1/9
–
jugement n° 2022-0022
RAPPORT N
°
2022-0115
C
OMMUNE DE
B
ELLEGARDE
-
SUR
-V
ALSERINE
DEVENUE
V
ALSERHONE A COMPTER DU
1
ER
JANVIER
2019
JUGEMENT N
°
2022-0022
T
RESORERIE D
’O
YONNAX
AUDIENCE PUBLIQUE DU
20
JUILLET
2022
CODE N
°
001002000
DELIBERE DU
20
JUILLET
2022
EXERCICES
2015,
2016
ET
2018
PRONONCÉ LE
:
21
JUILLET
2022
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES AUVERGNE-RHÔNE-ALPES
STATUANT EN SECTION
Vu
le réquisitoire n° 24-GP/2021 du 27 juillet 2021, par lequel le procureur financier a saisi la
chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. X..., comptable de la commune de Bellegarde-sur-Valserine, au tit
re d’opérations
intéressant les exercices 2015, 2016 et 2018 ; ensemble les pièces attestant de la notification
du réquisitoire le 14 octobre 2021 au comptable concerné ;
Vu
les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de Bellegarde-sur-Valserine,
par M. X..., pour la période du 1
er
janvier 2015 au 31 décembre 2016 et du
1
er
janvier au 31 décembre 2018 ;
Vu
l’article 60 de la loi de finances pour 1963 n° 63
-156 du 23 février 1963 ;
Vu
le code des juridictions financières ;
Vu
le code général des collectivités territoriales ;
Vu
les lois et règlements relatifs à la comptabilité des communes ;
Vu
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu
le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du
VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’article 90
de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
2/9
–
jugement n° 2022-0022
Vu
les observations écrites présentées par M. X..., comptable mis en cause, enregistrées au
greffe de la juridiction le 20 octobre 2021 et le 1
er
juin 2022 dans le cadre de l’instruction ;
Vu
les observations écrites présentées par M. Y..., ordonnateur, enregistrées au greffe de la
juridiction le 25 mai 2022 ;
Vu
le rapport n° 2022-0115 de Mme Marina GUIRONNET, première conseillère, magistrate
chargée de l’instruction
;
Vu
les conclusions du procureur financier ;
Vu
l’ensemble des pièces du dossier ;
Entendus
lors de l’audience publique du 20 juillet 2022, Mme Marina GUIRONNET, première
conseillère, en son rapport, M. Denis LARRIBAU, procureur financier, en ses conclusions, les
parties à l’instance n’étant ni présentes ni représentées à l’audience publ
ique ;
Entendu
en délibéré Mme Hélène DESCOUT, première conseillère, réviseur, en ses
observations ;
Après
en avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;
Sur la première présomption de charge, soulevée à
l’encontre de
M. X... au titre des
exercices 2015 et 2016 :
Sur les réquisitions du ministère public,
Attendu
que par le réquisitoire n° 24-GP/2021 du 27 juillet 2021, le procureur financier près
la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le
fondement
de l’article L. 242
-4 du code des juridictions financières,
à fin d’ouverture d’une
instance à l’enco
ntre de
M. X... au titre de sa gestion comptable de la commune de Bellegarde-
sur-Valserine sur les exercices 2015 et 2016 ;
Attendu
qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que l
e comptable mis en cause
aurait pris en charge au cours des exercices 2015 et 2016 des mandats collectifs de paye
entrainant le
paiement d’
indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) pour un
montant total de 20 564,29
€
, sans disposer
d’une
délibération ouvrant droit au versement de
ces indemnités au personnel contractuel et fixant la liste des emplois dont les missions
impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires
, comme mentionné au premier
alinéa de la rubrique 210224 «IHTS» de la liste des pièces justificatives des dépenses
publiques locales annexée à l’article D. 1617
-19 du code général des collectivités territoriales
(CGCT) ;
qu’il
souligne
, en effet, que la délibération du conseil municipal de
Bellegarde-sur-Valserine en date du 3 février 2003 relative à la mise en
œuvre
des heures
supplémentaires ne fixe pas une telle liste et ne prévoit pas
le versement d’IHTS aux
agents
contractuels;
qu’il en conclut que
le comptable est susceptible
d’
avoir engagé sa responsabilité
personnelle et pécuniaire
; qu’
il se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les dispositions
de l’article 60 de la loi du 2
3 février 1963 et qu
’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir l’instance
prévue à
l’article L.
242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer la
responsabilité encourue ;
3/9
–
jugement n° 2022-0022
Sur les observations du comptable mis en cause,
Attendu
que dans ses observations, M. X... a indiqué que le versement des indemnités
horaires pour travaux supplémentaires au personnel contractuel était selon lui prévu dans la
délibération du 3 février 2003 et qu’il disposait donc bien d’une délibération fondant
juridiquement la dépense ; que les dépenses, objet du réquisitoire,
avaient fait l’objet d’un
contrôle en vertu du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense en 2015 et
n’avai
ent, pour
2016,
pas à faire l’objet d’un tel
contrôle car le contrôle des primes et indemnités excluait selon
lui les indemnités horaires pour travaux supplémentaires ; q
u’i
l estime enfin
qu’aucun
préjudice
financier ne peut être retenu à son encontre, la dépense reposant, en présence d’une
délibération, sur les fondements juridiques prévus par la nomenclature, l’ordonnateur ayant
exprimé, par l’émission des mandats, son souhait d’engager cette dépe
nse et la signature des
bordereaux attestant du service fait ;
Sur la responsabilité du comptable,
Attendu
qu’aux
termes du I de l'article 60 modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de
finances pour 1963,
«
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables (…) du paiement des dépenses, (…) de la conservation des pièces justificatives
des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité »
ainsi
que «
des
contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière (…) de dépenses (…).
» ; que l
eur
« responsabilité personnelle et pécuniaire prévue (ci-
dessus) se trouve engagée dès lors (…)
qu’une dépense a été irrégulièrement payée
» ;
Attendu
qu’aux termes
du III de l'article 60 de la même loi :
« la responsabilité pécuniaire
des comptables publics s'étend à toutes les opérations du poste comptable qu'ils dirigent
depuis la date de leur installation jusqu'à la date de cessation des fonctions » ;
Attendu
que selon l
’article 20 du décret n° 2012
-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion
budgétaire et comptable publique, applicable
à compter de l’
exercice 2013,
« le contrôle des
comptables publics sur la validité de la dette porte sur : (…) 5°/ la production des p
ièces
justificatives
» ;
Attendu
que pour apprécier la validité des créances, les comptables doivent notamment
exercer leur contrôle sur la production des justifications
; qu’à
ce titre, il leur revient d'apprécier
si les pièces fournies présentent un caractère suffisant pour justifier la dépense engagée, en
vérifiant, en premier lieu, si l'ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable leur ont été fournies et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d'une part,
complètes et précises, d'autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense définie
dans la nomenclature applicable et de la nature et de l'objet de la dépense telle qu'elle a été
ordonnancée ; que, si ce contrôle peut conduire les comptables à porter une appréciation
juridique sur les actes administratifs à l'origine de la créance et s'il leur appartient alors d'en
donner une interprétation conforme à la réglementation en vigueur, ils n'ont pas le pouvoir de
se faire juges de leur légalité
; qu’e
nfin, lorsque les pièces justificatives fournies sont
insuffisantes pour établir la validité de la créance, il appartient aux comptables de suspendre
le paiement jusqu'à ce que l'ordonnateur leur ait produit les justifications nécessaires ;
Attendu
que M. X... a pris en charge, pour un montant total de 20
564,29 € en 2015 et 2016,
des mandats collectifs de paye liquidant des indemnités horaires pour travaux
supplémentaires ;
Attendu
que l’articl
e D 1617-19 du CGCT prévoit, dans la rubrique 210224 de son annexe,
que les pièces justificatives à joindre aux paiements des indemnités horaires pour travaux
supplémentaires sont une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent
la réalisation effective d’heures supplémentaire
s, un décompte indiquant par agent et par taux
4/9
–
jugement n° 2022-0022
d’indemnisation le nombre d’heures effectuées
et, le cas échéant, une décision justifiant le
dépassement du contingent mensuel autorisé ;
Attendu
que la seule délibération en possession du comptable au moment des paiements est
la délibération du 3 février 2003 qui réserve explicitement le versement indemnités horaires
pour travaux supplémentaire « à
tous les fonctionnaires de catégorie C (sans borne indiciaire)
et aux fonctionnaires de caté
gorie B dont la rémunération est au plus égale à l’indice brut 380
»
et ne mentionne pas le paiement aux agents contractuels ; que par ailleurs, cette délibération
ne fixe aucune liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d’heu
res
supplémentaires ;
Attendu
qu’il y a donc lieu de caractériser l’existence d’un manquement
du comptable à ses
obligations de contrôle des pièces justificatives, celui-ci ayant payé, sur les exercices 2015 et
2016, des indemnités horaires pour travaux supplémentaires à des agents contractuels à
l’appui d’une délibération
réservant explicitement les paiements aux fonctionnaires et ne fixant
pas la liste des emplois éligibles à ces paiements ; que la responsabilité personnelle et
pécuniaire de M. X... se trouve ainsi engagée à hauteur de 12
723,11 € au titre de l’exercice
2015 et de 7
841,18 €
au titre de
l’
exercice 2016 ;
Sur le préjudice financier causé à la commune de Bellegarde-sur-Valserine,
Attendu
que le préjudice financier se traduit dans la comptabilité de la collectivité, soit par un
appauvrissement patrimonial non recherché par celle-ci, soit par une contrepartie non
conforme à son souhait
; qu’il est de jurisprudence constante que les actes requis pa
r la
nomenclature des pièces justificatives sont nécessaires pour considérer que les droits au
paiement étaient ouverts par l’autorité compétente au moment du paiement
;
Attendu
que selon la jurisprudence administrative, trois éléments cumulatifs doivent exister
pour considérer qu’un manquement n’a pas causé de préjudice
: le service doit être fait ; la
volonté de l’autorité compétente d’exposer la dépense doit être établie
; la dépense doit
reposer sur un fondement juridique ;
Attendu
que les états liquidatifs et la signature des bordereaux de mandats par l’ordonnateur
de la commune de Bellegarde-sur-Valserine attestent que ce dernier a voulu exposer la
dépense, et qu’il a certif
ié les services faits ;
Attendu
qu
’en revanche,
la délibération du 3 février 2003 ne peut pas constituer le fondement
juridique de la dépense en ce qu’elle
arrête
le principe du versement d’indemnités horaires
pour travaux supplémentaires aux agents de
catégorie C et B (jusqu’à l’indice brut 380)
fonctionnaires de la commune ; que, dès lors que le versement était réservé aux fonctionnaires
de la commune, les agents non titulaires, contractuels, ne pouvaient pas en bénéficier et que,
de ce seul fait, la délibération ne pouvait pas constituer le fondement juridique de la dépense
qu
’’il appartenait au comptable de vérifier au regard de la nomenclature des pièces
justificatives ;
Attendu
que les dépenses ainsi payées sont indues, du fait du manquement du comptable à
son obligation de contrôle des pièces justificatives, et que leur paiement, du seul fait de leur
caractère indu, a entraîné un préjudice financier pour la collectivité ;
Attendu
qu’il
y a lieu, en conséquence,
de retenir l’existence d’un
préjudice financier et de
prononcer deux débets à l’encontre de M.
X... mettant à sa charge une somme de 12 723,11
€ au titre de l’exercice 2015 et de 7
841,18 € au titre de l’exercice
2016, du même montant
que les dépenses irrégulièrement payées
; qu’en application des dispositions du
IX de l’article 60 de la loi précitée, le
sdits débets porteront intérêts de droit à compter de la
notification du réquisitoire le 14 octobre 2021 ;
5/9
–
jugement n° 2022-0022
Sur le respect du plan de contrôle hiérarchisé de la dépense,
Attendu
que les mandats visés au réquisitoire ont été pris en charge et payés chaque mois
de janvier à décembre sur les exercices 2015 et 2016 ;
Attendu
que le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense relatif à la paye pour l’exercice
2015 a été validé le 12 février 2015 par la direction départementale des finances publiques ;
qu’i
l prévoyait le contrôle a priori des indemnités horaires pour travaux supplémentaires au
mois d’avril 2015
et que le comptable a contrôlé un échantillon comportant des agents
contractuels ;
Attendu
que le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense relatif à la paye pour
l’exercice
2016 a été validé le 31 mai 2016 par la direction départementale des finances publiques ;
qu’i
l
prévoyait le contrôle a posteriori des « primes et indemnités » au mois de novembre 2016 ;
que le comptable a contrôlé un échantillon comportant des agents contractuels et que les
indemnités horaires pour travaux supplémentaires
n’ont pas fait partie
des primes et
indemnités effectivement contrôlées par le comptable au mois de novembre alors même que
les IHTS
doivent être considérées, contrairement à ce qu’affirme le comptable
, comme faisant
partie des primes et indemnités à contrôler dans ce cadre ;
Attendu
qu’a
u surplus, à supposer que ces indemnités horaires pour travaux supplémentaires
n’auraient pas relevé, comme le soutient le comptable,
de la catégorie « primes et
indemnités »
qui faisait l’objet d’un contrôle sélectif au mois de novembre 2016
, elles auraient
alors
dû faire l’objet d’un contrôle exhaustif ce qui en l’espèce, n’a pas
non plus été le cas ;
Attendu
qu’il doit en être conclu
que les manquements constatés sont bien intervenus dans
un champ couvert par le plan de contrôle en 2015
sans que le comptable ne relève d’anomalie
et que
sur l’exercice 2016,
l
e plan de contrôle sélectif de la dépense n’a pas été respecté
; que
cela fait donc obstacle à la remise gracieuse totale des débets au titre de ces deux exercices.
Sur la seconde présomption de charge soulevée à l’encontre de M.
X... au titre de
l’exercice 2018
:
Sur les réquisitions du ministère public,
Attendu
que par le réquisitoire n° 24-GP/2021 du 27 juillet 2021, le procureur financier près
la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a saisi la juridiction sur le
fondement de l’article L. 242
-4 du code des juridictions financières,
à fin d’ouverture d’une
instance à l’encontre de de M.
X... titre de sa gestion comptable de la commune de Bellegarde-
sur-Valserine
pour l’exercice 2018
;
Attendu
qu’en son réquisitoire, le procureur financier relève que le comptable mis en cause
aurait pris en charge
au cours de l’exercice 2018
des mandats collectifs de paye entrainant le
paiement d’indemnités
horaires pour travaux supplémentaires pour un montant total de
68 421,96 €
,
sans disposer d’une délibération fixant la liste des emplois dont les missions
impliquent
la réalisation effective d’heures supplémentaires
, comme mentionnée au premier
alinéa de la rubrique 210224 «IHTS» de la liste des pièces justificatives des dépenses
publiques locales annexée à l’article D. 1617
-19 du code général des collectivités territoriales ;
qu’il souligne
, en effet, que la délibération du conseil municipal de Bellegarde-sur-Valserine
en date du 19 juin 2017 relative aux «
indemnités horaires et travaux supplémentaires
» ne
fixe pas une telle liste
; qu’il en conclut que le comptable est susceptible d’avoir engagé sa
responsabilité personnelle et pécuniaire
; qu’il se trouverait ainsi dans le cas déterminé par les
dispositions de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’ouvrir
6/9
–
jugement n° 2022-0022
l’instance prévue à l’article L.
242-4 du code des juridictions financières aux fins de déterminer
la responsabilité encourue ;
Sur les observations du comptable mis en cause,
Attendu
que dans ses observations, M. X... a indiqué que la délibération du
19 juin 2017 dont il disposait à l’appui des paiements, prévoit le versement des indemnités
horaires pour travaux supplémentaires dans un tableau présentant une liste de cadres
d
’emplois ou grades qui reprend la codification des emplois utilisée dans le tableau des
emplois annexé au budget
et qu’il n’incombait pas au comptable d’en vérifier la conformité
;
qu’
il
estime avoir disposé d’une délibération fondant juridiquement la
dépense ;
qu’il
en conclut
n’avoir
pas commis de manquement et que, en tout état de cause, aucun préjudice n’a été
causé à la commune ;
Sur la responsabilité du comptable,
Attendu
qu’aux
termes du I de l'article 60 modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de
finances pour 1963, «
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables (…) du paiement des dépenses, (…) de la conservation des pièces justificatives
des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité »
ainsi
que «
des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière (…) de dépenses (…).
» ; que l
eur
« responsabilité personnelle et pécuniaire prévue (ci-
dessus) se trouve engagée dès lors (…)
qu’une dépense a été irrégulièrement payée
» ;
Attendu
qu’aux termes
du III de l'article 60 de la même loi :
« la responsabilité pécuniaire des
comptables publics s'étend à toutes les opérations du poste comptable qu'ils dirigent depuis
la date de leur installation jusqu'à la date de cessation des fonctions » ;
Attendu
que selon l’article 20 du décret n° 2012
-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion
budgétaire et comptable publique, applicable à compter de l’exercice 2013,
« le contrôle des
comptables publics sur la validité de la dette porte sur :
(…) 5°/ la production des pièces
justificatives
» ;
Attendu
que pour apprécier la validité des créances, les comptables doivent notamment
exercer leur contrôle sur la production des justifications
; qu’à ce titre, il leur revient d'apprécier
si les pièces fournies présentent un caractère suffisant pour justifier la dépense engagée, en
vérifiant, en premier lieu, si l'ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable leur ont été fournies et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d'une part,
complètes et précises, d'autre part, cohérentes au regard de la catégorie de la dépense définie
dans la nomenclature applicable et de la nature et de l'objet de la dépense telle qu'elle a été
ordonnancée ; que, si ce contrôle peut conduire les comptables à porter une appréciation
juridique sur les actes administratifs à l'origine de la créance et s'il leur appartient alors d'en
donner une interprétation conforme à la réglementation en vigueur, ils n'ont pas le pouvoir de
se faire juges de leur légalité
; qu’enfin, lorsque les pièces justificatives fournies sont
insuffisantes pour établir la validité de la créance, il appartient aux comptables de suspendre
le paiement jusqu'à ce que l'ordonnateur leur ait produit les justifications nécessaires ;
Attendu
que M. X... a pris en charge, pour un montant total de 68 421,96
€ en 201
8, des
mandats collectifs de paye liquidant des indemnités horaires pour travaux supplémentaires ;
Attendu
que l’article D 1617
-19 du CGCT prévoit, dans la rubrique 210224 de son annexe,
que les pièces justificatives à joindre aux paiements des indemnités horaires pour travaux
supplémentaires sont une délibération fixant la liste des emplois dont les missions impliquent
la réalisation effective d’heures supplémentaires,
un décompte indiquant par agent et par taux
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–
jugement n° 2022-0022
d’indemnisation le nombre d’heures effectuées et, le cas échéant, une décision justifiant le
dépassement du contingent mensuel autorisé ;
Attendu
que la seule délibération en possession du comptable au moment des paiements est
la délibération du 19 juin 2017 relative aux «
indemnités horaires et travaux supplémentaires
»
et instaurant l’ouverture du droit à versement d’indemnités horaires pour travaux
supplémentaires au bénéfice des agents, fonctionnaires titulaires et agents contractuels de
droit public, appartenant aux filières et
cadres d’emplois éligibles à ces
indemnités ; que de
jurisprudence constante, la mention des seuls cadre d’emplois n’est pas considérée comme
la liste des emplois, dont les miss
ions impliquent la réalisation effective d’heures
supplémentaires exigée par la nomenclature des pièces justificatives ;
Attendu
qu’en procédant au paiement d’IHTS en l’absence d’une délibération comportant les
précisions exigées par la nomenclature des pièces justificatives, le comptable a manqué à ses
obligations de contrôle de validité de la dépense et que la responsabilité personnelle et
pécuniaire de M. X... se trouve ainsi engagée à hauteur de 68
421,96 €
sur l’exercice 2018
;
Sur le préjudice financier causé à la commune de Bellegarde-sur-Valserine,
Attendu
que le préjudice financier se traduit dans la comptabilité de la collectivité, soit par un
appauvrissement patrimonial non recherché par celle-ci, soit par une contrepartie non
conforme à son souhait
; qu’il est de jurisprudence constante que les actes requis par
la
nomenclature des pièces justificatives sont nécessaires pour considérer que les droits au
paiement étaient ouverts par l’autorité compétente au moment du paiement
;
Attendu
que selon la jurisprudence administrative, trois éléments cumulatifs doivent exister
pour considérer qu’un manquement n’a pas causé de préjudice
: le service doit être fait ; la
volonté de l’autorité compétente d’exposer la dépense doit être établie
; la dépense doit
reposer sur un fondement juridique ;
Attendu
que les états liquida
tifs et la signature des bordereaux de mandats par l’ordonnateur
de la commune de Bellegarde-sur-Valserine attestent que ce dernier a voulu exposer la
dépense, et qu’il a certifié les services faits
;
Attendu
que la délibération du 19 juin 2017 ouvre le droit à
l’attribution d’IHTS aux agents des
cadres d’emplois éligibles
;
qu’elle
vise le décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002, lequel prévoit
que : «
Les indemnités horaires pour travaux supplémentaires peuvent être versées, dès lors
qu'ils exercent des fonctions ou appartiennent à des corps, grades ou emplois dont les
missions impliquent la réalisation effective d'heures supplémentaires, aux fonctionnaires de
catégorie C et aux fonctionnaires de catégorie B
»;
Attendu
que, adoptée antérieurement aux paiements, cette délibération, peut être considérée
comme « arrêtant le principe » de l’attribution de l’IHTS aux agents éligibles à cette indemnité
en application des dispositions nationales réglementaires relatives aux IHTS et en particulier
de l’article 2 du décret n° 2002
-60 du 14 janvier 2002 et, de ce fait, fonde juridiquement la
dépense ;
Attendu
par conséquent que le manquement du comptable à son obligation de détenir la
délibération fixant la liste des emplois élig
ibles aux IHTS n’a pas causé de préjudice financier
à la commune ;
Attendu
qu
’aux termes du VI de
l
’article 60 de la loi du 23 février 1963, modifié par la loi
n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, dispose que,
« lorsque le manquement du comptable
aux obligations mentionnées au I n'a pas causé de préjudice financier à l'organisme public
concerné, le juge des comptes peut l'obliger à s'acquitter d'une somme arrêtée, pour chaque
8/9
–
jugement n° 2022-0022
exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce » ;
qu’en
vertu du décret
n° 2012-1386 du 10 décembre 2012, cette somme est fixée dans la limite de 1,5 millième du
montant du cautionnement du poste comptable considéré ;
Attendu
que le montant du cautionnement du poste comptable
s’élève à
155 000
€
pour
l’exercice
2018
; qu’au regard des circonstances de l’espèce, il sera fait une juste appréciation
du montant de la somme non rémissible laissé à la charge de M. X... en le fixant à
232,50 €
au titre de sa gestion de l’
exercice 2018 ;
qu’une somme non rémissible n’est pas
productive
d’intérêts
;
Sur la situation du comptable,
Attendu
que par arrêté préfectoral du 22 octobre 2018, le p
réfet de l’Ain a validé la création
de la commune nouvelle dénommé Valserhône à compter du 1
er
janvier 2019 en lieu et place
des communes de Bellegarde-sur-Valserine, Châtillon-en-Michaille et Lancrans ;
Attendu
que les manquements reprochés à M. X... au cours des exercices 2015, 2016 et 2018
ont été commis au détriment de la commune de Bellegarde-sur-Valserine ; que depuis le 1
er
janvier 2019, l’actif et le passif de l’ancienne commune ont été repris par la commune nouvelle
de Valserhône ;
Attendu
qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M.
X... ne pourra être déchargé de
sa gestion de la commune de Bellegarde-sur-
Valserine, aux droits de laquelle s’est
substituée
depuis le 1
er
janvier 2019 la commune de Valserhône, au titre des exercices 2015, 2016 et
2018
qu’après constatation de l’apurement
, en principal et en intérêts, des débets et de la
somme non rémissible prononcés à son encontre ;
PAR CES MOTIFS,
DECIDE
Article 1
:
M.
X...
est
constitué
débiteur
envers
la
commune
de
Valserhô
ne, au titre de sa gestion de l’exercice 2015, sur le fondement de la
première présomption de charge élevée à son
encontre, à hauteur d’une
somme de 12
723,11 € augmentée des intérêts de droit à compter de la date
du 14 octobre 2021 ;
Article 2
:
M.
X...
est
constitué
débiteur
envers
la
commune
de
Valserhône,
au titre de sa gestion de l’exercice 2016, sur l
e fondement de la
première présomption de charge élevée à son encontre, à hauteur d’une
somme de 7
841,18 € augmentée des intérêts de droit à compter de la date du
14 octobre 2021 ;
Article 3
:
M. X... ne pourra être déchargé de sa gestion de la commune de Valserhône,
du 1
er
janvier 2015 au 31 décembre 2016 qu’après avoir justifié de l’apurement,
en principal et en intérêts, des débets prononcés à son encontre ;
9/9
–
jugement n° 2022-0022
Article 4
:
Il est mis à la charge de M. X...
une somme non rémissible d’un m
ontant de
232,50 €
au titre de l’exercice 2018
, sur le fondement de la seconde
présomption de charge élevée à son encontre ;
Article 5
:
M. X... ne pourra être déchargé de sa gestion de la commune de Valserhône,
du 1
er
janvier au 31 décembre 2018 qu’après avoir justifié de l’apurement de la
somme non rémissible prononcée à son encontre.
Fait et jugé par M. Jean-Pierre ROUSSELLE, président de section, président de séance ;
M. Jean-Baptiste MOUTON, premier conseiller, et Mme Hélène DESCOUT, première
conseillère, réviseur.
En présence de Mme Brigitte DESVIGNES, greffière de séance.
La greffière de séance
Le président de séance
Brigitte DESVIGNES
Jean-Pierre ROUSSELLE
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs
de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
1
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les
jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être
frappés d’appel
devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce
selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est
prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étr
anger.
La révision d’un jugement
peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à
l’article R. 242
-29 du même code.
1
Sauf si uniquement non-lieu à charge