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SEPTIÈME CHAMBRE
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Deuxième section
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Arrêt n° S-2022-2157
Audience publique du 15 décembre 2022
Prononcé du 23 décembre 2022
INSTITUT DE FRANCE
DOMAINE DE CHANTILLY
Exercices 2017 à 2019
Rapport n° R-2022-1069-1
République française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu
le
réquisitoire
n° 2022-22
du
4 mai 2022,
par
lequel
la
Procureure générale
près la Cour des comptes a saisi la Cour de charges soulevées à l’encontre
de
Mme X,
comptable
du
domaine
de
Chantilly,
au
titre
des
exercices
2017
à 2019, notifié le 31 mai 2022 à l’intéressée ;
Vu
les
comptes
rendus
en
qualité
de
comptable
du
domaine
de
Chantilly,
par Mme X, du 1
er
janvier 2017 au 31 décembre 2019 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires,
notamment son article 9 dans sa version en vigueur au moment des faits ;
Vu les lois et règlements applicables à l’organisme, qui a le statut de fondation abritée
de l’Institut de France, notamment les articles 35 à 38 de la loi n° 2006-450 du 18 avril 2006
de programme pour la recherche ;
Vu le décret n° 64-685 du 2 juillet 1964 modifié relatif à la constitution et à la libération
du cautionnement exigé des comptables publics ;
Vu les décrets n° 2007-811 du 11 mai 2007 et n° 2017-846 du 9 mai 2017 ayant approuvé,
puis modifié le règlement financier de l’Institut de France et des académies, en vigueur
au moment des faits ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
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Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90
de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le décret du 10 août 2005 portant reconnaissance de la fondation dite « Fondation pour
la sauvegarde et le développement du domaine de Chantilly » (FSDC) comme établissement
d’utilité publique ;
Vu l’arrêté interministériel du 16 novembre 1961 portant règles d’administration financière
et comptable du domaine de Chantilly (Institut de France), en vigueur jusqu’à son abrogation
par le décret n° 2020-339 du 24 mars 2020 portant approbation du règlement financier
du domaine de Chantilly (Fondation d’Aumale), entré en vigueur le 1
er
juillet 2020 ;
Vu les arrêtés des 13 avril 2016 et 31 janvier 2018 fixant la liste des pièces justificatives
des dépenses des organismes soumis au titre III du décret du 7 novembre 2012 susvisé,
successivement en vigueur au moment des faits ;
Vu la convention du 14 décembre 2005, par laquelle l’Institut de France a confié à la FSDC,
pour une durée de 20 ans, la restauration du château de Chantilly et de ses dépendances,
en vigueur au moment des faits ;
Vu le rapport n° R-2022-1069-1 à fin d’arrêt de Mme Catherine PAILOT-BONNÉTAT,
conseillère maître, magistrate chargée de l’instruction ;
Vu
les
observations
produites
les
12
et
13
décembre
2022
par
Mme X
après la clôture de l’instruction ;
Vu les conclusions n° 671 du Procureur général du 14 décembre 2022 ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 15 décembre 2022, Mme PAILOT-BONNÉTAT,
conseillère maître, en son rapport, M. Benoît GUÉRIN, avocat général, en les conclusions
du ministère public, les autres parties informées de l’audience n’étant ni présentes,
ni représentées ;
Entendu
en
délibéré
de
M. Jean-François GUILLOT,
conseiller
maître,
réviseur,
en ses observations ;
Sur le droit applicable aux charges n° 1 à n° 4 relatives à des dépenses
Sur le droit applicable en matière de responsabilité des comptables
1. Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles
qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine
dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique
» ;
que leur responsabilité se trouve engagée dès lors notamment «
qu’une dépense
a été irrégulièrement payée
» ;
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Sur le droit applicable au domaine de Chantilly
2. Attendu qu’aux termes de l’article 3 du règlement financier de l’Institut de France
et des académies, approuvé puis modifié par les décrets des 11 mai 2007 et 9 mai 2017
susvisés, «
Le règlement financier particulier du domaine et de la Fondation de Chantilly
est défini, après avis de la commission administrative centrale, par délibération
de l’Assemblée générale approuvée par décret en Conseil d’État
» ; qu’au moment des faits,
ce règlement financier particulier était celui fixé par l’arrêté du 16 novembre 1961 susvisé ;
qu’aux termes de son article 1
er,
, «
Sous réserve des dispositions particulières prévues
au présent arrêté, l’administration financière et comptable du domaine de Chantilly
est effectuée dans les conditions définies par le décret n° 53-1227 du 10 décembre 1953
» ;
3. Attendu qu’aux termes de l’article 2 du même règlement financier particulier du domaine
de Chantilly, «
L’administrateur, ordonnateur des recettes et des dépenses du domaine,
et l’agent comptable sont désignés par la commission administrative centrale de l’Institut
de France, sur proposition de la sous-commission déléguée par celle-ci pour la gestion
du domaine.
/ La nomination de l’agent comptable est soumise à l’agrément du ministre
des finances
» ;
4. Attendu que le décret du 10 décembre 1953 précité a été abrogé par le décret n° 62-1587
du
29 décembre 1962
portant
règlement
général
sur
la
comptabilité
publique,
lui-même remplacé, à compter du 1
er
janvier 2013, par le décret du 7 novembre 2012 susvisé ;
qu’au moment des faits, les dispositions de ce décret s’étaient substituées à celles du décret
du 10 décembre 1953 visées par le règlement financier particulier du domaine de Chantilly ;
Sur le droit applicable en matière de responsabilité des comptables publics
5. Attendu
qu’aux
termes
de
l’article 17
du
décret
du
7 novembre 2012
susvisé,
«
Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes
et contrôles qui leur incombent en application des dispositions des articles 18, 19 et 20,
dans les conditions fixées par l’article 60 de la loi du 23 février 1963
» ;
6. Attendu qu’aux termes de l’article 18 du même décret, «
Dans le poste comptable
qu’il dirige, le comptable public est seul chargé : [...]
4° De la prise en charge des ordres [...]
de payer qui lui sont remis par les ordonnateurs ; [...]
7
° Du paiement des dépenses,
soit sur ordre émanant des ordonnateurs, soit au vu des titres présentés par les créanciers,
soit
de
leur
propre
initiative
» ;
qu’aux
termes
de
l’article
19
du
même
texte,
«
Le comptable public est tenu d’exercer le contrôle :
[...]
2° S’agissant des ordres de payer :
[...]
d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à l’article 20
» ; qu’aux termes
de cet article, «
Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur : [...]
2° L’exactitude de la liquidation ; 3° La production des pièces justificatives
», notamment ;
7. Attendu qu’aux termes de l’article 38 du même décret, lorsque le comptable public
«
a constaté des irrégularités ou des inexactitudes dans les certifications de l’ordonnateur,
il suspend le paiement et en informe l’ordonnateur
» ;
Sur le droit applicable en matière de production des pièces justificatives
8. Attendu
qu’aux
termes
de
l’article 50
du
décret
du
7 novembre 2012
susvisé,
« L
es opérations de recettes, de dépenses et de trésorerie doivent être justifiées
par des pièces prévues dans des nomenclatures établies […] par arrêté du ministre chargé
du budget […]. / Lorsqu’une opération de dépense n’a pas été prévue par une nomenclature
mentionnée
ci-dessus,
doivent
être
produites
des
pièces
justificatives
permettant
au comptable d’opérer les contrôles mentionnés aux articles 19 et 20
» ;
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9. Attendu que, pour les organismes soumis au titre III du décret du 7 novembre 2012 susvisé
la nomenclature n’a été établie que par l’arrêté du 13 avril 2016 susvisé publié
au
Journal officiel
de la République française (JORF) le 22 avril 2016, puis modifié
par un arrêté du 10 octobre 2016, avant d’être abrogé par l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé,
publié au JORF le 20 février 2018 ;
Sur les éléments de contexte
10. Attendu que dans une «
note relative aux responsabilités de l’administrateur du domaine
de Chantilly comme ordonnateur
principal
des recettes et des dépenses de 2008 à 2020
»,
du 8 juin 2022 dudit administrateur, versée au dossier par la comptable, celui-ci rappelle que
«
Jusqu’à l’entrée en application du décret n° 2020-339 du 24 mars 2020 portant approbation
du règlement financier du domaine de Chantilly, celui-ci fonctionnait selon les prescriptions
de l’arrêté du 16 novembre 1961
[aux termes desquelles]
l’administrateur était "ordonnateur
des recettes et dépenses"
» ; qu’il indique ensuite qu’il bénéficiait d’une large autonomie
et rendait compte de sa gestion, au minimum deux fois par an, à la sous-commission déléguée
par la commission administrative centrale de l’Institut de France pour la gestion du domaine
selon le règlement financier particulier de celui-ci précité ;
11. Attendu qu’il précise que cette sous-commission, qui jouait le rôle d’un conseil
d’administration,
approuvait
le
budget
annuel,
un
éventuel
budget
rectificatif
ainsi que les comptes annuels ; que l’accord de cette sous-commission était également
sollicité pour les décisions importantes, en particulier les baux d’une durée supérieure
à neuf ans et les marchés publics, et que ses décisions étaient ensuite approuvées
par la commission administrative centrale de l’Institut de France ; qu’en revanche
toutes les décisions « courantes » relevaient, sans aucune délégation de signature provenant
de l’Institut, de l’administrateur-ordonnateur qui signait, sans délégation à quiconque,
tous les engagements de dépenses et certifiait le service fait ; qu’il ajoute que le comptable
public assurait le paiement des dépenses et que la séparation des fonctions entre ordonnateur
et comptable était ainsi strictement respectée ;
Sur la charge n° 1, soulevée à l’encontre de Mme X, au titre des exercices
2018 et 2019
12. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, la Procureure générale a saisi la Cour des comptes
de la responsabilité encourue, au titre des exercices 2018 et 2019, par Mme X
à raison du défaut de contrôle de la validité de la dette lors du remboursement de frais
d’assurance et de cautionnement à son profit, à hauteur de 302,53 € en 2018 et 314,46 €
en 2019, sur décision de l’ordonnateur du 9 novembre 2017 ; que cette décision ne fait pas
référence aux textes réglementaires permettant la prise en charge de cette dépense ;
que celle-ci a été imputée au compte 616 « primes d’assurance », alors que ce compte
n’a pas pour objet de prendre en charge des dépenses d’assurance et autres cotisation
à titre personnel ; que selon le décret du 2 juillet 1964 modifié susvisé, les frais
de cautionnement sont des charges personnelles des comptables et que la souscription
d’une assurance du risque pécuniaire des comptables publics est une démarche personnelle ;
Sur les éléments apportés à décharge par la comptable
13. Attendu que la comptable fait valoir que depuis le 1
er
janvier 2006 sa mission était double,
à savoir assurer «
simultanément mais de façon […] étanche
» la comptabilité de la partie
du domaine de Chantilly dont l’Institut de France conservait la gestion, et la comptabilité privée
de la FSDC, avec laquelle l’Institut de France avait conclu la convention du 14 décembre 2005
susvisée ; que la FSDC ne voulait pas rémunérer cette tâche alors que, de son côté, l’Institut
ne pouvait pas la prendre en charge car la comptable ne figurait plus dans ses effectifs,
ayant été «
mise à disposition
» du domaine de Chantilly ;
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14. Attendu qu’elle ajoute que la solution trouvée par l’administrateur du domaine de Chantilly
a été de prendre en charge la dépense, ce qui assurait à la comptable «
un petit bonus
financier de 330 € par an
» ; qu’elle produit la note que l’administrateur a signée,
le
9 novembre 2017,
pour
organiser
le
remboursement
des
frais
d’assurance
et de cautionnement professionnel de la comptable par le budget du domaine
«
à compter de l’année 2018
» ; qu’elle reconnaît «
le côté
délicat
du remboursement
»
et demande à la Cour «
la plus grande mansuétude à ce sujet
» ;
15. Attendu que la comptable souligne par ailleurs qu’elle aurait eu ensuite «
toutes les peines
du monde
» à trouver un accord sur son solde de tout compte au moment de son départ
du domaine de Chantilly, et qu’un montant d’environ 10 000 € lui serait encore dû ;
Sur le droit applicable
16. Attendu que les articles 2 et 6 du décret du 2 juillet 1964 susvisé prévoient respectivement
que «
Le cautionnement est constitué par un dépôt de numéraire, de rentes sur l’État
ou d’autres valeurs du trésor. / Il peut être remplacé par l’engagement d’une caution solidaire
constituée par l’affiliation du comptable à une association de cautionnement mutuel agréée
par le ministre chargé du budget
», et que «
Les frais de constitution et de conservation
des garanties sont une charge personnelle des comptables
» ;
Sur les faits
17. Attendu que selon la note envoyée par l’administrateur du domaine de Chantilly
à la comptable le 9 novembre 2017, «
à compter de l’année 2018, les frais d’assurance
et de cautionnement professionnel de
[l’intéressée]
seront pris en charge par le budget
du domaine de Chantilly
» ; que ces frais lui ont été remboursés pour les montants
visés par le réquisitoire, soit 302,53 € en 2018 et 314,46 € en 2019, par mandats n° 612
du
31 octobre 2018,
payé
le
même
jour,
et
n° 548
du
31 octobre 2019,
payé
le 8 novembre 2019 ;
Sur l’existence d’un manquement
18. Attendu que, dans le cadre du contrôle de la validité de la dette, il appartient au comptable
public de vérifier, en premier lieu, si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable lui a été fourni et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d’une part,
complètes et précises et, d’autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense ;
que si ce contrôle peut conduire le comptable à porter une appréciation juridique sur les actes
administratifs à l’origine de la dette et s’il lui appartient alors d’en donner une interprétation
conforme à la réglementation en vigueur, il n’a pas le pouvoir de se faire juge de leur légalité ;
que si les pièces justificatives fournies sont insuffisantes pour établir la validité de la dette,
il appartient au comptable de suspendre le paiement jusqu’à ce que l’ordonnateur lui ait produit
les justifications ou les attestations nécessaires ;
19. Attendu que la comptable reconnaît que le domaine de Chantilly a pris en charge
une dépense personnelle reconductible, éventuellement due par un organisme privé
qui n’a toutefois pas voulu l’exposer ; que le domaine de Chantilly n’a pas respecté le principe
de spécialité en prenant en charge une dépense doublement privée, au regard
tant du créancier que du débiteur ; que le compte 616 « primes d’assurance » n’a pas
pour objet de prendre en charge des dépenses d’assurance et autres cotisations à caractère
personnel, lesquelles, par nature, sont dépourvues d’intérêt public ;
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20. Attendu, à supposer que les montants remboursés soient assimilés à des compléments
indemnitaires de rémunération, que la comptable aurait dû disposer au moment du paiement,
selon l’article 3.6 de l’annexe à l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé, des documents suivants :
- «
1. Décision
individuelle
ou
collective
d’attribution
»,
précision
étant
faite
que cette décision «
doit être suffisamment détaillée pour permettre à l’agent comptable
de vérifier l’exacte application du texte en vigueur
» ;
- «
2. État liquidatif et nominatif faisant référence au texte institutif de l’indemnité
et à l’arrêté fixant le(s) taux en vigueur
», étant précisé que cet état, signé
par
le
gestionnaire
de
personnel,
peut
valoir
décision
d’attribution
et
que
«
Sur les documents communiqués au comptable figurent le libellé exact de l’indemnité
et l’imputation budgétaire et comptable
» ;
- «
3. Pour les agents contractuels : mention au contrat
» ;
21. Attendu qu’au moment des paiements, la comptable disposait de la seule note
de l’administrateur mentionnée au point 17, aucun état liquidatif et nominatif n’ayant été établi
annuellement ; que la note de l’administrateur ne vise aucun texte législatif ou réglementaire,
voire contractuel ; qu’au demeurant, le contrat de l’intéressée ne prévoyait pas la prise
en charge des frais litigieux par le domaine de Chantilly ;
22. Attendu que, confrontée à des pièces justificatives insuffisantes, voire incohérentes
au regard de la nature de la dépense, la comptable aurait dû suspendre le paiement
et en informer l’ordonnateur, en application des dispositions de l’article 38 du décret
du
7 novembre 2012
susvisé ;
que
faute
de
l’avoir
fait,
Mme X
a
manqué
à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; qu’il y a donc lieu de mettre
en jeu sa responsabilité au titre des exercices 2018 et 2019, à hauteur des montants payés
au cours de ces exercices ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
23. Attendu que, pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable
public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge
des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à laquelle il statue,
si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait permis d’éviter
que soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due ; que lorsque le manquement
du comptable porte sur le contrôle de la production des pièces justificatives requises,
ce manquement doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice
financier à l’organisme public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris
d’éléments postérieurs au manquement en cause, que la dépense repose sur les fondements
juridiques dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la nomenclature,
que l’ordonnateur a voulu l’exposer et, le cas échéant, que le service a été fait ;
24. Attendu que s’il n’y a pas de doute sur le service fait et la volonté de l’ordonnateur
d’exposer la dépense, celle-ci était, en revanche, dépourvue de fondement juridique
et donc indue ; qu’ainsi le manquement de la comptable a causé un préjudice financier,
au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi
du 23 février 1963 susvisée, au domaine de Chantilly ;
25. Attendu qu’aux termes du même article, «
Lorsque le manquement du comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable a l’obligation
de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
» ;
qu’ainsi il y a lieu de constituer Mme X débitrice envers le domaine de Chantilly
pour les sommes de 302,53 € au titre de l’exercice 2018 et de 314,46 € au titre
de l’exercice 2019 ;
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26. Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce
cette date est le 31 mai 2022, date de réception du réquisitoire par Mme X ;
Sur la charge n° 2, soulevée à l’encontre de Mme X, au titre de l’exercice 2019
27. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, la Procureure générale a saisi la Cour des comptes
de la responsabilité encourue, au titre de l’exercice 2019, par Mme X à raison
du défaut de contrôle de la validité de la dette lors du remboursement à l’administrateur
d’un montant total de 803,28 € correspondant à l’achat de boissons destinées, d’une part,
au dédommagement d’une locataire du domaine, ce qui conférerait un caractère personnel
à cette dépense, et, d’autre part, à un cocktail, alors que ni l’objet de la réception ni les invités
ne sont mentionnés sur les pièces produites qui n’incluent pas non plus une délibération
autorisant l’administrateur à prendre à sa charge certaines dépenses du domaine pour ensuite
se les faire rembourser ;
Sur les éléments apportés à décharge par la comptable
28. Attendu que, au sujet du dédommagement de la locataire, la comptable rappelle
que la maison, objet de la location, était restée inhabitée pendant 15 ans et avait fait l’objet
d’une restauration complète avant la conclusion du bail ; qu’elle fait ensuite valoir que,
durant les deux premiers mois dans les lieux, la locataire «
a dû supporter de nombreuses
difficultés
», notamment un dysfonctionnement du système de chauffage et une perturbation
de l’alimentation en eau, et qu’elle «
aurait pu demander une remise de loyer
(3 000 € par mois)
» ; qu’elle ajoute que «
c’est dans le cadre de relations très courtoises
qu’il a été décidé de lui offrir une caisse de champagne (178,70 €) en guise de tout
dédommagement
» et que la locataire «
a ainsi renoncé à tout recours
» ;
29. Attendu, s’agissant des boissons destinées au cocktail, que la comptable précise
qu’il s’agit de la réception habituelle de fin d’année 2018 de l’administrateur qui réunit environ
80 personnes, et a pour but de «
rassembler et remercier toutes les personnes […] ayant rendu
service au cours de l’année
» ; que le traiteur accordait un tarif privilégié compte tenu
de ses liens avec la FSDC et qu’afin de diminuer le coût de la prestation, l’administrateur
achetait lui-même les bouteilles d’alcool et demandait ensuite le remboursement
des seules bouteilles consommées, soit 60,40 € pour deux bouteilles de whisky et 563,18 €
pour 29 bouteilles de champagne en l’espèce ;
Sur le droit applicable
30. Attendu que l’article 2.9.2 «
Remboursement à l’agent public organisateur de la réception
s’il a fait l’avance des fonds
» de l’annexe à l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé prévoit
la production à l’agent comptable des pièces suivantes : «
Facture détaillée acquittée,
ou déclaration de frais produite par l’organisateur de la réception
» ; que le commentaire
associé précise que cette déclaration doit mentionner la nature de la réception, sa date,
le relevé des frais exposés et le montant global ;
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Sur les faits
31. Attendu qu’un montant de 849,68 € a été remboursé, le 16 janvier 2019, à l’administrateur
par mandat n° 789 du 11 janvier 2019 qui comprend, outre les frais de réception en cause,
un billet de train de 4,40 € et un déjeuner de 42 € ; que le mandat porte en objet
«
frais de cocktail du 14 décembre 2018
», mais ne vise pas le dédommagement de la locataire
du domaine ;
32. Attendu que la demande de remboursement de l’administrateur récapitule les paiements
qu’il a effectués pour le cocktail du 14 décembre 2018 ; que la demande est assortie
de la photocopie du ticket de caisse retraçant l’achat de trois bouteilles de whisky
(valeur 90,60 €), dont il a été demandé le remboursement de deux seulement pour un montant
de 60,40 €, ainsi que de la facture d’achat de 41 bouteilles de champagne pour un total de
815,86 €, sur laquelle une mention manuscrite indique que 29 bouteilles ont été consommées
et remboursées au tarif de 19,42 € la bouteille, soit au total 563,18 € ;
33. Attendu que, s’agissant du dédommagement de la locataire, la comptable fournit
la photocopie d’un ticket de caisse accompagné d’une facturette de carte bleue pour l’achat
de six bouteilles de champagne d’un montant unitaire de 29,95 €, soit un montant total
de 179,70 € ; qu’aux termes du bail prenant effet le 29 octobre 2018 pour l’occupation
de la maison en cause, «
les lieux sont loués dans l’état où ils se trouvent à la signature
des présentes et il sera procédé à un état des lieux contradictoire
» et que le locataire est
«
tenu de signaler tout état de fait apparent dans les lieux loués qui nécessiterait
une réparation incombant au bailleur
», mais qu’aucun dédommagement spécifique
n’est toutefois prévu dans ce cas ;
Sur l’existence d’un manquement
34. Attendu que, dans le cadre du contrôle de la validité de la dette, il appartient au comptable
public de vérifier, en premier lieu, si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable lui a été fourni et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d’une part,
complètes et précises et, d’autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense ;
que si ce contrôle peut conduire le comptable à porter une appréciation juridique sur les actes
administratifs à l’origine de la dette et s’il lui appartient alors d’en donner une interprétation
conforme à la réglementation en vigueur, il n’a pas le pouvoir de se faire juge de leur légalité ;
que si les pièces justificatives fournies sont insuffisantes pour établir la validité de la dette,
il appartient au comptable de suspendre le paiement jusqu’à ce que l’ordonnateur lui ait produit
les justifications ou les attestations nécessaires ;
35. Attendu, au sujet des dépenses liées à la réception de fin d’année 2018, que la comptable
disposait à la fois d’une demande de remboursement de l’ordonnateur mentionnant
expressément le cocktail du 14 décembre 2018, les frais exposés pour les 29 bouteilles
de champagne et les 2 bouteilles de whisky consommées, et des factures ou tickets de caisse
associés ; que le mandat émis par l’ordonnateur mentionne également le cocktail en cause
en son objet ; qu’ainsi la comptable disposait de pièces à la fois nécessaires et cohérentes
pour assurer les contrôles lui incombant et qu’elle n’a pas manqué à ses obligations
en la matière ; qu’il n’y a donc pas lieu de mettre en jeu sa responsabilité à ce titre ;
36. Attendu, en revanche, au sujet du dédommagement en nature de la locataire d’une valeur
de 179,70 €, que la comptable reconnaît implicitement que le domaine de Chantilly aurait dû
procéder par réduction de son loyer à due concurrence des dommages subis ;
qu’elle ne produit toutefois aucune décision de l’ordonnateur ;
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37. Attendu que, confrontée à des pièces justificatives insuffisantes, voire incohérentes
au regard de la nature de la dépense, la comptable aurait dû suspendre le paiement
et en informer l’ordonnateur, en application des dispositions de l’article 38 du décret
du
7 novembre 2012
susvisé ;
que
faute
de
l’avoir
fait,
Mme X
a
manqué
à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; qu’il y a donc lieu de mettre
en jeu sa responsabilité au titre de l’exercice 2019, à hauteur du montant payé au titre
du dédommagement ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
38. Attendu que, pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable
public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge
des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à laquelle il statue,
si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait permis d’éviter
que soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due ; que lorsque le manquement
du comptable porte sur le contrôle de la production des pièces justificatives requises,
ce manquement doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice
financier à l’organisme public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris
d’éléments postérieurs au manquement en cause, que la dépense repose sur les fondements
juridiques dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la nomenclature,
que l’ordonnateur a voulu l’exposer et, le cas échéant, que le service a été fait ;
39. Attendu que s’il n’y a pas de doute sur le service fait et la volonté de l’ordonnateur
d’exposer la dépense, celle-ci était, en revanche, dépourvue de fondement juridique
et donc indue ; qu’ainsi le manquement de la comptable a causé un préjudice financier,
au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi
du 23 février 1963 susvisée, au domaine de Chantilly ;
40. Attendu qu’aux termes du même article, «
Lorsque le manquement du comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable a l’obligation
de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
» ;
qu’ainsi, il y a lieu de constituer Mme X débitrice envers le domaine de Chantilly
pour la somme de 179,70 €, au titre de l’exercice 2019 ;
41. Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce
cette date est le 31 mai 2022, date de réception du réquisitoire par Mme X ;
Sur la charge n° 3, soulevée à l’encontre de Mme X, au titre de l’exercice 2018
42. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, la Procureure générale a saisi la Cour des comptes
de la responsabilité encourue, au titre de l’exercice 2018, par Mme X à raison
du défaut de contrôle de la validité de la dette lors du paiement de plusieurs dépenses,
d’un montant total de 2 803,38 €, liés au «
pot de départ
» d’un personnel du domaine,
sans délibération de la commission de Chantilly permettant la prise en charge de dépenses
relatives à un événement organisé à titre privé au profit d’un personnel de l’organisme ;
qu’elle n’aurait pas non plus procédé au contrôle de la régularité de l’autorisation de percevoir
la recette d’un montant de 870 € constituée par une collecte destinée à l’achat du cadeau
de départ, intégralement reversée à l’administrateur du domaine ;
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Sur les éléments apportés à décharge par la comptable
43. Attendu que la comptable fait valoir que ce pot de départ a été décidé en l’honneur
d’un membre du personnel, de catégorie A, qui «
était un modèle de compétence et surtout
de dévouement
» et faisait l’admiration de tous ; qu’elle ajoute que c’est pour ces raisons
que «
l’administrateur a décidé de célébrer son départ
» avec l’organisation d’un déjeuner
de
70 convives
regroupant
de
nombreux
élus
ainsi
que
le
directeur
général
de l’Institut de France, et la remise d’un cadeau ; qu’elle précise que, pour celui-ci, une collecte
a permis de rassembler 870 €, somme venue en déduction du montant du cadeau,
et que le montant à la charge du domaine de Chantilly a en conséquence été réduit à 220 € ;
Sur le droit applicable en matière de responsabilité des comptables
44. Attendu qu’aux termes du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
« Les
comptables
publics
sont
personnellement
et
pécuniairement
responsables
du recouvrement des recettes
»
;
que leur responsabilité «
se trouve engagée dès lors [...]
qu’une recette n’a pas été recouvrée
» ;
45. Attendu qu’aux termes de l’article 17 du décret du 7 novembre 2012 susvisé,
«
Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes
et contrôles qui leur incombent en application des dispositions des articles 18, 19 et 20,
dans les conditions fixées par l’article 60 de la loi du 23 février 1963
» ;
46. Attendu qu’aux termes de l’article 18 du même décret, «
Dans le poste comptable
qu’il dirige, le comptable public est seul chargé : [...] 4° De la prise en charge des ordres
de recouvrer [...] qui lui sont remis par les ordonnateurs ; 5° Du recouvrement des ordres
de recouvrer et des créances constatées par un contrat un titre de propriété ou tout autre titre
exécutoire ; 6° De l’encaissement des droits au comptant et des recettes liées à l’exécution
des ordres de recouvrer
» ; qu’aux termes de l’article 19 du même texte, «
Le comptable public
est tenu d’exercer le contrôle : 1° S’agissant des ordres de recouvrer : a) De la régularité
de l’autorisation de percevoir la recette ; b) Dans la limite des éléments dont il dispose,
de la mise en recouvrement des créances et de la régularité des réductions et des annulations
des ordres de recouvrer
» ;
Sur le droit applicable en matière de production des pièces justificatives
47. Attendu que l’article 2.9.1 «
Paiement direct aux restaurateurs et aux fournisseurs
»
de l’annexe à l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé prévoit comme pièce à produire à l’agent
comptable
la
«
Facture
détaillée
établie
par
le
fournisseur
ou
le
restaurateur
»,
voire l’attestation de l’organisateur de la réception si la facture n’est pas détaillée et ne précise
pas l’objet de la réception ; qu’aux termes de l’article 2.9.2
« Remboursement à l’agent public
organisateur de la réception s’il a fait l’avance des fonds
», les pièces à produire
sont les suivantes : «
Facture détaillée acquittée, ou déclaration de frais produite
par l’organisateur de la réception
», le commentaire associé précisant que cette déclaration
doit mentionner la nature de la réception, sa date, le relevé des frais exposés et le montant
global ;
Sur les faits
48. Attendu que le mandat n° 413 du 25 juillet 2018 a été payé le 13 août 2018 directement
au traiteur pour un montant de 1 340 € ; que la facture du 11 juillet 2018 mentionne
la fourniture, le même jour, d’un buffet froid et de café pour 70 convives, au prix unitaire
de 17 €, soit 1 190 €, et d’une vacation pour le service à hauteur de 150 € ; que ce montant
n’était pas inclus lors de la commande des prestations, approuvée le 2 juillet 2018 ;
qu’en revanche, les frais de livraison et de reprise de matériel prévus à hauteur de 25 €
n’ont pas été facturés ;
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49. Attendu que deux autres mandats du 25 juillet 2018 (n° 402 et n° 404) ont soldé également
le 13 août 2018 les demandes de remboursement de la récipiendaire, qui s’était chargée
de quelques achats à hauteur de 59 € en vue de la réception qui lui était consacrée,
et d’un autre agent du domaine pour 80,35 € ; que le mandat n° 406 du même jour payé
le 1
er
août 2018 a remboursé à l’administrateur des dépenses qu’il avait prises en charge
de son côté, à savoir l’achat de boissons pour 234,03 € et d’un vélo électrique offert en cadeau
de départ à la retraite pour 1 090 € ;
50. Attendu que l’achat du vélo a été effectué avec le fruit d’une collecte ayant réuni
un montant de 870 €, sous la forme d’espèces et de chèques à hauteur respective de 540 €
et de 330 €, intégrés dans les comptes du domaine de Chantilly par les pièces de recette n° 18
du 19 juillet 2018 et également n° 18 mais du 23 juillet 2018 ; que cette collecte a réduit le coût
effectif du cadeau à 220 € pour le domaine de Chantilly ;
Sur l’existence d’un manquement en dépense
51. Attendu que, dans le cadre du contrôle de la validité de la dette, il appartient au comptable
public de vérifier, en premier lieu, si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable lui a été fourni et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d’une part,
complètes et précises et, d’autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense ;
que si ce contrôle peut conduire le comptable à porter une appréciation juridique sur les actes
administratifs à l’origine de la dette et s’il lui appartient alors d’en donner une interprétation
conforme à la réglementation en vigueur, il n’a pas le pouvoir de se faire juge de leur légalité ;
que si les pièces justificatives fournies sont insuffisantes pour établir la validité de la dette,
il appartient au comptable de suspendre le paiement jusqu’à ce que l’ordonnateur lui ait produit
les justifications ou les attestations nécessaires ;
52. Attendu que, s’agissant de la dépense payée au traiteur pour la réception
du 11 juillet 2018, la comptable disposait, au moment du paiement, d’une facture détaillée
jointe au mandat ; que, cependant, celle-ci ne correspondait pas exactement à la commande
passée ; qu’une vacation pour le service avait été facturée en sus à hauteur de 150 €,
contrairement aux frais de livraison et de reprise de matériel prévus à hauteur de 25 €
;
que confrontée à des pièces justificatives incohérentes entre elles, la comptable aurait dû
suspendre le paiement et en informer l’ordonnateur, en application des dispositions
de l’article 38 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ; que faute de l’avoir fait, Mme X
a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ; qu’il y a donc lieu
de mettre en jeu sa responsabilité au titre de l’exercice 2018, à hauteur du montant payé ;
53. Attendu que, en ce qui concerne les autres dépenses liées à la réception du 11 juillet 2018
remboursées aux trois personnes ayant fait l’avance des fonds, que les trois mandats
mentionnaient la date et l’objet de cette réception ; qu’à l’appui du mandat n° 406 relatif
au remboursement à l’agent public organisateur de la réception, à savoir l’administrateur
lui-même, étaient jointes la demande de remboursement de l’intéressé et le ticket de caisse
pour l’achat de boissons à hauteur de 234,03 € ; qu’à l’appui des mandats n° 402 et n° 404
aux deux autres personnes, qui peuvent être considérées comme «
co-organisatrices
de la réception
» comme le reconnaissent les conclusions du Procureur général susvisées,
étaient jointes leur demande respective de remboursement ainsi que les tickets de caisse
des dépenses effectuées à hauteur de 80,35 € pour l’une et de 59 €, pour l’autre ;
qu’ainsi, la comptable disposait, au moment des paiements, des pièces requises
pour s’assurer de la validité de la dette ; qu’il n’y a donc pas lieu de mettre en jeu
sa responsabilité à ce titre ;
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54. Attendu que, sur le principe de l’achat d’un cadeau de départ, le comptable public
ne doit pas apprécier la légalité de l’octroi de libéralités ou de gratifications de cette nature
mais se reporter aux pièces justificatives indispensables à leur prise en charge ;
que dans le silence de la nomenclature applicable, ou en l’absence de nomenclature,
le comptable public doit, avant toute chose, exiger la production de toutes les justifications
qui lui permettent de garantir les contrôles que la réglementation lui prescrit, au besoin
après s’être référé à des nomenclatures voisines, sans toutefois considérer que celles-ci
puissent lui être opposables ;
55. Attendu, en l’espèce, que l’annexe à l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé ne prend
en compte aucune dépense de ce type, qui ne peut pas, par ailleurs, être assimilée
à des prestations sociales pour lesquelles la participation des agents est considérée
comme nécessaire ; que dans le silence de la nomenclature des pièces justificatives
applicable, la comptable pouvait se référer à celle applicable aux collectivités territoriales
et à leurs établissements publics, qui prévoit une décision de l’assemblée délibérante
fixant les modalités d’attribution du cadeau et les événements donnant lieu à l’octroi
d’un tel avantage, puis une décision d’attribution en sus de la facture ;
56. Attendu que la comptable ne disposait, à l’appui du mandat n° 406, ni d’une décision
de
la
sous-commission
déléguée
par
la
commission
administrative
centrale
de l’Institut de France pour la gestion du domaine de Chantilly, ni d’une décision d’attribution
de l’ordonnateur, les seules pièces produites étant la demande de remboursement
de l’administrateur et la facture de l’achat du vélo ; que, confrontée à des pièces justificatives
insuffisantes, la comptable aurait dû suspendre le paiement et en informer l’ordonnateur,
en application des dispositions de l’article 38 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ;
que faute de l’avoir fait, Mme X a manqué à ses obligations en matière de contrôle
de la validité de la dette ; qu’il y a donc lieu de mettre en jeu sa responsabilité au titre
de l’exercice 2018, à hauteur du montant payé pour l’achat du cadeau ;
Sur l’existence d’un manquement en recette
57. Attendu que l’achat du cadeau de départ a été financé majoritairement par des fonds
privés, intégrés dans les comptes de l’établissement au mépris des règles de la comptabilité
publique ; que si la comptable ne s’est pas assurée, au préalable, de la régularité
de l’autorisation de percevoir de telles recettes, il n’y a, cependant, pas lieu de mettre en jeu
sa responsabilité ; qu’aux termes de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisé,
cette responsabilité ne se trouve engagée que si une recette n’a pas été recouvrée,
ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
58. Attendu que, pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable
public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge
des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à laquelle il statue,
si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait permis d’éviter
que soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due ; que lorsque le manquement
du comptable porte sur le contrôle de la production des pièces justificatives requises,
ce manquement doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice
financier à l’organisme public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris
d’éléments postérieurs au manquement en cause, que la dépense repose sur les fondements
juridiques dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la nomenclature,
que l’ordonnateur a voulu l’exposer et, le cas échéant, que le service a été fait ;
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59. Attendu que pour la dépense payée au traiteur, il n’y a pas de doute sur la volonté
de l’ordonnateur de l’exposer, ni sur le service fait ; que s’agissant de son fondement juridique,
le montant de 150 € facturé au titre d’une vacation pour le service non prévue
lors de la commande était indu ; que le manquement de la comptable a ainsi causé
un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 modifié
de la loi du 23 février 1963 susvisée, au domaine de Chantilly ; que, cependant, le montant
de ce préjudice n’a été que de 125 €, du fait de l’absence de paiement des frais de livraison
et de reprise de matériel, pourtant approuvés lors de la commande mais non facturés ;
60. Attendu que s’agissant de la dépense liée à l’achat du cadeau de départ, il n’y a pas
de doute sur la volonté de l’ordonnateur de l’exposer, ni sur le service fait ; qu’elle était,
cependant, dépourvue de fondement juridique, faute de décisions de la sous-commission
déléguée par la commission administrative centrale de l’Institut de France pour la gestion
du domaine de Chantilly et de l’ordonnateur ; que le manquement de la comptable
a ainsi causé un préjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI
de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, au domaine de Chantilly ;
que, cependant, le montant de ce préjudice n’a été que de 220 €, correspondant au montant
resté à la charge de l’établissement du fait de la collecte ;
61. Attendu qu’aux termes du même article, «
Lorsque le manquement du comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable a l’obligation
de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
» ;
qu’ainsi il y a lieu de constituer Mme X débitrice envers le domaine de Chantilly
pour la somme totale de 345 € (125 € et 220 €) au titre de l’exercice 2018 ;
62. Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce
cette date est le 31 mai 2022, date de réception du réquisitoire par Mme X ;
Sur la charge n° 4, soulevée à l’encontre de Mme X, au titre de l’exercice 2018
63. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, la Procureure générale a saisi la Cour des comptes
de la responsabilité encourue, au titre de l’exercice 2018, par Mme X à raison
du défaut de contrôle de la validité de la dette lors du paiement à un fournisseur
de 9 chèques cadeaux de Noël pour un montant de 1 416,60 €, imputé au compte 6472
« œuvres sociales CE », sans délibération de la commission de Chantilly autorisant la prise
en charge de cette dépense ;
Sur les éléments apportés à décharge par la comptable
64. Attendu que la comptable rappelle qu’à son arrivée en 1999 les «
us et coutumes
»
du domaine étaient d’attribuer à chaque membre du personnel un cadeau de fin d’année
qui se matérialisait par un repas, un cadeau pour les enfants, un dîner spectacle ou encore
un panier festif ; qu’elle précise que l’ensemble du personnel du domaine de Chantilly
bénéficiait de cet avantage, y compris, depuis la création de la FSDC en 2015, les personnels
employés par la fondation ou mis à sa disposition ; qu’elle ajoute que, toutefois, en 2018,
le comité d’entreprise (CE) de la FSDC a décidé de ne plus faire bénéficier le personnel
de l’Institut de France non mis à disposition, soit 9 agents, du cadeau annuel attribuée
aux 130 personnels de la Fondation ; qu’elle explique cette décision «
très surprenante,
en rupture avec toutes les habitudes antérieures
», par l’existence d’une «
grande tension
nouvelle entre représentants du personnel de la Fondation et leur direction
» ;
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65. Attendu que, dans ses observations susvisées, produites après la clôture de l’instruction,
la comptable fait valoir que «
c’est dans ce contexte de tension que l’administrateur a pris
la décision d’accorder le même "cadeau d’entreprise"
aux 9 personnels du domaine
qui en avaient été privés contrairement aux pratiques des 13 années précédentes
»,
estimant que «
cette injustice risquait de provoquer une tension aussi néfaste qu’inutile
entre les deux catégories de personnels œuvrant à la même mission générale au domaine
de Chantilly
» ; qu’elle ajoute avoir «
longuement échangé sur ce sujet
» avec l’administrateur
du domaine de Chantilly et la direction de la FDSC et qu’il est apparu que la décision
«
était un acte de justice entre les catégories de personnel et aussi un moyen d’apaiser
des tensions naissantes. Un résultat positif de cette petite mesure a d’ailleurs pu être
observée
» ;
66. Attendu que la comptable produit une note du 7 novembre 2019 de l’administrateur
du domaine indiquant que le CE de la FSDC «
a décidé d’octroyer à tous les personnels
du domaine de statut privé ou mis à disposition des cadeaux (boîte de chocolat et cartes
cadeaux) à l’occasion de Noël 2019. / Il est
juste de faire bénéficier du même avantage
[que le personnel couvert par le CE de la FSDC]
le personnel Institut
qui travaille au domaine
mais pas à disposition (conservation, administrateur et ses 2 collaboratrices, ouvriers
forestiers
) » ;
Sur le droit applicable
67. Attendu que, selon l’article 9 de la loi du 13 juillet 1983 susvisé, en vigueur au moment
du paiement en cause, «
l’action sociale, collective ou individuelle, vise à améliorer
les conditions de vie des agents publics et de leurs familles, notamment dans les domaines
de la restauration, du logement, de l’enfance et des loisirs, ainsi qu’à les aider à faire face
à des situations difficiles
», et «
sous réserve des dispositions propres à chaque prestation,
l’action sociale implique une participation du bénéficiaire à la dépense engagée.
Cette participation tient compte, sauf exception, de son revenu et le cas échéant,
de sa situation familiale
» ;
68. Attendu que «
les dispositions propres à chaque prestation
» doivent être édictées
au moins par une décision de l’ordonnateur ou une délibération de l’organe délibérant
afin de déterminer le type des actions et le montant des dépenses à engager pour la réalisation
des prestations d’action sociale, dont l’octroi de chèques cadeaux ; que selon l’avis
du 23 octobre 2003 du Conseil d’État, certaines conditions doivent être satisfaites ;
qu’en particulier, la qualification d’action sociale ne peut être retenue que si les prestations
«
présentent des caractéristiques garantissant leur vocation sociale et les distinguant
des prestations à caractère marchand, ce qui suppose notamment qu’elles ne se bornent pas
à offrir des services disponibles et aisément accessibles, en termes de localisation et de prix,
sur le marché et que leurs conditions d’octroi et de tarification les rendent accessibles
à l’ensemble des agents, en particulier ceux à revenu modeste
» ; que notamment, si l’octroi
de chèque cadeaux est possible dans des conditions qui garantissent leur vocation sociale,
un dispositif de remise systématique et d’un montant uniforme à tous les agents apparaît plus
discutable au regard de la qualification de prestations d’action sociale, ces prestations
présentant,
a fortiori
si leur montant est élevé, un risque de requalification en complément
de rémunération ;
69. Attendu que l’article 3.7.6 «
Prestations d’action sociale des organismes
» de l’annexe
à l’arrêté du 31 janvier 2018 susvisé prévoit que doivent être produites à l’agent comptable
les pièces suivantes :
« 1. Demande établie par l’agent ; 2. Eléments de liquidation ;
3. Attestation
du
service
gestionnaire
certifiant
que
les
conditions
imposées
par la réglementation sont remplies
» ;
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Sur les faits
70. Attendu que la comptable a pris en charge et payé le 11 décembre 2018 un mandat émis
le même jour pour 1 416,60 €, correspondant à l’achat de chèques cadeaux pour
9 personnes ; qu’au moment du paiement, la comptable disposait de la facture et du bon
de commande ; que les échanges de courriels joints au mandat indiquent l’identité
des neuf bénéficiaires, qui comprennent notamment l’administrateur du domaine de Chantilly
et un agent pourtant déjà parti à la retraite en juillet 2018 ;
Sur l’existence d’un manquement
71. Attendu que, dans le cadre du contrôle de la validité de la dette, il appartient au comptable
public de vérifier, en premier lieu, si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable lui a été fourni et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d’une part,
complètes et précises et, d’autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense ;
que si ce contrôle peut conduire le comptable à porter une appréciation juridique sur les actes
administratifs à l’origine de la dette et s’il lui appartient alors d’en donner une interprétation
conforme à la réglementation en vigueur, il n’a pas le pouvoir de se faire juge de leur légalité ;
que si les pièces justificatives fournies sont insuffisantes pour établir la validité de la dette,
il appartient au comptable de suspendre le paiement jusqu’à ce que l’ordonnateur lui ait produit
les justifications ou les attestations nécessaires ;
72. Attendu qu’au moment du paiement incriminé, la comptable ne disposait pas
de toutes les pièces requises pour lui permettre d’effectuer les contrôles lui incombant ;
que si elle disposait d’une facture et d’un bon de commande, elle ne disposait pas
d’une décision de l’administrateur, celle-ci n’ayant été prise que le 7 novembre 2019,
ou d’une délibération de la sous-commission déléguée par la commission administrative
centrale de l’Institut de France pour la gestion du domaine de Chantilly ; qu’elle ne disposait
pas non plus d’une «
attestation du service gestionnaire certifiant que les conditions imposées
par la réglementation sont remplies »
pour que les chèques cadeaux puissent être bien traités
comme des prestations d’action sociale, et pas comme des compléments de rémunération
soumis à cotisations sociales ;
73. Attendu, au surplus, que la comptable a accepté le paiement d’un chèque cadeau au profit
d’une personne retraitée, alors qu’aux termes de l’article 9 de la loi 13 juillet 1983,
alors en vigueur, les prestations sont d’abord destinées à des agents actifs ;
74. Attendu que, confrontée à des pièces justificatives insuffisantes, la comptable aurait dû
suspendre le paiement et en informer l’ordonnateur, en application des dispositions
de l’article 38 du décret du 7 novembre 2012 susvisé ; que faute de l’avoir fait,
Mme X a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la dette ;
qu’il y a donc lieu de mettre en jeu sa responsabilité au titre de l’exercice 2018, à hauteur
du montant payé pour l’achat des chèques cadeaux ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
75. Attendu que, pour déterminer si le paiement irrégulier d’une dépense par un comptable
public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au juge
des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à laquelle il statue,
si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait permis d’éviter
que soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due ; que lorsque le manquement
du comptable porte sur le contrôle de la production des pièces justificatives requises,
ce manquement doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice
financier à l’organisme public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris
d’éléments postérieurs au manquement en cause, que la dépense repose sur les fondements
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juridiques dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la nomenclature,
que l’ordonnateur a voulu l’exposer et, le cas échéant, que le service a été fait ;
76. Attendu, en l’espèce, qu’il n’y a pas de doute sur le service fait et la volonté
de l’ordonnateur d’exposer la dépense ; que s’agissant de son fondement juridique,
l’octroi des chèques cadeaux n’est pas fondé sur une décision de la sous-commission
déléguée par la commission administrative centrale de l’Institut de France pour la gestion
du domaine de Chantilly ou de l’administrateur ; que, cependant, comme le fait valoir
la comptable, cet octroi relevait d’un usage constant depuis 13 ans ; que, par ailleurs,
il remplissait les deux autres conditions de généralité (avantage accordé à tous les personnels
sans distinction de statut et d’affectation) et fixité (avantage déterminé selon des règles
préétablies et précises) pour constituer un droit d’usage ; que dès lors, le caractère indu
de l’attribution des chèques cadeaux n’est pas établi ; qu’ainsi le manquement de la comptable
n’a pas causé de préjudice financier au domaine de Chantilly ;
77. Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article 60 modifié
de la loi du 23 février 1963 susvisée, «
Lorsque le manquement du comptable
[…]
n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes
peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte
des circonstances de l’espèce
» ; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant
maximal de cette somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu
pour le poste comptable ;
78. Attendu
que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré
pour l’exercice 2018 était fixé à 199 600 € ; qu’ainsi le montant maximum de la somme
susceptible d’être mise à la charge de Mme X s’élève à 299,40 € ;
79. Attendu que, eu égard aux circonstances, notamment au contexte spécifique au domaine
de Chantilly et à l’ancienneté de l’octroi de l’avantage en cause, il n’y a pas lieu de d’obliger
la comptable à s’acquitter d’une somme pour le manquement précité ;
Sur l’exercice 2017
80. Attendu qu’aucune charge n’est relevée à l’encontre de la comptable au titre
de l’exercice 2017 ; qu’elle peut donc être déchargée de sa gestion au titre de cet exercice ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Au titre de l’exercice 2018 (charges n° 1, n° 3 et n° 4)
Article 1
er
. – Mme X
est
constituée
débitrice
envers
le
domaine
de
Chantilly
au titre de la charge n° 1, pour la somme de 302,53 €, augmentée des intérêts de droit
à compter du 31 mai 2022.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle
sélectif.
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Article 2. – Mme X
est
constituée
débitrice
envers
le
domaine
de
Chantilly
au titre de la charge n° 3, pour la somme de 345 €, augmentée des intérêts de droit
à compter du 31 mai 2022.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle
sélectif.
Article 3. – Il n’y a pas lieu d’obliger Mme X à s’acquitter d’une somme à raison du
manquement constaté au titre de la charge n° 4.
Au titre de l’exercice 2019 (charges n° 1 et n° 2)
Article 4. – Mme X
est
constituée
débitrice
envers
le
domaine
de
Chantilly
au titre de la charge n° 1, pour la somme de 314,46 €, augmentée des intérêts de droit
à compter du 31 mai 2022.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle
sélectif.
Article 5. – Mme X
est
constituée
débitrice
envers
le
domaine
de
Chantilly
au titre de la charge n° 2, pour la somme de 179,70 €, augmentée des intérêts de droit
à compter du 31 mai 2022.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle
sélectif.
Décharge
Article 6. – Mme X
est
déchargée
de
sa gestion
pour
la
période
du
1
er
janvier
au 31 décembre 2017.
Sursis à décharge
Article 7. – La
décharge
de
Mme X
au
titre
des
exercices
2018
et
2019
ne pourra être donnée qu’après apurement des débets à acquitter fixés ci-dessus.
Fait et jugé par M. Jean-Yves BERTUCCI, président de chambre, président de la formation ;
MM. Jean-François GUILLOT et Paul de PUYLAROQUE, conseillers maîtres.
En présence de Mme Nadine BESSON, greffière de séance.
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En conséquence, la République française mande et ordonne à tous commissaires de justice,
sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs
de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants
et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par
Nadine BESSON
Jean-Yves BERTUCCI
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières,
les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État
dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt peut
être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions
prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.