refacturations, qui représentent une charge significative
pour la SPL. Le nouveau « contrat de mise à disposition de locaux partagés et de services »,
entré en vigueur au 1
er
janvier 2019, prévoit en outre un « loyer annuel de 69 000
€
HT ». Le
paiement du « tarif annuel » de 100 000
€ dû au titre de la convention de do
miciliation vient
ainsi faire double emploi avec les charges partagées avec la SEM.
La SPL réfute l’observation de la chambre sur les risques
déontologiques pris par le
PDG. Elle souligne que le PDG
était tenu de présider la séance du conseil d’administrat
ion du
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
24
26 janvier 2017, en raison des obligations découlant de
l’article L.
225-51 et L. 225-56 du code
de commerce, et
qu’en sa qualité de représentant
de la ville de Chartres
il n’a
pas pris part au
vote.
En outre, selon son appréciation, l’article
L. 1524-5 précité du CGCT permet de
considérer qu’il n’était pas intéressé à l’affaire.
Toutefois la chambre relève que ces considérations ne dispensent pas du respect de la
loi du 11 octobre 2013. La seule présence du PDG lors des débats du conseil
d’administration,
son magistère et sa participation au vote du conseil municipal relatif à cette même opération
suffisent à caractériser un risque « d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics
ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial
et objectif d'une fonction
» au sens de l’
article 2 de la loi précitée.
La dérogation de l’article L
. 1524-5 du CGCT invoquée par la SPL est ici sans objet.
Son objet est limité à la seule question de la légalité de la délibération de la ville de chartres et
ne peut être invoquée quant au fonctionnement de la SPL. Le dysfonctionnement observé en
l’espèce
est révélateur du défaut de prise en compte des règles générales de prévention des
conflits d’inté
rêts disposées par la loi relative à la transparence de la vie publique. Il manifeste
une confusion entre l’intérêt social de l’entreprise et les finalités poursuivies par la personne
publique actionnaire, rendue possible par la porosité entre les instances exécutives.
Prévention des
conflits d’intérêts
dans les relations entre les collectivités
territoriales et les entreprises publiques locales
L’article L 1524
-5 du code général des collectivités territoriales prévoit que
dans les SEML et les SPL les collectivités territoriales actionnaires ont droit « au
moins à un
représentant au conseil d’administration ou
au conseil de surveillance,
désigné en son sein par l'assemblée délibérante concernée ». Ces représentants, qui
sont généralement des élus de la collectivité, « ne sont pas considérés comme étant
intéressés à l’affaire, au sens de l’article L.
2131-11, lorsque la collectivité ou le
groupement délibère sur ses relations avec » la société
d’économie mixte locale
».
Cette exception ne porte toutefois que sur les seuls actes pris
au sein de l’organe
délibérant de la collectivité concédante. Elle demeure sans incidence sur le
fonctionnement propre des entreprises publiques locales et sur le règles de
comportement des élus, lorsque ces derniers siègent dans les organes sociaux ou
assurent des fonctions de direction générale.
Dans la mesure où une entreprise publique locale exerce des activités
d’intérêt général
déléguées par une personne publique
, à l’instar de concessions
d’aménagement, elle
entre dans le champ des dispositions de la loi du 11 octobre
2013 relative à la transparence de la vie publique. Elle est donc tenue de veiller à la
prévention des
conflits d’intérêts
et des risques déontologiques dans le
fonctionnement de ses organes sociaux. A cet
effet, il lui revient d’identifier les
situations à risque les plus prégnantes et de définir,
notamment au moyen d’
un code
de bonne conduite, l’ensemble des mesures conservatoires requises
(règles en
matière de déport ou d’abstention, suppléances, délégati
ons de signature, etc.).
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
25
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
La SPL Chartres Aménagement a connu une double évolution de son objet et de son
actionnariat. Initialement spécialisée dans la réalisation de zones d’aménagement à dominante
économique pour le compte de la ville de Chartres, de Chartres Métropole et de syndicats
apparentés, cette entreprise s’est vue confier de nouveaux projets combinant bâtiments publics,
équipements culturels et sportifs, aires de stationnement et aménagements multimodaux. Cette
mont
ée en puissance coïncide avec l’arrivée au capital de communes membres de
l’agglomération chartraine, pourvoyeuses de projets d’aménagements de cœur de village et de
lotissements. Sans remettre en cause la prépondérance de la ville de Chartres et de Chartres
Métropole, cette diversification appelait logiquement une gouvernance rénovée.
Des avancées ont permis de mettre en accord l’objet statutaire avec l’activité, tout en
garantissant l’adéquation avec les compétences des actionnaires. Toutefois les mesures
de
transparence demeurent insuffisantes. L’étendue des pouvoirs de contrôle et de surveillance du
conseil d’administration
gagneraient à être renforcés, de même que les mécanismes de
pré
vention des conflits d’intérêts (
instauration
d’un
e cartographie des risques et
d’un code de
bonne conduite, contrôle renforcé des délégations au PDG et aux directeurs délégués, etc.).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
26
2
UNE ACTIVITÉ INSUFFISAMMENT PILOTÉE
2.1
Les activités sont conformes au cadre légal et statutaire,
à l’exception de
celles liées à
l’image de marque de la société
2.1.1
Les opérations d’aménagement et les études confiées à l’entreprise sont
conformes à son objet social
Faisant application de l
’article L.
1531-1 du CGCT, l
’article
2 des statuts de Chartres
Aménagement prévoit une intervention exclusive « pour le compte de ses collectivités
actionnaires et dans le périmètre géographique de celles-ci ».
Au 31 décembre 2019,
la SPL assure l’exécution de 21
concessions d’aménagement,
d’une convention de portage foncier, de
huit
conventions d’étu
des et prestations diverses et de
deux contrats de mandat. Ce portefeuille d’activité comprend exclusivement des opérations ou
prestations intégrées réalisées pour le compte des actionnaires publics. Le poids des concessions
d’aménagement y est prépondérant. Il représente un chiffre d’affaires de 26
,1
M€, sur un total
de 26,8
M€.
Répartition du portefeuille d’activité de Chartres Aménagement par actionnaire
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des rapports de gestion
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
27
Les opérations et les prestations de services sont réalisées dans le périmètre
géographique des collectivités actionnaires.
Répartition des opérations confiées à la SPL Chartres Aménagement
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir du
plan local d’urbanisme de Chartres
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
28
Composition
et répartition des principales prestations de services d’après la valeur
des contrats et avenants notifiés
Source : CRC Centre-Val de Loire
Les missions d’AMO et les mandats exécutés par Chartres Aménagement portent sur
des objets en lien a
vec ses missions d’aménagement et de réalisation d’équipements publics.
Conformité des AMO et des mandats à l’objet statutaire
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des
conventions d’AMO
et de mandats
L’activité de la société est donc conforme
à son objet social.
AMO ou mandat en lien avec
une opération
d'aménagement
•
Ville de Chartres : AMO de la
ZAC de Beaulieu
•
Ville de Chartres : Mandat
d'études préalables pour
l'aménagement du secteur
de l'Ile de la Porte Guillaume
AMO ou mandat en lien avec
la construction d'un bâtiment
public
•
Chartres Métropole : AMO
complexe culturel et sportif,
parc médiéval et EHPAD
•
Ville de Chartres : abords de
la cathédrale
•
Dangers : AMO pour la
réhabilitation de la mairie
•
Mittainvilliers : AMO pour la
réalisation d'une salle
communale
AMO ou mandat en lien avec
des aménagements de voirie
ou de déplacement
•
Chartres Métropole : AMO
BHNS
•
Amilly : Mandat pour la
réalisation d'un
aménagement de sécurité
routière
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
29
2.1.2
La valorisation de l’image de marque de la société ne présente qu’un lien
indirect avec l’objet social
Le président-directeur général de la SPL Chartres Aménagement a conclu, sur
autorisation du conseil d’administration
réuni le 26 juin 2015, un « contrat de parrainage sportif
(sponsoring) » avec le club Mainvilliers Chartres Handball (MCHB). Au terme de ce contrat,
la SPL s’oblige à assurer un « parrainage financier dans la limite de 150
000
€ au titre de la
saison 2015-2016 et « la mise
à disposition gracieuse, sous la forme d’un avantage en nature,
des locaux dont Chartres Aménagement est propriétaire au 40 rue Jean Mermoz à Chartres ».
Cet avantage en nature correspondant est estimé « à 16 000
€/an.
». Les avenants du 25 janvier
2016 et du 3
juillet 2017 ont reconduit ces dispositions jusqu’en 2020.
Ainsi, entre 2015 à 2019, le club sportif a bénéficié de concours financiers de la part de
la SPL d’un montant cumulé de 750
000
€. Il a bénéficié en outre d’un avantage en nature
valorisé à hauteur de 16 000
€ par an sur toute cette période.
La société indique que cette opération a été traitée au plan fiscal comme une opération
de mécénat. Celle-ci a été consentie sans contrepartie. Cette situation est en contradiction avec
l’intérêt social
de la société tel que défini par la loi et ses statuts et doit être réexaminée.
2.2
Les modalités du contrôle analogue sont insuffisamment sécurisées
L’objet, le fonctionnement et la structure actionnariale des SPL présentent l’avantage
d’en faire un instrume
nt privilégié pour des prestations intégrées. Ce régime, dit de quasi régie,
permet aux collectivités actionnaires de ces sociétés de leur confier des prestations ou des
opérations d’aménagement, en dérogeant aux règles de publicité et de mise en concurr
ence. Sa
mise en œuvre
est subordonnée à la présence de trois conditions cumulatives : la personne
morale contrôlée ne doit pas comporter de participation directe de capitaux privés ; son activité
doit être principalement consacrée aux prestations et opérations confiées par ses collectivités
actionnaires ; le contrôle exercé par ces dernières sur la société doit être analogue à celui
qu’
elles exercent respectivement sur leurs propres services.
Les deux premières conditions ne soulèvent pas de difficultés. En revanche la condition
du contrôle analogue
10
ne semble satisfaite de manière stricte que pour la seule ville de Chartres.
En ce qui concerne Chartres Métropole
, l’existence d’un contrôle conjoint ne se vérifie pas pour
certaines des missions confiées à la SPL. Pour les autres actionnaires, la participation aux
orientations stratégiques et aux décisions importantes de la société n’apparaît pas effective, bien
que les statuts et le règlement intérieur aient été complétés à cet effet.
2.2.1
Plusieurs études ont été indûment soustraites aux règles de mise en
concurrence, faute d’être soumises à un contrôle effectif des collectivités
adjudicatrices
Pour apprécier si une autorité publique exerce sur une entreprise publique locale un
contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services,
la jurisprudence invite à
10
Cf. annexe n° 4 pour une présentation de cette notion.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
30
considérer plusieurs indices. La détention du capit
al de l’entité concessionnaire
, la composition
des organes de décision de celle-ci et
l’étendue des pouvoirs
reconnus à son conseil
d’administration
figurent parmi les principales « circonstances pertinentes » permettant
d’appréhender l’existence d’un tel contrôle analogue
.
L’existence d’une relation de contrôle
analogue suppose également un lien de dépendance institutionnel fort. Celui-ci se manifeste
notamment par le fait que l’entité ne dispose d’aucune autonomie dans son fonctionnement et
n’est pas à même de déterminer, les prestations qu’elle doit exécuter, leur contenu, et leur tarif
11
.
Dans le cadre d’un contrôle conjoint, l’existence d’un suivi relatif au coût réel des services
contribue à établir ce lien de dépendance. Il offre la possibilité à un actionnaire de conforter
l’influence déterminante qu’il exerce sur l’entité attributaire, la participation au capital n’étant
pas suffisante par elle-même.
De prime abord, l’influence exercée par la ville de Chartres ou Chartres
Métropole sur
la SPL peut sembler relever de l’évidence. Le contrôle capitalistique est réel, y compris pour
Chartres Métropole qui dispo
se de plus du tiers des voix à l’assemblée générale extraordinaire
et peut y exercer une minorité de blocage. Ces collectivités sont
en mesure d’exercer,
par le
biais du conseil d’administration, qui dispose des «
pouvoirs les plus étendus », une influence
déterminante sur les décisions stratégiques.
Cependant la possibilité pour les autorités publiques de recourir à la quasi-régie ne
s’apprécie pas seulement de manière générale. Elle implique une analyse circonstanciée pour
chaque contrat durant l’ensemble
de son exécution.
Plusieurs missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO)
confiées par la ville de
Chartres et Chartres Métropole à la SPL ont été conclues moyennant une rémunération à base
fixe et sans comptabilité analytique des coûts.
La SPL n’ignor
e pas les risques attachés à ces formules contractuelles privilégiant une
rémunération forfaitaire. Elle a été destinataire de plusieurs alertes à ce sujet, notamment à
l’occasion d’
une convention conclue le 24 juillet 2017. Le président de Chartres Métrop
ole s’y
était engagé à verser à la société un « forfait annuel » de 200 000
€
TTC, dans le cadre d’une
AMO «
pour les études préalables à l’implantation d’un parc médiéval sur l’agglomération
chartraine ». Les prestations fournies se limitaient à une « assistance administrative ». Conclue
pour un « délai global prévisionnel de 36 mois », cette convention garantissait à la SPL une
ressource de 600 000
€ entre 2017 et 2019, en mobilisant un volume modeste de moyens et
avec une obligation de résultat appréciée de façon peu contraignante.
Estimant que les conditions du contrôle analogue n’étaient pas réunies, les
services de
la préfecture d’Eure
-et-Loir ont adressé une
lettre d’observation en date du 8
août 2017. Ils y
relèvent que «
la convention d’assistance à
maîtrise d’ouvrage pour les études préalables à
l’implantation d’un parc médiéval sur l’agglomération chartraine aurait dû faire l’objet d’une
publicité et d’une mise en concurrence
» et que «
la sécurité juridique de ce contrat n’est pas
assurée à ce jour ».
Par ailleurs, les avertissements formulés par le commissaire aux comptes étaient
exempts d’ambiguïté. Dans ses points d’audit,
il a relevé à plusieurs reprises des taux de
rémunération significativement élevés. Revenant sur une observation déjà formulée en 2018,
une note établie sur les comptes arrêtés au 31 décembre 2019 relève «
l’absence de comptabilité
analytique » de «
l’activité AMO / études
» et l’impossibilité de «
rattacher une prestation à des
11
CJCE, 19 avril 2007,
Asociacion Profesional de Empresas Forestales (ASEMFO)
, Aff. C-295/05, pt. 60.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
31
coûts réels ». Un courrier du 14 juin 2019 souligne encore plus directement les risques attachés
à cet ensemble de contrats : « la SPL Chartres Aménagement a réalisé différents mandats sur le
périmètre de l’agglomération de Chartres et a pu signer des contrats dont certains nous
paraissent particulièreme
nt rentables au regard des charges engagées. Il nous semble qu’une
procédure analytique en fin d’année pour calculer mandat par mandat l’adéquation des charges
engagées avec les produits facturés permettrait de s’assurer qu’il n’y a pas de situation
except
ionnelle au regard de l’analyse économique sur [la] prestation réalisée.
»
Les observations du commissaire aux comptes sont cependant restées sans effet. Aucune
procédure de suivi des charges par contrat d’AMO n’a été mise en place. En outre la SPL a
continué à bénéficier de missions tout aussi peu sécurisées que les précédentes, à l’instar du
contrat conclu le 3 juillet 2019 au titre
d’une mission d’AMO «
pour la construction d’un
EHPAD », sans mesures de publicité et de mise en concurrence.
Par délibération du 28 mai 2019, le CIAS a attribué à Chartres Métropole « la réalisation
de prestations d’assistance à maîtrise d’ouvrage dans le cadre de l’opérat
ion de construction
d’un EHPAD
». Par une délibération du 26 juin 2019, le conseil communautaire de Chartres
métropole a approuvé « les termes de la convention entre Chartres Métropole et la SPL Chartres
Aménagement ayant pour objet la sous-
traitance de certaines des prestations d’assistance à
maîtrise d’ouvrage dans le cadre de la construction d’un EHPAD
dont le CIAS est maître
d’ouvrage.
»
Toutefois
le CIAS ne bénéficie pas d’un suivi analytique des coûts de la prestation de
service ou de garanties «
de nature à empêcher que l’entité in house n’acquière une vocation de
marché et une marge de manœuvre qui
rendrait précaire [son] contrôle ».
La
mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage « pour la réalisation de l’opération de
restructuration du parvis ouest et de l’aménagement des abords de la cathédrale
» illustre les
reconductions successives auxquels certains contrats de prestations peuvent donner lieu, sans
la moindre régularisation en ce qui concerne les clauses de prix ou le suivi des prestations. Par
un premier contrat du 26 février 2015
, la ville de Chartres a demandé à la SPL de l’accompagner
pour «
l’établissement d’une étude de faisabilité
» sur le réaménagement des abords de la
cathédrale de Chartres. Il s’agissait de définir, sur une période de 18 mois, le «
programme
d’aménagement du domaine public dans le périmètre de l’opération
» et le « programme du
Centre d’Interprétation
». Les tâches confiées à la SPL se limitaient à des missions d
’
« assistance administrative » ainsi que de « coordination générale ». La SPL était rémunérée
par le versement d’un «
forfait annuel » de 180 000
€
HT. Un avenant du 25 novembre 2016 a
prolongé la durée de la mission « pour une durée de 12
mois, jusqu’au 24
septembre 2017 ».
Les conditions de rémunération forfaitaire sont demeurées inchangées.
Un deuxième contrat, signé le 22 novembre 2017 pour une durée de 36 mois, a succédé
à la première mission d’AMO. Son objet apparaît encore moins évident que celui de la
convention de 2015. Après avoir pris connaissance
d’une «
étude de diagnostic-faisabilité et
programmation, présentée en comité de pilotage le 20 juin 2016 », la ville de Chartres a confié
à un cabinet
d’étude
une «
mission de maîtrise d’œuvre
globale sur le réaménagement des
abords de la cathédrale ». Au motif que la ville souhaitait « poursuivre sa réflexion sur les
montages juridiques et financiers de réalisation et d’exploitation du Centre culturel et
touristique qui doit prendre place sous le parvis ouest surélevé », une nouvelle « convention
d’assistance à maîtrise d’ouvrage
» a été conclue avec la SPL. Celle-
ci s’est vue
chargée de
«
l’assistance au pilotage général et à la gestion de l’opération sur les plans administratifs et
opérationnels », de «
l’assistance à la passation des marchés d’études, de maîtrise d’œuvre et
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
32
de travaux nécessaires à la réalis
ation de l’opération
» et de diverses autres missions. Dans les
faits, la SPL se bornait à réunir les parties prenantes et à assurer un rôle de coordination, alors
que les livrables étaient produits
par le cabinet d’étude.
La SPL a perçu, à ce titre, une r
émunération forfaitaire annuelle qui s’élevait à
200 000
€
TTC « pour la première année » et devait ensuite être « réévaluée tous les ans à la
date anniversaire du contrat
» par application d’une formule de révision. La seule obligation de
résultat mise à la charge de la SPL portait sur la production d
’ «
un livrable des actions engagées
et réalisées » au minimum une fois « par an et à la date anniversaire du contrat
». Elle n’était
pas assortie de réelles sanctions
: aux termes de l’article 6
-1 de la convention, « il ne sera pas
fait application de pénalités en cas de retard de production de ce document ». Aucune
comptabilité analytique ne permet d’évaluer la réalité des coûts supportés par l’entreprise. La
collectivité n’est donc pas à même de vérifier si
les prestations ont été établies dans des
conditions proches de celles
d’une gestion
en régie.
Pour l’ensemble des contrats d’AMO précités, la chambre
invite la SPL à se rapprocher
de son co-contractant pour réviser les clauses relatives au prix. Une facturation en fonction des
heures réalisées et des livrables produits permettrait de suivre le coût réel des services.
2.2.2
Les actionnaires minoritaires ne sont pas à même d’exercer une influence
décisive sur les décisions essentielles de la société
Une collectivité territoriale est réputée assurer « sur une personne morale un contrôle
analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, [si elle] exerce une influence décisive à
la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de la personne morale
contrôlée. Ce contrôle peut également être exercé par une autre personne morale, qui est elle-
même contrôlée de la même manière par le pouvoir adjudicateur »
12
. La circonstance « que le
pouvoir adjudicateur détient, seul ou ensemble avec d’autres
pouvoirs publics, la totalité du
capital d’une société adjudicataire tend à indiquer, sans être décisive, que ce pouvoir
adjudicateur exerce sur cette société un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres
services »
13
. La détention de l’intégralité du capital d’une SPL par une ou plusieurs personnes
publiques est un indice de l’influence décisive exercée sur celle
-
ci. Mais elle n’est pas suffisante
pour que la relation de quasi-régie soit établie, comme le rappelle la jurisprudence européenne
et nationale
14
.
Les actionnaires minoritaires doivent être associés à un degré suffisant à la vie de
l’entreprise pour qu’il
s puissent exercer une influence déterminante sur celle-ci, quel que soit
leur niveau de participation au capital. Ils ne peuvent déléguer leur pouvoir de contrôle à
l’autorité publique détenant une participation majoritaire au capital,
fut-ce un groupement de
communes dont ils sont membres, sous peine de vider de son sens la notion de contrôle conjoint.
Depuis 2014,
les statuts de Chartres Aménagement ont été modifiés afin d’associer les
collectivités actionnaires autres que Chartres ou Chartres Métropole à la gouvernance. Les
12
Articles L 2511-1 et L 3211-1 du code de la commande publique.
13
CJCE, 11 mai 2006,
Carbotermo SpA
, Aff. C-340/04, pt. 37 ; CJCE, 13 novembre 2008,
Coditel Brabant c/
Commune d’Uccle
, Aff. C-324/07, pt. 54
14
CJUE, 29 nov. 2012,
Econord SpA
, aff. C-182/11 ; CE, 6 novembre 2013,
Commune de Marsannay-la-Côte
,
n°365079.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
33
statuts constitutifs
ne comportaient initialement qu’une clause de portée générale sur le co
ntrôle
analogue, à son article 12. Les administrateurs étant choisis parmi les actionnaires détenant plus
de 5 % du capital social, la participation aux décisions essentielles autres que celles soumises
en assemblée générale était de fait impossible pour des collectivités minoritaires.
Les modifications apportées aux statuts, à la suite de la réunion de l'assemblée générale
du 26 juin 2013, ont marqué une première évolution. Les actionnaires détenant moins de 9 %
du capital social et ne pouvant, de ce fait, disposer d'un représentant direct au conseil
d'administration se sont vus
reconnaître le droit de siéger au sein d’une assemblée spéciale
(AS).
Réuni une fois par an, cet organe vise à garantir une représentation indirecte des actionnaires
minoritaires. Il désigne un « représentant commun au conseil d'administration », lequel dispose
d’une voix délibérative au conseil d’administration. L’AS
statue uniquement sur le rapport
annuel établi par son représentant. Son vote a une portée essentiellement consultative.
À la suite de la transmission aux services chargé du contrôle de légalité de concessions
d’aménagement conclues avec la commune d’
Amilly, de Mignières et de Saint-Prest, le préfet
d’Eure
-et-Loir a souligné que ces évolutions statutaires demeuraient insuffisantes pour garantir
un contrôle effectif des actionnaires minoritaires sur la société. Il relevait, outre une
participation faible au capital de la société (« 0,2 % des actions émises par la SPL »), le caractère
formel de la représentation de ces communes dans les organes statutaires. Faute «
d’une
représentation directe au sein des organes de direction » et «
d’un nombre d’actions suffisant
pour organiser une Assemblée spéciale », les choix de gouvernance enlevaient « toutes
présomptio
ns quant à l’existence d’un possible contrôle analogue
» pour ces communes.
À la suite de la réunion de l'assemblée générale extraordinaire du 3 mars 2017,
l’
article
14 sur la composition du conseil d’administration a été complété par une disposition
permettant
à
l’
AS de donner un « mandat impératif » à son représentant « pour la séance du conseil
d'administration concernée ».
L’article
30 prévoit, quant à lui, que « l'assemblée spéciale se
réunit au moins trois fois par an ». Elle peut « se prononcer sur les questions qu'elle souhaite
soumettre à l'ordre du jour des conseils d'administration suivants ». Enfin, aux termes du nouvel
article 38, il est rappelé que « le contrôle analogue est notamment exercé sur les orientations
stratégiques, la vie sociale [et] l'activité opérationnelle ».
L’assemblée générale n’a pas repris à son compte la proposition formulée par les
services préfectoraux dans une lettre du 10 février 2017. La société avait été invitée à conclure
avec les actionnaires minoritaires des contrats de concession « sans participation financière
dans les conditions fixées par l’article L
. 1523-3 du code général des collectivités territoriales. »
De même,
aucune évolution n’est intervenue sur la représentation de l’AS
au conseil
d’administra
tion ou sur
ses possibilités d’intervention. La présence d’un seul représentant ne
permet pas de détenir une minorité de blocage au sein du conseil d’administration. Enfin les
capacités d’intervention de l’ass
emblée spéciale se limitent à « entendre le rapport de son
représentant concernant les conseils d'administration précédents » et à « se prononcer sur les
questions qu'elle souhaite soumettre à l'ordre du jour des conseils d'administration suivants »
en délivrant une « consigne de vote ».
Depuis la dernière révision statutaire adoptée lors de la réunion de
l’AGE du
15 novembre 2018
, les possibilités d’intervention de l’
AS ont même été en partie restreintes :
ses « décisions doivent être prises à la majorité des deux tiers des voix dont disposent les
actionnaires présents ou représentés. » Le règlement intérieur, dans sa nouvelle version,
demeure silencieux sur d’éventuelles présentations du suivi du plan d’affaires ainsi que
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
34
l’analyse et l’explication des éventuels écarts par la direction générale.
Il s’a
git pourtant du
niveau de redevabilité minimal couramment admis dans la mise en œuvre du contrôle analogue.
En l’état, le fonctionnement concret de l’AS
ne permet pas aux actionnaires minoritaires
d’exercer un contrôle effectif et continu sur la SPL
. En 20
18, cet organe ne s’est réuni que deux
fois, contrairement à ce que les statuts prévoient depuis mars 2017. Les documents présentés
lors des sessions de 2018 et 2019 ne délivrent aucune information sur la situation financière de
la société ou sur son plan
d’affaires.
Selon la société, il n’est pas nécessaire que chacun des actionnaires minoritaires
détienne, par lui-
même, un pouvoir de contrôle individuel sur la SPL. La présence d’un membre
de l’assemblée spéciale au conseil d’administration serait donc suf
fisante pour garantir le
contrôle analogue. En outre, les actionnaires minoritaires étant membres de la communauté
d’agglomération, ils exerceraient leur influence indirectement par l’intermédiaire des
représentants de Chartres Métropole.
Toutefois le contrôle exercé par les actionnaires minoritaires ne saurait reposer sur le
seul pouvoir de l’autorité publique détenant une participation majoritaire dans le capital. Il ne
peut pas être délégué ou abandonné à celui-ci, sous peine de vider de son sens la notion même
de contrôle conjoint
15
. Les actionnaires minoritaires doivent donc être associés à un degré
suffisant à la vie de l’entreprise. Cela suppose que l’assemblée spéciale se réunisse
régulièrement, qu’elle soit tenue informée dans des conditions garantissant une vue d’ensemble
sur la société, sa situation financière et ses réalisations opérationnelles et que ses membres
disposent d’un pouvoir d’intervention adéquat au conseil d’administration.
Recommandation n°
1 : Garantir
un contrôle conjoint de l’ensemble des actionnair
es
sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de la société.
2.3
L’exécution des opérations d’aménagement emporte des risques
financiers et juridiques significatifs
La situation d’ensemble du portefeuille des concessions est contrastée. Une dizaine
d’opérations d’aménagement de cœur de village ou de lotissement y côtoient des projets à
dominante urbaine, combinant des programmes de logements, des aménagements destinés aux
activités d’industrie, de commerce et de services et des équipements publics. Ces derniers sont
principalement concédés par la ville de Chartres et Chartres Métropole, lesquelles sont à
l’initiative de
neuf des dix opérations de plus de 10
M€. Deux d’
entre elles, concédées par
Chartres, présentent un budget supérieur à 100
M€ et pèsent à hauteur de
45 % dans les
prévisions consolidées totales et de 65 % dans le stock total.
15
CJUE, 29 nov. 2012,
Econord SpA
, préc., §§ 30 et 31 : « Dans ces conditions, si, en cas de recours de plusieurs
autorités publiques à une entité commune aux fins de l’accomplissement d’une mission commune de service
public, il n’est, certes, pas indispensable que chacune de ces autorités détienne, à elle s
eule, un pouvoir de contrôle
individuel sur cette entité, il n’en demeure pas moins que le contrôle exercé sur celle
-ci
ne saurait reposer sur le
seul pouvoir de contrôle de l’autorité publique détenant une participation majoritaire dans le capital de l’en
tité
concernée et ce sous peine de vider de son sens la notion même de contrôle conjoint
. »
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
35
Inversement, sur les onze opérations présentant un budget prévisionnel inférieur à
10
M€, neuf ont été concédées par des actionnaires minoritaires. Elles représentent 6
% des
prévisions consolidées totales et 3 % des stocks.
L’étude des concessions confiées à Chartres Aménagement vise à couvrir à la fois les
risques opérationnels gén
éraux et ceux propres à l’opération (réalisation du programme foncier,
respect du bilan prévisionnel annexé au traité de concession, prise en compte du positionnement
géographique, qualité des comptes rendus au concédant, etc.). Ainsi l’appréciation d’ense
mble
des équilibres financiers du portefeuille d’activité (figurant au chapitre 2
-3-1) a-t-elle été
complétée par l’étude d’un échantillon de cinq opérations (dans le chapitre suivant 2
-3-2). Ce
dernier a été établi par application d’un ensemble de critère
s de cotation des risques. Il permet
d’appréhender 70
% des charges prévisionnelles consolidées, 80 % des charges réalisées et
89 % des stocks valorisés fin 2019.
La dimension spatiale a également été prise en compte dans la sélection des concessions.
L’un
e des cinq opérations retenues est située en centre-ville, dans un environnement urbain
dense (le pôle gare, ci-après « PG »). Une deuxième opération a été sélectionnée en raison de
son positionnement intermédiaire, en « entrée » de centre-ville (le plateau nord-est, ci-après
« PNE »). Le choix de la ZAC du j
ardin d’entreprises
(ci-après « JE »), des pôles ouest (ci-
après « PO ») et de la roseraie (ci-après « RO »)
permet d’illustrer les risques opérationnels
attachés à une situation périphérique.
Enfin la diversité des cycles temporels a été prise en compte. Les opérations
échantillonnées présentent des niveaux de maturité diversifiés. Pour l’opération du
Jardin
d’entreprises
, 88
% de la durée contractuelle est d’ores et déjà accomplie, alors qu’elle l’est
pour moins de la moitié en ce qui concerne le pôle gare. Les trois autres opérations présentent
une durée (15
ans) et un niveau d’avancement proche (entre 62 et 66
%)
16
.
2.3.1
Les opérations d’aménagement concédées à la société se caractérisent par des
cycles d’i
nvestissement longs sur des emprises foncières importantes, intégrant
le plus souvent la construction d’équipements publics
L’appréciation d’ensemble des concessions confiées à Chartres Aménagement fait
apparaître des retards de recettes conséquents
, à l’o
rigine de tensions durables sur la trésorerie.
L’exécution d’une concession d’aménagement se caractérise traditionnellement par un
décalage structurel entre le paiement des charges et l’encaissement des produits. La réalisation
des études et des travaux d’
aménagement génère un besoin de financement au début de
l’opération. Les recettes commerciales sont constituées essentiellement du produit de la vente
de droits à bâtir sur des terrains mis en état à cet effet. Elles ne reviennent à l’opérateur
d’aménagement qu’au terme du projet. Pour Chartres Aménagement, les contraintes de ce cycle
de financement sont amplifiées par trois spécificités.
Tout d’abord le profil temporel de ses 21
concessions est peu diversifié. Treize d’entre
elles comptent une durée supérieure ou égale à 15 ans. La durée contractuelle moyenne se situe
autour de 13 ans. Les opérations à maturité longue sont aussi celles dont les enjeux financiers
16
Cette convergence est le fruit d’évolutions pour la Roseraie (
initialement conclue pour dix ans et prolongée de
cinq ans complémentaires par avenant) et pour le J
ardin d’entreprises (
onze
ans à l’origine
).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
36
sont les plus importants. Celles du pôle gare (20 ans), du plateau nord-est (20 ans), du jardin
d’entreprises
(plus de 24 ans), des pôles ouest et roseraie (15 ans) couvrent 80 % des charges
réalisées. Elles cumulent 89 % (- 123
M€) du déficit provisoire consolidé constaté au
31 décembre 2019 (- 153
M€). Depuis 2015, la SPL s’efforce de diversifier s
on activité en
réalisant des aménagements de cœur de village et des lotissements pour le compte
d’actionnaires minoritaires. Elle vise, ce faisant, à garantir un meilleur équilibre entre des
opérations fondées sur des cycles longs et des projets offrant des perspectives de recettes à
brève échéance. Néanmoins l
es opérations d’une durée
de neuf ans au plus représentent moins
de 6 % des charges et des produits réalisés au 31 décembre 2019. La prépondérance des
opérations dont le dénouement commercial est lointain demeure encore très marquée. Cette
situation accroît l’exposition au risque de financement à moyen terme.
Ensuite le portefeuille de la société compte de nombreuses opérations intensives en
équipements publics. Les opérations d’immobilier à usage
de bureau au sens strict sont rares.
Les aménagements de terrains destinés à des constructions à usage d’habitation sont le plus
souvent inclus dans des concessions centrées autour de projets commerciaux ou urbanistiques.
Il n’
est pas rare que le périmètre des opérations comprenne des parcelles dédiées à des
infrastructures publiques (tel
l’aérodrome
de PNE, le complexe culturel et sportif du PG, etc.).
Il convient d’ajouter à ces aménagements de surface ceux liés aux réseaux d’eau,
d’assainissement ou d’én
ergie et aux infrastructures de télécommunication. Il en résulte une
limitation des recettes que l’autorité concédante doit compenser par des participations. Les
participations acquises au 31
décembre 2019 s’élèvent à
13
M€
, soit 13 % des recettes réalisées.
Enfin l’objet des opérations, large et multiforme, implique le plus souvent des
contraintes de réalisation impliquant une ingénierie onéreuse. Cette situation est liée à la fois à
des emprises foncières étendues et à des configurations spatiales complex
es où l’aménageur
doit tenir compte de prescriptions environnementales
, du raccordement multimodal d’axes de
communication ainsi que des contraintes de flux ou de stationnement. Ces facteurs de risque
multiples imposent de lourdes études et parfois des arrêts de travaux ou des interventions
complémentaires (dépollution, fouilles préventives, etc.), occasionnant des retards et des pertes
financières accrues. Le taux d’exécution des produits prévisionnels, hors participations, s’élève
à 21 % en moyenne pour l
’ensemble des concessions d’aménagement, alors que le niveau de
maturité moyen atteint 64 % de la durée contractuelle.
Le besoin de financement à court terme qui en résulte oblige la société à multiplier les
emprunts et les facilités de trésorerie. Ceux-ci représentent en moyenne 29 % des recettes
prévisionnelles (hors participation), avec des variations allant de 0 à 60 % selon les opérations.
En l’absence d’avances de trésorerie, le solde consolidé des concessions serait de
- 87,8
M€
, au
lieu des - 797 470
€
indiqués dans le rapport de gestion.
2.3.2
Les opérations du pôle gare et du plateau nord est concentrent les principaux
défis financiers et opérationnels à relever pour le modèle d’affaires de la société
Les besoins de financement du pôle gare ont été insuffisamment anticipés et comblés
dans des conditions qui comportent des risques au regard du droit
des aides d’
État.
La ville de Chartres a confié à la SPL Chartres Aménagement
l’
aménagement des abords
de la gare par un traité de concession signé le 26 août 2010. Cette opération se caractérise par
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
37
le caractère multidimensionnel de son objet, la diversité des régimes juridiques fonciers
applicables et un positionnement en zone urbaine dense.
D’une surface
de 32 hectares, son périmètre comprend divers terrains appartenant à des
personnes publiques et privées, des espaces dédiés à la voirie et à la circulation ainsi que des
parcelles appartenant à la SNCF et à RFF. Le projet combine les contraintes de sécurité
d’accès
à
une infrastructure ferroviaire d’intérêt ré
gional, celles relatives au franchissement des voies
ferrée
s et à l’adaptation des voiries ou
du cadre paysager au caractère multimodal du site.
Il s’agit, d’une part, de requalifier le quartier situé aux abords de la gare, tout en
désenclavant sa partie nord séparée du centre-
ville par les voies ferrées. D’autre part, «
une
plateforme multimodale » doit être créée «
pour gérer l’intermodalité (piéton, cycle, voitur
e,
train, bus, car et taxi) »,
assortie d’une offre de «
stationnement en souterrain et en surface en
quantité suffisante. »
Plan de la zone d’aménagement concerté du pôle gare
Source
: Présentation de l’état d’avancement du projet à l’
assemblée spéciale du 27 février 2019
Au projet urbain renouvelant l’offre de logements, de services et de com
merces et
répondant aux intérêts de la commune, se superpose
donc, dès le début de l’opération, une
deuxième dimension, liée à la réalisation d’équipements collectifs débordant les seuls besoins
de la population chartraine. Les modifications du programme ont fini par donner la priorité aux
équipements collectifs faisant passer les autres aménagements au second plan.
Une remise en cause
des équilibres fondamentaux de la concession en l’absence
d’actualisation du bilan prévisionnel
Un avenant du 13 juillet 2011 prévoyait initialement des réalisations ambitieuses.
L’emprise des surfaces cessibles
y avait été portée de 55 000 à 62 400 m². Les surfaces hors
œuvre nette des 291 «
logements collectifs », du « tertiaire » et des « commerces et services »
avaient été réévaluées respectivement à 21 800 m², 22 500 m² et 18 100
m². Le projet d’hôtel
fut remplacé par « une salle culturelle et sportive de 7 000 m² au sol
», d’une capacité de
« 5 000 places ». Le produit des cessions foncières correspondantes était évalué à 24,65
M€
.
« Une passerelle piétonne » surplombant les voies ferrées devait relier les quais de la gare à la
plateforme multimodale aux abords de l’esplanade de la gare et à 2
800 places de stationnement.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
38
L’avenant n°
3 du 9 janvier 2014
a réduit l’assiette dédiée au cessions foncières
, afin de
tenir compte des contraintes de réalisation du « complexe multifonctionnel culturel et sportif
d’environ 9
300 m² au sol ».
L’augmentation des dépenses d’acquisitions foncières
(de 7,1 à
14,8
M€) a
été compensée par la suppression du parking de 2 800 places, par une baisse de la
rémunération du concessionnaire et par une réduction de la participation du concédant. L’effet
sur les recettes fut double, du fait de la réduction de la surface de foncier cessible (de 21 % à
10 % de la superficie de la ZAC) et de
l’ajustement des prix de cession
(310
€/m² au lieu de
350
€/m² pour l’habitat et
342
€/m
² au lieu de 350
€/m² pour le tertiaire).
Par
l’avenant n°4 notifié le 23
décembre 2015, la SPL a dû prendre en charge le « coût
de la reconstitution ferroviaire d’un montant de 31,6
M€ auquel s’est ajouté un montant de
2,5
M€ pour la libération anticipée de l’emprise pour l’équipement culturel et sportif.
» Le bilan
financier prévisionnel a été adapté en conséquence, par l
’ «
ajout d’une participation
constructeur » de 472 500
€ et par l’«
augmentation du montant des autres participations » de
25 900 000
€ à
62 617 625
€
, soit 66 % des recettes prévisionnelles totales.
En dépit de ces nombreuses évolutions du projet, aucune actualisation du bilan financier
n’est intervenue pendant quatre ans. Les charges prévisionnelles figurant dans les comptes
rendus annuels à la collectivité (CRAC) ne reposaient plus sur aucune référence contractuelle
explicite de 2016 à 2019.
Écart entre les charges prévisionnelles figurant dans les avenants et celles
renseignées dans les comptes rendus annuels au concédant
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des CRACL 2014 à 2019 et des avenants 3, 4, 5 et 6
L
a société s’est écartée de
sa cible prévisionnelle
jusqu’à 25
% en 2017. Il a fallu
attendre le 11 janvier 2021 pour que les références budgétaires soient actualisées par un avenant
n°7
, lequel n’est entré en vigueur qu’à la date de sa notification.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
39
Quote-part des aides publiques et des dépenses explicitement affectées aux
équipements publics dans les budgets annuels
Source : CRC à partir des CRAC 2014 à 2019
–
Grille de lecture : En recettes, les postes retenus sont ceux classés
dans la rubrique « 30
–
Participations constructeurs » et « 40
–
Aides publiques » du bilan comptable joint aux
comptes rendus du concessionnaire. En dépenses, les postes retenus sont ceux compris dans la rubrique « 40
–
Travaux d’aménagement des espaces publics et VRD
» des mêmes bilans.
La structure des recettes prévisionnelles a dérivé dans des proportions fort éloignées du
budget initial, la SPL procédant à des ajustements en dehors de toute trajectoire prédéfinie. Les
parts respectives des recettes de cessions et des participations représentaient chacune la moitié
des produits du bilan prévisionnel initial
17
. Dans les CRAC de 2017 et 2018, les aides et
participations publiques atteignaient 77 % des recettes prévisionnelles.
L’équilibre économique de l’opération a ainsi été
graduellement transformé, sans que le
conseil municipal de Chartres ne se soit prononcé sur l’équilibre retenu entre recettes
commerciales et aides publiques.
Un risque élevé de non-
conformité au droit des aides d’
État
Les transformations successives du programme de construction ont conduit à renforcer
la prédominance des équipements publics.
L’
avenant 5 notifié le 22 février 2017 a prévu « la
réalisation d’un complexe culturel et sportif imposant de nombreux travaux d’aménagement
effectués dans le cadre d
e la concession d’aménagement et nécessitant la reconstitution des
activités ferroviaires existantes.
» La société s’est également vu confier le «
projet de
plateforme multimodale, [des] aménagements des espaces publics rue Pierre Nicole et place
Pierre Sémard et [des] aménagements prévus pour accueillir le Bus à Haut Niveau de Service ».
Chartres Métropole est intégrée « au traité de concession compte tenu du caractère
communautaire des aménagements réalisés » en qualité de Co-financeur. Mais aucune une
17
L’annexe 3 du traité de concession prévoyait des recettes de 19,7
M€ (30
% du total) au titre des « cessions
foncières », de 12,8
M€ (20
%) pour les « cessions [de] parkings (rive ouest et rive est) », de 12,4
M€ (19
%) au
titre de la « participation du concédant » et de 20,5
M€ (31
%) pour les « autres participations ».
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
40
ac
tualisation du bilan financier n’est proposée, alors que les équipements sont onéreux et
nécessitent une individualisation des dépenses et des recettes correspondantes.
En application
de l’article L.
300-
5 du code de l’urbanisme
le concessionnaire doit
rendre compte de l'utilisation des subventions reçues aux personnes publiques qui lui ont été
allouées.
L’intérêt d’un suivi individualisé de financement des équipements de la ville de
Chartres et de celui de Chartres Métropole est double. D’une part, il
permet de ne pas faire
peser sur la première un déficit partiellement dû à la seconde lors de la clôture de l’opération.
D’autre part, il garantit que la société ne reçoit que ce qui est strictement nécessaire à la
couverture des coûts générés par les équipements publics.
L
’Aut
orité de la concurrence, dans un avis du 24 novembre 2011, recommande « aux
collectivités
publiques
d’être
particulièrement
vigilantes
lorsqu’elles
accordent
des
compensations financières à des SPL exerçant une activité économique dans la mesure où ces
transferts financiers sont susceptibles de contrevenir à la réglementation européenne des aides
d’
État. À la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice et de la pratique décisionnelle de
la Commission européenne, il est recommandé que chaque compensation financière fasse
l’objet d’un mandat qui décrit précisément les missions de service public confiées à la SPL, les
paramètres de calcul, de contrôle régulier et de révision éventuelle de la compensation
financière, ainsi que les modalités de remboursement à la collectivité publique des possibles
surcompensations financières. »
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
41
L’application du droit des aides d’État aux sociétés publiques locales
En application de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union
européenne (TFUE), « les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt
économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises
aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où
l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait
de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges
ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de l'Union [...]. »
Au sens de ces dispositions
, la « notion d’entreprise comprend toute entité
exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette
entité et de son mode de financement » (CJCE 23 avril 1991,
Klaus Höfner c/
Macrotron GmbH
, aff. C-41/90). Les SPL étant « compétentes pour réaliser des
opérations d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, des
opérations de construction ou pour exploiter des services publics à caractère
industriel ou commercial ou toutes autres activités d'intérêt général » selon
l’article
1531-1 du CGCT, elles sont assimilables à des SIEG au sens du droit européen.
L'article 107 du TFUE fixe trois
conditions pour qu’une mesure soit
qualifiée d’aide d’
État
: elle doit conférer un avantage au moyen de ressources
d'État ; l'avantage doit être anormal et sélectif ; il doit être susceptible de fausser la
concurrence et d'affecter les échanges entre États membres.
Pour cette dernière condition, la nature régionale de l’activité
importe peu.
Comme le relève l’Autorité de la concu
rrence dans son avis de 2011, « même une
aide d’un faible montant peut augmenter l’offre de service d’une entreprise et
rendre plus difficile l’accès au marché local pour d’a
utres entreprises
européennes. » L
’absence d’effet sur les échanges est présumé po
ur les aides
n’excédant pas le
plafond de 200 000 euros sur une période de trois exercices.
Les personnes qui délivrent des services d’intérêt économique général
(SIEG) peuvent échapper à la rigueur du régime des aides d’État sous réserve du
respect de quatre conditions cumulatives (CJCE 24 juill. 2003,
Altmark Trans
GmbH
, aff. C-280/00). Premièrement, l'entreprise bénéficiaire « doit effectivement
être chargée de l'exécution d'obligations de service public et ces obligations doivent
être clairement définies. » Deuxièmement, « les paramètres sur la base desquels
sera calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective
et transparente, afin d'éviter qu'elle comporte un avantage économique susceptible
de favoriser l'entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes. »
Troisièmement, la compensation ne doit pas dépasser « ce qui est nécessaire pour
couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l'exécution des obligations de
service public en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice
raisonnable relatif à l'exécution de ces obligations. » Quatrièmement,
en l’absence
d
’obligation de mise en concurrence, « le niveau de la compensation nécessaire doit
être déterminé sur la base d'une analyse des coûts qu'une entreprise moyenne, bien
gérée et adéquatement équipée en moyens de transport afin de pouvoir satisfaire
aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces
obligations en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice
raisonnable relatif à l'exécution de ces obligations. »
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
42
Les soutiens financiers accordés à la SPL pour le pôle gare sont susceptibles d’entrer
dans le champ du droit
des aides d’
État, dans la mesure où :
- ils bénéficient à une entreprise dans le cadre de son activité économique ;
- ils sont financés au moyen de ressources publiques ;
- ils lui confèrent un avantage économique ;
- ils lui profitent de manière exclusive ;
- enfin ils présentent une incidence manifeste sur les conditions de la concurrence.
Bien que la société émette des doutes sur la première condition énoncée, notamment en
raison de l’actionnariat exclusivement public de la société, plusieurs indices tendent à établir le
caractère économique de l’activité. Il ap
paraît clairement que Chartres Aménagement offre des
services sur un marché donné, auxquels peuvent être substitués des prestations d’autres
opérateurs d’aménagement foncier. Les conditions de formation des prix résultent, comme pour
d’autres aménageurs, de l’ajustement entre l’offre et la demande de terrains aménagés par les
promoteurs immobiliers. La construction d’équipements publics est elle
-même constitutive
d’une activité économique, dès lors qu’elle ne relève pas en tant que telle de prérogatives de
puissance publiq
ue et qu’elle est indissociable de l’utilisation économique ultérieure qui en est
faite. Plusieurs aménagements réalisés dans le cadre de l’aménagement pôle gare sont destinés
à accueillir des activités économiques (stationnement, complexe sportif, etc.) et sont
susceptibles de donner lieu au versement de droits d’utilisation.
Le fait que la SPL intervienne pour le compte exclusif de ses actionnaires publics ne
modifie pas le sens de cette analyse. Car ces derniers peuvent potentiellement faire appel à
d’autres aménageurs. La société ne bénéficie pas de droits exclusifs qui élimine
raient par
construction toute concurrence potentielle. La relation de quasi régie dispense uniquement
d’une démarche de mise en concurrence, lorsque l’autorité concédante a déc
idé de confier une
opération d’aménagement à
cette SPL. Mais cette circonstance est sans incidence sur le fait que
les collectivités peuvent devenir actionnaires d’autres SEM ou SPL, susceptibles d’offrir des
prestations équivalentes. Chartres Aménagement doit être regardée, pour cette raison, comme
une entreprise au sens du droit des aides d’
État.
Les deuxième, troisième et quatrième conditions ne soulèvent pas de difficultés :
- La SPL Chartres Aménagement a bénéficié
d’avances financières
à hauteur de 70
M€
au titre du pôle gare, dont 7,7 M
€ de
la ville de Chartres et 62,3 M
€ de Chartres
Métropole. Elle
est déliée de l’obligation de les rembourser à hauteur de
66,33 M
€, les avances de la ville de
Chartres ayant été transformées en participation pour 4,03 M
€ et celles de Chartres
Métropole
pour 62,3 M
€
. La personne publique doit ainsi supporter sur son budget propre le coût
correspondant à cet abandon de créance. Il s’agit donc bien d’une aide octroyée au moyen de
ressources publiques.
-
L’avantage consenti n’est pas au nombre de ceux dont une entreprise pourrait
bénéficier dans les conditions normales de marché. Il couvre 81 % des charges réalisées de la
concession. Il représente plus du double du chiffre d’affaires et amène les personnes publiques
à se s
ubstituer aux établissements bancaires, sans intérêts, sur une durée allant jusqu’à 18 ans.
L’opération serait déficitaire à hauteur de
- 39,24
M€ en l’absence de ces financements. Ceux
-
ci confèrent donc clairement un avantage économique à Chartres Aménagement.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
43
- Les aides financières profitent exclusivement à la SPL Chartres Aménagement. Elles
lui sont accordées individuellement. Il n’est pas prévu que d’autres opérateurs d’aménagement
puissent bénéficier d’un dispositif équivalent. Elles revêtent donc un
caractère sélectif.
Enfin, en ce qui concerne la cinquième et dernière condition, il semble difficile de
considérer qu’un tel niveau de soutien n’a pas eu d’effet perturbateur sur la concurrence. Les
aides qui visent à libérer une entreprise des coûts qu'elle aurait dû normalement supporter dans
le cadre de sa gestion courante faussent en principe les conditions de concurrence. Cette
présomption ne peut être renversée que dans la mesure où le financement public est justifié par
des obligations de service p
ublic. Ces obligations peuvent se matérialiser, dans le cas d’une
concession d’aménagement, par la construction d’un équipement public. Il faut cependant que
les paramètres de calcul de la compensation publique soient préalablement établis, qu’ils le
soien
t de manière claire et transparente et que leur mise en œuvre soit traçable dans le compte
-
rendu annuel de l’opération.
À
défaut, il n’est pas possible de s’assurer que le financement
excède le coût de l’équipement public.
Au cas d’espèce, les paramètres
de compensation du coût des équipements ne sont pas
« préalablement établis de façon objective et transparente ». Dans le traité de concession et ses
avenants, les obligations de service public imposées par la ville de Chartres sont définies dans
des termes généraux. Le financement des aménagements requis au titre de la plateforme
multimodale et des autres équipements pris en charge par Chartres Métropole n’y est pas
davantage précisé. Les postes de dépenses propres aux équipements publics ne sont pas
disti
ngués de ceux qui n’ont pas vocation à être financés par la personne publique. Il n’est donc
pas possible d’écarter le risque de surcompensation du coût des équipements publics.
Un pilotage financier à améliorer
La concession du pôle gare présente des désé
quilibres financiers qui ne s’expliquent pas
par les seules modifications du programme. Le pilotage financier présente des faiblesses
importantes.
Le taux de réalisation des produits (hors participation) est de 22,2 %, alors que
l’opération atteint presque
la moitié de sa durée contractuelle (46,7 %). Inversement le budget
prévisionnel des charges (118,6
M€) est réalisé pour les deux tiers de son montant (
79,3
M€
).
Si les niveaux d’exécution des charges et des produits étaient alignés sur le taux d’avanceme
nt
de l’opération, le déficit (hors participation) ne serait que de
- 2,9
M€
au 31 décembre 2019,
soit presque vingt fois moins que le déficit réellement constaté à la même date.
Si les charges et les produits devaient continuer de progresser au rythme moyen annuel
observé entre 2014 et 2019 (+ 34 % et + 64 %), les charges prévisionnelles seraient alors
réalisées bien avant le 25 août 2030. Leur montant cible serait atteint dès 2021. Le déficit
continuerait à se situer à des niveaux supérieurs à - 40
M€ jusqu’en 2021, du fait des retards
accumulés en matière de produits. Il ne serait résorbé qu’en 2024, à supposer que le
recouvrement des produits se poursuive au rythme observé à partir de 2018. Si les recettes
devaient suivre une trajectoire linéaire, propor
tionnelle à l’avancement de la durée contractuelle
et sans effet de rattrapage, un déficit de l’ordre de 60
M€ perdurerait en 2030.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
44
Exécution des produits et des charges de la concession « pôle gare »
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des comptes annuels de 2014 à 2019
Le respect de l’équation financière prévisionnelle semble donc peu réaliste. Les
perspectives de recettes
apparaissent incertaines au vu du degré d’avancement des cessions
foncières. Le CRAC de 2019 fait uniquement mention, pour 20
20, d’un «
protocole d’étude
»
sur une partie de l’îlot SERNAM
et d
’ «
une promesse de vente dans l’année, sous réserve d’un
accord sur la programmation et la charge foncière. » En raison de la crise sanitaire, la promesse
de vente prévue en avril 2020 a été reportée en octobre 2020
, reportant d’autant la recette
attendue de 5,62
M€.
Le renouvellement du foncier disponible pour la commercialisation est tributaire de la
réalisation des acquisitions foncières. Or, plus d’une vingtaine de parcelles restent à
acquérir
dans le périmètre de l’opération, alors que
16,3
M€
sont d’ores et déjà engagés sur le budget
des acquisitions foncières (18,8
M€) au 31
décembre 2019. Outre l’opération relative à la gare
routière, au parking et au parvis de la gare, les autres acquisitions sont suspendues à des
négociations et à des procédures d’expropriation. Dans la mesure où
la crise sanitaire a généré
des surcoûts et des retards, la libération de foncier pour de nouvelles opérations semble
difficilement envisageable à budget constant.
L’effet de rattrapage sur les recettes, observé en 2019, doit être nuancé dans la mesure
où les ventes de cette même année (32,4 % des produits prévisionnels de cessions foncières)
ont été effectuées à perte. Chartres Métropole a acquis, sur le f
ondement d’une
délibération du
26 septembre 2019
, les terrains d’assiette du complexe culturel et sportif
(dits « Épargne
ouest ») auprès de la SPL pour un prix de 5,45
M€
HT (6,54
M€
TTC). Les parcelles destinées
à accueillir les parkings adjacents au complexe (dits « Épargne est ») ont été achetées par la
ville de Chartres au prix de 4,81
M€
HT (5,77 M
€
TTC), sur autorisation du conseil municipal
du 17 octobre 2019. Les conditions financières de ces deux cessions ont été approuvées par les
résolutions 3 (pour « Épargne ouest ») et 2 (pour « Épargne est »)
du conseil d’administration
en date du 17
octobre 2019. L’organe social s’est écarté de l’évaluation
domaniale (de 4,36
M€
pour « Épargne ouest » et de 3,85
M€ pour «
Epargne est »), en se fondant sur « les dépenses
engagées par la SPL Chartres Aménagement pour la remise en état des sols.
» Or l’acquisition
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
45
des terrains auprès de la SNCF et les travaux de démolition et de dépollution ont coûté
10,37
M€
HT à la société (sur les 13,65
M€
HT engagés).
Calcul de la moins-
value sur la vente des terrains d’assiette du complexe culturel et
sportif (secteur « Épargne ouest ») et des parkings latéraux (secteur « Épargne est »)
Cessions
2019
Acquéreurs
Évaluation
France
Domaine
Prix de vente
TTC
Prix de vente
HT
Montant
engagé HT
(acquisition,
démolition et
dépollution)
Montant
facturé HT
(acquisition,
démolition et
dépollution)
Frais de
gestion
SPL (5,5%
dépenses)
Moins-value
au regard des
montants
engagés
Moins-value
au regard
des
montants
facturés
Épargne
ouest
Chartres
métropole
4 360 000,00
6 536 714,70
5 447 262,25
7 232 420,00
5 494 273,30 302 185,03 -2 087 342,78
-349 196,08
Épargne
est
Ville de
Chartres
3 850 000,00
5 767 689,44
4 806 407,87
6 413 655,60
4 872 280,10 267 975,41 -1 875 223,14
-333 847,64
Total
8 210 000,00 12 304 404,14 10 253 670,12 13 646 075,60 10 366 553,40 570 160,44 -3 962 565,92
-683 043,72
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des actes notariés et des restitutions comptables fournies par la SPL
La majoration
pratiquée par rapport à l’évaluation domaniale n’a donc pas réellement
permis de prévenir une moins-value. En outre les sommes réellement encaissées en 2019 pour
ces ventes (4,72
M€
) représentent à peine plus du tiers du produit attendu. Le versement du prix
de l’ensemble foncier «
Épargne est » est différé au terme de la concession, « soit au plus tard
au 2 septembre 2030. » Pour « Épargne ouest
», l’acquéreur est réputé avoir déjà acquitté une
partie du prix «
à concurrence de […] [1,82
M€] dès avant ce j
our, ainsi que le vendeur le
confirme, représentant une avance de trésorerie. »
Cette « avance » a été allouée à la SPL, par un premier paiement de 1,2
M€,
consenti le
6 juillet 2017 par Chartres M
étropole, suite à une résolution du conseil d’administratio
n du
30 juin 2017
et sur la base d’une délibération du conseil communautaire
du 28 juin 2017. Le
« complément de 0,62
M€
» a été acquitté le 20 juillet 2018. Au-delà de la question que soulève
le changement de destination d’une facilité de trésorerie en avance sur un prix de vente, cet
abandon de créance révèle en creux l’impasse
à laquelle la SPL est confrontée dans ses
financements. Faute de ressources propres pour rembourser ses dettes de court terme, la SPL
cherche à obtenir l’acquisition à titre définitif des financements consentis de façon provisoire.
En donnant l’apparence d’une recette de cession à une aide publique,
le taux de réalisation des
produits s’en trouve amélioré, au risque d’occulter l’avancement réel du programme.
Pour prévenir toute nouvelle dégradation des équilibres financiers, la chambre invite la
SPL à clarifier le suivi du plan d’affaires. La présent
ation des comptes rendus du pôle gare
devrait être revue afin
d’écarter tout risque de
surcompensation des coûts liés aux équipements
publics. Ils gagneraient à être assortis d’une programmation plus transparente
, notamment en
ce qui concerne le calendrier des recettes.
Les retards enregistrés sur les recettes du plateau nord-est exigent un suivi plus
rigoureux et un plan d’affaires actualisé
La
concession d’aménagement
«
pour la réalisation de l’opération du plateau nord
-est »
a été conclue la même année que celle du pôle gare, le 6 août 2010. Si les deux opérations
présentent des analogies au regard de leur chronologie des charges prévisionnelles en jeu
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
46
(114
M€ pour PN
E et 118
M€ pour PG au 31
décembre 2019) et du transfert intégral du risque
au concédant, leur configuration spatiale et leur exécution présentent des traits divergents.
D’une surface hors œuvre nette (SHON)
de 276 hectares
, soit cinquante fois l’emprise
du pôle gare (5,5
ha SHON), le périmètre de l’opération est situé en bordure de centre
-ville. Il
comprend des voies de transit générant des césures spatiales et des équipements collectifs
consommateurs de foncier (aérodrome, parc des expositions, hippodrome, complexe aquatique,
etc.). Une partie des interventions programmées intègre d’ailleurs la relocalisation ou le
redimensionnement d’infrastructures publiques.
Dans sa conception initiale, le programme prévisionnel des constructions s’articulait
autour d’u
n double projet urbain et commercial. Il prévoyait notamment le « renouvellement
du quartier de la Madeleine » et la «
création d’un centre commercial accessible par l’avenue
Jean Mermoz et le futur prolongement de la RN 154
». Le centre de gravité de l’opération s’est
progressivement déplacé vers l
’aménagement commercial
. Le programme de 1 982 logements
(179 988 m²), prévu dans le traité de concession, a été ramené à 316 logements (23 700 m²).
Les surfaces dédiées aux commerces représentent 82,2
% de l’ens
emble (contre 18,4 %
initialement).
Les charges réalisées représentent à peine 49,9 % du budget prévu, à cinq ans du terme
de la durée contractuelle.
Si l’opération (
- 46,5
M€) présente un solde déficitaire moindre que celui du pôle gare
(- 53
M€), cette situation n’est pas moins préoccupante au regard du faible taux de réalisation
des recettes (9,1 %, contre 22,2
% pour le pôle gare) et de l’importance des en
-cours (81,7 %
des charges réalisées, contre 66,8 % pour le pôle gare). Le stock constaté au 31 décembre 2019
(46,5
M€) représente plus du double de celui qui résulterait d’une sortie linéaire en ligne avec
le taux de maturité de l’opération (21,5
M€). Ce «
retard théorique
» d’écoulement des stocks
s’élève à 43,9
% des charges réalisées (13,6 % pour le pôle gare).
Le degré limité de réalisation des cessions foncières
fragilise l’équilibre financier
.
Le produit correspondant (0,42
M€
) comptabilisé dans le CRAC de 2019 représente
uniquement 0,4 % des 114,1
M€ des recettes
prévisionnelles inscrites dans
l’annexe au comptes
annuels de 2019. Les autres recettes de la concession sont constituées de produits accessoires
(loyers,
remboursements d’assurances,
etc.) à hauteur de 1,93
M€
et du remboursement par
Chartres Métropole des t
ravaux réalisés sur l’aérodr
ome à hauteur de 8 014 600
€ HT
.
L’actuel bâtiment de Chartrexpo devait être démoli et le nouvel équipement devait être
réalisé sur un autre secteur afin de libérer l’emprise foncière n
écessaire à la réalisation du
« trapèze commercial ».
L’avenant n°
2 signé le 30 novembre 2011 prévoyait une dépense
prévisionnelle de 2,5
M€ pour les démolitions, 11
M€ pour les travaux de
voirie et réseaux
divers, 30
M€ pour la reconstruction du parc et 14,4
M€ pour la maîtrise d’œuvre
. Les loyers
perçus pour le bâtiment représentaient une recette totale de 39
M€ sur 25
ans et la cession du
parc des expositions était estimée à 15
M€. La maîtrise d’œuvre du projet avait été confiée à un
groupeme
nt de maîtrise d’œuvre,
auquel
l’entreprise a mis
un terme par un protocole
transactionnel le 28 avril 2015. Il a fallu alors reprendre le projet à son point de départ, en
procédant à des études de faisabilité complémentaires dans le courant de 2015 et en lançant un
marché de conception-réalisation au cours du premier semestre 2016. Pour pallier la démolition
du parc des expositions en 2017, un site provisoire a alors été remis en état
et a fait l’objet de
diverses interventions, pour être loué dans l’attente de la
livraison du nouvel équipement.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
47
Dans sa conception initiale, le bilan financier prévoyait une recette de 66
M€ de la
commercialisation du foncier correspondant, soit 67 % du total. Cette prévision se fondait sur
les termes
d’un protocole foncier conclu le 19
juillet 2012 entre la SPL et une entreprise de
promotion immobilière. Chartres A
ménagement s’y était engagé à acquérir les terrains
nécessaires au projet (« au plus tard le 31 décembre 2014 »), à en purger les droits et sûretés, à
démolir les constructions présentes. L
e promoteur s’obligeait à édifier un centre commercial.
Le projet devait être «
mis en œuvre en deux phases successives, en fonction de la maîtrise du
foncier par l’aménageur et
du projet commercial à définir. » La première phase prévoyait des
constructio
ns d’une « surface hors œuvre nette comprise entre 60
000 et 80 000 m² », assorti
d’un parking comprenant «
environ 2 500 places de stationnement. ». La seconde phase devait
donner lieu à la construction d’un ensemble commercial
«
d’une SHON comprise entre
50 000
et 70 000 m² », sous
réserve d’une limite de constructibilité totale de 130
000 m².
Le promoteur a proposé, dans le cadre de la première phase, un ensemble commercial
d’une surface de vente de 68
200
m² auquel devait s’ajouter un magasin de 11
700 m². Le projet
comportait, en outre, «
l’aménagement d’un parc de stationnement de plain
-pied sur 75 030 m²
d’emprise au sol
» d’une contenance de 3
271 places. Si celui-ci a recueilli dans un premier
temps l’avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial d’Eure
-
et-Loir, la commission nati
onale d’aménagement commercial
a formulé un avis défavorable le
12 mai 2016. Celle-ci fait grief au projet de comporter « la création de 65 boutiques en
périphérie de ville » et de « fragiliser la situation du centre
–
ville de Chartres alors que cette
commune a bénéficié de subventions au titre du FISAC. » En outre, il est relevé que « le dossier
transmis par le pétitionnaire ne prévoit aucune mesure de nature à réduire l’imperméabilisation
des sols, ni aménagement en sous-sol de places de stationnement » et que « les efforts du
demandeur ne seront pas de nature à atténuer l’impact d
u projet sur son environnement. »
Un protocole foncier a été signé le 9 octobre 2017, afin de redimensionner le projet.
Celui-ci a été suivi de deux avenants de prorogation. Les discussions autour de la refonte du
projet s’étant prolongées, la signature de la promesse de vente
n’a pas pu aboutir et la société
s’est trouvée privée de toute perspective de recettes pour ce pr
ojet fin 2018.
En dépit d’observations du commissaire aux comptes
en 2018 et en 2019 sur la nécessité
de procéder à une requalification de l’opération, il a fallu attendre
le 18 décembre 2020 pour
que la SPL examine différents scénarios d’ajustement du programme. En raison d’un risque de
suroffre de logement dans l’agglomération (le rythme de construction étant actuellement de 230
logements par an), les hypothèses de programmation ne prévoient pas de ventes avant 2024.
Cette situation risque de prolonger les tensions sur la trésorerie. La SPL indique avoir fait
valider au concédant une nouvelle programmation et avoir ajusté les hypothèses financières par
un avenant du 16 septembre 2021. Cependant le plan de financement révisé à cette occasion ne
prévoit pas de rétablissement de l’équilibre financier à court terme. En 2021 et en 2022,
l’essentiel des recettes proviennent des cessions d’équipements aux personnes publiques. Les
produits relatifs aux équipements commerciaux ne sont pas attendus avant 2023. Les recettes
issues du programme de logement seront perçues pour l’essentiel à compter de 2026.
L’opération devrait demeurer déficitaire pour plus de 30
M€ jusqu’en 2027 et ne parviendrait
à l’équilibre qu’en 2030.
».
La chambre invite la société à apporter une vigilance particulière au bon déroulement
de ce nouveau programme et à limiter les risques de pertes et des retards accrus en recettes.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
48
2.3.3
La conduite du programme des cessions des ZAC de la roseraie, du jardin
d’entreprises et des pôles ouest doit être mieux suivie et anticipée
Les opérations de la ZAC de la roseraie, du j
ardin d’entreprises et du
pôle ouest ont en
commun de se situer en périphérie de l’agglomération chartraine. Les potentialité
s accrues de
libération d’emprises foncières importantes
offrent un avantage certain. Mais elles sont
susceptibles d’être
contrebalancées
par l’éloignement du centre, de ses
équipements et de ses
services, faisant peser un risque accru en phase de commercialisation. Par ailleurs, alors que la
charge des équipements publics est prédominante pour le pôle gare et le plateau nord-est, elle
est moindre pour ces trois autres opérations. La vente des droits à construire constitue le centre
de gravité de leur progr
amme prévisionnel. Leur équilibre de financement est donc d’autant
plus sensible aux contraintes de débouché.
Si le j
ardin d’entreprises et le
pôle ouest sont confrontés aux difficultés inhérentes à des
parcs d’activités dédiés à l’immobilier d’entreprise
et au tertiaire, leurs différences de maturité
les exposent à des zones de risque distinctes.
Les équilibres de l’opération de la
roseraie, dont
l’objet principal est la construction d’un éco quartier, se trouve
nt contrariés par la présence
d’u
ne offre concurrente importante, susceptible de peser sur les conditions de prix.
Parvenue au terme de
sa durée contractuelle, l’
opération du jardin
d’entreprise
doit faire l’objet d’un suivi renforcé pour les dernières opérations foncières
L’opération du
jardin
d’entreprise constitue l’opération la plus ancienne dans le
portefeuille des concessions de l’entreprise.
Conclue le 29 juin 1998
entre le syndicat d’études,
de développement et de gestion du jardin
d’entreprises et la société d’économie mixte de la
ville de Chartres devenue la SEM Chartres développements immobiliers, la concession
d’aménagement a été transférée à la SPL Chartres
Aménagement en janvier 2010. Elle a pour
objet le développement, la commercialisation et la gestion d’un espace mixte d’ac
tivités, de
loisirs et d’habitat, su
r une zone couvrant environ 550 hectares, dont 230 ha sur le territoire de
Chartres et 320 ha sur celui de Nogent-le-Phaye.
Proche de l’autoroute, le secteur est attractif. De nombreuses entreprises s’y sont
implantées et y exercent leur activité dans divers secteurs : activités de logistique, stockage,
services, bâtiment et travaux publics, etc. U
ne demande réelle en matière d’immobilier
d’entreprise a soutenu l’implantation de sociétés dans ce parc d’activité, à la rech
erche
d’emprises foncières vastes à des conditions de prix inférieures à celles de l’ouest francilien.
La durée de la convention a été prolongée à plusieurs reprises. Son terme a été repoussé
du 31 décembre 2009 au 31 décembre 2012
par l’avenant n°
3 du 25 mai 2007, puis au
31 décembre 2017 par avenant n° 6 du 16 octobre 2012
et, enfin, jusqu’au 31
décembre 2022
par avenant n° 7 du 16 décembre 2016. Initialement conclue pour onze ans, la concession court
désormais sur une durée de plus de 24 ans
18
.
La prolongation de la durée contractuelle opérée
par l’avenant n°
6 a été décidée
« compte tenu du foncier restant à maîtriser, des aménagements à réaliser (travaux de la desserte
téléphonique, barreau d’accès à la RD 24…) et de l’avan
cement de la commercialisation. ».
18
Aux termes de l’article 2 de l’avenant n°7, les parties se réservent la possibilité de repousser encore davanta
ge
le terme de l’échéance du 3
1 décembre 2022, en prévoyant «
de tirer le bilan de l’opération et de renégocier, par
avenant les termes de cette convention, dont sa durée » en fin de contrat.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
49
Les raisons fondant le nouveau report de la date d’expiration du contrat sont plus
diverses en ce qui concerne
l’avenant n°
7. Il est fait mention, dans son exposé des motifs, de
la volonté « de répondre à la demande du monde économiq
ue de l’agglomération
», de « deux
nouveaux découpages parcellaires composés de parcelles comprises entre 3 000 et 5 000 m² sur
l
es lots prévus à l’arrière du «
Chartres Business Park » ainsi que sur les lots de « Muid
Pintard » », de « la réalisation de voiries supplémentaires » et de la remise en état
d’un
« site
industriel
». La question des retards de commercialisation n’en est pas moins présente.
L’annexe n°
4 jointe à cet avenant révèle l’existence d’u
n ensemble foncier de plus de
61,6 hectares dont la commercialisation
n’a pu aboutir à la date de notification
. La perception
des produits de cession
correspondants est ainsi renvoyée, pour plus d’un tiers, à un horizon
supérieur à un an.
Au 31 décembre 2019, seuls 31,8 % des surfaces restant à commercialiser suite à
l’avenant n°
7 précité avaient été vendues et 2,6 % réservées ou sous promesse de vente. Parmi
les ventes réalisées, certaines sont intervenues avec deux à trois ans de retard, générant un
décalage de trésorerie allant jusqu’à
8,8
M€
en 2019.
La revente
d’un ancien site de l’industrie cosmétique
illustre le suivi défaillant des
opérations foncières. Cet ensemble immobilier a été acquis « hors périmètre » sur décision du
conseil d’administration
du 9 novembre 2012 et par un acte du 5 décembre 2012 moyennant un
prix de 5,38
M€
TTC (4,5
M€
HT), avec l’engagement de revendre les biens immobiliers
acquis dans un délai de cinq ans. Des négociations ont été engagées avec une société qui a fait
part de son intérêt pour acquérir le bien et y regrouper ses sites. Une proposition de prix a été
adressée le 28 mai 2014 à hauteur de 4,6
M€ «
hors taxe et hors frais », sans disposer au
préalable d’une estimation de France Domaine.
Dans un courrier du 24 novembre 2014, les
services de l’autorité concédante ont a
ccordé un «
report de l’acquisition du site à la fin du
premier semestre 2015
», sur la foi d’échanges avec
le vice-président de Chartres Métropole
chargé du développement et [de la] promotion économique et
en l’absence de protocole foncier
fixant le calendrier et les modalités de la promesse de vente. La société ayant fini par se retirer
totalement des négociations, la vente n’a pas pu être menée à son terme en 2017 à hauteur de
4,5
M€, comme le prévoyait
la « grille des prix de cession actualisée » annexé
e à l’avenant n°7.
Celle-
ci n’est intervenue que
le 9 octobre 2019, à un prix inférieur de 0,9
M€
HT, à savoir à
hauteur de 3,6
M€
HT, au profit de Chartres M
étropole, mais supérieure à l’évaluation de
France Domaine (2,75
M€). Chartres Aménagement n’ayant pas respecté l’engagement de
revendre les biens acquis dans un délai de cinq ans
, c’est
-à-dire avant le 5 décembre 2017, et la
taxe de publicité foncière différée n’ayant pas été spontanément régularisée dans le mois suivant
l’expiration de ce délai, la société a dû demander le bénéfice d’une procédure de régularisation,
précisément au moment où elle faisait l’objet d’une vérification de comptabilité. La rectification
a conduit au rétablissement des droits à hauteur de 196 879
€
(au lieu des 32 174
€ payés) et à
l’application d’intérêts de retard pour un montant de 8
269
€. Cet enchaînement de pertes et de
surcoûts ne résulte pas uniquement d’aléas de gestion. Il est également lié à un
pilotage
défaillant des opérations foncières dans la durée.
Afin de prévenir la persistance d’un déficit à la clôture de l’opération, la société doit
apporter un soin tout particulier à la sécurisation des opérations foncières. Alors que le taux de
réalisation des charges au 31 décembre 2019 (87,7 %) est proche du taux de maturité de
l’opération (87,8
% de la durée contractuelle), le niveau de réalisation des recettes atteint à
peine les deux tiers du montant prévisionnel inscrit au bilan (66,2 %). Il faudrait que la société
soit en mesure de maintenir une progression annuelle moyenne de 14 %, pour résorber son
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
50
déficit au 31 décembre 2022, date à laquelle elle devra rembourser deux avances de trésorerie
de 4,1
M€ et 2,7
M€
.
Le programme du pôle ouest doit être réajusté sur la base d’expertises
foncières
visant à fiabiliser l’évaluation des stocks et des recettes
La concession d’aménagement des
pôles ouest s’articule autour d’un projet ambitieux
visant à réunir dans un même secteur un pôle dédié aux activités du BTP, un agroparc et un
pôle dédié à des services. Un secteur « mixte » doit en outre « accueillir des activités connexes
aux différents pôles voisins ou d’autres activités le cas échéant
».
D’une superficie totale de
203 hectares, les terrains destinés à accueillir ces différents
aménageme
nts sont situés sur les communes d’Amilly et Mainvilliers, dans la partie ouest de
l’agglomération chartraine. L’objectif poursuivi par Chartres
M
étropole, en sa qualité d’autorité
concédante, est de faire émerger un pôle économique d’équilibre, faisant pe
ndant au jardin
d’entreprises et au Parc d’Archevilliers à l’est.
Concédée à Chartres Aménagement par le Syndicat mixte des pôles ouest (SMPO) le
22 décembre 2009
, l’opération s’est accompagnée de plusieurs révisions successives de la zone
d’aménagement co
ncertée. Les études réalisées par Chartres Aménagement pour le compte du
SMPO ont conduit à une première évolution. Afin de permettre la réalisation d’aménagement
de voiries et d’un carrefour, une extension de périmètre a été introduite par un
avenant du
6 juillet 2010. Suite à la dissolution du SMPO en date du 1
er
janvier 2011, Chartres Métropole
s’est substituée à ce groupement de communes et a repris les procédures d’urbanisme,
notamment afin d’apporter toutes les garanties nécessaires
en termes de protection
environnementale
. Ce processus a abouti à la redéfinition du périmètre de l’opération et à des
ajustements du bilan par un avenant du 8 avril 2015.
La SPL a mis à profit cette stabilisation du projet pour accélérer son programme
d’acquisitions fonciè
res en 2016. Les négociations portant sur des terrains agricoles exploités,
le concessionnaire a cru bon de recourir à des achats hors périmètre, afin de procéder à des
échanges et faciliter la libération du foncier dans l’emprise de la ZAC. Des «
réserves
foncières » ont ainsi été constituées à Berchère Saint Germain, à Briconville ou à Fresnay le
Gilmert et utilisées comme levier de transaction.
Au 31 décembre 2017, le coût des acquisitions foncières
s’élevait
ainsi à 17
M€
(10,9
M€
en 2014). Il représentait plus de deux fois les recettes cumulées perçues à cette même
date (7,1
M€). Si les CRAC ne détaillent pas le coût des réserves foncières, sa contribution aux
décalages de trésorerie de la concession est certaine. À la fin de 2019,
l’état d’avancement d
u
programme d’acquisition foncière
sur les pôles ouest était encore partiel et l’ensemble des
échanges escomptés n’avaient pas encore eu lieu. Si la constitution d’un stock foncier «
hors
périmètre
» n’est pas exclue en tant que telle par
le traité de concession, elle est réservée aux
biens «
nécessaires pour la réalisation des ouvrages inclus dans l’opération
».
Le concessionnaire a concentré ses efforts sur la maîtrise foncière au risque de perdre
de vue les entrées en négociation requises pour la commercialisation et de retarder les entrées
en recettes. La seule cession menée à bien sur la période porte sur l’implantation d’un
centre de
données. Une promesse de vente a été signée le 4 décembre 2017. La vente a été conclue le
4 décembre 2018 pour un prix de 2,63
M€
et de 2,9
M€ auprès d’une société tierce
, au profit
de laquelle l’acquéreur a usé de la faculté de substitution prévue dans la promesse de vente.
L’ensemble foncier cédé représente une superficie totale de 117
136 m².
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
51
Aucune autre cession foncièr
e n’a été réalisée
en 2019
dans le périmètre de l’opération.
À l’issue de la période contrôlée,
moins de 9 % des surfaces cessibles du programme ont été
écoulées. Les stocks
d’invendus ayant été multipliés par deux entre 2014 (9,4
M€) et 2019
(20,2
M€) sans progression des recettes, les tensions pesant sur la trésorerie se sont notablement
accrues. Son solde s’est creusé
de - 0,5
M€ à
- 3,4
M€
entre 2016 et 2018. La réduction partielle
du déficit observée en 2019 (- 1,8
M€) a été obtenu
e
par un recours accru à l’endettement. Le
concessionnaire a contracté un prêt de 8
M€ sur six ans
le 3 janvier 2019 et a sollicité une
avance de trésorerie de 6
M€
auprès de Chartres Métropole,
susceptible d’être «
renouvelée fin
2019 pour l’année 2020
».
Si le taux moyen d’évolution des produits et des charges demeurait inchangé, la cible
prévisionnelle en recettes ne serait pas atteinte au terme de la durée contractuelle. Un déficit
résiduel de 46
M€
subsisterait en décembre 2024, lequel devrait être pris en charge à hauteur
de 20 % par la SPL et de 80
% par l’autorité concédante. Un effort de rattrapage est donc
nécessaire d’ici 2025 pour garantir le rétablissement des équilibres financiers.
O
r la perspective d’une accélération des recettes reste affectée d’inconnues. Le caractère
périphérique de cette zone d’activité, en bordure de terrains agricoles et éloignée des principaux
axes de communications (autoroute et voie ferroviaire), est peu fav
orable à l’écoulement de
terrains aménagés. Les contraintes liées à la future directive paysagère viennent ajouter une
difficulté complémentaire au réajustement du programme. Dans le CRAC de 2019, le
concessionnaire relève, à cet égard, que «
l’approbation
de la directive paysagère entraine une
profonde modification de zones de constructibilité de la ZAC, nécessitant à la fois une refonte
complète du projet ainsi qu’un travail important de rééquilibrage budgétaire, avec pour
conséquence intermédiaire un besoin de trésorerie temporaire. ».
Du fait de l’accumulation des terrains invendus, le concessionnaire ne pourra pas se
contenter du recours à d
’autres facilités de trésorerie de l’autorité concédante. Le réajustement
du programme devra être adossé à un plan de trésorerie construit de manière rigoureuse sur la
durée contractuelle restante. Les prévisions de recettes devront se fonder sur des expertises
foncières qui permettront, au besoin, de fiabiliser les recettes prévisionnelles et de constater
d’éventuell
es provisions pour perte.
Un plan d’actions visant à résorber les risqu
es de pertes de recettes est nécessaire
pour
sécuriser l’exécution
de l’opération de la
roseraie
Initialement gérée en régie par la ville de Chartres
depuis 2007, l’opération de la
roseraie
a été concédée à la société
en 2010. Elle a pour principal objet la création d’un
éco quartier.
D’une surface de 20
hectares, s
on périmètre se situe au sein d’un secteur «
dont la vocation est
essentiellement résidentielle ». Elle comprend les « derniers terrains non urbanisés du nord-
ouest de Chartres. »
La ville de Chartres
poursuit une double ambition. Elle vise un niveau d’exigence
soutenu en matière de qualité de l’habitat et du cadre de vie. Le
programme prévisionnel prévoit
ainsi « la construction de logements Haute Qualité environnementale, la gestion des eaux
pluviales par des systèmes alternatifs et la création d’espaces verts d
e qualité. » La surface des
parcs et des espaces paysagers représente 20 %
de la superficie de l’opération dans sa ve
rsion
initiale. Le projet comprend également un groupe scolaire, des commerces et des services.
La deuxième ambition réside dans la recherche d’un
e offre de logement diversifiée. Les
750 logements prévus se répartissent respectivement à hauteur de 14 %, 66 % et 17 % entre
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
52
maisons individuelles, habitat collectif et constructions intermédiaires. Le logement social y est
réparti entre les différentes catégories de lots.
Initialement fixée à dix ans, la durée de la concession a été prolongée
jusqu’au
8 février
2019 par un premier avenant du 12 septembre 2012, puis
jusqu’au 9
février 2025 par un
deuxième avenant du 11 décembre 2014, portant sa durée totale à 15 ans. Ces modifications se
sont accompagnées d
’un nouveau phasage des travaux
et d’une révisio
n du programme foncier.
Les surfaces de plancher (SDP) dédiées au logement individuel (19 %) et aux constructions
collectives (67 %) ont
été revues à la hausse, afin d’optimiser l
e produit attendu des cessions.
Celui-ci porté de 14,5 M
€ à
15,1
M€
, dont 6,4
M€ pour la première phas
e et 8,6
M€ pour la
deuxième phase. Le concessionnaire se voit assigner un objectif de prix moyen de cession
compris entre 170 et 189 euros par mètre carré de SDP
(à l’exception de quelques lots) en
phase 1, puis entre 214 et 230 euros par mètre carré de SDP en phase 2.
La révision des paramètres du bilan financier de la concession s’accompagne également
d’une nouvelle allocation du risque de perte d’exploitation. Alors que le conces
sionnaire se
voyait imputer 10 % du résultat positif ou négatif
dégagé à l’achèvement de l’opération dans le
traité de 2010,
l’avenant n°
2 prévoit que « le résultat est affecté au concédant » dans son
intégralité. La rémunération du concessionnaire est revue à la baisse en conséquence. Celle-ci
est ramenée « de 1 810 239
€
HT (CRACL 2013) à 1 345 991
€
HT. »
Deux principaux motifs sont invoqués pour justifier cette modification. D’une part,
« de
nombreuses modifications aux travaux ont été apportées pendant la durée du chantier suite aux
demandes notamment de la ville de Chartres, de Chartres Métropole ».
D’autre part, il
est fait
mention du choix de « préserver une homogénéité entre les constructions de ces parcelles et le
reste des bâtiments à venir sur la ZAC », lequel impliquerait le rachat des parcelles « par le
concessionnaire au concédant » et leur commercialisation directe par la SPL.
Ce nouveau programme confié au concessionnaire ne se borne pas à tirer les
conséquences d’aléas imprévus. Il constitue une remise en cause substantielle de l’é
conomie
générale de la convention. Sa régularité interroge autant que son efficience. En dépit de la baisse
de rémunération
de l’exploitant
, la prise en charge intégrale du risque de déficit par le concédant
est de nature à déresponsabiliser le concessionnaire. De plus la prolongation de la durée de la
concession et les incertitudes entourant la phase 2, affaiblit ses obligations de résultat en termes
de cessions : « la difficulté de commercialisation des lots de la phase 1 ne permet pas
d’envisager la comm
ercialisation de la phase 2 à court terme. De plus, la demande en logements
et les ventes effectives constatées ne permettent pas d’écouler le stock de logement de manière
efficiente. Dans ce contexte, il est décidé de prolonger la durée de la concession à 15 ans. »
L
’octroi d’un montant croissa
nt d
’ «
avances de trésorerie » vient encore réduire les
incitations à une bonne gestion. Leur montant s’établit à
2,65
M€
au 31 décembre 2019 et leur
remboursement est différé pour une large part en 2025.
Le bouleversement des principaux paramètres de la concession, opéré en décembre
2014, ne constitue pas le seul facteur explicatif des déséquilibres ultérieurs. Les recettes perçues
au 31 décembre 2019 correspondent à moins de 20 %
du montant attendu, alors que l’opé
ration
atteint les deux tiers de sa durée contractuelle.
L’examen
des CRAC
ne révèle pas d’obstacles majeurs qui auraient constitué un
imprévu indépendant de la volonté du concessionnaire dans la réalisation du programme. Le
programme d’acquisition foncièr
e était parachevé en 2015. Les terrains étaient exempts de toute
contrainte
en matière d’archéologie préventive
dès 2014. Le lancement des études préalables
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
53
pour la phase 2 mentionnée dans le CRAC de 2018 révèle que la livraison des lots de la phase 1
était jugée suffisamment aboutie pour envisager la suite du programme.
D
u fait d’un manque de pilotage pluriannuel, le concessionnaire a lui
-même généré les
conditions de l’essoufflement de l’opération.
Les négociations engagées avec les promoteurs
ont débouché sur des promesses de vente généralement en plus de deux ans. Pour certains lots,
une durée de quatre ans s’est écoulée entre le début des discussions commerciales («
lancement
des négociations […] pour les lots 1C, 1D et 1E
» et « poursuite des négociations sur les lots
1G et 1H » en 2014) et la signature des promesses de vente (« Signature de promesses de vente
pour [le] lot 1G
[…]
: 938 028,00
€
HT [et le] lot 1H
[…]
: 800 000,00
€
HT » en 2018) ou
celle des actes de vente (« Signature des actes de cession
: […] lot 1E […]
: 408 000,00
€
HT »
en 2018). Deux abandons de négociation sont constatés pour les lots 1H et 1F. Le lot 1F faisait
toujours l’objet de négociation au 31
décembre 2019, sans « projet viable, compte-tenu de la
charge foncière attendue ».
Il a fallu attendre fin 2019 pour que six des treize lots aménagés de la phase 1 soient
cédés. Seuls 81 % des recettes prévisionnelles relatives à cette première phase étaient réalisées.
En moyenne, les prix de cession des lots (181 euros par mètre carré de surface de plancher
(SDP)) apparaissent conformes aux objectifs prévus au contrat (entre 170 et 189 euros par mètre
carré
de SDP), à l’exception de ceux relatifs au lot 1A et aux parcelles hors ZAC, inférieurs aux
références contractuelles.
Ces lenteurs ont pu contribuer à accroître les tensions sur la trésorerie. Les dépenses
exposées pour l’opération présentent un niveau d’avancement notable (
65 % des prévisions),
alors que la phase 1 porte sur 39 % des lots à céder. Le solde provisoire fait apparaître, hors
participations, un stock de 8,5
M€ au 31
décembre 2019, faisant naître un besoin de
financement sept fois supérieur à celui qui aurait résulté (autour de 1,2
M€) d’un niveau de
réalisation des produits et des charges proportionnel au taux d’av
ancement (66 %).
Pour la phase
2, des incertitudes encore plus marquées pèsent sur l’exécution du projet.
71
% des parcelles sont encore indisponibles. Leur livraison prévisionnelle n’interviendrait
qu’en 2023. Deux promoteurs ont sollicité la SPL en 2019
pour les lots 2A, 2H et 2G, mais sans
accord sur la charge foncière afférente. Le prix moyen des différents lots de la phase
2 s’élève
à 111
€
/
m², alors que l’avenant n°
2 prévoyait un intervalle compris entre 214 et 230
€
/ m² de
SDP. La contrainte exer
cée sur la vente de droits à construire découle d’un rythme de
construction de logements soutenu (230 logements par an) dans un contexte de stabilisation de
la population. Il existe ainsi un risque de suroffre de logements à l’échelle de l’agglomération.
Le concessionnaire doit également composer avec des contraintes paysagères accrues.
Le projet de directive « de protection et de mise en valeur des paysages destinée à préserver les
vues proches et lointaines sur la cathédrale de Chartres »
a fait l’objet
d’une
procédure de mise
à disposition du public jusqu’en novembre 2020
. Son entrée en vigueur prochaine limitera les
hauteurs de construction et de plantation compris
dans l’une des 456
vues rayonnant autour de
la cathédrale. Elle précisera la palette chromatique les constructions et les aménagements
paysagers à appliquer aux nouvelles constructions.
D’après
le CRAC 2019, « il a été demandé
à l’équipe de maîtrise d’œuvre de proposer une recomposition des lots en intégrant le nouveau
cône de vue [de la cathé
drale] afin d’adapter la programmation et le bilan de l’opération
d’
aménagement. »
En raison de ce contexte, la chambre appelle l’attention de la SPL sur la nécessité de se
doter d’un plan d’action
assorti d’un calendrier précis. Celui
-ci identifierait des indicateurs de
suivi pour chacune des mesures requises. Le cadre de négociation avec les promoteurs
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
54
immobiliers (calendrier, avancement des protocoles foncier ou des promesses de vente)
gagnerait à être explicité dans les compte-rendu à la collectivité, pour lui
permettre d’apprécier
les délais par lot et le respect de la grille des prix.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
L’exécution d’une concession d’aménagement se caractérise traditionnellement par un
décalage structurel entre le paiement des charges et l’enca
issement des produits. Pour
Chartres Aménagement, les contraintes de ce cycle de financement sont amplifiées par des
retards de recettes conséquents causés par un défaut de pilotage.
À court terme, il s’agit de sécuriser l’équilibre financier de ces opérat
ions, en procédant
aux ajustements
du programme prévisionnel là où il est requis, afin d’optimiser les rentrées
commerciales potentielles et de mieux programmer les financements.
À moyen terme, la société doit prévenir le risque de surcompensation des équipements
publics. I
l y a lieu que la société se dote d’une comptabilité analytique propre à prévenir tout
manquement au droit des aides d’
État. Les bilans joints aux avenants, les CRACL et les
tableaux de bords internes doivent permettre d’isoler le coût de
s équipements publics et les
soutiens financiers correspondants.
Enfin, à moyen et long terme, la société doit veiller à améliorer la portée informative
de ses comptes rendus aux collectivités actionnaires, notamment en explicitant le financement
du cycle
de l’opération dans son intégralité et non uniquement sur l’année à venir.
L’amélioration du suivi du programme foncier apparaît indispensable. En raison du
redécoupage des lots ou de l’absence d’indication sur les surfaces ou les références de
parcelles, il est peu aisé de rapprocher les grilles de prix de cession contractuelles de celles
jointes aux CRAC.
Recommandation n°
2 : Actualiser les bilans (financiers, immobiliers, fonciers et
commerciaux
) des opérations d’aménagement et garantir la transparence de leur suiv
i.
Recommandation n°
3 :
Définir et mettre en œuvre les actions et outils permettant de
maitriser les risques identifiés des opérations d’aménagement menées et
en assurer le
suivi périodique.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
55
3
UNE SITUATION FINANCIÈRE PRÉOCCUPANTE
3.1
Les documents comptables délivrent une image fidèle des risques
financiers, à l’exception des pertes sur opérations qui n’ont pas été
provisionnées
Les comptes de la SPL Chartres Aménagement ont été certifiés sans réserve jusqu’en
2016. À compter de
l’exercice 2017
, le commissaire aux comptes a formulé une réserve réitérée
en des termes identiques dans les rapports produits à l’appui des comptes annuels
de 2018 et de
2019. Les anomalies relevées par le commissaire aux comptes portent principalement sur le
suivi anal
ytique des opérations concédées et sur l’arrêté des CRACL
(
cf.
annexe n°14). Elles
sont principalement liées à la ventilation des charges et des produits par opération, à la mise à
jour des données du logiciel de gestion financier et à leur rapprochement avec les données de
comptabilité.
Les stocks d’en
-
cours de certaines opérations, à l’instar
du plateau nord-est et du pôle
ouest, auraient dû donner lieu à des ajustements, afin de tenir compte de la réalité des taux
d’avancement
. Les opérations de sortie des stocks au fur et à mesure des cessions de biens
aménagés s’écartent
, pour certaines opérations comme le plateau nord-est, de la méthode
prescrite par
l’autorité des normes comptables.
Il appartient à la société de veiller au respect
des termes du règlement du 23 juin 1999 relatif au traitement comptable des concessions
d’aménagement
. Celui-ci prévoit que « lorsque les coûts de revient estimés sont supérieurs aux
coûts comptabilisés depuis le début de la concession, l’écart est constitué de charges non encore
comptabilisées
qu’il convient de provisionner
». Sur la période examinée, ce dispositif n’a été
appliqué que pour l’opération Cœur de village à Sain
t-Prest.
Sous réserve de ces limites dans l’appréciation du bilan et du compte de résultat
,
l’examen de la comptabilité de la société ne révèle pas de défaut de fiabilité majeur. L
e
processus de confection des comptes offre une assurance raisonnable quant à la connaissance
des équilibres financiers globaux de la société. De ce fait, les principaux soldes de gestion et
les
ratios financiers conservent une portée explicative qui permet d’appréhender les principales
tendances et la trajectoire financière de la société.
3.2
L’
exploitation demeure déficitaire alors que les opérations parviennent
en moyenne aux deux tiers de leur durée
L’analyse du compte de résultat de Chartres
Aménagement révèle un cycle
d’exploitation structurellem
ent déficitaire, alors que les
opérations d’aménagement présentent
un taux d’avancement moyen de l’ordre de 65
%. L
a conjonction d’un niveau important de
charges et d’un faible niveau de production vendue
s’observe logiquement en début de
concession. En revanche, le maintien d’une telle
situation appelle une vigilance toute
particulière, lorsque les opérations atteignent un certain niveau de maturité et se rapprochent de
leur terme. Dans le cas de Chartres Aménagement, le décalage entre le taux de réalisation des
dépenses (52 %) et des recettes (21 %) persiste, tandis que les 21
concessions d’aménagement
parviennent en moyenne aux deux tiers de leur durée, sans le moindre effet de rattrapage. Entre
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
56
2014 et 2019, les produits d’exploitation (hors transferts de charge) sont systématiquement
inférieurs aux charges d’exploitation. Les écarts vont de
5 à 7,5 % selon les exercices.
Une insuffisance brute
d’exploitation
est constatée
chaque exercice sur l’ensemble de la
période (
cf.
annexe n° 9). Ce ratio mesure le solde des recettes et des dépe
nses d’exploitation
de la société, avant incorporation des frais de fonctionnement au bilan des opérations et
constatation des provisions et des amortissements
. En dépit d’une légère amélioration en 2015
(1,19
M€) suivie d’un repli en 2016 (1,72
M€), la so
ciété enregistre en 2019 un déficit de
1,6
M€ proche de celui de 2014.
D’après l’analyse de la société, c
e solde déficitaire ne reflète pas sa situation effective.
Celui-ci est compensé à la fois par un résultat financier excédentaire et par
d’autres produ
its de
gestion constitués principalement de transferts de charges. Ces dernières opérations consistent
à neutraliser une partie des charges d’exploitation pour les incorporer dans les comptes de
stocks. Elles correspondent à la prise en charge régulière d’
une quote-part des frais de gestion
de la société dans le cadre des concessions d’aménagement. La société affiche ainsi un résultat
positif à la suite de la prise en compte de ces éléments.
La chambre invite ce
pendant à une lecture nuancée du résultat d’ex
ploitation. Si la
situation est équilibrée d’un point de vue comptable, elle demeure fragile d’un point de vue
économique. La société continue d’enregistrer des taux de réali
sation de ses produits faibles
(21 % toutes opérations confondues), alors que les opérations parviennent en moyenne aux
deux tiers de leur durée. Cet écart entre les dépenses et les recettes n’est pas anormal lorsqu’une
opération d’aménagement débute. Il fait courir des risques
significatifs lorsque les retards de
commercialisation pers
istent et que l’insuffisance brute d’exploitation se prolonge en dépit du
niveau de maturité élevé des concessions. En fin d’opération, avec la diminution de l’activité
donnant lieu à rémunération et faute de recettes suffisantes, les transferts de charges pourraient
ne plus suffire à garantir l’équilibre du compte de résultat
.
Les charges de personnel ne représentent pas le facteur de risque principal. Elles ne
s’écarte
nt pas significativement du niveau moyen observé dans des entreprises comparables.
Toutefois ce poste tend à augmenter en moyenne entre 2014 et 2019 (1,3 % par an), alors que
les effectifs ont connu une légère décrue (0,7 % par an en moyenne). Cette tendance qui
demeure modérée en fin de période a pu être plus accentuée en 2016. Rapportées aux effectifs
en temps plein, les charges de personnel ont progressé de 24 % sur ce seul exercice, avant de
revenir à partir de 2018 dans des proportions plus proches du niveau antérieur. Elles
représentaient en 2016 jusqu’à vingt fois la valeur ajoutée
telle que définie par le plan
comptable général.
En raison de l’étroitesse de ses marges de manœuvre, la société ne peut pas
se permettre d’autres écarts analogues à l’avenir. L’effort de maîtrise réalisé en 2018 doit donc
être poursuivi et conforté, en veillant à ce que la dépense soit strictement dédiée aux besoins
opérationnels directs.
Les charges d’exploitation
ont connu une progression de 6 % en moyenne sur la période.
Les achats de matériel et les rémunérations d’intermédiaires occupent une place pré
pondérante
dans cette rubrique. Au-delà des charges liées à la montée en puissance des chantiers du pôle
gare et du plateau nord-est à partir de 2016, plusieurs postes présentent un dynamisme notable
en fin de période, sans entretenir un lien direct avec les cycles de travaux des principales
concessions. Tel est le cas en particulier des frais de publicité, des frais de séminaire ou encore
des locations de véhicules, des frais de téléphone et de déménagement.
La résorption des déficits d’exploitation impliq
ue donc de veiller, en priorité, à la
maîtrise des achats et prestations. Une revue des dépenses offre
des pistes d’économies à court
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
57
et à moyen terme, alors que le rattrapage des retards de commercialisation n’aura des e
ffets
qu’à moyen et long terme.
La crise sanitaire, intervenue postérieurement à la période contrôlée, a accru le retard
sur les recettes.
L’annexe aux comptes de 2019
signale, au titre des « évènements postérieurs à
la clôture de l’exercice
», «
une baisse d’environ 1/6
ème
de notre chiffre
d’affaires annuel et par
conséquence un impact significatif sur notre résultat de l’exercice 2020.
» Du fait des mesures
de confinement, «
l’activité liée aux acquisitions et cessions immobi
lières a très nettement
diminué » et «
l’ensemble des chantiers de nos projets ont été mis à l’arrêt pe
ndant une durée
minimum de 6 à 8 semaines et leur reprise reste très progressive et incertaine quant au nouveau
rythme d’avancement.
»
À brève échéance, la société doit concentrer ses efforts sur les économies en dépenses.
D’une part, il lui faut veiller à renforcer le suivi des coûts. Les comptes rendus au concédant
devront être assortis d’engagements sur les pistes d’économies possibles
, tenant compte des
besoins et de l’ajustement des recettes prévisible. D’autre par
t, la fonction contrôle de gestion
gagnerait à être renforcée.
3.3
Les besoins financiers croissants de la société ont été comblés par des
« avances » des personnes publiques actionnaires
3.3.1
L’octroi de
prêts par les collectivités actionnaires, majoritairement sans
rémunération, dissuade la société d’améliorer la performance de sa gestion
La montée en puissance des principales opérations a exercé une pression accrue sur la
trésorerie. Le niveau des dettes « fournisseurs » a augmenté de + 17,5
M€
entre 2014 et 2017.
La durée moyenne de rotation des dettes fournisseurs a été portée de 55 à 147 jours entre 2015
et 2016, puis à 203 jours en 2017. Les délais moyens de paiement, suivis dans le système
d’information financier
, déjà élevés en 2014 (45 jours) et en 2015 (47 jours), ont progressé à
53 jours en 2016 et en 2017. Au 31 décembre 2017, les factures dont le terme était échu depuis
plus de 90 jours représentaient 65,2 % des montants en instance de règlement.
Ancienneté des factures non réglées au 31 décembre de l’e
xercice
Factures reçues non réglées à la date de clôture de l'exercice
dont le terme est échu (en €)
2017
2018
2019
0 jour
71 999
0
1
1 à 30 jours
242 082,
714 736,
2 052 843
31 à 60 jours
2 235 348
2 004 229
4 234 674
61 à 90 jours
3 530 265
1 124 534
1 835 188
91 jours et plus
11 404 634
5 712 531
3 039 504
Total au 31 décembre de l'exercice =
17 484 328
9 556 030
11 162 210
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des comptes annuels de 2017 à 2019
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
58
La société a dû mobiliser des financements externes pour faire face à des besoins
croissants. Le montant des dettes financières est passé de 110
M€ en 2014 à 147
M€ en 2019
.
Évolution des dettes financières entre 2014 et 2019
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des comptes annuels 2014 à 2019
Les financements consentis par les collectivités actionnaires occupent une place de plus
en plus importante. Alors qu’ils constituent moins de
30 %
de l’encours en 2014, ils s’élèvent
à 94,2
M€ en 2019, soit 64
% du montant total des dettes financières comptabilisées au
31 décembre de cet exercice, dont 13,9
M€ pour Chartres et
79,9
M€ pour Chartre
s Métropole,
soit 45 % et 155 % de leurs ressources fiscales respectives. La SPL soutient que «
[…] l
es
établissements financiers n’acceptent plus de porter la totalité des encours de concessions
d’aménagement et demandent que les concédants […] apportent leur contribution de façon
significative […]
» lorsque le risque est porté
par l’autorité concédante
. Elle relève également
que la part des avances dans le financement des stocks d’aménagement est restée stable (21
%
en 2014 et 23 % en 2020), déduction faite des avances relatives au « pôle gare ». Toutefois il
paraît difficile d’
exclure du champ de l
’
étude la concession du pôle gare qui représente à elle
seule 74 % du total des avances constatées en 2019 et
constitue l’une des principales opérations
du portefeuille d’activité de la société.
Leur montant total cumulé est le plus souvent sous-évalué dans les comptes annuels,
l’écart pouvant atteindre 23,7
M€ en 2018.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
59
« Avances » consenties par les actionnaires entre 2014 et 2019
Conventions d'avances (montants cumulés en €)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Pôle gare
2 170 000
4 480 000
6 790 000
26 000 000
60 030 000
69 997 000
Plateau nord-est
10 000 000
10 000 000
18 500 000
10 042 428
1 842 428
642 428
CM 101
2 500 000
2 500 000
2 500 000
2 500 000
2 500 000
2 500 000
Jardin d'entreprises
6 800 000
6 800 000
6 800 000
6 800 000
6 800 000
6 800 000
Pôle ouest
1 600 000
1 600 000
1 600 000
1 600 000
1 600 000
7 600 000
ZAC de la Roseraie
1 325 000
1 590 000
1 855 000
2 120 000
2 385 000
2 650 000
ZAC des Hauts Saumons
2 340 330
2 340 330
2 340 330
2 340 330
2 340 330
2 340 330
Parc d'Archevilliers
800 000
800 000
800 000
800 000
800 000
800 000
Lotissement Le Plessis 2
0
200 000
200 000
200 000
350 000
350 000
Ilot Courtille
288 000
384 000
480 000
576 000
442 027
538 027
Total des avances pour les concessions (A)
27 823 330
30 694 330
41 865 330
52 978 758
79 089 785
94 217 785
Total des avances pour les portages fonciers (B)
2 049 000
3 498 000
4 968 183
4 970 255
22 854
26 881
Montant total des avances (C = A+B)
29 872 330
34 192 330
46 833 513
57 949 013
79 112 639
94 244 666
Montant total mentionné dans le rapport de
gestion (D)
19 872 330
31 992 330
29 333 512
38 949 012
55 435 638
73 747 666
Écart (E = C - D)
10 000 000
2 200 000
17 500 001
19 000 001
23 677 001
20 497 000
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des
conventions d’avances
et des comptes annuels 2014 à 2019
Aucun remboursement n’est prévu au 31
décembre de l’exercice 2019 pour
87 % du
montant cumulé de ces « avances » (81,8
M€)
. Plus du tiers
d’entre elles (
29,9
M€)
a couru sur
les six années contrôlées et 70 % sur les trois derniers exercices. Ainsi la majorité de ces
montants
paraissent s’assimiler à des prêts plus qu’à des
« facilités de trésorerie ».
Par ailleurs, la société a pu bénéficier d’échéanciers lui permettant de lisser le
remboursement de 10
M€ dus le 31
décembre 2015
jusqu’en décembre
2023 et de 2
M€ dus au
31 décembre 2016
jusqu’au 30
juin 2018. Dans certaines hypothèses, la SPL est libérée par
anticipation de l’obligation de rembourser le prêt consenti. Par exemple, pour une
avance
octroyée dans le cadre de la
concession de l’Îlot Courtille
, la ville de Chartres consent à ce que
l’avance soit «
remboursée par transformation en participation, au rythme de l’acquisition de
cette participation par le concessionnaire ».
Le recours structurel à ces financements est porteur de risques très significatifs pour la
société. Il
génère un aléa moral, préjudiciable à l’amélioration de la gestion et à la recherche
d’efficience
. En acceptant des facilités financières pour des montants conséquents, souvent sans
intérêts ou à des conditions de taux favorables,
la société se dispense d’optimiser sa gestion
de
trésorerie
. Outre sa fragilité au plan juridique, ce financement n’est pas sans risque pour la
conduite du programme aux meilleures conditions de coût.
La chambre rappelle que les avances de trésorerie doivent constituer un soutien
exceptionnel, nécessairement infra-annuel, soumis à intérêts, dont la reconduction ne peut
s’opérer au
-
delà d’un an sans s’assimiler à un prêt ou à un
apport en compte courant.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
60
3.3.2
Les différés de remboursement des « avances » conduisent à reporter le besoin
de financement dans le temps, sans y apporter de réponses structurelles
Les « avances » consenties par la ville de Chartres et Chartres Métropole parviennent à
leur terme majoritairement entre 2022 et 2025, à hauteur de 11,8
M€
.
Échéances des avances de trésorerie
Source : CRC Centre-Val de Loire
à partir des conventions d’avance
Faute de progression nette de ses recettes, la société pourrait se trouver contrainte de
solliciter des prêts pour rembourser ces tombées d’échéances. L’abandon de ces créances et
leur transformation en participation reviendrait à en faire assumer la charge par la collectivité,
en sus de potentiels déficits constatés à la clôture des opérations. Cette situation ne serait pas
sans risques au regard du droit des aides d’État.
Pour prévenir cet écueil, il apparaît
essentiel d’anticiper au mieux l
es tombées
d’échéances
et de disposer d’outils de pilotage
. La trésorerie de la société demeure sous tension
en dépit des soutiens publics, notamment du fait de la croissance de la production stockée.
D’après
une note du commissaire aux comptes, « au 31/12/19 le montant des découverts
bancaires est de 1
385 k€ (1
181 k€ au 31/12/2018)
». La trésorerie nette était négative à hauteur
de 1,1
M€
au 31 décembre 2018 (dont 7,1
M€ pour les opérations d’aménagement). Elle
apparaît excédentaire au 31 décembre 2019, à hauteur de 3,2
M€
. Mais elle serait demeurée
déficitaire, à hauteur de 70,6
M€, en l’absence d’ «
avance des concédants ».
À ce jour la fragmentation du suivi de la trésorerie par opération interdit toute vue
d’ensemble.
Il existe des tableaux consolidés utilisés lors des séances de paiement, établis à
partir d’un
historique
issu du système d’informati
on financier, et une balance analytique des
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
61
comptes bancaires par opération. Ils sont utilisés pour effectuer des rapprochements entre la
comptabilité générale et celle des opérations dans le cadre de l’arrêté des comptes.
Mais, du fait
de leur portée rétr
ospective, ils ne peuvent guère constituer un outil d’anticipation.
Par ailleurs, la présentation consolidée figurant dans les comptes annuels porte sur le
seul exercice considéré. Si les annexes des CRAC présentent des trajectoires pluriannuelles,
celles-ci dépassent rarement 2021. Cette opacité est propice à une « logique du fait accompli »
en matière de financement. Elle permet au concessionnaire de solliciter des « avances » au
concédant au prétexte que le bouclage financier de l’opération retarderait l
a montée en charge
des chantiers. La multiplication des conventions financières rend
plus difficile l’appréciation
des engagements consentis et la chronologie des remboursements.
La
chambre invite l’entreprise à élaborer, dans les meilleurs délais, un plan de trésorerie
pluriannuel, consolidé, tenant compte de la chronologie des tombées d’échéances des
« avances » et du remboursement des autres dettes financières. Cette présentation
d’ensemble
des « avances de trésorerie », des « avances sur participation » et des diverses autres aides
octroyées par les personnes publiques actionnaires pourrait être utilement présentée à l’appui
des rapports des gestion et communiquée en annexe des rapports des administrateurs.
3.4
La SPL pourrait être
confrontée à une situation d’emballement de sa
dette, si ses déséquilibres financiers persistent
La solvabilité de l’entreprise est faible. Les capitaux pro
pres représentent à peine 4 à
5 % des dettes portées au bilan sur la période.
À niveau de charge constant, la production vendue aurait dû être multipliée par deux,
pour générer un autofinancement couvrant le remboursement de la dette en capital en 2019
(13,5
M€
). En raison de la faiblesse des excédents dég
agés par l’activité, u
ne part des soutiens
apportés par les collectivités, notamment leurs « avances », a donc servi
à l’amortissement de
la dette. Cette situation ne saurait se prolonger durablement sans danger pour la société.
Appréciation du risque de reconstitution du capital au sens de
l'article L. 225-248 du code de commerce
Niveau de capitalisation
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Capital social
5 852 000
5 852 000
5 852 000
5 852 000
5 852 000
5 852 000
Capitaux propres
5 337 335
5 798 511
5 917 338
6 018 967
6 128 847
6 399 123
Capitaux propres / Capital social
91 %
99 %
101 %
103 %
105 %
109 %
Source : CRC Centre-Val de Loire à partir des comptes annuels 2014 à 2019
Une recapitalisation « préventive » ne constituerait pas une solution. Elle représenterait
un coût complémentaire pour les collectivités actionnaires, en particulier pour la ville de
Chartres et Chartres Métropole déjà fortement engagées auprès de la société. Par ailleurs elle
serait inutile, si la société demeurait incapable de faire aboutir les programmes de
commercialisation à des conditions de prix raisonnables du fait des charges foncières imposées
par les promoteurs immobiliers. La plupart des concessions ont, en effet, été conclues aux
risques et périls de l’autorité concédante.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
62
Il n’en demeure pas moins que le déficit consolidé des concessions d’aménagement
(hors participations) excède 26 fois le montant des capitaux permanents. Le déficit enregistré
par le plateau nord-est atteint à lui seul 730
% de ce poste du bilan. Il va jusqu’à 850
% pour le
pôle gare.
Une vigilance toute particulière s’impose pour mettre un terme à la spirale
d’endettement qui semble s’amorcer. Eu égard au report d’opérations foncières et à l’incertitude
générée par les suites de la crise sanitaire, le désendettement doit être la priorité.
Toute nouvelle avance des personnes publiques actionnaires doit être dorénavant exclue.
Les reports de remboursement ne doivent être pratiqués
qu’à titre exceptionnel
. La société doit
chercher à susciter la confiance des financeurs et apporter des garanties sur les perspectives de
retour à l’équilibre. À cet effet l’entreprise gagnerait à bâtir un programme de désendettement.
Ce plan aiderait les dirigeants et les actio
nnaires à décider s’il est nécessaire d’accélérer les
ventes sur tel ou tel programme afin de garantir ses équilibres financiers. Il appartient à la
société d’éclairer ses clients sur les opérations pour lesquelles une telle mesure est la plus
appropriée.
Des financements externes ne devraient être mobilisés qu’en dernier recours, sous
réserve que leur remboursement ultérieur par des ressources propres soit garanti.
Le développement de compétences internes en
matière d’ingénierie financière
constituerait un
levier effectif d’amélioration de la gestion. La société doit se garder d’une
approche formelle du contrôle de gestion, se résumant à la tenue de tableaux de bord. Un
pilotage abstrait, sans déclinaison opérationnelle en termes de synchronisation de la trésorerie
ou de prospective, ne serait d’aucun secours pour le redressement de la trajectoire financière.
L’attention portée par la société à la soutenabilité de sa gestion conditionne la pérennité
de son activité et sa capacité à répondre dans la durée aux besoins des actionnaires.
Recommandation n°
3 : Tenir un plan de trésorerie pluriannuel et consolidé
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Affectée par un cycle d’exploitation continument déficitaire et une absence durable de
marges brutes d’autofinancement, Chartres Aménagement se trouve confrontée à un besoin de
financement croissant qu’elle comble, dans l’urgence, par des prêts contractés
auprès des
actionnaires. Cette situation s’étant réitérée chaque exercice depuis 2014, la société
pourrait
être confrontée à
un risque d’emballement de la dette
.
Pour mettre un terme à la dégradation de ses équilibres financiers, la société doit
retrouver
des marges de manœuvre sur son cycle d’exploitation. À cet effet, il lui revient de
développer un suivi des coûts pour procéder à une revue des dépenses et de réajuster sans
tarder le programme prévisionnel des recettes du pôle gare, de plateau nord-est et de pôle
ouest. De plus il est essentiel que la société élabore un plan de trésorerie pluriannuel et
consolidé, synchronisant les tombées d’échéances avec le recouvrement des prod
uits. Celui-ci
devra reposer sur un calendrier des recettes fiabilisé et réaliste.
À partir de ces projections, l’entreprise serait à même de bâtir un programme de
désendettement. Celui-
ci lui permettrait d’anticiper ses besoins de financement et d’identifier
les possibilités de réduction de ses dettes. Le renforcement de la fonction contrôle de gestion et
des compétences internes en matière d’ingénierie financière serait également de nature à
garantir le rétablissement d’une trajectoire soutenable.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
63
4
DES CHOIX DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES QUI
FRAGILISENT LE FONCTIONNEMENT DE LA SOCIÉTÉ
4.1
La SPL supporte un niveau de dépenses de personnel proche d’autres
entreprises du secteur, mais se distingue par la structure de ses effectifs
4.1.1
La société ne s’écarte pas des références du secteur en ce qui concerne le poids
des rémunérations, leur évolution et leur distribution
Les charges
de personnel s’élèvent
à 1,56
M€ en 2019, dont 1,06
M€
pour les salaires
bruts et 0,50
M€ pour les charges sociales patronales.
De 2014 à 2019, ce poste oscille entre
4,5 et 7,2 %
de l’ensemble des charges d
u compte de résultat, ce qui est inférieur aux moyennes
constatées
par l’INSEE dans l’é
laboration des statistiques annuelles d'entreprise (plus de 10 %
en 2017). Un effort particulier est constaté en 2019.
Poids des dépenses de personnel
Montants en euros
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
annuelle
moyenne
Rémunérations du personnel
906 711
892 580
1 153 272
1 117 333
1 081 774
959 825
1,1 %
dont salaire brut annuel
901 586
873 593
1 093 067
1 037 013
1 031 238
1 061 692
3,3 %
- salaires et
appointements
898 218
866 916
1 084 294
1 028 969
1 021 204
1 050 113
3,2 %
- avantages en nature
3 368
6 676
8 774
8 044
10 035
11 579
28,0 %
dont prov. sur congés payés
5 125
18 987
14 397
-3 560
12 418
8 154
9,7 %
dont primes et
gratifications
45 808
83 880
38 118
-110 021
-
Charges sociales
465 209
396 087
512 409
490 696
477 612
502 744
1,6 %
Total des charges
au compte de résultat
28 058 326
22 727 469
34 959 024
35 889 058
21 624 648
37 348 807
5,9 %
part dépenses de personnel
4,9 %
5,7 %
4,8 %
4,5 %
7,2 %
3,9 %
-
Compte 60500000 :
Achats Matériel, travaux
26 081 456
20 892 643
32 368 082
33 017 512
19 151 122
34 516 795
5,8 %
Total des charges
(hors compte 60500000)
1 976 870
1 834 827
2 590 942
2 871 546
2 473 526
2 832 012
7,5 %
part dépenses de personnel
69,4 %
70,2 %
64,3 %
56,0 %
63,0 %
51,6 %
-
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après les
comptes annuels des exercices 2014 à 2019
Entre 2014 et 2019, les dépenses de rémunérations présentent une variation annuelle
moyenne de 1,1 %. Cette évolution est inférieure à celle
de l’indice des salaires des activités
immobilières
19
(1,5 %).
Les effectifs de la société sont demeurés constants entre 2014 et 2018. Selon les
exercices, la société compte entre 30 et 32 salariés. L
’effectif en
équivalent temps plein (ETP)
19
Le taux est calculé en rapportant le dernier indice connu pour les salaires mensuels de base des « activités
immobilières (NAF rév. 2, niveau A17 LZ) » au même indice des salaires mensuels mesuré en début de période.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
64
est de 18,84 en 2019 contre 18,91 en 2014. Ces chiffres masquent toutefois une augmentation,
suivie d’
une diminution des heures travaillées (38 767 en 2016 contre 34 426 et 34 297 en 2014
et 2019), liées aux variations des temps non complets.
Par ailleurs le coût annuel total
d’un ETP est passé de 72
279
€ à 83
038
€, soit en
moyenne + 2,8 % par an.
Évolution des effectifs et des dépenses de personnel interne
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
annuelle
moyenne
Nombre de salariés
32
30
32
31
31
32
0,0 %
Total des heures travaillées (HT)
34 426
32 668
38 767
35 324
36 009
34 297
-0,1 %
Total des heures de présence (HP)
35 590
34 893
39 484
36 115
37 772
35 599
0,0 %
rapport HT/HP
96,7 %
93,6 %
98,2 %
97,8 %
95,3 %
96,3 %
-
Nombre d’ETP annuel
18,91
17,95
21,30
19,41
19,78
18,84
-0,1 %
Salaire brut + charges sociales
(en euros)
1 366
795
1 269 680
1 605 476
1 527 710
1 508 851
1 564 436
2,7 %
Coût annuel d'un ETP (en euros)
72 279
70 734
75 374
78 707
76 282
83 038
2,8 %
dont salaire brut
47 678
48 668
51 318
53 427
52 135
56 353
3,4 %
dont charges sociales
24 601
22 066
24 057
25 281
24 146
26 685
1,6 %
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après les livres de paie et les comptes annuels
Sur la période 2014-2019, les
hauts cadres, c’est
-à-dire le PDG et les cadres dont les
fonctions sont définies par référence au niveau maximal de la convention collective,
représentent un quart des effectifs.
Répartition du salaire brut
(hors avantages en nature)
sur la période 2014-2019
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après les livres de paie
La distribution des rémunérations a connu un rééquilibrage sur la période. Alors que,
pour les autres salariés, la part du salaire annuel brut
s’accroit de 1
2,1 %
, celle de l’équipe
encadrante diminue de 8,7 %.
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
65
Évolution comparée du salaire annuel brut des deux groupes d’effectifs
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après les livres de paie
L’écart entre le salaire le moins élevé de l’entreprise et celui du directeur général, de
l’ordre de 1 à 8, est conforme aux références du secteur privé.
4.1.2
La SPL accueille, parmi ses cadres dirigeants, des agents des collectivités
actionnaires « en temps partagé
» ou d’anciens cadres publics de haut niveau
Certains des salariés de Chartres Aménagement sont employés « en temps partagé »
avec la ville, Chartres Métropole ou la SEM Chartres développement immobilier.
Répartition en ETP et salaire brut annuel des effectifs de la société
entre les postes « en temps partagé » et ceux qui ne le sont pas
Source : CRC Centre-Val de Loire
d’après les organigrammes successifs et les livres de paie
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
66
Les cadres de niveau V cumulent plus souvent leur emploi dans la SPL avec un autre
poste que les autres salariés. Ils sont 59 % à occuper des postes « en temps partagé » contre
41 % pour les autres niveaux.
4.2
Le recrutement d’
agents publics « en temps partagé » et
d’anciens
cadres publics de haut niveau emporte un risque de confusion entre
l’intérêt social de la société et les finalités
des collectivités actionnaires
Au sein de Chartres Aménagement, des emplois sont pourvus par des agents publics ou
par d’anciens fonctionnaires. Certains ont été mis à disposition par leur employeur public.
D’autres ont été recrutés sous le régime du cumul d’emplois. Enfin, pour deux
salariés, le
recrutement par la société est intervenu immédiatement après la cessation de leur fonction dans
la sphère publique.
Sans être proscrites, ces situations sont strictement encadrées. Elles doivent répondre à
l’intérêt social de l’entreprise et ne pas l’exposer à des risques juridiques préjudiciables à son
fonctionnement.
Synthèse des situations d’emploi d’agents publics ou anciens agents publics
Source : CRC Centre-Val de Loire
Légende :
SOCIÉTÉ PUBLIQUE LOCALE CHARTRES AMÉNAGEMENT
67
4.2.1
Le
recrutement d’agents publics par une société publique locale est soumis à
des règles visant à préserver ses intérêts et son objet statutaire
Des fonctionnaires peuvent être mis à disposition d’une SPL sous réserve du
respect des conditions garantissant la
sécurisation de l’activité
La mise à disposition des fonctionnaires
auprès d’une entité de droit privé est possible
.
Mais elle doit répondre à certaines conditions prévues par les articles 61 à 63 de la loi du
26 janvier 1984 ainsi que par le décret du 18 juin 2008 pour les agents relevant de la fonction
publique territoriale
Le fonctionnaire mis à disposition demeure dans son cadre d'emplois ou corps d'origine.
Il continue à percevoir la rémunération correspondante, mais exerce ses fonctions hors du
service où il a vocation à servir. La mise à disposition est prononcée par arrêté de l'autorité
territoriale investie du pouvoir de nomination, après accord du fonctionnaire concerné et de
l’organisme d'accueil. Elle se matérialise par une convention dont la du
rée ne peut excéder trois
ans. Outre la nature des activités exercées, les conditions d'emploi, les modalités du contrôle et
de l'évaluation des activités, la convention de mise à disposition précise les missions de service
public confiées à l'agent.
L’art
icle 61-1 de la loi portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale prévoit que la mise à disposition
au profit d’
une société anonyme
n’est possible
que
pour «
des organismes contribuant à la mise en œuvre d'une politique […]
des collectivités
territoriales […] pour l'exercice des seules missions de service public confiées à ces
organismes ».
L'organisme d'accueil doit rembourser à la collectivité territoriale ou à l'établissement
public d'origine la rémunération du fonctionnaire mis à disposition. Ce remboursement
comprend également les cotisations et contributions y afférentes, ainsi que diverses autres
charges (congés de maladi
e, de formation). L’absence de remboursement des salaires prévus
par la convention de mise à disposition peut s’analyser comme une aide indirecte de la personne
publique
Le décret du 18 juin 2008 relatif au régime de la mise à disposition
prévoit qu’
un
« éventuel complément de rémunération dûment justifié » peut-être
versé par l’organisme
d’accueil. L
a convention doit alors préciser la nature du complément de rémunération dont peut
bénéficier le fonctionnaire mis à disposition. Celui-ci doit être versé « selon les règles
applicables aux personnels exerçant leurs fonctions dans l'organisme d'accueil ». De même le
contrat de travail
établi par l’entreprise pour l’agent
mis à disposition doit préciser les éventuels
compléments de rémunération versés. Ceux-ci sont soumis aux cotisations et contributions de
sécurité sociale dans les conditions de droit commun du régime général, y compris les
contributions d’assurance chôm
age et de garantie des salaires.
L
’article 10 du décret
précité dispose que « les agents mis à disposition sont soumis aux
obligations qui en résultent pour les fonctions exercées dans le cadre de leur mise à
disposition ». En vertu des articles 25 et 25 bis de la loi du 13 juillet 1983, le fonctionnaire doit
exercer ses fonctions avec impartialité et neutralité vis-à-vis de toutes les entreprises privées. Il
doit faire cesser ou prévenir toutes les situations de conflit d’intérêts dans lesquels il pourrait
se trouver.
La commission de déontologie peut être amenée à apprécier préalablement la
compat
ibilité entre les fonctions précédemment exercées par l’agent et celles qu’il est amené à
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
68
exercer. Ainsi, «
saisie de l’application de ces dispositions à la situation de l’agent d’un syndicat
mixte mis partiellement à la disposition d’une société d’économi
e mixte (SEM) dont le syndicat
était l’associé majoritaire, la commission de déontologie a estimé que l’agent serait
nécessairement placé dans une situation de conflit d’intérêts si, dans le cadre de ses fonctions
au sein du syndicat, il était amené à prendre parti sur la situation ou sur des opérations
intéressant la SEM, ou bien si, dans le cadre de ses fonctions exercées au sein de la SEM, il
était conduit à prendre des décisions ou à formuler des avis sur des opérations mettant en cause
le syndicat. Dan
s ce contexte, la commission a donc recommandé au syndicat de retirer à l’agent
toutes les fonctions susceptibles de le placer dans une situation d’interférence entre les intérêts
de ce syndicat et de la SEM. En outre, et de manière générale, elle a rappel
é qu’il appartiendrait
à l’agent de mettre en œuvre les prescriptions du II de l’article
25 bis de la loi du 13 juillet 1983
dans tous les cas où il estimerait se trouver en situation de conflit d’intérêts du fait de sa double
affectation (Rec. n° 17REC004 du 25 juillet 2017)
20
. »
Au-
delà des mesures conservatoires qui relèvent de l’employeur, l’organisme d’accueil
doit lui-
même veiller à la définition des missions confiées à l’agent mis à disposition. La
multiplication de situations constitutives de conflit
s d’intérêts pourrait conduire l’agent à se
déporter ou à s’abstenir d’effectuer les tâches demandées, au risque de paralyser le
fonctionnement de la société. Faute de s’abstenir des décisions litigieuses, il pourrait exposer
la société ou ses dirigeants à
des risques juridiques significatifs, s’il s’avère que leur négligence
a concouru à une atteinte à la probité ou au manquement à tout autre règle d’ordre public.
La sécurisation des conditions d’exercices de fonctionnaires locaux mis à disposition
n’est donc pas seulement l’affaire de l’employeur public. Elle est tout aussi importante pour
l’entreprise qui accueille le fonctionnaire mis à disposition. Ce cadrage lui permet de s’assurer
que l’intéressé agit bien au service de l’intérêt social de la société
et ne fait pas primer d’autres
finalités préjudiciables à sa situation financière ou patrimoniale.
Le recrutement d’agents publics, hors mise à disposition, n’est possible qu’au
titre d’activités accessoires compatibles avec leurs obligations statutaires
En l’absence de convention de mise à disposition, le recrutement d’un agent public,
titulaire ou contractuel, par une SPL est possible sous réserve que l’activité soit exercée à temps
non complet, sans participation aux organes de direction de la société.
Aux termes de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations
des fonctionnaires, « le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux
tâches qui lui sont confiées. […] Il est interdit au fonctionnaire : […] 2° De participer aux
organes de direction de sociétés […] à but lucratif ; […] 4° De prendre ou de détenir,
directement ou par personnes interposées, dans une entreprise soumise au contrôle de
l'administration à laquelle il appartient ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature
à compromettre son indépendance. […] 5° De cumuler un emploi permanent à temps complet
avec un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet. […]»
L
a possibilité pour l’agent de cumuler son activité
principale avec une activité
accessoire, lucrative ou non, auprès d'un organisme privé
n’est possible qu’à titre dérogatoire
.
Elle ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du
service ou ne pas mettre l'intéressé en situation de méconnaître l'article 432-12 du code pénal.
20
Rapport 2017 de la commission de déontologie de la fonction publique (p. 64).