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ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LE DROIT
AU LOGEMENT
OPPOSABLE
Une priorité à restaurer
Rapport public thématique
Synthèse
Janvier 2022
2
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations, des organismes et des collectivités
concernés figurent à la suite du rapport
.
3
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Sommaire
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Une effectivité partielle, avec
une dégradation continue en Île-de-France
7
2
Un mise en cause croissante
de la responsabilité de l’État
9
3
Un enlisement à bas bruit résultant
d’une conjonction de facteurs
11
Recommandations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
5
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Introduction
Instauré par la loi du 5 mars 2007, le droit au logement opposable (Dalo)
constitue pour les requérants un recours ultime face à des difficultés graves de
logement . Il vise à confier à l’État l’obligation de loger ou de reloger de façon
prioritaire et urgente les ménages qui y sont reconnus éligibles . Si l’État est seul
débiteur de ce droit, les collectivités territoriales, les bailleurs sociaux et Action
Logement ont l’obligation de contribuer à l’effort de relogement .
Sept critères sont susceptibles de conférer l’éligibilité au Dalo :
• l’absence de domicile ;
• la menace d’une expulsion sans solution de relogement ;
• l’hébergement dans une structure d’hébergement ou une résidence hôtelière à
vocation sociale de façon continue depuis plus de six mois, ou dans un logement
de transition ou un logement foyer depuis plus de 18 mois ;
• le fait d’être logé dans des locaux impropres à l’habitation ou présentant un
caractère insalubre et dangereux ;
• le fait d’être logé dans un logement non décent, à condition d’avoir à charge
au moins un enfant mineur ou une personne handicapée ou de présenter soi-
même un handicap ;
• le fait d’être logé dans un logement suroccupé, à condition d’avoir à charge
au moins un enfant mineur ou une personne handicapée ou de présenter soi-
même un handicap ;
• le fait d’avoir demandé un logement social depuis un délai « anormalement
long » .
L’offre de logement formulée par l’État doit être « adaptée » au sens de la loi,
c’est-à-dire répondre aux besoins et caractéristiques des ménages . Lorsque l’État
est défaillant, sa responsabilité peut être engagée, y compris au plan indemnitaire .
7
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
1
Une effectivité partielle,
avec une dégradation continue
en Île-de-France
Unique en Europe et dans le monde, le
Dalo, depuis son entrée en vigueur le
1
er
 janvier 2008, a enregistré un nombre
croissant de sollicitations . Jusqu’à fin
2020, près de 1,3 million de demandes
de reconnaissance d’éligibilité au
Dalo ont été déposées auprès des
commissions départementales de
médiation (Comed) chargées de les
instruire .
Plus de 60 % des demandes sur la
période ont été enregistrées en Île-de-
France . Elles représentent aujourd’hui
2,7 % du nombre total de demandes
de logement social (4,5 % en 2015) .
Cette évolution traduit l’amplification
de la tension sur la demande de
logements sociaux . Même si le nombre
de demandeurs du Dalo augmente, leur
part relative par rapport à la demande
globale de logement social diminue .
2020
2019
2018
2017
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2008
0
20 000
40 000
60 000
80 000
100 000
120 000
52 853
58 874
56 180
53 273
51 240
49 794
49 092
45 339
42 327
38 864
41 756
41 066
39 326
90 532
99 787
94 685
90 220
86 260
86 050
86 148
80 897
71 859
60 832
61 322
61 759
59 607
Île-de-France
France
Graphique n° 1 : évolution du nombre de demandes de reconnaissance
au titre du Dalo entre 2008 et 2020
Source : Cour des comptes d’après les données de la DHUP. Un même ménage
peut déposer plusieurs demandes
8
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Le pourcentage de décisions favorables
rendues par les commissions de
médiation était, en 2019, de 34,5 %
contre 25,0 % en 2008 . Les variations
observées entre départements ne
peuvent seulement s’expliquer par la
différence des situations individuelles et
du parc locatif . Elles résultent aussi de
pratiques disparates des commissions,
ce qui soulève le problème de l’absence
d’uniformité dans l’application du Dalo .
Être reconnu éligible au Dalo ne
représente pour un ménage qu’une
première étape . L’effectivité de ce droit
acquis réside dans la capacité de l’État,
seul débiteur, à proposer rapidement
une offre de logement ou de relogement
adaptée aux besoins de ces ménages .
Le bilan actualisé depuis la dernière
enquête de la Cour n’est toujours pas à
la hauteur de l’engagement .
Entre 2008 et 2020, 333 724 ménages
ont été reconnus éligibles à un
relogement urgent et prioritaire au titre
du Dalo, dont 62,8 % ont bénéficié d’une
offre adaptée de relogement proposée
par l’État . Toutefois, 78 016 d’entre eux,
soit 23,4 % du total, n’avaient pas encore
été relogés fin février 2021 . La situation
s’est dégradée depuis 2015 : on comptait
alors 60 000 ménages en attente d’une
offre . Elle est particulièrement difficile
en Île-de-France, où près d’un tiers des
65 000 ménages reconnus éligibles au
Dalo, depuis 2008, est toujours en attente
d’une offre de relogement par l’État .
Le relogement s’effectue presque
exclusivement dans le parc social, alors
même que le parc privé conventionné
peut également être mobilisé .
À l’échelle nationale, moins de la moitié
des ménages reconnus éligibles au
Dalo depuis 2008 a été relogée dans les
délais fixés par la loi . Ces délais moyens
sont contradictoires avec l’idée d’un
relogement prioritaire et urgent .
Une effectivité partielle, avec une dégradation
continue en Île-de-France
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
40 000
35 000
30 000
25 000
20 000
15 000
10 000
5 000
0
Taux de reconnaissance
Nombre de décisions favorables
14 888
19 352
19 960
20 255
24 521
28 047
25 597
25 241
27 721
32 009
34 451
29 191
25,0
31,3
32,5
33,3
34,1
40,1
32,6
29,7
29,3
30,7
33,8
34,5
32,2
Graphique n° 2 : évolution du nombre de décisions favorables
et du taux de reconnaissance
Source : Cour des comptes d’après les données InfoDaLo communiquées par
la DHUP. Données extraites au 24 février 2021, incomplètes, pour les années
2008, 2009, 2010, 2011 et 2012 pour les Bouches-du-Rhône. Lecture : nombre
de décisions favorables annuelles rapportées au nombre de demandes reçues.
Certaines décisions peuvent porter sur les recours reçus les années précédentes.
9
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Un mise en cause croissante
de la responsabilité de l’État
2
Deux voies de recours ont été prévues
par le législateur en cas de carence
de l’État : le recours en injonction
pour carence avec, le cas échéant, le
prononcé d’une astreinte, et le recours
indemnitaire . Elles sont mobilisées
de façon croissante par les ménages
reconnus éligibles au Dalo et en attente
d’une offre adaptée . Entre 2015 et
2020, l’État
a dû payer près de 130 M€
au titre des astreintes . L’augmentation
du nombre des ménages toujours en
attente d’une offre devrait avoir un
impact à la hausse sur ces montants .
L’activité contentieuse représente une
charge lourde pour les juridictions
administratives, particulièrement en
zone tendue où l’intervention du juge
ne permet pas d’agir sur le principal
levier : l’offre de logements .
10
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
11
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Les difficultés grandissantes pour
accéder au logement social, souvent
invoquées par les acteurs locaux, ne
sauraient constituer le seul frein à
la mise en œuvre du Dalo . D’autres
facteurs interviennent . Ils ont
d’abord pour origine l’augmentation
du nombre des objectifs assignés
aux acteurs locaux en matière
d’attributions de logements sociaux .
Depuis l’instauration du Dalo, plusieurs
textes législatifs ont créé de nouvelles
catégories de publics prioritaires .
Ces injonctions multiples ont pour
conséquence de faire perdre au Dalo
son caractère de priorité supérieure, au
point de le reléguer au rang de priorité
parmi d’autres . L’effort toujours
insuffisant des collectivités territoriales
et des bailleurs pour participer à
l’effort de relogement aux côtés de
État en constitue une illustration .
Ce risque de banalisation du
Dalo pourrait être accentué par
la généralisation de la cotation
des demandes de logement social .
Ce système d’attribution de points
en fonction d’un certain nombre
de critères, élaboré au sein des
conférences intercommunales du
logement, a vocation à être généralisé
d’ici fin 2023, et vise à aider les
commissions d’attributions à prioriser
les demandes . Alors qu’elle ne devrait
normalement constituer qu’une aide
à la décision, elle risque, compte-tenu
du volume de demandes, d’orienter
significativement l’ordre de la file des
demandeurs . Or, aucune des règles
aujourd’hui appliquées ne permet de
s’assurer que la priorité supérieure du
Dalo sera respectée .
Une deuxième série de difficultés a
trait à la concentration excessive sur
l’État de l’effort de relogement des
ménages reconnus éligibles au Dalo .
L’État est seul débiteur du droit, alors
qu’il n’est pas gestionnaire des parcs de
logements . La loi a cependant imposé
à Action Logement, depuis 2009, et
aux collectivités territoriales et autres
bailleurs, depuis 2017, une obligation
de contribuer à cet effort
a minima
à
25 % de leurs attributions annuelles .
La mesure de la contribution de
chacun des acteurs est rendue difficile
par l’incohérence des systèmes
d’information et par l’insuffisance
des données qui y sont renseignées .
À partir des ordres de grandeur
disponibles, la Cour a pu constater que
les obligations légales n’étaient pas
respectées, notamment dans les zones
tendues, telles que l’Île-de-France .
Un enlisement à bas bruit
résultant d’une conjonction
de facteurs
3
12
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Un enlisement à bas bruit résultant
d’une conjonction de facteurs
Dans le même temps, l’État, seul à
voir sa responsabilité engagée en cas
de carence à reloger les ménages
reconnus éligibles, ne mobilise pas
les outils de sanction prévus par le
législateur dans un contexte de
dialogue déjà difficile avec les acteurs
du logement social .
Une troisième série de difficultés
concerne les contestations directes
ou indirectes de la légitimité même
du Dalo . Celles-ci se nourrissent de
l’imprécision ou de l’inadaptation de
certains critères d’éligibilité :
• le traitement indifférencié des
ménages demandeurs, selon qu’il
sont déjà dans le parc social ou
non, accrédite l’idée que le Dalo se
substitue aux obligations normales
des bailleurs sociaux et au droit
commun en matière de mutation au
sein du parc social ;
• l’absence de prise en compte
prioritaire des personnes handicapées,
sauf en cas d’indécence de leur
logement ou de sa suroccupation .
Des éléments de contexte, reconnus
par la loi, comme la nécessaire mixité
sociale ou l’insuffisance des ressources,
peuvent aussi être utilisés par certains
bailleurs pour refuser les candidatures
de ménages reconnus éligibles
au Dalo, sans qu’ils formulent de
proposition alternative de logement .
Une quatrième série de difficultés
provient de la fragilité des commissions
de médiation . Malgré une composition
plus représentative et d’incontestables
efforts conduits par les services
de l’État pour former les membres
et rapprocher les pratiques, des
disparités importantes persistent entre
départements . Les présidences de ces
commissions sont peu attractives .
Au vu de leur mission, qui consiste
à reconnaître à certains ménages
un droit opposable à l’État, et,
en comparaison avec d’autres
commissions administratives, leur
compétences doivent être renforcées .
Enfin, l’insuffisance de l’accompa-
gnement des ménages est source de
difficultés aussi bien en amont des
demandes de reconnaissance (non-
recours, incomplétude des dossiers)
qu’en aval après avoir obtenu la
reconnaissance de leur droit (refus
d’une offre pourtant adaptée) .
Au terme de ce nouveau bilan
de la mise en œuvre du droit au
logement opposable, la Cour
constate l’accentuation des difficultés
qu’elle avait déjà révélées en 2015,
particulièrement en Île-de-France .
Le risque existe que le Dalo devienne
de plus en plus un droit source de
désillusions grandissantes . Pour de
trop nombreux ménages, il n’est pas
encore un droit effectif .
13
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Si une partie des difficultés résultent
de facteurs exogènes - notamment
l’insuffisance d’une offre locative
accessible, dans le parc privé comme
dans le parc social -, une évolution
du cadre juridique et des modalités
de mise en œuvre opérationnelle du
Dalo est nécessaire . À cette fin, la Cour
formule treize recommandations
destinées à restaurer l’effectivité du
Dalo .
Ces recommandations se structurent
autour des cinq orientations suivantes :
• garantir la primauté du Dalo ;
• recentrer le Dalo pour en garantir le
caractère d’ultime recours ;
• accompagner davantage les ménages ;
• spécialiser et simplifier les procédures ;
• responsabiliser les acteurs .
Elles forment un tout cohérent et que
la Cour considère comme indissociable
pour restaurer l’effectivité du droit au
logement opposable .
Un enlisement à bas bruit résultant
d’une conjonction de facteurs
14
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
15
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
Au regard des difficultés persistantes
qu’elle constate, cinq ans après
sa précédente enquête, la Cour
formule une série d’orientations et
de recommandations destinées à
restaurer l’effectivité et la primauté
du droit au logement opposable,
conformément à l’intention initiale
du législateur . Ces propositions
comportent à la fois des ajustements
législatifs et réglementaires et des
mesures relevant des services de
l’État . Elles constituent pour la Cour
un ensemble cohérent et indissociable .
Orientation n°1 : Garantir la
primauté du Dalo
Alors que la loi du 5 mars 2007
confère aux ménages reconnus
éligibles au Dalo une priorité sur
tous les autres publics prioritaires
pour être logés ou relogés, la Cour
a constaté que, dans les zones
où l’accès au logement privé et au
logement social est le plus difficile,
les ménages attributaires d’un Dalo
sont trop souvent considérés comme
une catégorie de publics prioritaires
parmi d’autres . Il importe de rétablir
la primauté prescrite par le législateur .
1. Procéder à l’harmonisation des
dispositions juridiques afin que
la désignation par le préfet d’un
ménage attributaire d’un Dalo vaille
injonction à reloger
(DHUP)
.
La Cour recommande de clarifier
l’obligation faite aux bailleurs de loger
les bénéficiaires du Dalo . Le terme de
« désignation » parfois mentionné
dans le code de la construction et
de l’habitation (CCH) introduit une
confusion avec les désignations
auxquelles procèdent les réservataires
dans le cadre habituel des attributions
de logement et laisse entendre
l’existence d’une possibilité de refus .
L’harmonisation visera à expliciter le
fait que la désignation d’un ménage
attributaire d’un Dalo vaut injonction
à loger ou reloger au bailleur .
Elle recommande d’amender en
conséquence la rédaction des
9
e
et 15
e
alinéas de l’article L . 441-2-3
du CCH pour bien indiquer que la
désignation d’un ménage par le
préfet vaut injonction .
2. Veiller à ce que la cotation des
demandes de logement social
reconnaisse systématiquement la
primauté du Dalo
(DHUP)
.
Dans la perspective de la
généralisation de la cotation des
demandes de logement social, la
Cour recommande de s’assurer que
les modalités de cotation retenues
garantissent la primauté des ménages
attributaires d’un Dalo . En l’absence,
à ce jour, de règles prescriptrices en
ce sens, le risque est réel que, dans
les zones tendues, les systèmes
de cotation arrêtés à l’échelon
intercommunal relèguent le Dalo au
rang de priorité parmi d’autres .
Si les critères de cotation sont
laissés au choix des acteurs locaux,
un décret pourrait prévoir que les
bénéficiaires du Dalo sont dotés
d’une cotation supérieure aux autres
dans tous les territoires concernés
par la réforme des attributions .
3. En cas de refus d’une candidature
d’un ménage Dalo au motif de la
faiblesse de ses revenus ou des
objectifs législatifs de mixité sociale,
16
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
introduire dans la loi une obligation
pour la commission d’attribution de
lui proposer un autre logement ou
un loyer adapté
(DHUP)
.
Si les commissions d’attribution des
logements (Caléol) doivent conserver
leur capacité d’appariement entre
les candidatures proposées et les
logements disponibles, les situations
de blocage conduisant aux refus de
ménages attributaires d’un Dalo,
au motif de leurs ressources sans
solution alternative, doivent cesser .
Les dispositions légales ou
réglementaires doivent prévoir
l’obligation pour le bailleur de
proposer un autre logement à titre
d’alternative .
À défaut, les représentants de
l’État doivent se saisir des outils de
substitution par attribution directe
déjà inscrits dans la loi et aujourd’hui
non mobilisés, sous réserve des
ajustements nécessaires pour en
faciliter la mise en œuvre .
Orientation n°2 : Recentrer le droit
pour en garantir le caractère de
recours ultime
Après treize ans de mise en œuvre,
il est nécessaire de réviser certains
critères d’éligibilité pour conserver
au Dalo son caractère de recours
ultime et pour parer au risque qu’il ne
devienne une voie de contournement
du droit commun .
4. Supprimer pour les requérants déjà
logés dans le parc social le critère
d’éligibilité au Dalo fondé sur le délai
anormalement long d’obtention d’un
logement social
(DHUP)
.
Dans le prolongement de ses
observations de 2016, la Cour
recommande un traitement
différencié, sur ce critère, entre les
ménages déjà logés dans le parc
social et les autres . Seuls ces derniers
justifient du maintien de ce critère .
L’avantage majeur que procure
l’occupation d’un logement
social dans les zones tendues,
les responsabilités spécifiques des
bailleurs sociaux, dont l’État, et les
difficultés que celui-ci rencontre, dans
ces mêmes zones, pour respecter
son obligation de proposition d’un
logement ou d’un relogement ne
peuvent conduire à considérer que la
situation est identique . Le risque d’un
détournement des procédures de droit
commun relatives aux mutations au
sein du parc social serait ainsi écarté .
5. Préciser, dans la loi, les deux
étapes de l’examen des demandes
de reconnaissance au titre du
Dalo : vérification en premier lieu
de l’appartenance à l’une des
catégories prévues par la loi, puis
mesure de l’urgence de la situation
du ménage requérant
(DHUP)
.
L’urgence à reloger doit primer .
La Cour recommande que le
13
e
 alinéa de l’article L . 441-2-3 du
CCH prescrive la nécessité pour les
commissions de médiation (Comed)
de procéder à l’instruction des
demandes selon ces deux étapes .
6. Créer dans la loi une procédure
de caducisation du droit devant les
commissions de médiation
(DHUP)
.
La Cour recommande qu’une
procédure visant à constater la
17
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
caducité du Dalo soit mise en
place, afin de traiter la situation des
ménages qui ont refusé une offre
de proposition adaptée au sens des
dispositions réglementaires .
Une telle procédure permettrait
d’harmoniser les diverses pratiques
de caducisation aujourd’hui mises en
œuvre dans certaines régions et de
clarifier le nombre exact des ménages
vis-à-vis desquels l’État demeure
débiteur de la mise en œuvre du Dalo .
La Cour suggère à cet égard de
s’inspirer du dispositif mis en place
en Île-de-France par la direction
régionale et interdépartementale
de l’hébergement et du logement
(Drihl), qui conduit les services
départementaux à solliciter l’avis de la
Comed avant de notifier aux ménages
concernés que l’État s’estime délié
de son obligation à leur égard . Un
renforcement des moyens des Comed
pour répondre à ces sollicitations
supplémentaires sera nécessaire .
Orientation n°3 : Accompagner
davantage les ménages
Si le profil des ménages éligibles
est assez diversifié, un nombre
important d’entre eux a besoin d’un
accompagnement social tout au
long des étapes de reconnaissance
de l’éligibilité au Dalo, et jusqu’au
relogement . Cet accompagnement
est la garantie d’une insertion réussie
dans le logement .
7. Proposer systématiquement aux
ménages un accompagnement en
amont de la reconnaissance au titre
du Dalo et en aval de l’obtention de
celle-ci jusqu’au relogement
(DHUP)
.
Au regard des difficultés que l’absence
d’accompagnement systématique
engendre en amont de la décision de la
Comed comme, ensuite, dans l’attente
de la proposition de logement ou de
relogement, la Cour recommande que
les Comed ou les services instructeurs
proposent systématiquement un
accompagnement aux ménages
sollicitant la reconnaissance de leur
éligibilité au Dalo comme à ceux qui
ont obtenu ce droit . Les formes de
cet accompagnement devraient être
adaptées en fonction de la situation
des ménages et mobiliser les différents
acteurs de l’accompagnement
présents dans les territoires .
Orientation n°4 : Spécialiser et
simplifier les procédures
Plusieurs mesures de simplification
peuvent être mises en œuvre pour
alléger les procédures d’instruction
de l’éligibilité, sans préjudice pour les
ménages demandeurs .
8. Renforcer les présidences
des commissions de médiation,
conforter leurs moyens et regrouper
les commissions les moins sollicitées
(DHUP, préfets de régions)
.
La Cour recommande de poursuivre
le travail de consolidation des
commissions de médiation en agissant
sur trois leviers complémentaires :
• le renforcement du statut des
présidents, en confiant cette
responsabilité à des anciens
magistrats ou professionnels du
droit, à l’instar du principe déjà
en vigueur pour de nombreuses
autres commissions administratives
indépendantes . La question de
18
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
l’indemnisation des présidents
doit également être posée, alors
même que l’activité de certaines
commissions atteint des niveaux
élevés ;
• la formation systématique des
membres des Comed, en amont de
leur prise de fonctions et pendant
l’exercice de leur mandat ;
• le regroupement des Comed les
moins sollicitées à l’échelon
régional voire interdépartemental,
avec mutualisation à cette
occasion des moyens d’instruction,
le préfet de département
demeurant juridiquement et
opérationnellement responsable,
au nom de l’État, de l’obligation de
proposer une offre de logement .
9. Supprimer dans la loi l’avis
préalable du maire sur le relogement
d’un ménage Dalo
(DHUP, DGCL)
.
La Cour recommande de supprimer
les dispositions de l’article L . 441-2-3
du CCH qui prévoient que le
représentant de l’État définit le
périmètre au sein duquel un logement
sera proposé au ménage reconnu
éligible au Dalo, « après avis des
maires des communes concernées » .
Cet avis préalable n’est pas sollicité
s’agissant des demandes de logement
social ressortant de la procédure
de droit commun . Il représente une
démarche supplémentaire fastidieuse
pour les services de l’État et n’apparaît
nullement de nature à favoriser
l’intégration du ménage dans la
commune . Les avis négatifs, même
s’ils n’ont qu’une valeur consultative,
peuvent mettre l’État en difficulté
pour mener à bien l’opération de
logement .
10. Supprimer le principe de
l’audience obligatoire devant le
juge administratif pour les recours
contentieux en injonction visant à
constater la carence de l’État dans
le relogement d’un ménage reconnu
éligible au Dalo
(DHUP)
.
La Cour recommande la suppression
de l’audience publique obligatoire
pour les recours contentieux en
injonction contre l’État qui ont pour
seul but de constater l’absence d’offre
de logement de la part du préfet .
Le juge administratif se bornant à
constater l’absence d’offre, l’audience
n’apporte aucune valeur ajoutée .
Cette suppression normaliserait le
fonctionnement en vigueur pendant
la crise sanitaire, le juge administratif
conservant la possibilité de rétablir
l’audience s’il la juge nécessaire .
Cette suppression ne concernerait pas,
en revanche, les recours contentieux
en injonction qui ont pour but de
contester le caractère adapté d’une
offre de logement formulée par l’État .
Dans la mesure où la décision du juge
peut emporter la perte de l’éligibilité
au Dalo, si l’offre de l’État est jugée
adaptée, la possibilité pour les parties
de s’exprimer lors d’une audience
s’impose .
Orientation n°5 : Responsabiliser les
acteurs
Si l’État est seul garant de l’effectivité
du Dalo, l’effort de logement ou de
relogement des ménages attributaires
de ce droit repose également, depuis
les dernières évolutions législatives,
19
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
sur les bailleurs, les collectivités
territoriales et Action Logement .
11. Prévoir dans la loi l’extension
aux préfets de région de la faculté
de proposer un relogement en-
dehors du département, lorsque les
spécificités territoriales permettent
de l’envisager, en tenant compte des
contraintes des ménages
(DHUP)
.
Il convient d’élargir les possibilités
dont dispose le préfet . La faculté de
relogement à l’échelle interdéparte-
mentale, aujourd’hui applicable dans
la seule région francilienne, doit
être étendue à d’autres territoires
spécifiquement circonscrits .
Dans les territoires dont l’organisation
urbaine, les réseaux de transports et
les bassins de vie sont intégrés au-
delà des frontières administratives
départementales, cette extension
permettrait d’accroître les offres
possibles pour les ménages .
Les critères d’adaptation de l’offre, et
notamment la prise en compte des
lieux de travail et de scolarisation,
le cas échéant, continueraient de
s’imposer, comme c’est le cas
aujourd’hui en Île-de-France .
12. Confier dans la loi aux préfets
de département la possibilité de
sanctionner financièrement les
bailleurs refusant, sans motif valable,
d’attribuer un logement aux ménages
Dalo désignés par le préfet
(DHUP)
.
La Cour recommande d’instaurer un
pouvoir de sanction financière par
le préfet en direction des bailleurs
qui refuseraient, sans motif valable,
d’attribuer un logement à un ménage
attributaire d’un Dalo désigné par le
préfet ou d’inscrire sa candidature
à l’ordre du jour d’une Caléol . Le
produit de la sanction bénéficierait au
Fonds national d’accompagnement
vers et dans le logement (FNAVDL)
et pourrait venir en déduction, à due
proportion, du paiement par l’État
des astreintes pour carence à reloger .
La conception d’un dispositif simple
devra être privilégiée pour ne pas
alourdir la procédure, qui, sinon, serait
rendue impraticable .
Ce pouvoir de sanction interviendrait
en complément de l’exercice du
pouvoir de substitution .
À cette occasion, il apparaît nécessaire
d’amender la rédaction du
19
e
alinéa
de l’article L . 441-2-3 du CCH qui se
limite aujourd’hui à mentionner le refus
d’attribution, alors qu’il conviendrait
plutôt de parler d’absence d’attribution
dans le délai réglementaire, et qui ne
mentionne que la mobilisation du seul
contingent préfectoral en cas d’usage
du pouvoir de substitution, alors que
désormais tous les contingents doivent
pouvoir être sollicités .
13. Adapter les systèmes
d’information afin de permettre de
mesurer précisément le respect par
les collectivités territoriales, Action
Logement et les bailleurs de leurs
obligations en matière de relogement
des ménages Dalo
( D H U P ,
collectivités territoriales, bailleurs)
.
Bien identifiée par l’ensemble des
interlocuteurs de la Cour, cette
recommandation constitue une
condition générale de l’efficacité du
dispositif de réforme proposée par
la Cour .