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RAPPORT PUBLIC THEMATIQUE
« LES AIDES DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES AU DEVELOPPEMENT
ÉCONOMIQUE »
SOMMAIRE
I
Pages
Introduction générale…………………………..………..
1
Chapitre I – Des dispositifs éclatés, complexes et peu
coordonnés………………….…….……….
5
I -
Un poids financier non négligeable …………..…
6
II -
Des dispositifs éclatés, facteurs de complexité
….
8
A -
Un grand nombre d’acteurs …………………………...
9
B -
Un nombre important d’aides …………………………
16
C -
Une complexité excessive des dispositifs….………….
23
III -
Des pratiques peu respectueuses des règles
nationales et européennes……
.............................
25
A -
Les manquements aux règles nationales ………..….
26
B -
Les risques liés à la complexité
des règles
européennes ………………..…………………………….
28
IV -
Une coordination insuffisante des dispositifs
d’aide……………………………………….…
.....
32
A -
Les difficultés de coordination des dispositifs
locaux………………………………………………..…
....
33
B -
La mission de coordination de la région dans le
cadre de la loi du 13 août 2004 : un rôle central,
mais sans réels moyens………………………………….
39
Chapitre II – Des aides à la portée limitée ……….……
43
I -
Une faible portée économique……………….…..
43
A - Les entreprises aidées…………………………………
....
44
B -
Une faible corrélation entre les aides versées et le
développement économique des territoires…………..
45
II -
Un accompagnement plus qu’une incitation à
investir…………………………………………...
47
A -
Une panoplie de primes aux effets peu perceptibles
....
47
B -
Un soutien aux fonds propres limité………………….
49
C -
Des délais de versement inappropriés…………………
51
III
Des risques d’effets d’aubaine et de guichet ……...
52
II
COUR DES COMPTES
Pages
Chapitre III – Une évaluation et un suivi insuffisants des
aides………………………………………….…
55
I -
L’hétérogénéité et l’inadaptation des processus
d’évaluation mis en place………………………….
56
A -
Une trop grande diversité des procédures
d’évaluation
.........................
……………………………
56
B -
Des dispositifs inadaptés, trop partiels et de faible
portée………………………………………..………… …
58
II -
Des évaluations au contenu insuffisant…………
59
A -
Des évaluations d’impact inexistantes ……………….
59
B -
Des comptes rendus annuels déficients……………….
60
C -
L’évaluation ex post n’est pas systématisée……… …
61
III -
Une faible prise en compte des résultats des
évaluations par les décideurs publics…………...
61
A - Des interprétations divergentes……………………..…
61
B -
Une place limitée dans les schémas régionaux de
développement économique.………………………..….
62
C - Des résultats peu utilisés……………………………
....
62
IV -
Un suivi insuffisant des aides
...............................
63
A -
Un système de contrôle insuffisant…………………..
63
B -
Des mesures de recouvrement des aides indues
déficientes ……………………………………..……..….
64
C -
Des coûts de gestion élevés…………………………..
66
Conclusion générale……………………………….………..
69
Annexe 1 –Les actions de développement économique
dans la région Rhône-Alpes ……………….….….
73
Réponse du président du conseil régional de Rhône-Alpes….
96
Annexe 2 - Liste des rapports d’observations définitives
exploités dans le cadre de l’enquête……….….….
99
Annexe 3 - Echantillonnage des organismes contrôlés…………
106
Liste des sigles et acronymes…………………………….…………
107
DÉLIBÉRÉ
III
Délibéré
La Cour des comptes publie un rapport thématique intitulé «
Les
aides des collectivités territoriales au développement économique »
.
Conformément aux dispositions législatives et réglementaires du
code des juridictions financières, la Cour des comptes, délibérant en
chambre du conseil, a adopté le présent rapport public.
Ce texte a été arrêté au vu du projet qui avait été communiqué au
préalable, en totalité ou par extraits, aux administrations et organismes
concernés, et après avoir tenu compte, quand il y avait lieu, des réponses
fournies par ceux-ci. En application des dispositions précitées, ces
réponses sont publiées ; elles engagent la seule responsabilité de leurs
auteurs.
Étaient présents : M. Séguin, premier président, MM. Pichon, Picq,
Babusiaux, Mmes Cornette, Ruellan, MM. Hernandez, Descheemaeker,
présidents de chambre, Mme Bazy
Malaurie, président de chambre,
rapporteur général, MM.
Collinet, Cieutat, Carrez, Cretin, Fragonard,
présidents de chambre maintenus en activité, MM. Chartier, Houri,
Richard, Devaux, Bayle, Gillette, Ganser, Martin (Xavier-Henri), Bertrand,
Monier, Thérond, Mme Froment-Meurice, M. Cazanave, Mme Bellon,
MM. Moreau,
Ritz,
Frèches,
Pannier,
Lebuy,
Lesouhaitier,
Lefas,
Durrleman,
Andréani,
Braunstein,
Brochier,
Delin,
Mmes Saliou
(Françoise),
Dayries,
MM.
Lévy,
Deconfin,
Bertucci,
Tournier,
Mme Seyvet, MM. Bonin, Vachia, Mme Moati, MM. Mollard, Cossin,
Diricq, Lefebvre, Mme Aubin-Saulière, MM. Sabbe, Pétel, Maistre,
Valdiguié, Lair, Mme Trupin, MM. Corbin, Ravier, Viveret, de Gaulle,
Korb, Mme Carrère-Gée, M. Uguen, Mme Briguet, MM. Zérah, Prat,
Guédon, Mme Gadriot-Renard, conseillers maîtres, MM. Pascal, Gleizes,
Schaefer, Bille, Zeller, Limodin, André, Cadet, conseillers maîtres en
service extraordinaire.
Etait présent et a participé aux débats : M. Bénard, Procureur
général, assisté de M. Colin, chargé de mission.
Etaient présents en qualité de rapporteur et n’ont donc pas pris part
aux délibérations : M. Mottes, conseiller référendaire, président de la
chambre régionale des comptes de Lorraine, et M. Azerad, président de
section de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France.
Madame Mayenobe, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Les contrôles dont ce rapport constitue la synthèse ont été
effectués par :
L’équipe de synthèse était constituée de MM. Gérard Terrien, dans un
premier temps, Jean Mottes, par la suite, conseillers référendaires et
présidents de chambre régionale des comptes, Charles Azerad, président de
section et Philippe Blanquefort, premier conseiller.
Ont participé aux travaux : Christophe Rosenau, conseiller référendaire,
président de chambre régionale des comptes, Alain Lanxade, président de
section, Dominique Gillier, Jackie Rougeau, Bernard Tartayre, Philippe
Blanquefort, Raymond Le Potier, Danièle Masson, Dominique Saint Cyr,
William Richard, Philippe Saffrey, et Joël Leroux, conseillers et premiers
conseillers de chambre régionale des comptes ;
Ce projet a ensuite été arrêté par le Comité du rapport public et des
programmes
dans
sa
séance
du
4
septembre
2007
présidé
par
M. Philippe Séguin, Premier président, avant d’être communiqué aux
administrations et organismes concernés.
Introduction générale
En supprimant, par la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et
libertés des communes des départements et des régions, la tutelle
administrative et financière qui pesait sur les collectivités territoriales, le
législateur a entendu leur conférer la maîtrise de leur avenir. Devenues
ainsi des collectivités majeures de plein exercice, celles-ci se sont vu
reconnaître le droit non seulement de remplir librement leurs missions
traditionnelles mais aussi de mettre en oeuvre des compétences
supplémentaires qui leur ont été transférées par les lois des 7 janvier et
22 juillet 1983 relatives à la répartition de compétences entre les
communes, les départements, les régions et l’Etat.
La nouvelle répartition des compétences reposait sur deux
principes fondamentaux, qui, dès l’origine, ont constitué le socle sur
lequel allait reposer par la suite tout le mouvement de décentralisation. Le
premier, intangible, affirmait qu’aucune collectivité territoriale ne peut
«
établir ou exercer une tutelle, sous quelque forme que ce soit, sur une
autre d’entre elles
». Le second, plus ambigu, voulait que «
dans la
mesure du possible […] chaque domaine de compétences ainsi que les
ressources correspondantes soient affectés en totalité soit à l’Etat, soit
aux communes, soit aux départements, soit aux régions
». Ambigu, car de
toutes les compétences ainsi dévolues aux collectivités territoriales celle
concernant l’aide au développement économique
1
a été précisément la
seule à échapper à l’application de ce principe. Considérée en effet par le
législateur, plus que toute autre, comme une compétence inhérente à la
légitimité de chaque collectivité de maîtriser le développement de son
territoire, l’aide en faveur des entreprises a été dès l’origine conçue
comme une compétence partagée entre l’Etat et chacune des autres
collectivités territoriales. La force de cette exception a été telle qu’elle ne
fut jamais par la suite remise en cause.
1) Entendue comme destinée à favoriser la création et l’extension d’activité à
caractère économique.
2
COUR DES COMPTES
Sous réserve de la responsabilité reconnue à l’Etat
2
de conduire la
politique économique et sociale ainsi que la défense de l’emploi, la loi
approuvant le plan intérimaire 1982-1983, véritable charte constitutive de
la répartition des compétences en matière d’aide au développement
économique, a en effet clairement établi que «
les collectivités
territoriales et leurs groupements ainsi que les régions peuvent, lorsque
leur intervention a pour objet la création ou l’extension d’activités
économiques,
accorder des
aides directes
ou indirectes
à
des
entreprises
». Si un rôle particulier a été de la sorte reconnu à la région,
collectivité dont la vocation essentielle résidait dans l’animation de
l’économie
régionale,
les
communes,
les
départements
et
leurs
groupements ont également été investis du droit d’intervenir en faveur
des entreprises dans des conditions leur ouvrant un large spectre d’outils
très divers. Ce régime juridique distinguait en effet les « aides directes »
et les « aides indirectes ». Faute d’avoir été dégagé sur le plan national ou
européen, le critère de distinction entre ces deux catégories d’aide l’a été
par la juridiction administrative : l’aide directe se traduit par la mise à
disposition de moyens financiers à l’entreprise bénéficiaire, avec une
conséquence comptable (immédiate ou potentielle) dans ses comptes ;
quant aux aides indirectes, elles recouvrent toutes les autres formes d’aide
consistant soit à mettre à la disposition des entreprises des biens
immeubles, soit à améliorer leur environnement économique et à faciliter
l’implantation ou la création d’activités.
Les premières étaient constituées de trois catégories d’aide,
définies par la loi : primes régionales à l'emploi (PRE), primes régionales
à la création d'entreprise (PRCE) et prêts, avances et bonifications.
L'octroi de l’une d’entre elles par les communes et les départements était
subordonné à une décision de la région l’instituant. Les aides indirectes,
quant à elles, pouvaient être attribuées par toutes les autres collectivités et
la forme qui pouvait leur être donnée était libre, à l'exception toutefois
des aides à l'immobilier d'entreprise, des garanties d'emprunt et des prises
de participation.
Au fil des années, toutes les collectivités territoriales, mais aussi
leurs groupements et les nombreux partenaires locaux qu’elles ont
sollicités, ont ainsi pu expérimenter et utiliser toutes les facettes de
l’intervention économique que ce soit en matière d’accueil, d’aide à la
création ou au développement des entreprises, ou que ce soit plus
traditionnellement en matière de sauvegarde des entreprises en difficulté.
C’est donc un dispositif à la fois complexe et très hétérogène,
essentiellement axé sur l’aide individuelle aux entreprises, qui a été mis
2) Article 5 de la loi n 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des
communes, des départements et des régions
INTRODUCTION GÉNÉRALE
3
en place dans un contexte économique particulier, marqué au début de la
décennie des années 1980 par la restructuration de pans entiers de
l’industrie, une montée du chômage et un net ralentissement de la
croissance. Si sa vocation première était de répondre au souci des
collectivités territoriales d’aménager le territoire et de rééquilibrer les
économies régionales, il avait également pour objectif d’éviter localement
une dégradation accélérée du niveau de l’emploi. Afin d’y parvenir, les
collectivités territoriales ont souvent rivalisé pour offrir le plus large
éventail de réponses supposées adéquates.
Les dispositifs initialement mis en place ont été marqués au fil des
ans par une diversification importante des aides, débouchant souvent sur
une certaine confusion institutionnelle. Ainsi, à partir des années 1990, la
gouvernance de l’ensemble de ce système a fait l’objet de critiques de
fond. En 1996
3
, la Cour des comptes a interpellé les pouvoirs publics en
recommandant une clarification du cadre juridique applicable et préconisé
un choix précis du niveau d'intervention entre la région, le département,
le cadre intercommunal ou la commune. Elle préconisait également qu’un
meilleur suivi des aides accordées soit effectué afin de rechercher une
plus grande efficacité des interventions en faveur des entreprises.
D’autres rapports officiels ont également souligné l’opacité du dispositif
et la méconnaissance des aides distribuées aux différents niveaux,
national, régional et local en l’absence d’un recensement exhaustif par les
pouvoirs publics.
Or, si depuis le début des années 2000 le législateur a modifié le
cadre juridique de 1982, les évolutions qu’il a introduites ont été
relativement limitées, consistant, notamment au regard de l’évolution de
la réglementation européenne, en de simples adaptations techniques de la
pratique des collectivités territoriales.
Irriguant depuis l’origine toute la problématique territoriale, faisant
intervenir l’ensemble des acteurs locaux animés d’un objectif commun, le
système
d’aide
des
collectivités
territoriales
au
développement
économique a été porteur de l’idée même de décentralisation, en
s’appuyant principalement sur la région qui a forgé son identité et sa
vocation autour de cette compétence.
3) Les interventions des collectivités territoriales en faveur des entreprises- Rapport
public particulier – novembre 1996.
4
COUR DES COMPTES
Après vingt-cinq ans de décentralisation, et à un moment où le
contexte économique national et international connaît des inflexions
majeures, il a paru indispensable d’effectuer un bilan des dispositifs
d’aide que les collectivités territoriales ont mis en oeuvre. Un tel bilan
doit permettre de répondre à ce qui paraît être la question centrale que
suscitent aujourd’hui ces dispositifs, à savoir leur efficacité.
Dans cette perspective, les travaux engagés par les juridictions
financières depuis 2003 et l’enquête, conduite en 2005 et 2006 par
plusieurs chambres régionales des comptes
4
, alors que les régions
mettaient en oeuvre les nouvelles dispositions issues de la loi du
13 août 2004, ont ainsi visé :
à apprécier la cohérence, la régularité ainsi que la coordination
des dispositifs d’aide au développement économique des
acteurs locaux ;
à mesurer la portée économique de ces aides ;
et, enfin, à mesurer la qualité des mécanismes d’évaluation et
de suivi.
L’enquête n’a pas porté sur les aides accordées sous forme
d’exonérations
fiscales,
en
particulier
celles
concernant
la
taxe
professionnelle et qui pèsent de fait sur le budget de l’Etat
***
La chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes a, à la même
époque, conduit une soixantaine de contrôles sur des collectivités, des
établissements et divers
intervenants impliqués dans le développement
économique afin de tenter d’apprécier la cohérence globale de leur action.
Le conseil régional ayant demandé, comme la loi lui en ouvrait la
possibilité à titre expérimental, à élaborer le schéma régional de
développement économique, il offrait à cet égard un terrain d’observation
privilégié. Une annexe est consacrée aux résultats de ces travaux.
4) L’annexe 2 du présent rapport présente la liste des rapports d’observations
définitives des chambres régionales des comptes qui ont été exploités dans le cadre de
cette enquête (Ne figurent pas dans cette annexe les rapports de la chambre régionale
des comptes de Rhône-alpes exploités dans le cadre de l’annexe 1 « Les actions de
développement économique dans la région Rhône-Alpes »).
Chapitre I
Des dispositifs éclatés, complexes et peu
coordonnés
Pour définir la notion d’aides accordées par les États
5
, la
commission européenne s’appuie notamment sur les dispositions de
l’article 87, paragraphe 1, du Traité instituant la Communauté
européenne, selon lesquelles « sont incompatibles avec le marché
commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États
membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources
d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de
fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines
productions ».
Par contre, en droit national, on ne trouve pas encore de définition
précise de l’aide à caractère économique susceptible d’être accordée tant
par l’Etat que par les collectivités territoriales. Pour ces dernières, les
dispositions légales et règlementaires qui les concernent ne font que
recenser les formes ou catégories d’aide qu’elles peuvent allouer et
prévoir les procédures et contraintes auxquelles elles sont soumises. «
Toutefois, on admet généralement que la notion d’aide publique
répond à trois critères : l’origine (l’aide émane d’une personne publique
ou d’une personne privée mandatée ou liée à une personne publique) ; le
bénéficiaire (l’aide publique est notamment distincte des mesures à
caractère général) ;
la relation entre la personne qui accorde l’aide et
celle qui la reçoit (avec la combinaison de trois éléments essentiels :
l’impact comptable de l’aide, le caractère désintéressé de celle-ci et le
caractère direct ou indirect des effets attendus).
5) Au sens du droit européen, cette notion regroupe les aides versées par l’ensemble
des collectivités publiques d’un Etat.
6
COUR DES COMPTES
C’est sur ces bases doctrinales qu’ont été bâti les différents
dispositifs d’aides aux entreprises mis en oeuvre par les collectivités
territoriales. Il n’en demeure pas moins que les aides aux entreprises
représentent un champ vaste aux contours peu cernés et surtout mal mesuré.
I
-
Un poids financier non négligeable
Les différentes sources disponibles ne permettent pas encore de
recenser avec précision et de manière exhaustive les volumes financiers que
les
collectivités
territoriales
et
leurs
groupements
consacrent
aux
interventions en faveur de l’action économique, ainsi que leur poids relatif
dans les budgets locaux. En effet, outre le fait que ce type de recensement
s’effectue toujours avec un certain temps de retard, la continuité des séries
historiques a été affectée ces dernières années par les changements des
nomenclatures budgétaires et comptables, lesquelles ne font toujours pas
apparaître de manière distincte les dépenses affectées spécifiquement à
l’aide au développement économique
6
.
Dans son rapport public particulier sur les interventions économiques
de novembre 1996, la Cour des comptes avait déjà souligné les
insuffisances du système de collecte des données, notamment financières.
Quoi qu’il en soit, l’étude effectuée en 2005 par le ministère de
l’économie, des finances et de l’industrie, intitulée « les dépenses des
collectivités locales pour l’action économique
7
(2002-2004) »
8
, montre que
les dépenses affectées par ces collectivités à l’action économique ont atteint
6 milliards d’euros en 2004, soit en moyenne 4 % de leurs dépenses totales
et plus du quart de la seule taxe professionnelle. Ainsi, comparées aux
seules dépenses, les aides des collectivités territoriales aux entreprises
occupent une place qui peut paraître modeste, mais elles représentent un
reversement au profit des entreprises d’une part non négligeable du produit
de la fiscalité directe locale et notamment de celui de la taxe professionnelle
qui pèse sur les seules entreprises.
6) Les données recensées par les chambres régionales des comptes au cours de leurs
travaux portent sur les exercices budgétaires compris entre 2002 et 2005 : elles ont
été, dans la mesure du possible, régulièrement actualisées, ou, à défaut, présentées
sous
forme d’une moyenne des 4 années observées.
7) Par action économique, l’étude entend non seulement les aides accordées aux
entreprises, mais également toutes les dépenses qui concourent au développement
économique et de l’emploi.
8) Tous les chiffres indiqués ci-dessous, hormis indications contraires, sont tirés de
cette étude.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
7
Dépenses des collectivités territoriales en 2004
Type de
collectivité
Dépenses
totales
(M€)
Dépenses
pour l'action
économique
(M€)
Part de l'action
économique
dans le total des
dépenses
Montant des dépenses
pour l'action
économique
(en € par habitant)
Communes
60 936
1 032
1,70 %
24,9
Groupement à
fiscalité propre
17 532
958
5,50 %
19,8
Départements
51 815
1 690
3,30%
28,1
Régions
19 524
2 379
12,20 %
39,5
Total
149 812
6 059
4,00 %
112,3
Sources : Minéfi
Les régions consacraient ainsi en 2004 12,2 % de leurs dépenses à
l’action économique. Cette proportion relativement élevée s’explique par
le rôle de chef de file et de coordination qui leur a été confié par les lois
de décentralisation de 1982 et 1983 et confirmé par la loi de 2002 relative
à la démocratie de proximité et celle de 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales. La part des dépenses que les autres catégories de
collectivités territoriales affectent à l’action économique est plus modeste,
puisqu’elle varie de 1,7 % à 5,5 % de leurs dépenses totales.
Pour la seule année 2004, les dépenses pour l’action économique
des groupements à fiscalité propre atteignaient 958 millions d’euros, soit
19,84 € par habitant ; elles réservent une place prépondérante aux
dépenses d’équipement (aménagement de zone, aménagements fonciers
et hydrauliques, infrastructures de production d’énergie, équipements
touristiques). Ce montant est lié à la croissance du nombre des
communautés d’agglomération et de communes dont les compétences
comprennent à titre obligatoire le développement économique.
Rapportées au nombre d’habitants, l’ensemble des interventions des
collectivités territoriales représentait 112 € par habitant, dont 39 € pour les
seules régions. Les écarts à la moyenne sont toutefois significatifs : l’action
économique des collectivités de la région Ile-de-France, la moins
importante sur la période en termes financiers, ne représentait que 66,52 €
par habitant, alors que celle de la région Réunion atteignait 330,33 € par
habitant.
8
COUR DES COMPTES
Les subventions qui sont destinées aux entreprises privées sont la
principale forme d’intervention des collectivités territoriales avec, en 2004,
près de deux milliards d’euros, soit près du tiers du total des dépenses
qu’elles ont consacré à l’action économique et près de 34 euros par habitant.
Cette forme d’intervention est surtout le fait des départements et des régions,
dont la part dans ce total s’établit à 35,5 % pour les premiers et 44,7 % pour
les secondes. Les communes et leurs groupements interviennent le plus
souvent sous forme de dépenses d’équipement, comme les aménagements de
zones d’activités.
S’agissant de la répartition par secteur, malgré un important montant
de dépenses dites non ventilées résultant des évolutions récentes des
nomenclatures budgétaires et comptables locales, on constate que les
collectivités territoriales ont entendu privilégier en 2004, dans leurs actions
économiques, le tourisme (14,5 %), avant l’industrie, le commerce et
l’artisanat (11,3 %), l’agriculture (10,2 %) et le maintien des services
publics (moins de 1 %). Si l’on s’intéresse aux seules subventions accordées
aux entreprises privées, ce classement n’est modifié que sur un point : le
tourisme confirme sa place prépondérante avec une part de l’ordre de 20,5
% ; en revanche, l’agriculture, avec 13,8 %, devance l’industrie, le
commerce et l’artisanat, avec 11,2 %, et le maintien des services publics,
avec seulement 0,5 %.
Une autre étude du ministère de l’économie, des finances et de
l’industrie, intitulée « les interventions économiques des collectivités locales
en 2002 » montre que les aides directes représentaient 76,5 % du total des
aides versées et étaient constituées pour 86 % par des subventions et pour 12
% par des prêts et avances consentis à des conditions plus favorables que les
taux du marché
9
. Cette étude précise également que les aides indirectes
s’étaient diversifiées et qu’elles se
répartissaient en aides à l’immobilier
pour 26 % des montants versés, en aménagement de zones pour 21 % et en
prises de participation dans le capital de sociétés pour 12 %.
II
-
Des dispositifs éclatés, facteurs de complexité
Les régimes d’organisation et de mise en oeuvre des aides des
collectivités territoriales au développement économique sont rarement
coordonnés et souffrent souvent d’une incohérence d’ensemble. Deux
raisons principales expliquent cette situation : la trop grande dispersion des
acteurs concernés et le trop grand nombre d’aides. Elles ont également pour
effet de rendre très complexes les dispositifs mis en oeuvre.
9) Les autres formes d’aides directes, comme le lease-back, les bonifications
d’intérêts, et les avances résultant de la mise en jeu des garanties d’emprunt, étaient
marginales.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
9
A - Un grand nombre d’acteurs
La lecture des guides ou autres documents, s’adressant aux créateurs
d’entreprises ou à des chefs d’entreprises à la recherche d’aides de toute
nature, permet de mesurer la diversité et le rôle des acteurs chargés de leur
apporter une réponse. Certains ont vocation à accorder des aides financières
directes ou indirectes, d’autres sont parfois des relais des précédents et/ou
chargés d’une mission d’accompagnement dans le cadre notamment
d’actions collectives.
Ce foisonnement, utile quand il s’agit de répondre à des demandes
spécifiques ou de résoudre un cas particulier, est souvent perçu comme ne
facilitant pas la compréhension des dispositifs d’aides existants. Après la loi
du 13 août 2004, la « régionalisation » des régimes d’aide, et donc leur
distinction d’une zone géographique à une autre, coeur de la réforme, risque
d’accroître cette complexité et la concurrence entre territoires.
1 -
Une forte présence des services et organismes d’Etat
Sur le plan local, parmi les acteurs de l’action économique, l’Etat
joue un rôle déterminant par l’intermédiaire, tout d’abord, de ses services
déconcentrés tels que les préfectures de région ou de département, les
directions régionales ou départementales de l’emploi, du travail et de la
formation professionnelle, les directions régionales de l'industrie, de la
recherche, et de l'environnement, et enfin les directions régionales du
commerce et de l’artisanat. Il intervient également par le biais des
représentations locales d’agences ou d’établissements publics nationaux,
comme l’Agence française de l’innovation (OSEO-Innovation, ex-
ANVAR) ou l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie
(ADEME), chargés notamment de mettre en oeuvre différents régimes
d’aide définis au niveau national.
A ce dispositif, s’ajoutent les agences de développement liées
directement à la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la
compétitivité des territoires (DIACT), qui a succédé à la DATAR, comme
l’ADIMAC, l’ADIELOR, Normandie Développement ou Nord-France-
Expert qui agissent en réseau sur l’ensemble du territoire national et qui ont
pour fonction principale l’ingénierie et la valorisation de l’offre territoriale.
Très souvent, ces services ou organismes interviennent en partenariat avec
les collectivités territoriales et les organisations de développement
économique qu’elles ont créées. L’Etat, par l’intermédiaire également de la
DIACT, assure aussi, en relation avec les collectivités territoriales, la mise
en oeuvre de la politique régionale européenne par le biais de la dotation de
10
COUR DES COMPTES
fonds structurels européens
10
dont la France est bénéficiaire. Cette dotation
s’est élevée pour la période 2000-2006 à plus de 16 milliards d’euros.
L’Etat dispose d’un autre levier d’intervention, constitué par la prime
d’aménagement du territoire (PAT)
11
. Cette prime
12
permet depuis 1982
d’allouer une subvention d’équipement aux entreprises qui réalisent des
programmes créateurs d’emploi dans des secteurs d’activité prédéterminés
et dans certaines zones du territoire national définies comme prioritaires. A
l’initiative de la DIACT, l’analyse des 1 336 primes distribuées, entre 1996
et 2004 pour un montant de 18,5 milliards d’euros visant à la création de
122 000 emplois, a toutefois révélé une orientation préférentielle au profit
des grands projets qui concentrent plus de 39 % des fonds et une
concentration sur des régions privilégiées comme la Lorraine, le Nord-Pas-
de-Calais et la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur qui en concentrent 48
%. L’étude a par ailleurs montré que la PAT remplit bien son rôle de
déclencheur de l’aide publique et que ses impacts demeurent significatifs
sur l’emploi. Mais son incidence n’est pas à la hauteur de l’ensemble des
objectifs fixés tant en matière de soutien à la recherche et au développement
qu’en matière de localisation et d’effet d’aménagement des territoires.
L’Etat, acteur majeur de l’intervention économique, contribue, du
fait même de l’action non seulement de ses services déconcentrés mais
aussi de ses agences et établissements publics nationaux comme de la
multiplication de ses propres régimes d’aide, à accentuer le foisonnement
institutionnel et à rendre encore moins lisible les dispositifs locaux d’aide
au développement économique. La loi du 13 août 2004 a certes prévu que
l’adoption du schéma régional de développement économique (SRDE)
emporte, à titre expérimental, la compétence pour la région d’attribuer, au
nom de l’Etat par délégation, les aides que ce dernier attribuait aux
entreprises. Mais cette compétence est limitée à certaines catégories d’aides
individuelles. L’Etat conserve la compétence de mettre en oeuvre des
actions collectives. Dans ces conditions, ces nouvelles dispositions ne
permettront pas de réduire le nombre des acteurs du développement
économique local.
10) Jusqu’en 2006, trois objectifs prioritaires ont caractérisé les fonds structurels :
objectif 1, soutien aux régions en retard de développement (pour la France, les
DOM) ;
objectif 2, soutien à la reconversion économique et sociale des zones
connaissant des difficultés structurelles ;
objectif 3, adaptation et modernisation des
politiques d'éducation, de formation et d'emploi.
11) Les conditions d’attribution de la PAT ont été redéfinies par le décret n° 2007-809
du 11 mai 2007, en application de la carte des aides à finalité régionale approuvée par
la Commission européenne.
12) En 2005, il a été accordé quelque 32,9 M€ de PAT pour 803 M€
d’investissements, correspondant à 6 758 emplois aidés, soit 4 900 € par emploi.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
11
2 -
Un rôle actif des collectivités territoriales
La loi de 1982 approuvant le plan intérimaire 1982-1983
13
avait
défini les conditions dans lesquelles les communes, les départements et les
régions pouvaient, lorsque leur intervention a pour objet la création ou
l’extension d’activités économiques, accorder des aides directes ou
indirectes aux entreprises. Cette compétence, reconnue à leur demande aux
collectivités territoriales afin de pouvoir agir sur la dégradation de leur
propre tissu économique, a été confortée par le législateur, notamment par
la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité et de la loi de 2004
relative aux libertés et responsabilités locales.
A l’occasion de leurs contrôles, les chambres régionales des
comptes relèvent que toutes les collectivités territoriales ont ainsi combiné
l’ensemble des moyens législatifs mis à leur disposition, pour favoriser le
développement économique local et donc l’emploi. Même si elles n’en
avaient pas les moyens juridiques et humains, elles ont souhaité contribuer
à la création, au maintien, à la reprise d’entreprises, ainsi qu’au
financement de leur croissance et de leurs investissements. Mais les
travaux menés ont aussi montré qu’en la matière, chaque catégorie de
collectivités territoriales semblait s’être plus ou moins spécialisée,
apportant ainsi dans le foisonnement général des dispositifs d’aide existant
une certaine dose de rationalité.
Les actions en faveur de l’accompagnement du développement des
entreprises ont souvent été le fait des régions
et, pour nombre d’entre elles,
ont été prévues dans le cadre notamment des derniers contrats de plan pour
la période 2000-2006.
La plupart des départements se sont, quant à eux, engagés dans des
dispositifs d’accompagnement des entreprises, soit seuls, soit avec la
région et les communes et ont également complété les aides directes de la
région. Ils sont cependant intervenus, principalement, pour apporter des
aides à l’immobilier d’entreprise, des concours financiers aux entreprises
en milieu rural ainsi que dans des procédures de développement local.
Les communes et les communautés de communes, pour leur part
,
sont plus particulièrement intervenues sur l’offre de terrains aménagés et
de bâtiments d’accueil des entreprises. Tout en consolidant leurs stratégies
dans le domaine foncier et en matière d’immobilier d’entreprise, les
communautés d’agglomération
ont souhaité investir également d’autres
secteurs clés du développement économique local comme l’animation de
13) Ces dispositions ont été codifiées en 1996 dans le code général des collectivités
territoriales, sous les articles L. 1511-1 à L. 1511-5.
12
COUR DES COMPTES
réseaux, la création d’entreprises, l’emploi et la formation, ou encore le
tourisme ou la prospection d’entreprises. Toutefois, la plupart des
chambres régionales des comptes ont montré de façon régulière que la
répartition des compétences dans le domaine économique entre les
communes,
d’une
part,
et
les
communautés
de
communes
et
d’agglomération, d’autre part, pour nouvelle qu’elle fût encore, ne
correspondait pas toujours à ce que prévoyaient les statuts de ces dernières.
Ainsi, la gestion d’un parc technologique a pu reposer sur un
enchevêtrement
de
compétences
exercées
simultanément
par
une
communauté de communes, une agence de développement et un syndicat
intercommunal. De même, plusieurs communautés d’agglomération ont vu,
au cours des premières années de leur existence, leur compétence
économique entravée par le maintien du syndicat antérieurement
compétent en la matière. Des élus communautaires ont souvent agi dans le
but évident de ne pas mettre en oeuvre la compétence communautaire en
matière de développement économique ou bien d’en réduire la portée.
Néanmoins,
quand
ces
établissements
publics
de
coopération
intercommunale exercent leurs compétences, ils apparaissent bien souvent
comme des organismes dont l’action vient se juxtaposer à celle des
communes,
en
l’absence
d’une
réelle
définition
de
l’intérêt
communautaire, comme l’ont montré sur l’exercice d’autres compétences
les travaux de la Cour des comptes sur l’intercommunalité
14
.
Enfin, l’action économique des collectivités territoriales et,
notamment des départements et des communes peut également se
poursuivre au travers des « pays ». Ces structures, organisées en
associations, syndicats mixtes ou groupements d’intérêt public (GIP), ont
pour fonction de définir un projet commun de développement territorial.
Mais, pour le moment, leurs actions ont été relativement limitées.
Ainsi, c’est l’ensemble des collectivités territoriales qui est
intervenu au cours de ces vingt-cinq dernières années dans le champ de
l’action économique, chacune dans un ou plusieurs domaines qu’elles ont
choisis, non seulement avec des moyens définis par les lois et règlements
existants, mais aussi avec d’autres que n’encadrait nul texte, avec les
risques juridiques que cela comportait
15
.
Il s’agit bien en cela d’une
compétence partagée telle que l’a voulu le législateur.
14) L'intercommunalité en France – rapport public particulier – novembre 2005.
15) Voir pages 25 et suivantes du présent rapport (III – Des pratiques peu
respectueuses des règles nationales et européennes
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
13
3 -
Des organismes périphériques nombreux et diversifiés
Les collectivités territoriales créent ou font appel à de nombreux
organismes pour mettre en oeuvre leur action économique. Tout d’abord,
les régions, qui ne disposent pas toujours de structures administratives et
techniques en rapport avec leurs missions, confient à des organismes
périphériques la gestion et l’instruction de certaines de leurs aides
économiques,
accroissant
en
cela
la
complexité
du
dispositif
institutionnel.
Ainsi, bien que disposant de services compétents propres à
instruire des dossiers d’attribution des aides, une région confie cette
mission, dans le cadre d’un partenariat, à différents opérateurs, les plus
sollicités étant les organismes consulaires ainsi que les centres régionaux
d’innovation et de technologie et, dans une moindre proportion, les
sociétés de capital-investissement. Une autre région, pour sa part,
charge
des organismes extérieurs, dans lesquels elle détient des participations, de
la présentation ou de la constitution des dossiers pour lesquels les
organismes de développement régionaux et départementaux sont
également présents.
Les chambres consulaires, en raison de leur proximité avec les
entreprises, notamment dans le cadre des centres de formalités des
entreprises, sont aussi perçues comme des interlocuteurs naturels par les
collectivités territoriales, sans que pour autant ces dernières maîtrisent les
effets induits de ces partenariats. Souvent, les chambres consulaires ne
disposent pas de structure d’aide et de conseils juridiques leur permettant
d’apprécier les risques qu’elles prennent, comme l’ont fait remarquer
plusieurs chambres régionales des comptes. Ainsi, dans ses relations avec
une association intervenant dans le secteur de la mécanique, une chambre
de commerce et d’industrie n’a pas pris en considération que les
associations étaient soumises en cas de difficultés à des procédures
collectives, comme les entreprises.
Les réseaux associatifs de proximité (France Initiative Réseau et
ses plates-formes d'initiative locale, l'ADIE, Entreprendre en France,
Fondation France Active, le Réseau Entreprendre) complètent ce tableau,
comme les structures d’appui et de conseil, spécialistes de la création
d’entreprise, ou les Boutiques de gestion, ou bien encore les structures
d’hébergement des nouvelles entreprises telles que les pépinières et les
incubateurs, ou, enfin, les structures d'essaimage ou de reconversion de
grands groupes industriels, impliqués dans des restructurations.
14
COUR DES COMPTES
Les
comités
d’expansion
économique
et
les
agences
de
développement économique, ainsi que les comités de bassin d’emploi,
sont des associations de la loi de 1901 destinées, pour leur part, à
rassembler, sur un territoire donné, l'ensemble des acteurs qui concourent
au
développement
économique.
Disposant
règlementairement
de
compétences élargies, ils apparaissent cependant le plus souvent comme
de simples prolongements des services des collectivités territoriales. Ces
dernières ont également créé des organismes qu’elles désignent sous le
vocable d’agences de développement économique, mais dont les
fonctions sont beaucoup plus restreintes que celles qu’envisagent les
textes puisqu’elles ne portent, bien souvent, que sur la commercialisation
de zones d’aménagement et le développement d’activités d’insertion par
l’économique. Des associations de développement local ont même
contracté avec l’Etat pour la mise en oeuvre de dispositifs particuliers
d’aide. C’est notamment le cas d’un comité départemental de
développement
économique
qui
gère
le
dispositif
d’Etat
de
l’encouragement au développement d’entreprises nouvelles (EDEN).
Les contrôles ont montré que nombre de ces agences avaient été
dotées de multiples attributions, non hiérarchisées et pour la plupart
imprécises dans leur contenu. Leurs modes de gestion et de gouvernance,
peu adaptés aux évolutions, ont également été critiqués : ils les rendent
parfois inefficaces, faute souvent d’indicateurs mettant en relation
objectifs et réalisations et les font entrer en concurrence avec d’autres
structures du même type. C’est le cas d’une association de développement
économique qui est intervenue à la demande de collectivités territoriales
et d’établissements n’appartenant pas à son propre ressort territorial, et est
entrée ainsi en compétition avec d'autres agences de développement
économique.
Dans d’autres cas, les organismes locaux de développement
économique ont été créés sous forme de sociétés d’économie mixte
chargées d’actions traditionnelles de gestion de zones d’activités, voire de
pépinières d’entreprises ou de bâtiments industriels. Ces sociétés
coexistent dans un certain nombre de cas
avec les sociétés de
reconversion mises en place par de grands groupes industriels.
Poursuivant souvent un large éventail d’actions très diverses, les sociétés
d’économie mixte locales peuvent parfois s’investir dans des opérations
qu’elles maîtrisent peu. Ainsi, dans les observations d’une chambre
régionale des comptes, on relève qu’une société d’économie mixte, dans
la gestion d’une zone d’activités, a mis en oeuvre un montage d’opération
particulièrement compliqué, peu cohérent, non transparent, mais surtout
sans aucune analyse préalable des risques.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
15
Depuis la loi du 2 janvier 2002 tendant à la modernisation du statut
des sociétés d’économie mixte locales, les collectivités territoriales et leurs
groupements peuvent soutenir financièrement les structures associatives
qui accompagnent la concrétisation des projets de création d’entreprises. Il
s’agit, en l’occurrence, des plates-formes d’initiative locale (PFIL), qui
mobilisent des fonds pour financer, sous forme de prêts d’honneur, tous
types de créateurs d’entreprises, mais presque essentiellement des
entreprises de petite taille. La valeur ajoutée de telles structures par rapport
aux dispositifs déjà existants en la matière, notamment au niveau régional,
reste souvent à démontrer. Ainsi, une chambre régionale des comptes a
établi que les dépenses de personnel et l’achat de petit matériel
représentaient l’essentiel des charges de certaines associations de ce type,
leur action se réduisant à mettre en relation le porteur de projet avec une
chambre de commerce et d’industrie.
Quant aux structures de gestion des fonds de capital-investissement
financés en tout ou partie par des collectivités territoriales, elles ne doivent
intervenir, sur l’ensemble du territoire métropolitain, qu’en faveur des
petites entreprises au sens communautaire
16
du terme. Elles peuvent
également apporter des fonds propres à des entreprises moyennes aux
différents stades de leur développement Ces structures privilégient
habituellement les techniques de financement qui facilitent un retour sur
investissement.
Enfin, les sociétés de garantie des concours financiers octroyés à des
personnes privées ou à des entreprises peuvent accorder leurs garanties aux
établissements financiers et autres organismes accordant des concours
financiers aux PME prises au sens communautaire
17
du terme. Les
interventions des fonds de garantie constitués en relation avec les
collectivités territoriales et leurs groupements peuvent prendre la forme
soit de garantie de prêts à moyen ou long terme et des opérations de crédit-
bail, soit des garanties d’intervention en fonds propres.
Le nombre des intervenants directs au sein d’une même région est
ainsi en moyenne supérieur à 60, voire à 100 lorsque l’on additionne les
partenaires
de
second
rang
représentant
des
intervenants
infra
départementaux. La valeur ajoutée générale de la densité d’un tel maillage
n’est pas établie.
16) La petite entreprise est définie comme une entreprise employant moins de
50 personnes et dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 7 millions d'euros,
soit le total du bilan n'excède pas 5 millions d'euros, et qui respecte le critère de
l'indépendance.
17) Au sens du règlement n° 70/2001 du 12 janvier 2001, entreprises employant
moins de 250 personnes et dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas
40 millions d'euros, soit le total du bilan n'excède pas 27 millions d'euros, et qui
respectent le critère de l'indépendance.
16
COUR DES COMPTES
En faisant ainsi massivement appel à des structures relais,
organismes aux statuts juridiques très divers et aux missions souvent
redondantes, les collectivités territoriales, déjà elles-mêmes nombreuses à
intervenir, ont contribué à rendre plus opaques au fil du temps les
dispositifs d’aide au développement économique.
B - Un nombre important d’aides
L’Etat, en participant à l’action économique locale, accorde
directement ou en partenariat avec les collectivités territoriales des aides
aux entreprises sous différentes formes qui ont été notifiées à la
Commission européenne, comme la prime à l’aménagement du territoire
(PAT), le fonds de développement des petites et moyennes industries, le
fonds régional d’aide au conseil, ou encore les concours financiers à
l’innovation et aux nouvelles technologies. Dans les pôles de compétitivité
et les pôles d’excellence rurale, certains dispositifs mis en oeuvre
intéressent également le développement économique local.
Quant aux collectivités territoriales, les dispositifs législatifs qui se
sont succédé depuis plus de vingt ans n’ont pas contribué à réduire ou à
limiter le nombre d’aides qu’elles peuvent directement ou indirectement
accorder aux entreprises. Leur effet a plutôt d’ailleurs été contraire,
puisqu’elles en ont créé d’autres en l’absence de tout cadre légal.
A titre d’exemple, les chambres de commerce et d'industrie ont
constitué une base de données en ligne, intitulée Sémaphore, qui dénombre
plus de 5 000 aides et financements publics s’adressant aux entreprises. De
même, l’observatoire des aides aux petites et moyennes entreprises ne
recense pas moins de 2 550 dispositifs d’aides dont le financement est
assuré par l’Union Européenne, l’Etat ou les collectivités territoriales.
1 -
Une juxtaposition de dispositifs
Dénombrer les aides publiques accordées aux entreprises reste un
exercice malaisé. Sous des dénominations voisines, au sein d’une même
zone territoriale, qu’il s’agisse d’une commune, d’un département ou d’une
région, se cachent des régimes distincts. Aucun acteur ne possède de vision
exhaustive des interventions potentielles. Les seules aides destinées aux
petites et moyennes entreprises comptent environ 1 300 régimes de bases
qui peuvent varier dans l’application qui en est faite.
Si l’on se réfère aux estimations de l’Observatoire des aides aux
petites et moyennes entreprises, le nombre de régimes d’aide recensés par
région serait le suivant au 31 décembre 2005 :
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
17
Régions (*)
Nombre de régimes d'aide
Alsace
351
Aquitaine
391
Auvergne
395
Basse Normandie
341
Bourgogne
347
Bretagne
387
Centre
378
Champagne Ardenne
376
Franche Comté
380
Haute Normandie
335
Ile de France
389
Languedoc Roussillon
366
Limousin
342
Lorraine
365
Midi Pyrénées
376
Nord pas de Calais
314
Pays de la Loire
367
Picardie
340
Poitou Charente
328
Provence Alpes Côte d'Azur
365
Réunion
291
Rhône Alpes
434
* L’observatoire n’a pas rendu public de données
concernant la Corse et
les régions d’outre-mer, à l’exception de La Réunion.
Confrontés à la difficulté de dénombrer les aides ou régimes d’aide
accordés dans le ressort territorial des régions concernées, certains
schémas régionaux de développement économique (SRDE) ont érigé leur
recensement comme fondement même de la mise en oeuvre d’un schéma
cohérent. Ainsi, la région Alsace estimait, dans son schéma, à 153 les
dispositifs auxquels pouvaient accéder les entreprises, alors que les
services de l’Etat en comptabilisaient 351.
18
COUR DES COMPTES
Ces dispositifs comportent bien souvent des aides ou régimes
d’aides sinon parfaitement identiques, tout au moins très proches. La
majorité d’entre eux ont vocation à favoriser l’emploi, la création, la
transmission, la reprise des entreprises et, enfin, les études et diagnostics,
comme le montre le tableau ci-après qui s’appuie sur les 1 300 catégories
d’aides recensées par l’Observatoire des aides aux petites et moyennes
entreprises.
Type d'aides
Nombre
Actions collectives et coopération interentreprises
42
Amélioration des conditions de travail
24
Artisanat et commerce
78
Création transmission reprise
157
Emploi
143
Environnement maîtrise de l'énergie
104
Etudes conseils diagnostics
142
Exportation développement commercial
45
Formation
86
Hôtellerie restauration tourisme
19
Immobilier d'entreprises
74
Innovation recherche diffusion technologique
72
Investissements matériels
110
Prévention et gestion des difficultés
24
Renforcement des capacités financières
72
Réduction des charges fiscales
84
Réduction des charges sociales
27
De l’avis des acteurs économiques, l’ensemble est hétérogène,
peu cohérent et peu lisible.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
19
2 -
Les aides à caractère général
18
Jusqu’à la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales, les collectivités territoriales étaient autorisées à
verser, dans le but de favoriser la création ou l’extension d’activités
économiques, des aides directes et des aides indirectes, catégories qui
n’étaient cependant pas définies. La loi ne faisait qu’énumérer une suite
de moyens que les collectivités territoriales étaient autorisées à mettre en
oeuvre. La jurisprudence avait cependant tenté de cerner ces deux
notions : la première s’étendant au versement de moyens financiers ayant
une incidence directe sur le compte de résultat, la seconde recouvrant
toutes les autres aides.
a)
Jusqu’en 2004, des aides directes et des aides indirectes
Dès l’origine, l’octroi d’aides directes a été soumis à trois
contraintes qui, par la suite, ont été progressivement assouplies.
Ainsi, les aides directes étaient limitativement énumérées par la
loi. Initialement, elles pouvaient revêtir les formes de primes régionales à
la création d’entreprises (PRCE), primes régionales à l’emploi (PRE),
bonifications d’intérêts ou prêts et avances à des conditions plus
favorables que celles du taux moyen des obligations privées à
l’émission
19
. Comme l’avait affirmé à plusieurs reprises la jurisprudence
administrative, aucune aide directe ne pouvait être accordée, hormis
celles énumérées ci-dessus. La loi sur la démocratie de proximité du 27
février 2002 a supprimé les PRE et les PRCE et leur a substitué la notion,
plus large, de subvention, laissant le soin au conseil régional d’en
déterminer les modalités d’attribution et de versement. Elle a également
précisé que les prêts et avances pouvaient être consentis à taux nul ou à
des conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations
et que la gestion de ces avances pouvait être confiée à des établissements
publics locaux.
La région s’est, par ailleurs, toujours vu conférer un rôle de chef de
file. Dès la loi du 2 mars 1982, les initiatives éventuelles des
départements et des communes étaient subordonnées à l’intervention
18) Ne sont pas abordées dans ce paragraphe, parce que ne faisant pas partie du
champ de l’enquête, les aides aux entreprises en difficulté que les départements et les
régions peuvent accorder et les aides au maintien des services nécessaires à la
population que les trois niveaux de collectivités territoriales peuvent également
accorder.
19) Ces aides faisaient l’objet, quant à leur mise en oeuvre effective, de dispositions à
caractère règlementaire.
20
COUR DES COMPTES
préalable de la région. La prééminence de cette collectivité, qui n’était
pas synonyme d’une mise sous tutelle, impliquait que les communes et
les départements et leurs groupements ne pouvaient que compléter l’aide
régionale lorsque celle-ci n’atteignait pas un plafond fixé par décret. La
loi du 27 février 2002 a ajouté que ces deux dernières catégories de
collectivités territoriales pouvaient dorénavant participer au financement
des aides directes dans le cadre d’une convention passée avec la région.
Enfin, l’octroi des aides directes était soumis à l’existence d’une
décision formelle de l’exécutif local prise en exécution d’une délibération
de l’assemblée locale. C’est une compétence qui ne peut faire l’objet
d’aucune délégation.
Depuis 1982, les aides dites indirectes étaient considérées comme
libres de toute contrainte. Toutefois, les aides à l'investissement
immobilier et à la location d'immeubles accordées aux entreprises, la
prise en charge des commissions dues par les bénéficiaires de garanties
d'emprunts, les garanties d'emprunts ainsi que la participation à des
sociétés ont toujours fait l’objet d’un encadrement. En outre, toutes les
collectivités territoriales ont toujours été autorisées à attribuer l’ensemble
des aides indirectes seules ou conjointement.
b)
Le régime issu de la loi de 2004
A partir du début des années 2000, le dispositif juridique a été
réformé à plusieurs reprises afin de le simplifier et de le rendre conforme
au droit européen et la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales a modifié l’architecture générale du dispositif.
- La loi fait disparaître la distinction entre aides directes et aides
indirectes.
Pour
favoriser
la
création
ou
l’extension
d’activités
économiques, il appartient au conseil régional de définir le régime et de
décider de l'octroi des aides aux entreprises dans la région qui revêtent la
forme de prestations de services, de subventions, de bonifications
d'intérêt, de prêts et avances remboursables, à taux nul ou à des
conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations.
Les départements, les communes et leurs groupements peuvent,
quant à eux, comme depuis 2002, participer au financement de ces aides
dans le cadre d'une convention passée avec la région et, disposition
nouvelle, en cas d'accord de la région, définir un projet d'aide ou de
régime d'aides et le mettre en oeuvre. La région peut également déléguer
à des établissements publics locaux la gestion des avances qu’elle
consent.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
21
- Dans ce dispositif dénommé par certains « aides de droit
commun »,
la loi ne fixe plus de façon limitative les catégories d’aides
susceptibles d’être accordées par la région et avec son accord par les
autres catégories de collectivités territoriales. Elles peuvent définir des
aides ou des régimes d’aides, à condition qu’ils revêtent les formes
prévues à cet effet.
La loi du 13 août 2004 continue, par ailleurs, d’affirmer que toutes
les collectivités territoriales ou leurs groupements seuls ou conjointement
peuvent accorder des aides à l’immobilier, dont elle a modifié par ailleurs
les conditions d’octroi. Ces aides peuvent ainsi prendre la forme de
subventions, de rabais sur le prix de vente, de location ou de location-
vente de terrains nus ou aménagés ou de bâtiments neufs ou rénovés et
leur montant doit être calculé par référence aux conditions du marché,
suivant des règles de plafond et de zone déterminées par décret en
Conseil d’Etat
20
. Elles donnent lieu à l’établissement d’une convention et
sont versées soit directement à l’entreprise bénéficiaire, soit au maître
d’ouvrage, public ou privé, qui en fait alors bénéficier intégralement
l’entreprise.
Mais l’Etat conserve toujours la possibilité de conclure une
convention avec des collectivités territoriales autres que la région pour
compléter les aides en faveur de l’immobilier d’entreprise, comme pour
les régimes d'aide dits de droit commun. Une copie de la convention est
en ce cas portée à la connaissance du président du conseil régional par le
représentant de l'Etat dans la région.
c)
Les aides dans le domaine de l’ingénierie financière
En plus de ces aides devenues aujourd’hui de droit commun, les
collectivités territoriales ont également été autorisées, au fil du temps, à
accorder des aides dans le domaine de l’ingénierie financière. Les régions
ont été ainsi autorisées à prendre des participations dans le capital de
sociétés de développement régional et de sociétés de financement à
caractère régional ou interrégional (sociétés de capital-risque). Les
départements et les communes n’ont, quant à eux, été habilités à
participer au capital de ces sociétés que sur autorisation donnée par décret
en Conseil d’Etat. Les régions ont également été autorisées à souscrire
des parts dans un fonds commun de placement à risques à vocation
20) Depuis la loi du 13 août 2004, les aides à l’immobilier ont fait l’objet d’un premier
décret n° 2005-584 du 27 mai 2005. Depuis l’approbation par la Commission
européenne de la carte française des aides à finalités régionales et le décret
correspondant de mise en oeuvre du 7 mai 2007, elles sont régies par le décret n° 2007-
1282 du 28 août 2007.
22
COUR DES COMPTES
régionale ou interrégionale ou à participer, par le versement de dotations,
à la constitution d'un fonds d'investissement auprès d'une société de
capital-investissement ayant pour objet d'apporter des fonds propres à des
entreprises. Toutes les collectivités territoriales et leurs groupements se
sont également vu accorder le droit d’apporter directement leur garantie
aux emprunts contractés par des personnes de droit privé, sous réserve du
respect de ratios financiers particuliers. Elles ont aussi obtenu la
possibilité de participer au capital de sociétés anonymes ayant pour objet
exclusif de garantir des concours financiers à des personnes de droit privé
et de constituer auprès de ces sociétés, dont elles ne sont pas actionnaires,
des fonds de garantie, par le versement de dotations.
Ainsi, à l’exception des aides qui font l’objet d’un encadrement
législatif ou règlementaire, les collectivités territoriales sont aujourd’hui
habilitées à définir ou mettre en oeuvre autant de régimes d’aide qu’elles
peuvent souhaiter, au risque d’une altération de la lisibilité des dispositifs
mis en place.
3 -
Les aides aux jeunes entreprises
Les collectivités territoriales, seules ou bien par l’intermédiaire
d’organismes qui leur sont liés, ont mis en oeuvre des dispositifs d’aide en
faveur d’entreprises en cours de création ou nouvellement créées, afin
notamment de faciliter leurs premiers pas.
Les collectivités territoriales assurent ainsi directement ou en
faisant appel à des organismes ad hoc la gestion de pépinières
d’entreprises. Il s’agit de structures permettant l’accueil temporaire
d’entreprises nouvellement créées ou en développement. De nombreuses
collectivités territoriales se sont très largement investies dans ce type
d’aide, venant très souvent en complément des services offerts aux
entreprises dans le cadre des zones d’accueil, de type zone industrielle ou
zone de haute technologie.
Un dispositif proche du précédent est constitué par les
incubateurs
technologiques. Il permet aux établissements publics à caractère
scientifique et technologique (EPST) et aux établissements publics
d’enseignement supérieur ou à de grands groupes, de fournir des moyens
de fonctionnement, pour une durée limitée, à des entreprises ou à des
personnes physiques porteurs de projets scientifiques ou techniques. Les
collectivités territoriales sont appelées à participer aux actions ainsi
engagées. La France en compte aujourd’hui trente et un, dont pour
certains les résultats obtenus ne paraissent pas être à la hauteur des
espoirs qu’ils ont suscité. Ainsi un incubateur, créé en 1999 sous la forme
d’une association entre quatre universités, n’a permis la création que de
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
23
seize entreprises soit moins de quatre par an et il restait alors encore sept
projets en incubation, résultat décevant au regard des moyens mis en
oeuvre et des objectifs fixés initialement.
Les chambres régionales des comptes, dans leurs analyses des
différents dispositifs d’aides, ont, à de multiples reprises, fait observer
qu’il y avait un décalage certain entre les règles d’intervention des
collectivités territoriales en matière économique et leurs pratiques en ce
domaine. L’absence de définition de critères permettant de distinguer
effectivement les aides directes et les aides indirectes a certainement
rendu difficile l’interprétation de la réglementation. Mais elle n’explique
pas totalement que nombre de régimes d’aide ont été créés et que des
concours financiers ont été versés sans cadre juridique. Les évolutions qui
sont intervenues notamment depuis 2002 ont dans de nombreux cas
codifié ces pratiques. Elles n’ont cependant réduit ni le nombre
d’intervenants, ni le nombre d’aides, confortant de la sorte la complexité
des dispositifs existants.
C - Une complexité excessive des dispositifs
Bien qu’elle ait pu correspondre à une adaptation à des situations
objectives, la diversité des régimes d’aide n’a pas été sans conséquences
sur la portée des interventions des collectivités territoriales. Certaines
collectivités territoriales ont défini et multiplié des dispositifs d’aide
transversaux mais ont aussi élaboré des offres d’aides particulières.
Pourtant, cet ensemble n’a pas été jugé par les entreprises adapté au
contexte concurrentiel et de performance dans lequel elles évoluent.
‘‘L’agence des PME’’(OSEO), s’est notamment interrogée sur la
perception qu’avaient les entreprises des structures professionnelles
dédiées à la création d’entreprise
21
, sachant que la plupart sont
directement
ou
indirectement
en
relation
avec
les
collectivités
territoriales. Il est ressorti de l’étude de faibles taux de recours à ces
structures, en raison, pour partie, d’une méconnaissance ou d’une
connaissance erronée des services qu’elles proposent. Cette enquête a
montré également que seulement 27 % des chefs d’entreprise qui ont
bénéficié d’une aide ont eu recours à une structure dédiée. Toutefois,
lorsque les entreprises ont eu recours à ces structures, le niveau de
21) Les chambres consulaires, les structures d’essaimage ou de restructuration des
grands groupes, les structures d’appui au financement de la création d’entreprise
autres que les banques, les structures d’appui et de conseil spécialistes de la création
d’entreprises, les structures d’hébergement des nouvelles entreprises et les services
locaux de développement économique et social intégrés à une commune, un conseil
général, un conseil régional, un comité d’expansion.
24
COUR DES COMPTES
satisfaction est tout à fait convenable. La difficulté de pouvoir accéder à
une information pertinente est d’ailleurs devenue un élément de
justification et de légitimation de certains opérateurs en matière d’aide
aux entreprises. En effet, selon le rapport du Commissariat général du
plan de 2004 portant sur les très petites entreprises (TPE), tous les
professionnels de l’accompagnement des petites entreprises signalaient
qu’une partie de leur mission consistait désormais à aider les TPE à se
repérer dans « la jungle » des procédures et des formalités auxquelles
elles sont souvent confrontées.
A l’occasion de leurs contrôles, les chambres régionales des
comptes ont abouti à des constats identiques. Elles ont relevé que des
procédures complexes et parfois ambiguës étaient trop souvent perçues
comme des formes de « parcours du combattant » de longue durée. Elles
ont également observé des dédoublements de structures chargées pour
certaines d’accueillir les créateurs d’entreprise et pour d’autres d’instruire
leurs demandes, ou la multiplication de mesures ayant des critères
d’éligibilité variables, ou bien encore l’existence de fonds particuliers,
dotés
de
logiques
différentes
d’intervention,
ne
permettant
pas
d’appréhender les objectifs fixés à chacun d’eux
.
Un des exemples les plus significatifs est celui d’une chambre de
commerce et d’industrie qui a souhaité faciliter la création et la reprise
d’entreprises en confiant cette mission à une société, sans prendre en
compte qu’un créateur devait s’adresser alternativement à cette dernière
et au centre de formalité des entreprises qu’elle gérait elle-même, nuisant
ainsi à la qualité et à la cohérence du soutien apporté. D’autres exemples
pourraient être cités, comme celui d’une association créée par une C.C.I,
chargée de promouvoir l’exportation au niveau régional qui, pour allouer
une aide de 3 250 €, a mis en place un circuit complexe de plusieurs
intervenants y compris pour la liquidation de l’aide.
Sur un plan plus général, les analyses auxquelles ont procédé les
chambres régionales des comptes confirment l’absence de cohérence des
politiques locales de développement économique. Elles mettent souvent
en lumière que l’intérêt des mesures mises en oeuvre varie beaucoup
selon la nature des acteurs qui les portent et de leur effort pour s’adapter
aux demandes des entreprises.
Il n’est pas certain que la loi du 13 août 2004 apporte à ces
questions des solutions, car, en confirmant le rôle de chef de file de la
région, elle l’a limité aux seules aides de droit commun. Les aides à
l’immobilier
d’entreprise
continuent
de
pouvoir
être
accordées
indistinctement
par
toutes
les
collectivités
territoriales
et
leurs
groupements. Certaines régions ont d’ailleurs profité de l’élaboration du
SRDE pour revoir leurs régimes d’aide. Elles ont pour certaines institué
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
25
des commissions d’évaluation des dispositifs mis en oeuvre. D’autres ont
souhaité
conclure
des
conventions
avec
les
différents
acteurs
économiques et se sont notamment rapprochées des établissements
financiers, bancaires ou consulaires pour rationaliser les dispositifs
existants. Malgré les objectifs ambitieux retenus dans ces schémas, la
question permanente de la concurrence entre collectivités et territoires et
l’absence de coopération interrégionale n’a pas été effacée.
III
-
Des pratiques peu respectueuses des règles
nationales et européennes
Le respect des règles nationales et européennes est une exigence
qui aurait dû prévaloir dans l’élaboration des aides et régimes d’aide que
les collectivités territoriales ont mis en oeuvre. Or, bien souvent, tel n’a
pas été le cas. La diversité des aides susceptibles d’être versées,
l’empilement des régimes juridiques et, dans un certain nombre de cas,
les réponses à apporter à des situations d’urgence expliquent les
difficultés des collectivités territoriales à respecter un cadre juridique qui
s’imposait à elles. Le rapport présenté au Sénat le 28 juin 2000 au nom de
la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la
décentralisation faisait en outre remarquer que ce cadre juridique
semblait en total décalage avec la réalité, d’autant plus qu’il pouvait
donner lieu à des interprétations différentes.
Au regard du droit européen, les aides d’Etat, qui correspondent à
des aides accordées par l’Etat ou les collectivités territoriales, sont
interdites dès lors qu’elles confèrent un avantage économique à leur
bénéficiaire notamment en matière de concurrence. Bien que des aides
soient considérées comme automatiquement
22
ou potentiellement
23
compatibles avec le traité instituant la Communauté européenne, toute
aide ou tout régime d’aide doit en conséquence être notifié à la
Commission européenne et approuvé par celle-ci avant d’être exécuté.
Mais il existe des exceptions à cette obligation de notification. Ainsi, en
22) Aides à caractère social octroyées aux consommateurs ; aides destinées à remédier
aux dommages causés par les calamités naturelles ou d’autres évènements
extraordinaires.
23) Aides destinées à
favoriser le développement économique de certaines régions
dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ; aides destinées à promouvoir
la réalisation d’un projet important d’intérêt européen ou à remédier à une
perturbation grave de l’économie d’un Etat membre ; aides destinées à promouvoir la
culture et la conservation du patrimoine.
26
COUR DES COMPTES
sont exclues les aides déjà autorisées et les aides à finalité régionale
24
. Par
ailleurs, quatre règlements d’exemption approuvés par la Commission
européenne ont également pour effet d’autoriser, en l’absence de toute
notification, le versement d’aides à caractère général ou sectorielles, sous
réserve du respect d’un certain nombre de conditions tenant notamment
au montant, à la durée ou à l’intensité de l’aide.
Jusqu’en 2002, le droit national constituait, quand il était respecté,
un filtre à l’égard du droit européen, puisque les aides allouées ne
pouvaient s’écarter des modalités de mise en oeuvre définies directement
par la loi. Le défaut de respect du premier entraînait automatiquement
celui du second. Depuis la loi de 2002 sur la démocratie de proximité, la
région et, depuis la loi de 2004 sur les libertés et responsabilités locales,
avec son accord, les deux autres niveaux d’administration locale, peuvent
définir librement des régimes d’aide ; la loi ne fixe que la forme que doit
revêtir l’aide. Dans ces conditions, il appartient à chaque collectivité
instituant une aide ou un régime d’aide de s’assurer qu’il ne doit pas faire
l’objet d’une notification à la Commission européenne
25
. C’est ce que
prescrit l’article premier de la loi du 13 août 2004 sur les libertés et
responsabilités locales.
Les contrôles montrent que la réglementation européenne est
méconnue, alors que cette méconnaissance comporte des risques que
l’article premier de la loi du 13 août 2004 a clairement réaffirmés.
A - Les manquements aux règles nationales
Un des principaux manquements observés a consisté à mettre en
place des régimes d'aide directe ou de concours financiers hors du cadre
légal. Les plafonds des primes et les taux des prêts, avances et
bonifications d’intérêt n’ont pas toujours été respectés. De nombreux
départements,
communes
et
groupements
de
communes
ont,
contrairement à ce que prévoyait la réglementation, accordé des aides
directes alors que la région n’avait pas défini de dispositifs d’intervention.
C’est notamment le cas d’un département qui a versé à des entreprises
agricoles des concours financiers directs ne se rattachant pas à une
24) Il s’agit des aides visant le développement de zones particulières dont la carte
pour chaque Etat est préalablement approuvée par la Commission. Pour la France,
cette carte a été approuvée par décision C/2007/651 de la Commission en date du
7 mars 2007 pour la période 2007-2013 (voir également sur le sujet le décret du
7 mai 2007). C’est sur la base de cette carte que sont notamment définies les zones
d’attribution de la prime d’aménagement du territoire.
25) La collectivité utilise alors les canaux appropriés des services de l’Etat.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
27
catégorie prévue par la réglementation applicable jusqu’en 2004 et ne
s’inscrivant pas non plus dans un dispositif défini par la région.
Dans un certain nombre de cas, les chambres régionales des
comptes ont relevé que les aides directes accordées aux entreprises
faisaient intervenir en cascade des organismes divers, contrairement aux
règles. Une association, spécialisée dans le domaine agroalimentaire, a
versé des subventions à des projets sur les fonds publics dont elle était
bénéficiaire, privant ainsi le décideur public de ses prérogatives
d’attribution et de gestion de l’aide. Ce dispositif était par ailleurs
contraire à la convention entre l’association et la région concernée. Un
comité d’expansion économique, dépositaire de crédits départementaux
destinés au renforcement des fonds propres des entreprises, a réaffecté ces
fonds à d’autres opérations après avoir mis fin à son partenariat avec une
société
de
développement
régional,
sans
que
la
collectivité
départementale en ait été informée.
D’autres constats ont été effectués par les chambres régionales des
comptes dans le domaine des aides régionales à l’exportation. Dans un
cas, notamment, l’organisme intermédiaire versait irrégulièrement des
concours financiers de ce type sur instruction expresse de la collectivité
territoriale qui avait versé les fonds affectés à cette opération.
Au titre des aides à l'immobilier d'entreprise, les chambres
régionales des comptes ont constaté que l’interdiction de consentir des
rabais sur les locations ou rétrocessions aux entreprises situées dans des
zones non éligibles à la prime d'aménagement du territoire (PAT) n'était
pas toujours respectée et que, dans les zones éligibles, le plafonnement du
rabais était le plus souvent ignoré. A titre d’exemple, on peut citer le cas
d’une communauté de communes qui a défalqué du montant de la vente
d’un bâtiment celui des loyers que l’entreprise avait antérieurement
acquittés ; elle a de ce fait accordé un avantage supérieur à celui que la
réglementation envisageait à l’époque. La même remarque a pu être faite
à une commune qui a réalisé un hôtel trois étoiles et l’a loué à une
entreprise qui a acquitté au cours des trois premières années des loyers
sensiblement réduits par rapport à la charge effectivement supportée par
la commune.
La loi du 13 août 2004 a autorisé les collectivités territoriales à
accorder des aides à l’immobilier par le biais d’un maître d’ouvrage
public ou privé. Antérieurement, les chambres régionales des comptes ont
observé que la pratique contraire s’était développée. A titre d’exemple,
un comité de développement économique recourait à des financements
émanant de communes pour octroyer, contrairement à la réglementation,
des aides à l’immobilier à des entreprises dont la taille excédait celle
retenue en droit européen pour caractériser les PME. Ce dispositif en
28
COUR DES COMPTES
cascade a été fortement critiqué non seulement parce qu'il était contraire à
la loi, mais aussi parce qu’il ne prévoyait pas de moyens de contrôle du
montant de l’aide effectivement rétrocédée au bénéficiaire final.
Les chambres régionales des comptes ont, dans les contrôles
qu’elles ont conduits récemment, noté peu d’irrégularités concernant
l'octroi de garanties, la participation à des fonds de garantie ou à des
sociétés de capital-risque ou encore au capital d'entreprises. Toutefois,
avant que la législation n’évolue et ne régularise les dispositifs mis en
oeuvre, une région accordait en toute illégalité des aides à des
plateformes d’initiatives locales (PFIL), ainsi que des avances à taux nul,
et apportait des aides au fonctionnement à une société de capital-risque
pour lui permettre d’accroître ses interventions notamment à l’égard
d’entreprises de taille réduite.
Les évolutions législatives ont mis en adéquation le droit et la
réalité locale des interventions à caractère économique.
Toutefois, le décalage entre la réglementation nationale et
l’interprétation locale qui en a été faite a souvent été expliqué, dans les
réponses apportées aux observations des chambres régionales des
comptes, par l’abondance des questions juridiques que soulevaient la
complexité et la diversité des règles applicables. L’exercice du contrôle
de la légalité des actes des collectivités territoriales aurait pu en réduire
l’impact. Mais celui-ci s’est souvent exercé dans des conditions difficiles,
l’intervention du représentant de l’Etat pouvant être interprétée comme la
remise en cause de mesures nécessaires au maintien de l’emploi, alors
même qu’une de ses missions prioritaires a toujours consisté à favoriser le
développement du tissu économique local et le sauvetage d’entreprises.
B - Les risques liés à la complexité
des règles européennes
En l’absence, depuis la loi du 27 février 2002 sur la démocratie de
proximité, du filtre juridique que constituaient les règles nationales, les
collectivités territoriales sont donc aujourd’hui confrontées directement à
des règles européennes complexes et de plus en plus contraignantes. Elles
doivent les respecter soit en reprenant à leur compte des régimes
précédemment notifiés, soit en s'insérant dans le cadre de l'application
d'un règlement d'exemption. Dans leurs contrôles, les chambres
régionales des comptes ont mis plus particulièrement en lumière une
méconnaissance ou une mauvaise application de deux règles, celle du
« de minimis » et celle des compensations de service public.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
29
Dans son règlement n°69/2001 du 12 janvier 2001, la Commission
européenne a codifié une pratique antérieure
: en dehors des régimes
notifiés, seules les aides d'État d'un montant inférieur à 100 000 €
26
sur
une période de trois ans étaient compatibles avec le marché commun car
dénuées
d'effet
substantiel
sur
la
concurrence.
Le règlement
« de minimis »
s'applique ainsi à l’ensemble des aides octroyées aux
entreprises, à l'exception de certaines d’entre elles, concernant pour
l’essentiel les transports et l’exportation de certains produits.
Ce dispositif, apparemment simple, a été pourtant mal appréhendé
par les collectivités territoriales qui, très souvent, ont attribué à une même
entreprise des aides sous des formes diverses dont le montant total excédait
le plafond fixé par la Commission, faute de disposer d’un « compte de
cumul » pour chaque entreprise bénéficiaire d’aides différentes. Peuvent à
cet égard être cités les cas de deux communes qui assuraient, contrairement
aux règles européennes, le financement, pour l’une, d’un festival géré par
une SARL et, pour l’autre, d’un laboratoire départemental d’analyses qui
tous deux avaient pratiqué des remises sur leurs tarifs en faveur
d’entreprises clientes, assimilables de ce fait à l’octroi d’aides directes. De
même, plusieurs régions détenaient un répertoire des aides accordées par
catégorie, mais n’avaient entrepris aucune consolidation par entreprise
bénéficiaire. Même quand celle-ci existait, aucun moyen de vérification
n’avait été défini. Un département qui ne s’était pas doté en la matière de
moyens de contrôle interne, utilisait la règle « de minimis » pour
compenser les taux d’aide dont pouvaient bénéficier les entreprises
n’appartenant pas aux zones éligibles à la PAT.
Dans d’autres cas, faute d’avoir vérifié le niveau des aides accordées
par différentes collectivités territoriales, des entreprises ont pu bénéficier
sur une période de trois ans de concours excédant le plafond fixé par la
Commission. Ce type de situation, qui a été rencontré de manière assez
fréquente, illustre la difficulté d’application des règles européennes,
d’autant plus qu’il y a lieu de vérifier que chaque aide et l’ensemble des
aides reçues, quelle qu’en soit l’origine, sont conformes au droit européen.
La circulaire du Premier ministre du 26 janvier 2006, portant sur
l'application au plan local des règles communautaires, conseille aux
collectivités territoriales d'instaurer une procédure de « déclaration
préalable » auprès du financeur pour toutes les entreprises qui demandent
une aide. Cette déclaration doit permettre un meilleur contrôle des cumuls.
26) Ce montant a été porté à 200 000 € à compter du 1er janvier 2007 par le règlement
1998/2006 de la commission européenne du 15 décembre 2006.
30
COUR DES COMPTES
Le défaut de respect de la règle « de minimis » a également été
souvent observé en matière d’accueil des entreprises, domaine dans lequel
les collectivités locales, soumises à une concurrence aiguë, sont conduites
à accorder des aides très significatives. Ainsi de nombreuses communes ou
communautés d’agglomération ont été tentées, dans le cadre d’opérations
de lotissement à vocation industrielle et commerciale, de consentir aux
entreprises susceptibles de s’implanter sur leur territoire des conditions
d’acquisition ou de location de biens immobiliers très avantageuses, sans
faire de distinction entre aide à l’investissement s’inscrivant dans un
régime particulier d'aide approuvé par la Commission européenne et aide à
la location relevant du règlement d'exemption sur les aides « de
minimis ».
La seconde obligation que les collectivités territoriales ont du mal à
appréhender est celle relative à la prise en compte des compensations de
service public.
Les entreprises qui se voient en effet confier des missions relevant
de « services d’intérêt économique général » (SIEG)
– l’équivalent
communautaire des services publics au sens du droit français –
n’échappent pas complètement à l’application des règles communautaires
de concurrence, lorsqu’elles perçoivent des collectivités territoriales des
aides en compensation des charges de service public qu’elles supportent.
Dans l’arrêt Altmark
27
, la Cour de justice a défini les conditions selon
lesquelles le versement d’un prix, représentant la contrepartie de
prestations effectuées par l’entreprise bénéficiaire pour exécuter des
obligations de service public, ne constitue pas une aide. Elle a ainsi jugé
qu’il n’y a pas d’aide si la compensation est établie de façon objective et
transparente, ne dépasse pas les coûts occasionnés en tenant compte d'un
bénéfice raisonnable et est déterminée soit dans le cadre d'une procédure
de marché public, soit «
sur la base d'une analyse des coûts qu'une
entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée
» supporterait.
Mais cette solution recèle des difficultés d’application, eu égard à la
relative imprécision des conditions fixées et à l’insécurité juridique et
financière qui en résulte. Dans de nombreux cas, les chambres régionales
des comptes ont en effet observé que les contrats de délégation de service
public ne reposaient pas sur une définition suffisamment précise du
contenu du service assuré par l’entreprise et par là même ne permettaient
pas d’évaluer avec rigueur les charges de service public pouvant justifier
une compensation appropriée.
27) CJCE, 24 juillet 2003, Altmark Trans, C-280/00
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
31
Deux exemples révélateurs de cette situation peuvent être cités.
Ainsi, il a été relevé que, pour un service public de transport maritime de
passagers, un département était amené à verser au transporteur privé une
subvention d’équilibre représentant 23 % du produit de l’activité sans pour
autant que les parts respectives de l’exploitation commerciale et des
missions de service public aient été clairement définies. De même, il a été
observé qu’une commune avait consenti, dans le cadre de l’exploitation
d’un centre nautique et aquatique, à verser une subvention forfaitaire
d’exploitation évaluée sur la seule base d’un planning horaire d’utilisation
des installations et non par référence aux charges de service public
réellement et précisément
supportées par ce dernier. Dans ces deux cas,
non seulement le cadre juridique communautaire des compensations de
service public n’a pas été respecté, mais ne l’ont pas non plus été les
dispositions de l’article L.2224-2 du code général des collectivités
territoriales, qui prévoit qu’une collectivité ne peut subventionner un
service public industriel et commercial, sauf si «
les exigences du service
public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de
fonctionnement »
.
Le droit européen exige que toute aide, versée dans des conditions
incompatibles avec les règles fixées par le traité instituant la Communauté
européenne, soit restituée. Le non respect de cette règle est d’ailleurs
susceptible de donner lieu à une condamnation de la collectivité qui a versé
l’aide incriminée. La loi du 13 août 2004 a rappelé dans son article premier
les responsabilités qu’assument en la matière les collectivités territoriales.
Ainsi, toute collectivité territoriale ayant accordé une aide à une entreprise
est tenue de procéder sans délai à sa récupération
28
si une décision de la
Commission européenne ou un arrêt de la Cour de justice des
Communautés européennes l'enjoint, à titre provisoire ou définitif. A
défaut, le représentant de l'Etat y procède d'office par tout moyen, après
une mise en demeure restée sans effet dans un délai d'un mois à compter de
sa notification. De même, les collectivités territoriales supportent les
conséquences financières des condamnations qui pourraient résulter pour
l'Etat de l'exécution tardive ou incomplète des décisions de récupération.
Cette charge est considérée comme une dépense obligatoire et peut en
conséquence faire l’objet d’une inscription d’office au budget de la
collectivité.
Les chambres régionales des comptes ont observé à maintes reprises
que les collectivités territoriales, quelle que soit leur taille, avaient pris des
risques sérieux en ne respectant pas les règles européennes. Le cas le plus
symptomatique est celui d’une grande ville qui, en 1987, a aidé, avec
l’appui du département,
l’implantation sur son territoire d’un grand groupe
28) Le délai de prescription en la matière est de 10 ans.
32
COUR DES COMPTES
papetier de dimension internationale, en consentant trois types d’aides
indirectes : une aide à l’acquisition du terrain via une société d’économie
mixte, une participation à l’aménagement du site industriel et l’application
d’un tarif préférentiel pour la redevance d’assainissement. Toutefois, en
1998, cette entreprise, après de nombreuses difficultés financières, a cessé
son activité et ses actifs ont été repris par un autre groupe industriel.
Dénoncé par la Cour des comptes dans son rapport public publié en 1996,
le montage financier initial a été par la suite déclaré contraire aux règles
communautaires par la Commission européenne dans une décision du 12
juillet 2000 qui a enjoint l’Etat français de récupérer les sommes indûment
versées à l’entreprise, à charge pour la commune d’accueil d’en assurer le
recouvrement. En définitive et après de nombreuses péripéties, la
commune a été contrainte, à l’invitation du représentant de l’Etat, de
constituer dans ses comptes une provision de 8,5 M€ pour dépréciation des
actifs représentés par les titres de recettes non recouvrés.
IV
-
Une coordination insuffisante des dispositifs
d’aide
La coordination de l’ensemble des aides qui pouvaient être
accordées localement a été depuis 1982 au coeur de la problématique. Au
fil des différents dispositifs législatifs mis en place au cours de ces
dernières années, le législateur n’a cessé de réaffirmer au profit de la
région la fonction de mise en cohérence des politiques locales en matière
économique. Pourtant, en même temps, le principe de l’autonomie des
collectivités territoriales a été réaffirmé régulièrement en vue d’éviter une
mise en tutelle d’une collectivité par une autre. Jointe à la multiplication
des aides et des acteurs périphériques intervenant à des degrés divers,
cette dichotomie a constitué un obstacle à une réelle coordination des
dispositifs d’aide, dont l’efficacité en dépendait étroitement.
Cette difficulté demeure même après la loi du 13 août 2004 et la
réaffirmation du rôle de la région en la matière, faute de moyens
suffisants et adaptés.
A - Les difficultés de coordination des dispositifs locaux
Les chambres régionales des comptes ont observé que, dans
certains cas, des tentatives de coordination se sont heurtées à l’existence
de logiques d’intervention différentes voire opposées. Elles ont également
noté que, dans d’autres cas, alors même qu’il y avait une volonté
commune de coordination, les tentatives auxquelles elle a donné lieu ont
produit peu de résultats, le plus souvent en raison de l'inadéquation des
moyens mis en oeuvre et de la faiblesse structurelle des acteurs sollicités
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
33
pour conduire ces actions. Le nombre et la diversité tant des acteurs que
des bénéficiaires ont rendu toute coordination de l’action économique
locale difficile à organiser et à mettre en oeuvre.
1 -
La complexité des mécanismes de coordination
L’intervention économique des collectivités territoriales repose
bien souvent sur des procédures lourdes et complexes sur les plans
juridique, technique et financier. Les procédures d’attribution des primes
et aides régionales, comme les opérations de reconversion des zones en
difficulté, sont à cet égard significatives.
A l’occasion de la plupart des contrôles auxquels les chambres
régionales des comptes ont procédé, elles ont constaté que les
mécanismes d’attribution des primes et aides par les conseils régionaux
reposaient
sur
des
procédures
très
semblables.
Tout
d’abord,
interviennent divers réseaux, dont notamment celui des chambres
consulaires, auxquels est confiée la mission de rechercher des créateurs et
des repreneurs d’entreprises. Après cette première phase, les projets
recueillis sont transmis aux services de la région qui ont alors pour
fonction d’élaborer les dossiers de demande d’aide et de définir les
conditions de versement, en relation avec les organismes intermédiaires
qui ont apporté les projets. Cette organisation ne peut que limiter les
relations entre le créateur d’entreprise et les services de la région. Ceux-ci
estiment d’ailleurs généralement qu’ils ne rencontrent le porteur du projet
en moyenne qu’une fois, voire deux dans les cas de grands projets
nécessitant un accompagnement plus appuyé.
Les membres des réseaux réalisent ainsi un premier filtrage des
dossiers. Les projets donnent souvent lieu également à d’autres avis
émanant de la Banque de France, de la trésorerie générale et, le cas
échéant, de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de
l'environnement, ou enfin du comité régional du tourisme lorsqu’il s’agit
de projets relevant de sa compétence. Le dossier ainsi constitué est dans
la plupart des cas transmis à un comité technique qui comprend des
représentants de la région, mais également des banques et des chambres
consulaires, parties au financement du projet. Mais la composition et le
fonctionnement de ce comité technique sont souvent peu satisfaisants par
défaut de formalisation, ou par absence de cadre de référence. Son rôle
est dans la plupart des cas de fixer les conditions et la répartition du
financement entre les différents intervenants. L’avis qui est formulé est
souvent destiné à une commission interne au conseil régional, dénommée
« commission des interventions économiques ». Son avis précède celui de
la commission permanente dont le rôle se cantonne généralement à n’être
qu’une chambre d’enregistrement.
34
COUR DES COMPTES
Plusieurs chambres régionales des comptes ont fait remarquer que
cette cascade d’intervenants et d’avis ne pouvait pas servir de garantie
faute d’avoir été formalisée alors même qu’elle constitue une forme de
coordination des différents acteurs intéressés à des degrés divers par les
projets susceptibles d’être aidés par la région et d’autres financeurs. Mais
son principal inconvénient est d’accroître la durée de traitement des
demandes et de rendre les procédures décisionnelles complexes, ce qui
explique l’attitude de repli, voire de rejet que manifestent certains
demandeurs. De même, la détection de projets de création d’entreprise
par des réseaux dédiés aboutit très souvent à un accroissement des délais
de versement des aides et à réduire la lisibilité des dispositifs de soutien
aux entreprises. Les chambres régionales des comptes ont pu ainsi
observer des délais qui pouvaient atteindre voire dépasser un an,
notamment pour des dossiers de financement de société de crédit-bail.
Le traitement de la reconversion de zones souffre particulièrement
de ces défauts et des résultats souvent modestes par rapport aux objectifs
fixés initialement. Un des cas les plus récents se rattache à la disparition
d’un grand groupe industriel, le groupe Moulinex.
Pour en limiter les effets, des mesures nombreuses et diversifiées
ont été prises par l’Etat, les collectivités territoriales et divers autres
organismes.
Une convention de redynamisation de sites et bassins d’emploi,
touchés par la disparition du groupe, a été conclue pour une durée de trois
ans qui a dû être prolongée d’une année. Elle faisait intervenir outre
l’État, la région, trois départements et neuf collectivités territoriales et
établissements publics. En outre, la reconversion des sites industriels a été
confiée à des sociétés de reconversion, choisies sur appel à candidature
national et coordonnées par la mission régionale de revitalisation
économique (MIRE) placée auprès du préfet de région. L’objectif premier
consistait dans
la recherche et la mise en oeuvre de solutions pour chaque
salarié se retrouvant sans emploi. A cet effet, ce sont plus de 124 M€ que
l’on a prévu de mobiliser, si l’on tient compte des financements
complémentaires apportés au titre du Fonds européen de développement
régional (FEDER).
Malgré l’effort de coordination effectué notamment par le
représentant de l’Etat et la volonté manifestée par les différents
intervenants et financeurs de participer activement à la reconversion des
sites et à la création d’emplois, le nombre de ces derniers et leurs propres
procédures expliquent certainement qu’à un mois du terme de la
convention de redynamisation, le taux de réalisation des mesures et
opérations mises en oeuvre apparaissait relativement faible, puisque les
actions programmées ne représentaient que 86,4 % du montant de la
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
35
dotation actualisée et les paiements effectifs un peu moins du tiers
(31,9 %). Si le bilan des actions entreprises montrait que pour 99 % des
salariés licenciés, une solution avait été trouvée, il n’en demeurait pas
moins qu’en grande partie, elle reposait soit sur des préretraites totales et
dérogatoires, soit sur des mesures de type invalidité, longue maladie, soit
sur le dispositif du plan amiante financé par l’assurance maladie. Quant
aux créations d’emplois, on en dénombrait 1 901 sous forme de contrats à
durée indéterminée, soit environ un tiers des emplois supprimés.
2 -
Des stratégies souvent difficilement conciliables
Très souvent, l’étanchéité des réseaux et les stratégies parfois
opposées qu’ils développent, expliquent également les difficultés
d’assurer une réelle coordination dans la mise en oeuvre des aides.
Une région avait défini son propre dispositif d'aide à l'innovation,
en se fixant pour objectif d'accompagner et de faciliter l'innovation
technologique et la création d'emplois. Elle intervenait ainsi dans la phase
du prélancement industriel d'un produit, d'un procédé ou d'un service
innovant. L'aide consistait en une avance à taux zéro remboursable en
quatre ans, avec un différé d'un an. Une convention avec l'ANVAR
confiait à l’agence l'instruction des dossiers de demande de subvention,
en concertation avec la région au sein d’une commission spécifique dans
laquelle siégeaient des représentants élus de la région. Au cours des
séances qu’elle a tenues, la composition de cette instance a très rarement
été celle prévue initialement, la région étant peu ou pas représentée. Si le
conseil régional a toujours entériné les demandes d’aide qui étaient
formulées après avis conforme de la commission, l’absence ou la
faiblesse de la participation des représentants régionaux n’a pas permis à
la région de faire valoir en permanence sa propre stratégie dans le
domaine de l’aide à accorder sur ses propres fonds. C’est d’ailleurs la
raison sur laquelle s’est appuyée la chambre régionale des comptes pour
montrer que l’aide régionale manquait de lisibilité par rapport aux
interventions que menait en propre l’ANVAR.
Les interventions conjointes de l’Etat et des collectivités
territoriales sont souvent confrontées à des logiques qui dépassent celles
de l’aide elle-même. Ainsi, à l’occasion de l’examen de la gestion d’un
département, une chambre régionale des comptes a pu relever que les
conventions conclues avec l’Etat et la région imposaient la passation pour
chaque aide d’une convention entre le département et l’entreprise
bénéficiaire, mentionnant qu’elle intervenait en concertation avec les
deux autres partenaires. Ce dispositif n’était cependant pas appliqué. Le
président du conseil général en cause l’expliquait par des difficultés
techniques. Mais la raison principale était que la politique du département
36
COUR DES COMPTES
risquait de ne pas apparaître de manière claire. L’aide constituait sans nul
doute un moyen de communication pour la collectivité, mais, en ne
mentionnant pas le dispositif régional dans lequel elle s’insérait, elle
pouvait également être utilisée pour exacerber la concurrence entre
territoires. Des stratégies particulières viennent ainsi s’opposer à une
volonté de coordination.
La coordination n’apparaît pas plus aisée quand la collectivité
territoriale multiplie le nombre d’intervenants. Une région disposait fin
2005 de deux organismes de développement économique indépendants,
intervenant dans des domaines très proches, voire identiques. L’un était
d’ailleurs qualifié de structure « livrée à elle-même » par un audit
commandité par la région elle-même. Un troisième acteur, présenté
comme un point d’appui technologique pour les entreprises régionales,
constituait, quant à lui, un moyen pour la région de « se réapproprier » les
dossiers, selon les conclusions de ce même rapport. L’absence de
définition du champ de compétence des trois acteurs combinée au défaut
de rationalité de l’ensemble ne pouvait que rendre vain tout effort de
coordination et de mise en cohérence de l’action de la région.
3 -
Des tentatives de coordination sans grands effets
Des collectivités territoriales ont essayé de manière originale avec
des succès variés de définir des mécanismes cohérents de coordination et
d’en assurer la mise en oeuvre parfois avec une efficacité réduite.
Certaines collectivités territoriales ont ainsi souhaité disposer d’outils de
coordination maîtrisables, en créant des « missions », des associations ou
de sociétés d’économie mixte.
Ainsi, une région a mis en place une « mission régionale pour le
développement et l’innovation », sous forme d’une régie dotée de la
personnalité morale et de l’autonomie financière. Cet établissement
public local avait pour mission de mettre en oeuvre les orientations
stratégiques fixées par la région et de coordonner l’action de tous les
acteurs dans une logique de subsidiarité. Une autre région a créé avec
cinq associations départementales d’expansion et de développement
économique une association, unique en France, qui avait pour objet de
collecter et de centraliser toutes les informations économiques et sociales
utiles à la promotion de la région auprès d’investisseurs étrangers.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
37
Dans l’un et l’autre cas, l’action menée par la région a permis une
réelle coordination des intervenants à qui elle s’adressait. Dans le second,
malgré le retrait de l’une des associations départementales, les résultats
font état, outre d'une mutualisation des informations et d'une restitution
adaptée, d’une présentation cohérente du territoire et de l’offre économique
qu’il présentait.
Des collectivités territoriales ont tenté de coordonner leurs actions
en créant une société d’économie mixte ayant pour vocation à intervenir
sur le territoire départemental. Elle devait s’adresser à des petites
entreprises, essentiellement par la construction ou l’aménagement de
bâtiments industriels et leur mise à disposition sous forme de location ou
de vente. La société n’a cependant pas pu exercer sa fonction et elle est
devenue, pour l’essentiel de son activité, un animateur chargé d’aider, par
son conseil, le développement économique.
Souvent, les régions ne disposent pas de services suffisamment
nombreux ou organisés pour assurer seuls la recherche des prospects, le
soutien aux porteurs de projets, l’analyse des dossiers et le suivi de
l’efficacité de l’aide allouée. Pour y pallier, elles recourent à des acteurs
territoriaux ou nationaux dont certains, constitués en réseaux, contribuent à
la détection et à l’amorçage de projets de création ou de développement.
Or, il est apparu que la région s’appuie plus sur ces derniers qu’elle ne les
fédère. L’émergence des incubateurs et des pépinières d’entreprises en
constitue un exemple révélateur.
Dans de nombreuses régions, les créations d’incubateurs ont permis
le rapprochement d’universités, de centres de recherche, de grandes écoles,
en
partenariat
avec
des
collectivités
territoriales.
Leurs
résultats
d’ensemble ont cependant très souvent été modestes. La coordination sur
laquelle ils reposaient a très vite montré ses limites autant dans la
gouvernance des incubateurs eux-mêmes que dans l’intervention des
financeurs.
Les pépinières d’entreprises constituent un autre des champs
potentiels de développement d’une coordination efficace. Elles font
souvent partie intégrante de projets de développement intercommunaux et
s’insèrent dans des réseaux départementaux ou régionaux. Si ces réseaux
permettent de rationaliser l’offre en la matière, ce résultat peut être battu en
brèche par d’autres pépinières qui n’en relèvent pas. On comptait ainsi en
2005 sur le territoire national quelque 300 pépinières dont la moitié
connaissait des difficultés, dues à la concurrence à laquelle elles étaient
exposées. Si certaines d’entre elles se consacraient à des filières innovantes
ou aux nouvelles technologies, un grand nombre n’avait plus d’autre
objectif que leur taux d’occupation, confondant souvent hébergement et
accompagnement des créateurs. Une chambre régionale des comptes a
38
COUR DES COMPTES
ainsi noté qu’une commune hébergeait sans contrepartie financière
plusieurs entreprises en difficulté au sein de bâtiments récemment rénovés,
qualifiés de pépinières d’entreprises. D’autres chambres régionales des
comptes ont observé des durées d’occupation qui ont fait bénéficier les
entreprises concernées d’avantages qui n’étaient plus justifiés.
Alizé (Actions Locales Interentreprises en Zones d'Emploi) est un
dispositif créé en 1997 à l'initiative de l'association Développement et
Emploi, avec l’appui de la DIACT, dans le cadre d'un appel à projets du
Fonds social européen (FSE). Ce dispositif vise à rassembler et coordonner
sur un territoire particulier l’action des grandes entreprises, du service
public de l'emploi, des collectivités territoriales et des acteurs territoriaux
afin de soutenir les
projets de développement d’activité des PME/PMI.
Il
concerne vingt et un bassins d’emploi, avec pour opérateurs les chambres
de commerce et d’industrie qui en assurent la gestion administrative,
technique et financière. Les actions qui y sont conduites
29
n’ont pas
vocation à se juxtaposer ou à se substituer à celles déjà existantes, mais à
les compléter.
Ce dispositif ayant pour ambition la coordination opérationnelle
d’un réseau de partenaires publics et privés n’a pas eu tous les effets
escomptés, très souvent parce que les financements projetés n’ont pas tous
été mis en oeuvre. Une chambre régionale des comptes a ainsi relevé que
les fonds réellement mis en place étaient inférieurs aux prévisions initiales
et n’atteignaient que 77 % des montants contractualisés.
De nombreux autres réseaux d’accompagnement des entreprises, la
plupart parfaitement étanches entre eux, ont des représentations locales qui
interviennent directement ou indirectement dans le champ d’action des
collectivités territoriales. Certains ciblent une population identifiée
30
,
toutefois une majorité d’entre eux s’adressent à un public élargi par le biais
des chambres de commerce et d’industrie, des chambres des métiers et de
l’artisanat et encore des boutiques de gestion. La mission de France
Initiative Réseau présente, quant à elle, un caractère spécifique puisqu’elle
vise à organiser une collaboration entre les collectivités territoriales, les
opérateurs institutionnels et les entreprises pour créer un environnement
29) Il s’agit de missions de diagnostic et pré-diagnostic, d’octroi d’avances
remboursables d’une durée maximale de 36 mois, avec un différé maximum de
6 mois, à taux zéro et sans caution, et de l’attribution de subventions limitées au
financement d’interventions non prises en compte par le biais des soutiens déjà
obtenus, tels que le financement d’un stagiaire ou d’un cabinet-conseil.
30) Comme l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) pour les
demandeurs d’emploi ou les bénéficiaires du revenu minimum d’insertion, ou le
réseau « Racines ou Action’elles » pour les femmes porteurs de projet, ou encore la
fondation « France Active » pour les publics en difficultés, ou enfin le réseau de
développement technologique pour les entreprises innovantes.
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
39
favorable au développement de l'initiative économique et d'emplois
nouveaux. Ce réseau qui couvre presque l’ensemble du territoire national a
pour principale vocation la mobilisation de fonds pour financer, sous forme
de prêts sans intérêt ni garantie, la création d'entreprises. Il a aussi pour
fonction, grâce aux compétences économiques locales, d’assurer le
parrainage des créateurs et leur accompagnement.
Afin d’éviter une dispersion des actions conduites par les
représentations locales de chacun de ces réseaux et une concurrence entre
elles, les régions ont souhaité les coordonner par l’intermédiaire de têtes de
réseaux ayant pour mission la collecte et la redistribution d'informations,
l'animation de réflexions, le suivi d'actions expérimentales et l'évaluation
des pratiques. Or, très souvent ces dispositifs fédératifs ont été confrontés à
un manque récurrent de moyens de fonctionnement et l’efficacité de leurs
actions s’en est trouvée réduite.
B - La mission de coordination de la région dans le cadre
de la loi du 13 août 2004 : un rôle central,
mais sans réels moyens
La loi du 13 août 2004 a certes organisé au profit de la région une
fonction de coordination des aides au développement économique mises en
oeuvre dans son ressort territorial. Toutefois, les moyens mis à sa
disposition à cet effet paraissent en l’état très limités et semblent pour le
moment se heurter à de nombreuses difficultés de mise en oeuvre.
1 -
Un rôle central
L'article premier de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales a attribué à la région un rôle de coordination des
actions de développement économique des collectivités territoriales et de
leurs groupements. Il a également réaffirmé le rôle de chef de file de la
région pour les aides au développement économique de droit commun. Ce
rôle n’a cependant pas été étendu aux autres aides relevant de la
compétence des collectivités territoriales.
Au titre de son rôle de coordination, la région a également la charge,
en application de la réglementation européenne, d'établir un rapport annuel
sur les aides et régimes d'aide mis en oeuvre sur son territoire. Il doit être
communiqué au représentant de l'Etat dans la région avant le 30 juin de
l'année suivante. La région peut satisfaire à cette obligation dès lors que les
communes et les départements transmettent avant le 30 mars de chaque
année toutes les informations relatives aux aides et aux régimes d'aide
qu’ils accordent.
40
COUR DES COMPTES
S’il est effectivement rédigé chaque année, ce rapport devrait
permettre non seulement à la région de vérifier la cohérence des dispositifs
d’aide au développement économique dans l’espace régional, mais
également de recenser les catégories et formes d’aide des collectivités
territoriales. La région disposerait ainsi du moyen de jouer le rôle
d’observatoire
régional
des
politiques
locales
de
développement
économique s’exerçant sur son territoire.
La région est également responsable de l'organisation d'une
concertation locale et d'un débat du conseil régional en cas d'atteinte à
l'équilibre économique de tout ou partie de son territoire. Elle peut enfin
décider d'adopter un schéma régional expérimental de développement
économique et, dans ce cas, se voir confier, par délégation de l'Etat,
l'attribution de tout ou partie des aides que ce dernier met en oeuvre au
profit des entreprises et qui font l'objet d'une gestion déconcentrée.
Enfin, une autre disposition de la loi du 13 août 2004 accroît le rôle
de coordination confié à la région, en prévoyant que, dans le cas où une
convention est conclue entre l'Etat et une collectivité territoriale autre que
la région pour compléter des aides ou des régimes d'aide, une copie de la
convention est portée à la connaissance du président du conseil régional
par le représentant de l'Etat dans la région.
2 -
Des moyens limités et une mise en oeuvre difficile
Les régions ne disposent pas encore de tous les moyens nécessaires
à un recensement exhaustif de tous les dispositifs d’aide mis en place sur
leur territoire. Ainsi, les aides à l’immobilier d’entreprise y échappent. Les
tableaux joints à l’appui de la circulaire du ministère de l’intérieur du
3 juillet 2006 dont le contenu est très restreint ne pourront pas être le
support de ce recensement.
Par ailleurs, les régions ne disposent pas bien souvent des équipes
nécessaires pour mener à bien une mission d’une telle envergure. Certaines
ont envisagé de réclamer à tout bénéficiaire d’aide des états déclaratifs.
Cette exigence ne peut être mise en oeuvre que lors de l’attribution d’une
aide par la collectivité régionale, ce qui exclut de son champ les aides
octroyées par les autres organismes susceptibles de relayer les aides d’Etat
à finalité régionale ou même d’attribuer des aides spécifiques. Ainsi,
l’analyse de l’activité des sociétés de capital-investissement, dont les fonds
sont partiellement constitués de capitaux publics, a montré que dans
plusieurs cas des entreprises avaient bénéficié de concours de plusieurs
organismes publics et consulaires sans qu’une coordination soit intervenue
ou en l’absence de déclaration des sommes perçues. Dans d’autres cas, le
DES DISPOSITIFS ÉCLATÉS, COMPLEXES ET PEU COORDONNÉS
41
montant maximal des aides tel qu’il est défini par le règlement
communautaire relatif aux aides « de minimis » était dépassé.
En outre, le dispositif de conventionnement entre la région et
d’autres collectivités territoriales, destiné à faciliter le rôle de coordination
de la région, n’est pas aussi systématique que la loi l’a envisagé. Certaines
collectivités refusent d’ailleurs toute convention avec la région, alors que
d’autres préfèrent contractualiser directement avec l’Etat.
Il n’est pas non plus certain que l’adoption du schéma régional de
développement économique (SRDE), avec son corollaire, la distribution
des aides déconcentrées de l’Etat, soit suffisante à asseoir le rôle de la
région dès lors qu’elle ne lui donne pas pour autant un rôle d’orientation
et de clarification des diverses politiques et stratégies locales de
développement économique.
L’objectif a toujours été de faire en sorte que les stratégies de la
région et de l’Etat puissent être coordonnées par le biais notamment du
contrat de plan. Mais si très souvent les aides accordées par la région aux
entreprises se sont inscrites dans les contrats de plan, elles sont également
intervenues au fil de l’eau. En outre, les contrats de plan intégraient
rarement les interventions à caractère économique des collectivités
territoriales autres que la région. La circulaire du 6 mars 2006 du Premier
ministre sur la préparation des contrats de projets
31
Etat-région pour la
période 2007-2013 le reconnaissait elle-même puisqu’elle affirmait que le
gouvernement était attaché à entretenir des relations contractuelles avec
les différentes catégories de collectivités territoriales. Si les régions ont
vocation à être les interlocuteurs privilégiés de l’Etat, elles ne pouvaient
exclure les autres collectivités territoriales.
La coordination des stratégies de l’Etat et des collectivités
territoriales est d’autant plus nécessaire qu’il y a lieu également de tenir
compte de la programmation des axes à privilégier au regard des fonds
structurels européens et de leur réforme à compter du 1
er
janvier 2007. La
circulaire précitée du Premier ministre énonçait d’ailleurs que la phase
préparatoire aux contrats de projet devait être conduite parallèlement avec
la réflexion engagée au titre des programmes européens. Le cadre de
référence stratégique national (CRSN) pour le Fonds européen de
développement régional et le Fonds social européen a d’ailleurs été
élaboré à partir d’une large consultation partenariale associant les
collectivités territoriales et notamment les régions.
31)
Nouvelle appellation des contrats de plan.
42
COUR DES COMPTES
Enfin,
les
projets
d’action
stratégique
de
l’Etat
(PASE)
déterminent la stratégie de l’Etat dans chaque région et chaque
département (PASER et PASED). Ils se caractérisent notamment par
quatre ou cinq grandes orientations, déclinées en un programme d’actions
resserré (quinze au maximum). Ces projets devaient servir à l’élaboration
des schémas régionaux de développement économique. Cela n’est pas
toujours le cas, surtout lorsque les PASER, comme il a pu être observé,
sont communiqués par les services de l’Etat trop tard pour qu’ils puissent
être pris en considération dans le cadre des schémas.
Ainsi, la région ne semble toujours pas aujourd’hui être en mesure,
compte tenu des moyens dont elle dispose à cet effet, de coordonner avec
suffisamment d’efficacité un dispositif d’aide aux entreprises devenu, au
fil du temps, trop hétérogène et trop complexe.
***
Chapitre II
Des aides à la portée limitée
En matière d’aide au développement économique, l’offre présentée
par les différentes collectivités locales est perçue comme inscrivant ces
dernières dans des situations de concurrence pour attirer des entreprises.
Mais l’attractivité dépend d’un certain nombre de facteurs.
Les aides doivent, non seulement s’adresser à un nombre
significatif d’entreprises pour avoir un impact suffisant sur les économies
locales, mais aussi être suffisamment incitatives pour contribuer
efficacement à la décision d’investir. Pour cela, il leur faut correspondre
aux besoins et aux stratégies économiques autant des petites et moyennes
entreprises que des grands groupes industriels.
Les travaux menés par les chambres régionales des comptes ont
montré que la plupart de ces facteurs n’étaient pas réunis et que,
finalement, la portée effective des interventions économiques des
collectivités territoriales paraissait très limitée.
I
-
Une faible portée économique
Les dispositifs mis en place par les collectivités territoriales
représentent des montants de plus en plus élevés et parfois significatifs,
lorsqu’ils sont rapportés au nombre d’habitants (voir tableau ci-joint).
Ils concernent un nombre relativement restreint d’entreprises. Les
constats effectués montrent qu’il est difficile d’établir un lien entre le
volume des interventions réalisées et les dynamiques de développement
manifestées par les tissus économiques locaux.
44
COUR DES COMPTES
Aides versées par habitant (année 2004)
Aide en € par habitant
ILE-DE-FRANCE
66,52
PICARDIE
69,27
HAUTE-NORMANDIE
74,21
BOURGOGNE
81,72
ALSACE
82,43
LORRAINE
92,43
CENTRE
102,42
RHÔNES-ALPES
106,30
MIDI-PYRENEES
111,71
LANGUEDOC ROUSSILLON
111,79
AQUITAINE
120,82
FRANCHE-COMTE
121,72
BASSE-NORMANDIE
126,37
NORD-PAS-DECALAIS
128,03
CHAMPAGNE ARDENNE
128,83
PAYS DE LA LOIRE
132,43
POITOU CHARENTES
134,61
BRETAGNE
138,33
PROVENCE-ALPES COTE
146,48
AUVERGNE
164,90
LIMOUSIN
214,26
CORSE
313,47
Source :Cour des comptes, sur la base des données établies par le
MINEFI.
A - Les entreprises aidées
Le
s
politiques d’intervention ont des objectifs souvent très
ambitieux. Au regard des ces objectifs, le nombre d’entreprise
s
qui
bénéficient des aides allouées par les collectivités peut paraître faible.
Mais le rapport entre le nombre d’entreprises aidées et le nombre total
d’entreprises créées se situe en moyenne à près de 2 % en 2005. Ainsi,
6 243 des 316 829 entreprises créées avaient bénéficié d'une aide.
Concernant les
entreprises déjà installées, 1 %, soit environ 12 000,
DES AIDES A LA PORTÉE LIMITÉE
45
avaient également reçu une aide. Ces taux doivent toutefois tenir compte
du fait que, dans certaines régions, jusqu’à 40 % des entreprises
soutenues au cours de la période 2000 à 2005 ont bénéficié d’au moins
deux dispositifs d’aide.
Enfin, il convient de souligner la forte dispersion des aides
publiques dans l’ensemble des secteurs économiques, parmi lesquels
l’agriculture et le tourisme restent très privilégiés au détriment de
l’industrie et du commerce. Des régions ont tenté de concentrer les aides
sur certains secteurs, mais cette politique a alors conduit à une partition
peu explicite, ne permettant pas de distinguer les aides versées aux
entreprises de celles destinées à financer le fonctionnement des structures
mises en place pour porter la politique régionale. Il en est ainsi, à titre
d’exemple, des aides en faveur de l’exportation qui ont autant été
destinées aux entreprises porteuses de projet qu’aux chambres consulaires
pour leurs frais de gestion.
B - Une faible corrélation entre les aides versées et le
développement économique des territoires
Si l’objectif principal des collectivités territoriales reste autant la
création d’entreprises nouvelles que la création d’emplois durables,
l’analyse des données économiques ne permet pas de constater un effet
significatif.
1 -
L’incidence des aides sur le tissu économique
La mesure de la portée des aides suppose que soit effectué un
examen détaillé du tissu des entreprises qui sont susceptibles de
bénéficier des interventions économiques des collectivités publiques.
Une chambre régionale a effectué l’analyse d’échantillons
représentatifs d’entreprises aidées afin d’évaluer l’impact réel et
l’efficacité directe des aides apportées. L’évaluation a porté sur
l’incidence à court terme des aides allouées et leur effet direct sur le
comportement des entreprises. Pour ce faire, l’ensemble des entreprises, à
l’exception des sociétés d’économie mixte et des établissements
consulaires ayant reçu des aides, a été sondé sur la région. Les aides
apportées, versées au cours de l’exercice 2000, n’ont donc pu produire
d’effets mesurables qu’à compter de 2001. C’est pourquoi l’analyse de
l’échantillon s’est déroulée jusqu’en 2004 pour la vision comptable et au
31 mars 2005 pour ce qui concerne la situation des bénéficiaires.
46
COUR DES COMPTES
Sur cet échantillon, représentant 150 entreprises questionnées, il
est apparu que 30 sociétés avaient disparu, ou n’étaient pas en mesure de
répondre, parce que placées en liquidation ou redressement judiciaire.
Les résultats ont révélé au premier chef un taux élevé de
défaillance à court terme parmi l’effectif sondé. Ainsi, avec un taux de
disparition de 19,73 % moins de quatre ans après le versement de l’aide,
il apparaît que les entreprises soutenues ont été proportionnellement
moins résistantes que la moyenne nationale sur la même période
(12,03 %).
L’examen des grandeurs économiques, chiffre d’affaires, chiffre
d’affaires à l’exportation, capital social et résultats, a mis en lumière un
renforcement global des entreprises aidées. En effet, en moyenne, elles
ont connu une forte progression dans les entreprises soutenues. Toutefois,
cette croissance générale est à relativiser par l’impact induit sur la
moyenne par quelques progressions individuelles spectaculaires.
En effet, près de 41 % de l’échantillon avait subi une décroissance
du chiffre d’affaires à l’exportation. De même, alors que l’ensemble de
l’échantillon affichait une progression modeste des résultats nets
comptables, plus de 59 % des entreprises présentaient une nette
régression de leurs bénéfices. Enfin, la croissance modérée des effectifs
moyens masquait mal une diminution de l’emploi pour plus du tiers des
entreprises subventionnées.
L’aide régionale n’a donc sur cette période produit que des effets
limités sur l’ensemble de l’échantillon testé. Son impact a en réalité été
différé selon les entreprises. Celles qui étaient déjà solidement ancrées
commercialement ont ainsi pu bénéficier d’un renforcement structurel,
alors que pour les autres, l’aide reçue n’a pas suffi à dynamiser leur
chiffre d’affaires et maintenir leur effectif de salariés.
2 -
La portée des aides sur le tissu géographique
Les différents projets ou programmes instituant les modalités
d’intervention économique au travers des contrats de plan Etat-région
posent le principe d’une intervention économique indépendante des
considérations territoriales. Toutefois les effets sur les départements et les
bassins d’emploi sont loin d’être négligeables. Afin de les analyser, les
chambres régionales des comptes ont choisi comme unité d’analyse la
zone d’emploi telle qu’elle est définie par les services de l’INSEE.
DES AIDES A LA PORTÉE LIMITÉE
47
L’analyse de la distribution des aides par zone d’emploi a mis en
lumière
plusieurs
distorsions
notables.
Ainsi,
certaines
zones
bénéficiaient proportionnellement d’un niveau d’aide en quantité et en
montants alloués très inférieur à celui des créations enregistrées. A
l’inverse, certaines zones d’emploi bénéficiaient d’aides en nombre
largement plus élevé que le taux de création d’entreprise observé.
Au plan national, la distorsion entre le montant des aides accordées
et le nombre d’entreprises créées est tout aussi significative. L’approche
comparative par région permet de constater des distorsions importantes
entre les différents montants par habitant des aides versées. Elle montre, à
l’instar de 'analyse effectuée par les chambres régionales des comptes,
qu'il n'y a pas de corrélation, pour une grande partie des régions, entre les
montants accordés et le nombre d’entreprises créées.
Ainsi, à la fin 2004, il apparaît que les interventions économiques
des collectivités territoriales n’avaient la plupart du temps, qu’une
incidence marginale sur la création d’entreprises. En effet
L'attractivité
des territoires ne repose pas seulement sur les seuls moyens financiers
dévolus aux aides aux entreprises, mais tient compte d’autres facteurs,
comme, par exemple, la sphère de compétitivité ou les potentiels
sectoriels horizontaux.
II
-
Un accompagnement plus qu’une incitation à
investir
Les collectivités territoriales perçoivent les différents dispositifs
d’aide au développement économique qu’elles sont amenées à mettre en
place comme le moyen privilégié d’inciter à l’implantation, à la création ou
au développement des entreprises sur leur territoire. Or, malgré l’effet
d’entraînement attendu des aides de l’Etat, les dispositifs d’aide des
collectivités territoriales paraissent trop dispersés et trop lourds pour
pouvoir atteindre les objectifs recherchés, en prenant plus la forme de
mesures d’accompagnement que de réelles incitations à investir.
A - Une panoplie de primes aux effets peu perceptibles
Trop disparates mais aussi excessivement dispersées dans leurs
modalités d’intervention, les aides des collectivités territoriales ne
produisent pas d’effets suffisamment incitatifs sur les décisions d’investir
des entreprises. Dans ces conditions, elles ne peuvent relayer efficacement
la politique d’aménagement du territoire initiée par l’Etat au moyen de
l’attribution de la prime d’aménagement du territoire dont les effets
structurants constituent pourtant un enjeu majeur pour la politique d’aide
des collectivités territoriales à l’économie.
48
COUR DES COMPTES
1 -
La prime régionale à la création d’entreprise : un effet
retardateur sur la survie des entreprises
Une chambre régionale des comptes
a analysé le taux de survie des
entreprises soutenues par le biais de la prime régionale à la création
d’entreprise (PRCE) dans la région. L’échantillon était constitué de
l’ensemble des entreprises bénéficiaires de la PRCE au cours de
l’exercice budgétaire 2000, ce qui permettait une comparaison utile avec
le taux de survie national à 3 et 5 ans. Durant l’exercice 2000, trente-neuf
entreprises (de type PME) ont bénéficié de la prime régionale pour un
montant total de 938 476 € soit un montant moyen par entreprise de
24 463 €. Au 31 mars 2005, onze entreprises avaient cessé d’exister soit
28,2 % de l’effectif total. Deux entreprises avaient cessé leur activité dès
le mois de janvier 2001, soit moins d’un an après le versement de l’aide.
Le taux de survie à cinq ans des entreprises aidées (71,8 %) restait
supérieur sur la même période à la moyenne nationale (53,6 %).
L’analyse de la survie des entreprises bénéficiaires de l’aide
régionale à la création a été effectuée sur l’ensemble de la population des
entreprises aidées en 2003. Durant cet exercice 2003, 42 PME ont
bénéficié de la prime régionale pour un montant total de 808 300 € soit un
montant moyen par entreprise de 19 245 €. Sur l’ensemble de la
population, six entreprises avaient cessé leur activité au moment du
contrôle.
Avec un taux de défaillance à un an de 14,29 %, les entreprises
aidées de cette région résistaient juste un peu mieux que l’ensemble des
entreprises françaises sur la même période (14,79 %).
2 -
La portée modérée de la prime régionale à l’emploi
Le travail d’analyse des chambres régionales des comptes portant
sur l’examen de la situation des entreprises soutenues par les collectivités
territoriales régionales,
au regard des engagements initialement pris dans
le cadre du dispositif de la prime régionale à l’emploi, a permis de
mesurer le faible effet général du dispositif.
Le taux de défaillance, mesuré en termes de sinistralité directe,
liquidation et dépôt de bilan, avoisine les 10 %, sur une période de
seulement trois exercices.
Une chambre régionale des comptes a plus particulièrement mis en
exergue le caractère peu contraignant des régimes d’allocation de prime.
En effet, outre le nombre modeste des aides attribuées dans le cadre de la
prime régionale à l’emploi, près de 50 % des entreprises ne remplissaient
DES AIDES A LA PORTÉE LIMITÉE
49
pas les engagements souscrits lors du versement de la prime, ce qui
rendait discutables à la fois l’attribution des primes et leur efficacité, de
même que cela rendait indispensable la mise en oeuvre d’un véritable
contrôle de la réalisation des engagements pris par les entreprises
primées.
3 -
Le soutien à l’équipement industriel de production
Pour faire suite à une enquête conjointe de l’INSEE et des chambres
régionales de commerce et d’industrie qui relevaient en 2000 que le
principal soutien recherché par les porteurs de projets était celui portant sur
l’équipement productif, une chambre régionale des comptes a porté son
attention sur le soutien de la région
à l’équipement industriel de production
dispensé en 2002.
Sur l’échantillon examiné, trente-huit projets avaient bénéficié du
soutien régional seul ou en complémentarité avec les partenaires
économiques territoriaux, pour un montant total de subventions versées de
1 280 569 €, soit 33 699 € par projet, ce qui représentait 11,06 % des
dépenses subventionnables.
Sur l’ensemble des entreprises soutenues par la région, trois avaient
fait l’objet d’une liquidation judiciaire, deux d’une cessation d’activité, une
avait été dissoute tandis qu’une autre faisait l’objet d’une fusion-absorption.
L’analyse des bilans financiers et des comptes de résultats des
entreprises bénéficiaires a permis de vérifier l’impact des aides sur les
fonds propres des sociétés. Ainsi, l’effet mécanique de l’amortissement des
subventions génère, dans ces cas précis, une consolidation du haut de bilan
et donc, par voie de conséquence, une pérennisation du financement
durable des immobilisations par stabilisation du fonds de roulement.
Toutefois, en dépit de ce soutien marqué, l’augmentation du chiffre
d’affaires ne s’est que trop rarement inscrite de manière pérenne et dépasse
en fait rarement un seul exercice.
B - Un soutien aux fonds propres limité
La France était en 2005 le premier marché du capital-
investissement européen et on comptait alors 200 sociétés de capital-
risque gérant leurs propres fonds ou les fonds qui leur avaient été confiés
notamment par des fonds de pension. En nombre d’interventions, les
petites et moyennes entreprises sont les principaux destinataires de ces
financements. L’analyse des montants consacrés à ce type de soutien aux
fonds propres depuis 1995, démontre qu’en dépit d’une progression
spectaculaire, les collectivités territoriales ne peuvent y jouer qu’un rôle
50
COUR DES COMPTES
mineur. En 2005, la part du secteur public représentait en effet 6,65% du
marché, mais seulement 2,2% en moyenne sur une période de dix ans.
Les collectivités publiques semblent n’avoir mesuré que très tardivement
l’intérêt de ces leviers économiques sur les créations d’entreprises ou sur
leur développement.
Les soutiens de toute nature, publics et privés, ne s’expriment pas
d’égale façon selon les régions. La région Ile-de-France concentre en
effet plus des deux tiers des montants investis pour près de 43 % des
entreprises bénéficiaires.
Contrairement
aux
investisseurs
privés
qui
limitent
leur
investissement moyen à 2,6 M€ par projet, les partenaires publics
investissent peu mais des montants élevés, 12 M€ par investissement en
2005. Cette tendance nouvelle se situe pourtant à l’opposé des besoins du
secteur qui a fait émerger un besoin d’investissement en fonds propres sur
les petits projets, inférieurs à 165 000 € mais dont le risque de défaillance
est par nature élevé.
De fait, les collectivités territoriales ont une propension naturelle à
intervenir dans un marché concurrentiel et exigu, au risque de rendre les
outils déjà existants inefficaces et coûteux au regard des moyens alloués.
Le capital-investissement, qui constitue l’une des différentes
techniques d’apport en fonds propres, est particulièrement soumis aux
aléas conjoncturels des taux consentis en matière de prêt par les
organismes bancaires, taux qui peuvent s’avérer plus compétitifs que les
taux de rendement interne pratiqués sur les sorties de capital. Il est aussi
confronté aux objectifs divergents des collectivités locales, lesquelles
recherchent une garantie des risques pris en matière d’intervention
économique, tandis que le capital-investissement, et plus spécialement sa
branche orientée vers la création d’entreprise, ou capital-risque, suppose
une rémunération du capital investi souvent proportionnelle au risque
pris. Les collectivités territoriales, peu préparées à ce type d’intervention,
appréhendent mal en réalité la gestion des sociétés de capital-risque.
Les objectifs du capital-investissement et ceux des collectivités
territoriales ne se rejoignent en effet que partiellement. Les fonds de
capital-risque obéissent à une logique de profit à moyen terme, tandis que
les collectivités territoriales tentent d’offrir une réponse la plus large
possible aux déficits de capitaux propres rencontrés par les entreprises
lors des étapes essentielles de leur existence. Le domaine du capital-
investissement relève normalement de l’activité des établissements
bancaires ou financiers spécialisés et il obéit à une logique de rentabilité
sévère. Pour tenter de faire coïncider ces logiques antagonistes, les
collectivités régionales ont tenté parfois de circonscrire l’action des
sociétés de capital-risque en précisant de façon stricte leur objet social,
DES AIDES A LA PORTÉE LIMITÉE
51
mais n'ont pas pour autant défini de politique précise à mettre en oeuvre.
Les orientations à donner à ces interventions se limitent généralement à
des interventions très ponctuelles et sommaires lors des conseils
d’administration qui ne sont que trop rarement appuyées de directives
écrites ou de notes de principe.
L’activité
de
capital-risque,
si
elle
constitue
un
outil
complémentaire de l’action économique des collectivités territoriales, ne
peut s’exercer hors d’une logique de rentabilité, notamment en matière de
capital-développement ou de capital-transmission. Cette logique ne peut
toutefois pas s’appliquer de la même façon en matière de capital-
amorçage. Cette activité suppose, pour sa part, une prise de risque
significative ; elle reste confrontée à un taux de défaillance élevé et, par
voie de conséquence, à une rentabilité réduite voire nulle. En ce domaine,
les collectivités territoriales, si elles en admettaient les règles, pourraient
soutenir les fonds propres des entreprises, là où précisément les
établissements financiers hésitent à s’engager. Mais la pratique montre
que les collectivités territoriales, prises isolément, maîtrisent mal ce
procédé relativement sophistiqué d’intervention sur la structure financière
des entreprises en création.
C - Des délais de versement inappropriés
Pour avoir de réels effets, les aides qui ont pour finalité
l’attribution d’un soutien financier doivent être délivrées dans des délais
conformes aux attentes des entreprises et aux lois du marché.
Le soutien à la création d’entreprises, dont les caractéristiques
devaient tendre vers l’instantanéité, comme l’a voulu le législateur au
travers des diverses lois d’incitation et de soutien à la création
d’entreprises, s’accommode mal de réactions tardives ou trop longues des
services chargés du développement économique. Or les procédures
d’attribution sont longues et complexes, la durée totale du processus
tenant davantage à la complexité structurelle d’un dispositif qu’à
l’assurance de financer un projet à bon escient.
Bien trop souvent, les délais de versement des aides ne démarrent
qu’à compter de la réception d’une lettre d’intention du porteur de projet,
ce qui exclut la phase d’analyse préparatoire effectuée par les membres
du réseau intervenant en amont. Sur cette seule période, le délai moyen
observé, tous types d’aide confondus, n’a jamais été inférieur à 150 jours.
En prenant pour base l’enregistrement initial du projet et pour but le
versement effectif de l’aide, ces délais sont supérieurs à six mois dans la
plupart des cas examinés par les chambres régionales des comptes. La
distribution de certaines aides atteint même, pour certaines régions, plus
de 300 jours.
52
COUR DES COMPTES
Ces constats paraissent antinomiques avec la loi du 1
er
août 2003
pour l’initiative économique qui a mis en oeuvre un dispositif destiné à
faciliter et accélérer le processus de création.
III
-
Des risques d’effets d’aubaine et de guichet
La portée réelle des aides au développement économique ne tient
pas seulement à l’impact que celles-ci peuvent avoir sur la décision même
d’investir des créateurs et des chefs d’entreprise. Si leurs régimes sont
mal définis par rapport aux finalités recherchées ou si, par suite d’une
organisation inappropriée ou de procédures trop complexes, leurs délais
de traitement et de versement sont trop importants, les aides peuvent voir
leurs effets significativement réduits, voire annulés.
L’examen des aides accordées par les collectivités publiques
montre la persistance de la recherche d’effets d’aubaine. Cette approche
négative de l’aide publique est le plus souvent rendue possible par la
persistance d’une logique de guichet que la mise en oeuvre de la loi du
13 août 2004 n’a pas permis
d’éviter.
L'effet d'aubaine est lié généralement à l'inadaptation des régimes
d’octroi à la finalité même des aides, notamment en raison d’un défaut de
définition précise de la population visée. En conséquence, des entreprises
qui ne relevaient pas du champ initial de l’aide peuvent ensuite bénéficier
des avantages liés à ce régime sans que cela corresponde pour elles à une
réelle nécessité économique.
Pour bon nombre de programmes, l'effet d'aubaine semble dans
une certaine mesure inévitable. Toutefois, lorsque trop d’entreprises
bénéficient de l’effet d’aubaine, c’est en réalité l’adaptation et l’efficacité
de la mesure qui sont en cause.
Le travail des chambres régionales des comptes a permis de
démontrer que près de la moitié des entreprises bénéficient sur une courte
période de plusieurs aides compte non tenu des dispositifs de PRE, PRCE
ou PRCEA
.
Ce système est particulièrement sensible en matière de
soutien à l’équipement industriel de production, dans la mesure où
nombre d’entreprises ont profité de l’aide pour céder ensuite l’activité dès
la rénovation de leur outil achevée.
DES AIDES A LA PORTÉE LIMITÉE
53
En outre, l’examen des conditions d’attribution des aides et de
leurs effets a mis en relief la persistance d’une logique de guichet maintes
fois dénoncée mais difficilement évitable. L’analyse des dossiers ne suffit
pas à écarter les projets qui intègrent les aides comme un droit et non
comme un outil de développement.
Cette attitude évacue très souvent de
facto des éléments d'analyse comme la viabilité, la pertinence et la
crédibilité du projet.
La multiplicité des intervenants est également à l’origine d’un
grand nombre de formules d’aides que la contractualisation entre
collectivités territoriales ne suffit pas à limiter et qui accentue, de fait,
cette logique de guichet.
Enfin, l’analyse des interventions des structures représentatives de
l’intercommunalité a également montré que, dans de nombreux cas, le
contrat régional de développement ou toute autre convention-cadre
s'inscrit dans la même logique en se surajoutant à des dispositifs d'aides
préexistants.
Chapitre III
Une évaluation et un suivi insuffisants
des aides
Il n’est pas toujours aisé de répondre clairement à la question de
savoir si les aides versées sont efficaces, ces aides n'étant pas le seul
paramètre à prendre en compte en cas d'échec, comme en cas de réussite.
S'il est difficile d'isoler la seule influence des aides accordées, des erreurs
d'interprétation des résultats enregistrés peuvent conduire à conclure
hâtivement à une réussite, ou plus rarement à un échec, du système
d'intervention.
Si malgré tout les collectivités locales ont tenté, en ordre toujours
dispersé, de mesurer l’efficacité des politiques publiques en comparant
les objectifs fixés et les résultats atteints, elles ont rarement effectué une
évaluation de l’efficience et des incidences directes et indirectes des
aides.
Les exécutifs régionaux, comme leurs assemblées délibérantes,
doivent en effet disposer d’instruments pour préparer puis piloter les
stratégies décidées et mises en oeuvre au cours d’une mandature. Force est
de constater que, si les initiatives ne sont pas rares en la matière, les
processus élaborés ne répondent que partiellement aux questions
stratégiques posées, quand ils ne sont pas arrêtés avant leur terme.
56
COUR DES COMPTES
I
-
L’hétérogénéité et l’inadaptation des processus
d’évaluation mis en place
Le besoin d’évaluation ne repose pas uniquement sur un objectif
réglementaire mais aussi sur la volonté d’acquérir les moyens nécessaires à
un pilotage utile autant qu’efficace de l’activité d’intervention économique.
Les moyens d’y parvenir sont divers. Ils reposent toutefois tous sur un
système de suivi et de collecte des données qui se doit d’être aussi précis
que possible pour autoriser une lecture et une interprétation correcte du
résultat des actions conduites. Les systèmes d’aide mis en place par les
collectivités territoriales réunissent en fait rarement de telles conditions.
A - Une trop grande diversité des procédures
d'évaluation
La superposition des structures procédant à des évaluations est lié en
tout premier lieu à la distinction de plusieurs niveaux d'évaluation
correspondant à autant de niveaux des politiques publiques.
Ces politiques publiques sont déjà, théoriquement, soumises à des
obligations d'évaluation lorsqu'elles mettent en jeu des cofinancements. Tel
est le cas des évaluations propres à la politique de la ville, mais aussi des
programmes structurels européens et des actions financées dans le cadre
des contrats de plan Etat-région, notamment pour la génération 2000-2006.
A ces systèmes d’évaluation proposés par les services de l’Etat
viennent se juxtaposer les évaluations commandées par les autorités locales
ou les différents acteurs de l’intervention économique, sans pour autant
que la multiplication des processus soit profitable aux différents acteurs.
L’étanchéité des dispositifs ne permet généralement pas de rapprocher les
processus,
obérant
une
vision
d’ensemble
pourtant
indispensable.
L’absence d’un dispositif général institutionnalisé paraît en ce sens
préjudiciable, car elle prive les acteurs d’informations essentielles au
pilotage de leurs interventions, tout en accroissant subsidiairement le poids
financier de l’évaluation.
Au niveau régional, les collectivités locales diligentent parfois des
procédures d’évaluation de leurs politiques en les confiant à des partenaires
privés, comme les agences de développement économique ou les
associations relais. Ces entités sont chargées d’évaluer l’efficience de
certaines aides régionales. Cependant, leur vision n’est jamais complète car
elle se cantonne dans un champ d’investigation étroit, défini par le
commanditaire public qui ne recouvre qu’une fraction des dispositifs mis
en oeuvre.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
57
Si les dispositifs évaluatifs diffèrent singulièrement d’une région à
l’autre, l'organisation retenue généralement s'appuie sur des instances
bipartites réunissant les services du représentant de l’Etat et les services
régionaux. L’évaluation est quant à elle le plus souvent effectuée par la
collectivité régionale, tandis qu’un comité scientifique est chargé
d'examiner la méthodologie d'évaluation et de garantir la rigueur et la
qualité scientifique des évaluations.
Le plus souvent les évaluations des mesures des contrats de plan ne
sont pas aussi exhaustives qu’initialement prévu et elles peuvent ne porter
que sur certains programmes développés dans ce cadre.
Une autre option retenue a été, dans le cadre des contrats de plan,
une
externalisation
ponctuelle
du
processus
d’évaluation
auprès
d’organismes spécialisés en la matière. Les résultats n’ont pas toujours
été à la hauteur des ambitions affichées.
Ainsi, une association créée à l’initiative d’une région avait pour
mission d’évaluer les politiques publiques des principales collectivités du
ressort territorial concerné. Elle ne bénéficiait toutefois que d’une
indépendance relative, puisqu’elle comptait au rang de ses principaux
financeurs les collectivités dont elle était chargée d’évaluer les
programmes. Malgré un dispositif séduisant, le programme d’évaluation
des politiques publiques régionales était singulièrement réduit. Sur la
durée du contrat de plan, l’organisme n’avait pu fournir qu’une seule
étude d’évaluation portant sur un dispositif d’aide à l’emploi. L’étude
n’avait par ailleurs engendré aucune modification d’un régime dont
l’efficacité n’était pas avérée.
Les missions d’évaluation confiées à des organismes externes en
matière d’interventions économiques sont restées en réalité trop
ponctuelles pour pouvoir conférer à un organisme extérieur le rôle central
que les contrats de plan Etat-région 2000-2006 entendaient lui voir jouer.
Certains organismes, pourtant cités en exemple, avaient été dissous bien
avant la fin du contrat de plan, et surtout sans avoir pu produire les
résultats escomptés.
Les contrats de plan, qui pour la plupart contiennent des
dispositions tendant à favoriser une démarche évaluative, ne semblent
ainsi pas avoir, dans ce domaine, rempli leur rôle. En laissant bien
souvent l’initiative des évaluations aux régions, qui pour beaucoup ont
délégué ces missions qu’elles n’étaient pas en mesure d’assurer elles-
mêmes, les contrats de plan ont très certainement contribué à
disperser
un peu plus les efforts d’évaluation et à en limiter la portée tout autant
que l’efficacité.
58
COUR DES COMPTES
B - Des dispositifs inadaptés, trop partiels
et de faible portée
De nombreux contrats de plan Etat-région instituaient un dispositif
« suivi évaluation » destiné à actualiser les contrats de projets négociés
avec chaque partenaire de l’action régionale. Leur articulation reposait
sur l’utilisation de trois instruments dont celui d’une évaluation précise de
l’impact des actions publiques.
La mise en place du dispositif de suivi-évaluation avait pour
vocation d’être un gage de transparence aux autres collectivités et
d’instituer un outil d’aide à la décision. Il devait permettre de vérifier
que l'action publique répondait à des besoins non couverts ou
insuffisamment satisfaits, d'améliorer les interventions grâce à
l'observation de la réalité des résultats et des impacts et à une
rétroaction sur les actions en cours, et, au vu des résultats enregistrés,
que les actions à mener soient confirmées ou infléchies voire
supprimées. Enfin, il devrait permettre aussi de rendre compte aux
partenaires du plan des résultats obtenus et du bon emploi des
ressources affectées.
Les régions souhaitaient ainsi faire de la démarche d’évaluation ex
post un outil d’aide à la décision, dont la qualité serait garantie par la
mise en place d’un conseil scientifique et l’établissement de la
transparence des résultats. L'esprit du dispositif de suivi-évaluation établi
avec précision était celui d'un véritable outil de pilotage des interventions
économiques.
Toutefois, les objectifs fixés à chacune des actions économiques à
conduire sont apparus peu précis voire inexistants. Ils n’étaient ni
quantifiés, ni planifiés dans le temps.
Bon nombre de collectivités territoriales de moins de 200 000
habitants ne mettent en oeuvre aucun dispositif d’évaluation des aides
accordées. Quelle que soit l’importance des moyens disponibles et bien
que les fonds publics investis soient substantiels, les collectivités
territoriales prennent en effet rarement la peine de procéder à des études
d’impact ou d’efficacité des aides allouées. Si ces insuffisances paraissent
compréhensibles quand elles mettent en jeu des collectivités de petite
taille, une telle faiblesse semble plus étonnante pour les collectivités de
plus grande importance. Il arrive qu'un département ou une région ne soit
pas en mesure, malgré les moyens dont il ou elle dispose, de s’assurer du
nombre d’emplois créés, alors que ce critère a conditionné l’octroi de
l’aide considérée.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
59
Pourtant conscientes de la nécessité de présenter un bilan des
actions entreprises, les collectivités ne souhaitent pas investir dans une
logique systématique de l’évaluation et se contentent parfois simplement
des éléments d’information fournis par les bénéficiaires d’aides, éléments
qui ne sont ni actualisés ni confirmés par d’autres sources.
Enfin, quand les moyens de l’évaluation ont été mis en place, et
quand ils ne sont pas simplement délégués à un stagiaire, ils ne paraissent
pas toujours suffisants. Par voie de conséquence, ils ne permettent pas
d’ajuster les programmes ni même de piloter en temps utile l’action
économique déployée.
II
-
Des évaluations au contenu insuffisant
La démarche d’évaluation ne peut pas reposer seulement sur la
mesure d’impact, ou des effets sur un tissu économique ou sur un secteur
précis. Elle doit être globale en prévoyant des outils institutionnalisés et
clairement définis et en autorisant la collecte de données dans le cadre
d’un système de suivi, complétée par des enquêtes thématiques
ponctuelles. L’évaluation des aides publiques impose donc aux opérateurs
de mettre préalablement en oeuvre des indicateurs quantifiables et
mesurables. Ces derniers sont concentrés sur les ressources, la réalisation,
le résultat et l’impact. En effet, ils doivent permettre de mesurer puis
d’expliquer les écarts constatés entre objectifs et réalisations et, ainsi,
apporter une base d’analyse fiable pour proposer des corrections et des
amendements aux programmes développés.
A - Des évaluations d’impact inexistantes
Les travaux menés par les chambres régionales des comptes ont
montré que les dispositifs d’intervention économique ne font que
rarement l’objet d’une étude d’impact préalable, ni même d’une
présentation approfondie. Le lien entre stratégie et efficacité n’est
pratiquement jamais appréhendé. Dès lors, il est difficile de mesurer avec
suffisamment de certitude la cohérence d’ensemble des instruments
d’intervention économique mis en oeuvre, ni même d’en identifier les
limites et les axes de progression.
Les dispositifs, lorsqu’ils sont établis, paraissent mal utilisés.
Quand des mesures d’évaluation préalable sont mises en oeuvre, elles ne
concernent alors pas un régime d’aide dans son ensemble, mais le plus
souvent un élément particulier de ce dernier. Les modes opératoires de
l’évaluation excluent par ailleurs trop souvent le suivi des indicateurs
d’impact.
60
COUR DES COMPTES
B - Des comptes rendus annuels déficients
A défaut d’approche globale en matière d’évaluation, les
collectivités régionales procèdent à l’élaboration d’un compte-rendu
annuel de mise en oeuvre des politiques régionales. Dans ce document,
sont détaillés les principaux éléments relatifs à l’évaluation des aides
attribuées. Ces derniers présentent pour chaque programme d’action des
indicateurs de ressources et d’activités. Les indicateurs de ressources
détaillent les décisions budgétaires annuelles décidées par l’assemblée
délibérante. Ils sont complétés par des indicateurs de réalisation
mentionnant le niveau des affectations de crédits et le volume financier
des mandatements correspondants. Enfin, ils sont parfois complétés par
des indicateurs d’impact.
Le plus souvent les éléments présentés comme indicateurs ne se
rapportent pas à des objectifs préalablement fixés et ne donnent pas une
vision dynamique de l’action, se cantonnant à une présentation des
actions accomplies durant l’année.
Il n’est donc pas possible de préconiser des mesures correctives, en
dépit des orientations strictes fixées généralement par les assemblées
régionales.
En outre, les indicateurs de performance sont mal utilisés. Ainsi,
une certaine confusion entre indicateurs de réalisation et indicateurs de
résultats prédomine. Les régions concernées présentent le plus souvent de
simples indicateurs de réalisation. Enfin, les indicateurs d’impact mêlent
des indicateurs macro-économiques avec des indicateurs de réalisation ou
de résultat. Lorsque ces derniers sont correctement définis, ils ne font pas
l’objet d’un développement dans la partie qui leur est normalement
consacrée.
L’analyse des aides directes conduite par les services régionaux est
donc le plus souvent partielle, et ne fait pas l’objet d’un suivi durable.
Les dispositifs d’évaluation « en continu » des programmes en
cours, tels qu’ils sont élaborés par les collectivités régionales, sont
nettement insuffisants. et n’offrent qu’une vision ponctuelle qui ne peut
en aucun cas constituer une base efficace pour adapter ou réformer les
dispositifs de mesure adoptés.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
61
C - L’évaluation ex post n’est pas systématisée
Les contrats de plan Etat-région ont prévu un dispositif d’évaluation
a posteriori. Ce dernier embrasse la totalité des programmes envisagés. En
raison de l’importance du champ potentiel d’investigation, un choix sur les
thèmes à évaluer a dû être effectué par les collectivités en accord avec les
comités régionaux d’évaluation.
Certaines
régions
excluent
des
procédures
d’évaluation
les
interventions économiques. C'est ainsi qu'aucune information ne permet
d'apprécier le nombre d'emplois créés et pérennisés, le nombre
d'entreprises créées ou sauvegardées, l'impact de ces actions sur la fiscalité
ou sur la situation économique et sociale d'un secteur ou d'un territoire, et,
en définitive, de prendre la mesure des échecs.
Rares sont les collectivités régionales qui disposent de l’expérience
et de la pratique voulues pour conduire ou faire établir les évaluations
souhaitées. Il en résulte une grande faiblesse générale en matière
d'évaluation qu’elle soit globale, sectorielle ou par programme.
III
-
Une faible prise en compte des résultats des
évaluations par les décideurs publics
L’efficacité d’un dispositif d’évaluation tient non seulement à la
qualité technique de ses modalités de mise en oeuvre, mais aussi à ses
résultats et aux conséquences qui peuvent en être tirées quant aux
inflexions à apporter au régime d’aide considéré.
A - Des interprétations divergentes
Même lorsqu’il existe une évaluation quantifiée des aides allouées,
des divergences d’analyse, d’interprétation ou plus simplement de
comptabilisation empêchent, le plus souvent, une juste perception de
l’efficacité réelle de l’aide octroyée.
Les divergences relevées par les chambres régionales des comptes
portaient en premier lieu sur le mode de comptabilisation des emplois créés
par aide apportée. Les résultats peuvent en effet être nettement différents
selon qu’on les présente par projets plutôt que par l’analyse de l’évolution
globale des effectifs. La première solution, d’usage courant au sein du
dispositif Alizé dont la présentation a été évoquée plus haut, revenait à
occulter la situation d’ensemble de l’entreprise soutenue et, ainsi, à éluder
la réalité de sa situation économique.
62
COUR DES COMPTES
En outre, si le recueil et l’analyse des informations constituent
deux des aspects essentiels de la procédure d’évaluation, des divergences
notables apparaissent en fonction des modes de comptabilisation.
Ainsi, l’examen des zones franches urbaines a révélé chez les
différents
intervenants
l’existence
d’écarts
substantiels
entre
les
différentes bases statistiques de mesure de l’impact de la ZFU sur les
créations d’entreprises et d’emplois. Le comité technique chargé du suivi
a mis en évidence, en 2005, la difficulté d’harmonisation des différentes
bases statistiques produites par l’URSSAF, la direction des services
fiscaux, les chambres consulaires et la direction départementale du travail
et de l’emploi (DDTEFP). En l’espèce, seules l’URSSAF et la DDTEFP
disposaient de bases correspondantes, mais dont les chiffres demeuraient
très éloignés les uns des autres. Il n'était donc pas possible de suivre
l’efficacité de la zone franche urbaine en termes de création
d’entreprises et d’emplois.
B - Une place limitée dans les schémas régionaux de
développement économique
La plupart des schémas régionaux de développement économique
(SRDE) reprennent le dispositif légal qui impose un processus de suivi et
d’évaluation des aides accordées. Cependant l’approche engagée reste à
parfaire dans de nombreux schémas. En effet pour nombre d’entre eux, la
procédure d’évaluation se limite à la création d’un comité de pilotage
partenarial sans que le support de la démarche d’évaluation ni même ses
objectifs soient précisés.
Par
ailleurs,
l’élaboration
des
schémas
régionaux
de
développement économique est affectée de retards importants. Dans leur
majorité, les régions
n’ont pas conclu avec les autres collectivités de
convention spécifique susceptible de préciser la nature des financements
pris en charge par chacune d’elles. Il est de fait impossible de fonder
l’élaboration du schéma régional de développement sur des orientations
stratégiques précises, ruinant dès le départ la possibilité d'une approche
évaluative.
C - Des résultats peu utilisés
L’évaluation des aides et le contrôle de l’effectivité de leur
versement n’ont été en réalité introduits dans les politiques régionales que
sous la pression des dispositifs de financement européens.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
63
De manière quasi générale, sur l’ensemble de l’échantillon analysé,
les chambres régionales des comptes mettent en lumière la faible lisibilité
et l’absence de cohérence d’ensemble des dispositifs existants. D’autres
facteurs d’insuffisance sont ponctuellement démontrés, qu’il s’agisse de
la faiblesse des aides à l’exportation ou du soutien trop limité apporté à la
transmission d’entreprises ou à l’intégration de systèmes informatiques,
ou qu’il s’agisse du pilotage des réseaux, estimé globalement inefficient
voire inefficace.
Les états des lieux dressés par les cabinets spécialisés externes sont
pour la plupart sans concession et délimitent avec précision les lacunes
des dispositifs ou des politiques engagées. Ils soulignent majoritairement
que les objectifs sont trop flous ou qu'il n’existe pas d’indicateurs
susceptibles d’en mesurer l’impact. Ils démontrent surtout, et il s’agit là
de l’enseignement essentiel, que faute d’objectifs clairs, précis, quantifiés
et mesurables selon une périodicité pertinente, l’action économique n’est
ni corrigée dans ses applications ni adaptée dans sa stratégie.
L’évaluation semble ainsi être avant tout comprise comme une
étape « administrative » obligée, dont les collectivités territoriales
semblent mal discerner l’usage potentiel et les effets directs pour la
conduite de leur politique d’intervention économique.
IV
-
Un suivi insuffisant des aides
Les travaux des chambres régionales des comptes montrent
également que l' absence de culture du résultat se trouve confirmée dans
le domaine de la gestion administrative des dispositifs d’aide, ceci en
dépit d’un coût de gestion très élevé.
A - Un système de contrôle insuffisant
Un système efficace et économe d’aide publique au développement
économique suppose la mise en place de procédures de contrôle adaptées
et de mesures de remboursement des fonds indûment perçus.
La plupart des aides publiques octroyées aux entreprises sont en
effet assorties de conditions quant au nombre d’emplois à créer ou au
chiffre d’affaires à atteindre.
Or, le plus souvent, le contrôle des services spécialisés se limite à
une simple vérification formelle des conditions règlementaires et ne va que
très rarement jusqu’à la vérification des conditions économiques de l’aide.
64
COUR DES COMPTES
Par ailleurs, le contrôle des aides versées ne s’inscrit que rarement
dans un cadre homogène et s’opère selon des modalités variables. Les
contrôles a posteriori portent sur la vérification de la réalité de la prestation
tantôt à l’occasion d’une visite de l’opérateur, tantôt au moyen d’un train
de mesures comportant questionnaires, diagnostics et rapports.
D’une façon générale, les règlements d’intervention demeurent
incomplets. Souvent, ils ne comportent pas
une présentation exhaustive
des contrôles auxquels le versement de l’aide est soumis, ou bien les
dispositifs de contrôle envisagés sont trop lacunaires. C’est ce dernier
aspect qu’une chambre régionale des comptes a fait observer à un
département, à l’occasion de l’examen de ses relations avec une agence de
développement économique.
Une autre chambre régionale des comptes a constaté que, jusqu'à
une période récente, les services de la région avaient exercé des contrôles
de suivi beaucoup trop tardifs, voire nettement insuffisants. Si des
contrôles ont été partiellement mis en place à partir de 2002, notamment en
matière de délais de réalisation, ils ne l’ont été que du fait de l’intervention
des crédits de l’Union européenne.
B - Des mesures de recouvrement des aides indues
déficientes
Les aides publiques locales font l’objet d’une restitution lorsqu’elles
ne respectent pas le droit national ou le droit communautaire. Toutefois, en
application de l’article L. 1511-4
32
du code général des collectivités
territoriales et bien que la jurisprudence administrative l’ait également
établi, il n’en est pas toujours de même pour les aides accordées
régulièrement, lorsque l’entreprise ne respecte pas a posteriori les
engagements pris en contrepartie de l’aide accordée.
S’agissant du droit communautaire, l’article 88-2 du traité et ses
règlements d’application prévoient une procédure précise de récupération,
par l’État membre, des aides accordées sans notification préalable et des
aides déclarées par la commission incompatibles avec le marché commun.
Dans ces hypothèses, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales met à la charge de la collectivité locale concernée
l’obligation de récupération des aides et les éventuelles sanctions
financières résultant d’une condamnation en manquement. Il convient de
noter que le juge national peut lui-même constater l’illégalité d’une aide et
imposer sa récupération.
32) Les collectivités territoriales et leurs groupements déterminent la nature et le
montant des garanties imposées, le cas échéant, aux entreprises bénéficiaires de l'aide
ainsi qu'à leurs dirigeants.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
65
Le retrait d’une aide est également possible lorsqu’elle a été
attribuée dans des conditions d’irrégularité interne, par exemple en cas de
déclaration mensongère de l’entreprise. Toutefois, conformément à une
jurisprudence constante du Conseil d’Etat, l’autorité ne dispose que d’un
délai de quatre mois pour effectuer le retrait. En revanche, le retrait pour
des raisons d’opportunité d’une aide légalement attribuée présente un
caractère irrégulier et peut engager la responsabilité pour faute de la
collectivité.
En cas de non respect des engagements souscrits par l’entreprise,
l’aide accordée peut faire l’objet d’une récupération, à condition qu’une
procédure contradictoire ait permis à l’entreprise de faire valoir ses
arguments et dans le respect de l’article L. 1617-5 du CGCT qui prévoit
qu’en cas de contestation du titre de recette devant le juge administratif, la
force exécutoire du titre est suspendue jusqu’au prononcé de la décision
définitive. Il est vrai que, par ailleurs, les ordonnateurs locaux ont souvent
des réticences à exiger la restitution des aides pour éviter des difficultés à
l’entreprise concernée. Les clauses de restitution des aides ne sont pas pour
autant totalement absentes des dispositifs contractuels. Certaines régions
insèrent ainsi systématiquement dans les conventions qu’elles concluent
avec les organismes aidés une clause imposant la restitution des fonds
versés lorsque la contrepartie exigée du bénéficiaire de l’aide n’a pas été
obtenue.
Le recouvrement de ces fonds constitue l’un des éléments clefs de
l’efficience d’une politique d’intervention. Malgré tout, et bien que les
enjeux soient importants, les collectivités territoriales se sont peu engagées
dans cette démarche. Il est vrai que les conventions d’attribution de l’aide
font peu souvent référence aux conditions et circonstances d’un
reversement des montants versés.
Lorsque l’action économique est disséminée dans des réseaux
d’opérateurs, ou lorsqu’elle est déléguée à des partenaires associatifs ou
institutionnels, il est souvent difficile de prévoir la mise en oeuvre de
procédures de recouvrement pour les aides indues.
Ces mêmes partenaires assurent également pour le compte des
collectivités publiques le suivi du déroulement des programmes, du
versement des aides, du constat de fin de programme technique, du
recouvrement des remboursements éventuels et de l'analyse des demandes
de constat d'échec total ou partiel. Ce mécanisme trouve une expression
privilégiée au sein des fonds d’aides régionaux. Dans de tels cas, la
décision de soulever ou d'abandonner la créance publique échappe, en
réalité, en grande partie à la collectivité. Les chambres régionales des
comptes ont constaté des abandons de créance d'un montant souvent élevé
excédant parfois plusieurs millions d’euros.
66
COUR DES COMPTES
En outre, même lorsqu’elles sont initiées, les procédures de
restitution aboutissent assez rarement, ou sont engagées avec un tel retard
que le processus de recouvrement peut devenir inopérant. Il n'est pas rare
que malgré tout, quelques collectivités locales
manifestent clairement
leur
volonté d’engager, dans le cadre d’un suivi rigoureux de leur politique
d’aide à l’économie, des procédures de recouvrement efficaces. Cette
volonté s’exprime dans la convention elle-même puis au travers de bilans
réguliers et de contrôles précis et planifiés montrant ainsi que c'est dès
l’encadrement que se joue l'efficacité du contrôle et la qualité du système
d'aide.
C - Des coûts de gestion élevés
Les travaux des chambres régionales des comptes montrent que les
aides versées par les collectivités territoriales ont très souvent des coûts de
gestion élevés. Mais ces coûts sont trop souvent ignorés ou mal connus des
exécutifs locaux.
Ainsi, entre 2000 et 2005, le coût de gestion d’un dossier a pu être
déterminé par les chambres régionales des comptes participant à l’enquête.
Il atteint, selon les calculs effectués, 1 100 € par dossier accepté. Les frais
de distribution des interventions économiques, qui ne représentent que les
coûts directs supportés par la collectivité territoriale concernée, varient
pour leur part dans une fourchette s’étendant de 0,23 euros à 0,29 euros
pour un euro d’aide attribué. On peut en déduire que les coûts directs de
gestion représentent à minima 25 % des sommes allouées, quelle que soit
la collectivité, coûts auxquels il conviendrait d’ajouter ceux de l’ensemble
des organismes intermédiaires agissant pour leur compte.
En matière de subventions accordées aux filières agricoles les coûts
de distribution peuvent même atteindre, selon certaines études, 40% des
montants alloués, voire être largement supérieurs au montant accordé.
L’analyse des aides à la sécheresse versées par une région à vocation
agricole, révélait que chaque aide attribuée donnait lieu à paiement à la
chambre d’agriculture de 70 euros d’expertise et de 6,70 euros par dossier
instruit pour une aide qui était en moyenne de 300 euros mais qui, dans
certains cas, n’atteignait que 17 euros.
UNE ÉVALUATION ET UN SUIVI INSUFFISANTS DES AIDES
67
Le plus souvent, le coût par euro d’aide accordée est inversement
proportionnel aux montants alloués. De fait, plus les aides accordées sont
modestes, plus le coût est élevé. Il en est ainsi pour les dispositifs relatifs à
la prime régionale à l’emploi (PRE), à la prime régionale à la création
d’entreprise (PRCE) et surtout à la prime régionale à la création
d’entreprise artisanale (PRCEA)
33
.
Au total, en raison du caractère hétéroclite de la dispersion des aides
mais aussi de la complexité de leurs dispositifs et de leurs procédures, les
coûts de structure et de gestion sont particulièrement élevés et représentent
vraisemblablement près du tiers des aides effectivement versées. Si l’on
applique ce ratio à l’ensemble des aides versées par les collectivités
territoriales, on est conduit à estimer à près de 8 milliards d’euros le
montant
annuel
des
dépenses
publiques
consacrées
à
l’aide
au
développement économique des collectivités territoriales.
***
33) Prime particulière créée dans certaines régions en faveur des entreprises relevant
du répertoire des métiers.
Conclusion générale
Les travaux menés au plan national par les chambres régionales
des comptes montrent que le bilan de l'action économique des
collectivités territoriales est dans l’ensemble bien décevant au regard de
l’ampleur des moyens financiers mis en oeuvre autant que de l’envergure
des objectifs affichés.
Il en ressort en effet, alors que les dispositifs mis en place sont
conçus pour produire un effet de levier déterminant sur l’économie locale
et en particulier sur l’emploi, qu'en fait, la complexité et l’hétérogénéité
d’un dispositif institutionnel reposant sur une compétence plus diluée que
partagée, ainsi que le foisonnement excessif des aides versées donnent
peu de cohérence aux politiques publiques poursuivies tout en leur
conférant une réelle fragilité juridique. En outre, ces politiques, mal
maîtrisées et souffrant d’une insuffisance majeure de leur système
d’évaluation et de suivi, se révèlent être d’une portée économique
contestable, alors que leur coût de gestion est élevé.
Aussi, après vingt-cinq ans d’une décentralisation qui, dans ce
domaine, s’est voulue ambitieuse aux yeux du législateur comme des
acteurs locaux eux-mêmes, convient-il de s’interroger sur les voies et
moyens susceptibles de donner à cette compétence toute l’efficience et
l’efficacité que les acteurs économiques sont en droit d’attendre d’elle.
Certes, le dispositif actuel pourrait vraisemblablement être
amélioré, notamment par la redéfinition d’une compétence recentrée sur
le couple Etat-région, mais aussi par une réduction significative des
régimes d’aide applicables et l’instauration d’une véritable démarche
évaluative répondant aux exigences de la gestion publique moderne. Ces
évolutions demanderaient, sur le plan législatif, des inflexions consistant
70
COUR DES COMPTES
pour l’essentiel à remettre en cause un des principes fondateurs de la
décentralisation, celui qui a présidé à la mise en place d’une compétence
partagée par des collectivités territoriales de plein exercice, alors que la
pratique d’une telle compétence, principalement axée sur l’emploi, les a
isolées, démunies de moyens et les a rendues inefficaces. De tels
aménagements permettraient de donner au dispositif existant l’apparence
d’une plus grande cohérence. Mais il n’est pas certain qu’ils soient de
nature à lui conférer une réelle efficacité sur le plan économique.
Le dispositif actuel a été conçu pour une grande part il y a plus de
vingt-cinq ans, avant tout comme un système d’aide individuelle aux
entreprises s’inscrivant dans un contexte économique particulier, celui
d’une économie encore largement dominée par l’emploi industriel, celui
d’un environnement concurrentiel limité, d’une politique monétaire
encore relativement autonome et celui, enfin, d’une politique centrée sur
des impératifs d’aménagement du territoire.
Il est probable, si ce n’est certain, qu’un tel dispositif ne
correspond plus aux exigences et préoccupations présentes des entreprises
françaises confrontées à un contexte économique nouveau, marqué
surtout par la mondialisation des économies. Dans ce contexte, il est
raisonnable de considérer qu’aujourd’hui, pour une grande partie des
entreprises françaises, la somme des gains qu’elles peuvent escompter des
aides publiques existantes est devenue inférieure à la somme des gains
qu’elles peuvent obtenir d’une délocalisation hors de la France de leurs
emplois. Prendre en compte une telle équation, c’est reconnaître la
nécessité de revoir fondamentalement le système d’aide à l’économie des
collectivités territoriales comme celui de l’Etat lui-même, si ce n’est d’y
mettre fin dans sa forme actuelle.
L’importance des enjeux économiques et financiers en cause exige
en effet une reconsidération totale du dispositif d’aide des collectivités
publiques à l’économie. Une telle démarche devrait pouvoir faire
apparaître, dans une perspective globale et macro-économique, la
nécessité de recentrer les collectivités territoriales comme l’Etat sur leurs
compétences propres considérées par rapport aux besoins réels du tissu
économique national. Ainsi, pourrait voir le jour une nouvelle approche
qui
permettrait
aux
collectivités
territoriales
et
à
l’Etat
d’agir
efficacement dans les trois domaines qui paraissent le mieux répondre
aux exigences économiques actuelles et futures. Celui, tout d’abord, de
l’accueil des entreprises, par la création d’un environnement et
d’infrastructures adaptés aux nouvelles donnes du développement,
domaine dans lequel les collectivités territoriales ont tous les atouts pour
intervenir efficacement. Ceux, ensuite, étroitement liés, de la recherche-
développement et des fonds propres où l’Etat et les collectivités
CONCLUSION GÉNÉRALE
71
territoriales, dans le cadre d’une approche contractuelle appropriée,
doivent pouvoir répondre aux besoins des entreprises innovantes,
notamment des plus petites. Domaine, enfin, de l’emploi, relevant de
l’Etat auquel il appartient d’assurer aux entreprises les moyens de leur
compétitivité internationale.
Le bilan effectué par les chambres régionales des comptes de
vingt-cinq ans de décentralisation en matière d’aide aux entreprises
montre
ainsi la nécessité, non pas tellement d’une simple amélioration du
dispositif existant, mais assurément celle d’une redéfinition profonde
d’une compétence frappée d’inefficacité et de réelle obsolescence. Les
enjeux présentés en termes économiques paraissent sans nul doute à la
mesure d’une telle démarche qui devrait ainsi conduire l’Etat et les
collectivités territoriales à privilégier, non plus les seules aides
individuelles aux entreprises, mais plus largement et plus efficacement
l’aide à la croissance de l’économie française.
***
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
73
ANNEXE 1
LES ACTIONS DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
DANS LA RÉGION RHONE-ALPES
Région prospère et dynamique, en particulier en ce qui concerne
ses deux principaux pôles de développement, Lyon et Grenoble, Rhône-
Alpes a eu la chance d'être moins soumise que d'autres régions à la
pression de l'opinion en faveur d'aides directes aux entreprises, dans une
problématique de défense de l'emploi. Ces grandes collectivités ont
remplacé des politiques d'aide peu ciblées par des politiques d'incitation
à la coopération entre acteurs économiques.
Plusieurs dates marquent cette évolution :
- Depuis plusieurs décennies, la ville de Grenoble a développé un
modèle
d'interactions
entre
enseignement
supérieur,
recherche
scientifique et développement industriel ;
- En 1987 la Région a abandonné la distribution de la prime
régionale à l'emploi, et a créé l'association Entreprise Rhône-Alpes
International (Erai), afin d’apporter son soutien aux exportations des
PME ;
- Dans les années quatre-vingt dix, le modèle italien des districts
industriels, fondé sur des synergies apparaissant dans un tissu de PME, a
été appliqué aussi bien à la structuration de secteurs récemment
industrialisés (plasturgie dans la vallée d'Oyonnax) qu'à la reconversion
de territoires marqués par la défaillance de grandes entreprises (Saint-
Étienne avec la fermeture de Manufrance) ;
- En 1995, les villes de Lyon et de Grenoble ont proposé à la
Région, dans une logique d'attractivité, de lisibilité et d'efficacité, de
privilégier le thème de la valorisation de la recherche ;
- En 1997, la communauté urbaine du Grand Lyon a initié avec les
milieux
économiques
lyonnais
un
« schéma
de
développement
économique », qui s’est traduit en 2000 par la création de l'Observatoire
partenarial lyonnais en économie, puis en 2003 par le dispositif de
gouvernance économique concertée intitulé « Grand Lyon, l’esprit
d’entreprise ».
74
COUR DES COMPTES
- A la fin des années 1990, dans le cadre du contrat de plan État-
Région, les moyens budgétaires ont été affectés en priorité à deux
secteurs prioritaires : l’économie numérique et le secteur des
biotechnologies.
- Au début des années 2000, deux opérations de développement
technologique ont été lancées dans le domaine de la microélectronique
dans le bassin grenoblois (Crolles
2 et Minatec).
- En 2003, sur le modèle du Québec et surtout de la Catalogne, la
région a créé les "clusters économiques Rhône-Alpes", variante des
districts
industriels
italiens
dont
ils
renforcent
la
logique
de
décloisonnement, que ce soit entre professions voisines, entre entreprises,
ou au sein du monde de la recherche. Des "clusters de recherche" ont été
créés en 2005 afin de renforcer des coopérations entre équipes de
recherches rhône-alpines.
- En 2005-2006, la Région a élaboré un schéma régional de
développement économique (SRDE), de manière à mieux asseoir son rôle
de coordination, conformément à la loi du 13 août 2004 ; ce schéma
prévoit que "la subvention … devra être réservée à des dispositifs
extrêmement ciblés tels que l'aide à la création d'entreprise par les
publics en difficulté" ; dans le même temps, elle a procédé à l'évaluation
d'un dispositif d'aide directe aux PME engagées dans un saut stratégique,
puis elle a supprimé le volet aide à l'investissement de ce dispositif, et elle
a renoncé à la possibilité de distribuer certaines aides d’État ;
- En 2006-2007, elle a contribué à la résolution d'un différend
entre Erai et deux agences locales de développement économique
(l'Aderly pour Lyon et l'AEPI pour l'Isère), en matière d’attraction des
investissements étrangers.
***
L'intérêt marqué des acteurs du développement économique pour
la recherche de solutions originales a conduit la chambre régionale des
comptes de Rhône-Alpes à examiner les modalités de mise en oeuvre de
leurs politiques au travers d’une soixantaine de contrôles approfondis
34
,
en s'intéressant tout particulièrement à l'application des dispositions de
la loi du 13 août 2004 redéfinissant les compétences des collectivités
territoriales.
34) Ces contrôles ont concerné, outre la région elle-même, les huit départements de
Rhône-Alpes, la communauté urbaine de Lyon, sept communautés d’agglomération
dont celles de Grenoble et Saint-Étienne, cinq communautés de communes, quelques
communes, des syndicats mixtes (communes et départements), les chambres de
commerce et d’industrie (CCI), les agences économiques départementales, les comités
d’expansion économique, et certaines sociétés d’économie mixte ou associations.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
75
En effet, la loi précitée semblait rejoindre les préoccupations
exprimées en région Rhône-Alpes en faveur d'actions plus ciblées que la
distribution d'aides publiques. Alors qu'auparavant le législateur
n’envisageait la compétence des collectivités territoriales qu’en termes
d’aides, soit directes ou indirectes, la loi de 2004 a inclus dans son
champ les actions de développement économique. En outre, le rôle de la
région à l’égard des autres collectivités territoriales n’est plus défini
seulement au regard de la distribution des aides, mais plus largement en
fonction des actions de développement économique qu’il lui appartient
désormais de coordonner aux termes de la loi.
Compte tenu de ces diverses modifications législatives, la chambre
régionale des comptes de Rhône-Alpes a conduit ses contrôles en
référence à deux questions principales :
Dans
leurs
interventions
en
faveur
du
développement
économique, quelles sont les relations entre la région et les
autres collectivités territoriales de Rhône-Alpes, compte tenu du
rôle de l’État ? Ces relations ont-elles été modifiées par les
dispositions de la loi du 13 août 2004, du fait notamment de
l’extension du rôle économique de la région qu’elle autorise ?
Les interventions des collectivités territoriales en Rhône-Alpes
en faveur de l’activité économique se sont-elles limitées à la
distribution d’aides aux entreprises, ou bien, dans l’esprit des
nouveaux textes, d’autres formes d’actions de développement
économique ont-elles été mises en oeuvre ?
Il se dégage des résultats de cette enquête que si le conseil
régional de Rhône-Alpes a entendu assumer son rôle de coordination
dévolu par la loi, les collectivités de niveau infra-régional conservent une
large autonomie dans la définition de leur propre politique d’aide au
développement économique. Ces collectivités n’ont pas abandonné les
aides financières traditionnelles aux entreprises mais, comme la région
elle-même,
elles
privilégient
désormais
de
nouvelles
formes
d’intervention économique.
Parmi celles-ci, la création des « clusters Rhône-Alpes », dont la
logique est proche de celle qui a prévalu lors de l’adoption de la
politique des « pôles de compétitivité », a sans doute facilité les
nombreuses initiatives qui, en réponse à l’appel à projets du
gouvernement, ont été élaborées en Rhône-Alpes et ont le plus souvent été
couronnées de succès.
76
COUR DES COMPTES
I
-
L’exercice du rôle de coordination dévolu
par la loi à la région
A - Le schéma régional de développement économique
(SRDE)
Pour la mise en oeuvre de la mission de coordination désormais
dévolue à la région, la loi du 13 août 2004 a prévu que l’État, à titre
expérimental et pour une durée de cinq ans, peut confier à celle-ci
l’élaboration et l’adoption d’un schéma régional de développement
économique
(SDRE),
après
concertation
avec
les
collectivités
territoriales, leurs groupements et les chambres consulaires.
Ainsi, la région Rhône-Alpes a-t-elle été l’une des premières à
élaborer un tel schéma régional qui décrit, dans un premier temps,
les
caractéristiques
principales
de
l’économie rhône-alpine.
Rhône-Alpes regroupe sur 8 % du territoire de la France
métropolitaine près de 10 % de sa population. Elle a connu depuis
presque quarante ans une croissance démographique supérieure à la
moyenne nationale. Son PIB par habitant se situait en 2005 à 28 131 €,
soit au deuxième rang national après l’Île de France. Elle est également la
deuxième région exportatrice avec 11 % des exportations nationales.
Avec 7,2 % en avril 2007, le taux de chômage est sensiblement
inférieur à la moyenne française (8,3 %). Celui-ci tend à s’accroître au fur
et à mesure que l'on s'éloigne de la zone d'emploi de Genève qui connaît
un quasi plein emploi, sans toutefois dépasser la moyenne nationale dans
aucun département de la région.
Deuxième région industrielle de France pourvue de 22 % des
emplois dans ce secteur (contre 19 % en moyenne), Rhône-Alpes se
présente comme une économie diversifiée, fruit d’une industrie de
tradition ancienne avec le textile, la chimie, la métallurgie et la
mécanique,
mais
aussi
orientée
vers
des
activités
nouvelles
(biotechnologies, électronique ou informatique). Elle est également dotée
d’un secteur tertiaire dynamique regroupant 70 % de la population active,
et d’une agriculture à forte valeur ajoutée.
Disposant d’un réseau diversifié de PME, Rhône-Alpes est la
première région française en matière de sous-traitance, avec près d’un
quart de l’activité de ce secteur sur son territoire.
Grâce à des structures d'enseignement supérieur performantes, et à
une collaboration ancienne entre recherche et industrie, la région a pu
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
77
inscrire durablement son action dans des secteurs de pointe. Elle est ainsi
devenue la première région de Province pour les emplois de recherche et
d’innovation, avec 7,5 % d’emplois relevant de cette catégorie.
La région doit faire face également à des reconversions parfois très
lourdes, tout en étant circonscrites à des zones précises comme la
Matheysine (charbon) ou le Roannais (textile).
Le schéma régional de développement économique a défini une
stratégie qui cherche à allier développement des entreprises et de l’emploi,
et solidarité à l’égard des territoires.
Le SRDE stipule qu’
« afin d’éviter l’éparpillement de l’attribution
des aides individuelles aux entreprises,
les régimes d’aides ne pourront
être mis en place que par l’État,
les départements
et la région
elle-
même
. ». Les communes et leurs groupements se voient par le fait même
interdire l’adoption de régimes d’aides individuelles aux entreprises,
puisqu’elles ne peuvent le faire qu’avec l’accord de la région, sauf à
recourir à un conventionnement spécifique avec l’État. Quant aux
départements, le conventionnement avec la région est subordonné «
à la
cohérence entre le régime d’aides souhaité par le conseil général et la
stratégie du schéma régional de développement économique ».
Pour le reste, c’est principalement par le biais du volet économique
des contrats de développement Rhône-Alpes (CDRA), des contrats de pays
et des contrats d’agglomération que la région entend mettre en oeuvre son
partenariat avec les collectivités territoriales en faveur du développement
économique.
Enfin,
le
schéma
régional
de
développement
économique
subordonne les conventionnements de la région avec les collectivités
territoriales
35
à leur engagement de respecter les dispositions de la loi du 13
août 2004 qui leur font obligation de lui communiquer les informations
relatives aux aides et régimes d’aides mis en oeuvre, de manière à ce que la
région établisse à l'attention du préfet de région et de la Commission
européenne, le rapport annuel prévu par la loi précitée. Ce rapport devra
être établi pour la première fois en 2007, au titre des régimes d'aide
existant en 2006.
35) De fait il s’agit principalement des départements, puisque eux seuls sont autorisés
à conventionner avec la région pour mettre en place des régimes d’aide directe aux
entreprises. Cette décision régionale de ne pas conventionner avec des collectivités
infra-départementales, qui restreint les possibilités de versement de subventions aux
entreprises ou d'autres aides telles que des prestations de service, n’a pas suscité
d’opposition, par exemple de la part des principales communautés d'agglomération.
Pour les autres formes d’intervention le conventionnement avec la région n’est pas
requis.
78
COUR DES COMPTES
B - Les limites apportées dans le SRDE au rôle de
coordination exercé par la région
L’ambition de la région d’exercer pleinement son rôle de
coordination, à l’égard des collectivités territoriales et de leurs
groupements, conformément à la loi, est tempérée dans le schéma
régional lui-même par le fait que les collectivités de niveau infra-régional
peuvent intervenir en faveur du développement économique de multiples
manières, sans avoir à conclure des conventions avec la région, ni à
obtenir son accord préalable.
1 -
La renonciation à la distribution des aides par délégation de
l’État
La loi du 13 août 2004 dispose qu’après l’adoption d’un schéma
régional de développement économique par la région, « celle-ci est
compétente, par délégation de l’État, pour attribuer tout ou partie des
aides que celui-ci met en oeuvre au profit des entreprises et qui font
l’objet d’une gestion déconcentrée »
(aides individuelles aux PME, aides
au développement économique à l’international, aides individuelles pour
les entreprises agricoles et agroalimentaires, aides à la création
d’entreprise, encouragement au développement d’entreprises nouvelles,
chéquiers conseils). Or, la région n’a pas souhaité exercer cette
compétence.
Elle paraît ainsi se priver a priori d’un outil d’intervention et de
coordination. La région n’entend pas se voir confier, par délégation de
l’État, la distribution d’aides directes auxquelles elle n’est, par principe,
pas favorable, dont elle anticipe en outre l’extinction progressive
« sauf
dans des contextes de restructurations lourdes ».
2 -
« Laisser se gérer localement ce qui s’organise localement »
Le schéma régional stipule que la région « a pour vocation à laisser
se gérer localement ce qui s’organise localement (…) et que les
collectivités devront pouvoir intervenir financièrement en toute légalité
sur des projets d’entreprise pour lesquelles elles estiment que l’enjeu
local est important. Le principe de subsidiarité doit alors guider la
réflexion sur la réorganisation des dispositifs d’aide aux entreprises. »
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
79
En pratique, les contrôles de la Chambre ont permis de constater
que si les huit départements rhône-alpins avaient passé, en 2006, des
conventions avec la région, ces conventions avaient eu principalement
pour objet de permettre à chaque département de poursuivre en toute
légalité la mise en oeuvre des régimes d’aides antérieurement mis en
place, et dont la régularité avait été assurée jusque-là par un
conventionnement avec l’État. Or, le schéma régional de développement
économique subordonnait la signature de telles conventions à une
exigence de cohérence entre le régime d’aides souhaité par le conseil
général et la stratégie arrêtée dans le schéma régional.
Le fait de rassembler sans sélectivité les projets des autres
collectivités territoriales n’est pas propre à la Région. Ainsi, le schéma de
développement de l’un des départements de la région, document de nature
stratégique, a été élaboré de façon à reprendre les interventions
économiques du département, mais aussi pour répondre à tous les
souhaits des communes et de leurs groupements.
C - Les limites inhérentes au rôle de l’État et à la liberté
des acteurs publics locaux
1 -
Le rôle de l’État
Même si l’État a confié à la région Rhône-Alpes la responsabilité
d’élaborer un schéma régional de développement économique, il conserve
en ce domaine des pouvoirs propres importants, au regard desquels le
pouvoir de coordination dévolu à la région peut paraître limité.
En premier lieu, l’État conserve tous ses services déconcentrés
d’étude et d’analyse qui, avec l’appui des administrations centrales,
disposent d’une capacité d’expertise bien supérieure à celle de la région.
Ces services déconcentrés permettent également à l’État d’instruire les
demandes de subventions auprès de la Commission européenne.
La région, quant à elle, dispose certes de services propres, mais
une partie importante de leur activité consiste à instruire des dossiers
individuels de subvention. Quand elle doit conduire un travail de
réflexion stratégique, la région dispose de l’expertise du Conseil
économique et social régional, et elle recourt fréquemment à des cabinets
de conseil privés.
80
COUR DES COMPTES
Par ailleurs, l’État conserve une responsabilité propre en faveur de
territoires fragiles. La création des zones franches urbaines
36
, dont
l’objectif est de fixer des activités économiques dans des tissus urbains
défavorisés, demeure de la compétence de l’État. Les actions en faveur
des territoires touchés par des restructurations lourdes (Loire-Nord, Loire-
Sud, Romans, Tarare) sont formalisées dans des contrats de site ou des
contrats locaux de revitalisation qui relèvent de l’initiative de l’État, tout
en associant la région et les départements. L’intervention de l’État est
particulièrement attendue en cas de fortes réductions d’activité, comme
pour l’industrie de l’armement, notamment dans le bassin de Roanne,
dans un contexte où l’autre spécialité industrielle de ce territoire, le
secteur textile, est également en grande difficulté.
Surtout, l’État peut prendre des initiatives qui, comme celle des
pôles de compétitivité, s’adressent directement aux acteurs économiques,
sans que soit confiée à la région une responsabilité particulière dans
l’élaboration et la sélection des projets. Ce n’est qu’
a posteriori
que la
région a précisé les critères d’octroi de financements complémentaires au
fonctionnement des pôles de compétitivité et à la réalisation de leurs
projets.
Enfin, il convient de mentionner le rôle de l’État par le biais des
contrats de plan État-Région (CPER, devenus contrats de projets État-
Région). Ces contrats englobent de larges aspects de la vie des régions,
dont les actions de développement économique
stricto sensu
ne sont
qu’un élément parmi d’autres. Le contrat de plan entre l’État et la région
Rhône-Alpes,
pour
la
période
2000-2006,
comprenait
quatorze
programmes, l'un deux étant intitulé « développement des entreprises et
emploi ». Sur un total de financements de 8 341 M€ à la charge de l’État
et 8 155 M€ à celle de la région, les dépenses prévues en faveur du
développement économique étaient de 509 M€ pour l’État et de 740 M€
pour la région, soit au total environ 7,5 % des crédits dudit contrat
37
. Les
actions et les financements prévus au contrat de projet 2007-2013 pour le
développement des entreprises sont plus modestes : les grands projets
« pôles de compétitivité et clusters » et « innovation globale et croissance
des PME » ne comportent que 101 M€ attribués à Rhône-Alpes, dans le
cadre du CPER (presque à parité entre l’État et la région), soit 4,2 % du
total de dépenses de l’ensemble du contrat, ramené à 2 395 M€
36) En Rhône-Alpes : Saint-Étienne, Valence et Vaulx-en-Velin (zones franches
1996, loi PRV) ; Grenoble, Vénissieux et Rillieux-la-Pape (zones franches 2003) ;
Lyon - La Duchère (2006).
37) Auxquels on peut ajouter, par analogie avec les actions équivalentes du contrat
2007-2013, le programme intitulé "technologie" pour lequel la région et l’État ont
contribué chacun à hauteur de 196 M€ .
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
81
(dont 547 M€ pour le volet territorial du contrat de projet, pour l’essentiel
à la charge de la région).
Si les régions ont la responsabilité de coordonner les interventions
économiques des collectivités territoriales, elles doivent s’entendre avec
l’État, ne serait-ce que pour trouver des compléments de financement aux
actions envisagées.
De façon incidente, il convient de noter que le contrat de projet
entre l’État et la région Rhône-Alpes, au titre de la période 2007-2013,
concrétise l’objectif de la région de réduire les aides aux entreprises, que
celles-ci émanent d’elle-même ou de l’État.
2 -
La liberté des acteurs locaux
Si la loi du 13 août 2004 attribue un rôle de coordination de la
région à l’égard des interventions économiques des collectivités
territoriales et de leurs groupements, les compétences de la région
demeurent limitées au contrôle de la distribution des aides directes aux
entreprises, hors immobilier d’entreprise,
domaine dans lequel les
collectivités de niveau infra-régional peuvent intervenir sans avoir à
conventionner avec la région ni à solliciter son accord. Or, l’immobilier
d’entreprise constitue l’une des formes principales d’intervention
économiques des collectivités territoriales. De plus, l’action des
collectivités de niveau infra-régional, notamment des communautés
d’agglomération, voire de la région elle-même, emprunte de plus en plus
d’autres formes que celle des aides directes. Ces autres formes constituent
autant
de
types
d’interventions
économiques
qui
s’effectuent
indépendamment de la région.
Il en résulte que les collectivités territoriales infrarégionales, en
particulier les départements et les intercommunalités (notamment la
communauté urbaine de Lyon et les communautés d’agglomération de
Grenoble et de Saint-Étienne), définissent chacune de manière autonome
leur propre politique de développement économique. Les rapprochements
avec les autres collectivités territoriales mais aussi avec l’État, ne sont
recherchés qu’en fonction de l’aide qui peut en être attendue, notamment
à travers les contrats de développement Rhône-Alpes ou les contrats
d’agglomération. Quant à la région, ses actions peuvent venir en soutien
des projets portés par les autres collectivités, mais aussi se dérouler de
façon autonome.
82
COUR DES COMPTES
a)
Les spécificités de l’agglomération de Saint-Étienne
L’agglomération de Saint-Étienne offre un exemple de l’autonomie
des collectivités de niveau infra-régional ou de leurs groupements dans la
définition et la mise en oeuvre d’une politique d’aide au développement
économique, compte tenu de ses spécificités.
Son développement économique se heurte à des contraintes
topographiques qui l’ont conduite à rechercher une extension vers la
plaine du Sud Forez. A cette fin elle a attaché une importance particulière
à l’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale (SCOT) permettant
de dégager des synergies avec deux autres communautés, celle des
communes du pays de Saint-Galmier et celle de l’agglomération de Loire-
Forez. Ces trois communautés ont constitué le syndicat mixte
"zone
d’activité
d’intérêt national Loire-Sud
" avec le département de la Loire.
S’agissant de l’innovation et des synergies nécessaires entre ses
différentes composantes, Saint-Étienne n’est pas aussi richement dotée en
matière d’enseignement supérieur que les deux autres grandes métropoles
de la région, et doit donc valoriser de la manière la plus efficace ses
propres spécialités. C’est ce qu’elle tente de faire avec la Cité du design,
dans une logique qui se situe aux frontières d’une part de l’esthétique et
de la technique, d’autre part de l’industrie et de l’architecture, en
s’appuyant notamment sur ses écoles d’ingénieurs et des beaux-arts.
Saint-Étienne Métropole prend également en compte l’existence
d’un réseau dense de PME. Elle a développé une politique de soutien aux
filières professionnelles, alors même que cette forme d’action est l’une
des spécificités de la collectivité régionale. Ainsi, le
pôle des technologies
médicales
, créé en 1993 à Saint-Étienne, regroupe-t-il une cinquantaine
d’entreprises et 2 000 emplois.
L’importance des sommes que Saint-Étienne Métropole affecte au
développement économique dans son budget (24,17 M€ inscrits au
budget 2005, soit 61,7 € par habitant) traduit la volonté de prendre en
charge elle-même la responsabilité de son avenir économique.
Enfin, cette communauté d’agglomération a développé une
réflexion sur ses complémentarités avec la communauté urbaine de Lyon,
étant entendu que toutes deux tendent à former un seul marché de
l’emploi et du logement. Ce rapprochement constitue la colonne
vertébrale de l’association "
Région urbaine de Lyon
"
.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
83
b)
La recherche de complémentarités
Agir de manière autonome n’est donc pas incompatible, pour
Saint-Étienne Métropole, avec le fait de prendre en compte les actions des
autres collectivités territoriales.
En matière de politique partenariale, la chambre de commerce et
d’industrie du Roannais a défini une stratégie consistant à ne pas faire ce
qui est déjà fait par d’autres acteurs publics ou parapublics, voire à
obtenir qu’ils prennent en charge ce qu’elle-même ne veut plus faire
(gestion de la gare routière et de l’aéroport, construction d’hôtel
d’entreprises).
S’agissant de la mission de développement économique du
département de l’Ain, le souci d’éviter les redondances avec les actions
existantes s’est traduit par un engagement formel en faveur d’une
coopération avec les autres acteurs du développement économique.
En ce qui concerne l’agglomération chambérienne, la Chambre a
relevé la ligne de partage suivante : la Chambre de commerce et
d’industrie de la Savoie procure des conseils et des services d’assistance
technique, dès lors qu’ils concernent les conditions de rentabilité des
entreprises, tandis que reviendrait aux collectivités locales ce qui
concerne l’amélioration de l’environnement des entreprises, ainsi que
l’aménagement et la gestion des zones d’activités qui leur incombe ; la
prospection d’entreprises susceptibles de s’y implanter relève quant à elle
de l’agence économique de la Savoie.
c)
Le cas particulier de l’attraction d’investissements étrangers
Un exemple particulièrement net de manifestation d’autonomie
dans un premier temps, mais de sens du compromis dans un second, a
concerné les trois principales agences de développement économique de
la région.
Rhône-Alpes présente la particularité de posséder deux agences
économiques départementales ayant une action importante dans le
domaine de la promotion internationale de leurs territoires et de
l’attraction d’investissements étrangers : l’AEPI (agence d’études et de
promotion de l’Isère), et l’Aderly, association réunissant la CCI de Lyon,
la communauté urbaine du Grand Lyon, le département du Rhône et le
Medef).
Pour le compte de la Région, l’association Entreprise Rhône-Alpes
International (Erai), créée en 1987, exerce des missions comparables.
84
COUR DES COMPTES
Dans son rapport d’observations sur la gestion de l’une de ces
agences, l’Aderly, la chambre régionale des comptes avait relevé ce
chevauchement de compétences, et rappelé les dispositions législatives
selon lesquelles "
la région coordonne sur le territoire les actions de
développement économique des collectivités territoriales et de leurs
groupements".
Le contrôle récent de l’association Erai a permis de constater qu’un
terrain d’entente avait été trouvé entre l’AEPI, l’Aderly et Erai. Cette
dernière intervient en amont des dossiers d’attraction d’investisseurs,
tandis que les diverses agences départementales de développement
économique de la région se voient confier un accompagnement ciblé des
entreprises intéressées.
Cette attitude coopérative a favorisé une rationalisation des
antennes de ces agences. Erai en possède neuf, dont cinq hors d’Europe.
Le
rapprochement
avec
l’Aderly
a
permis
de
fusionner
leurs
implantations respectives à Tokyo. La fermeture de l’antenne de l’Aderly
à New York, recommandée par la chambre au vu des résultats décevants
de son activité, a été compensée par une action conjointe de partenariat
avec la Pennsylvanie, incluant également la Région et le Grand Lyon.
Enfin, on peut noter que la CCI de Lyon dispose de sa propre antenne à
Pékin.
***
S’agissant des régimes d’aide directe, à propos desquels elle ne
paraît cependant pas exercer la totalité de ses pouvoirs, les moyens dont
dispose la région Rhône-Alpes pour coordonner l’action économique des
collectivités territoriales sur son territoire restent limités. Plus que par des
mesures coercitives, c’est donc par l’effet d’entraînement de ses propres
interventions que la région peut espérer jouer le rôle de coordination de
l’action des autres collectivités territoriales qui lui a été dévolu par la loi
de 2004 précitée.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
85
II
-
D'une politique d'aide individuelle à une
politique d'accompagnement collectif
Le fait que les moyens de la région Rhône-Alpes pour coordonner
les interventions économiques des autres collectivités territoriales se
limitent principalement à l’incitation, et que chacune d’entre elles reste
attachée à définir sa propre politique, invite à analyser le contenu concret
des politiques de développement économique pratiquées.
Il résulte des examens de gestion effectués par la chambre régionale
des comptes, tant à propos de la région que des autres collectivités
territoriales, que les principales évolutions constatées sur la période
concernent d’autres formes d’intervention que celle des aides directes aux
entreprises, même si ces aides sont encore pratiquées.
Une évaluation chiffrée de ces évolutions n’est pas aisée. Les aides
traditionnelles consistent soit en des subventions à des entreprises, soit en
des dépenses d’équipement de zones d’activités dont les statuts sont variés
(aménagement en régie, en concession, contributions sous forme de fonds
de concours, etc…) ; les actions apparues dans un second temps se
traduisent souvent par des subventions à des organismes intermédiaires
entre la sphère publique et la sphère privée (organismes professionnels,
chambres consulaires, associations, incubateurs, sociétés d’amorçage ou de
capital-risque, fonds de garantie) ; enfin, les modes d’action les plus
récents peuvent consister à subventionner un projet de recherche conjoint
entre un laboratoire public et une entreprise privée.
En outre, l’imputation comptable, par fonctions, des dépenses des
collectivités, n’est pas faite avec suffisamment de rigueur pour permettre
une mesure précise du poids de l’action économique.
A - Le maintien des aides traditionnelles aux entreprises
Outre la possibilité de mettre en place leur propre régime d'aide,
sous
réserve
d'un
conventionnement
avec
la
région
ou
l'État,
conventionnement dont la région a réservé le bénéfice aux départements, la
loi du 13 août 2004 a également prévu que les collectivités territoriales
peuvent participer au financement des aides instituées par la région, telles
que subventions, prestations de services, bonifications d'intérêt ou de prêts
et avances remboursables. Cependant, au travers de ses contrôles, la
chambre n'a noté aucun exemple de mise en oeuvre de cette possibilité.
86
COUR DES COMPTES
La plupart des dispositifs examinés ressortissent au domaine
foncier ou à l’aide à l’immobilier d'entreprise, pour lequel la chambre a
relevé le plus d’exemples de gestion perfectible ou d’irrégularités.
En dépit de la volonté des collectivités importantes (région,
grandes agglomérations) de concentrer leur action sur des thématiques
ciblées, des régimes d'aide sans doute peu lisibles, voire peu efficaces,
subsistent également dans des proportions aussi élevées que dans d'autres
régions. L'observatoire national des aides aux PME a recensé 434 régimes
d'aides existants au 31 décembre 2005 en Rhône-Alpes, à comparer avec
une fourchette comprise entre 291 et 395 pour l'ensemble des autres
régions.
En 2005, la région Rhône-Alpes a dépensé près de 125 M€ au titre
des deux chapitres fonctionnels correspondant au développement
économique. Les deux tiers concernent l’action économique à proprement
parler. Une politique de soutien à l’économie sociale et solidaire a été
mise en place trop récemment pour pouvoir être évaluée dans le cadre de
la présente enquête.
Depuis de nombreuses années, la région Rhône-Alpes limite le
versement de subventions aux entreprises pour éviter le saupoudrage des
crédits qui est moins efficace, toutes choses égales par ailleurs, qu’une
baisse de taxe professionnelle à due proportion. Elle ne verse ainsi plus de
prime régionale à l’emploi depuis 1987.
Le souci de sélectivité de la région s’était longtemps concrétisé
dans le dispositif dénommé « contrat régional objectif croissance »
(CROC) dont le coût annuel était de l’ordre de 4 M€. Son objet était,
grâce à une aide au conseil et à une aide à l’investissement, de favoriser
les sauts stratégiques des PME. Cette aide a fait l’objet, en 2005-2006,
d’une évaluation qui ne concluait pas à l’existence d’un important effet de
levier. La région a alors pris la décision de supprimer la partie "aide à
l’investissement" du CROC, ainsi que l’aide appelée « 1001 talents » qui
était accordée de façon quasi-systématique aux créateurs ou repreneurs
d’entreprise.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
87
Après la réduction de l’ampleur de ses interventions, les
principales aides de la région bénéficiant aux entreprises sont les
suivantes :
- des financements s’écartant du principe de la subvention pure et
simple : avances remboursables, participation à des fonds d’amorçage ou
de capital risque, ainsi qu’à des fonds de garantie d’emprunts ou de prêts
d’honneur ;
- « I-déclic transmission », soutien à la reprise d’entreprise, et
« I-déclic Prim », aide directe aux publics en difficulté qui créent leur
entreprise ;
- « I-déclic stratégie », qui regroupe d’une part l’ancienne aide au
conseil du CROC, d’autre part une aide au conseil ou à l’embauche de
cadres
commerciaux
export
qui
existait
précédemment
sous
la
dénomination d’aide au renforcement des compétences à l’international
;
- la part du subventionnement, à hauteur d’environ 4 M€ par an, de
l’association Erai qui permet à cette dernière d’offrir aux PME des
prestations de prospection et d’implantation commerciale.
B - Vers d’autres modes d’intervention
Les collectivités territoriales en Rhône-Alpes ont de longue date
exploré d’autres modes d’intervention que celui des aides directes, en
misant notamment sur l’attractivité des territoires et sur l’innovation.
1 -
L’acquis des grandes collectivités en matière de politiques
économiques innovantes
Dans sa réflexion sur de nouveaux modes d’action économique, la
région Rhône-Alpes a pu s’appuyer sur une tradition consistant à
rapprocher des mondes distincts. Il existe ainsi à Lyon une "gouvernance
économique" associant milieux économiques et collectivités locales, et à
Grenoble une tradition d’association entre l’université, le monde de la
recherche et l’industrie. La région elle-même a développé depuis de
nombreuses années des actions visant à décloisonner les entreprises.
88
COUR DES COMPTES
a)
Une gouvernance économique concertée : le dispositif « Grand
Lyon, l’esprit d’entreprise »
Avec une certaine similitude par rapport au positionnement de la
Région dans le cadre du schéma régional de développement économique,
le Grand Lyon se définit non seulement comme acteur principal, mais
surtout comme coordonnateur, mettant en oeuvre une « ingénierie de
partenariat » pour mettre en réseau les différents acteurs et favoriser leur
synergie.
Ce partenariat avec l’ensemble des acteurs publics et privés de
l’agglomération vise à créer un cadre favorable au développement
économique plutôt qu’à intervenir sous forme d’aides, et constitue une
véritable gouvernance économique locale, avec notamment le dispositif
« Grand Lyon, l’esprit d’entreprise », institué en 2003. Les principaux
partenaires du Grand Lyon sont la chambre de commerce et d’industrie de
Lyon, la chambre des métiers, le MEDEF et la CGPME.
Traduisant l’ambition de l’agglomération lyonnaise d’être présente
sur la scène internationale et notamment dans les quinze premières
métropoles européennes, « Grand Lyon l’esprit d’entreprise » fédère
autour des cinq partenaires initiaux une centaine d’acteurs économiques.
Développé dans ce cadre, « Lyon Ville de l’entrepreneuriat » constitue un
dispositif unique en France en matière de création et de transmission
d’entreprises, associant les vingt-deux principaux partenaires et acteurs de
la création, de l’accompagnement et de la reprise d’entreprises. Ainsi,
quels que soient l’organisme ou le site Internet auxquels les créateurs
d’entreprises s’adressent, ils se voient offrir les mêmes services de
proximité, en matière de financement ou d’actions spécifiques à la
reprise-transmission d’entreprise.
b)
La spécificité iséroise : des interventions financières puissantes
ciblées sur une filière d’excellence
Le département de l’Isère s’est impliqué dans une stratégie globale
de développement économique s’appuyant fortement sur un socle
scientifique et une filière microélectronique, avec environ 8 000 emplois
répartis entre plusieurs grandes entreprises et de nombreuses « jeunes
pousses » industrielles. La communauté d’agglomération grenobloise et la
ville de Grenoble se sont également engagées dans cette voie, quoique
dans une moindre mesure.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
89
Face à la rapidité des évolutions technologiques, les acteurs de la
microélectronique du bassin grenoblois se sont mobilisés au début des
années 2000 autour d’un projet fédérateur, Minatec, qui regroupe
notamment une plateforme d’enseignement, une plateforme de recherche
(CEA, Institut national polytechnique de Grenoble, CNRS et université
Joseph Fourier), et une plateforme de valorisation industrielle, destinée à
accueillir des « jeunes pousses » industrielles dans leur phase de
croissance.
Parmi les financeurs du projet, et notamment les collectivités
territoriales potentiellement intéressées pour un total de 82 M€, le
département de l’Isère tient une place particulière. Son rôle de direction
du comité de pilotage du projet et la mission de maîtrise d’ouvrage qui lui
a été confiée l’ont conduit à s’engager largement au-delà de sa
participation financière (39 M€) puisqu’il a avancé environ 60 M€ pour le
compte des autres opérateurs.
L’effort du département en faveur de cette filière s’est également
concrétisé par un apport d’environ 51 M€ d’aide à l’Alliance
ST Microelectronics
-
Motorola
-
Philips, projet qui, autour du site de
Crolles 2, a mobilisé des aides publiques importantes (543 M€ au total,
dont 395 M€ provenant de l’État et 28,9 M€ de la région Rhône-Alpes).
Les bénéficiaires de ces subventions publiques sont les trois entreprises
de l’Alliance, ainsi que onze entreprises industrielles et vingt et un
laboratoires de recherche, en tant que sous-traitants.
D'autres projets allient, dans la tradition grenobloise, recherche et
industrie, secteurs public et privé. Deux de ces opérations, Biopolis et
Nanobio,
montrent
le
souci
de
l’agglomération
d’affirmer
sa
complémentarité avec l’agglomération lyonnaise, traditionnellement plus
forte qu'elle dans le secteur des biotechnologies.
En outre, le projet Équinoxe est l’illustration du partenariat entre la
communauté
d’agglomération
et
l’entreprise
Schneider
Electric
Industries, par ailleurs chef de file du pôle de compétitivité Minalogic
(solutions miniaturisées intelligentes). Un engagement financier de
7,8 M€ de la communauté d’agglomération a reçu comme contrepartie un
engagement de la société d’investir 49,4 M€ et de maintenir sur son site
environ 900 emplois.
c)
La politique de la région : actions collectives et sectorielles
Le modèle traditionnel d’intervention de la région, hors aides
individualisées aux entreprises, est celui des actions collectives, définies
et subventionnées en partenariat avec l’État.
90
COUR DES COMPTES
Un des principaux programmes d’actions collectives s’intitulait
"Produire au Plus Juste" (PPJ). Il a été interrompu en 2004, et n’a été
remplacé qu’en 2006, avec notamment la création de "Performance
PME". Parallèlement à deux programmes s’analysant eux aussi comme
des actions collectives (Start-PME pour la réflexion stratégique, et PASS-
PME pour le développement commercial), Performance PME constitue le
volet performance industrielle du Programme régional en faveur de la
sous-traitance. Le déploiement de ce programme doit permettre
d’accompagner 2
000 entreprises sur cinq ans.
À l’inverse de ces actions s’appliquant à des entreprises de secteurs
professionnels différents, la région a également mis en place des contrats
sectoriels. Il s’agit de soutiens financiers soit à des centres techniques,
soit à des organisations professionnelles, souvent dans une optique de
décloisonnement d’organismes proches.
En
matière
de
centres
techniques,
cette
logique
de
décloisonnement doit conduire à la mise en place d’une agence régionale
de développement de l’innovation (ARDI), par regroupement de six pôles
et agences existant dans les domaines de la productique, de la mesure, du
design, des matériaux, des biotechnologies et du numérique. Annoncée
depuis plusieurs années par les responsables régionaux, cette ARDI était,
courant 2007, en phase de création, et est inscrite au contrat de projet
2007-2013.
Une action de décloisonnement a également été tentée entre la
branche de l’habillement, industrie rhône-alpine traditionnelle ayant
beaucoup souffert de la concurrence étrangère, et celle des textiles,
branche tirée notamment par les textiles techniques, créneau permettant
d’intégrer davantage de haute technologie. Après deux contrats sectoriels
limités au secteur textile, la région a voulu que le troisième contrat (2003-
2005) intègre la branche de l’habillement. L’exécution de ce contrat s’est
cependant révélée décevante, au point que la région a diligenté un audit
confié à son Inspection générale. Cette formule d’une association avec
l’habillement n’a pas été confirmée pour le quatrième contrat, qui a été
passé avec le seul secteur textile.
2 -
Les « clusters » Rhône-Alpes, anticipation des pôles de
compétitivité
Fort des acquis précités, le tissu économique régional a obtenu la
labellisation par l’État de quinze pôles de compétitivité (soit 83 % des
dossiers présentés par Rhône-Alpes), dans un contexte marqué par
l’adoption par la région d’un modèle très similaire, celui des « clusters ».
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
91
a)
Les "clusters Rhône-Alpes"
A partir de 2003, sous l’impulsion notamment de certains de ses
responsables ou de ceux de la CCI de Lyon, la région Rhône-Alpes a
importé, en particulier de Catalogne, le modèle des "clusters". Il s’agit en
principe d’identifier sur un territoire cohérent une concentration
d’entreprises, grandes et petites, et de centres de formation ou de
recherche, génératrice de synergies en matière d’innovations.
Parallèlement, ce type de réflexion a progressé au sein des services
de l’État et a conduit en 2004 à l’institution de la politique des « pôles de
compétitivité », puis à la labellisation de 67 pôles en 2005. On peut noter
que l’émergence de ces politiques nouvelles n’a pas été le fruit de
programmes spécifiquement prévus au contrat de plan État-Région (2000-
2006), sans que pour autant ceci ait constitué un obstacle à l’innovation.
À partir de 2003, la région a créé des « clusters économiques
Rhône-Alpes », dans les secteurs suivants : aéronautique, éco-énergies,
véhicules roulants, loisirs numériques, industrie de la neige, produits
biologiques, sport - loisir.
En l’absence de toute activité visible de construction d’avions sur
le territoire régional, le cluster aéronautique regroupe en fait des
entreprises de la mécanique, de l’électronique, du plastique ou du textile,
qui
ont
en
commun
de
travailler
comme
sous-traitantes
pour
l’aéronautique et qui ont donc un intérêt à mutualiser leur approche
commerciale et stratégique de leurs donneurs d’ordre. Un cluster
économique Rhône-Alpes résulte ainsi surtout d’une approche de marché,
par opposition aux contrats sectoriels centrés sur la fonction de
production.
b)
Le rôle des collectivités territoriales de niveau infra-régional dans
les pôles de compétitivité : l’exemple de la plasturgie.
Réunissant depuis longtemps, dans un secteur professionnel (la
plasturgie) et sur un territoire bien défini, des entreprises, des centres de
formation et des unités de recherche, la région d’Oyonnax, parfois
surnommée
« plastic vallée
», s’est naturellement portée candidate à un
pôle de compétitivité.
La communauté de communes d’Oyonnax s’est donc associée à
des partenaires publics (syndicat mixte du pôle européen de la plasturgie,
soutenu par le département de l’Ain ; institut national des sciences
appliquées ; commissariat à l’énergie atomique) et privés (industriels,
association du pôle européen de la plasturgie, association Compositec).
92
COUR DES COMPTES
Cinquante projets sur six ans devraient être menés à bien, pour un
coût de 120 M€, la moitié provenant de fonds publics et l’autre moitié de
fonds privés, sur les axes de recherche que sont les matériaux, les
processus de production, les matériaux composites et le « plastique
intelligent ».
c)
La région et les pôles de compétitivité
L’industrie et la recherche rhône-alpines se sont fortement inscrites
dans la démarche des pôles de compétitivité, comme le montrent le
nombre de projets déposés mais surtout de labellisations obtenues (15 sur
18, contre 67 sur 105 au niveau national) ou encore les montants de
crédits d’État attribués à des projets de recherche rhône-alpins, de l’ordre
de deux fois supérieurs à ce qui résulterait de son poids démographique
ou économique.
Six de ces quinze pôles sont plurirégionaux, dont deux qui ont leur
siège en Rhône-Alpes (plasturgie et Viaméca). Les neuf autres sont
purement rhône-alpins : Lyon Urban Trucks and Bus 2015, Arve
Industries, Tennerdis (Énergies renouvelables), Sportaltec (Sports et
loisirs), Imaginove (Loisirs numériques), Techtera (Textiles techniques),
Axelera-Chimie-Environnement, Lyon Biopôle, et Minalogic
(Micro-
nanotechnologies et logiciel). Les trois derniers sont à dimension ou
vocation mondiale. Axelera a été le premier pôle français à expérimenter
des procédures, notamment informatiques, garantissant aux PME le secret
industriel des projets de recherche qu’elles soumettent aux instances de ce
pôle puis à l’échelon national.
Ces pôles de compétitivité ont souvent fait le choix d’une
gouvernance assurée par des acteurs professionnels, entreprises d’un côté
et laboratoires de recherche publique de l’autre. De nombreux acteurs
publics locaux sont membres des pôles mais
a priori
n’interviennent pas
dans la sélection des projets de recherche.
S’agissant des deux pôles mondiaux de la région Rhône-Alpes,
l’engagement public local demeure important : c’est le cas de la
communauté urbaine du Grand Lyon pour Lyon Biopôle, et du conseil
général de l’Isère pour Minalogic, dont le dossier a par ailleurs bénéficié
de l’appui technique de son agence de développement, l’AEPI. À l'instar
de la CCI de Lyon qui a piloté le pôle
"Lyon Urban Trucks and Bus
2015",
les chambres consulaires peuvent également jouer un rôle de
premier plan dans la gouvernance de ces pôles.
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
93
La collectivité régionale n’a pas eu à jouer un rôle moteur dans les
dix-huit candidatures rhône-alpines, qui ont répondu à l'appel à projets du
gouvernement avec un dynamisme se suffisant à lui-même. Cependant,
elle leur a apporté
a posteriori
son soutien, notamment financier,
réorientant sur ces projets 18,4 M€ de crédits et dégageant 12,2 M€
supplémentaires d’autorisations d’engagement au titre de 2006.
Ces orientations rejoignent celles du schéma régional de
développement économique, qui défend l’emploi "de qualité" et de
manière plus générale le secteur de l’industrie. Or, les frontières
traditionnelles entre industrie et services s’estompent.
Un enjeu important bien que peu apparent dans la présentation
habituelle des pôles de compétitivité, est de savoir si leur impact doit être
recherché uniquement dans les secteurs de haute technologie, ou au
contraire si ces pôles doivent être incités à entraîner l’ensemble du tissu
industriel, y compris dans ses composantes les plus traditionnelles, et
comment une telle diffusion de leurs effets serait possible.
En effet, la logique d’innovation par l’interaction entre recherche
et industrie, qui sous-tend les pôles de compétitivité, s’incarne le plus
souvent dans de jeunes PME développant des technologies de pointe.
Ceci pourrait générer des désillusions par rapport au fait que les pôles de
compétitivité sont souvent présentés comme permettant d'associer
grandes entreprises et PME, sans autre précision, ce qui conduit à penser
que des entreprises industrielles plus classiques pourraient bénéficier, par
leur participation à un pôle, des avantages résultant de coopérations avec
de grandes entreprises leaders sur leur marché, ou des laboratoires de
recherche publique.
L'observation des pôles de compétitivité rhône-alpins montre
cependant que l'écueil d'un modèle de développement endogame entre
grandes entreprises, « jeunes pousses » industrielles et laboratoires de
recherche de haute technologie, n'est pas insurmontable. En effet, le
succès inattendu des pôles de compétitivité au plan national s’est traduit
par l’émergence de réseaux de PME constituant par elles-mêmes un vrai
tissu industriel, dont le pôle "Arve Industries Haute-Savoie Mont Blanc"
est sans doute l’un des meilleurs exemples. L’économie haut savoyarde
est justement engagée, à travers notamment l’association « Thésame »
(laquelle réunit l’agence de développement du département, l’Université
de
Savoie et
deux
centres
techniques)
dans
une
politique
de
développement de la mécatronique, visant à établir des ponts entre la
mécanique de précision telle que le décolletage, spécialité traditionnelle
de la vallée de l’Arve, et les technologies de l’électronique et de la
mesure.
94
COUR DES COMPTES
Ces dernières sont également au coeur du pôle Minalogic, labellisé
« pôle mondial » dont on aurait pu craindre qu’il se contente de donner un
nouvel élan à la tradition grenobloise d’association entre université,
recherche et industrie. Il s’est cependant révélé soucieux de son
environnement plus lointain, en intégrant les thématiques de la
mécatronique, de la "minaoptique" autour de Saint-Étienne et même des
textiles techniques, dans la perspective futuriste des textiles dits
« intelligents ».
La région demande pour sa part, dans les conventions de soutien
dont elle est signataire, que soient développées des coopérations entre
pôles, qu’elle a définies au préalable. Il s’agit d’un enjeu précis, celui de
la capacité d’entraînement, sur l’ensemble du tissu industriel rhône-alpin,
de pôles de compétitivité exposés au risque de ne se développer qu'entre
spécialistes des hautes technologies.
Face à cet enjeu, les incitations financières mises en oeuvre par les
collectivités publiques, et notamment par la région, peuvent soit viser à
favoriser un tel effet d’entraînement, soit se caractériser par un
engagement plus massif. Cette question se pose avec une acuité nouvelle
dans une logique d’aménagement du territoire.
En effet, le « dézonage » du Fonds européen de développement
régional fait perdre aux territoires les plus fragiles l’exclusivité dont ils
bénéficiaient
pour
l’attribution
de
cette
ressource.
Quant
aux
interventions de l’État au titre du nouveau contrat de projet État-Région,
le fait qu’elles soient d’une part centrées sur la recherche, l’innovation et
les pôles de compétitivité, d’autre part sur une action de soutien
spécifique à la seule agglomération stéphanoise, pose à la région la
question de savoir si une politique principalement tournée vers les
nouvelles technologies est susceptible, à elle seule, de garantir le
développement économique équilibré de l’ensemble du territoire régional.
On peut par exemple se demander si, en complément des
connections sectorielles évoquées précédemment entre Minalogic et
certains textiles techniques, la mécatronique savoyarde ou l’optique
(spécialité stéphanoise la plus sophistiquée), d’autres effets d’entraîne-
ment sont susceptibles d’apparaître au bénéfice de spécialités textiles ou
mécaniques plus traditionnelles, ou si une telle perspective est peu
probable. Même s’ils ont pu bénéficier en 2006-2007 d’une embellie
conjoncturelle, l’avenir de ces secteurs traditionnels reste incertain. Les
bassins d’emplois concernés sont souvent mono-industriels, et ne se
limitent pas à l’agglomération de Saint-Étienne visée par le contrat de
projet État-Région. Certains de ces bassins, comme la Matheysine,
bénéficient de l’appui de leur département (en l’espèce, l’Isère), mais un
ANNEXE I – TRAVAUX DE LA CRC
DE RHONE-ALPES
95
tel soutien est plus difficile à envisager quand il s’agit de départements
moins riches, ce qui peut justifier l’appel à la solidarité régionale.
En dépit du succès de sa politique de soutien aux nouvelles
technologies et à la constitution de « clusters », et plus récemment de
pôles de compétitivité, la collectivité régionale se trouve donc dans
l’obligation de conduire de nouvelles réflexions sur sa politique d’aide au
développement économique, compte tenu des données propres au tissu
économique de Rhône-Alpes, mais aussi de la position des autres acteurs
publics que sont l’État, les autres collectivités territoriales ou encore
l’Union européenne, et compte tenu enfin de ses propres contraintes
budgétaires.
***
96
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL REGIONAL
DE RHONE-ALPES
Je souhaite vous faire part des observations que ce document appelle
de ma part au regard des actions de développement économique en Rhône-
Alpes.
Concernant la question relative à la modification des relations entre
la Région et les collectivités territoriales, suite à l’adoption de la loi du
13 Août 2004, je vous confirme que, du point de vue du conseil régional,
l’impact en fut profond mais inabouti. En effet, la capacité à élaborer, en
partenariat
avec
les
autres
collectivités,
un
schéma
régional
de
développement économique a conduit à la fois à une réflexion sur les
dispositifs existants, à une construction commune du schéma (à travers plus
de 30 réunions territoriales) et à une réelle révision des politiques régionales
et départementales, pour tenir compte des axes stratégiques dégagés en
commun. Mais, en définitive, cette démarche est restée inaboutie car elle
aurait dû se traduire par un réel transfert de compétences et surtout de
moyens entre l’Etat et les collectivités, transfert qui n’a pas eu lieu à ce jour.
A la question de savoir si les interventions des collectivités régionales
se limitent à la distribution d’aides aux entreprises la réponse est clairement
non et je vais l’illustrer en corrigeant certaines informations contenues dans
votre rapport.
Tout d’abord concernant la renonciation à certaines aides d’Etat,
celle-ci était principalement dictée par le souhait de ne pas avoir à gérer des
dispositifs en voie d’extinction en matière de création d’entreprise, qui
auraient mobilisé les services du Conseil Régional en faveur d’une multitude
de bénéficiaires de petites subventions. En l’espèce, il ne s’agissait pas de
renoncer à notre rôle de coordinateur des interventions économiques, mais
de ne pas servir de sous-traitant administratif à l’Etat, donc de ne pas
assumer à court terme la responsabilité politique de la disparition de
certains systèmes d’aides. Ainsi comme nous l’anticipions, l’Etat n’a prévu
aucun crédit déconcentré au budget 2007 pour que les DRIRE attribuent des
aides individuelles. Si la Région avait demandé l’attribution des aides
directes,
elle
se
retrouverait
aujourd’hui
avec
une
compétence
supplémentaire et des crédits transférés existants. Je rappelle que le projet de
convention Etat-Région sur la délégation des aides prévoyait de doter la
Région du financement équivalent à ce que la loi de finances avait inscrit
pour l’année « N » au titre des aides déconcentrées dans les DRIRE.
RÉPONSE DE LA RÉGION RHONE-ALPES
97
C’est pourquoi la Cour interprète mal notre rédaction du SRDE.
Lorsqu’on y écrit : « les priorités de l’Etat devraient s’éloigner de
l’attribution des aides… », ce n’est pas une invitation faite à l’Etat de se
retirer des aides directes, mais bien une hypothèse sur l’attitude future de
l’Etat qui s’est malheureusement vérifiée.
Au sujet des conventionnements avec les Départements sur les aides
directes, il faut tout d’abord souligner notre volonté de limiter les dispositifs
de soutien individuel à cette maille territoriale qui seule permet d’avoir la
capacité d’instruction et d’analyse nécessaire au traitement d’une demande
sur cette thématique, qu’il s’agisse d’entreprises en développement ou en
difficulté. Si les propositions des Départements ont été approuvées par la
Région, c’est parce qu’il y a eu un travail préalable dans le cadre de la
préparation du SRDE pour expliquer notre objectif de décroiser les
financements sur un même projet, et de jouer la complémentarité de nos
interventions
respectives
(les
aides
aux
créateurs
d’entreprise
et
investissements immatériels pour la Région, les aides à l’investissement
matériel pour les Départements par exemple…). L’absence de refus est le
signe de la qualité du travail de concertation préalable. L’examen de la
situation actuelle est d’ailleurs plutôt positif. De moins en moins de dossiers
d’entreprises sont enchevêtrés dans des systèmes de financements croisés, en
dehors de l’immobilier d’entreprise où la loi n’a donné aucune compétence à
la Région pour organiser les aides. Sur cette thématique, la Région qui vient
par ailleurs de réorganiser son intervention pour s’adapter aux règles et
dispositifs existants.
Concernant la capacité d’expertise la remarque formulée, au sujet du
maintien de celle-ci au sein des services de l’Etat, est tout à fait justifiée. On
peut d’ailleurs s’étonner que la Région soit chargée de définir la stratégie de
développement économique sans que cette capacité d’analyse soit transférée.
C’est pourquoi le Conseil Régional a souhaité se doter d’une Direction de la
Prospective dont le rôle est précisément de fournir les éléments d’analyse
indispensables à la construction des divers documents stratégiques
participant à l’élaboration des politiques régionales.
Sur les dispositifs de soutien aux pôles de compétitivité, il convient de
compléter le rapport en soulignant que la Région, parfois aux côtés d’autres
collectivités, a très fortement appuyé la création de certains d’entre eux dans
une intervention qui n’a pas été qu’à posteriori. C’est tout d’abord à travers
la constitution préalable de certains réseaux d’acteurs que les dynamiques de
regroupement se sont mises en place. Ainsi le pôle « Imaginov » n’aurait pas
vu le jour sans la constitution du cluster économique du même nom, les deux
ayant depuis fusionné au niveau de l’animation. Il en va de même du cluster
« Automotiv » et de « Lyon Urban Truck and Bus ». Concernant le pôle «
Tennerdis », c’est encore plus vrai puisque la Région a financé directement
le dossier de candidature du pôle.
98
COUR DES COMPTES
Il convient aussi de souligner le rôle très important des annexes
régionales aux contrats cadre des pôles de compétitivité qui fixe à la fois des
objectifs ambitieux en matière d’aménagement du territoire, de diffusion
technologique de création d’emplois, de partenariat et d’implication des
acteurs. Ces objectifs sont d’ailleurs suivis par une commission spécifique
qui regroupe élus régionaux, partenaires sociaux et acteurs économiques. Il
faut enfin souligner la mécanique complexe de financement directe aux
projets R&D des pôles de compétitivité, où l’ingénierie du financement est du
ressort de l’Etat qui a mis en place le dispositif de financement sans
concertation avec la Région et les autres collectivités. L’Etat les sollicite
pourtant pour une part de plus en plus importante du coût des projets tout en
se réservant l’exclusivité des décisions en matière de labellisation de projet
et de pôle.
Concernant les opérations citées en exemple au titre de certaines
collectivités, il faut souligner que la plupart d’entre elles ont fait l’objet
d’une véritable co-construction et d’un co-financement par l’institution
régionale. C’est le cas de « Lyon Ville de l’Entreprenariat » qui figure au
Contrat d’agglomération et bénéficie d’une subvention importante au titre de
notre politique d’aide à la création d’entreprise; C’est aussi le cas des
opérations foncières de Saint-Etienne Métropole qui trouvent un financement
régional à travers les activités d’EPORA où par certains dispositif fonciers
de la Région.
Il peut enfin sembler étonnant que le rapport ne mentionne pas la
structuration en partenariat avec les collectivités locales des dispositifs de
soutien à la création d’entreprise, à travers les plates-formes d’initiative
locale et un ensemble de « portes d’entrée » qui couvre l’ensemble du
territoire régional. La mise en place de ce dispositif de proximité a
singulièrement renforcé, au travers de nouveaux mécanismes de prêts
d’honneur, d’avances remboursables nos résultats en matière de création
d’entreprise et le rôle de coordinateur opérationnel de la Région sur ce sujet.
De la même façon l’ensemble des outils sectoriels (cluster, contrat,
programme PME) n’est abordé que très rapidement alors qu’il touche
plusieurs milliers d’entreprises dans des opérations de soutien indirect
illustrant l’efficacité des dispositifs collectifs face aux aides individuelles. Il
en va aussi des opérations de soutien à l’internationalisation des entreprises
où rien n’est dit en dehors d’ERAI, alors que nos opérations en faveur du
recrutement de cadre export, ou notre soutien aux actions collectives,
illustrent encore une fois sur ce sujet notre rôle de coordination au-delà de la
distribution d’aide individuelle.
ANNEXES II – LISTE DES RAPPORTS
99
Annexe 2 - Liste des rapports d’observations
définitives exploités dans le cadre de l’enquête
38
Chambre
régionale
Nom organisme
Date
Région de Brumath (CC de la)
01/04/2003
Val d’Argent (CC du)
19/07/2005
Alsace
Sélestat (CC de)
19/10/2005
Région Aquitaine
13/01/2003
Département de Lot-et-Garonne
04/07/2006
Seignanx (CC du)
17/03/2005
Aquitaine
Département de la Dordogne
02/08/2006
Département de l'Allier
12/02/2003
Commune de Billom
19/11/2003
Département du Cantal
05/04/2004
Pays de Massiac (CC du)
16/06/2005
Commune de Brioude
03/11/2005
Département du Puy-de-Dôme
12/12/2005
Comité d'expansion économique du Puy-de-
Dôme
12/12/2005
Auvergne
Département de la Haute-Loire
16/06/2006
Caen-la-Mer (CA de)
23/04/2004
Commune de Livarot
20/07/2005
CRCI Basse-Normandie
07/10/2005
Commune de Landelles-et-Coupigny
06/12/2005
Région Basse Normandie
18/05/2006
Commune de Bayeux
22/06/2006
Basse
Normandie
CCI Alençon
03/07/2006
38) ne sont pas cités dans cette liste les rapports de la chambre régionale des comptes
de Rhône-Alpes exploités dans le cadre de la rédaction de l’annexe 1 « Les actions de
développement économique dans la région Rhône-Alpes. »
100
COUR DES COMPTES
Commune de Villeneuve-sur-Yonne
28/01/2003
SEM ADECO 71
29/04/2004
Commune de Saint-Fargeau
30/09/2004
Région Bourgogne
15/10/2004
Commune de Trambly
04/03/2005
Val de Loire-Val de Nièvre (CC du)
25/11/2005
Département de la Côte d'Or
25/11/2005
Bourgogne
Commune d'Autun
02/06/2006
Pays de la Roche aux Fées (CC du)
12/11/2003
Département d'Ille-et-Vilaine
24/11/2003
Pays de Saint-Malo (CA du)
29/06/2004
Pays de Pontivy
16/11/2005
Commune de Perros-Guirec
05/01/2006
Bretagne
Commune de Dol de Bretagne
10/03/2006
Pays d'Issoudun (CC du)
24/10/2003
Commune d'Issoudun
26/03/2004
Commune de Dreux
29/06/2004
Commune d'Avoine
29/07/2004
Commune de Vernouillet
10/09/2004
Commune d'Orléans
14/01/2005
Agglomération orléanaise
02/08/2005
Comité de développement économique
d'Eure-et-Loir (CODEL)
09/11/2005
Commune de Luisant
29/11/2005
L’Orée du Perche (CC)
27/03/2006
CA castelroussine
27/03/2006
Département du Loir-et-Cher
10/04/2006
Centre
Agence de développement et de promotion
de la région Centre : CENTRECO
03/08/2006
ANNEXES II – LISTE DES RAPPORTS
101
Commune Les Mazures
19/05/2003
Deux vallées du canton de Fismes (CC des)
17/05/2004
Commune de Fismes
02/06/2004
Epernay-Pays-de-Champagne (CC)
23/05/2005
Commune de Reims
04/07/2005
Commune de Chooz
28/02/2006
Champagne
Ardenne
Commune de Troyes
30/05/2006
Corse
Commune de Corte
20/11/2003
Commune d'Arinthod
16/04/2003
Département du Jura
09/12/2003
Commune de Valentigney
04/03/2004
Département du Doubs
12/10/2005
Pays de Montbéliard (CAPM)
15/12/2005
Franche-Comté
Agence de développement économique et
touristique du Doubs (ADED)
14/03/2006
Région Martinique
22/04/2004
Commune Le Moule
31/01/2005
Centre Littoral (Guyane)
07/10/2005
Guadeloupe
Martinique
Guyane
Région Guadeloupe
19/12/2005
Région Haute-Normandie
16/10/2003
Haute
Normandie
CCI de Dieppe
14/06/2007
Commune de La Courneuve
21/01/2005
Commune de Paris
20/06/2005
Commune de Bois-Colombes
02/08/2005
Commune d'Aulnay-sous-Bois
12/04/2006
Commune de Rambouillet
01/06/2006
Ile de France
Région Ile de France
06/02/2007
102
COUR DES COMPTES
SAEM’Alès
17/05/2004
SIVOM de la région du Pic Saint Loup
31/12/2004
Sud-Roussillon (CC)
11/05/2005
Université Montpellier II
30/05/2005
Montpellier-Agglomération
14/10/2005
Commune de Mèze
17/10/2005
Pays de Lunel (CC du)
30/11/2005
Languedoc
Roussillon
Région Languedoc-Roussillon
17/10/2006
Commune de Limoges
11/06/2003
Commune de Saint-Léonard-de-Noblat
29/11/2004
Pays de Boussac (CC du)
29/11/2004
Commune d'Allassac
01/03/2005
Pays de Guéret Saint-Vaury (CCdu)
13/12/2005
Limousin
Région Limousin
26/10/2006
Commune de Lunéville
18/07/2003
Agglomération de Longwy (CC de l')
19/12/2003
Fénétrange (CC de)
02/02/2004
Commune de Fénétrange
02/02/2004
Pays de Neufchâteau (CC du)
27/04/2004
Pays d'Etain CC du)
17/06/2004
Centre Mosellan (CC du)
22/06/2004
Saulnois (CC du)
22/06/2004
Comité d'Aménagement, de Promotion et
d'Expansion des Vosges (CAPEV)
06/08/2004
Moselle et Madon (CC de)
10/08/2004
Bar-le-Duc (CC de)
10/08/2004
Pays de l’Orne (CC du)
30/08/2004
Comité d'Aménagement, de Promotion et
d'Expansion de Meurthe-et-Moselle
(CAPEMM)
06/09/2004
Lorraine
Association VALORIS Lorraine
17/09/2004
ANNEXES II – LISTE DES RAPPORTS
103
Comité d'aménagement et d'expansion de la
Moselle (CAPEM)
17/09/2004
Département des Vosges
23/11/2004
Vallée de la Plaine (CC de la)
12/01/2005
Sarreguemines Confluences (CA)
24/01/2005
Commune de Rambervillers
27/01/2005
Commune de Yutz
04/05/2005
CCI de la Moselle
25/05/2005
Val de Fensch (CA du)
31/05/2005
SEML Metz Technopôle
09/08/2005
CRCI Lorraine
26/08/2005
Région Lorraine
02/03/2006
Pays Orne-Moselle (CC du)
11/05/2006
Commune de Woippy
07/06/2006
CCI de la Meuse
22/06/2006
Freyming Merlebach (CC de)
20/07/2006
Lorraine
Institut Lorrain de Participation
19/12/2006
Cité des insectes (Micropolis)
24/01/2003
SM Centre Jean Henri Fabre (Micropolis)
24/01/2003
Commune de Villemur-sur-Tarn
10/04/2003
Villefranche-de-Rouergue (CC de)
15/07/2003
Agence de développement économique du
Gers (ADE)
27/11/2003
SICOVAL (CA du)
12/01/2004
Commune de Decazeville
23/01/2004
SEM 81
08/06/2004
Syndicat de pays Saint-Affricain
29/06/2004
Commune de Lourdes
11/10/2004
Commune de Launaguet
21/10/2004
Haute-Bigorre (CC de la)
05/08/2005
Midi-Pyrénées
Syndicat intercommunal de la Découverte (SID)
15/03/2006
104
COUR DES COMPTES
Département du Pas-de-Calais
23/05/2003
Commune de Gravelines
08/03/2004
Commune de Marchienne
02/11/2004
Cambrai (CAC)
22/09/2005
Nord Pas-de-
Calais
Département du Nord
17/10/2005
Commune de Saint-Sylvain-d'Anjou
22/05/2003
Commune de Ambrières-les-Vallées
17/06/2003
Guémené-Penfao (CC de)
21/07/2004
Grand Lieu (CC de)
20/01/2005
Commune de Luçon
22/02/2005
Régie départementale des passages d’eau de la
Vendée (RDEVP)
13/05/2005
Côte de Lumière (CC)
13/06/2005
Pays de Loire
Syndicat de Pays Haut-Anjou Segréen
02/09/2005
Région de Compiègne (CC de la)
18/06/2004
Association Régionale d'Exportation (AREX)
05/11/2004
Soissonnais (CA du)
06/01/2006
Picardie
Département de la Somme
23/07/2007
Ruffec (CC de)
16/01/2004
Syndicat Mixte du Pôle de l'Image
(Angoulême)
30/07/2004
Delta Sèvre Argent (CC)
13/08/2004
Commune de La Rochelle
23/09/2004
Grand Angoulême (COMAGA)
28/02/2005
Canton Saint-Jean d'Angély (CC)
28/04/2005
Syndicat mixte du Pays des Vals de Saintonge
28/04/2005
Région Poitou-Charentes
07/06/2005
Commune de Rochefort
08/11/2005
Poitou
Charentes
Université de Poitiers
05/02/2006
Pays d'Aix en Provence (CA du)
13/02/2003
Département des Hautes-Alpes
02/04/2003
Région Provence Alpes Côte d'Azur
17/05/2005
Provence Alpes
Département du Var
01/03/2006
ANNEXES II – LISTE DES RAPPORTS
105
Région Réunion
30/09/2003
Sud (CC du)
13/02/2004
Territoire de la côte ouest
27/10/2004
Commune de Saint-Leu
12/07/2005
Commune de Saint-Denis (Réunion)
28/09/2005
Communauté intercommunale des villes
solidaires (CIVIS)
28/04/2006
Réunion
Association de gestion pour l'insertion et le
développement économique et social urbain
(AGIDESU)
12/07/2006
Commune de Pont d’Ain
02/06/2003
Commune de Privas
24/07/2003
Bassin d'Annonay (CC du)
12/08/2003
Département de la Savoie
20/08/2003
Commune de Saint-Martin-de-Belleville
08/04/2004
Commune de Crest
20/04/2004
Commune de Saint-Paul-Trois-Châteaux
15/07/2004
Université Claude Bernard - Lyon 1
13/04/2005
CCI de Saint-Etienne-Montbrison
23/05/2005
Syndicat départemental d'équipement de
l'Ardèche (SEDA)
12/08/2005
Le Grand Roanne (CA)
31/08/2005
Commune d'Aix-les-Bains
19/10/2005
Commune de Publier
07/03/2006
Commune de Saint-Priest
12/05/2006
Association pour le développement
économique de la région lyonnaise (ADERLY)
21/06/2006
Comité d'expansion économique de la Loire
03/08/2006
Département de l'Isère
30/08/2006
Département de l'Ain
06/09/2006
Rhône Alpes
Pays viennois (CA du)
13/09/2006
106
COUR DES COMPTES
Annexe 3 - Echantillonnage des organismes
contrôlés
Type d’organisme
Nombre de rapports
Régions
13
Départements
20
EPCI
57
Syndicats intercommunaux
3
Syndicats mixtes
5
Communes
61
Chambres de commerce et
d’industrie
7
Associations
13
Société Anonyme
1
SEM
5
Régie
1
Universités
3
Total
189
LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES
107
Liste des sigles et acronymes
ADEME
Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie
ADIE
Association pour le droit à l'initiative économique
ADIELOR
Agence pour le Développement des Investissements Extérieurs
en Lorraine
ADIMAC
Association pour le Développement économique et Industriel
du Massif Central et du Centre
Alizé
Actions locales interentreprises en zone d'emploi
ANVAR
Agence nationale de la valorisation de la recherche
CCI
Chambre de commerce et d'industrie
CGCT
Code général des collectivités territoriales
CSRN
Cadre de référence stratégique national
DATAR
Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale
DDTEFP
Direction départementale du travail de l'emploi et de la
formation professionnelle
DIACT
Délégation interministérielle à l'aménagement et à la
compétitivité des territoires
EDEN
Encouragement au développement des entreprises nouvelles
EPST
Etablissement public à caractère scientifique et technologique
FEDER
Fonds européen de développement
FSE
Fonds social européen
MIRE
Mission régionale de revitalisation économique
PASE
Projet d'action stratégique de l'Etat
PASED
Projet d'action stratégique de l'Etat en Département
PASER
Projet d'action stratégique de l'Etat en Région
PAT
Prime à l'aménagement du territoire
PFIL
Plate-forme d'initiative locale
PME
Petite et moyenne entreprise
PRCE
Prime régionale à la création d'entreprise
PRCEA
Prime Régionale à la Création d'Entreprise Artisanale
PRE
Prime régionale à l'emploi
SIEG
Service d'intérêt économique général (notion européenne)
SRDE
Schéma régional de développement économique
TPE
Très petite entreprise
ZFU
Zone franche urbaine
Liste des rapports publiés par la Cour des
comptes depuis le 1
er
janvier 2005
* Rapport public annuel (février 2005)
* Rapport public annuel (février 2006)
* Rapport public annuel (février 2007)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2004 :
Rapport sur les résultats et la gestion budgétaire (juin 2005)
Rapport sur les comptes de l’Etat (juin 2005)
Rapport préliminaire au débat d’orientation budgétaire (juin 2005)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2005 :
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2005 (mai 2006)
Les comptes de l’Etat – Exercice 2005 (mai 2006)
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques –
préliminaire au débat d’orientation budgétaire (juin 2006)
* Rapports sur l’exécution des lois de finances pour l’année 2006 :
Résultats et gestion budgétaire de l’Etat – Exercice 2006 (mai 2007)
La certification des comptes de l’Etat – Exercice 2006 (mai 2007)
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
(juin 2007)
* Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale (septembre 2005)
* Rapport sur l’application de la loi de financement de la sécurité
sociale (septembre 2006)
* Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité sociale
- exercice 2006 (juin 2007)
LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES
109
Rapports publics thématiques :
Le démantèlement des installations nucléaires et la gestion des déchets
radioactifs (janvier 2005)
La Banque de France (mars 2005)
Les transports publics urbains (avril 2005)
La gestion de la recherche dans les universités (octobre 2005)
Les personnes âgées dépendantes (novembre 2005)
L’intercommunalité en France (novembre 2005)
Garde et réinsertion - la gestion des prisons (janvier 2006)
L'évolution de l'assurance chômage : de l'indemnisation à l'aide au
retour à l'emploi (mars 2006)
Les personnels des établissements publics de santé (avril 2006)
Les ports français face aux mutations du transport maritime : l’urgence
de l’action (juillet 2006)
La carte universitaire d’Île-de-France : une recomposition nécessaire
(décembre 2006)
L’aide française aux victimes du tsunami du 26 décembre 2004
(décembre 2006)
Les personnes sans domicile (mars 2007)
La gestion de la recherche publique en sciences du vivant (mars 2007)
Les institutions sociales du personnel des industries électriques et
gazières (avril 2007)
* Contrôle des organismes faisant appel à la générosité publique
Association pour la Recherche sur le Cancer - ARC (février 2005)
Fondation « Abbé Pierre pour le logement des défavorisés » (juin 2006)
Association « France Alzheimer et maladies apparentées » (juin 2006)
Association « Le Secours Catholique » (mars 2007)
Fondation « Aide à Toute détresse » - ATD Quart Monde (mars 2007)
La qualité de l’information financière communiquée aux donateurs par
les organismes faisant appel à la générosité publique (octobre 2007)
La ligue nationale contre le cancer (octobre 2007)