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Chambre
Jugement n° 2021-0016
Communauté de communes C
œ
ur du Var
Département du Var
Exercices 2017 et 2018
Rapport n° 2021-0163
Audience publique du 10 novembre 2021
Délibéré du 10 novembre 2021
Prononcé le 14 décembre 2021
JUGEMENT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU
le code des juridictions financières ;
VU
l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU
l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;
VU
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique ;
VU
le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du
paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifié, dans sa rédaction issue de
l’article 90 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 ;
VU
l'arrêté n° 2020-17 du 4 décembre 2020 du président de la chambre modifiant l'organisation
des formations de délibéré et leurs compétences pour 2021 ;
VU
le réquisitoire n° 2021-0014 du 22 février 2021 par lequel le procureur financier a saisi la
chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
Madame X pour sa gestion des exercices 2017 et 2018 ;
VU
la décision du président de la chambre en date du 1
er
mars 2021 confiant l’instruction de ce
réquisitoire à M. Marc Larue, président de section ;
VU
la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de
l’instruction à Madame X, comptable durant les exercices visés par le réquisitoire, intervenue
le 1
er
mars 2021 ;
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VU
la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de
l’instruction à M. Y, président de la Communauté de communes C
œ
ur du Var, intervenue le 3
mars 2021 ;
VU
les questionnaires adressés par le magistrat instructeur à la comptable et à l’ordonnateur,
respectivement les 2 et 4 mars 2021 ;
VU
les réponses transmises par Mme X le 13 avril 2021 et le 2 septembre 2021 ;
VU
la réponse transmise par l’ordonnateur le 23 mars 2021 ;
VU
le rapport n° 2021-0163 à fin de jugement des comptes déposé le 20 septembre 2021 par
M. Marc Larue, président de section ;
VU
les conclusions du procureur financier ;
Après avoir entendu en audience publique le 10 novembre 2021, le rapporteur, les conclusions
orales de M. Grégory Rzepski, procureur financier, et M. Y, ordonnateur, Mme X, dûment
informée de l’audience, n’étant, ni présente, ni représentée ;
Après en avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier et après avoir
entendu M. François-Xavier Volle, premier conseiller, réviseur, en ses observations ;
Sur les circonstances de force majeure
ATTENDU
qu’aux termes du V de l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 :
«
Lorsque le ministre dont relève le comptable public, le ministre chargé du budget ou le juge
des comptes constate l'existence de circonstances constitutives de la force majeure, il ne met
pas en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public
» ;
ATTENDU
que l’existence de circonstances constitutives de la force majeure doit résulter
d’événements extérieurs, imprévisibles et irrésistibles en lien avec les griefs formulés par le
réquisitoire ; qu’en l’espèce aucune circonstance constitutive de la force majeure n’a été établie
ni même alléguée ;
Charge unique : versement de l’indemnité de fonctions, de sujétion et d’expertise (IFSE)
à Mme Z du 1
er
juillet 2017 au 31 décembre 2018 et à M. A du 1
er
janvier 2018 au 31
décembre 2018.
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU
que par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a requis la chambre régionale
des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur au motif, d’une part, qu’une IFSE de 830
€
par mois
avait été versée de juillet 2017 à décembre 2018 à Mme Z sur la base d’un arrêté du 27 juin
2017 qui prévoyait seulement un montant de 717
€
et, d’autre part, qu’une IFSE, d’un montant
de 700
€
par mois, avait été versée de janvier à décembre 2018 à M. A, sur la base d’un arrêté
du 27 juin 2017 qui prévoyait seulement un montant de 460
€
, et ce sous la gestion de Mme X ;
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Sur le manquement de la comptable à ses obligations
ATTENDU
qu’aux termes des dispositions du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
« la
responsabilité personnelle et pécuniaire
(du comptable)
se trouve engagée dès lors (…) qu’une
dépense a été irrégulièrement payée »
;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif
à la gestion budgétaire et comptable publique, les comptables sont tenus d’exercer, «
s’agissant
des ordres de payer »
,
le contrôle
« de la validité de la dette dans les conditions prévues à
l'article 20 »
;
qu’aux termes de l’article 20, en ce qui concerne
« la validité de la dette »,
le
contrôle porte notamment sur
« l'exactitude de la liquidation »
;
ATTENDU
qu’en l’espèce des IFSE ont été payées à Mme Z et à M. A pour un montant
supérieur à ceux prévus par les arrêtés produits à la chambre et qui en autorisaient le versement ;
Sur les IFSE versées à Mme Z
ATTENDU
que, s’agissant des IFSE versées à Mme Z, Mme X et l’ordonnateur ont tous les
deux indiqué qu’une erreur de transmission avait été commise en ce qui concerne l’arrêté sur la
base duquel ces indemnités avaient été versées ; qu’ils ont en conséquence transmis cette fois
l’arrêté idoine n° 2017/301 du 27 juin 2017 qui mentionne bien un montant de 830
€
par mois,
identique au montant versé ;
ATTENDU
qu’il y a donc lieu de lever la charge en ce qui concerne les IFSE versées à Mme Z ;
Sur les IFSE versées à M. A
ATTENDU
que la comptable et l’ordonnateur indiquent tous les deux que, suite à une
surcharge de travail, aucun arrêté prévoyant le versement d’une IFSE d’un montant de 700
€
n’a été fait et qu’ils transmettent «
l’arrêté qui a été fait le 1/1/2019 pour une montant de
790
€
» ;
ATTENDU
que ces réponses confirment bien que les paiements à M. A d’IFSE d’un montant
mensuel de 700
€
mentionnées au réquisitoire, ont été effectués sur la base de l’arrêté du 27
juin 2017 mentionné dans la charge, arrêté qui n’autorisait le versement d’une IFSE qu’à
hauteur de 460
€
; qu’en revanche l’arrêté produit en réponse au réquisitoire ne peut servir de
base aux paiements puisqu’il leur est postérieur et prévoit d’ailleurs un montant différent de
celui versé ;
ATTENDU
qu’il résulte de ce qui précède que Mme X a commis un manquement en payant à
M. A de janvier à décembre 2018 une IFSE d’un montant supérieur de 240
€
au montant auquel
il avait droit en application de l’arrêté autorisant le versement d’IFSE à l’intéressé ;
En ce qui concerne le préjudice financier
ATTENDU
que la comptable et l’ordonnateur affirment tous les deux que
« ce nouveau
montant d’IFSE avait été validé par le président et le DGS
» mais sans le démontrer ni préciser
à quel moment cette validation aurait eu lieu ;
ATTENDU
qu’en tout état de cause, le Conseil d’Etat a jugé dans ses décisions ONIAM et
DRFiP de Bretagne du 6 décembre 2019 que «
lorsque le manquement du comptable porte sur
l’exactitude de la liquidation de la dépense et qu’il en est résulté un trop-payé
» comme c’est
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le cas en l’espèce, ce manquement «
doit être regardé comme ayant par lui-même, sauf
circonstances particulières, causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
» ;
ATTENDU
qu’il y a donc lieu de considérer que le manquement de Mme X en ce qui concerne
le paiement de janvier à décembre 2018 des IFSE de M. A, a causé un préjudice à la
Communauté de communes C
œ
ur du Var à hauteur du trop payé qui se monte à 12 fois 240
€
soit 2 880
€
;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 60.VI, 3
ème
alinéa, de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
lorsque le manquement du comptable (…) a causé un préjudice financier à l’organisme public
concerné (…), le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels
la somme correspondante
» ;
QU
’ainsi, conformément aux dispositions de l’article R. 241-37 du code des juridictions
financières, il y a lieu de constituer Mme X débitrice de la Communauté de communes C
œ
ur
du Var pour la somme de 2 880
€
(deux mille huit cent quatre-vingt euros) ;
ATTENDU
qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
précitée, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ;
ATTENDU
que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité de la comptable
correspond à la notification du réquisitoire intervenue le 1
er
mars 2021 auprès de Mme X ;
Sur le respect des règles de contrôle sélectif des dépenses
ATTENDU
que les dispositions du IX de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963
prévoient que
«
Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été
mise en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre
chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. (…) Hormis les cas (…)
de respect par [le comptable], sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle
sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée (…) »
;
qu’il
appartient donc à la chambre de se prononcer sur le respect des règles de contrôle sélectif de la
dépense ;
ATTENDU
que Mme X n’a produit aucun plan de contrôle hiérarchisé de la dépense ; que dès
lors le contrôle devait être exhaustif ;
ATTENDU
qu’il y a donc lieu de constater que les règles de contrôle sélectif des dépenses
n’ont pas été respectées ;
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Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
:
Mme X est constituée débitrice de la Communauté de communes C
œ
ur du Var au titre
de l’exercice 2018 pour la somme de 2 880
€
(deux mille huit cent quatre-vingt euros)
augmentée des intérêts de droit à compter du 1
er
mars 2021.
Article 2
:
Les règles de contrôle sélectif des dépenses n’ont pas été respectées.
Article 3
:
Il est sursis à la décharge de Mme X pour sa gestion du 1
er
janvier 2017 au 31 décembre
2018 dans l’attente de l’apurement du débet mentionné à l’article 1
er
.
Présents
: M. Nacer Meddah, président de chambre, président de séance, M. Clément Contan,
président de section, Mme Audrey Cavaillier et Mme Fleur Giocanti, premières conseillères,
M. François-Xavier Volle, premier conseiller, Mme Aline Fouque-Chanclou, première
conseillère et M. Vincent Béridot, conseiller.
Fait
et
jugé
à
la
chambre
régionale
des
comptes
Provence-Alpes-Côte
d’Azur,
le dix novembre deux mille vingt et un.
La greffière de séance,
Bérénice Bah
Le président de séance,
Nacer Meddah
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux
procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous les
commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre
régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de leur
notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux
mois pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais
d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242-29 du même code.