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Première section
Jugement n° 2021-0041 J
Audience publique du 5 novembre 2021
Prononcé du 26 novembre 2021
COMMUNE DE JOINVILLE-LE-PONT (94)
Exercices contrôlés 2014 à 2018
Exercice jugé : 2018
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire du 3 février 2021, par lequel le procureur financier a saisi la Chambre en vue
de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Madame X..., au titre
d’opérations relatives à l’exercice 2018
, notifié à Madame X...
, ainsi qu’à l’ordonnateur
en
fonctions,
le 4 février 2021 lesquels en ont accusé réception respectivement le 10 et le 4 février ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de la commune de Joinville-le-Pont par
Mme X..., du 1
er
janvier 2014 au 31 décembre 2018 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63
-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de
l’article 90 de
la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport de M. Roland Desbordes, conseiller, magistrat chargée
de l’instruction
;
Vu les conclusions du procureur financier du 29 avril 2021 ;
Vu les pièces du dossier et, notamment, les pièces produites par Mme X... le 26 février 2021
et par
l’ordonnateur le
10 mars 2021 ;
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Entendu lors de l’audience publique du
5 novembre 2021 M. Roland Desbordes, en son
rapport, le procureur financier en ses conclusions, et Mme X... comptable qui a eu la parole
en dernier ;
l’ordonnateur, régulièrement con
voqué
, n’étant pas présent
à l’audience
ni
représenté ;
Entendu en délibéré M. Pierre Caille-Vuarier, conseiller, réviseur, en ses observations, hors la
présence du rapporteur et du procureur financier ;
Attendu qu'aux termes du I de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 de finances pour 1963
susvisée : «
Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables
publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes,
du paiement des dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant
ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public,
désignées ci-après par le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des
mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des
opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste
comptable qu'ils dirigent. / Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et
de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité
publique. / La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée
dès lors qu'un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu'une recette
n'a pas été recouvrée, qu'une dépense a été irrégulièrement payée
[...] » ;
Attendu
que l’instruction n’a révélé aucune circonstance de l’espèce r
essortissant à la force
majeure, notion au demeurant non invoquée par la comptable ;
Sur la présomption de charge unique
et l’existence d’un manquement
:
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a saisi la chambre régionale des
comptes d’Île
-de-France de la responsabilité encourue par la comptable Mme X... à raison du
paiement au cours de l'exercice 2018, par mandats collectifs n°18 du 18 janvier 2018 ; n°670
du 15 février 2018 ; n°1161 du 14 mars 2018 ; n°1639 du 16 avril 2018 ; n°2234 du 16 mai
2018 ; n°2697 du 15 juin 2018 ; n°3308 du 16 juillet 2018 ; n°3675 du 14 août 2018 ; n°4101
du 14 septembre 2018 ; n°4848 du 16 octobre 2018 ; n°5548 du 16 novembre 2018 ; n°6022
du 14 décembre 2018 ; des indemnités horaires pour travaux supplémentaires à des agents
titulaires et non titulaires, sans disposer de la délibération fixant la liste des emplois dont les
missions impliquent la réalisation effective d'heures supplémentaires ;
Attendu qu'en application de l'article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à
la gestion budgétaire et comptable publique, applicable à compter de l'exercice 2013, «
Le
comptable public est tenu d'exercer le contrôle : 2°) S'agissant des ordres de payer
(...)
d) De
la validité de la dette dans les conditions prévues à l'article 20
» ; que l'article 20 du même
décret prévoit que «
Le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur
(...)
2° L'exactitude de la liquidation
(...)
5° La production des pièces justificatives
(...). » ;
Attendu qu’en application de l'article 38 du même texte : «
lorsqu'à l'occasion de l'exercice des
contrôles prévus au 2° de l'article 19, le comptable public a constaté des irrégularités ou des
inexactitudes dans les certifications de l'ordonnateur, il suspend le paiement et en informe
l'ordonnateur. Ce dernier a alors la faculté de requérir par écrit le comptable public de payer
» ;
Attendu par ailleurs qu'en vertu des dispositions de l'article D. 1617-19 du code général des
collectivités territoriales : «
Avant de procéder au paiement d'une dépense ne faisant pas l'objet
d'un ordre de réquisition, les comptables publics des collectivités territoriales, des
établissements publics locaux et des associations syndicales de propriétaires ne doivent
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exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste
définie à l'annexe I du présent code
. » ;
Attendu que la liste susvisée des pièces justificatives annexée au code général des
collectivités territoriales, qui précise à la sous-rubrique n° 210224, les pièces justificatives que
doit exiger un comptable avant de payer des indemnités horaires pour travaux
supplémentaires, mentionne : « 1.
Délibération fixant la liste des emplois dont les missions
impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires
; 2. État liquidatif précisant pour
chaque agent, par mois et par taux d’indemnisation le nombre d’heures effectuées
; 3. Le cas
échéant, décision justifiant le dépassement du contingent mensuel autorisé
».
Attendu qu’en cours d'instruction, l
a comptable a produit la délibération du 19 décembre 2002
décidant de la mise en place des IHTS aux agents titulaires et non titulaires, sauf ceux
appartenant à la police municipale, de catégorie C et B, dont
l’indice
brut ne dépasse pas 380
et dont les missions impliquent la réalisation d’heures supplémentaires
, ainsi que celle
du 3 février
2009
étendant
le
versement
des
indemnités
horaires
pour
travaux
supplémentaires aux fonctionnaires de catégorie B dont
l’indice brut
est supérieur à 380 ;
Attendu que ces délibérations ne précisent pas la liste des emplois dont les missions
impliquent la réalisation effective d’heures supplé
mentaires
; qu’elles sont donc
incomplètes,
et pas suffisamment précises pour justifier le paiement des IHTS ; que la prise en charge des
mandats malgré des pièces justificatives insuffisantes est constitutive
d’un manquement du
comptable ;
Attendu que la
comptable soutient qu’elle a respecté le plan de CHD consacré à la paye ; que,
toutefois, le respect des règles du plan de contrôle hiérarchisé
de la dépense n’est pas, par
principe, de nature à dégager la responsabilité des comptables ; qu’il peut en rev
anche justifier,
le cas échéant, une remise gracieuse totale des sommes dues par les comptables au titre des
débets qui leur sont infligés, ou bien la modulation du montant de la somme non rémissible au
titre de l’examen des circonstances de l’espèce, si u
ne telle sanction était prononcée ; que,
par suite, le moyen soulevé ne peut qu’être écarté
.
Sur l’existence d’un préjudice financier :
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que Mme
X..., comptable en fonction au cours de
l'exercice 2018, a manqué à ses obligations de contrôle de la validité de la dépense,
notamment celles relatives au contrôle des pièces justificatives et au contrôle de l'exactitude
de la liquidation, et engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre de
l'exercice 2018 à hauteur de 312 063,22
€ ;
Attendu que dans sa réponse, la comptable indique que «
le service a été fait, le décompte
des heures supplémentaires en nombre et nature étant repris sur les feuilles de paie des
agents concernés et le mandat collectif étant signé par l'ordonnateur. Ces paiements
s'inscrivent dans la limite des crédits votés par l'assemblée délibérante
» ; que dans sa
réponse, l’ordonnateur indique «
le manquement présumé n'a pas causé de préjudice financier
à la collectivité dans la mesure où les heures supplémentaires ont fait l'objet d'un service fait
et donc que les agents concernés devaient être indemnisés
»
; que l’ordonnateur confirme
sans équivoque la volonté de l’assemblée délibérante de verser ces indemnités
; que les
délibérations du 19 décembre 2002 et du 3 février 2009 fondent juridiquement la dépense et
arrêtent le principe du versement de l'indemnité horaire pour travaux supplémentaires aux
agents de la commune éligibles à cette indemnité en application de l'article 2 du décret
du 14 janvier 2002 ; que les sommes correspondantes étaient dues ; qu'ainsi le manquement
du comptable n'a pas causé de préjudice financier à la commune de Joinville-le-Pont ;
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Sur la
sanction du manquement en l’absence de préjudice financier
:
Attendu, qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du paragraphe VI de l’article 60
de la loi du 23 février 1963 susvisée : «
Lorsque le manquement du comptable aux obligations
mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme pub
lic concerné, le juge
des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant
compte des circonstances de l’espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret
en Conseil d’État en fonction du niveau des gara
nties mentionnées au II.
» ; que, selon
l’article
1
er
du décret du 10 décembre 2012 susvisé : «
La somme maximale pouvant être mise
à la charge du comptable, conformément aux dispositions du deuxième alinéa du VI de
l’article
60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, est fixé à un millième et demi du montant du
cautionnement prévu pour le poste comptable considéré
. » ;
Attendu que le cautionnement de ce poste ayant été fixé à 177 000
€ à compter du
1
er
janvier 2013, le montant maximum de la somme suscep
tible d’être mise à la charge de
Mme X...
s’élève à
265,50
€
; Attendu que compte-
tenu des circonstances de l’espèce,
il y a
lieu de fixer la somme mise à la charge de la comptable à 265,50
€
;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
:
Au titre de l’unique charge et de l’exercice 2018
Mme X...
devra s’acquitter d’une
somme de 265,50
€, qui ne pourra faire l’objet d’une remise
gracieuse.
Article 2 : il est sursis à la décharge de Mme X... pour sa gestion
de l’exercice 2018, jusqu’à
la constatation de l’apuremen
t de la somme mise à sa charge.
Fait et jugé par M. Patrick Prioleaud, président de séance ; M. Frédéric Mahieu, premier
conseiller, et M. Pierre Caille-Vuarier, conseiller.
En présence de Mme Lionelle Nivore, greffière de séance.
Lionelle Nivore,
Greffière de séance
Patrick Prioleaud,
Président de séance
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre
ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande
instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main
-
forte lorsqu’ils en
seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par
la chambre régionale
des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux
mois à compter de la notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même
code. Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger
1
. La révision d’un jugement
peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 242
-29 du
même code.
1
Vaut également pour les envois vers l’outre
-mer.