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3, place des Grands Hommes - CS 30059 - 33064 BORDEAUX CEDEX - www.ccomptes.fr
République Française
Au nom du peuple français
La chambre régionale des comptes Nouvelle-Aquitaine,
Vu le réquisitoire n° 2022-0013 du 30 juin 2022, par lequel le procureur financier a saisi la chambre en vue de la
mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X..., comptable de la commune de Thenon au titre
de paiements
de subventions de fonctionnement en faveur d’une association, intervenus au cours de l’e
xercice
2018, notifié à ce dernier le 25 juillet 2022
et à l’ordonnateur
le 22 juillet 2022 ;
Vu les comptes
relatifs à l’exercice 2018
rendus en qualité de comptable de la commune de Thenon par M. X... ;
Vu le cautionnement du poste comptable fixé à 155 000
€ pour l’exercice
2018 ;
Vu l
article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu le code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-1, L. 242-4, R. 212-15, R. 212-16, R. 242-4
à
R. 242-14 ;
Vu le code général des collectivités territoriales (CGCT) ;
Vu la loi n° 2000-0321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations et notamment son article 10 ;
Vu le décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 relatif à la transparence financière des aides octroyées par des personnes
publiques, pris en application de la loi n° 2000-0321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec l’administratio
n ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, en particulier
les articles 19, 20, 38 et 42 ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10
décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la
loi de finances pour 1963 modifiée ;
Vu l’arrêté du ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé du budget, du
23 octobre
2013 portant application du premier alinéa de l’article 42 du décret
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et encadrant le contrôle sélectif de la dépense ;
Jugement n° 2022-0023
Audience publique du 30 novembre 2022
Prononcé du 15 décembre 2022
Commune de Thenon
(024069 550)
Département de la Dordogne
Centre des finances publiques de Terrasson
Lavilledieu
Exercice 2018
2
/
7
…/
Vu l’instruction
référencée BOFIP-GCP-16-008 de la Direction générale des finances publiques du 28 avril 2016
relative aux pièces justificatives des dépenses du secteur public local ;
Vu
l’arrêté
du 16 février 2022 pris
par le pôle national d’apurement administratif de la
Direction générale des
finances publiques donnant décharge définitive à M. X... pour sa gestion du 1
er
janvier 2019 au 31 décembre 2019 ;
Vu
l’arrêté du président de la
chambre régionale des comptes Nouvelle-Aquitaine du 16 décembre 2021 relatif aux
attributions des sections et des formations délibérantes ;
Vu la décision du 5 juillet 2022 par laquelle le président de la deuxième section de la chambre régionale des
comptes a désigné M. Laurent Bourgin, premier conseiller, pour instruire le réquisitoire susvisé ;
Vu le rapport n° 2022-0218 déposé au greffe de la chambre le 10 octobre 2022 par M. Laurent Bourgin, les parties
ayant été informées par courriers du 14 octobre 2022 de la clôture de l
instruction résultant de ce dépôt et de la
possibilité de consulter ledit rapport ;
Vu le courrier du 28 octobre 2022 informant M. X...
et l’ordonnateur de
la fixation de la date de
l’audience publique
au 30 novembre 2022 ;
Vu les pièces du dossier et notamment les réponses apportées par M. X... les 3 août 2022, 29 août 2022 et
7 octobre 2022 et la réponse apportée le 24
octobre suivant par l’ordonnateur en fonctions
;
Vu
la communication de l’ensemble de ces réponses aux autres parties
;
Entendus
, lors de l’audience publique du
30 novembre 2022, M. Laurent Bourgin premier conseiller, en son rapport,
le procureur financier en ses conclusions, le comptable et l’ordonnateur n’étant ni présents, ni représentés à
l’audience
;
M. Hervé Bourdarie, premier conseiller, ayant été désigné réviseur ;
Après en avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
Sur la présomption de charge unique
à l’encontre de
M. X... comptable en fonctions lors des versements
de subventions au Y...d
’un montant
global de 15 000
intervenus au cours de
l’
exercice 2018
1.
Sur le réquisitoire du procureur financier
Considérant que le réquisitoire susvisé soulève une présomption de charge
d’un montant global de 15
000
à
l’encontre de
M. X... pour la mise en paiement de subventions en faveur de
l’association «
Y...» par cinq mandats
émis au cours de l’exercice 2018, tels que retracés dans le tableau ci
-après, tous imputés au compte 6574
« subventions de fonctionnement aux associations et autres organismes de droit privé »
;
3
/
7
…/
N° mandat et
bordereau
Date
Objet
Montant
Pièce justificative
Mandat n° 64,
bordereau n° 5
24 janvier 2018
Avance
subvention 1
er
acompte
15
000 €
convention du 29 juin 2015 et délibération du
23 janvier 2018 qui prévoyait une avance de
15 000
Mandat n° 437,
bordereau n° 42
4 mai 2018
Subvention 2
ème
acompte
10
000 €
convention du 3 mai 2018 autorisée par
délibération du 10 avril 2018 (30 000
annuels)
et état IVB1.7 annexé au vote du budget primitif
2018 (30 000
€)
Mandat n° 710,
bordereau n° 67
25 juin 2018
Solde
subvention
5
000 €
convention du 3 mai 2018 autorisée par
délibération du 10 avril 2018 (30 000
annuels)
et état IVB1.7 annexé au vote du budget primitif
2018 (30 000
€)
Mandat n° 1160,
bordereau n° 108
23 octobre 2018
Solde
subvention
2018
10
000 €
délibération du 11 juillet 2018 attribuant à
l’association sportive
10 000 € de subvention
complémentaire
.
mandat n° 1379,
bordereau n° 131
27 décembre 2018
Subvention
5
000 €
délibération du conseil municipal du 18 décembre
2018 attribuant
à l’association une subvention
de
5 000
pour compléter l’acquisition d’un bus
Considérant que le procureur financier relève que, par délibération du 10 avril 2018, le conseil municipal de Thenon
a approuvé le principe d’une convention
de partenariat avec le « Y...» pour
l’année civile 2018 avec tacite
reconduction pour les années civiles 2019 et 2020
; qu’
en application de la loi n° 2000-0321 du 12 avril 2000
modifiée, un tel conventionnement est nécessaire dès lors que la subvention annuelle allouée à une association
par une collectivité est supérieure à 23 000
; que la convention signée sur ce fondement le 3 mai 2018, pour une
durée d
’un
an avec tacite reconduction pour deux années supplémentaires, prévoit en son article 3 un montant de
subvention de 30 000
€ et, en son article 5, le versement
fractionné de ce montant avec une avance versée avant
le 31 mars dans la limite de 50 % du montant total ;
Considérant
que la rubrique 721 «
Subventions et primes de toute nature »
de l’annexe I visée à l’article D.
1617-
19 du code général des collectivités territoriales fixant la liste des pièces justificatives de la dépense pour le secteur
public local définit les pièces justificatives à joindre aux mandats relatifs aux paiements de cette catégorie de
dépenses ; que pour les paiements suivants le premier cette liste prévoit
« le cas échéant, les justifications exigées
par la décision »
et
« le décompte portant récapitulation des sommes déjà versées »
;
Considérant que, selon le procureur financier, les versements de subventions au profit du « Y...» intervenus après
les paiements des mandats n° 64 du 24 janvier 2018, n° 437 du 4 mai 2018 et n° 710 du 25 juin 2018 relatifs
respectivement aux deux premiers acomptes et au solde de la subvention annuelle au titre de 2018, devaient être
justifiés
d’une
récapitulation des sommes déjà versées ; que, compte tenu des deux paiements postérieurs aux
mandats précités, l’association a perçu des subventions communales pour un montant global de 45
000
€ en 2018
;
que, lors de la mise en paiement des mandats n° 1160 du 23 octobre 2018 et n° 1379 du 27 décembre 2018 de
respectivement 10 000
€ et 5
000
€,
le comptable n’était pas en possession d’un état
récapitulatif
qui l’aurait conduit
à constater que le montant cumulé des subventions versées à cette association excédait le plafond fixé dans la
convention du 3 mai 2018 ;
Considérant que, selon le procureur financier, M. X...
n’aurait pas disposé
, au moment des paiements, des pièces
justificatives indispensables aux contrôles de la validité de la dépense ; que de telles pièces lui auraient permis de
constater l’incohérence des paiements mandatés
; que,
faute d’avoir suspendu
c
es paiements dans l’attente de la
production par l
ordonnateur des pièces justificatives prévues par la nomenclature, conformément aux dispositions
de l’article 38 du décret
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, il aurait manqué à ses obligations définies aux articles
19 et 20 de ce décret et aurait dès lors engagé sa responsabilité personnelle et
pécuniaire au titre de l’exercice
2018 ;
4
/
7
…/
2.
Sur la réponse de l’ordonnateur
Considérant que, par courriel du 24 octobre 2022,
l’ordonnateur
a fait parvenir au greffe de la chambre régionale
des comptes les comptes rendus des séances du 9 juillet 2018 et du 27
juin 2019 de l’assemblée générale ordinaire
de l’association «
Y...» portant notamment sur le bilan moral et financier des années 2017/2018 et 2018/2019 ;
Considérant que chacun des comptes rendus reproduit le co
mpte de résultat de l’exercice écoulé, comprenant
notamment en produits
d’exploitation le montant global des subventions communales, à savoir 40
000
€ pour
l’exercice 2017/
2018 et 44 000
€ pour l’exercice 2018/
2019 ;
Considérant que l’ordonnateur n’a pas
formul
é d’observation à l’appui de
la transmission de ces pièces ;
3.
Sur la réponse du comptable
Considérant que, par courriels des 3 et 29 août 2022, M. X...
a fait valoir son impossibilité d’accéder aux
informations et pièces relatives à la gestion de la commune de Thenon en raison de son changement de fonctions
imposé par la fermeture, le 1
er
janvier 2022, de la trésorerie de Terrasson-la-Villedieu, dont relevait la commune de
Thenon ;
que cette difficulté d’accéder à des pièces a été accentuée par le changement d’élus à la commune de
Thenon et un congé de l
agent qui occupait les fonctions de secrétaire de mairie en 2018 ;
qu’il souligne que
, depuis
son entrée en fonctions, le poste comptable
pâtissait d’une instabilité de personnel
; que, parmi les agents en
charge du visa des dépenses de fonctionnement, un contrôleur expérimenté a quitté le poste comptable le
1
er
septembre 2018 ;
que, dans ce contexte, il n’était pas en capacité de superviser les
« très nombreux bordereaux
à traiter »
, particulièrement lors de la période chargée de fin de gestion, malgré son implication et sa
« totale bonne
foi »
;
qu’il suivait plus particulièrement les dépenses d’investissement, les opérations d’ordre et les opérations
budgétaires ;
Considérant, toutefois, que M. X... estime difficile de contester
l’absence de décomptes portant récapitulation des
sommes déjà versées et d’avenant
à la convention portant le montant total des subventions versées en 2018 à
45 000
;
Considérant, enfin, que M. X...
précise que l’imputation
des deux mandats au compte 6574 «
subventions de
fonctionnement aux associations et autres personnes de droit privé
» lui paraît justifiée car
« entrant dans la
continuité de la convention »
; que si le mandat de 5 000
a pour objet de
financer l’
acquisition
par l’association
d’un véhicule
, selon lui,
« les
conditions d’utilisation des subventions
relèvent
[…]
de la seule responsabilité de la
collectivité »
;
4.
Sur l’existence de circonstances constitutives de la force majeure
Considérant qu’aux termes du
paragraphe V de l
article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963
modifiée :
«
lorsque […] le juge des comptes constate l’existence de circonstances constitutives de la force
majeure, il ne met pas en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public »
;
Considérant
qu’en l’espèce
, les circonstances constitutives de la force majeure ne sont ni alléguées, ni établies ;
5.
Sur le manquement du comptable
Considérant que
l’article 10 de la loi du 12
avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations prévoit que
«
[
] L
autorité administrative [
] qui attribue une subvention doit, lorsque cette
subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec l
organisme de droit privé qui en
bénéficie, définissant l
objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d
utilisation de la subvention
attribuée [...] »
;
que l’article
1
er
du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 pris pour
l’
application
de l’article 10
précité
impose la conclu
sion d’
une convention pour les subventions dont le montant annuel dépasse 23 000
;
Considérant qu’aux termes de l’article 60 de la loi n°
63-156 du 23 février 1963 :
« I [...]
Les comptables publics
sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu
ils sont tenus d
assurer en matière [...] de
5
/
7
…/
dépenses [...] dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité
personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors qu
un déficit ou un manquant en monnaie
ou en valeurs a été constaté, [...] qu
une dépense a été irrégulièrement payée
[...] »
; qu’en application de l’article
17 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : «
Les
comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes et contrôles qui leur
incombent en application des dispositions des articles 18, 19 et 20, dans les conditions fixées par l
article 60 de la
loi du 23 février 1963
»
; qu’aux termes de l’article 19 du même décret
: «
Le comptable public est tenu d
exercer
le contrôle : [...] 2° s
agissant des ordres de payer : [
] d) De la validité de la dette dans les conditions prévues à
l
article 20 »
; qu’aux termes de l’article 20 du même texte
: « Le contrôle des comptables publics sur la validité de
la dette porte sur : [...] 5° La production des pièces justificatives [...] »
; que l’annexe
I prévue à l’article D.
1617-19
du code géné
ral des collectivités territoriales, dans sa version applicable à l’exercice 201
8, fixe à la rubrique 72
relative au paiement de subventions et primes de toute nature la liste des pièces justificatives de la façon suivante :
« 7211. Premier paiement
1. Décision (2) arrêtant le bénéficiaire, le montant, l
objet et, le cas échéant, les modalités particulières de
versement des fonds (3) ainsi que les conditions d
octroi et les charges d
emploi.
2. Le cas échéant, justifications particulières exigées par la décision.
3. Le cas échéant, convention entre le bénéficiaire et la collectivité ou l
établissement (3).
7212. Autres paiements
1. Le cas échéant, justifications particulières exigées par la décision.
2. Décompte portant récapitulation des sommes déjà versées.
(2) Pour les collectivités territoriales, la décision prend la forme d
une délibération. Elle peut intervenir à l
occasion
du vote du budget dans les conditions définies au deuxième alinéa de l
article L. 2311-7 du CGCT avec références
sur le mandat au budget arrêtant le bénéficiaire et le montant. Elle peut aussi prendre la forme d
une délibération
individualisée dans les conditions prévues au 1. Pour les subventions supérieures à 23 000 euros, la collectivité
fournit soit une délibération individualisée comportant les informations prévues au 1, soit une délibération prise à
l
occasion du vote du budget accompagnée de la ou des conventions conclue (s) entre le (s) bénéficiaire (s) et la
collectivité ou l
établissement.
S
agissant de la Corse, la décision est un arrêté du président du conseil exécutif ;
Pour les établissements publics de santé, la décision d
octroi relève du directeur.
(3) Les conventions ne sont produites que dans l
hypothèse où la décision ne précise pas les modalités particulières
de versement des fonds. » ;
Considérant que le point 4 de la partie
«
définitions et principes »
de ladite annexe I mentionne que la liste des
pièces justificatives est opposable aux ordonnateurs et aux comptables ; que les comptables ne peuvent exiger
d’autres pièces justificatives que celles prévues par cette liste et que
les ordonnateurs ne peuvent substituer à ces
pièces, de leu
r propre chef ou en application d’une délibération ou d’un contrat, d’autr
es justificatifs ;
Considérant que la délibération du conseil municipal du 11 juillet 2018 attribue une « subvention complémentaire »
à l’association
« Y...»
d’un montant de 10
000
€ afin de pérenniser le club
; que la délibération du 18 décembre
2018 lui attribue une subvention de 5 000
€ afin de participer à l’acquisition
d’un bus
; que le mandat n° 1160 du
23
octobre 2018 d’un mo
ntant de 10 000
€ était accompagné
du relevé d’identité bancaire de l’association,
de la
délibération du 11
juillet 2018, de l’état IV
-B-1.7 annexé au budget primitif et de la convention signée le 3 mai 2018 ;
que le mandat n° 1379 du 27
décembre 2018 était accompagné du relevé d’identité bancaire du bénéficiaire et de
la délibération du 18 décembre 2018 ;
Considérant que la convention du 3 mai 2018 prévoyait, en son article 5.3, la possibilité,
« en cas de besoin de
financement complément
aire en vue de la réalisation d’une action ponctuelle mais non comprise dans le cadre du
financement global annuel »
de
« faire une demande de subvention exceptionnelle »
; que cette stipulation ne peut
venir modifier la liste des pièces justificatives ainsi que le rappelle le point 4 de la partie « définitions et principes »
de l’annexe 1 mentionnée par l’article D.
1617-19 du code général des collectivités territoriales ;
Considérant que le seuil de 23 000
€ de subventions alloué
es à un même bénéficiaire sur une année était dépassé
pour l’association
« Y...» depuis le paiement du mandat n° 437 du 4 mai 2018 portant le montant des versements
à 25 000
€ depuis le 1
er
janvier 2018 ; que, par suite, les paiements suivants de subventions au bénéfice de ce club
de football devait nécessairement être considérés comme des « autres paiements » relevant de la rubrique 7212
6
/
7
…/
de la liste des pièces justificatives ; que cette rubrique exige notamment la fournit
ure d’un état récapitulatif des
paiements effectués ;
Considérant qu’il est constant que les deux mandats n°
1160 et 1379, imputés au compte 6574 « subventions de
fonctionnement aux associations et autres structures de droit privé
» n’étaient pas accompagnés d’un tel état
récapitulatif
; qu’en outre, le montant des
versements cumulés avec le paiement de ces deux mandats atteignait
respectivement 40 000
€ et 45
000
, excédant ainsi le plafond de 30 000
prévu par la convention signée le 3 mai
2018 ; que, contrairement à ce que soutient le comptable, une imputation identique au compte 6574 de tous les
mandats émis au profit de l’association
« Y...»
n’implique pas
une « continuité » de la convention liant cette dernière
à la commune
; qu’en l’absence d’avenant modifiant le plafond prévu pour l’année 2018, le cumul
annuel des
versements ne pouvait excéder 30 000
;
Considérant que les comptes
rendus d’assemblée générale de l’association des saisons 2017/2018 et 2018/201
9
produits par l’ordonnateur sont sans incidence sur le défaut de pièces justificatives requises
pour les deux mandats
en litige ;
Considérant qu’en ne suspendant pas le paiement des mandats n°
1160 et n°1379 qui étaient dépourvus des
pièces justificatives exigé
es par la nomenclature prévue par l’annexe 1 à laquelle re
n
voie l’article D.
1617-19 du
code général des collectivités territoriales, M. X... a manqué à ses obligations définies aux articles 19 et 20 du
décret du 7 novembre 2012 ;
6.
Sur l’
e
xistence d’un préjudice financier
Considérant qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 :
« [
] Lorsque le
manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme
concerné
[
]
, le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
»
;
Considérant que le manquement du comptable découlant de
l’absence
des pièces justificatives requises doit être
regardé comme n’ayant pa
s, en
principe, causé un préjudice financier à la collectivité concernée lorsqu’il ressort
des pièces du dossier, y compris d’éléments postérieurs audit manquement, que la dépense repose sur les
fondements juridiques dont il appartenait au comptable de vér
ifier l’existence au regard de la nomenclature, que
l’ordonnateur a voulu l’exposer
et que le service a été fait ;
Considérant que ni la réalité du service fait, ni la volonté de l’ordonnateur d’exposer les deux dépenses de 10
000
et 5 000
€ ne sont en
cause ;
Considérant qu’il résulte de l’article 10 précité de la loi du 12
avril 2000 modifiée et de son décret d’application, que
toute subvention dépassant le seuil annuel de 23 000
€ doit faire l’objet d’une convention
; que la convention signée
le 3 mai 2018 fixait un plafond de 30 000
; que si les délibérations du 11 juillet et du 18 décembre 2018
manifestent clairement l’intention de la commune d’exposer ces dépenses, elles ne peuvent suppléer l’exigence
légale de convention
; qu’ainsi,
faute d’avena
nt à ladite convention, les deux paiements de 10 000
€ et 5
000
sont dépourvus du fondement juridique dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la
nomenclature ;
qu’il s’ensuit que le manquement du comptable a entraîné pour la
commune de Thenon un préjudice
financier de 15 000
;
Considérant qu’il y a lieu de constituer
M. X... débiteur de la somme de 15 000
€ avec intérêt au taux légal à
compter du 25 juillet 2022, date de notification du réquisitoire ;
7.
Sur le contrôle hiérarchisé de la dépense
Considérant qu’aux termes du IX de l’article 60 de la loi n°
63-156 du 23 février 1963, modifié :
« [...] Hormis le cas
de décès du comptable ou de respect par celui-ci, sous l
appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle
sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable public dont la
responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des comptes, le ministre chargé du budget
étant dans l
obligation de laisser à la charge du comptable une somme au moins égale au double de la somme
mentionnée au deuxième alinéa dudit VI » ;
7
/
7
…/
Considérant que le plan de contrôle sélectif de la dépense applicable aux mandats n° 1160 et n° 1379, signé par
le directeur départemental des finances publiques de la Dordogne le 2 octobre 2018, prévoyait un contrôle
a priori
et exhaustif des « conventions à suivi exhaustif » et un contrôle
a priori
et exhaustif pour les mandats supérieurs à
6 000
€ se rattachant à des «
conventions à suivi non exhaustif » ; que, quelle que soit la catégorie à laquelle se
rattache la convention en cause, le comptable était tenu de réaliser un contrôle exhaustif des mandats n° 1160 et
n° 1379
; qu’il s’ensuit que le
manquement commis ne résulte pas du respect du plan de contrôle hiérarchisé de la
dépense ;
que le comptable ne pourra bénéficier d’une remise intégrale du débet prononcé au titre de l’exercice
2018 ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
:
M. X... est constitué débiteur de la commune de Thenon à hauteur de 15 000
€, somme augmentée
des intérêts de droit à compter du 25 juillet 2022 ;
Article 2 :
Le débet prononcé à l’article 1 ne pourra donner lieu à remise gracieuse intégrale de la part du ministre
chargé du budget ;
Article 3 :
Il est sursis à la décharge de M. X...
au titre de l’exercice 2018 jusqu’à l’apurement des sommes mises
à sa charge.
Fait et jugé par M. Yves Roquelet, président de section, président de séance, Mme Josiane Dubreuil, première
conseillère et M. Hervé Bourdarie, premier conseiller.
En présence de Mme Myriam Lagarde, greffière de séance.
Myriam Lagarde
Greffière de séance
Yves Roquelet
Président de séance
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement
à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à
tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Certifié conforme à l’original
Le secrétaire général
Olivier JULIEN
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre
régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la
notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de
deux mois
pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des
délais d’appel, et ce dans les conditions pré
vu
es à l’article R.
242-29 du même code.