13, rue Cambon
75100 PARIS CEDEX 01
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S2022-1255
Deuxième CHAMBRE
3ème SECTION
OBSERVATIONS DÉFINITIVES
(Article R. 143-11 du code des juridictions financières)
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE
L’ÉNERGIE
Exercices 2013 à 2020
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la Cour des comptes, le 22 juin 2022.
En application de l’article L. 143-1 du code des juridictions financières, la communication de
ces observations est une prérogative de la Cour des comptes, qui a seule compétence pour
arrêter la liste des destinataires.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
2
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
3
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
....................................................................................................................
5
LISTE DES RECOMMANDATIONS
........................................................................
9
INTRODUCTION
...................................................................................................
11
1
DES ACTIVITÉS SOUTENUES, UNE COMPÉTENCE RECONNUE
............
12
1.1
Une activité de médiation qui s’est structurée pour faire face à
l’augmentation régulière des saisines
.............................................................
12
1.1.1 Des compétences élargies dans un système de médiation encadré
.................
12
1.1.1.1
L’élargissement continu des compétences
...........................................................
12
1.1.1.2
Le champ de compétence actuel
...........................................................................
14
1.1.1.3
Des procédures de médiation encadrées
...............................................................
14
1.1.2 Une amélioration de la productivité pour faire face à la croissance de l’activité
16
1.1.2.1
Une activité en forte hausse depuis 2016 qui impacte les délais de traitement
....
16
1.1.2.2
L’amélioration de la productivité par les accords amiables et la médiation en
ligne
......................................................................................................................
20
1.1.2.3
Des moyens humains plus fortement sollicités
.....................................................
21
1.2
La coexistence du MNE avec les médiateurs d’entreprise
.............................
23
1.2.1 L’évolution du cadre juridique et sa mise en œuvre
........................................
23
1.2.2 La nécessaire régulation en amont des saisines du MNE
................................
26
1.3
Une mission d’information qui s’est affirmée auprès des acteurs de la
consommation
................................................................................................
27
1.3.1 Une communication active
..............................................................................
27
1.3.1.1
Une activité en hausse avec le développement de services en ligne et de
publications
..........................................................................................................
27
1.3.1.2
La reconnaissance du comparateur d’offres
.........................................................
29
1.3.1.3
Une communication largement externalisée dont le coût est maîtrisé
..................
30
1.3.2 L’affirmation de la place du MNE
..................................................................
31
1.3.2.1
Les relations et partenariats avec l’INC et les associations de consommateurs ...31
1.3.2.2
Un interlocuteur reconnu des pouvoirs publics
....................................................
31
2
UNE GESTION QUI RESTE À FIABILISER
....................................................
34
2.1
Une organisation fragile qui pèse sur la qualité du pilotage et du suivi de la
gestion
............................................................................................................
34
2.2
Gestion financière : renforcer le suivi de l’exécution budgétaire pour mieux
mesurer l’évolution de la performance
...........................................................
35
2.2.1 Des difficultés d’application des règles budgétaires et comptables
................
35
2.2.1.1
Procédure budgétaire : abroger formellement les dispositions réglementaires
rendues caduques par l’évolution du cadre juridique
...........................................
35
2.2.1.2
Une nécessaire clarification du régime applicable au MNE
.................................
36
2.2.2 Améliorer le suivi de l’exécution budgétaire et de l’évolution de la
performance
.....................................................................................................
37
2.2.2.1
Des indicateurs de performance globalement bien adaptés aux missions de
médiation et d’information
...................................................................................
37
2.2.2.2
Des documents budgétaires insuffisamment détaillés sur l’exécution budgétaire 38
2.2.3 Des ressources et des dépenses en baisse tendancielle de 2014 à 2020
..........
39
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
4
2.2.3.1
Des ressources qui reposent essentiellement sur une subvention de l’État
...........
39
2.2.3.2
Des évolutions de dépenses variables selon les missions, des économies en
fonctionnement
.....................................................................................................
40
2.2.3.3
Un fonds de roulement excessif
...........................................................................
42
2.3
Ressources humaines : des modalités de détermination et d’évolution des
rémunérations insuffisamment encadrées
......................................................
43
2.3.1 Un cadre juridique dérogatoire pour le recours aux agents contractuels
.........
43
2.3.2 Des règles souples en matière de rémunération des agents
.............................
44
2.3.3 Des rémunérations moyennes masquant des écarts importants
.......................
45
2.3.4 Des augmentations de salaire disparates
.........................................................
46
2.3.5 Des primes insuffisamment encadrées et trop faiblement liées à la
performance individuelle
.................................................................................
47
2.3.5.1
Les primes annuelles : des textes mal articulés, un complément de rémunération
reconduit de façon quasi automatique
..................................................................
47
2.3.5.2
Des primes exceptionnelles versées sans texte définissant leurs conditions
d’octroi
.................................................................................................................
49
2.3.6 Des déplacements non conformes aux règles
..................................................
49
2.4
Achats : consolider les procédures existantes pour renforcer la sécurité
juridique des contrats
.....................................................................................
50
2.4.1 Un guide des procédures d’achat à actualiser
.................................................
50
2.4.2 Des procédures internes inégalement respectées pour les marchés à procédure
adaptée
.............................................................................................................
50
2.4.3 Marchés formalisés : un respect inégal des règles applicables
........................
51
2.5
Un déménagement du MNE porteur d’économies de fonctionnement mais
contrevenant au schéma immobilier initial du ministère
...............................
53
2.5.1 Un gain significatif pour le MNE et pour le ministère chargé de l’énergie
....
53
2.5.2 Un schéma immobilier ministériel mis à mal
..................................................
54
ANNEXES
....................................................................................................................
58
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
5
SYNTHÈSE
Une activité de médiation structurée pour faire face à une
augmentation des saisines
Le champ de compétence du médiateur national de l’énergie (MNE), médiateur public
de la consommation, a été étendu par le législateur à plusieurs reprises depuis 2013, qu’il
s’agisse des personnes physiques ou morales susceptibles de le saisir (microentreprises ou
consommateurs non-professionnels), du type de litige concerné (exécution des contrats conclus
avec un distributeur, autoconsommation) ou des énergies éligibles à la médiation (toutes les
énergies domestiques). Cet élargissement paraît justifié au regard des difficultés rencontrées
par les consommateurs. Toutefois, le MNE instruit de façon peu justifiée un certain nombre de
saisines provenant de collectivités territoriales au motif qu’elles sont des personnes morales
assimilées à des non professionnels
.
La Cour recommande de les exclure expressément du
champ des personnes morales éligibles au service de médiation.
La forte augmentation du nombre de litiges dont le médiateur est saisi, notamment
depuis 2016, est la conséquence de plusieurs facteurs, dont en premier lieu l’intensification de
la concurrence sur les marchés de l’énergie et l’entrée de nouveaux fournisseurs n’en maîtrisant
pas les procédures et la réglementation. Des améliorations de productivité ont permis
d’absorber cette augmentation jusqu’en 2018 et de maîtriser le coût de la médiation. Ces
améliorations ont porté sur l’organisation des services, la mise en œuvre d’accords amiables et
le développement d’une plateforme de médiation en ligne. Par ailleurs, le taux de suivi des
recommandations s’est amélioré au cours de la période sous revue.
Toutefois, depuis 2019, on observe une dégradation du délai de traitement des saisines,
ce qui ne permet plus de respecter les délais prescrits par le code de la consommation. La
poursuite, au rythme actuel, de la hausse des litiges dont il est saisi posera à terme la question
de l’adéquation entre ses missions et les moyens humains dont il dispose.
La nécessaire régulation en amont des saisines du MNE à travers la
gestion des réclamations par les fournisseurs
Le secteur de l’énergie présente la particularité, dans le paysage de la médiation de la
consommation, d’une coexistence d’un médiateur public, le MNE, et de deux médiateurs
d’entreprises (EDF et Engie). Le code de l’énergie dispose que la saisine d'un autre médiateur
ne fait pas obstacle au traitement d'un litige de consommation par le MNE, dès lors que l'objet
de ce litige relève de son champ de compétences. Le MNE a passé avec chacun des médiateurs
d’entreprise des conventions qui régissent, notamment, la coordination de leurs interventions.
La dualité de médiation entre le MNE et les médiateurs d’entreprises EDF et Engie,
rendue possible par la transposition de la directive européenne sur la médiation de 2013, conduit
à des écarts d’analyse dans l’examen des litiges. Au vu de ce constat, la création de nouveaux
dispositifs de médiation internes à d’autres entreprises ne semble pas souhaitable. La Cour ne
remet toutefois pas en question la dualité de médiation. Elle considère, en revanche, que le
traitement des litiges par les fournisseurs devrait faire l’objet de moyens renforcés, de manière
à traiter de façon rapide et efficace les réclamations de leurs clients. Le MNE se trouve en effet
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
6
trop souvent saisi de litiges simples restés sans réponse. La régulation de ces saisines en amont
de l’intervention du MNE suppose une responsabilisation accrue des fournisseurs. La Cour
recommande de les inciter à régler directement les litiges avec leur clientèle et, si nécessaire, à
renforcer leurs obligations réglementaires.
Une mission d’information confortée et une communication de plus
en plus active.
La seconde mission statutaire du MNE, en lien avec plusieurs partenaires, est d’informer
les consommateurs sur leurs droits et de mettre à leur disposition les outils permettant une bonne
compréhension du fonctionnement du marché de l’énergie et de ses évolutions.
Le MNE a développé ces dernières années une communication active auprès des
consommateurs et des acteurs de l’énergie. Il gère le service d’information énergie-info qui
comprend un centre d’appels et un site internet dédié. Il a développé un comparateur d’offres,
devenu un outil de référence dont la loi a consacré l’existence. Un certain nombre de
publications complètent ces services et sont également disponibles en ligne. L’activité
d’information du MNE a augmenté au cours de la période sous revue, sous l’effet notamment
de la montée en puissance du comparateur d’offres mais également de la fréquentation
croissante du site énergie-info. Le coût de cette mission est maîtrisé.
Le MNE est par ailleurs reconnu par les acteurs de la consommation et les pouvoirs
publics ; il a développé une communication d’influence active, notamment à l’occasion de son
rapport annuel.
Gestion budgétaire et comptable : une clarification urgente des textes
applicables, des dépenses en diminution malgré l’augmentation de
l’activité
En application de l’article R. 122-10 du code de l’énergie, le décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (dit décret GBCP) est
applicable au MNE qui est, dans ce cadre, assimilé à un établissement
public administratif. Le
médiateur n’applique cependant pas ce texte, au motif que le décret précité exclut de son champ
les autorités indépendantes.
La Cour invite les administrations concernées à prendre les textes nécessaires pour
préciser le statut budgétaire et comptable du MNE. Si le choix est fait d’aligner le MNE sur le
régime des autres autorités indépendantes et de ne pas lui appliquer le décret GBCP, il convient
d’abroger les dispositions contraires de l’article R 122-10 du code de l’énergie.
En tout état de
cause, la situation actuelle ne peut perdurer et une clarification rapide s’impose.
Les dépenses de la structure se sont élevées en 2020 à 4,9 M€. Elles ont diminué de
20 % depuis 2013. Cette évolution résulte de la baisse du plafond d’emplois de 46 à 41 ETP,
d’économies de fonctionnement diverses ainsi que des efforts de productivité rendus
notamment possibles par le développement des outils de médiation. Malgré la baisse des
dépenses, les prévisions budgétaires sont restées supérieures à l’exécution, entraînant une
augmentation continue du fonds de roulement, dont le niveau (2,5 M€ en 2020) apparaît
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
7
excessif au regard des recettes de l’organisme (moins de 5 M€) et de ses besoins de
fonctionnement.
Le déménagement récent du MNE dans les locaux du MTE permet des économies
substantielles. Pour autant, les conditions d’exécution par le ministère de la transition
énergétique du schéma immobilier qui a conduit au déménagement des services du MNE et à
accepter de différer celui de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), se révèlent peu
cohérentes. Elles ont privé le MNE de possibilités de mutualisation et d’optimisation de ses
moyens avec la CRE. Quant aux gains présumés pour l’Etat, ils resteront à démontrer à la
lumière du bilan financier des travaux accomplis par la CRE et des contrats de sous-location
effectivement conclus dans les locaux laissés vacants par le MNE.
Une gestion à optimiser
Le MNE dispose de moyens humains limités pour assurer la gestion administrative et
financière de l’organisme. Ces moyens ont diminué sur la période malgré la montée en
puissance de l’activité.
Cette situation fragilise doublement le MNE. Tout d’abord, elle le rend très dépendant
de quelques personnes dont l’absence prolongée ou le départ pourrait porter préjudice à son
fonctionnement. Ensuite, en dépit de l’engagement réel des personnels concernés, elle ne
permet pas d’assurer le niveau de fiabilité et de performance attendu d’un organisme public.
La gestion quotidienne est assurée de façon correcte et la Cour n’a pas relevé de
dysfonctionnements majeurs. Elle a cependant mis en évidence certaines pratiques non
conformes à la réglementation ou aux règles internes de fonctionnement du MNE. C’est
notamment le cas en matière d’achats où les règles internes de mise en concurrence au premier
euro ne sont pas toujours mises en œuvre. De même, la traçabilité de certaines procédures de
marchés publics est insuffisante pour assurer la sécurité juridique des contrats passés. S’agissant
des ressources humaines, certaines des primes versées ne reposent sur aucun texte définissant
leur montant et leurs conditions d’attribution et ne figurent pas dans les contrats de travail. Les
textes internes supposés préciser l’ensemble des conditions de recrutement et d’emploi se
trouvent incomplets ou obsolètes.
Une partie de ces difficultés peut être résolue par une simplification des règles internes
que se fixe l’organisme et qui vont parfois au-delà de ce qui est exigé par les textes
réglementaires. L’abrogation systématique des dispositions anciennes à l’occasion d’une
actualisation des textes internes en matière de ressources humaines contribuerait aussi à clarifier
les règles applicables et assurer la bonne information des salariés sur leurs conditions d’emploi
et de rémunération. De même, l’information et le pilotage budgétaire pourraient être enrichis
par un meilleur suivi de l’évolution, sur la durée, des principales lignes de dépenses.
Néanmoins, la taille de l’organisme justifierait de confier une partie de la gestion à une
structure publique disposant des moyens adéquats. Cela permettrait de décharger le MNE de
certaines contraintes de gestion tout en lui permettant de la sécurité nécessaire à
l’accomplissement de ses missions. Cette démarche, déjà engagée avec la CRE, a été poursuivie
avec le ministère de la transition énergétique dans le cadre du déménagement à la Défense. Elle
porte aujourd’hui essentiellement sur les aspects logistiques (entretien de locaux,
affranchissement…) mais semble pouvoir être étendue, dans le respect de l’indépendance du
MNE, notamment en matière de ressources humaines.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
8
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
9
LISTE DES RECOMMANDATIONS
Recommandation n°
1 (DGEC, DGCCRF, MNE, 2022)
: Exclure le recours au médiateur
national de l’énergie par les collectivités territoriales.
Recommandation n°
2 (DGEC, DB, DGCCRF, 2022)
: Inciter les fournisseurs à régler
directement les litiges avec leur clientèle et, si nécessaire, renforcer leurs obligations
réglementaires.
Recommandation n°
3 (DGEC, DB, 2022)
: Prendre les dispositions nécessaires pour
clarifier la situation du MNE au regard du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la
gestion budgétaire et comptable publique.
Recommandation n°
4 (MNE, 2022)
: Renforcer le pilotage et l’information budgétaires, en
indiquant notamment les principaux postes de dépenses et, le cas échéant, les évolutions
significatives par rapport aux exercices précédents.
Recommandation n°
5 (DB, DGEC, MNE, 2022) :
Réduire le niveau des ressources
(subvention) allouées au médiateur national de l’énergie afin d’utiliser la trésorerie disponible
et mettre fin à l’augmentation régulière du fonds de roulement.
Recommandation n°
6 (MNE, 2022)
: Adopter un cadre de gestion des personnels
contractuels, comportant notamment une grille de rémunérations.
Recommandation n°
7 (MNE, 2022)
: Utiliser plus largement les possibilités de modulation
de la part variable de la rémunération liée à la performance individuelle, sur la base d’entretiens
d’évaluation.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
10
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
11
INTRODUCTION
Le médiateur national de l’énergie est une autorité publique indépendante créée par la
loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie. Son statut est encadré
par la loi n°2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives
indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Le médiateur est doté de la personnalité
morale et de l’autonomie financière. Son financement est assuré par l’État par une subvention
dont le montant est voté chaque année par le Parlement en loi de finances. Son champ de
compétences et les modalités de son intervention sont encadrés par les articles L. 122-1 à
L. 122-5 et R. 122-1 à R. 122-12 du code de l’énergie. Le MNE est un médiateur public au sens
de l’article L. 611-1 du code de la consommation.
En qualité de médiateur public régi par les articles L. 122-1 et suivants du code de
l’énergie, il est chargé de résoudre les litiges entre les personnes physiques ou morales et les
entreprises du secteur de l'énergie et de participer à l'information des consommateurs d'énergie
sur leurs droits. Il peut être saisi de litiges nés de l'exécution des contrats conclus par un
consommateur non professionnel ou par un consommateur professionnel appartenant à la
catégorie des microentreprises.
Il est nommé pour six ans par les ministres chargés respectivement de l'énergie et de la
consommation. Son statut est encadré par la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des
Autorités administratives indépendantes (AAI) et Autorités publiques indépendantes (API).
Son mandat n'est pas révocable et il est renouvelable une fois. Il ne peut recevoir ni solliciter
d'instruction d'aucune autorité. Lorsqu'il est exercé à temps plein, son mandat est incompatible
avec l'exercice d'une activité professionnelle ou d'un emploi public.
Trois titulaires se sont succédé au cours de la période sous revue : Denis Merville (2007-
2013), Jean Gaubert (2013-2019), Olivier Challan-Belval, en fonction depuis sa nomination par
arrêté interministériel du 25 novembre 2019.
Le budget du MNE était de 5,33 M€ en 2020 dont 4,85 M€ provenant du programme
budgétaire 345
Service public de l’énergie
, le solde venant de ressources propres (prélèvement
sur fonds de roulement). Son plafond d’emplois était de 41 ETP en 2020. L’institution est
composée de trois services : médiation ; information et communication ; administration et
finances. La médiation représente 70 % de l’effectif.
Le précédent rapport de la Cour avait mis en lumière les difficultés d’exercice de ses
missions et des fragilités de gestion lors des premières années de fonctionnement de
l’institution. L’annexe n° 1 présente le suivi des recommandations alors établies. L’activité du
MNE a connu une forte croissance depuis 2013, sous l’effet de l’ouverture à la concurrence du
marché de l’énergie qui s’est intensifiée, de l’élargissement de ses compétences, d’une
communication active et d’une notoriété accrue qui ont conduit les consommateurs à recourir à
ses services.
Le présent relevé d’observations définitives analyse la manière dont le MNE a assumé
ses missions de médiation et d’information dans ce contexte évolutif ainsi que la place qu’il
occupe dans le secteur de la médiation de l’énergie (1
ère
partie). Il examine également la gestion
des moyens de l’institution et son organisation administrative (2
ème
partie).
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
12
1
DES ACTIVITÉS SOUTENUES, UNE COMPÉTENCE
RECONNUE
1.1
Une activité de médiation qui s’est structurée pour faire face à
l’augmentation régulière des saisines
1.1.1
Des compétences élargies dans un système de médiation encadré
1.1.1.1
L’élargissement continu des compétences
La loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie a institué un médiateur
national de l’énergie, autorité publique indépendante, «
chargé de recommander des solutions
aux litiges [relatifs aux contrats de fourniture] entre consommateurs et fournisseurs
d’électricité et de gaz naturel et de participer à l’information des consommateurs d’électricité
ou de gaz naturel sur leurs droits
». La directive de 2013
1
, dite « directive médiation »,
transposée en droit français en 2015
2
, fait du MNE un médiateur public de la consommation
dans le secteur de l’énergie, notifié en ce sens à l’Union européenne. Il assure ses missions dans
les conditions prévues par les codes de la consommation et de l’énergie
3
.
Le champ de compétence du médiateur a été étendu par le législateur à plusieurs reprises
au cours de la période sous revue. Ainsi, depuis la loi du 15 avril 2013 visant à préparer la
transition vers un système énergétique plus sobre
4
, le MNE est compétent pour résoudre les
litiges rencontrés par les professionnels microentreprises (employant moins de 10 salariés et
dont le chiffre d’affaires n’excède pas 2 M€) et par les consommateurs non-professionnels (les
associations à but non lucratif, syndicats de copropriétaires), quels que soient leur puissance
souscrite ou leur niveau de consommation d’énergie. Il peut aussi intervenir dans le cadre de
l’exécution des contrats conclus avec un distributeur de gaz naturel ou d’électricité
(exemple : contrats de raccordement).
1
Directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relative au règlement
extrajudiciaire des litiges de consommation.
2
Ordonnance n°2015-1033 du 30 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de
consommation et décret n°2015-1382 du 30 octobre 2015 relatif à la médiation des litiges de consommation.
3
Le MNE est un médiateur public au sens de l’article L. 611-1 du code de la consommation. Il assure sa
mission dans les conditions prévues aux articles du code de la consommation et selon les modalités définies par
les articles R. 122-1 et suivants du code de l'énergie et pour les litiges des consommateurs personnes physiques,
par les articles L. 612-1 et suivants et R. 612-1 et suivants du code de la consommation.
4
Loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et
portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
13
La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte
5
a
renforcé les prérogatives du MNE, en étendant ses compétences à la consommation de toutes
les énergies domestiques (fioul, GPL, bois énergie, réseaux de chaleur). Enfin, la loi dite
« climat et résilience » du 22 août 2021
6
lui a donné compétence sur les litiges liés à
l’autoconsommation.
L’élargissement du champ d’attribution du MNE paraît justifié au regard des difficultés
croissantes posées par l’ouverture du marché de l’énergie. L’exposé des motifs de l’article 4 de
la proposition de loi instaurant une tarification progressive de l’énergie, devenue la loi du
13 avril 2013, précisait déjà que
« le médiateur national de l’énergie a pris une place
indispensable dans un marché de l’énergie qui se cherche encore. Il ne se contente pas d’être
une chambre d’enregistrement et de traitement des litiges ; au-delà des solutions individuelles
qu’il apporte aux consommateurs, il fait avancer des problèmes collectifs en les portant sur la
place publique »
. Le législateur a par la suite tenu compte des évolutions du marché de l’énergie
et des difficultés rencontrées par les consommateurs pour ajuster les compétences du MNE.
Toutefois, le champ d’application de la loi du 15 avril 2013 pose une difficulté
concernant les collectivités locales. De nombreux litiges n’étant pas à l’époque recevables
7
, ce
texte a procédé à des extensions de compétences, notamment à tous les consommateurs non
professionnels. Les travaux préparatoires montrent que les « non-professionnels » concernés
incluaient l’ensemble des associations, ainsi que les syndicats de copropriété, sans mentionner
le cas des collectivités locales.
Or, en vertu de l’article L. 122-1 du code de l’énergie, le MNE instruit actuellement un
certain nombre de saisines provenant de collectivités territoriales au motif qu’elles sont des
personnes morales assimilées à des non professionnels
.
La compétence du MNE pour de tels
litiges ne va pas de soi dès lors qu’ils portent sur l’application de contrats conclus dans le cadre
de marchés publics, pour lesquels les collectivités agissent comme des professionnels. Ces
saisines sont certes peu nombreuses (une soixantaine de dossiers en 2021) mais elles
contribuent à alourdir inutilement la charge du MNE. Elles posent un problème de principe,
d’autant qu’elles concernent principalement des collectivités de moyenne ou de grande
importance qui disposent des moyens de traiter leurs litiges. Ces saisines sont, en outre,
majoritairement portées (55 sur 61 en 2021) par une société de conseil démarchant les
collectivités en les incitant à saisir le médiateur. La Cour recommande donc d’exclure
expressément les collectivités locales du champ des personnes morales éligibles au service de
médiation du MNE, quelle qu’en soit la taille, les plus petites collectivités, dont les moyens
sont plus modestes, pouvant disposer, quant à elles, des services des intercommunalités pour se
prémunir contre d’éventuels litiges.
Recommandation n° 1.
(DGEC, DGCCRF, MNE, 2022) Exclure le recours au
médiateur national de l’énergie par les collectivités territoriales.
5
Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
6
Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de
la résilience face à ses effets.
7
L’article L. 122-1 du code de l’énergie limitait les compétences du MNE aux contrats de fourniture
d’énergie conclus par des particuliers ou des professionnels souscrivant une puissance électrique égale ou
inférieure à 36 kilovoltampères ou consommant moins de 30 000 kilowattheures de gaz naturel par an.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
14
1.1.1.2
Le champ de compétence actuel
Le champ de compétence actuel du MNE résulte de l’article L. 122-1 du code de
l’énergie. Sont concernées toutes les formes d’énergie domestique telles que l’électricité, le gaz
naturel, le gaz pétrole liquéfié (GPL) en bouteille ou en citerne, le fioul, le bois et les réseaux
de chaleur.
Peuvent faire appel au médiateur directement ou par l’intermédiaire de la personne
qu’ils ont choisi pour les assister :
-
tous les consommateurs particuliers ;
-
les autoconsommateurs particuliers (producteurs d’électricité qui consomment une partie et
revendent le surplus) ;
-
les micro-entreprises : artisans, commerçants, professions libérales et petits professionnels (moins
de 10 salariés et 2 M€ de CA) ;
-
les non professionnels : associations à but non lucratif et syndicats de copropriétaires.
Le MNE peut intervenir pour tous les litiges nés de contrats conclus avec une entreprise
du secteur de l’énergie. Il peut, en particulier, instruire en médiation les litiges nés de
l’exécution des contrats suivants :
-
fourniture d’énergie et services associés (ex : mise à disposition d’une citerne GPL et entretien,
assurance impayés, conseils sur les économies d’énergie…) ;
-
contrats de raccordement avec ENEDIS, GRDF ou à un réseau de chaleur ou de GPL ;
-
vente d’énergie dans le cadre d’une opération d’autoconsommation individuelle.
Cependant, le médiateur ne peut pas intervenir pour les litiges concernant :
-
la production d’électricité si toute l’énergie produite est revendue ;
-
les travaux de rénovation énergétique ou l’attribution de primes énergie.
1.1.1.3
Des procédures de médiation encadrées
Les règles générales de la médiation de la consommation encadrent le processus de
médiation. Il en résulte que le médiateur dispose de trois semaines pour se prononcer sur la
recevabilité d’une demande. En cas de recevabilité, il dispose de 90 jours pour mener à terme
le processus de médiation. Contrairement aux autres médiations conventionnelles qui se
bornent à rapprocher les parties en vue d’un accord, le médiateur de la consommation, à défaut
d’accord entre les parties, est tenu de présenter une proposition de solution. Le processus est
clôturé soit par le constat de l’accord intervenu entre les parties, soit par l’acceptation ou le
refus par celles-ci de la proposition de solution formulée par le médiateur.
1.1.1.3.1
Des règles de recevabilité rigoureuses
Outre le fait que le litige doit entrer dans le champ de compétence du médiateur, le
consommateur doit avoir tenté, au préalable, de résoudre son litige directement auprès du
professionnel par une réclamation écrite (courrier ou courriel) dans un délai compris entre deux
mois et un an avant de saisir le MNE. Sa demande ne doit pas être, en première analyse,
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
15
infondée ou abusive. Le dossier ne doit pas faire l’objet d’un examen simultané par un autre
médiateur. Le litige ne doit pas avoir déjà été examiné ou ne doit pas être en cours d’examen
par une juridiction.
Un accusé de réception est envoyé dans un délai de 48 heures après sa réception. Si le
litige est recevable en médiation, le requérant est informé par écrit de sa recevabilité, du
déroulement et des délais du processus de médiation. Il est également informé qu’il peut se
retirer du processus de médiation à tout moment. Si le litige n’est pas recevable, le
consommateur en est informé dans un délai maximum de trois semaines.
La réponse du médiateur aux litiges non recevables consiste à informer et orienter les
requérants dans leurs démarches. Les services du MNE peuvent signaler le litige à l’entreprise
concernée, lorsque les premières démarches du requérant sont restées sans suite. Dans le cas de
litiges pour lesquels aucune réclamation préalable n’a été jointe, le requérant est informé que,
sauf opposition de sa part sous 5 jours, son dossier sera notifié à l’opérateur concerné pour
qu’une réponse lui soit apportée. Cette notification tient lieu de réclamation préalable pour saisir
le médiateur si le litige n’est pas résolu dans un délai de 2 mois. S’agissant des litiges qui ont
fait l’objet d’une saisine prématurée ou trop tardive, le requérant et l’opérateur concerné sont
informés que le litige pourra être déclaré recevable dans un délai compris entre 2 mois et un an
suivant l’envoi d’une réclamation.
1.1.1.3.2
Une instruction enserrée dans des délais
Consommateurs et opérateurs sont associés tout au long de l’instruction du litige et les
pièces du dossier leur sont communicables. Le délai attendu des opérateurs pour transmettre
leurs observations est fixé par le médiateur (au maximum de trois semaines en fonction de la
complexité du dossier). La médiation débouche sur un accord amiable ou une recommandation
de solution. En l’absence d’accord amiable entre les parties, le médiateur formalise une
recommandation de solution qu’il transmet aux parties. Le suivi de cette recommandation ne
peut être imposé aux parties mais les opérateurs sont tenus d’informer le médiateur dans un
délai d’un mois s’ils acceptent de mettre en œuvre la solution proposée. La mise en œuvre de
la recommandation du médiateur par l’opérateur n’est pas subordonnée à son acceptation
préalable par le requérant. Par ailleurs, le médiateur s’efforce de recueillir auprès du requérant
son avis sur la solution de médiation proposée. En l’absence de réponse dans un délai d’un
mois, il considère que la solution de médiation est acceptée. Les requérants sont
systématiquement informés par écrit des voies de recours juridictionnel s’ils ne sont pas
satisfaits de la médiation.
En application de l’article R. 122-1 du code de l’énergie et de l’article R. 612-5 du code
de la consommation, le délai réglementaire d’émission des recommandations du médiateur
national de l’énergie est de 90 jours à compter de la date de notification par laquelle le médiateur
confirme au requérant qu’il se saisit de son dossier. En cas de litige complexe, le médiateur
informe le requérant du prolongement du délai d’instruction.
1.1.1.3.3
Deux types de recommandations
Le MNE propose, en premier lieu, des solutions écrites et motivées aux litiges entre les
consommateurs et les fournisseurs et distributeurs d’énergie. Il s’agit de
recommandations
. Dès
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
16
l’instant où la demande du consommateur est fondée, elle fait l’objet d’une enquête et donne
lieu à une recommandation écrite préconisant une solution au litige et qui n’a pas de caractère
contraignant. Le taux de suivi de ces recommandations s’est amélioré au cours de la période
sous revue, passant de 80 % en 2013 à 95 % en 2020 (
cf
. tableau n° 1
infra
). Ces statistiques
n’incitent pas à proposer de rendre les recommandations d’application obligatoire, ce qui
d’ailleurs ne serait pas conforme à l’esprit de la médiation et conduirait à les assortir d’un
pouvoir de sanction au profit du médiateur. En revanche, obliger les opérateurs récalcitrants à
motiver les refus d’application des recommandations pourrait être une mesure incitative à un
meilleur suivi, notamment lorsqu’elles concernent des points de droit.
Par ailleurs, le MNE émet des
recommandations génériques
. Elles constituent, le plus
souvent, des rappels à la réglementation. Elles proposent également des évolutions pour
améliorer le fonctionnement du marché de l’énergie au bénéfice des consommateurs et prévenir
les litiges. Le précédent rapport de la Cour avait recommandé de « ne pas utiliser le terme de
recommandation pour les avis à caractère générique ». Ce constat était partagé par le médiateur
mais aucune terminologie alternative n’a été trouvée. Ce terme est aujourd’hui reconnu et admis
par l’ensemble des acteurs et il ne paraît pas utile de le modifier. En revanche, comme l’avait
proposé la Cour en 2014, ces recommandations font dorénavant l’objet d’une mise à jour et
d’un suivi réguliers par le service de médiation, chacune étant assortie d’un statut (suivie, non
suivie, à l’étude).
1.1.2
Une amélioration de la productivité pour faire face à la croissance de l’activité
1.1.2.1
Une activité en forte hausse depuis 2016 qui impacte les délais de traitement
Les litiges enregistrés par le MNE ont connu une certaine stabilité, voire une baisse
s’agissant des demandes de médiation écrites, en début de période sous revue (2013-2016). A
partir de 2016, on observe une forte hausse des litiges enregistrés et recevables, associée à un
allongement des délais de traitement.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
17
Tableau n° 1 :
Évolution des principales données de médiation (2013-2020)
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Litiges enregistrés
15041
14412
12319
12260
14548
16934
22807
27203
30626
dont demandes de
médiation écrites
5510
6453
5287
5470
6650
8715
11591
13083
15327
dont demandes de
médiation écrites en ligne
182
1093
1879
2437
3412
5344
7522
9039
11013
Litiges recevables
3649
4159
3497
3499
4039
5530
7197
8595
9959
Recommandations
émises
1965
2301
2910
3183
3724
5086
6784
7681
9051
dont accords amiables
non
mesuré
non
mesuré
non
mesuré
1337
1974
3102
4003
4916
6142
dont émises en moins de 90
jours
non
mesuré
non
mesuré
non
mesuré
2769
3240
4120
5156
3764
<2700
Délai moyen traitement
(jours)
68
68
61
59
58
63
70
83
107
Montant moyen accordé
(€)
578
848
728
753
768
611
570
697
706
Taux de suivi
recommandations
80%
78%
75%
81%
89%
92%
90%
95%
96%
Enquête de satisfaction :
taux de satisfaction
globale
79%
80%
80%
79%
80%
89%
90%
82%
86%
Enquête de satisfaction :
taux de recommandation
à un proche
93%
89%
93%
89%
92%
94%
92%
91%
92%
Source : MNE
Modalités de saisine
Les consommateurs se manifestent auprès du MNE en majorité par un appel du numéro
vert gratuit 0 800 112 212 d’énergie-info. Ils le font également par une saisine directe sur l’outil
en ligne ou par courrier. Les autres demandes sont principalement émises par le formulaire de
contact du site Energie-info
8
. En 2019, le médiateur national de l’énergie avait enregistré 22 807
litiges. Au cours de l’année 2020, il a reçu 27 203 litiges, soit une hausse de 19 % par rapport
à l’année 2019, au cours de laquelle le nombre de litiges avait déjà augmenté de 35 %.
Recevabilité
Pour apprécier le nombre de requêtes recevables, le MNE se limite aux demandes de
médiation écrites
9
. Sur cette base, environ deux tiers des dossiers sont jugés recevables. Ce taux
de recevabilité est plus élevé chez le MNE que chez la plupart des médiateurs sectoriels ou
d’entreprises (
cf
. annexe n° 2).
8
énergie-info - Site d'information du médiateur national de l'énergie (energie-info.fr)
9
Les litiges enregistrés par téléphone ou par courriel via le service d’information Energie-Info, qui
représentent environ 50% des litiges enregistrés chaque année, ne sont pas considérées, à ce stade de la procédure,
comme des demandes de médiation.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
18
Dans les trois-quarts des cas, un litige est déclaré non recevable lorsque la saisine est
prématurée ou incomplète au vu des pièces requises pour son instruction. Les autres cas
d’irrecevabilité concernent, pour 15 % d’entre eux, des dossiers pour lesquels le consommateur
ne justifie pas avoir engagé une démarche écrite préalable auprès du fournisseur et, pour 10 %,
des litiges qui n’entrent pas dans le champ de compétence du médiateur.
Efficacité de la médiation
Le taux de suivi des recommandations s’améliore sur la période sous revue. De même,
les enquêtes effectuées traduisent un niveau de satisfaction élevé de l’action du MNE.
Les délais de traitement, après une baisse jusqu’en 2017, se sont allongés à compter de
cette date. En 2020, le délai moyen de clôture d’un litige recevable a été de 83 jours
10
, soit 13
jours de plus qu’en 2019 et 20 jours de plus qu’en 2018. Ce délai moyen a dépassé en 2021 le
délai maximum réglementaire de 90 jours dans lequel le MNE doit formuler sa
recommandation.
L’augmentation du nombre de litiges dont le médiateur est saisi - et par conséquent des
délais de traitement - est la conséquence de plusieurs facteurs, dont en premier lieu
l’intensification de la concurrence sur les marchés de l’énergie, les consommateurs ayant été de
plus en plus nombreux à changer de fournisseurs. A cette occasion, les difficultés liées à la
souscription, la résiliation, ou encore des erreurs de référence de compteur se sont multipliées.
Dans le même temps, les consommateurs, plus attentifs aux prix et à leurs factures, ont été plus
enclins à effectuer des réclamations. La recrudescence de démarchages téléphoniques et à
domicile est également à l’origine de nombreux litiges résultant de pratiques commerciales
agressives ou trompeuses, parfois illégales.
Dans le contexte de cette concurrence accrue, de nouveaux fournisseurs sont entrés sur
le marché de l’énergie sans en maîtriser les procédures et la réglementation, ce qui a pu
occasionner des litiges. Le non-respect de la réglementation n’épargne pas les fournisseurs
historiques, en particulier avec le cas des factures portant sur des rattrapages de consommation
de plus de 14 mois qui contreviennent à l’article L. 224-11 du code de la consommation.
Parallèlement, certains fournisseurs ont rencontré des problèmes de systèmes d’information
ayant entraîné de nombreuses erreurs de facturation ( blocages, contrats non résiliés, trop-perçus
non remboursés).
A ces problèmes de facturation s’ajoute ceux entrainés par l’insuffisance des moyens
déployés par les opérateurs pour traiter de façon satisfaisante et rapide les réclamations de leurs
clients. Le MNE est saisi de trop nombreux litiges simples, non traités dans un délai de deux
mois et issus de réclamations qui n’ont parfois fait l’objet d’aucune réponse du service clients.
Le déploiement des compteurs communicants dont on pouvait espérer une baisse des
litiges a eu, dans un premier temps, un effet inverse compte tenu de problèmes liés à la pose ou
de contestations de consommateurs ayant vu leur facturation augmenter (le nouveau compteur
révélant des réalités de consommation auparavant mal comptabilisées). De nouveaux litiges liés
à l’adaptation des systèmes d’information à l’intégration de données télé-relevées chez les
distributeurs comme les fournisseurs ont également été observés.
10
Si 24 % des dossiers ont été clos en moins de deux mois en 2020, seulement 49 % ont pu l’être en
moins de 90 jours, soit beaucoup moins qu’en 2019 (76 %).
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
19
On peut enfin noter que l’aggravation de la précarité énergétique a conduit des
consommateurs, confrontés à des difficultés financières accrues et ayant vu le montant de leurs
factures augmenter, à les contester auprès du MNE.
Typologie des litiges
En 2020, les litiges reçus concernent d’abord la fourniture d’électricité (65 %)
puis celle
de gaz (21 %), et les deux énergies simultanément (11 %). La quasi-totalité des litiges reçus
touche des consommateurs particuliers (94 %). Un petit tiers (29 %) d’entre eux concerne la
contestation des niveaux de consommations facturées et un autre (28 %) des problèmes liés à
la facturation (facture, paiement et règlement, prix/tarif). En 2020, il y a eu près de 1800 litiges
supplémentaires relatifs à des problèmes de facturation par rapport à 2019.
Les entreprises les plus concernées
Sur les 8 595 litiges déclarés recevables en 2020, les fournisseurs les plus concernés
sont Total Direct Energie (2 292 litiges recevables), puis EDF (2 097), Engie (1 888) et ENI
(1 355).
Le MNE publie depuis 2013 un indicateur relatant le taux de litiges pour 100 000
contrats résidentiels.
11
Après une baisse en début de période, ce taux est en progression depuis
2016.
Tableau n° 2 :
Évolution du taux de litiges pour 100 000 contrats
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
EDF
45
36
29
28
34
35
39
38
Engie
73
69
47
53
85
92
96
93
Direct Energie
127
109
82
58
61
61
-
-
Lampiris/Total Spring
-
157
199
128
89
125
-
-
Total Energie
-
-
-
-
-
-
93
115
ENI
-
220
308
200
207
253
329
307
Taux global
57
50
40
41
56
61
72
76
Source : MNE
Un nouvel indicateur a été mis en place, par les services du médiateur pour prendre en
compte la responsabilité d’un fournisseur dans le litige
12
. Dans de nombreux dossiers, plusieurs
opérateurs sont engagés dans un même litige, tous n’ayant pas nécessairement de responsabilité
dans le problème survenu. Par rapport au classement du nombre de litiges recevables, celui des
fournisseurs dont la responsabilité est engagée diffère : Total Direct Energie (1 345 litiges),
ENI (1 287), Engie (1 247), EDF (968). Le fournisseur ENI est responsable dans 91 % des
litiges dans lesquels il est cité, Greenyellow à 82 %, Iberdrola à 81 %, Total Direct Energie et
Vattenfall à 73 %, Engie à 71 %, Leclerc Energies à 64 %, Ekwateur à 55 % et EDF à 51 %. La
11
Pour les fournisseurs titulaires de plus de 100 000 contrats résidentiels.
12
Afin de mieux comprendre le rôle actif joué par un acteur dans l’origine d’un litige, le MNE a évalué
pour chaque opérateur la part des litiges dans lesquels il est responsable par rapport au total des litiges dans lesquels
il est impliqué. Cette approche permet d’effacer l’effet « volume » du nombre de litiges des grands opérateurs
ayant beaucoup de clients.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
20
responsabilité des gestionnaires de réseaux est plus limitée : celle d’ENEDIS est engagée dans
46 % des cas et celle de GRDF dans 28 %. Le traitement des litiges par les opérateurs reste un
sujet d’attention qui doit les conduire à mettre en œuvre des moyens suffisants pour traiter de
façon rapide et efficace les réclamations de leurs clients, en amont de l’intervention du MNE
(
cf. infra 1.2.3
).
1.1.2.2
L’amélioration de la productivité par les accords amiables et la médiation en
ligne
1.1.2.2.1
La mise en œuvre d’accords amiables.
Le traitement des litiges recevables par les services du MNE a donné lieu à un nombre
croissant de recommandations émises, passant de moins de 2 000 en 2013 à 7 681 en 2020 et
plus de 9 000 en 2021. Face à cette hausse régulière, le MNE a développé depuis 2016 des
procédures de règlement amiable des litiges en capitalisant sur l’expérience des litiges
récurrents à partir de trames d’analyse communes. Ce recours à des accords amiables est une
innovation importante qui a permis de limiter les délais d’instruction en médiation. Le nombre
d’accords amiables est passé de 1 337 l’année de leur mise en place en 2016 à plus de 4 900 en
2020 et plus de 6 000 en 2021. Alors qu’ils représentaient 59 % des solutions de médiation en
2019, ce taux s’élève à 64 % en 2020. Ces accords amiables sont dans leur grande majorité mis
en œuvre sans intervention ultérieure du MNE. Les dossiers restants (un peu plus de 30 % en
2021), les plus complexes donnent lieu à recommandations.
1.1.2.2.2
Le développement de la médiation en ligne
Une médiation peut être initiée par des moyens classiques (téléphone ou courrier) ou
directement sur une plateforme en ligne, Sollen
13
, accessible via le site du MNE, via énergie
info ou encore sur le site la plateforme de médiation interactive Sollen
14
. Cette application du
MNE, conçue en 2013, a pour objectif d’améliorer l’efficacité de la médiation et recense tous
les dossiers de demande de médiation dès lors qu’ils sont recevables.
Le formulaire à remplir précise les conditions de recevabilité des requêtes (champs de
compétence et délais de saisine). Une fois la demande formulée, la plateforme Sollen régit les
échanges entre les parties à la médiation via des notifications à travers deux espaces distincts :
un espace de médiation réservé aux échanges entre les parties (requérants, MNE,
opérateurs) ;
une messagerie privée permettant au MNE de dialoguer avec chacune des parties.
La plateforme Sollen a fait l’objet d’une certification en application des dispositions de
la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation et de réforme de la justice qui a défini
13
SOlution en Ligne aux Litiges d’Energie.
14
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
21
un cadre de certification des services de médiation en ligne
15
. Elle impose, en particulier,
l’interdiction de mettre en œuvre un service basé intégralement sur des algorithmes. Le bénéfice
de cette certification est attribué de plein droit aux médiateurs inscrits sur la liste prévue à
l’article L. 615-1 du code de la consommation au titre de leur activité de médiation, le
législateur considérant le caractère complet de l’instruction de l’activité du médiateur par les
services de la Commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation
(CECMC)
16
lors de l’inscription sur la liste des médiateurs de la consommation, le dispensait
d’un audit de certification par un organisme indépendant.
Les principales fonctionnalités de la plateforme de médiation en ligne donnent
satisfaction, même si des améliorations pourraient être envisagées pour permettre de traiter plus
rapidement des volumes de données en croissance compte tenu de l’augmentation des requêtes.
Le renforcement de la sécurité informatique et la protection des données personnelles
font l’objet d’une attention particulière de la part du MNE. En application du RGPD, ce dernier
fait valoir que tous les traitements de données personnelles sont consignés dans le registre des
activités de traitement et que ces données personnelles contenues dans la plateforme de
médiation en ligne sont conservées pendant une durée de cinq ans à l’issue de laquelle elles font
l’objet d’une anonymisation.
1.1.2.3
Des moyens humains plus fortement sollicités
Le service médiation est le principal service du MNE puisqu’il emploie 30 personnes
(incluant la cheffe de service). Il est organisé en trois pôles :
un pôle d’appui à la médiation assure les fonctions support (accueil téléphonique, l’analyse
et l’enregistrement des courriels, et la gestion administrative des saisines) et procède à
l’analyse de recevabilité des demandes de médiation (7 personnes dont 2 chargées plus
spécifiquement de la recevabilité) ;
deux pôles juridiques qui instruisent les dossiers recevables :
-
l’un, pour les litiges électricité (12 personnes) ;
-
l’autre, pour les litiges gaz naturel et réseaux (10 personnes).
Les données d’activité retracées dans le tableau suivant montrent que le MNE s’est
attaché à améliorer sa productivité depuis 2013, notamment grâce à la dématérialisation de ses
processus de médiation.
15
Certification Certilis.
16
La CECMC a pour rôle d’évaluer l’activité des médiateurs de la consommation et d’en contrôler la
conformité avec les exigences du code de la consommation, relatives à la médiation des litiges. Elle est chargée
d’établir et de mettre à jour la liste des médiateurs qu’elle notifie auprès de la Commission européenne.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
22
Tableau n° 3 :
Évolution comparée des indicateurs d’activité de médiation et des effectifs
nnée
Demandes
médiation
écrites
ETPT
assistantes
médiation
(dont chef
de pôle)
ETPT
receva
bilité
Analyses
recevabilité
par ETPT
Litiges
recevables
en
médiation
Litiges
recevables
affectés
par CM*
Recos
émises
ETPT
CM
(dont
chef de
pôle)
Reco/
CM
2013
5 510
6
3
1 837
3 649
261
1 965
14
140
2014
6 453
6
3
2 151
4 159
277
2 301
15
153
2015
5 287
5
3
1 762
3 497
233
2 910
15
194
2016
5 470
5
2
2 735
3 499
233
3 183
15
212
2017
6 650
5
2
3 325
4 039
252
3 724
16
233
2018
8 715
5
2
4 358
5 530
307
5 086
18
283
2019
11 591
5
2
5 796
7 197
327
6 784
22
308
2020
13 803
4
2
6 542
8 595
391
7 681
22
349
2021
15 237
4
2
7 619
10 031
418
9 051
24
377
*CM : chargés de médiation
Source : Cour des comptes
Jusqu’en 2014, six assistantes de médiation géraient les tâches administratives
(enregistrement des courriers, mails, appels téléphoniques entrants et sortants) et trois analystes
avaient la charge de la recevabilité des demandes de médiation. Les gains engendrés par la
dématérialisation ont permis de réduire progressivement le nombre de postes alloués à ces
fonctions. Le MNE emploie désormais six personnes pour les mêmes tâches (trois assistantes,
deux analystes de la recevabilité et un chef de pôle pour les encadrer). Par ailleurs, les
évolutions d’organisation interne mises en œuvre au cours de la période sous revue, notamment
à partir de 2014, ont permis de renforcer le service médiation par le recrutement de juristes. Le
MNE a appliqué la recommandation n° 4 du rapport de la Cour de 2014 qui proposait le
regroupement
des
deux
services
« concertation
et
médiation »
et
« études
et
recommandations ». Il s’est également attaché à mettre en œuvre la recommandation n° 5 qui
proposait de « réduire le nombre de niveaux de révisions des recommandations par niveaux de
difficulté » et en adaptant les compétences du personnel à ces derniers.
Ces évolutions ont permis de maîtriser le coût de la médiation du MNE comme le montre
le tableau n° 4. Les modalités de traitement du coût de cette mission ont été évaluées par
l’addition du coût total du programme relatif à la médiation (« résoudre les litiges ») et de 80 %
du coût du programme de moyens (« piloter la performance »), ce taux correspondant à une
évaluation de la proportion du temps consacré par les services généraux à la mission de
médiation au regard des effectifs et de l’activité (le solde de 20 % recouvrant la mission
d’information et communication).
Tableau n° 4 :
Estimation du coût de la médiation à partir de l’exécution budgétaire (en euros)
2 013
2 014
2 015
2 016
2 017
2 018
2 019
2 020
Var (1)
Résoudre les litiges
2 594 344
2 109 267
1 909 000
1 589 200
1 947 120
1 837 210
2 192 163
1 880 799
-27,5%
Pilotage
performance
1 424 308
1 660 410
1 772 800
2 228 760
1 527 929
1 674 200
1 535 469
1 670 616
+17%
Coût médiation
4 018 652
3 769 677
3 681 800
3 817 960
3 475 049
3 511 410
3 727 632
3 551 415
-11%
(1)
Variation 2013-2020
Source : Cour des comptes (à partir des rapports annuels de performance)
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
23
Si elles doivent être interprétées avec précaution compte tenu de la nature des missions
assignées à chacune de ces structures, les données comparatives tirées de l’activité d’autres
médiateurs sectoriels (cf. Annexe n° 2) montrent que le coût de la médiation du MNE est
globalement plus faible que pour la plupart des médiateurs sectoriels ou d’entreprises.
Le nombre de recommandations écrites de solutions émises par chargé de médiation est
passé de 140 par an en 2013 à 377 en 2021. Alors qu’un chargé de médiation gérait en moyenne
un portefeuille de 130 litiges recevables en 2013, il en gère 418 en 2021. Ces données traduisent
les améliorations de productivité apportées au système de médiation qui a permis d’absorber la
hausse du nombre de litiges. Toutefois, depuis 2019, on observe une dégradation du délai de
traitement des saisines. Ces derniers ont, pour la première fois en 2021, dépassé le délai de 90
jours assigné à la médiation (107 jours). Au rythme d’évolution actuel, le MNE ne semble plus
en mesure de respecter les délais prescrits par le code de la consommation et a formulé une
demande de 3 ETP supplémentaires
auprès du secrétariat général du MTE pour 2022, à laquelle
il n’a pas été donné suite. Des gains de productivité peuvent être encore attendus de la
dématérialisation mais l’hypothèse la plus communément admise par les acteurs reste une
croissance continue des litiges soumis au MNE.
1.2
La coexistence du MNE avec les médiateurs d’entreprise
1.2.1
L’évolution du cadre juridique et sa mise en œuvre
Le secteur de l’énergie présente des particularités dans le paysage de la médiation de la
consommation, avec la coexistence d’un médiateur public, le MNE, et de deux médiateurs
d’entreprises (EDF et Engie). Le législateur a, en effet, maintenu les structures de médiation
des deux opérateurs historiques lors de la création du MNE en 2006. Par la suite, la directive
européenne de 2013
17
, tout en privilégiant le système des médiateurs sectoriels, a reconnu la
mise en place de médiateurs d’entreprise. Elle a été transposée en France en 2015
18
.
Les groupes EDF et Engie disposent ainsi chacun d'un médiateur, compétent en vue de
la résolution amiable des litiges opposant un client, un fournisseur, un producteur d'énergie ou
une autre partie prenante externe à une entité de ces groupes. Ces médiateurs sont désignés dans
les conditions définies par l'article L 153-2 du Code de la consommation, qui dispose,
notamment qu'aucun lien hiérarchique ou fonctionnel entre le professionnel et le médiateur ne
peut exister pendant l'exercice de sa mission de médiation. Ils sont inscrits auprès de la
commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CECMC).
Le code de l’énergie
19
précise que la saisine d'un autre médiateur ne fait pas obstacle au
traitement d'un litige de consommation par le MNE, dès lors que l'objet de ce litige relève de
17
Directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relative au règlement
extrajudiciaire des litiges de consommation, dite « directive médiation ».
18
Ordonnance n°2015-1033 du 30 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de
consommation et décret n°2015-1382 du 30 octobre 2015 relatif à la médiation des litiges de consommation.
19
Article L. 122-1
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
24
son champ de compétences. Mais, conformément aux dispositions de l’article L. 612-5 du code
de la consommation, les litiges du secteur de l’énergie ne peuvent donner lieu à d’autres
procédures de médiation que sous réserve d’une convention, notifiée à la CECMC, qui répartit
les litiges entre les médiateurs concernés. Le MNE a ainsi passé une convention avec les
médiateurs d’Engie et d’EDF, permettant aux consommateurs de saisir, au choix, le médiateur
d’entreprise ou le MNE. Dans l’hypothèse où le consommateur ne serait pas satisfait de la
solution proposée par le médiateur d’entreprise, il peut saisir le MNE dans un second temps.
Le précédent rapport de la Cour, intervenu avant la transposition de la directive de 2013,
dans un contexte de tensions entre le MNE et les médiateurs d’entreprises, avait recommandé
la mise en place de conventions pour améliorer l’efficience du processus de médiation
20
. Cette
recommandation s’est trouvée, de fait, appliquée avec la transposition de la directive de 2013.
Ces conventions ont été signées par le MNE avec Engie puis EDF, respectivement les
21 et 22 décembre 2015.
Les règles conventionnelles régissant les relations entre le MNE et les médiateurs
d’entreprises
Coordination des interventions de chaque médiateur pour les litiges dont ils sont saisis
Les consommateurs contractant avec une entreprise de chacun des groupes EDF et
Engie peuvent librement saisir de leur litige soit le MNE, si le litige relève de son champ de
compétences, soit les médiateurs de ces entreprises, sans que la saisine de l'un puisse être
conditionnée à la saisine préalable ou simultanée de l'autre.
Si le dossier est recevable au sens des textes qui régissent le MNE, et si le consommateur
a saisi les deux médiateurs, les services du MNE et ceux du médiateur d’entreprise informent
le consommateur que deux médiations ne sauraient être menées en parallèle.
Il est alors demandé au consommateur de choisir l'un ou l'autre des médiateurs tout en
l'informant que :
-
s'il choisit le médiateur de groupe, et qu'il n'est pas satisfait de la solution proposée, il
conserve le droit de recourir ultérieurement au MNE ;
- s'il choisit le MNE, le médiateur du groupe renoncera à instruire le dossier car il ne
sera plus en mesure d'intervenir.
Conformément aux dispositions de l'article L. 122-1 du Code de l'énergie, le fait qu’un
des médiateurs des groupes EDF ou Engie ait statué sur un litige ne fait pas obstacle à ce que
ce litige puisse être soumis ultérieurement, par le consommateur, au MNE.
Information des consommateurs ayant conclu un contrat avec une entreprise des groupes
EDF ou Engie et souhaitant recourir à la médiation.
Les médiateurs d’entreprises s'engagent à éviter toute confusion avec le MNE dans tout
document ou message, écrit ou verbal. Ils mentionnent l'existence du MNE sur leurs sites
20
1
ère
recommandation des observations définitives du 28 janvier 2014.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
25
internet, de manière claire et aisément accessible, de la même façon que le site internet du MNE
informe les consommateurs que les groupes EDF et Engie disposent de leur propre médiateur.
Les médiateurs de groupe s'engagent, en outre, à mentionner, de façon claire et lisible,
l'existence et les modalités de saisine du MNE à l'occasion des réponses adressées aux
consommateurs qui ne sont pas satisfaits à l'issue du processus de médiation, ou réorientées
vers le service clients ou consommateurs de chaque entreprise.
Les conventions font l’objet d’un bilan annuel présenté par le MNE séparément à chacun
des médiateurs d’entreprise. Les bilans retracent le nombre de dossiers transmis par les
médiateurs dès lors qu’ils ne sont pas de leurs ressorts respectifs. En 2020, 43 saisines non
recevables par le MNE (portant principalement sur les primes énergies du dispositif des
certificats d’économies d’énergie) ont été transmises au médiateur d’EDF et trois à celui
d’Engie. À l’inverse, les médiateurs d’EDF et d’Engie ont transmis respectivement 18 et 2
saisines au MNE.
Concernant le médiateur d’Engie, les données de son rapport d’activité 2020 montrent
que sur 4 591 demandes de médiation enregistrées, 413 ont été déclarées éligibles. En 2019, ces
chiffres étaient respectivement de 5 497 et 421. Le nombre de clients du fournisseur Engie
susceptibles de saisir le MNE après une recommandation du médiateur interne du groupe est
faible et les résultats des bilans ne sont pas significatifs (moins de 20 cas par an).
S’agissant d’EDF, le bilan depuis 2016 est établi dans le tableau n° 5 ci-après.
Tableau n° 5 :
Bilan d’application de la convention avec EDF depuis 2016
Année
Saisines
simultanées des 2
médiations
justifiant une
orientation du
consommateur de
la part du MNE en
faveur du choix
d'une médiation
Saisines hors
champ de
compétence du
MNE
transférées au
médiateur EDF
Saisines hors
champ de
compétence du
médiateur EDF
transmises vers
le MNE
Nombre de
litiges instruits
post médiation
EDF
% de dossiers
dans lesquels
l'analyse du
MNE est en
écart avec celles
du médiateur
EDF
Montants
obtenus par le
MNE en + du
fournisseur
EDF (euros)
Montants
obtenus par le
MNE en + du
GRD (euros)
2016
9
12
10
83
68
3 411
10 829
2017
9
17
8
72
52
7 186
14 857
2018
22
3
12
85
53
7 426
33 442
2019
25
2
20
124
55
10 234
8 056
2020
25
43
18
91
42
5 353
13 210
Source : MNE
Au-delà du bilan chiffré de la coordination de leurs interventions respectives, les
médiateurs d’entreprise sont invités à prendre connaissance des écarts d’analyse qui ressortent
de l’examen des litiges qui ont été soumis au MNE pendant l’année, après leurs propres
interventions. Depuis 2016, le MNE examine une centaine de dossiers par an faisant suite à la
médiation du groupe EDF (qui instruit lui-même environ 1 200 dossiers par an) et de 15 à 25
dossiers par an, après médiation au sein d’Engie (moins de 500 dossiers par an).
Il ressort que les analyses ne sont pas convergentes dans près d’un cas sur deux. Pour
l’année 2020, sur 91 saisines instruites par le MNE après intervention de la médiatrice du
groupe EDF, 39 recommandations étaient divergentes. Les écarts constatés portent sur la
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
26
responsabilité d’EDF dans 17 cas, et sur la responsabilité du gestionnaire de réseau de
distribution impliqué dans 24 cas.
Les écarts d’analyse s’expliquent par le fait que les médiateurs d’entreprise s’en tiennent
souvent à la lettre stricte de la saisine, alors que le MNE prend davantage en considération
l’ensemble des facteurs à l’origine des contestations. Par exemple, le médiateur du groupe EDF
ne regarde pas systématiquement l’ajustement des mensualités, qui peut être en cause dans
l’origine d’une contestation visant des niveaux de consommation. Par ailleurs, contrairement
aux médiateurs internes, le MNE peut signaler auprès de la DGGCRF des cas de non-respect
du code de la consommation, ce qui incite les opérateurs à se mettre en conformité.
Les écarts observés ont été également plus marqués s’agissant des litiges relatifs aux
réseaux de distribution qui représentaient près d’un litige sur deux. Chez EDF, ces litiges ont
représenté 20 % des litiges postérieurs à la médiation EDF dont a été saisi le MNE en 2020. A
l’issue de son examen, le MNE a remis en cause l’analyse antérieure du médiateur d’EDF dans
61 % des cas et ses recommandations ont été suivies par ENEDIS dans 9 cas sur 10. En 2021,
rappelant la stricte indépendance qui devait prévaloir au sein des groupes, la CRE a
recommandé aux médiateurs d’EDF et d’Engie de ne plus exercer leur médiation pour le compte
des gestionnaires de réseau (ENEDIS et GRDF) lorsque le litige relevait de leur ressort exclusif
(raccordement, ouvrages réseaux et de qualité de la fourniture). Les groupes se sont conformés
à cette recommandation qui ne semble pas devoir conduire à la mise en place de médiateurs
spécifiques aux entreprises de distribution
21
.
1.2.2
La nécessaire régulation en amont des saisines du MNE
Le MNE, fort des constats établis à l’occasion des bilans annuels, reste réservé sur le
rôle des médiateurs d’entreprise et fait valoir leur double emploi avec le médiateur public. Il
considère qu’ils représentent davantage des échelons supplémentaires de réclamation ayant un
effet d’autant plus dissuasif quant au recours aux médiateurs, qu’ils ne peuvent être saisis
qu’après épuisement des voies de recours internes. En tout état de cause, le MNE est
défavorable à la création de nouveaux dispositifs de médiation interne au sein des entreprises
du secteur de l’énergie, dès lors que la loi a institué un médiateur public qui a compétence pour
l’ensemble du secteur.
A contrario, les médiateurs d’entreprise font valoir qu’ils assurent des médiations
indépendantes
22
et que, s’ils établissent des procédures spécifiques, notamment en matière de
recevabilité des litiges, ils le font dans le strict respect du code de la consommation. Ils
considèrent les conventions passées avec le MNE comme un cadre de répartition des dossiers
et non comme une forme de hiérarchie informelle entre les médiations dont la dualité constitue,
non un double emploi, mais une complémentarité. Le médiateur d’Engie a, en outre, fait valoir
que les conditions de recevabilité des dossiers en médiation auprès du MNE pourraient être
rendues plus restrictives en contrepartie du durcissement des obligations pesant sur les services
clients des fournisseurs. La médiation d’entreprise pourrait ainsi renforcer son rôle de
21
ENEDIS a mis en place un délégué au règlement amiable des litiges.
22
Leur évaluation et leur contrôle sont confiés à la CECMC qui les agrée. Ils sont inscrits sur la liste des
médiateurs européens de la consommation.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
27
régulation du système en limitant l’afflux des litiges vers le médiateur public. Ces appréciations
et propositions sont partagées par la direction générale d’Engie.
La majorité des acteurs de la consommation (associations de consommateurs
notamment) se satisfont du système actuel, dès lors qu’il est assorti de la possibilité de recourir
en dernier ressort au MNE et sous réserve que l’information sur cette faculté soit clairement
mentionnée dans tous les documents des opérateurs, ce qui est très majoritairement le cas.
En amont de la médiation, la Cour considère que la responsabilisation des fournisseurs
en vue d’assurer un traitement des réclamations efficace à leurs clients constitue la meilleure
voie de régulation de l’activité du MNE. Comme évoqué supra (
cf. 1.1.2.1
), le MNE est trop
souvent saisi de litiges simples qui auraient dû faire l’objet d’une réponse rapide de la part des
services clients des opérateurs. La structuration de services clientèle qui prennent pleinement
en considération les droits des consommateurs éviterait des transferts de charges indus vers la
médiation sectorielle publique. L’Etat doit y veiller et renforcer, si nécessaire, les obligations
des fournisseurs.
Recommandation n° 2.
(DGEC, DB, DGCCRF, 2022) Inciter les fournisseurs à régler
directement les litiges avec leur clientèle et , si nécessaire, renforcer leurs obligations
réglementaires.
1.3
Une mission d’information qui s’est affirmée auprès des acteurs de la
consommation
La seconde mission statutaire du MNE, en lien avec plusieurs partenaires (associations
de consommateurs, Institut national de la consommation) est d’informer les consommateurs sur
leurs droits et de mettre à leur disposition les outils permettant une bonne compréhension du
fonctionnement du marché de l’énergie et de ses évolutions (ouverture à la concurrence, fin des
TRV pour le gaz naturel, connaissances des offres des opérateurs).
1.3.1
Une communication active
1.3.1.1
Une activité en hausse avec le développement de services en ligne et de
publications
Le MNE gère le service d’information énergie-info qui comprend un centre d’appels
23
et un
site internet dédié, energie-info.fr
24
. Ce site contient :
23
Accessible du lundi au vendredi de 8h30 à 18h.
24
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
28
-
des informations pratiques pour les consommateurs sur leurs démarches et leurs droits,
-
un comparateur d’offres des fournisseurs d’électricité et de gaz naturel,
-
la liste des fournisseurs d’électricité et de gaz naturel, des calculettes,
-
des fiches pratiques.
Un certain nombre de publications complètent ces outils et sont également disponibles
en ligne :
-
la lettre du MNE à destination des décideurs publics et des acteurs de l’énergie(4 par an) ;
-
le rapport annuel d’activité ;
-
le baromètre énergie info ;
-
divers supports de communication (dépliants sur la présentation de la médiation, la fin des
TRV, guide pratique des marchés, etc.).
L’activité d’information du MNE a augmenté au cours de la période sous revue, sous
l’effet notamment de la montée en puissance du comparateur d’offres mais également de la
fréquentation croissante du site énergie-info.
Tableau n° 6 :
Évolution des données d’information et de communication (2013-2021)
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Visites du site
énergie-médiateur
96 000
120 000
120 000
122 000
154 000
164 000
202 000
212 000
287 000
Visites du site
énergie-info
934 000
1 180 000
1 506 000
1 787 000
1 831 000
1 780 000
1 690 000
2 616 000
3 200 000
- dont visites du
comparateur offres
364 000
499 000
554 000
620 000
677 000
662 000
653 000
1 312 000
1 600 000
Appels numéro vert
énergie-info
356 000
296 000
245 300
226 000
204 000
188 000
183 000
175 000
158 000
- dont traités
conseiller centre
d'appels
142 000
125 000
98 000
97 640
88 490
81 000
89 000
78 000
83 000
- dont traitées par
équipe MNE (niveau
2)
6 500
10 700
10 671
11 292
9 039
10 746
9 977
12 413
11 802
Citations dans les
médias (1)
296
585
541
474
573
839
1 130
567
>1200
Abonnés réseaux
sociaux
- Twitter
NM (2)
NM
1 500
2 132
3 167
3 887
4 560
5 170
5 802
- Facebook
NM
NM
NM
585
781
1 016
1 314
1 670
2 005
- Linkedin
NM
NM
NM
124
286
732
1 112
1 522
2 283
(1)
En 2020, peu de citations compte tenu de la crise sanitaire. En 2021, plus de 1 200 reprises
(2)
Non mesuré
Source : MNE
L’activité du service d’information des consommateurs augmente régulièrement sous la
période sous revue, et de façon encore plus nette dans la période récente : + 45% en 2020 par
rapport à 2019, avec plus de 3 millions de personnes renseignées. Les consommateurs ont
beaucoup plus utilisé le site energie-info.fr, qui a reçu plus de 2,6 millions de visites contre
(1,7 million en 2019). La moitié de la fréquentation s’est faite sur le comparateur d’offres, dont
le nombre de visites a plus que doublé entre 2019 et 2021, après un quasi doublement sur les
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
29
cinq années précédentes. Cette dernière hausse est largement due à la fin annoncée des tarifs
réglementés de vente de gaz naturel en juillet 2023 et à l’envoi d’un courrier officiel incitant
les consommateurs de gaz titulaires d’un contrat au tarif réglementé à anticiper et à comparer
les offres sur le site du médiateur national de l’énergie.
La hausse de fréquentation du site energie-info.fr s’accompagne d’une baisse des appels
téléphoniques au numéro vert gratuit dont le nombre décroît structurellement depuis 2013. Les
personnes utilisant ce moyen de communication sont généralement des personnes en plus
grande difficulté.
1.3.1.2
La reconnaissance du comparateur d’offres
Le MNE a mis en place un comparateur d’offres d’électricité et de gaz naturel en 2009
pour permettre aux consommateurs de connaître et comparer toutes les offres de fourniture
auxquelles ils pouvaient souscrire dans le contexte d’ouverture des marchés. L’accès au
comparateur se fait par le site
énergie-info
ou par le site du MNE.
À la différence de la plupart des comparateurs privés, rémunérés par les fournisseurs, le
comparateur d’offres du MNE est un service public, neutre et indépendant, qui se borne à
comparer toutes les offres disponibles sur le marché, sans aucune démarche d’intermédiation.
Les associations de consommateurs ont également développé des comparateurs
d’offres
25
, sans lien avec les professionnels référencés et soucieux de la neutralité requise par
ce genre d’outil. Certains opérateurs ont mis en place des comparateurs d’offres mais ils se
contentent de présenter et comparer les offres d’un même fournisseur.
Par ailleurs, comme dans d’autres secteurs d’activités concurrentiels (téléphonie,
assurance, voyages, etc.), un certain nombre de comparateurs d’offres se sont librement
installés, notamment sur internet
26
. Bien que se présentant comme indépendants, ces
comparateurs sont le plus souvent des courtiers commissionnés par les fournisseurs à chaque
signature de contrats.
Dans ce contexte, l’existence du comparateur du MNE a été consacrée par la loi du 8
novembre 2019, relative à l’énergie et au climat
27
. L’arrêté du 12 décembre 2019 en précise les
modalités de fonctionnement. Tous les fournisseurs d'électricité et de gaz naturel ont
l’obligation d’y référencer leurs offres destinées aux particuliers et aux petits professionnels et
de les mettre à jour en temps réel. Actuellement, près de 400 offres sont enregistrées mais seules
les offres correspondant aux critères renseignés par le consommateur s’affichent. En moyenne,
80 offres d’électricité et 50 offres de gaz naturel sont comparées entre elles. Il est possible de
trier les résultats par prix ou par type d’offre et de les comparer avec son offre actuelle.
Le comparateur doit faire face à la forte hausse des sollicitations par les consommateurs
(
cf. tableau n° 6 supra
), notamment en raison de la suppression progressive des tarifs
25
C’est le cas de l’association UFC-Que Choisir notamment.
26
Les principaux sont Selectra, Afficonso, Le Lynx, Capitaine Energie, Hellowatt, Les Furets, Meilleur
Taux.
27
Article 122-3 du code de l’énergie.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
30
réglementés de vente de gaz naturel, ainsi que d’offres de plus en plus complexes. Il a fait
l’objet d’évolutions en 2020 et 2021 pour assumer cette charge croissante et intégrer de
nouvelles spécifications, comme les offres dites « vertes », ou le renvoi vers des sites explicatifs
comme celui de l’ADEME.
Si la mise à jour des données relève de la responsabilité des fournisseurs, la veille et le
suivi des données enregistrées par les fournisseurs est une mission lourde et sensible qui
incombe au MNE. Elle nécessite une expertise et une connaissance précises du marché de détail
de l’énergie. Au sein du MNE, cette mission relève principalement du chef de projet chargé des
systèmes d’information, avec le concours de la direction générale et du service d’information.
En cas d’absence de mise à jour par un fournisseur, le MNE prend la responsabilité d’informer
le consommateur et peut également déréférencer une offre en cas de refus de mise à jour. Le
MNE souhaiterait que cette faculté de
« déréférencement »
lui soit explicitement dévolue dans
les textes.
1.3.1.3
Une communication largement externalisée dont le coût est maîtrisé
L’information et la communication ont été regroupées en 2015 en un seul service,
composé actuellement de six personnes, dont la cheffe du service. Deux salariés du MNE
interviennent également dans ce domaine (le chef de projet DSI sur le comparateur d’offres et
un chargé de mission auprès de la directrice générale sur les relations institutionnelles).
Certaines fonctions font l’objet d’une externalisation, comme le centre d’appels du
service énergie info qui gère lui-même 10 conseillers, ou encore l’hébergement et la
maintenance informatique du comparateur d’offres qui sont
assurés par des prestataires
extérieurs, sous la responsabilité du chef de projet DSI. Les marchés correspondant à ces
prestations sont examinés dans la partie 2.4.3 relative aux achats.
Tableau n° 7 :
Estimation du coût de l’information à partir de l’exécution budgétaire (en euros)
2 013
2 014
2 015
2 016
2 017
2 018
2 019
2 020
Var
(1)
Information
consommateurs
1 856 860
1 522 280
1 297 000
1 272 400
1 029 974
1 154 130
1 158 188
1 004 976
-45%
Pilotage
performance (20
%)
356 077
415 102
443 200
557 190
381 982
418 550
383 867
417 654
+17%
Coût information
2 212 937
1 937 382
1 740 200
1 829 590
1 411 956
1 572 680
1 542 055
1 422 630
-35%
(1) Variation 2013-2020
Source : Cour des comptes (à partir des rapports annuels de performance)
On peut estimer le coût global de la mission d’information à 1,4M€ par l’addition du
coût du programme « informer les consommateurs » et de 20 % du coût du programme de
moyens (« piloter la performance »). Ce coût diminue de près de 35 % entre 2013 et 2021.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
31
1.3.2
L’affirmation de la place du MNE
Le précédent rapport de la Cour avait souligné la nécessité d’une meilleure articulation
des acteurs concourant à l’information des consommateurs. Au cours de la période sous revue,
le MNE a conforté son rôle en la matière et contribué à fédérer les intervenants à travers ses
partenariats et ses actions auprès des pouvoirs publics.
1.3.2.1
Les relations et partenariats avec l’INC et les associations de consommateurs
L'Institut national de la consommation (INC) a une mission d'information et organise
des campagnes de sensibilisation du grand public sur des questions d'intérêt général. L'INC et
le MNE réalisent ainsi chaque année, en partenariat, une série de productions audiovisuelles sur
les moyens d'optimiser ses contrats de fourniture d'électricité et de gaz, ou encore le règlement
des litiges dans le secteur de l'énergie. Il s’agit d’émissions de télévision « ConsoMag »
diffusées sur France Télévisions et de courtes vidéos à destination des réseaux sociaux. Ces
formats sont également mis en ligne sur les sites du MNE et de l’INC. Le coût annuel de ce
partenariat s’élève à 60 000 euros. L’examen des conventions de partenariat n’appelle pas de
remarque.
Au-delà de ce partenariat, les échanges entre le MNE et l’INC sont réguliers. L’INC
relaie la communication du MNE à travers ses propres outils, notamment son site
INC Conso
et son magazine
« 60 millions de consommateurs »
, ainsi qu’auprès des associations de
consommateurs. Une réelle complémentarité s’est établie entre les actions de l’institut et du
médiateur.
Par ailleurs, le MNE a développé des relations soutenues avec les associations de
consommateurs. Des réunions annuelles se tiennent à l’initiative du MNE pour tirer le bilan des
difficultés rencontrées et complètent des échanges réguliers entre services. Le MNE bénéficie
d’une reconnaissance très positive de la part des acteurs de la consommation.
1.3.2.2
Un interlocuteur reconnu des pouvoirs publics
Le MNE est progressivement devenu un interlocuteur des pouvoirs publics. Il a été à
l’origine de l’adoption plusieurs mesures de protection des consommateurs.
Exemples de réformes initiées par le MNE
Mise en place de la trêve hivernale des coupures d’énergie
La loi sur l’énergie du 15 avril 2013 a instauré pour les foyers ne parvenant pas à régler
leur facture une « trêve hivernale » des coupures de leur alimentation en électricité ou en gaz
dans leur résidence principale. La première trêve hivernale a débuté le 1er novembre 2013 pour
se terminer le 15 mars 2014. La loi de transition énergétique pour la croissance verte du 17 août
2015 a aligné la période de l’interdiction des coupures d’énergie sur celle des expulsions
locatives (jusqu’au 31 mars).
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
32
Limitation des rattrapages de facturation
Le MNE a plaidé pour que soient interdits les rattrapages de facturation des
consommations d’électricité et de gaz naturel au-delà d’une certaine durée. La loi de transition
énergétique du 17 août 2015 a finalement limité cette durée à 14 mois. C’est un acquis pour les
consommateurs, qui, parce que leur compteur n’avait pas été relevé pendant plusieurs années
ou parce que leur facturation était bloquée dans le système d’information du fournisseur,
pouvaient soudainement recevoir des factures d’un montant exorbitant à régler dans un délai de
15 jours, avec le risque pour les ménages les plus fragiles de basculement dans la précarité ou
le surendettement.
Colonnes montantes d’électricité
Le MNE s’est investi pour que toutes les colonnes montantes d’électricité des
immeubles collectifs soient intégrées dans le réseau public de distribution d’électricité. Depuis
le 24 novembre 2020, conformément à l’article 176 de la loi ELAN, sauf opposition des
copropriétés, toutes les colonnes montantes d’électricité appartiennent au réseau public de
distribution d’électricité.
La publication annuelle du rapport d’activité est un moment particulièrement important
et attendu par les acteurs de la consommation. Outre la présentation d’un bilan chiffré exhaustif
de son activité, il est l’occasion pour le médiateur de mettre en exergue les principaux
problèmes soulevés par ses recommandations et de désigner publiquement les fournisseurs et
opérateurs défaillants. Cette pratique dite du
« name and shame »
est particulièrement redoutée
compte tenu du risque réputationnel qu’elle fait peser sur les entreprises. Elle est généralement
le dernier recours dont dispose le MNE lorsque les discussions conduites en amont avec ces
entreprises ne se sont pas avérées concluantes.
Le MNE assortit depuis 2019 ses rapports d’activité de propositions concernant le
marché de l’énergie (10 propositions en 2019 et 16 propositions en 2020). Ainsi propose-t-il
qu’il soit mis un terme aux coupures d’électricité pour impayés et que soit instauré un droit à
une alimentation minimale en électricité tout au long de l’année. Concernant le démarchage
pour la fourniture d’énergie, il propose un encadrement très strict de cette activité assorti de
sanctions.
Au-delà des compétences que lui attribuent les textes, cette communication d’influence
permet au MNE de faire avancer la mise en œuvre de ses recommandations.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Au cours de la période sous revue, la compétence du MNE en matière de médiation a
été confortée par les textes. Les sollicitations des consommateurs ont fortement augmenté sous
l’effet de l’intensification de la concurrence et de l’arrivée de nouveaux acteurs. Cette autorité
indépendante a fait face à ce surcroît d’activité grâce à l’amélioration de sa productivité.
La Cour ne remet pas en question la dualité de médiations entre le MNE et les
médiateurs d’entreprise des opérateurs historiques. Elle considère, en revanche, que la
structuration des services clientèle des fournisseurs est un enjeu majeur pour éviter que le MNE
ne soit trop souvent saisi de litiges simples qui auraient dû faire l’objet d’une réponse rapide
de la part des services clients des opérateurs. Elle recommande d’inciter les fournisseurs à
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
33
régler directement les litiges avec leur clientèle et, si nécessaire, renforcer leurs obligations
réglementaires.
Fort de sa position en matière de médiation, le MNE a également conforté sa mission
d’information, notamment grâce au développement de son comparateur d’offres. Il a aussi
renforcé sa communication.
L’augmentation continue du nombre des litiges dont il est saisi pose à terme la question
de l’adéquation entre ses missions et les moyens humains dont il dispose.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
34
2
UNE GESTION QUI RESTE À FIABILISER
Le MNE est une structure de petite taille disposant d’un nombre limité de personnes
affectées aux fonctions support. Il a su faire face, de façon globalement satisfaisante, à
l’augmentation importante de son activité et ce, malgré des ressources budgétaires en
diminution. Néanmoins, cette situation rend difficile la maîtrise de processus de gestion
complexes tels que la commande publique ou la gestion des ressources humaines. Une partie
de ces difficultés peut être résolue par la simplification de certains textes et règles de procédure
internes. Par ailleurs, le déménagement à la Défense offre des opportunités en matière de
mutualisation ou de délégation de gestion au ministère chargé de l’énergie qu’il lui appartient
de saisir.
2.1
Une organisation fragile qui pèse sur la qualité du pilotage et du suivi
de la gestion
Jusqu’en 2018, la gestion administrative et financière relevait de trois personnes, hors
direction générale : la cheffe de service, une juriste et une comptable. Avec le redéploiement
des ressources humaines vers le pôle médiation pour faire face à la montée en charge de
l’activité, la gestion administrative et financière est assurée depuis par une seule personne à
temps plein, appuyée par une assistante. Le chargé de mission auprès de la direction générale,
du fait de ses compétences juridiques, gère les procédures formalisées en matière de marchés
publics. Il offre également un appui ponctuel en matière de ressources humaines (procédure de
licenciement par exemple) tout en participant à la relecture des accords amiables en matière de
médiation.
Dans ces conditions, le fonctionnement courant de la structure est assuré mais peut être
fragilisé à n’importe quel moment par l’absence ou de départ des agents concernés.
Par ailleurs, les ressources limitées conduisent à une performance inégale en matière de
pilotage et de suivi de la gestion. Le MNE produit chaque mois, à usage interne, des tableaux
de bord détaillés. Ces tableaux portent sur l’activité mais aussi un certain nombre de données
financières (taux de consommation des crédits budgétaires) ou administratives (taux
d’absentéisme…). Ils permettent de piloter l’exécution budgétaire au fil de l’eau de façon
satisfaisante. En sens inverse, la structure n’est, par exemple, pas en mesure de fournir des
tableaux budgétaires sur l’ensemble de l’année civile ni
a fortiori
des tableaux récapitulatifs sur
plusieurs années. Le suivi des informations budgétaires est assuré dans l’outil informatique
mais ce dernier ne permet pas d’exporter des données sous forme de tableur ou de faire des
requêtes sur l’exécution budgétaire.
Le MNE est conscient de ses ces limites et envisage de recruter, grâce à un
redéploiement de postes, un(e) chargé(e) de mission pour la gestion budgétaire et comptable
ainsi que pour la passation des marchés publics.
On peut néanmoins s’interroger sur la capacité d’une structure de cette taille à se doter
des moyens permettant d’assurer le niveau de fiabilité et de performance dans la gestion
attendue de tout organisme gérant des deniers publics. La faiblesse des moyens propres conduit
à poser la question de leur adossement à ceux de structures plus importantes. Le partage des
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
35
locaux (avec la CRE jusqu’en janvier 2021, avec le MTE depuis cette date) en est une
illustration. Il permet notamment, sur la base de conventions avec le ministère, l’entretien des
locaux, la gestion de la distribution et de l’affranchissement, la gestion de la téléphonie et
l’hébergement de l’infrastructure informatique. Néanmoins, il semble possible d’aller plus loin,
dans le respect de l’indépendance de la structure. Le ministère a indiqué à la Cour travailler à
des conventions de gestion avec plusieurs autorités indépendantes et être en mesure de proposer
des prestations adaptées aux besoins de chacune .
Aussi, la Cour invite le MNE à se rapprocher du ministère chargé de l’énergie afin
d’étudier les modalités d’un transfert de certaines tâches de gestion.
2.2
Gestion financière : renforcer le suivi de l’exécution budgétaire pour
mieux mesurer l’évolution de la performance
Le MNE est doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Son
financement est essentiellement assuré par l’État.
En application des dispositions de l’article
R.122-4-3°
du code de l’énergie, le MNE
dispose d’un règlement comptable et financier (décision MNE n° 20 du 12 août 2010, puis n° 20
bis du 12 octobre 2017) qui rassemble l’ensemble des règles comptables et financières
applicables à la structure.
2.2.1
Des difficultés d’application des règles budgétaires et comptables
Les textes applicables à la procédure budgétaire et comptable se caractérisent par deux
types de difficultés :
-
L’une concerne la mise à jour et la lisibilité du cadre juridique applicable : certaines
dispositions réglementaires relatives à la procédure budgétaire ne s’appliquent plus et
devraient être abrogées ;
-
L’autre concerne la régularité de la décision de ne pas appliquer les dispositions
réglementaires en vigueur relatives à la gestion budgétaire et comptable.
2.2.1.1
Procédure budgétaire : abroger formellement les dispositions réglementaires
rendues caduques par l’évolution du cadre juridique
Le MNE a été expressément reconnu en tant qu’autorité publique indépendante (API)
par la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives
indépendantes et des autorités publiques indépendantes.
L’
article 4
de cette loi précise notamment que le médiateur national de l’énergie « (…)
établit le budget de l'autorité publique indépendante sur proposition du directeur
général ».
Or, le deuxième alinéa de
l’article L.122-5
du code de l’énergie, qui prévoyait que le
budget du MNE «
est arrêté par les ministres chargés respectivement de l'économie, de
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
36
l'énergie et de la consommation sur sa proposition
» n’a pas été immédiatement modifié pour
tirer les conséquences de la loi du 20 janvier 2017. La procédure d’approbation préalable a donc
continué à s’appliquer, en dépit des dispositions de l’article 4 de la loi de 2017 et du fait que la
dotation du médiateur était votée par le Parlement en loi de finances.
De façon concrète, la lourdeur de cette procédure impliquant trois ministères a conduit
à des retards dans le déblocage des fonds, en 2018 (fonds débloqués le 9 mai 2018), et en 2019
(fonds débloqués le 21 mars 2019).
Les dispositions de l’article L. 122-5 prévoyant que le budget est arrêté par les ministres
chargés de l’économie, de la consommation et de l’énergie ont finalement été supprimées par
l’article 66 de la loi
n° 2019-147
du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat
28
.
En revanche, des dispositions similaires figurent toujours dans l’
arrêté du 30 juillet 2008
fixant la procédure d'élaboration du budget du médiateur national de l'énergie. Elles sont
caduques et les ministères compétents sont invités à procéder à l’abrogation formelle de ces
dispositions et à s’assurer de la mise à jour du cadre réglementaire applicable aux aspects
budgétaires et comptables du MNE.
Le MNE doit faire de même avec les dispositions de son règlement budgétaire et
comptable du 12 octobre 2017.
2.2.1.2
Une nécessaire clarification du régime applicable au MNE
L’article
R. 122-10
du code de l’énergie précise
que le
décret n° 2012-1246
du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (dit décret GBCP) est
applicable au médiateur qui est, dans ce cadre, assimilé à un établissement
public administratif.
En revanche, les dispositions de l’article 5 de ce décret qui prévoient que «
les
dispositions du présent décret ne s’appliquent pas (…) aux autorités publiques
indépendantes
».
Les services du médiateur ont sollicité la direction du budget (DB) pour déterminer le
texte applicable. Celle-ci a considéré par courriels du 8 juin 2017 et du 10 juillet 2019 qu’il
existait une « contradiction entre le régime budgétaire et comptable » du GBCP et celui du code
de l’énergie relatif au MNE. Elle a conseillé au médiateur de se rapprocher du ministère chargé
de l’énergie pour modifier les textes constitutifs de l’organisme, tout en estimant, sur le fond,
que le MNE, à l’instar des autres API, ne devait pas être soumise au décret GBCP.
Dans son précédent rapport, la Cour avait considéré que le décret GBCP s’appliquait au
MNE. Elle maintient cette analyse et estime qu’il n’existe pas de contradiction entre les
différents textes réglementaires applicables au MNE.
En effet, l’article R. 122-10 précité est issu de l’article 233 du décret
n° 2012-1247
, pris
le même jour que le décret GBCP. On doit donc considérer que le décret n° 2012-1247 a
28
Le Parlement avait voté la suppression du deuxième alinéa de l’article L. 122-5 du code de l’énergie
dans la loi de Finances pour 2019, puis dans la loi dite PACTE, mais cette disposition a été censurée dans les deux
cas par le Conseil constitutionnel qui a considéré qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
37
entendu déroger, pour le MNE, à l’application des dispositions générales du décret n° 2012-
1246.
Il est vrai cependant que l’article R. 122-10 du code de l’énergie dispose que le décret
GBCP s’applique au médiateur «
dans des conditions précisées par un arrêté du ministre
chargé de la comptabilité publique
». Or, cet arrêté n’a jamais été pris.
La Cour invite donc le ministère de la transition énergétique et le ministère en charge
de l’économie et des finances à clarifier au plus vite les règles budgétaires et comptables
applicables au MNE. S’ils entendent appliquer au MNE le régime des autres autorités publiques
indépendantes, il leur appartient d’abroger les dispositions de l’article R. 122-10 du code de
l’énergie. En l’absence d’une telle abrogation, ces deux ministères devraient alors reconnaître
que les dispositions du décret GBCP s’appliquent bien au médiateur et prendre en conséquence
sans délai l’arrêté permettant l’application de ce texte.
Recommandation n° 3.
(DGEC, DB, 2022) Prendre les dispositions nécessaires pour
clarifier la situation du MNE au regard du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
2.2.2
Améliorer le suivi de l’exécution budgétaire et de l’évolution de la
performance
Depuis 2012, le MNE prépare et exécute son budget suivant un cadre conforme à la
LOLF. Il repose donc sur des missions, programmes et actions, auxquelles sont associés des
objectifs et des indicateurs. De même, comme le budget de l’État, le projet de budget du
médiateur de l’énergie est détaillé dans un programme annuel de performance (PAP) tandis que
l’exécution budgétaire est retracée dans un rapport annuel de performance (RAP).
La maquette budgétaire du MNE comprend trois missions :
-
Mission 1 : Informer les consommateurs
-
Mission 2 : Résoudre les litiges
-
Mission 3 : Piloter la performance du MNE
Les trois missions comprennent dix programmes eux-mêmes subdivisés en actions, au
nombre de 20 pour l’exercice 2020.
2.2.2.1
Des indicateurs de performance globalement bien adaptés aux missions de
médiation et d’information
La maquette a évolué sur la période pour s’adapter aux évolutions dans les objectifs et
les modalités d’exécution des missions. À titre d’exemple, la communication externe figurait
initialement dans la mission 3, elle a logiquement été rattachée à la mission 1. De même, le
programme « faire évoluer le système d’information de traitement des litiges » a été supprimé
une fois réalisé. Outre ces ajustements fonctionnels, les modalités de répartition des crédits par
mission ont évolué : jusqu’en 2013, chaque mission se voyait affecter une quote-part des
dépenses globales, notamment les dépenses immobilières. À partir de 2014, ces crédits ont été
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
38
centralisés sur la mission performance. Ces différentes évolutions ne sont cependant pas
documentées dans les PAP et les RAP, et ne permettent pas un suivi des crédits à périmètre
constant.
À l’exception de l’action « assurer un fonctionnement efficace de la structure et
développer l’action du MNE de façon durable », chaque action est associée à un objectif et un
indicateur.
Les indicateurs retenus pour les actions des deux premières missions portent sur le degré
de notoriété des services du MNE, la qualité du service rendu (taux de réponse aux appels, taux
de médiations acceptées par les parties, satisfaction …). Ils reposent sur des objectifs chiffrés
et sont globalement bien adaptés à l’activité de la structure. Cependant, certains semblent
partiellement redondants, tels que le « taux de consommateurs qui déclarent accepter la solution
recommandée par le médiateur » et le « taux de médiations acceptées par l’ensemble des
parties ».
Les objectifs et les indicateurs relevant des actions de la mission 3 « piloter la
performance du MNE » sont moins satisfaisants. Associés à des objectifs non chiffrés, les
indicateurs retenus sont peu signifiants : ainsi, l’objectif « développer les compétences des
agents » ne fixe aucune cible. L’indicateur « nombre d’heures de formation par agent »
renseigne peu sur la performance réalisée d’autant que les rapports annuels de performance
(RAP) ne proposent aucune comparaison avec les années précédentes » (
cf
.
infra
). Des objectifs
chiffrés pourraient donc être ajoutés. De même, les indicateurs portant sur le taux d’exécution
du budget de fonctionnement ou de la masse salariale ne permettent pas de s’assurer que
l’objectif associé de maîtrise des budgets est bien atteint. Un taux d’exécution budgétaire faible
peut avoir différentes causes et n’est pas nécessairement signe de bonne gestion. Le choix d’un
ratio d’efficience (à titre d’exemple, en matière bureautique) pourrait être mieux adapté. Par
ailleurs, dès lors que le plafond d’emplois est respecté, la sous-exécution de la masse salariale
ne constitue pas nécessairement un objectif pertinent sauf à considérer que le plafond d’emplois
est supérieur aux besoins réels de la structure, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Enfin, l’objectif « augmenter la part des achats effectués dans le cadre d’un marché
public » mentionné dans le RAP 2020 n’apparaît pas pertinent sur le plan juridique : du fait de
son statut, les contrats passés par le MNE pour répondre à ses besoins sont nécessairement des
marchés publics. Il est à noter par ailleurs que cet objectif est différent de l’objectif « effectuer
des économies lors du renouvellement des marchés publics » affiché dans le PAP 2020. Les
raisons d’un tel changement en cours d’année, ne sont pas expliquées.
2.2.2.2
Des documents budgétaires insuffisamment détaillés sur l’exécution budgétaire
À l’exception des évolutions de la maquette budgétaire, les PAP sont correctement
détaillés, avec notamment des tableaux de synthèse sur le coût immobilier ou le coût de
fonctionnement par agent.
Les RAP se concentrent sur l’atteinte des objectifs et les résultats des indicateurs et
contiennent peu de données budgétaires. Ils indiquent le montant des crédits exécutés par
programme et le taux d’exécution par rapport au budget initial mais peu de détails sur les
principaux postes de dépenses. Ainsi, sur la mission 1 « informer les consommateurs », la seule
donnée budgétaire qui figure dans le RAP 2020, hormis celles relatives aux différents
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
39
programmes, est le montant de 285 000 € correspondant aux crédits dépensés pour le centre
d’appels. Il en est de même sur la mission 2 « résoudre les litiges » alors que c’est la plus
importante en termes de volume de dépenses.
Les RAP ne donnent pas non plus d’informations
sur les quote-part de masse salariale associées aux différents programmes.
Par ailleurs, si les RAP contiennent des informations sur le taux d’exécution des
dépenses, les comparaisons avec les années précédentes sont absentes, que ce soit sur les
indicateurs ou sur les crédits. Ainsi, les augmentations des dépenses entre 2014 et 2015 (+ 7 %)
ou entre 2017 et 2018 (+ 10 %) sur la mission performance sont peu documentées. En
conséquence, les évolutions dans l’exécution des crédits sont parfois difficiles à comprendre.
Les RAP devraient retracer, pour chacune des missions, l’évolution pluriannuelle des crédits
exécutés et donner des informations détaillant les principales évolutions, à la hausse comme à
la baisse.
Enfin, les RAP sont souvent lacunaires sur certaines données comme les dotations aux
amortissements et aux provisions dont les fluctuations ont été pourtant importantes sur la
période.
L’autonomie de gestion dont dispose le médiateur doit s’accompagner d’un pilotage et
d’un suivi rigoureux de son budget. En particulier, les différents documents produits doivent
restituer de façon plus précise la manière dont les ressources ont été employées et montrer les
évolutions par rapport aux années précédentes. Un tel suivi impose néanmoins de disposer des
ressources suffisantes, ce qui pose à nouveau la question de la mutualisation de la gestion avec
une structure publique plus importante.
Recommandation n° 4.
(MNE,
2022)
:
renforcer
le
pilotage
et
l’information
budgétaires, en indiquant notamment les principaux postes de dépenses et, le cas
échéant, les évolutions significatives par rapport aux exercices précédents.
2.2.3
Des ressources et des dépenses en baisse tendancielle de 2014 à 2020
2.2.3.1
Des ressources qui reposent essentiellement sur une subvention de l’État
Le médiateur percevait jusqu’en 2015 une part du produit de la contribution au service
public de l’électricité (CSPE) et une part de la contribution au tarif spécial de solidarité Gaz
(CTSSG), toutes deux versées par la Caisse des dépôts et consignations.
La réforme du financement des charges de service public introduite par la loi
n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 a inscrit les charges de
service public de l’électricité et du gaz au budget de l’État.
Le financement du médiateur est donc assuré depuis 2016 par une subvention de l’État
votée en loi de finances. Cette subvention a été initialement inscrite au programme budgétaire
345 « Service public de l’énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité
durable » du ministère de la transition écologique. Depuis le PLF 2021, elle figure dans le
programme 174 « Énergie, climat et après-mines ».
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
40
Les autres ressources sont marginales et résultent notamment du revenu des placements.
L’équilibre entre dépenses et recettes peut être également assuré par des prélèvements sur le
fonds de roulement.
Le montant des ressources en provenance de l’État est passé de 5,5 M€ en 2013 à 4,9 M€
en 2020 (
cf
. annexe n° 3 - synthèse des comptes). Il est remonté à 5,5 M€ dans les LFI 2021 et
2022 pour tenir compte de l’augmentation du plafond d’emplois de 41 à 43 ETP en 2021.
Tableau n° 8 :
Évolution des ressources du médiateur de l’énergie (exécuté)
En milliers d’€
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Ressources de l’État
5 487
3 755
5 505
5 572
5 000
4 796
4 850
4 850
Subventions de l’État
5 572
5 000
4 796
4 850
4 850
Ressources fiscales affectées
5 487
3 755
5 505
Ressources propres et autres
726
2 100
306
187
12
288
420
28
Total
6 213
5 855
5 811
5 759
5 012
5 084
5 270
4 878
Source : Jaunes budgétaires (rapports sur les autorités administratives et publiques indépendantes) et documents
comptables ; tableau Cour des comptes
En 2014, le montant de la recette fiscale affectée a été sensiblement moindre (3,8 M€).
Suite au précédent rapport de la Cour qui pointait un fonds de roulement excessif, l’équilibre
global a alors été assuré par un prélèvement plus important sur le fonds de roulement.
2.2.3.2
Des évolutions de dépenses variables selon les missions, des économies en
fonctionnement
2.2.3.2.1
Dépenses par mission : un renforcement des moyens humains dédiés aux missions
de médiation
L’analyse de l’évolution des dépenses par mission doit tenir compte de certaines
spécificités dans le montant et la répartition des crédits. Ainsi, l’année 2013 correspond à un
pic de dépenses dans la mesure où le MNE disposait alors d’un plafond d’emplois de 46 ETP.
L’année suivante, le plafond a été abaissé à 41 ETP conduisant à une baisse mécanique des
dépenses. Par ailleurs, la maquette budgétaire a également été modifiée en 2014, conduisant à
centraliser sur la mission « performance » des crédits précédemment répartis sur l’ensemble des
missions (dépenses immobilières). L’année 2020 est également un peu atypique du fait de la
crise sanitaire, même si la structure est parvenue à conserver un taux d’exécution satisfaisant
(93 %).
Indépendamment de ces spécificités, la tendance générale est bien une baisse des
dépenses mais avec des variations selon les missions.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
41
Tableau n° 9 :
Évolution des dépenses budgétaires par mission (exécuté)
En milliers d’€
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2020/2013
Informer les consommateurs
1 857
1 522
1 297
1 272
1 030
1 154
1 158
1 005
-46%
Résoudre les litiges
2 594
2 109
1 909
1 589
1 947
1 837
2 192
1 881
-28%
Piloter la performance
1 780
2 076
2 216
2 786
1 910
2 093
1 919
2 088
17%
Total
6 231
5 707
5 422
5 648
4 887
5 084
5 270
4 974
-20%
Source : RAP ; tableau : Cour des comptes
La mission « informer les consommateurs » a porté l’essentiel des baisses (- 46 % entre
2013 et 2020), notamment les premières années. Outre le transfert vers le programme
performance d’une partie des charges immobilières, la baisse s’explique aussi par la diminution
des ETP affectés à cette mission (9 en 2014, 6 depuis 2018). Par ailleurs, le nombre d’appels
du numéro vert consacré à l’information de premier niveau a diminué de façon importante au
profit notamment des consultations du site internet. En conséquence, les crédits consacrés à ce
service, externalisé, sont passés de 475 271 € en 2014 à 322 000 € en 2019, puis à 285 000€ en
2020. Enfin, des économies ont été réalisées sur les participations aux salons ou sur les
cofinancements d’émissions de radio ou de télévision.
La mission « résoudre les litiges » a connu une baisse de 28 % sur la période dont – 20 %
entre 2013 et 2014 pour les raisons évoquées ci-dessus. Elle a bénéficié des redéploiements
d’ETP entre missions, passant de 26 ETP en 2014 à 30 à partir de 2019 du fait de l’augmentation
importante des saisines et de l’activité de médiation (cf.
supra
). En sens inverse, l’utilisation de
Sollen a permis des gains de productivité. La baisse importante entre 2015 et 2016 résulte d’un
faible taux de consommation des crédits (85 %) qui serait lié à une baisse des saisines par
courrier et de moindres dépenses d’affranchissement et de numérisation. Cet effet a été
compensé les années ultérieures par l’augmentation du nombre de saisines (cf.
supra
).
La mission « piloter la performance » affiche une augmentation des dépenses de 17 %
due notamment au changement de maquette budgétaire. Elle a connu également des variations
importantes. Une partie de l’augmentation des dépenses en 2016 (+ 569 950 €) s’explique par
la constitution d’une provision pour risques correspondant aux droits ouverts au titre de
l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) et susceptibles d’être réclamés par les agents
dans les cinq ans qui suivent l’ouverture de leurs droits. Elle est suivie d’une baisse de
876 039 € liée à une reprise sur la provision constituée pour l’ARE et la baisse du budget
formation. Les augmentations des dépenses entre 2014 et 2015 (+ 7 %) ou entre 2017 et 2018
(+ 10 %) sont en revanche peu documentées. Une partie des augmentations constatées en 2020
(+ 9 %) résultent, pour leur part, d’achats liés à la pandémie (vitres en plexiglass, gel et masques
de protection…) qui ont été compensés par les moindres dépenses en frais de mission et en
formation.
2.2.3.2.2
Dépenses par nature : des dépenses de fonctionnement en forte diminution
À la différence de la tendance constatée par la Cour dans son rapport sur les conditions
de rémunération dans les AAI, les dépenses de personnel du MNE ont diminué de 7 % entre
2013 et 2014 suite à la baisse du plafond d’emplois. Elles sont ensuite restées relativement
stables entre 2014 et 2020. Elles représentent 57 % des dépenses totales en 2020. Cette part est
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
42
en augmentation depuis 2013 en raison de la diminution proportionnellement plus importante
des dépenses de fonctionnement.
Tableau n° 10 :
Évolution des dépenses par nature (crédits exécutés)
En milliers d’€
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2020/2013
Personnel
3 050
2 830
2 794
2 642
2 651
2 753
2 879
2 832
-7%
Fonctionnement
2 935
2 580
2 408
2 738
1 985
2 157
2 146
1 913
-35%
Investissement
246
293
179
267
251
174
245
229
-7%
Total
6 231
5 703
5 381
5 647
4 887
5 084
5 270
4 974
-20%
Source : Jaunes budgétaires (rapports sur les autorités administratives et publiques indépendantes) ; tableau Cour
des comptes
Note : les différences dans le total de l’année 2015 avec le tableau 8 résultent des différences de source (RAP vs
Jaune)
Les dépenses de fonctionnement ont diminué de 35 % sur la période 2013-2020, suite à
la baisse du plafond d’ETP mais aussi en raison des économies liées à l’informatisation du
traitement de la médiation via Sollen et des économies diverses, sur le coût du rapport annuel
ou la participation à des évènements extérieurs. Le loyer et les charges locatives représentaient
766 376 €, soit près de 40 % des dépenses de fonctionnement hors dépenses de personnel (PAP
2020). Leur montant va être divisé par deux avec le déménagement à la Grande Arche
(380 523 € en 2022).
Les dépenses d’investissement sont limitées et portent essentiellement sur des
équipements informatiques.
2.2.3.3
Un fonds de roulement excessif
Le précédent rapport de la Cour avait pointé le fonds de roulement excessif et avait
recommandé de réduire le niveau des recettes allouées. C’est ce qui a été fait en 2014 avec un
prélèvement de 2,1 M€ qui a permis de limiter le niveau des ressources affectées et réduire le
fonds de roulement à hauteur de 1,2 M€.
Le fonds de roulement a recommencé à augmenter par la suite, alimenté par les
provisions et des dépenses budgétaires inférieures aux prévisions (
cf
. annexe n° 4 sur le taux
d’exécution budgétaire). Il a atteint 2,5 M€ début 2020.
Le MNE estime que ce fonds de roulement lui est nécessaire pour fonctionner de façon
sereine dans la mesure où il ne maîtrise pas la date de versement de sa subvention.
La Cour note que le fait que le versement de la subvention ne soit plus conditionné à la
publication d’un arrêté interministériel (
cf
.
supra
) a pour effet de fluidifier la procédure
budgétaire. Par ailleurs, le montant actuel du fonds de roulement représente à ce jour plus de la
moitié de la subvention versée soit 199 jours de dépenses de fonctionnement (hors
amortissement). Ce niveau apparaît donc excessif dès lors que la subvention est versée dans des
délais raisonnables, ce qui conduit la Cour à devoir réitérer la recommandation formulée lors
du précédent contrôle.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
43
Recommandation n° 5.
(DB, DGEC, MNE, 2022) : réduire le niveau des ressources
(subvention) allouées au médiateur national de l’énergie afin d’utiliser la trésorerie
disponible et mettre fin à l’augmentation régulière du fonds de roulement.
2.3
Ressources humaines : des modalités de détermination et d’évolution
des rémunérations insuffisamment encadrées
2.3.1
Un cadre juridique dérogatoire pour le recours aux agents contractuels
Comme les autres autorités administratives et publiques indépendantes, le MNE
bénéficie, en application de l’article 16 de la loi n°
2017-55
du 20 janvier 2017
,
d’un statut
dérogatoire l’autorisant à recruter des agents contractuels. Le rapport de 2017 de la Cour sur les
autorités indépendantes
29
relève que par cette disposition, dont les travaux préparatoires
éclairent la portée, le législateur a entendu garantir l’autonomie de recrutement des autorités
indépendantes, dans la limite de leur plafond d’emplois et de leurs ressources financières.
L’article
R. 122-8
du code de l’énergie précise que les agents des services du médiateur
sont des fonctionnaires ou des agents contractuels de droit public, sous contrat à durée
déterminée ou indéterminée, à temps complet ou incomplet. En application de l’article
R. 122- 4
du code de l’énergie, le MNE définit les conditions générales d'emploi et de
recrutement des agents de ses services. Le texte en vigueur date du 1
er
juillet 2020 et s’applique
à l’ensemble des agents contractuels de l’établissement. Il remplace une précédente décision
datant du 15 octobre 2018.
Les dispositions de la décision interne de juillet 2020 s’inscrivent dans le cadre fixé par
le
décret n° 86-83
du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents
non titulaires de l’État.
De fait, à l’exception de l’agent comptable, l’ensemble des agents du MNE sont
aujourd’hui des contractuels, généralement recrutés à durée déterminée pour trois ans,
reconductible une fois de façon expresse. La plupart des CDD sont convertis en CDI à l’issue
de la période de trois ans. La proportion des agents en CDD était en 2020 de 51 %, légèrement
supérieure à celle des agents en CDI (
cf
. annexe n° 5).
Il existe sept catégories de postes au MNE, dont cinq sont équivalentes à un emploi de
catégorie A. L’essentiel des recrutements s’effectue sur des postes de chargé de mission/juriste.
-
Directeur général des services
-
Chef de service
-
Chef de pôle
-
Chef de projet
29
Cour des comptes
,
Autorités administratives et publiques indépendantes : politiques et pratiques de
rémunération 2011-2016
, communication à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle
budgétaire de l’Assemblée nationale, décembre 2017, p. 34
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
44
-
Chargé de mission/juriste
-
Conseiller analyste
-
Assistant de direction/médiation.
La part des personnels de catégorie A et A+ est de près de 80 % en 2020 (
cf
. annexe
n° 5), en constante augmentation depuis 2013 (73 % en 2013). Cette évolution est cohérente
avec la montée en puissance de la mission de médiation et les efforts de rationalisation faits sur
les fonctions support.
Le MNE est une structure féminisée à plus de 80 % en 2020 (73 % en 2013) et la part
du personnel féminin dans les postes de catégories A et A+ a augmenté de façon significative
entre 2013 (68 %) et 2020 (82 %).
Le précédent rapport de la Cour sur le MNE avait relevé le turn-over important (17,4 %
en 2012). Les mouvements de personnels se sont stabilisés depuis à un niveau plus faible et se
situent, sur la période 2013-2020, entre 11 % et 14 %, à l’exception notable de l’année 2016
où, avec sept démissions, le renouvellement a atteint 22 %. Le taux de rotation reste en moyenne
relativement élevé, à l’instar de celui de plusieurs autorités indépendantes analysé dans le
rapport précité de la Cour sur les conditions de rémunérations dans ces structures. On peut
toutefois relever la particulière stabilité des personnels d’encadrement. La directrice générale
des services et deux des trois cheffes de service travaillent au sein du MNE depuis 2008 ou
2009. La troisième cheffe de service est arrivée en 2011. Ce constat souligne la nécessité
d’assurer une gestion dynamique des ressources humaines permettant d’assurer un
renouvellement régulier de l’ensemble de la structure hiérarchique tout en fidélisant pour un
temps suffisant les jeunes professionnels, notamment les chargés de missions/juristes.
2.3.2
Des règles souples en matière de rémunération des agents
La politique salariale concerne tous les salariés sous contrat hormis les personnes en
détachement (agent comptable pour 5 %) et le médiateur. Celui-ci entre dans la catégorie des
membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
n’exerçant pas leur mandat à temps plein et
perçoit une indemnité de fonction brute annuelle
de 50 000 €
30
. Ce montant est inchangé depuis 2009
31
.
Comme la plupart des contractuels de l’État
32
, le salaire de base des agents du MNE est
fixé en référence aux indices bruts et majorés de la fonction publique. La décision de juillet
2020 précise que le niveau retenu est versé en tenant compte notamment du type de fonctions
30
Arrêté du 27 février 2020
pris en application du
Décret n° 2020-173
du 27 février 2020
relatif aux
modalités de rémunération des membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques
indépendantes.
31
Arrêté du 18 mars 2009
32
Cour des comptes,
Les agents contractuels dans la fonction publique,
exercices 2010-2019
, rapport
public thématique, septembre 2020.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
45
exercées, du niveau de responsabilités, des qualifications, du niveau de diplôme et de
l‘expérience professionnelle antérieure (article 8-I).
Dans le précédent rapport sur le MNE, la Cour avait relevé l’absence d’une grille des
rémunérations et avait formulé une recommandation pour y remédier. Le médiateur estime
difficile de mettre en œuvre cette recommandation compte-tenu de la modestie de ses effectifs.
En outre, il souhaite conserver une certaine souplesse dans la gestion des rémunérations pour,
selon lui, s’adapter à l’évolution de son activité et aux conditions du marché de l’emploi.
Plus récemment, la Cour, dans son rapport de 2017 sur les rémunérations dans les
autorités indépendantes relevait que plusieurs AAI disposaient d’un « cadre de gestion »
détaillant notamment l’échelonnement indiciaire des agents contractuels. Pour celles qui n’en
relevaient pas encore, y compris les plus petites, la Cour recommandait l’adoption par chaque
autorité indépendante d’un cadre de gestion interne destiné à objectiver les rémunérations
proposées en fonction des responsabilités exercées et de l’ancienneté dans la structure.
La Cour invite donc le MNE à mettre en place un tel cadre de gestion afin de formaliser
et encadrer les règles de détermination et d’évolution des rémunérations des différents emplois,
ce qui devrait permettre de conserver la souplesse souhaitée.
Recommandation n° 6.
(MNE, 2022) : Adopter un cadre de gestion des personnels
contractuels, comportant notamment une grille de rémunérations.
2.3.3
Des rémunérations moyennes masquant des écarts importants
La rémunération des agents s’échelonne entre l’indice 426 (25 700 € brut annuel hors
primes en 2019) et l’indice 1510 auquel est ajouté un complément de 1 833 € (soit 111 645 €
brut annuel hors primes en 2019). Le MNE indique que l’essentiel des recrutements s’effectue
sur des postes de chargé de mission/juriste (bac + 5), avec un salaire d’embauche compris entre
les indices 510 (soit 29 540 € brut annuel hors primes en 2019) et 555 (soit 32 148 € brut annuel
hors primes en 2019) si le candidat possède au moins une première expérience et a un diplôme
d’avocat.
En plus du salaire de base, les agents perçoivent l’indemnité de résidence d’un taux de
3 %, le supplément familial de traitement, le remboursement des frais de transport sur la base
de 50 % des couts effectivement engagés, des indemnités pour les personnes en télétravail ainsi
que des primes versées annuellement. Ces primes (
cf
.
infra
) représentent environ 9 % de la
rémunération totale.
Le salaire moyen mensuel brut (y compris primes annuelles) au sein du MNE s’élevait
en 2019 à 3 558 €. Ce montant se situe légèrement au-dessus de celui des fonctionnaires de
l’État (3 423 €) et de celui des contractuels de l’État (2 685 €). Il s’explique notamment par la
forte proportion d’agents de catégorie A. Il reflète imparfaitement les écarts de salaire entre un
encadrement dirigeant ayant une forte ancienneté au sein de la structure et de jeunes
contractuels recrutés en tout début de carrière.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
46
Tableau n° 11 :
Salaire brut mensuel moyen des agents de l’État et du MNE (2019)
€
Salaire mensuel brut
Total fonction publique d'État
3 230
dont fonctionnaires
3 423
dont non-fonctionnaires
2 685
MNE
3 558
Source : «
jaune »
sur l’état de la fonction publique et des rémunérations (tableau 6.3-1 bis) annexé au PLF 2022
et fichier paie agent comptable (décembre 2019 hors quotité temps de travail) ; calculs et tableau Cour des
comptes.
Par ailleurs, les comparaisons montrent que les rémunérations au sein du MNE se situent
plutôt en deçà des rémunérations servies par d’autres autorités indépendantes. Ces
comparaisons sont à analyser avec précaution dans la mesure où certaines institutions, comme
par exemple la CRE, doivent attirer des profils très qualifiés et spécialisés et sont en
concurrence avec des recruteurs du secteur privé.
Enfin, le montant total de l’action sociale s’est élevé à 88 136 € en 2018, soit 2 318 €
par ETPT. Outre la restauration (tickets restaurant), l’action sociale portait sur le
remboursement d’une partie des frais de mutuelle, une subvention (3 200 € en 2018) à
l’association Recré qui donne accès à la pratique de loisirs à des tarifs préférentiels, des chèques
vacances, la prise en charge des frais d’inscription, jusqu’à 100 € par an et par enfant, aux
activités sportives et culturelles et les chèques cadeaux de Noël particulièrement généreux
(100 € pour l’agent et 100 € par enfant). En 2020, le montant consacré à l’action sociale a été
ramené à 38 000 € en raison de la crise sanitaire et, selon les informations données par le MNE,
de la suppression d’une dotation à une mutuelle et une prévoyance (environ 23 000 €), le
renouvellement du marché concerné ayant été infructueux.
2.3.4
Des augmentations de salaire disparates
Les augmentations de salaire peuvent être collectives en fonction de l’évolution du point
d’indice sur lequel est fixé le salaire de base, ou individuelles.
Les augmentations individuelles peuvent être décidées à l’occasion du renouvellement
du contrat, d’une évolution des fonctions de l’agent ou sur décision du comité de direction à
l’issue de l’entretien annuel. Par ailleurs, en application des dispositions de l’article 1-3 du
décret n° 86-83
du 17 janvier 1986 relatif aux agents contractuels de l’État, la rémunération des
agents du MNE fait l'objet d'une réévaluation au moins tous les trois ans.
La proportion d’agents bénéficiant chaque année d’une augmentation varie entre 23 et
50 %.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
47
Tableau n° 12 :
Principales caractéristiques des augmentations individuelles
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Nbre de salariés ayant bénéficié
d'une augmentation
18
16
21
9
15
19
18
13
% / total ETPT
43%
39%
51%
23%
39%
50%
44%
32%
Type d'augmentation
< ou = à 2 %
4
10
1
4
10
10
6
de 2 à 5% inclus
10
16
5
4
9
6
5
7
de 5 à 8% inclus
2
3
1
3
1
> 8 %
2
6
1
1
2
Augmentation la plus élevée (%)
14,5%
5%
23%
9%
20%
8%
15%
5%
Source : MNE ; calculs et tableau Cour des comptes
Le précédent contrôle de la Cour soulignait que les décisions-cadres internes à la
structure ne donnaient aucune information sur la fourchette des augmentations, ni sur leur mode
de fixation. Il invitait le MNE à mieux définir leur cadre juridique et leur processus
d’attribution. Cette recommandation n’a pas été mise en œuvre et reste d’actualité, en lien avec
la mise en place d’un futur cadre de gestion (
cf
.
supra
).
2.3.5
Des primes insuffisamment encadrées et trop faiblement liées à la
performance individuelle
2.3.5.1
Les primes annuelles : des textes mal articulés, un complément de rémunération
reconduit de façon quasi automatique
La décision interne du 20 octobre 2008 relative à la politique salariale du médiateur
national de l’énergie prévoit qu’une prime annuelle peut être versée en fin d’année. Son montant
est compris entre 20 et 100 % de la rémunération brute mensuel du salarié concerné. La décision
précise qu’il s’agit d’une dotation exceptionnelle sans automaticité de reconduction. En cas
d’arrivée en cours d’année, la prime est déterminée au prorata du temps de présence.
Toutes ces dispositions auraient dû être intégrées dans les décisions internes successives
sur les conditions générales de recrutement et d’emploi, dont la plus récente date du 1
er
juillet
2020. Cela n’a pas été le cas. De façon surprenante, les primes ne figurent pas dans la partie
« rémunération » de cette décision et ne font notamment pas partie des éléments cités comme
éléments de rémunération. Les primes sont uniquement mentionnées à l’article 9 relatif à
l’évaluation professionnelle individuelle de l’agent. Cet article renvoie assez largement à la
décision interne d’octobre 2008. Elle y déroge sur la fourchette de la prime, comprise entre 0 %
et 100 % de la rémunération brute mensuelle du salarié (précédemment comprise entre 20 et
100 %).
Enfin, le MNE a pris le 11 mars 2021 une nouvelle décision relative à l’attribution d’une
prime annuelle. Cette décision supprime le terme « exceptionnel » et précise que le montant de
la prime annuelle peut atteindre 120 % de la rémunération brute mensuelle moyenne de l’agent,
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
48
dérogeant ainsi à la règle du plafond à 100 % fixée par la décision du 1er juillet 2020. Pour
autant, cette décision ne mentionne ni la décision d’octobre 2008, ni celle de juillet 2020.
Au total, les textes encadrant les modalités d’attribution des primes appellent plusieurs
remarques :
-
Les dispositions relatives aux primes devraient figurer dans la partie « rémunération »
de la décision interne relative aux conditions d’emploi afin d’assurer la correcte et
complète information des agents sur les différentes composantes de la rémunération ;
-
La rédaction utilisée est ambigüe : l’article 9 de la décision du 1
er
juillet 2020 se réfère
à la « part variable de la prime allouée en fin d’année », laissant entendre qu’il existerait
une part fixe, ce qui n’est pas le cas ;
-
L’articulation entre les décisions internes de 2008, de 2020 et de 2021 est peu claire :
les conditions d’attribution des primes annuelles figurent dans la décision de 2008 et
dans celle de 2021 mais non pas dans celle de 2020, qui est pourtant supposée
rassembler toutes les règles sur les conditions d’emploi des agents. Certaines
dispositions de la décision de 2021 dérogent à celles de 2020 sans jamais mentionner ce
texte, ni
a fortiori
, préciser que les dispositions concernées sont abrogées.
En conséquence, la Cour invite le MNE à compléter et revoir la rédaction de la décision
générale du 1
er
juillet 2020 pour y inclure les précisions nécessaires relatives à l’attribution des
primes annuelles ainsi que les modifications de plafond prévues par la décision du
11 mars 2021. Les décisions antérieures doivent être formellement abrogées pour éviter toute
ambigüité sur le texte applicable. À l’avenir, le MNE doit veiller à une meilleure articulation
des textes successifs relatifs aux primes.
Au-delà, il apparaît que les contrats de travail des agents du MNE ne mentionnent que
le salaire de base et la référence aux indices brut et majorés sur lesquels repose ce salaire. Les
contrats ne font mention ni des primes annuelles ni des autres indemnités et avantages annexes
auxquels l’agent a droit. Il convient d’intégrer ces éléments dans les contrats.
Sur le fond, le montant de la prime tient en principe compte, en application de la décision
du 20 octobre 2008, de l’évaluation de l’atteinte des objectifs, des compétences mises en œuvre,
de la charge de travail, de l’investissement et du comportement personnels dans le travail et
dans le fonctionnement collectif du service. La décision du 11 mars 2021 reprend une
formulation similaire, en y ajoutant la prise en compte du temps de présence. Les différents
textes précisent que les primes sont attribuées sans automaticité de reconduction.
Dans les faits, et comme la Cour l’avait aussi souligné dans son rapport précité sur les
autorités indépendantes, si la modulation existe, elle est rare et de portée limitée. La grande
majorité des agents touche le taux de prime maximal (100 % du salaire brut mensuel). En 2020,
sur les huit agents n’ayant pas reçu ce taux, quatre était à 90 %, un était à 80 % et trois à 70 %.
Aussi, la Cour est amenée à réitérer au MNE, la recommandation formulée dans son
rapport sur les autorités indépendantes sur la nécessité de mieux lier la rémunération variable à
la performance individuelle.
Recommandation n° 7.
(MNE, 2022) Utiliser plus largement les possibilités de
modulation de la part variable de la rémunération liée à la performance individuelle,
sur la base des entretiens d’évaluation.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
49
2.3.5.2
Des primes exceptionnelles versées sans texte définissant leurs conditions
d’octroi
Certains agents bénéficient, en sus des primes annuelles, de primes exceptionnelles.
Cette pratique existe depuis 2017 sans qu’aucun texte en ait défini les conditions et les
modalités.
Le tableau ci-après montre les principales caractéristiques des primes exceptionnelles
versées entre 2017 et 2020. Le nombre de bénéficiaires était de cinq en 2017, il a augmenté en
2018 (11 personnes) et en 2019 (17 personnes soit près de la moitié de l’effectif total de la
structure), avant de redescendre à 12 personnes en 2020. Au total, 45 primes ont été distribuées
à 24 personnes différentes. Sur l’ensemble de la période, le montant total versé est de 43 300 €,
soit 962 € en moyenne par bénéficiaire.
Tableau n° 13 :
Primes exceptionnelles - principales caractéristiques
2017
2018
2019
2020
Total
Montant total primes (brut)
4 600 €
10 800 €
16 300 €
11 600 €
43 300 €
Nombre bénéficiaires
5
11
17
12
45
Prime la plus élevée
1 200 €
2 000 €
2 000 €
2 500 €
Montant moyen
920 €
982 €
959 €
967 €
962 €
Source : MNE ; calculs et tableaux Cour des comptes
La Cour invite le MNE à prendre au plus vite les textes nécessaires à l’encadrement
juridique de ces primes
.
2.3.6
Des déplacements non conformes aux règles
En application de l’article
R. 122-7
du code de l’énergie, les frais occasionnés par les
déplacements et les séjours des agents des services du médiateur sont remboursés dans les
conditions prévues par la réglementation applicable aux personnels civils de l'État, et en
particulier le décret
n° 2006-781
du 3 juillet 2006 sur les modalités de règlement des frais
occasionnés par les déplacements temporaires.
Une décision interne du MNE n° 59 bis du 17 février 2016, qui remplace une décision
n° 59 du 4 août 2015, fixe les modalités de prise en charge des frais engagés par les agents du
MNE à l’occasion d’une mission ou d’une représentation pour les besoins du service.
Tant le décret du 3 juillet 2006 que la décision interne du 17 février 2016 disposent que
l’agent en déplacement doit être muni d’un ordre de mission. La décision interne précise que le
médiateur signe directement les ordres de mission le concernant. Or, il apparait que certains
déplacements ont été effectués sans ordre de mission. Par ailleurs, certains trajets en train ont
été réalisés en première classe alors que la décision interne de 2016 précise que les trajets en
train de moins de six heures doivent se faire en 2
ème
classe.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
50
2.4
Achats : consolider les procédures existantes pour renforcer la sécurité
juridique des contrats
La Cour a procédé à l’analyse des procédures de passation de quelques marchés publics
afin de s’assurer du respect par le MNE des règles fixées par le code de la commande publique
et par son propre cadre de gestion. Elle a analysé à la fois des marchés passés en procédure
adaptée, c’est-à-dire les marchés ne dépassant pas un certain seuil et soumis en conséquence à
un moindre formalisme en matière de publicité et de mise en concurrence, et des marchés passés
selon une procédure formalisée (appel d’offres notamment) qui obéissent à des règles de
procédure plus strictes.
2.4.1
Un guide des procédures d’achat à actualiser
En tant que personne morale de droit public, le MNE est un pouvoir adjudicateur (article
L. 1211-1
du code de la commande publique) et doit respecter les dispositions du code
applicable à cette catégorie d’acheteurs.
Le code de l’énergie prévoit des dispositions spécifiques au MNE en précisant, à
l’article
R. 122-4-6°
que le Médiateur fixe les conditions générales de passation des conventions
et marchés.
Sur cette base, la structure dispose d’un guide des procédures d’achat. La dernière
version de ce document date du 8 juin 2016. Elle est donc antérieure à l’entrée en vigueur du
code de la commande publique le 1
er
avril 2019. Le MNE a indiqué être en train de procéder
aux adaptations nécessaires, ce dont la Cour prend acte.
2.4.2
Des procédures internes inégalement respectées pour les marchés à procédure
adaptée
En application de l’article
R. 2122-8
du code de la commande publique, les acheteurs
peuvent passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un
besoin dont la valeur estimée est inférieure à 40 000 € hors taxes
.
Pour ces achats, les acheteurs
ne sont soumis qu’à l’obligation de bon sens de gérer de façon optimale les deniers publics.
Le médiateur a cependant choisi d’appliquer des procédures plus contraignantes en
recourant à une procédure systématique de concurrence, quel que soit le montant de l’achat. Le
guide d’achat prévoit à l’article 13 deux exceptions à ce principe : (1) les produits non
substituables pour lesquels existe un fournisseur unique et (2) certaines commandes
complémentaires lorsque le changement de fournisseur entraînerait des difficultés techniques
d’utilisation et d’entretien disproportionnées par rapport à l’objectif poursuivi.
Sous ces réserves, l’article 14 du guide d’achat précise les règles interne de publicité et
de procédure. La mise en concurrence, au premier euro, repose sur l’analyse d’au moins trois
devis différents. S’agissant des mesures de publicité, le guide distingue les marchés en deçà de
25 000 €, dispensés de mesures de publicité et les marchés entre 25 000 € HT et les seuils de
procédure formalisée qui doivent prévoir de sur de telles mesures.
La Cour a analysé plus particulièrement les modalités de mise en concurrence de
quelques contrats de fournitures ou de services.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
51
Certains des marchés analysés n’appellent pas d’observations particulières dans la
mesure où ce sont les devis les moins chers qui ont été retenus. Dans d’autres cas, il apparaît
que le MNE ne respecte pas toujours les règles qu’il s’est lui-même fixées.
Ainsi, avant 2019, la rédaction du rapport annuel était confié à un prestataire, sans mise
en concurrence préalable. Ce n’est qu’à partir de 2019, du fait de l’indisponibilité du prestataire
habituel, que le marché a fait enfin l’objet d’une procédure de mise en concurrence sur la base
des dispositions de l’article 14 du guide d’achat.
De même, la procédure de mise en concurrence avec au moins trois devis n’a pas été
respectée pour certains achats de mobilier de bureau, en vue de conserver le même mobilier que
celui déjà installé dans les locaux du MNE. Néanmoins, les cas de dispenses à la mise en
concurrence mentionnées à l’article du guide de procédure (produits non substituables) peuvent
difficilement être invoquées pour du mobilier de bureau standard. Enfin, certaines prestations
juridiques ont été commandées directement à un prestataire.
Ces exemples montrent l’inadaptation des règles internes que le MNE s’est fixé pour les
achats de faible montant. Il lui appartient de redéfinir, le cas échéant, de nouvelles règles, dans
le respect des dispositions du code des marchés publics. Ces règles doivent tenir compte de
l’obligation qui lui incombe de gérer de façon rigoureuse les deniers publics, sans mobiliser ses
ressources de façon disproportionnée par rapport à la valeur des achats. Un recours plus
important aux groupements d’achats publics doit également être étudié.
2.4.3
Marchés formalisés : un respect inégal des règles applicables
La Cour a analysé quatre marchés de service passés selon une procédure formalisée.
Tableau n° 14 :
Marchés de services (procédure formalisée)
Source : MNE (rapports d’analyse des offres) ; tableau Cour des comptes
(1) Montant attribué sur la base du prix forfaitaire ou d’une commande simulée sur une année (sauf centre d’appel
/prix sur quatre ans)
Les quatre marchés ont été passés selon la procédure de l’appel d’offres ouvert. La
technique d’achat retenue pour les deux marchés informatique (sites Internet et Sollen) est celle
Numéro de marché
Nombre de lots
Intitulé des lots
Date
d'attribution
Montant (1)
Maintenance, développement, hébergement et exploitation des sites Internet et des outils du MNE
01-2018
2
Maintenance corrective et évolutive
29 mai 2018
32 857
Exploitation et hébergement
30 mai 2018
10 195
Réalisation de 3 baromètres annuels
02-2018
1
7 novembre 2018
49 987
Maintenance, développement, hébergement et exploitation de l’application SOLLEN
02-2019
2
Maintenance corrective et évolutive
7 mai 2019
48 420
Exploitation et hébergement
19 avril 2019
10 776
Externalisation d’un centre d’appels destiné à l’information de consommateurs particuliers et professionnels
Mise en place, exploitation et maintenance d’un Serveur Vocal Interactif
06-2019
1
20 janvier 2020
1 151 532
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
52
des accords cadre prévue à l’article
L. 2125-1
du code de la commande publique
33
Cette
technique paraît adaptée en l’espèce, les détails des évolutions informatiques ne pouvant pas
être toujours être connus à l’avance. Les accords-cadres ont donné lieu à des marchés
subséquents qui n’ont pas été examinés par la Cour.
Les conditions initiales de mise en concurrence sont globalement satisfaisantes. Les
cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) sont précis et décrivent bien les besoins du
pouvoir adjudicateur. La rédaction des règlements de consultation (RC) et des cahiers des
clauses administratives générales (CCAG) que la Cour a pu consulter n’appellent pas
d’observation particulières.
Seule l’absence d’allotissement du marché de réalisation de trois baromètres annuels
peut soulever des interrogations dans la mesure où le baromètre relatif à l’ouverture des marchés
de détail du gaz naturel et de l’électricité est assez différent dans son objet (les autres sont des
enquêtes de satisfaction sur les services du médiateur) et sa méthodologie (échantillon plus
grand). Le MNE a indiqué à la Cour que, par souci de sécurité juridique, la prochaine mise en
concurrence de ces prestations comportera deux lots, un pour les enquêtes de satisfaction et un
pour le baromètre sur l’ouverture des marchés.
La procédure d’examen des offres et de choix de l’attributaire par la commission d’appel
d’offres révèle quant à elle des pratiques plus contestables au regard de la régularité et de la
traçabilité de la procédure.
Ainsi, la déclaration d’infructuosité du lot n° 1 du marché 02-2019 relatif à la
maintenance corrective et évolutive de Sollen, pour lequel deux offres avaient été présentées,
est motivée de façon lapidaire. Le rapport d’analyse des offres se contente d’indiquer que les
prix sont supérieurs à l’enveloppe prévue par le MNE et de renvoyer à une négociation avec les
deux candidats.
Si la procédure conduite ne semble pas avoir eu d’impact sur l’identité de l’attributaire
et a permis d’obtenir des prix plus compétitifs, elle n’en demeure pas moins critiquable: la
déclaration d’infructuosité ne peut être utilisée pour contourner le principe de non-négociation
en appel d’offres et la rédaction des rapports d’analyse des offres ne permet pas d’assurer la
traçabilité de la procédure de façon satisfaisante.
Par ailleurs, l’offre retenue dans le cadre du marché des baromètres est une variante
consistant à mixer enquête par téléphone et par Internet. Or, l’avis d’appel public à la
concurrence excluait la possibilité de présenter des variantes. C’est l’offre de base de
l’attributaire, classée 2
ème
, qui aurait dû être retenue.
De manière générale, les modalités de désignation de l’offre retenue mériteraient d’être
plus détaillées pour assurer une meilleure traçabilité du processus de sélection. Les modalités
de notation du critère « prix » n’appellent pas d’observations particulières. En revanche, les
rapports d’analyse des offres (RAO) ne précisent pas clairement la manière dont le critère
« valeur technique » est évalué. Ce n’est pas une obligation légale mais le pouvoir adjudicateur
doit être en mesure de démontrer que la méthode retenue répond aux grands principes de la
33
«
L'accord-cadre (…) permet de présélectionner un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de
conclure un contrat établissant tout ou partie des règles relatives aux commandes à passer au cours d'une période
donnée ».
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
53
commande publique, notamment l’égalité de traitement des candidats. De même, alors que le
règlement de la consultation définit précisément les modalités d’analyse des critères, la
rédaction du rapport d’analyse des offres est parfois succincte et ne permet pas toujours de
comprendre les écarts de note. Par exemple, le RAO du marché « Centre d’appels » juge une
des offres non adaptée et « rédhibitoire » sur certains points tout en la notant 29/60.
Ces éléments sont sans conséquence lorsque les écarts entre les offres sont tels que la
décision d’attribution apparaît peu contestable mais pas lorsque les offres sont assez proches.
Il est recommandé au MNE de détailler davantage le RAO pour assurer une réelle traçabilité de
la procédure et se prémunir contre une éventuelle contestation.
Ces différents exemples illustrent les difficultés auxquelles le MNE peut être confronté
pour conduire des procédures de marchés souvent complexes. Là encore, le transfert de
certaines procédures, dans le cadre d’une convention de gestion, lui permettrait de concentrer
ses moyens sur la définition des besoins et le suivi de l’exécution des prestations.
2.5
Un déménagement du MNE porteur d’économies de fonctionnement
mais contrevenant au schéma immobilier initial du ministère
2.5.1
Un gain significatif pour le MNE et pour le ministère chargé de l’énergie
Depuis 2009, le MNE occupait des locaux sous-loués à la CRE rue Pasquier, aux termes
d’une convention d’hébergement signée le 16 décembre 2009 et arrivant à échéance le 31 août
2021. Le loyer annuel charges comprises était de 830 175 € en 2021. La convention
d’occupation prévoyait en outre la refacturation de la CRE au MNE de services partagés pour
l’informatique et la gestion du site, dont le coût annuel s’élevait à 93 695 € en 2021.
À l’issue d’une décision du secrétariat général du MTE du 28 septembre 2020, il a été
décidé que le MNE quitterait la rue Pasquier pour emménager dans un des immeubles du MTE
à La Défense au début de l’année 2022. Ce déménagement s’est réalisé fin janvier 2022 dans
les locaux de la Grande Arche.
Le loyer annuel charges comprises que le MNE acquittera auprès du MTE sera de
380 523,20 € pour la première année. Il représente une économie de fonctionnement
substantielle en regard du loyer annuel acquitté à la CRE, même si on en déduit le surcoût
annuel d’environ 40 000 euros occasionné par le nouveau support informatique, dorénavant
externalisé auprès d’un prestataire (SCC) dans le cadre d’une convention UGAP (132 042,96 €
TTC la première année).
Par ailleurs, un certain nombre de dépenses ont dû être engagées pour le déménagement,
pour un montant supérieur à 64 000 €, se décomposant comme suit :
-
mobilier : 36 408 € ;
-
déménagement et installation infrastructure informatique : 15 867 € ;
-
transition support informatique : 6 801,90 € ;
-
nettoyage avant état des lieux : 2 040 € ;
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
54
-
consultation juridique
34
: 1 500 € ;
-
frais d’huissier (pré-visite et état des lieux) : 1 638,40 €.
2.5.2
Un schéma immobilier ministériel mis à mal
Les ministères en charge de l’écologie et du logement ont mené, entre 2012 et 2017, un
ambitieux projet visant à regrouper physiquement leurs services centraux, réduire les surfaces
occupées et les coûts immobiliers tout en assurant la pérennité de leur implantation à La
Défense. La Cour a effectué en 2017 un contrôle de cette opération qui a donné lieu à une
insertion au rapport public annuel de 2018
35
dans laquelle elle constatait que cette opération
immobilière avait permis d’apporter des améliorations substantielles au fonctionnement des
services
36
.
La CRE louait pour sa part la totalité de l’immeuble de la rue Pasquier, aux termes d’un
bail signé le 17 septembre 2009 avec effet du 1er septembre 2009 au 31 août 2021. Elle a engagé
en 2018 une négociation avec le propriétaire des locaux (Generali) qui a conduit à définir les
conditions d'un renouvellement possible du bail. Ces conditions dépassaient toutefois les
normes de prix acceptables par la direction de l’immobilier de l’Etat.
Le ministre des comptes publics, saisi par le président de la CRE, a demandé à ce
dernier, par un courrier du 7 juin 2019, de comparer trois scénarios. Le premier consistait à
identifier un site domanial susceptible d'accueillir la CRE à court ou à moyen terme sur Paris,
dans la perspective d'une localisation pérenne. Le renouvellement du bail de la rue Pasquier
devait alors être négocié pour la durée restant à courir jusqu'à l'installation dans ce site
domanial. Le deuxième visait à stabiliser la proposition de renouvellement du bail négocié avec
le propriétaire, sans perspective de déménagement sur un site domanial dans les neuf prochaines
années. Enfin, le troisième scénario consistait à rechercher un nouveau site dans le parc locatif
privé à des conditions moins onéreuses que le loyer actuel.
Le premier scénario a été retenu en octobre 2019 mais aucun bien domanial présentant
des capacités suffisantes à court terme n’a pu être identifié dans le périmètre ministériel du
MTE, hormis à échéance plus lointaine. A cette date d’octobre 2019, à l’intérieur du périmètre
du MTE, les projections de postes de travail disponibles montraient que les besoins conjoints
de la CRE (175 postes) et du MNE (45 postes) pouvaient être satisfaits au mieux en 2022, et
plus certainement en fin d'année 2023. Le MTE s’est donc engagé à accueillir la CRE et le
MNE dans l’un des immeubles de La Défense à échéance de six ans au maximum (2025). Un
tel objectif correspondait à la volonté du ministère de densifier les bâtiments occupés au fur et
34
Honoraires d’avocat consécutifs à la demande de la CRE de facturer au MNE des travaux, pour un
montant de 137 000 €, de remise à neuf des locaux occupés au cours des 12 années d’occupation.
35
Cour des comptes - Rapport public annuel 2018 - février 2018 :
« Le regroupement immobilier des
services centraux des ministères chargés de l’équipement, de l’environnement et du logement : une fonctionnalité
améliorée au prix de surcoûts évitables ».
36
Toutes les directions techniques du ministère ont été rassemblées dans la tour Séquoia et les services
chargés des fonctions supports (finances, ressources humaines, logistique, etc.) dans la paroi sud de l’Arche.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
55
à mesure que les réductions d’effectifs rendraient des espaces disponibles pour accueillir de
nouveaux services. L’accueil de la CRE et du MNE s’est inscrit dans ce schéma immobilier.
Concomitamment, un nouveau bail pour la rue Pasquier a été signé le 28 novembre 2019
par la CRE, d’une durée ferme de six ans courant jusqu’au 31 décembre 2025, avec possibilité
de sortie anticipée l’année précédente. Le MTE, à cette occasion, s’est engagé à accueillir la
CRE au terme de ce bail.
A la date d’octobre 2019, il n’était pas question de disjoindre le relogement de la CRE
et du MNE. Pourtant, à l’issue d’une réunion tenue le 28 septembre 2020, en présence de la
secrétaire générale du ministère, du président de la CRE et du MNE, il a été décidé que :
-
le MNE déménagerait dès le début de l’année 2022 de la rue Pasquier pour emménager
dans un des immeubles du MTE à La Défense ;
-
ce départ anticipé, ainsi que l’évolution des modes de travail de la CRE, permettraient à
cette dernière de sous-louer entre 1 500 et 2 000 m² pendant une période supérieure à 3
ans ;
-
un avenant à la convention d’hébergement liant la CRE et le MNE serait négocié par les
deux parties afin notamment de faire bénéficier le MNE des conditions financières du
nouveau bail et de prolonger le terme de l’occupation du MNE jusqu’à la date de son
déménagement.
Cette décision a surpris les services du MNE auxquels il avait toujours été indiqué qu’un
relogement dans le patrimoine immobilier de l’État se ferait simultanément avec celui de la
CRE, notamment en raison des synergies et possibilités de mutualisation entre les deux
institutions.
Le schéma immobilier arrêté par le MTE et la direction de l’immobilier de l’État à
l’occasion du déménagement du MNE a donc autorisé le maintien provisoire de la CRE dans
ses locaux rue Pasquier, pour une durée limitée, avant un futur emménagement dans les locaux
du MTE. A l’occasion du départ anticipé des services du MNE, des travaux d’aménagement à
la charge de la CRE ont été entrepris en vue de sous-louer une partie du bâtiment.
Pour justifier la remise en cause du schéma immobilier initialement envisagé, le
secrétariat général du MTE fait valoir un séquençage destiné à ne pas geler l’ensemble des
surfaces disponibles à la Défense avant l’arrivée de la CRE, sans en préciser les modalités
précises.
D’après le président de la CRE, des désaccords avec le MNE sur l’utilisation des locaux
à l’issue de la renégociation du bail et dans l’attente du relogement de ces deux institutions,
seraient à l’origine de la décision
« de disjoindre le sujet immobilier du MNE et de la CRE »
,
dans un contexte de crise sanitaire qui aurait modifié les modes de travail des deux structures
au point de permettre de libérer des surfaces supplémentaires.
Le MNE, tout en reconnaissant les économies de fonctionnement qu’il réalise à l’issue
de son déménagement, s’interroge
« sur les véritables raisons qui ont conduit la secrétaire
générale du ministère de la transition écologique à revoir en septembre 2020, à la demande du
président de la CRE, une décision qu’elle avait prise moins d’un an auparavant, en octobre
2019, lorsqu’elle avait autorisé la signature d’un nouveau bail par la CRE fin 2019, pour
prolonger l’hébergement de la CRE et du MNE dans les locaux que les deux autorités
administratives occupaient ensemble 15 rue Pasquier à Paris (…) La décision de faire
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
56
déménager le MNE parait d’autant plus incohérente qu’en éloignant géographiquement la CRE
et le MNE, elle aboutit à la perte de synergies et de possibilités de mutualisation entre ces deux
autorités qui œuvrent dans le même secteur économique ».
Dans sa réponse à la Cour, le président de la CRE ne semble pas tenir compte de la
décision ministérielle de 2019 qui prévoyait le déménagement à terme de la CRE dans un site
domanial et conditionnait la signature d’un nouveau bail rue Pasquier à la possibilité d’en sortir
de façon anticipée. L’optimisation de la sous-location de ses locaux semble être la motivation
principale des initiatives récentes de la CRE qui n’évoquent aucune perspective de
déménagement. La CRE a ainsi fourni à la Cour un
« tableau d’équilibre financier de la
location de la rue Pasquier »
qui tend à estimer les gains annuels pour l’Etat jusqu’au terme de
2028. Ce tableau omet un nombre substantiel d’informations, à commencer par celles relatives
aux charges supportées au cours de l’année 2022, consécutives aux travaux d’aménagement
engagés ainsi qu’aux pertes locatives occasionnées par le départ du MNE et l’absence de sous-
locataire dans les locaux vacants ou en travaux.
Les conditions d’exécution du schéma immobilier qui a conduit au déménagement des
services du MNE sont donc critiquables. Elles n’ont pas respecté les termes de la décision du
ministre des comptes publics de 2019. Elles ont privé le MNE de possibilités de mutualisation
et d’optimisation de ses moyens avec la CRE. Alors que les principes initiaux de la double
opération immobilière ont été rappelés à la Cour par le secrétariat général du MTE, les
initiatives récentes de la CRE pourraient retarder, voire compromettre, son déménagement.
Quant aux gains présumés pour l’Etat, ils resteront à démontrer à la lumière du bilan financier
des travaux accomplis par la CRE et des contrats de sous-location effectivement conclus dans
les locaux laissés vacants par le MNE.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
L’analyse de la gestion montre la nécessité de clarifier au plus vite l’environnement
juridique en matière budgétaire et comptable. Si les autorités compétentes de l’État entendent
appliquer au MNE le régime des autres autorités publiques indépendantes, elles sont invitées
à abroger les dispositions réglementaires du code de l’énergie
qui appliquent au MNE le
décret
n° 2012-1246
du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (dit
décret GBCP)
Les règles relatives aux rémunérations sont encore trop imprécises. Le MNE est appelé
à mettre en place un cadre de gestion destiné à préciser les conditions de détermination et
d’évolution des salaires. L’encadrement juridique de certaines primes doit être renforcé, de
même que leur lien avec la performance individuelle des bénéficiaires.
Les achats requièrent une attention particulière. La Cour a relevé plusieurs
insuffisances dans l’application des procédures, déterminées par le code de la commande
publique ou établies par l’autorité de sa propre initiative.
A noter que le déménagement récent du MNE dans les locaux du MTE permet des
économies substantielles. Pour autant, les conditions d’exécution par le ministère de la
transition écologique du schéma immobilier qui a conduit au déménagement des services du
MNE et à accepter de différer celui de la CRE, se révèlent peu cohérentes.
De manière plus générale, la Cour s’interroge sur la capacité structurelle du MNE à
gérer de manière fiable et efficace ses moyens humains et financiers, en raison de sa petite
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
57
taille. Dans ces conditions, la Cour invite le MNE et le ministère de la transition énergétique à
explorer, dans le respect de son indépendance, les pistes d’une mutualisation des fonctions
support, sous la forme d’une convention de gestion, avec d’autres autorités publiques
indépendantes ou avec les services du ministère.
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
58
ANNEXES
Annexe n° 1. Suivi des recommandations du précédent rapport de la Cour
.........................
59
Annexe n° 2. Données comparatives avec quelques médiateurs sectoriels
...........................
60
Annexe n° 3. Synthèse des comptes
......................................................................................
61
Annexe n° 4. Taux d’exécution budgétaire
...........................................................................
62
Annexe n° 5. Données RH
....................................................................................................
63
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
59
Annexe n° 1.
Suivi des recommandations du précédent rapport de la Cour
Le précédent contrôle de la Cour a porté sur les comptes et la gestion du MNE pour les
exercices 2009 à 2012. Il a donné lieu à un relevé d’observations définitives en janvier 2014 et
à neuf recommandations dont environ la moitié a été mise en œuvre.
Recommandations
Mise en œuvre
Mettre en place des conventions avec les médiateurs d’EDF et GDF
Suez afin d’améliorer l’efficience du processus.
Mise en œuvre
Réduire le niveau des ressources (CSPE) allouées au médiateur
national de l'énergie afin d’utiliser la trésorerie disponible et mettre
fin à l’augmentation régulière du fonds de roulement.
Mise en œuvre en
2014.
La
reconstitution
progressive
du
fonds de roulement
requiert une mesure
similaire
Respecter les dispositions du plan comptable général.
Comme
indiqué
dans le rapport, les
règles
comptables
applicable au MNE
doivent
être
clarifiées.
Regrouper les deux services « Concertation et médiation » et
« Études et recommandations ».
Mise en œuvre
Réduire le nombre des niveaux de révisions des recommandations
en introduisant des traitements par niveaux de difficulté et en
adaptant les compétences du personnel à ces derniers.
Mise en œuvre
Ne pas utiliser le terme « recommandation » pour les avis à
caractère générique.
Non mise en œuvre
Procéder à une révision comptable complète annuelle avant
l’établissement des comptes financiers.
Non mise en œuvre
Mettre en place une grille de rémunérations stable et claire en
fonction des responsabilités attachées au poste, au niveau de
formation et à l’expérience professionnelle acquise.
Non mise en œuvre
Clarifier le processus d’attributions des augmentations individuelles.
Non mise en œuvre
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
60
Annexe n° 2.
Données comparatives avec quelques médiateurs sectoriels
Tableau n° 15 :
Comparaisons avec d’autres médiateurs (année 2020)
MNE
Assurances
AMF
La Poste
EDF
ENGIE
Fédération
bancaire
Saisines reçues
13 083
17 355
1 479
16 550
5 557
4 569
6 851
Saisines recevables
8 595
5 033
966
4 128
1 457
413
2 683
Taux de recevabilité
66 %
29 %
65 %
25 %
26 %
9 %
39 %
Recommandations émises
7 681
3 608
505
3 921
1 285
491
1 896
Délai de traitement
83 jours
9,6 mois
5,5 mois
74 jours
64 jours
63 jours
104 jours
Budget (M€)
3,5
5,2
0,8
0,18
(2)
1,72
1,63
ND
Effectifs
41
(1)
49
7
18
10
6
(3)
20
Coût unitaire reco (€)
456
1 441
1 584
140
1 338
3 320
-
(1)
on peut évaluer les ressources consacrées à la médiation à 34 ETP
(2)
hors masse salariale
(3)
auxquels s’ajoutent des stagiaires et alternants
Source : Rapports d’activité des médiateurs et DGCCRF
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
61
Annexe n° 3.
Synthèse des comptes
Tableau n° 16 :
Comptes 2013-2020
En M€
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Produits
6 213
3 758
5 508
5 581
5 012
5 062
4 850
4 878
Subventions d'exploitation
6 075
3 755
5 505
5 572
5 000
4 796
4 850
4 850
Produits de gestion courante,
redevances
0
0
0
9
0
0
0
0
Reprises provisions
0
0
0
0
12
266
0
28
Produits financiers
6
3
0
0
0
0
0
Produits exceptionnels
132
0
3
0
0
0
0
0
Charges d'exploitation
5 986
5 410
5 202
5 360
4 620
4 910
5 025
4 745
Achat de marchandises
79
234
187
128
110
99
110
86
Consommations de l'exercice
en provenance de tiers
2 304
2 082
1 932
1 727
1 686
1 744
1 639
1 493
Impôts et taxes
255
280
295
256
274
265
461
424
Charges de personnel
2 796
2 585
2 547
2 421
2 414
2 509
2 459
2 456
Autres charges d'exploitation
17
30
18
47
52
51
30
36
Dotation aux amortissements
et provisions
292
219
211
781
83
242
326
250
Charges financières
0
0
0
0
0
0
0
0
Charges exceptionnelles
242
-19
12
0
0
0
0
0
Résultat
227
-1 652
305
222
392
152
-175
132
Résultat d'exploitation
331
-1 675
315
222
392
152
-175
132
Résultat financier
6
3
0
0
0
0
0
0
Résultat exceptionnel
-110
19
-10
0
0
0
0
0
Source : documents comptables
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
62
Annexe n° 4.
Taux d’exécution budgétaire
Tableau n° 17 :
Taux d’exécution budgétaire
€
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Budget
prévisionnel
6 497 000
5 855 000
5 811 000
5 759 000
5 634 000
5 546 000
5 320 000
5 334 085
Budget réalisé
6 231 622
5 703 779
5 381 336
5 647 550
4 886 950
5 084 081
5 269 687
4 974 045
Taux d'exécution
96%
97%
93%
98%
87%
92%
99%
93%
Source : MNE et Jaunes sur les autorités administratives et publiques indépendantes annexés au PLF ; tableau
Cour des comptes
LE MÉDIATEUR NATIONAL DE L’ÉNERGIE
63
Annexe n° 5.
Données RH
Tableau n° 18 :
Part des agents du médiateur de l’énergie et CDD et en CDI
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
CDD
48%
34%
34%
35%
39%
45%
46%
51%
CDI
48%
63%
66%
65%
58%
55%
54%
49%
Source : bilans sociaux ; tableau Cour des comptes
Note : en 2013, les effectifs intégraient également deux agents fonctionnaires en détachement ; en 2014,
ce chiffre est descendu à un.
Tableau n° 19 :
Répartition des agents par catégorie
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
A+ et A
73%
76%
76%
76%
78%
81%
78%
78%
B
10%
10%
11%
10%
9%
6%
8%
8%
C
18%
14%
13%
14%
13%
13%
14%
14%
Source : bilans sociaux ; tableau Cour des comptes
Tableau n° 20 :
Taux de féminisation
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Part des femmes/effectif total
73%
70%
73%
76%
80%
81%
80%
82%
Part des femmes/effectif cat A et A+
68%
68%
71%
74%
77%
79%
79%
82%
Source : bilans sociaux ; tableau Cour des comptes