RAPPORT D’INSTRUCTION À FIN
D’OBSERVATIONS DEFINITIVES
L’AGENCE SANITAIRE ET
SOCIALE DE LA NOUVELLE-
CALEDONIE
Exercices 2014 et suivants
Document confidentiel destiné aux membres
de la collégialité délibérante
Déposé le XXXXXX
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES
L’Agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie
Exercices 2014 et suivants
Le présent document a été délibéré par la chambre le 10 juin 2021
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
2
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
5
PREAMBULE
............................................................................................................................
6
INTRODUCTION
......................................................................................................................
7
1
DES MISSIONS DISPARATES, UNE TUTELLE PARTIELLE
........................................
8
1.1
Une gouvernance classique
.............................................................................................
8
1.2
Des missions qui manquent de cohérence
....................................................................
10
1.2.1 Des compétences de santé publique croisées avec les collectivités de Nouvelle-
Calédonie
........................................................................................................................
11
1.2.2 Un rôle essentiel de financeur de la santé et de la protection sociale
.............................
14
1.2.3 L’absence de stratégie formalisée
...................................................................................
14
1.3
Une collaboration perfectible entre l’autorité de tutelle et l’agence
.............................
16
1.3.1 Des projets d’évolution statutaire en suspens
.................................................................
16
1.3.2 Des conventions d’objectifs et de moyens qui manquent d’ambition
............................
17
1.3.3 Une direction en intérim prolongé
..................................................................................
20
2
UNE SITUATION FINANCIERE QUI SE DEGRADE
....................................................
21
2.1
Un résultat en diminution
..............................................................................................
21
2.1.1 Des produits fragiles
.......................................................................................................
23
2.1.2 Des facteurs d’augmentation des dépenses d’intervention
.............................................
30
2.1.3 Des charges de gestion qui restent modestes
..................................................................
35
2.2
Une situation financière qui se tend
..............................................................................
38
2.2.1 Des investissements massifs qui pèsent dans l’endettement
...........................................
38
2.2.2 Une capacité d’autofinancement en baisse
.....................................................................
39
3
APPROFONDIR LES REALISATIONS DE L’AGENCE
................................................
40
3.1
Participer au contrôle des organismes bénéficiaires
.....................................................
40
3.2
Redéfinir et mieux évaluer les priorités de santé publique
...........................................
42
3.2.1 Des priorités de santé publique inchangées depuis un quart de siècle
............................
42
3.2.2 Adapter les priorités à l’évolution des besoins de santé
.................................................
43
3.2.3 Rénover l’évaluation des programmes de santé publique
...............................................
44
3.3
Contribuer à l’efficacité du système de santé et de protection sociale
.........................
47
4
MAITRISER LES FINANCES ET CLARIFIER LE DEVENIR DE L’AGENCE
............
49
4.1
Sécuriser la situation financière de l’établissement
......................................................
49
4.2
Faire évoluer le pilotage des politiques sanitaires et sociales
.......................................
52
4.2.1 Le projet de suppression de l’ASS
..................................................................................
52
4.2.2 Une alternative à la suppression : la mutation
................................................................
55
ANNEXES
...............................................................................................................................
59
REPONSE
..................................................................................................................................
1
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
2
SYNTHÈSE
Des missions variées exercées en l’absence de projet stratégique
L’agence sanitaire et sociale (ASS) est un établissement public de la Nouvelle-Calédonie créé
par la délibération du Congrès n° 264 du 23 novembre 2001. Sa mission initiale est de participer
au financement des infrastructures hospitalières. Son rôle dans le système de santé et de
protection sociale a progressivement évolué et l’ASS est aujourd’hui le principal financeur des
organismes de ce système et l’acteur majeur des politiques de promotion de la santé, de
prévention et de dépistages.
L’exercice de ces actions de santé publique intervient en complément de celles mises en œuvre
par les différentes collectivités du territoire : Nouvelle-Calédonie, provinces et communes.
Cette situation complexe résulte d’une législation qui manque de clarté. C’est dans ce contexte
que le plan de santé calédonien « Do Kamo », adopté en 2016 et modifié en 2018, prévoit une
nouvelle gouvernance du système de santé et de protection sociale, basée sur la disparition de
l’ASS en 2021. Les réflexions autour de la nouvelle gouvernance sont cependant toujours en
cours et ne devraient se terminer qu’en 2022.
Dans cette attente, le présent rapport émet des recommandations visant à renforcer l’efficience
de l’action de l’ASS et à clarifier son devenir. Sa disparition n’est en effet pas l’unique voie
ouverte pour améliorer la réponse aux besoins de santé de la population en matière de
prévention et de dépistage.
L’association dans un établissement unique de missions aussi différentes que le financement
des institutions sanitaires et sociales et la mise en œuvre d’actions de santé publique, ne permet
pas d’appréhender facilement le rôle et la place de cette agence.
Le rôle de financeur du système de santé et de protection sociale de l’ASS pose la problématique
de la composition de son conseil d’administration, dans lequel, la caisse chargée de la gestion
des régimes de sécurité sociale et de protection sociale
1
et les provinces, principales
bénéficiaires des fonds distribués par l’agence, disposent de voix délibératives. A l’inverse, la
présence des provinces dans cette instance est indispensable pour déterminer le bien fondé des
actions de santé publique sur l’ensemble du territoire. Ce paradoxe illustre à lui seul le manque
de cohérence des missions confiées à l’ASS et la nécessité de s’interroger sur son existence.
Cette difficulté est renforcée par l’absence de projet stratégique de l’ASS et une tutelle de la
direction des affaires sanitaires et sociales (DASS) et de la direction du budget et des affaires
financières qui manque d’ambition et mériterait d’être renforcée. L’évaluation des actions de
santé publique de l’ASS par la DASS n’est réalisée que partiellement en raison de la difficulté
à mesurer le bénéfice des réalisations de l’agence ainsi que sa performance sur la santé de la
population. Cette évaluation revêt alors un caractère essentiellement administratif.
1
Il s’agit précisément de la caisse de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de
prévoyance des travailleurs de la Nouvelle-Calédonie (CAFAT).
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
3
Une situation financière qui se fragilise
L’ASS a été créée pour jouer le rôle d’intermédiaire dans le financement du système de santé
et de protection sociale. La possibilité de lui affecter directement des produits fiscaux ne soumet
pas les crédits concernés à la clé de répartition budgétaire entre les collectivités du territoire.
Les comptes de l’ASS facilitent, en outre, la traçabilité des fonds qu’elle distribue aux acteurs
du sanitaire, du médico-social et de la protection sociale.
La détérioration du résultat de l’ASS entre 2014 (+10,6 Md F CFP) et 2019 (+1,03 Md F CFP),
pose la question de sa capacité à honorer ses engagements financiers, notamment en matière
d’appui aux investissements hospitaliers. De surcroît, le modèle de financement de l’ASS risque
d’être rapidement mis en défaut par la dégradation progressive de l’économie calédonienne qui
pourrait affecter la progression des produits fiscaux qu’elle perçoit. Le risque financier est enfin
renforcé, du point de vue de ses charges, par la crise sanitaire (Covid-19) et par une hausse
continue de la demande de soins et des maladies chroniques.
Les interventions massives que l’ASS réalise à la demande du gouvernement pour limiter le
déficit du régime d’assurance maladie
2
dont la gestion est confiée à la caisse chargée de la
gestion des régimes de sécurité sociale et de protection sociale, nuisent à justesse des prévisions
budgétaires. La trésorerie de ce régime est en effet volatile et conduit le gouvernement à verser,
via l’ASS, d’importants concours financiers en dehors de toute anticipation.
Dans ce contexte, la diversification des produits de l’ASS pourrait être engagée afin de lui
attribuer une dotation pour l’exercice de sa mission de santé publique. Cette modification qui,
interviendrait à un niveau de recettes constant, éviterait ainsi le risque de voir réduire la somme
des actions de santé publique de l’ASS en cas de baisse des recettes fiscales du territoire.
Des compléments à apporter dans l’exercice des missions
Dans l’attente d’une décision sur son avenir, l’ASS devrait pouvoir participer au contrôle des
organismes qu’elle finance, alors qu’il n’est aujourd’hui conduit que par la DASS et la direction
du budget et des affaires financières du gouvernement. Il n’est en effet pas de bonne
administration que cette agence ne puisse pas vérifier le bon emploi des fonds publics qu’elle
redistribue.
Placée en situation de coordonnateur d’actions de santé publique et d’acteur de terrain dans ce
domaine, l’ASS devrait renforcer les modalités d’évaluation de ses actions pour mieux guider
le gouvernement dans la définition des priorités de santé publique.
L’ASS devrait enfin, produire des indicateurs médico-économiques pour mesurer l’efficience
de ses actions de santé publique afin de déterminer les bénéfices qu’elle engendre sur les
finances sociales de la Nouvelle-Calédonie.
2
Déficitaire de 0,6 Md FCFP dès l’année de sa mise en place en 2002, le régime d’assurance maladie, géré par la
CAFAT, a cumulé 1,2 Md FCFP de résultats négatifs entre 2002 et 2014. En 2015, il a enregistré un important
déficit (6,2 Md F CFP), qui a augmenté à nouveau en 2016 (7,2 Md F CFP). Ce régime a ensuite généré un déficit
en 2017 (-346 M F CFP), 2018 (-670 M F CFP) et 2019 (-7 Md F CFP). Pour autant, la somme des subventions
d’équilibre versées entre 2015 et 2019 par l’ASS au régime d’assurance maladie s’établissait à 36,9 Md F CFP.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
4
Un avenir à clarifier
Pour l’avenir, le gouvernement prévoit actuellement la disparition de l’ASS par l’attribution de
sa mission de financeur à une nouvelle autorité de régulation et la réaffectation de sa mission
de santé publique à la DASS.
Le présent rapport ouvre une perspective différente pour confier la mise en œuvre de la
promotion de la santé, de la prévention et des dépistages du territoire à une agence de santé
publique, dans un format où celle-ci serait déchargée du rôle de financeur, au profit de la
nouvelle autorité de régulation.
Cette agence de santé publique exercerait également la veille épidémiologique et produirait des
données d’économie en santé. Elle serait une vigie au service de la Nouvelle-Calédonie, dont
la tutelle serait exercée par la DASS. Son objet serait d’offrir une réponse adaptée et évolutive
pour la prévention et les dépistages à destination de la population calédonienne.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
5
RECOMMANDATIONS
Recommandation n°1
: la chambre recommande à l’ASS d’adopter dès 2021, une stratégie
pluriannuelle fixant des objectifs d’activité et d’évolution des dépenses de l’ASS en matière de
prévention. (Page 16)
Recommandation n°2 :
la chambre recommande à l’ASS de proposer au gouvernement
d’intégrer des indicateurs relatifs aux objectifs de santé publique (dits « objectifs
opérationnels ») dans la convention d’objectifs et de moyens 2020-2022, par la voie d’un
avenant à conclure dans le courant de l’année 2021. (Page 19)
Recommandation n°3 :
sous réserve de l’obtention de la compétence de contrôle des
organismes qui bénéficient de ses concours financiers, la chambre recommande à l’ASS
d’adopter un programme pluriannuel d’audits et de contrôles de ces structures. (Page 42)
Recommandation n°4 :
la chambre recommande à l’ASS d’adopter un plan rénové
d’évaluation des programmes de santé publique, contributif à la mesure des bénéfices et des
coûts du système de santé et de protection sociale. (Page 48)
Recommandation n°5 :
la chambre recommande à l’ASS de mettre en œuvre dès 2021, un
pilotage budgétaire plus précis. (Page 52)
Recommandation n°6 :
dans le cadre des travaux qui seront conduits par le gouvernement à
compter de l’année 2021 sur la gouvernance du système de santé et de protection sociale, la
chambre recommande à l’ASS de proposer des évolutions statutaires et fonctionnelles la
concernant, de nature à garantir l’adaptation rapide des priorités de santé et des actions qui en
résultent aux besoins de la population. (Page 56)
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
6
PREAMBULE
Le présent rapport porte sur la « l’agence sanitaire et sociale de Nouvelle-Calédonie » (ASS),
établissement public de la Nouvelle-Calédonie. Il couvre les exercices comptables de 2014 à
2019
3
. La chambre est compétente pour conduire ce contrôle en application des dispositions de
l’article LO. 262-2 du code des juridictions financières.
Le contrôle a été inscrit au programme 2020 de la chambre territoriale des comptes (CTC) par
l’arrêté modificatif de la programmation, n°2020-02 du 2 juin 2020. Le plan de contrôle a été
déposé le 3 septembre 2020 et a donné lieu à un délibéré de la chambre le 8 septembre 2020.
Le contrôle a été notifié par courrier du 4 septembre 2020 à Mme Marie-Laure Mestre,
directrice par intérim. Par courrier du 2 octobre 2020, le contrôle a été notifié à M. Bernard
Rouchon, directeur en fonction en 2014 et jusqu’au 6 novembre 2018.
Par courrier du 4 septembre 2020, la présidente du conseil d’administration, Mme Valentine
Eurisouké, a été informée de la procédure.
L’entretien de début de contrôle a eu lieu le 11 septembre 2020 avec la directrice par intérim et
le 22 octobre 2020 avec la présidente du conseil d’administration.
L’entretien de fin de contrôle s’est tenu le 18 novembre 2020 avec la directrice par intérim et
la présidente du conseil d’administration et le 7 décembre 2020 avec M. Bernard Rouchon,
ancien directeur.
En application de l’article L. 262-65 du code des juridictions financières, le rapport
d’observations provisoires a été adressé le 22 décembre 2020 à Mesdames Valentine Eurisouké,
présidente l’agence et Marie-Laure Mestre, directrice par intérim, ainsi qu’à M. Bernard
Rouchon ancien directeur. Il a également été adressé, le même jour, à M. Thierry Santa,
président du gouvernement.
En application de l’article L. 262-65 du code des juridictions financières, un extrait du rapport
d’observations provisoires qui correspond aux paragraphes 21,25 et 26 du point « 1.2.1 Des
compétences de santé publique croisées avec les collectivités de Nouvelle-Calédonie », a été
adressé le 22 décembre 2020 aux présidents des trois provinces de la Nouvelle-Calédonie.
L’ensemble de ces courriers a fait l’objet d’un accusé de réception signé par les destinataires.
A la date du 2 juin 2021, soit 163 jours après le 22 décembre 2020, qui correspondent à cinq
mois et douze jours, seules la présidente et la directrice par intérim de l’ASS ont adressé une
réponse au rapport d’observations provisoires. Cette réponse a été réceptionnée par la chambre
le 20 mai 2021, il en est tenu compte dans le présent rapport.
3
Le précédent rapport de la chambre portait sur la période 2009-2013.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
7
INTRODUCTION
L’agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie a été créée par la délibération du
Congrès n° 264 du 23 novembre 2001 pour servir d’instrument de financement des
infrastructures hospitalières et des équipements médicaux du territoire. Cet établissement a
ensuite été progressivement chargé de missions de santé publique pour le compte de la
Nouvelle-Calédonie.
Ses produits, dont le montant s’établissait à 48,1 Md F CFP en 2019, ont diminué
de 1,2 Md F CFP depuis 2014 (soit 2,54 %). Au cours de la même période ses charges ont
progressé de 8,3 Md F CFP et s’élevaient à 47,1 Md F CFP en 2019 (soit une hausse de 21,5 %).
La situation financière de l’agence s’est progressivement dégradée au cours de la période sous
revue et présente aujourd’hui les caractéristiques d’un établissement qui s’est appauvri
4
. Le
mode de financement de l’agence, qui résulte presque exclusivement de l’attribution directe de
ressources fiscales, n’est pas de nature à garantir la pérennité de ses ressources.
L’ASS est responsable de missions variées dont le premier volet est la participation au
financement des investissements hospitaliers. Elle participe également au financement du
fonctionnement des établissements publics de santé, de la caisse de compensation des
prestations familiales, des accidents du travail et de prévoyance des travailleurs de la Nouvelle-
Calédonie (CAFAT) et de plusieurs organismes et associations chargés du handicap et de la
dépendance. Le second volet est relatif à la mise en œuvre et l’évaluation d’actions de santé
publique ainsi que la réalisation d’études sur l’état de santé de la population.
L’objet et les moyens financiers des différentes missions de l’agence présentent des écarts
importants. Cette disparité expose l’établissement et le gouvernement chargé de sa tutelle, à des
difficultés pour évaluer ses actions et déterminer sa stratégie.
La disparition de l’ASS, inscrite depuis 2018 comme un objectif du plan de santé
gouvernemental, a pris du retard. La crise sanitaire peut aujourd’hui conduire à s’interroger sur
les options jusqu’alors envisagées dans ce plan, pour refonder la gouvernance du système de
santé.
Le présent rapport analyse l’organisation, la gouvernance et la tutelle de l’ASS (I) et sa situation
financière (II). Il aborde ses réalisations (III) et expose par ailleurs, les voies et moyens de sa
pérennité financière et sa destination (IV).
4
Les exercices 2017 et 2018 ont été clôturés avec des déficits respectivement de 1,5 Md F CFP et 1,9 M F CFP
alors que l’excédent de l’année 2014 s’établissait à 10,6 Md F CFP.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
8
1
DES MISSIONS DISPARATES, UNE TUTELLE PARTIELLE
L’agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie a été créée par délibération du
Congrès n°264 du 23 novembre 2001 qui lui confère le statut d’établissement public
administratif de la Nouvelle-Calédonie. L’objet de l’ASS, inscrit à l’article 1
er
est de « faciliter
la garantie du droit à la santé pour tous au travers d’un niveau adapté de protection sociale ».
Ce texte précise ensuite que
« cet objet (…) qui s'inscrit en accompagnement des objectifs
prioritaires de la politique sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie concerne, notamment,
l'offre de soins hospitaliers, les actions prioritaires d'hygiène publique et de prévention sanitaire
de la Nouvelle-Calédonie, les objectifs de protection sociale.»
5
.
Les missions et l’organisation de l’agence ont été modifiées par la délibération n°189
du 31 mai 2006 qui précise la mission de financement des structures hospitalières et renforce la
mission de prévention. La délibération du Congrès n°361 du 18 janvier 2008 a permis, par
la suite, l’intégration du centre d'éducation diabétique et diététique à l’agence.
1.1
Une gouvernance classique
En application des articles 5 et 8 du statut de l’agence, « L’administration de l’agence est
confiée à un conseil d’administration » dont les délibérations sont signées par le président et un
administrateur. Toutefois, « les délibérations du conseil d'administration relatives au budget, au
compte administratif, aux décisions modificatives, aux prises et aux cessions de participations
financières, aux emprunts, aux cautions ou garanties accordées, sont soumises à l'approbation
du gouvernement ». Les délibérations « sont réputées approuvées si le gouvernement de la
Nouvelle-Calédonie n'a pas fait connaître son opposition dans un délai de 30 jours francs. ».
Le conseil d’administration est présidé par un membre du gouvernement ou son suppléant. Dans
les faits, cette responsabilité est traditionnellement assurée par le membre du gouvernement
chargé du secteur de la santé
6
.
Le conseil d’administration associe quatre autres représentants de la Nouvelle-Calédonie
désignés par le gouvernement et quatre membres du Congrès ou leur suppléant ainsi que les
présidents des assemblées des provinces ou leur représentant, le directeur de la CAFAT ou son
représentant, le président du conseil de l'ordre des médecins de la Nouvelle-Calédonie ou son
représentant et une personnalité qualifiée ou son suppléant désignés par le gouvernement de la
Nouvelle-Calédonie.
5
Articles 2 et 3 de la délibération modifiée n° 264 du 23 novembre 2001 portant création de l'agence sanitaire et
sociale de la Nouvelle-Calédonie.
6
La présidence du conseil d’administration de l’ASS a été confiée à Mme Valentine Eurisouké par arrêté
2015 765/GNC du 6 mai 2015.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
9
L’article 8 des statuts de l’ASS précise que les décisions du conseil sont formalisées par des
délibérations signées par le président et un administrateur. Les délibérations relatives au budget,
au compte administratif, aux décisions modificatives, aux prises et aux cessions de
participations financières, aux emprunts, aux cautions ou garanties accordées, sont soumises à
l’approbation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et sont réputées approuvées si celui-
ci n’a pas fait connaître son opposition dans un délai de trente jours
7
.
Les autres délibérations du conseil doivent être transmises au gouvernement de la Nouvelle-
Calédonie qui en accuse réception ; le gouvernement peut demander, dans un délai de quinze
jours après leur transmission, une seconde lecture de la délibération. Cette demande est
suspensive. Si le conseil d’administration confirme la décision qu’il a prise, celle-ci doit être
motivée
Selon les termes de l’article 10 de statuts, « Le conseil d’administration définit la politique
générale de l’agence.
Il délibère sur les affaires relatives à l’objet de l’agence et, notamment :
- il adopte le projet d’établissement,
- il arrête le budget, les décisions modificatives, les comptes, le tableau des personnels,
- il arrête le règlement intérieur si l’établissement décide de s’en doter,
- il approuve le rapport d’activité,
- il autorise la conclusion des emprunts, la passation des marchés et conventions,
- il délibère sur les interventions financières de l’agence,
- il accepte les dons et legs,
- il peut créer, le cas échéant, les comités ou commissions qu’il estime nécessaires au bon
accomplissement des missions de l’établissement public et, notamment, pour chacun des
programmes de prévention, il crée le comité de pilotage nécessaire à sa conception et à sa mise
en œuvre. Le conseil d’administration peut déléguer à son directeur une partie de ses pouvoirs
pour la conclusion de tous marchés ou conventions, pour une durée et dans la limite d’un
montant ou d’une nature déterminés. Le directeur rend compte à chaque séance du conseil
d’administration, des décisions prises dans le cadre de ces différentes délégations.
Le président du conseil d’administration prend les décisions individuelles concernant le
directeur. »
Le directeur met en œuvre la politique définie par le conseil d’administration et assure
l’exécution de ses délibérations. Il est l’ordonnateur du budget.
7
En cas de refus d’approbation, celui-ci est motivé et notifié au conseil d’administration qui procède à un nouvel
examen dans le délai de quinze jours. Après ce nouvel examen ou à l’issue du délai imparti, le gouvernement de
la Nouvelle-Calédonie arrêté définitivement le budget ou les décisions modificatives du budget dans un délai de
trente jours.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
10
1.2
Des missions qui manquent de cohérence
Les deux missions de l’ASS, déterminées par les articles 2 et 3 de la délibération du Congrès
du 23 novembre 2001, répondent à des finalités différentes :
- la première mission qui consiste « dans le cadre de l'offre de soins hospitalière » à « participer
au financement et au suivi des projets d'investissements et d'équipements de la Nouvelle-
Calédonie dans ces domaines » et « financer pour sa part les contrats d'objectifs conclus entre
la Nouvelle-Calédonie et les établissements hospitaliers ». Ce texte confie par ailleurs, à l’ASS
« dans le cadre des actions prioritaires d'hygiène publique et de prévention sanitaire de la
Nouvelle-Calédonie », la mission de « mettre en œuvre les programmes prioritaires de
prévention et de promotion de la santé décidés par la Nouvelle-Calédonie et de participer au
financement de l'analyse des déterminants des conditions de vie et des problèmes de santé
publique et d'émettre des recommandations en matière de prévention et de promotion de la santé
». Une délibération n° 361 du 18 janvier 2008 a transféré à l’agence les missions exercées par
l'association « Prévention Santé » via la gestion du centre d'éducation diabétique et diététique
8
;
-
la seconde mission, dont l’objet porte sur le financement de la CAFAT (assurance maladie,
assurance vieillesse, indemnisation des accidents du travail, des maladies professionnelles et de
la perte d’emploi et allocations familiales), du handicap et de la dépendance, de régimes sociaux
(complément retraite solidarité, allocations familiales de solidarité et fonds autonome de
compensation des transports sanitaires et des urgences ambulancières), ainsi que sur le
financement de l’aide au logement de la Nouvelle-Calédonie et du « minima vieillesse » versé
par les provinces.
Définitions
La prévention a été définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1948
9
, comme
« l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire le nombre et la gravité des maladies, des
accidents et des handicaps ». Le dépistage est défini comme une action « destinée à identifier de
manière présomptive, à l’aide de tests appliqués de façon systématique et standardisée, les sujets
atteints d’une maladie ou d’une anomalie passée jusque-là inaperçue ».
La charte d’Ottawa
10
, précise que la promotion de la santé a pour but de « donner aux individus
davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l’améliorer».
La réalisation de ces missions se traduit par deux types d’actions :
-
la mise en œuvre de programmes de promotion de la santé, de prévention et de
dépistages en santé décidés par la Nouvelle-Calédonie ;
-
la redistribution de crédits publics affectés à l’ASS à destination de l’organisme
de protection sociale et des établissements sanitaires publics.
8
Délibération n° 361 du 18 janvier 2008 modifiant la délibération modifiée n° 264 du 23 novembre 2001 portant
création de l'agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie.
9
Préambule à la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, tel qu’adopté par la conférence internationale
sur la santé, New York, 19-22 juin 1946 (Actes officiels de l’Organisation mondiale de la santé, n° 2, p. 100) et
entré en vigueur le 7 avril 1948.
10
OMS, charte d’Ottawa du 21 novembre 1986.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
11
1.2.1
Des compétences de santé publique croisées avec les collectivités de Nouvelle-
Calédonie
Les missions de l’ASS s’exercent, selon les termes de la délibération de novembre 2001, « dans
le respect des compétences des autres collectivités de la Nouvelle-Calédonie ». Cette limite
implique d’identifier les compétences des autres collectivités en matière de santé pour mesurer
le périmètre juridique de l’ASS dans ce domaine.
De prime abord, la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie,
qui détermine les compétences de la Nouvelle-Calédonie et des provinces ne permet pas de
connaître de manière précise le domaine d’action des collectivités dans le champ sanitaire et
médico-social. Le quatrième alinéa de l’article 22 de cette loi organique dispose que, la
Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de « protection sociale, hygiène publique et
santé (…) contrôle sanitaire aux frontières » ; en outre, le 22
ème
alinéa du même article précise
que la Nouvelle-Calédonie est compétente sur les « établissements hospitaliers ».
La direction des affaires sanitaires et sociales (DASS) de la Nouvelle-Calédonie est « chargée
de la mise en œuvre de la politique de la Nouvelle-Calédonie en matière de protection sociale,
d'hygiène publique, de santé et de prévention de la santé, de contrôle sanitaire aux frontières »
11
.
En particulier, le service de la santé publique de la DASS est « chargé de la santé-
environnement, de la prévention et des programmes de santé publique, de l’épidémiologie et
statistiques ainsi que de la veille sanitaire, du contrôle sanitaire aux frontières et des plans
d’urgence ». Il est particulièrement observé que le bureau de la prévention et des programmes
de santé publique est « chargé notamment d’assurer l’animation des politiques de santé, (et)
l’élaboration des programmes de prévention dont la vaccination et la lutte contre les
arboviroses,
». En outre, le service de la protection sociale de la DASS assure la mise en œuvre
de la politique de protection sociale du gouvernement de la Nouvelle Calédonie.
Les attributions de la DASS, se superposent ainsi en partie avec les compétences de l’ASS
fixées par la délibération du congrès du 23 novembre 2001.
Pour ce qui les concerne, les provinces disposent d’une capacité à agir dans les domaines dont
la compétence n’a pas été attribuée à l’État ou à la Nouvelle-Calédonie
12
. Par le passé, la
compétence de droit commun en matière d’action sanitaire et sociale leur avait été attribuée par
l'article 7 du statut du 9 novembre 1988
13
, mais
l’abrogation de ce statut par l’article 233 de la
loi organique du 19 mars 1999 a mis fin à cette situation. En pratique, les provinces
interviennent cependant dans la prise en charge en santé et dans des actions de promotion de la
santé et de prévention par l’intermédiaire des directions provinciales de l'action sanitaire et
11
Arrêté n° 2006-435/GNC du 16 février 2006 fixant les attributions et l'organisation de la direction des affaires
sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie. L'arrêté n° 2001-465/GNC du 22 février 2001 fixant les attributions
et l'organisation de la direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie a été abrogé par l’arrêté
du 16 février 2006.
12
Sénat, rapport d’information de la commission des finances n° 212-1997, relatif à la mission effectuée en
Nouvelle-Calédonie du 2 au 16 septembre 1996 et dossier législatif du projet de loi organique de 1999 relatif à la
Nouvelle-Calédonie (
). L'article 20 de la loi organique de 1999
précise que : « Chaque province est compétente dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État ou à la
Nouvelle-Calédonie par la présente loi, ou aux communes par la législation applicable en Nouvelle-Calédonie ».
13
Loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la
Nouvelle-Calédonie en 1998.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
12
sociale (DPASS). Elles agissent précisément dans la mise en œuvre de l’aide médicale gratuite,
des aides sociales à l’enfance et la gestion de centres médico-sociaux.
L’intervention des provinces dans ces domaines est aujourd’hui réalisée sans cadre légal précis
et en dehors de toute convention de délégation de compétence avec la Nouvelle-Calédonie.
Cette situation juridiquement fragile permet aux provinces de renoncer à l’exercice de tout ou
partie de leurs actions à tout moment. Une telle option est envisagée par la province sud à
compter de l’année 2021 ou 2022.
Principales compétences des institutions en matière de santé
Gouvernement
Provinces
DASS
ASS
DPASS
Règlementation en matière de
santé publique
Planification
sanitaire
et
médico-sociale
Inspection/contrôle des
activités médicales des
établissements et des services
sanitaires et médico -sociaux.
Inspection/Contrôle pharmacie
Tutelle administrative,
technique et financière des
établissements hospitaliers et
de l’ASS
Épidémiologie
Santé environnement
Prévention et programmes de
santé publique
Veille sanitaire, contrôles aux
frontières, plan d’urgence
Protection sociale, handicap et
dépendance
Mise en œuvre des
programmes prioritaires
de prévention et de
promotion de la santé fixé
par la NC
Recommandations en
matière de santé publique
Participation au
financement de l’analyse
des déterminants des
conditions de vie et de la
santé publique
Participation au
financement de la
protection sociale, du
handicap et des
établissements de santé
Participation au
financement des
politiques sociales
Interventions en matière de
prévention de proximité, de
promotion de la santé et de soins
de proximité
Interventions en matière médico-
sociale et sociale de proximité
Source : CTC
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
13
Dans cet environnement juridique complexe, les programmes de santé publique pilotés par
l’ASS sont mis en œuvre conformément aux orientations déterminées par le gouvernement. Ils
consistent en des actions de communication et d’information à la population, des informations
aux professionnels et la conduite d’actions de santé. Les thématiques portent sur le diabète, le
dépistage organisé du cancer du sein, le dépistage organisé du cancer du col de l’utérus, le
programme de vaccination contre le papillomavirus en milieu scolaire
14
, la santé orale, la
prévention en addictologie, la prévention et le suivi du rhumatisme articulaire aigu et de la
cardiopathie rhumatismale chronique
15
, la prévention des pathologies liées à la surcharge
pondérale, la santé sexuelle, les infections et maladies sexuellement transmissibles et la
tuberculose.
L’ASS dispose par ailleurs d’un centre d’éducation à la santé destiné à l’éducation
thérapeutique du patient dans le domaine du diabète et de la broncho pneumopathie chronique
obstructive
16
. Cette activité de soins est réalisée en ambulatoire dans les locaux de l’agence.
Les objectifs de la prise en charge éducative sont notamment de prévenir l’apparition des
complications et d’améliorer la qualité de vie des patients.
Enfin en matière d’analyse des déterminants de santé, l’agence a mis en place depuis 2010 une
enquête dénommée « baromètre santé » réalisée sur un échantillon de personnes âgées de 18 à
67 ans. L’objectif de cette enquête épidémiologique est de documenter les comportements, les
représentations, attitudes et croyances de la population sur les sujets de santé et d’addiction. Au
cours des années 2014 et 2019 deux baromètres spécifiques ont été organisés pour la population
âgée de 10 à 18 ans. En outre, la tranche d’âge de18 à 60 ans a fait l’objet d’une enquête en
2015.
14
Il existe, depuis 2011, un programme de dépistage organisé du cancer du col de l’utérus destiné aux femmes de
20 à 65 ans et depuis 2015 une campagne de vaccination anti papillomavirus en direction des jeunes filles de 12 ans
scolarisées dans les collèges de Nouvelle-Calédonie.
15
Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) est une maladie auto-immune faisant suite à une infection (angine ou
infections cutanées) causée par une bactérie. Cette maladie touche préférentiellement les enfants et les jeunes
adultes. Plus de 2000 nouveaux cas par an sont diagnostiqués en Nouvelle-Calédonie. Le RAA peut entraîner une
séquelle cardiaque nommée cardiopathie rhumatismale chronique (CRC), qui provoque à terme de graves
dysfonctionnements cardio-vasculaires nécessitant souvent une prise en charge chirurgicale. L’échocardiographie
permet le diagnostic et la gradation de la sévérité de la CRC. La CRC est la première cause de pathologie cardiaque
acquise chez le jeune adulte dans le monde et en Nouvelle-Calédonie. Pour éviter les rechutes aggravantes et
l’évolution des complications cardiaques, le traitement est un antibiotique, qui dans sa forme injectable,
s’administre toutes les trois à quatre semaines pendant une durée minimale de dix ans. Ce traitement préventif est
primordial pour diminuer la morbidité et la mortalité liées au RAA et à ses conséquences cardiaques. Source :
ASS, rapport d'activité 2019.
16
Selon les dernières données disponibles, au 31 décembre 2017, pour une population totale de plus de 270 000
habitants, plus de 49 000 personnes étaient atteintes d’une maladie chronique, dont 13 987 étaient atteintes de
diabète et 7 756 d’insuffisance respiratoire, soit près de la moitié de ces patients.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
14
1.2.2
Un rôle essentiel de financeur de la santé et de la protection sociale
Le versement de concours financiers en matière de santé et de protection sociale constitue la
seconde mission de l’ASS. Elle s’exerce à travers la redistribution de produits fiscaux aux
établissements sanitaires ainsi qu’aux acteurs institutionnels et associatifs médico-sociaux. Les
produits fiscaux ne sont pas répartis entre les collectivités du territoire mais sont affectés
directement à l’ASS.
La CAFAT, organisme privé chargé d'une mission de service public créé en 1958, est donc le
principal bénéficiaire des crédits versés par l’agence au titre de la mission solidarité
(soit 26,4 Md F CFP sur les 39,8 Md F CFP de dépenses de la mission solidarité en 2019).
Les provinces ont bénéficié de 2,4 Md F CFP en 2019 au titre du financement du minima
vieillesse et la Nouvelle-Calédonie de 722 M F CFP au titre de la mise en œuvre du plan de
santé, d’actions de santé publique et du plan de lutte contre la délinquance de la jeunesse (volet
alcool/addictions).
Les autres organismes financés par l’ASS interviennent dans le champ du handicap et de
l’autonomie (7,9 Md F CFP en 2019) et l’aide au logement (2,1 Md F CFP en 2019).
Les établissements publics de santé perçoivent quant à eux, des subventions d’investissement
ainsi que l’attribution d’une part de leur dotation annuelle de financement par l’agence (soit un
montant total de 4,7 Md F CFP en 2019).
Le montant de la fiscalité redistribuée par l’ASS en 2019 a ainsi représenté plus de 95 % des
charges de l’agence au cours de l’année 2019 (44,2 Md F CFP sur 47 Md F CFP). Cette
proportion est restée identique depuis l’année 2014 (37 Md F CFP sur 38,4 Md F CFP au cours
de l’exercice 2014).
1.2.3
L’absence de stratégie formalisée
Le conseil d’administration de l’ASS n’a pas adopté de projet d’établissement et l’étude de ses
procès-verbaux ne permet pas d’identifier de projet pluriannuel de développement de l’ASS ni
de ligne stratégique suivie et évaluée au fil des années.
Les autres documents communiqués par l’agence au cours de l’instruction, tels que les rapports
d’activité, ne permettent pas non plus de prendre connaissance d’une stratégie à moyen terme.
L’ASS ne dispose donc pas de projet stratégique.
La disparité des missions ainsi que les écarts importants qui existent entre les moyens consacrés
aux actions de santé publique
17
et ceux attribués aux financements de la santé et de la protection
sociale, devraient conduire le conseil d’administration à adopter un projet d’établissement
pluriannuel afin de fixer des objectifs précis pour chacune des missions de l’agence.
17
Entre 2014 et 2019, les charges relatives aux actions de santé publique de l’agence ne représentaient, en
moyenne, que 1 % des charges de fonctionnement annuelles.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
15
Cette feuille de route stratégique participera d’une meilleure prévision de la progression des
dépenses de protection sociale et de santé de la Nouvelle-Calédonie. Cette visibilité sur la
programmation des dépenses de l’ASS contribuera notamment à la maîtrise des dépenses
d’assurance maladie, conformément aux objectifs fixés le plan gouvernemental de santé
calédonien « Do Kamo »
18
. Ce plan vise en effet à construire un nouveau modèle économique
et une nouvelle gouvernance pour le système de santé. L’action n°14 du premier axe de ce plan
prévoit l’instauration d’un objectif calédonien d’évolution des dépenses de santé et de
protection sociale (OCDS) qui comporterait notamment un objectif calédonien d’évolution des
dépenses maladie (OCEAM). Ce dernier serait construit sur le modèle de l’objectif national de
dépenses d’assurance maladie (ONDAM) métropolitain.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la directrice par intérim indique que « la
Nouvelle-Calédonie s’est dotée d’un plan stratégique pour l’évolution de son système de santé
résultat des assises de la santé. Cette stratégie a été matérialisée par l’adoption de la
délibération n°114 du 24 mars 2016 qui a institué le plan de santé calédonien « Do Kamo, Être
épanoui ! ».
A également été conçue par la Nouvelle-Calédonie, en lien avec les missionnaires de l’IGAS,
une première ébauche des projets de textes sur l’objectif calédonien d’évolution des dépenses
de santé, comprenant la fixation d’une enveloppe de dépenses de prévention.
Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie vient d’obtenir le bénéfice du Fonds 5.0 déployé
par le Ministère des Outre-mer pour le financement d’une mission d’assistance destinée à
faciliter la mise en œuvre de la réforme structurelle du système de santé calédonien. »
Ces éléments ne sont pas en lien direct avec les observations de la chambre. Cependant, dans
cette même réponse, la directrice par intérim ajoute que « Dans ce cadre, va être formalisé
en 2021 dans une perspective de rééquilibrage des moyens alloués à la prévention et aux soins :
l’objectif calédonien d’évolution des dépenses d’assurance maladie (OCEAM), l’objectif
d’évolution des dépenses de prévention. ».
Le recours du conseil du dialogue social
19
contre le plan de santé calédonien.
Le conseil du dialogue social a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d’annuler
la délibération n°345 du 29 août 2018 relative au plan de santé calédonien. Par jugement du
19 février 2019, le tribunal a rejeté la demande. Par une requête et un mémoire complémentaire
enregistrés en mai et juillet 2019, le conseil du dialogue social a demandé à la Cour administrative
d’appel de Paris d’annuler le jugement du tribunal administratif et d’annuler la délibération n°345 du
29 août 2018.
L’arrêt n°19PA01676 de la Cour administrative d’appel de Paris, du 10 juillet 2020, a annulé le
jugement du tribunal administratif et la délibération de 2018 relative au plan de santé calédonien, sur
le fondement d’un vice de procédure liée à l’absence de consultation du conseil du dialogue social
alors que le plan de santé calédonien concerne la protection et la prévoyance sociale des salariés.
18
Délibération n°114 du 24 mars 2016 relative au plan de santé calédonien « Do Kamo, Être épanoui ! », modifiée
par la délibération n°345 du 29 août 2018.
19
Instance consultative des représentants des salariés, instituée par l’article Lp. 381-1 du code de travail de
Nouvelle-Calédonie.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
16
Recommandation n° 1 : la chambre recommande à l’ASS d’adopter dès 2021, une
stratégie pluriannuelle fixant des objectifs d’activité et d’évolution des dépenses de
l’ASS en matière de prévention.
1.3
Une collaboration perfectible entre l’autorité de tutelle et l’agence
1.3.1
Des projets d’évolution statutaire en suspens
Au cours de travaux relatifs à la refonte des statuts des établissements publics de la Nouvelle-
Calédonie opérée en 2016
20
, l’ASS a adressé une demande
de modification de ses statuts au
gouvernement pour inscrire la notion d’activité de soins dans ses missions, conformément à la
deuxième recommandation formulée par la CTC lors du contrôle opéré en 2014
21
.
Par ailleurs, en 2020
22
l’ASS a sollicité une modification de la composition de son conseil
d’administration pour y inclure les directions des affaires sanitaires et sociales de chaque
province. L’ASS souhaitait par ailleurs la création d’un comité ad-hoc regroupant les acteurs
de la société civile. Au cours de l’instruction, la directrice de l’ASS a indiqué que « Les
principales difficultés rencontrées avec le statut actuel de l’agence résident dans (…) la sous-
représentation de la société civile mais également des professionnels de la santé. La promotion
de la santé, axe majeur du plan de santé, ne trouve pas sa place lors des réunions du conseil
d’administration et aucune autre instance formalisée n’est dédiée à cette question ».
Les demandes de modifications portées par l’ASS sur les textes régissant son fonctionnement
n’ont pas reçu de réponse du gouvernement.
Au cours des échanges avec l’équipe de contrôle, la DASS a confirmé que la composition
actuelle du conseil d’administration répond aux objectifs de la mission de santé publique de
l’agence mais n’est pas compatible avec celle relative au financement du système de santé. La
DASS estime en effet que la présence de la CAFAT et, dans une moindre mesure, des provinces,
principales bénéficiaires des reversements de l’agence, soulève un problème de conflit
d’intérêts. Elle a indiqué avoir proposé depuis 2016 au gouvernement de modifier en
conséquence la composition du conseil d’administration.
La composition du conseil d’administration de l’ASS pourrait effectivement faire l’objet d’une
modification visant à supprimer la participation de la CAFAT au motif que cette caisse est le
principal organisme bénéficiaire des concours financiers versés par l’ASS (cf. infra). A tout le
moins, si la présence du directeur de la CAFAT peut être considérée comme utile pour éclairer
le conseil d’administration dans la définition de sa stratégie de financement des comptes
20
Délibération n°157 des 11 août et 22 septembre 2016 portant modification de dispositions statutaires des
établissements publics de Nouvelle-Calédonie.
21
La deuxième recommandation des observations définitives de la CTC en date du 23 octobre 2014
était formulée
comme suit : «
la chambre recommande à l’agence de mettre rapidement en œuvre une modification de ses statuts,
intégrant une activité de soins dans ses missions et l’élargissement de son conseil d’administration aux DPASS ,
comme prévu d’ailleurs dans le projet qu’elle a adopté lors du conseil d’administration du 13 novembre 2013,
même en l’absence éventuelle de suite donnée par ailleurs au plan ISA, vecteur du projet examiné à cette
occasion ».
22
Note n° 4921/95/2020 de la directrice de l’ASS au secrétaire général du gouvernement.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
17
sociaux, une simple voix consultative pourrait lui être octroyée par substitution de la voix
délibérative dont il dispose actuellement. La participation des provinces aux délibérations du
conseil d’administration reste nécessaire pour s’assurer de leur contribution à la mise en œuvre
des actions de santé publique de l’agence au plus près des populations.
1.3.2
Des conventions d’objectifs et de moyens qui manquent d’ambition
1.3.2.1
Des conventions peu contraignantes
En application de l’article 3 de la délibération n°264 du 23 novembre 2001, des conventions
d’objectifs et de moyens (COM) sont signées tous les deux ans entre l’ASS et le gouvernement.
Elles visent à encadrer les conditions d’exercice et les missions de l’ASS. Ces conventions,
doivent garantir la cohérence de l’action de l’agence avec « la gouvernance et les orientations
retenues par la Nouvelle-Calédonie »
23
. Elles sont cependant signées tardivement, c’est-à-dire
au cours de la première année de mise en œuvre
24
. De plus, la conclusion d’un avenant au cours
de la seconde année est presque systématique.
Il conviendrait pourtant que ces conventions soient discutées et signées en amont de leur période
de réalisation.
Les COM contractualisées entre l’ASS, la DASS et la direction du budget et des affaires
financières, au cours de la période 2014-2019 fixaient des objectifs administratifs et financiers
et des « objectifs opérationnels » relatifs aux actions de santé publique.
Dans la convention en vigueur en 2020, les objectifs financiers concernent particulièrement : la
stratégie et le pilotage budgétaire, la gouvernance, les éléments financiers et la gestion
administrative. Les objectifs opérationnels portaient, sur les actions de financements de
l’agence et ses actions de santé publique.
L’absence d’indicateurs relatifs aux objectifs opérationnels (c’est-à-dire relatifs à la mission de
santé publique) nuit à la qualité du suivi opéré par la DASS et la direction du budget et des
affaires financières.
1.3.2.2
Des conventions difficiles à évaluer
Les conventions d’objectifs et de moyens prévoient des modalités annuelles d’évaluation
fondées sur un « taux global de réalisation » qui résulte de l’addition d’une quinzaine de sous
indicateurs.
23
Avenant n°1 à la COM 2018-2019.
24
La convention 2018-2019 a ainsi été signée le 26 juillet 2018.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
18
Évaluation des objectifs de la COM de l’ASS en 2019
25
Source : ASS, Compte administratif et rapport d’activité 2019, page 5
Si les intitulés sont prometteurs, les indicateurs de suivi des COM portent essentiellement sur
des données d’activité telles que la présence à des réunions, la réalisation de rapports et de
tableaux de bords ou le déploiement de règlements intérieurs.
Ces indicateurs ne comprennent
pas de cible(s) à atteindre. L’appréciation des résultats obtenus s’avère par conséquent difficile
à objectiver.
L’évaluation de l’efficience des actions de l’agence repose principalement sur des indicateurs
logistiques tels que la maîtrise des charges courantes, la mise en œuvre d’économies sur les
achats, la production d’un plan de trésorerie ou encore le respect de taux d’exécution budgétaire.
Ces indicateurs ne font l’objet d’aucune comparaison dans le temps alors que des cibles
annuelles pourraient être définies en lien avec les réalisations de la convention précédente. Il
s’avèrerait, en outre, utile que l’agence et la tutelle disposent de points de comparaison précis
en sus de cibles à atteindre.
La convention d’objectifs et de moyens 2018-2019 prévoyait ainsi :
- « la mise en place d’un cadre d’échange avec les organismes en charge des régimes sociaux
pour le recueil mensuel des besoins mensuels de trésorerie » ;
- « une remontée d’information régulière à la tutelle opérationnelle sur la mise en œuvre des
conventions déclinant les modalités de financement des régimes sociaux et sur le suivi mis en
place avec les organismes financés » ;
25
L’évaluation des objectifs a été effectuée le 4 décembre 2019 par la direction du budget et des affaires financières
et la DASS de la Nouvelle-Calédonie et a conduit à un résultat de 195/214 points pour les objectifs financiers, soit
une augmentation de 2,1 points par rapport au résultat de 2018.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
19
- au titre des actions de santé publique, des évaluations des programmes « Mange mieux bouge
plus », « dépistage du cancer du sein », « diabète » et « rhumatisme articulaire aigu » ainsi que
l’examen de l’opportunité de la mise en place d’un dépistage organisé du cancer du côlon et le
transfert du service de soins en addictologie au Centre hospitalier spécialisé (CHS).
La convention en vigueur pour la période 2020 à 2022 ne comporte pas de mentions sur les
modalités d’évaluation des objectifs à atteindre en matière de santé publique. Interrogée au
cours de l’instruction, la DASS explique cette situation par l’impossibilité de consacrer autant
de temps que nécessaire pour la préparation de la COM en raison du temps consacré à la gestion
de la crise sanitaire. De son côté, l’ASS a précisé que les modalités d’évaluation de la
convention sont implicitement conformes à celles de la convention précédente. Conformément
à l’observation déjà posée, cette situation aurait pu être évitée si la convention avait été préparée
au cours de l’année qui a précédé son exécution.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la directrice par intérim de l’agence
précise qu’ « en raison du contexte particulier dans lequel s’est déroulé l’année 2020, la
Nouvelle-Calédonie (DBAF et DASS) n’a pas été en mesure d’effectuer la mise à jour et le
contrôle des objectifs de la convention 2020-2022. Pour l’année 2021, des propositions
d’indicateurs vont être soumises au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au titre des actions
de santé publique par l’agence:
-
objectif opérationnel 1 : dans la continuité de la publication du second baromètre santé
jeunes produire en interne des analyses complémentaires par thématiques ;
-
objectif opérationnel 2 : produire la méthodologie, le questionnaire, et administrer le
troisième baromètre santé adulte en élargissant l’étude aux à 18-64 ans ;
-
objectif opérationnel 3 : collaborer au réseau
Pacific Ending Childhood Obesity
, coalition
des Etats membres du Pacifique, pour la prise en charge de l’obésité chez les enfants ;
-
objectif opérationnel 4 : renforcer les actions de promotion de santé à l’échelle des bassins
de vie :
Sous-objectif 1 : proposer aux partenaires de nouveaux lieux de vacation ;
Sous-objectif 2 : expérimenter la coordination d’activité physique bien-être ;
-
objectif opérationnel 5 : adapter l’organisation et les méthodes de travail de l’agence aux
objectifs fixés par le plan Do Kamo ;
-
objectif opérationnel 6 : mettre en place un plan d’action dans le cadre de la qualité de vie
au travail. »
Recommandation n° 2 : la chambre recommande à l’ASS de proposer au
gouvernement d’intégrer des indicateurs relatifs aux objectifs de santé publique (dits
« objectifs opérationnels ») dans la convention d’objectifs et de moyens 2020-2022,
par la voie d’un avenant à conclure dans le courant de l’année 2021.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
20
1.3.3
Une direction en intérim prolongé
En prévision du départ à la retraite de l’ancien directeur, le 6 novembre 2018, un avis de
vacance de poste a été publié le 18 août 2018 pour pourvoir à sa succession. Dans l’attente du
recrutement, Mme Marie-Laure Mestre qui exerçait les fonctions de directrice adjointe, a été
nommée le 6 novembre 2018 directrice par intérim de l’agence, afin de pallier temporairement
à l’absence de directeur
Toutefois, aucune procédure de recrutement n’a été organisée pour donner suite à cette
publication. Plus d’un an plus tard, par courrier en date du 14 novembre 2019, la directrice par
intérim a attiré l’attention du président du gouvernement sur sa situation et sur les difficultés de
gestion que cette situation pourrait finalement entraîner pour l’agence
26
. Le secrétaire général
du gouvernement lui a adressé une réponse le 22 janvier 2020 indiquant qu’un avis de vacance
de poste avait été publié en janvier 2020 (3134-20-0085/SAFPFI du 17 janvier 2020). Pour
autant, à ce jour, aucune procédure de recrutement n’a été engagée pour finaliser la procédure
ainsi ouverte.
26
TA de Nouvelle-Calédonie, jugement NC n°1900010 du 25 avril 2019, « la nomination d’un fonctionnaire en
vue d’assurer un intérim en qualité de directeur (…) est destinée à pourvoir temporairement un poste dans l’attente
de l’aboutissement de la procédure de recrutement du titulaire du poste ».
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
21
2
UNE SITUATION FINANCIERE QUI SE DEGRADE
La situation financière de l’agence au cours de la période 2014-2019, se traduit par la
dégradation de son cycle d’exploitation et son appauvrissement progressif.
La fréquence du déficit de l’ASS résulte particulièrement de ses modalités de financement et
de la progression de la demande de soins et des besoins de santé jusqu’à un niveau égal à celui
de la métropole.
L’appauvrissement de l’agence fragilise sa position de financeur de l’investissement sanitaire.
2.1
Un résultat en diminution
En application de ses statuts, « l’établissement est soumis aux dispositions budgétaires et
comptables applicables aux établissements publics administratifs de la Nouvelle-Calédonie »
27
.
Le budget de l’ASS comporte ainsi une section d’investissement et une section de
fonctionnement.
La section d'investissement retrace les charges et les produits relatifs à des opérations qui se
traduisent par une modification de la consistance ou de la valeur du patrimoine.
La section de fonctionnement retrace les charges et les produits nécessaires au fonctionnement
courant l’agence. C’est dans cette section que sont notamment comptabilisées les opérations de
financement de l’organisme de la protection sociale et du fonctionnement des établissements
sanitaires.
L’addition cumulée des résultats de ces deux sections forme le résultat annuel de l’agence, dont
le montant a diminué de 90 % entre 2014 et 2019.
Entre 2014 et 2019, les produits totaux (résultant de l’addition des produits des deux sections)
ont diminué de 2,5 % pour s’établir à 48,1 Md F CFP alors que les charges ont progressé
de 21,5 % et s’élevaient à 47,07 Md F CFP.
Produits et charges de l’ASS entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
Produits
49 358,08
47 175,39
45 899,97
42 381,66
46 649,56
48 106,53
- 1 251,55
- 2,54 %
Charges
38 745,57
42 869,17
44 037,34
43 937,65
48 533,10
47 071,26
8 325,69
21,49 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
27
Article 14 de la délibération modifiée n° 264 du 23 novembre 2001 portant création de l'agence sanitaire et
sociale de la Nouvelle-Calédonie. Il s’agit de l’instruction budgétaire et comptable M. 52 adaptée à la Nouvelle-
Calédonie.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
22
Le résultat de l’ASS qui s’élevait à 10,61 Md F CFP en 2014, s’établissait à 1,03 Md F CFP
en 2019, soit une diminution de 9,57 Md F CFP. Cette baisse représente une perte de 90 % de
la valeur du résultat de l’exercice 2014.
Les plus forts déficits ont été atteints à l’exécution des exercices 2017 (-1,55 Md F CFP) et 2018
(-1,8 Md F CFP). L’amélioration du résultat 2019 résulte essentiellement d’une subvention
exceptionnelle de 0,7 M F CFP non inscrite au budget primitif. Cette subvention a été versée
par la Nouvelle-Calédonie pour compenser la diminution d’une recette fiscale ; cette remontée
du résultat est donc purement conjoncturelle.
Résultat de l’ASS entre 2014 et 2019 (M F CFP)
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
Le résultat cumulé a diminué de 27 % (1,31 Md F CFP) entre 2014 et 2019, où il s’établissait
à 3,5 Md FCP alors qu’il s’élevait à 4,8 Md F CFP en 2014.
Résultat cumulé entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
4 839,7
6 279,11
6 391,22
4 371,61
2 488,06
3 523,33
-
1 316,38
- 27 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs annuels
La part des charges de la section de fonctionnement dans les charges totales de l’agence a évolué
de 78 % en 2014 (soit 30 Md F CFP) à 96 % (46,14 Md F CFP) en 2019. Cette progression est
liée à la participation de l’agence au cycle de financement des investissements hospitaliers qui
n’a pas progressé depuis 2016. (Cf. infra).
10 613
4 306
1 863
-1 556
-1 884
1 035
-4 000
-2 000
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Produits
Charges
Résultat
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
23
Résultats en fonctionnement et investissement entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation 2014-2019
Fonctionnement
Produits
33 477,58
37 194,39
41 604,12
39 149,27
45 555,15
46 936,4
13 458,82
40,2 %
Charges
30 062,72
34 931,5
38 031,58
42 639,27
47 190,02
46 145,07
16 082,35
53,5 %
Résultat
3 414,86
2 262,89
3 572,53
-
3 490
-
1 634,86
791,34
- 2 623,53
- 76,8 %
Investissement
Produits
15 880,5
9 981
4 295,85
3 232,39
1 094,4
1 170,12
-14 710,38
- 92,6 %
Charges
8 682,85
7 937,67
6 005,75
1 298,38
1 343,08
926,19
- 7 756,66
- 89,3 %
Solde
7 197,64
2 043,33
-
1 709,9
1 934,01
-
248,68
243,93
- 6 953,72
- 96,6 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
2.1.1
Des produits fragiles
2.1.1.1
Un établissement dont le financement est étroitement dépendant de la fiscalité
Les produits de l’agence qui s’établissaient à 49,4 Md FCFP en 2014, ont diminué de 2,5 %
(1,25 Md F CFP) entre 2014 et 2019 et s’élevaient alors à 48,1 Md F CFP. Cette baisse n’a pas
été linéaire sur la période et résulte notamment de la forte variation des produits d’imposition
qui composent majoritairement les produits de l’ASS.
La part des produits fiscaux dans les produits totaux a progressé de plus de 38 points entre 2014
(56,7 %, soit 28 Md F CFP) et 2019 (95,5 %, soit 45,9 Md F CFP). L’attribution directe de
produits d’imposition à l’ASS sort ces recettes du budget de répartition entre les collectivités
de la Nouvelle-Calédonie.
Part des produits fiscaux dans les produits de l’ASS entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
Produits fiscaux 28 005,49 34 201,8
40 068,24 38 164,43 44 761,94 45 963,28 17 957,79 64,1 %
Produits totaux
49 358,08 47 175,39 45 899,97 42 381,66 46 649,56 48 106,53 -1 251,55 -2,5 %
Ratio
56,7 %
72,5 %
87,3 %
90 %
96 %
95,5 %
38,8 points
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
Le facteur principal de la baisse des produits de l’agence est la chute des produits
d’investissement d’une valeur de 14,7 Md F CFP alors que les produits de fonctionnement ont
progressé de 13,4 Md F CFP. Le poids des produits d’investissement dans les produits totaux
de l’agence qui s’élevait à 32 % en 2014 (15,8 Md F CFP) n’atteignait plus que 2 % en 2019
(1 Md F CFP). Cette baisse est directement liée aux emprunts contractualisés entre 2014 et 2016
par l’ASS pour le financement des opérations hospitalières et à l’absence de nouvel emprunt au
cours des années suivantes
28
.
28
Les produits de la section d’investissement sont composés des emprunts et des dotations aux amortissements.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
24
Les autres produits sont constitués, de dotations de la Nouvelle Calédonie dont le montant a
diminué entre 2014 et 2016
29
pour disparaitre entre 2017 et 2018. Une subvention
de 700 M F CFP a été versée en 2019 pour compenser en partie une baisse de recette fiscale
(cf. infra).
De manière plus anecdotique par rapport aux produits totaux, l’ASS enregistre chaque année,
des produits exceptionnels de fonctionnement tirés très majoritairement de mandats annulés sur
exercices antérieurs ou atteints par l’échéance quadriennale et dont le montant a varié
de 257 M F CFP en 2014 à 183 M F CFP en 2019 (le montant le plus élevé était
de 888 Md F CFP en 2017). Ces produits comprennent également le versement des dotations
versées par la CAFAT et les trois provinces pour assurer le fonctionnement du centre de soins
en addictologie géré par l’ASS. Le montant total perçu par l’ASS à ce titre s’établissait en
moyenne à 88 M F CFP entre 2014 et 2019.
Plus précisément, la part de la fiscalité dans les produits de fonctionnement a progressé de 84 %
en 2014 à 98 % en 2019.
Montant et part des produits fiscaux dans les produits de fonctionnement entre
2014 et 2019 (M FCFP)
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
2.1.1.2
Des produits d’imposition dont la nature et les montants varient fortement
Le montant des produits fiscaux affectés à l’agence a progressé de 64 % entre 2014 et 2019.
Cette progression n’était toutefois pas régulière sur la période puisqu’elle s’élevait à 22,1 %
en 2015, 17,1 % en 2016, puis a reculé de 4,7 % en 2017, pour revenir à une croissance
de 17,2 % en 2018 puis enfin ralentir à un taux de 2,7 % en 2019.
29
La dotation annuelle versée par la Nouvelle-Calédonie s’établissait à 5,2 Md F CFP en 2014, 2,2 Md en 2015,
1,2 Md en 2016 et 700 M en 2019. En 2014, cette subvention a permis de financer la part des provinces pour l’aide
de l’habitat (FSH) et le régime d’aides en faveur des personnes en situation de handicap et des personnes en perte
d’autonomie(RHPA) ainsi qu’une partie du complément retraite solidarité. En 2015, la Nouvelle-Calédonie a versé
à l’ASS une participation financière au titre des dépenses d’aides aux personnes en situation de handicap ou en
pertes d’autonomie d’un montant de 1,78 Md F CFP ainsi qu’une participation financière au titre des dépenses
d’aide au logement d’un montant de 429,6 M F CFP. Pour l’année 2016, la dotation a été versée au titre des
dépenses d’aides aux personnes en situation de handicap ou en pertes d’autonomie d’un montant de 1,2 Md FCFP.
83,7%
92,0%
96,3%
97,5%
98,3%
97,9%
0%
20%
40%
60%
80%
100%
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Produits de fonctionnement
Produits fiscaux
Part des produits fiscaux
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
25
Ces variations s’expliquent par la forte disparité de la nature des produits fiscaux reversés à
l’ASS. Ces produits d’imposition sont issus de cinq ressources, dont certaines étaient en voie
d’extinction ou de création au cours de la période :
-
la taxe sur les alcools et sur le tabac (TAT3S) ;
-
la taxe de solidarité sur les services (TSS) ;
-
la taxe générale sur la consommation (TGC) ;
-
la contribution sociale additionnelle (CSA) ;
-
la contribution calédonienne de solidarité (CCS).
Montant et répartition des produits d’imposition affectés à l’ASS entre 2014 et 2019
(M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
TAT3S
3 455
3 745
7 832
7 388
11 765
9 484
Prévisionnel
Réalisé
3 799
4 630
7 227
6 933
10 246
10 574
TSS
19 300
19 000
19 500
20 000
20 000
-
Prévisionnel
Réalisé
18 931
19 771
19 744
19 474
17 656
5 189
TGC
-
-
-
-
-
20 000
Prévisionnel
Réalisé
-
-
-
-
4 868
18 500
CSA
4 500
5 824
5 300
5 100
4 700
4 500
Prévisionnel
Réalisé
5 275
5 856
4 922
4 603
4 722
4 351
CCS
-
8 300
5 260
7 560
7 565
7 395
Prévisionnel
Réalisé
-
3 945
8 175
7 155
7 269
7 349
TOTAL prévisionnel
27 255
36 869
37 892
40 048
44 030
41 379
TOTAL réalisé
28 005
34 202
40 068
38 164
44 762
45 963
Source : CTC, d’après les budgets primitifs et les comptes administratifs
Cette situation complique la lisibilité des produits de l’ASS. Elle est par ailleurs peu adaptée à
la situation financière difficile de l’agence en ce qu’elle nuit à la capacité de l’équipe de
direction et du conseil d’administration à établir des prévisions budgétaires stables.
Les incertitudes qui pèsent chaque année sur les prévisions de recettes fiscales pourraient
cependant avoir une incidence plus forte sur la crédibilité des prévisions budgétaires de
l’agence. Il est ainsi observé que si le taux de réalisation des recettes totales de l’agence peut
varier d’une année à l’autre
30
, l’écart entre le montant des produits d’imposition prévu et celui
réellement perçu ne s’établissait en moyenne qu’a 98 % sur la période 2014-2019.
30
Cette différence s’établissait ainsi à 98,2 % en 2016, 97,6 % en 2017, 97,8 % en 2018 et 102,7 % en 2019.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
26
La taxe sur les alcools et sur le tabac
Créée par la loi du pays n° 2001-14 du 13 décembre 2001 pour une mise en application au 1er
janvier 2002, la taxe sur les alcools et le tabac a remplacé la cotisation spéciale sur les alcools
et les tabacs, qui était affectée en totalité à la CAFAT.
La TAT3S était affectée, jusqu’à fin 2009, pour 33 % à la CAFAT et pour 67 % à l’ASS, dont
elle constituait alors la quasi-intégralité des produits fiscaux. À compter de 2010, la totalité du
produit de la TAT3S a été réaffecté à l’ASS. À la suite de ce transfert, l’agence a repris à son
compte des dépenses de prévention financées par le régime universel d’assurance maladie et
maternité (RUAMM)
31
. L’objet de l’affectation de la taxe est défini de manière large, puisqu’il
concerne « le secteur sanitaire et social ».
Le produit de la TAT3S a plus que doublé entre 2014 (3,8 Md F CFP) et 2019 (10,6 Md F CFP).
Dans le cadre de la lutte contre le tabagisme, le Congrès a relevé le taux de la TAT3S portant
sur le tabac de 82 % en 2017 à 90 % en 2018, ce qui a entraîné une diminution des quantités
vendues
32
. Cependant, l’augmentation des prix de vente du tabac à rouler engagée fin 2019 a
engendré une recette de plus de 700 M F CFP
dont 270 M F CFP ont été affectés à l’ASS
33
. Le
produit de la TAT3S a été porté à 6,6 Md F CFP dans le budget 2020 de l’ASS, soit une légère
hausse (1 %) par rapport à la TAT3S prévue en 2019.
La taxe de solidarité sur les services
La taxe de solidarité sur les services est une imposition sur la consommation intérieure, qui
frappe les prestations de services, assujetties à un prélèvement de 5 % depuis 2006. En vertu de
la loi du pays n°2001-013 du 31 décembre 2001, le produit de TSS était affecté à la CAFAT
afin de contribuer à l’équilibre global de la protection sociale et du RUAMM. À partir du 1er
janvier 2010, le produit de la TSS a été intégralement affecté à l’ASS par la loi du pays n° 201-
3 du 21 janvier 2010 portant diverses mesures d’ordre fiscal. Cette affectation avait pour objet
le financement par l’ASS de la protection sociale, des infrastructures hospitalières d’intérêt
territorial et du Régime Handicap Personnes en perte d’Autonomie (RHPA)
34
.
En 2018, 17,6 Md F CFP de produits de TSS ont été affectés à l’ASS (contre 19,7 Md F CFP
en 2015). Sur ce montant, 15,1 Md F CFP ont été attribués, par la voie d’une subvention, à la
31
Le RUAMM verse des prestations en espèces et prend en charge les soins hospitaliers, les soins hors territoire
et une partie des soins de ville pour les assurés sociaux. Les prestations en espèces sont constituées par des
indemnités journalières d’arrêt de travail et maternité, des pensions d’invalidité et des capitaux décès. Les soins
hospitaliers sont délivrés par trois établissements de santé publics, dont un centre spécialisé en psychiatrie, ainsi
qu’une clinique privée à but lucratif et un centre de radiothérapie privé à but lucratif. Les soins médicaux hors
territoire sont principalement constitués d’évacuations sanitaires et de prises en charge de soins rendus en
métropole à des assurés du RUAMM.
32
Plus précisément, les ventes de tabac ont chuté de 25 % en trois ans et de 8 % sur les sept premiers mois de
l’année 2019 (source : rapport du 8 septembre 2019 du Président du gouvernement au Congrès relatif à
l’augmentation des prix du tabac).
33
Le gouvernement a constaté un report de 5 % la consommation de cigarette vers le tabac à rouler, plus nocif
pour la santé. Ce marché représentait 32 % des ventes de tabac en 2019 (source : rapport du 8 septembre 2019 du
Président du gouvernement au Congrès relatif à l’augmentation des prix du tabac). L’augmentation de prix du
tabac a été adoptée par le Congrès le 30 octobre 2019.
34
Loi du pays n°2009-2 du 07 janvier 2009 portant création d’un régime d’aide en faveur des personnes en
situation de handicap et des personnes en perte d’autonomie. Ce dispositif a remplacé les aides sociales
précédemment prévues par la délibération modifiée n°49 du 28 décembre 1989 qui étaient servies par les provinces
aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées dépendantes.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
27
CAFAT. En 2019, l’ASS a perçu 5,2 Md F CFP du produit de cette taxe. Sur ce
montant, 5 Md F CFP ont été attribués à la CAFAT, le solde a été affecté par l’ASS au
financement de la prévention.
La taxe générale sur la consommation
L’année 2018 était le dernier exercice de perception de la taxe sur les services, remplacée
progressivement à compter du 1er octobre 2018 par la taxe générale sur la consommation en
application de la loi du pays n° 2016-14 du 30 septembre 2016.
La part de TCG attribuée à
l’ASS fait l’objet d’une délibération annuelle du Congrès. En 2019, les prévisions de recettes
de la TCG ayant été surestimées par rapport à leur réalisation, le Congrès a diminué le montant
attribué à l’ASS. Pour faire face aux dépenses de protection sociale, le gouvernement a alors
versé une dotation de 0,7 Md F CFP à l’ASS visant à compenser le manque à gagner sur cette
recette fiscale.
La contribution sociale additionnelle
Une contribution sociale additionnelle à l’impôt sur les sociétés a été instaurée en 2005. Son
produit était affecté à la CAFAT pour la gestion du régime des prestations familiales de
solidarité créé la même année. L’article 18 de la loi du pays n°2011-8 du 28 décembre 2011 a
réaffecté cette contribution à l’ASS au titre des années 2011 et 2012. L’article 6 de la loi du
pays n°2013-3 du 4 juin 2013 a étendu cette disposition aux exercices 2013 et 2014 et une
prolongation sur les exercices 2015-1016 a été adoptée par le Congrès. Cette disposition a
ensuite été rendue définitive à compter de l’année 2017 avec pour objectif de permettre à l’ASS
de verser une part du produit de la CSA aux provinces pour le financement des minima
vieillesse.
Le montant perçu par l’ASS était de 5,3 Md F CFP en 2014 et de 4,3 Md F CFP en 2019
dont 2,9 Md F CFP ont été versés à la CAFAT pour le financement des prestations familiales
de solidarité.
La contribution calédonienne de solidarité
En 2015, est entrée en vigueur la contribution calédonienne de solidarité, équivalent local de la
contribution sociale généralisée (CSG) métropolitaine
35
. À ce titre, elle est assise sur l’ensemble
des sources de revenus. Elle est affectée à l’agence sanitaire et sociale pour financer « toutes
les dépenses de protection sociale et combler le besoin de financement prévisionnel ».
La création de la CCS a été suscitée par la réforme des minima versés aux personnes retraitées
(complément de retraite de solidarité géré par la CAFAT et minimum vieillesse versé par les
provinces). Il a alors été décidé de financer ces minima par une imposition, sur le modèle initial
de la CSG métropolitaine pour ce qui concerne le minimum vieillesse. En 2019, la CCS était
principalement consacrée au financement du complément de retraite de solidarité.
35
La CCS a été mise en place à compter du 1er janvier 2015 par la loi du pays n° 2014-20 du 31 décembre 2014,
en remplacement d’une contribution exceptionnelle de solidarité (CES) au taux de 0,75 %.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
28
Les premières réflexions sur la mise en place de la CCS prévoyaient un taux de 3 % afin qu’elle
contribue au financement du RUAMM dont le déficit atteignait en 2015 un montant
de 6,2 Md F CFP. Il a finalement été instauré un taux de référence de 2 % modulé selon la
nature des revenus par l’application de coefficients. Ainsi, le prélèvement s’établit à 1 % sur
les revenus d’activité et de remplacement, à 2 % sur les revenus du capital et à 5 % sur les
revenus de capitaux mobiliers de source calédonienne perçus par des sociétés et établissements
étrangers
36
.
La contribution assise sur les revenus d’activité et de remplacement est recouvrée par
la CAFAT, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités que les cotisations
sociales
37
. Le produit recouvré est ensuite reversé à l’agence sanitaire et sociale.
La DASS a proposé depuis 2015 aux gouvernements successifs d’augmenter la CCS d’un point
pour doter le RUAMM de nouvelles recettes estimées aux alentours de 5,8 Md F CFP
38
. Cette
proposition n'a pas été retenue au motif d’un risque d’alourdissement du coût du travail dans le
contexte des difficultés économiques du territoire.
Les produits de la CCS perçus par l’ASS, ont presque doublé entre 2015 (3,9 Md F CFP)
et 2019 (7,3 Md F CFP). Le montant collecté par la CAFAT, qui correspond à 1 point de CCS
39
,
provenait à 80 % des revenus d’activité et pour les autres 20 %, des revenus de remplacement.
Les principaux contributeurs de la CCS collectée par la CAFAT sont les employeurs (65,1 %
du montant collecté, dont 37 %, soit 2 Md F CFP, pour les employeurs du secteur privé).
Le montant prévisionnel de la CCS pour 2020 s’élève à 7,6 Md F CFP.
Recettes prévisionnelles de la CCS en 2020 en M F CFP
Catégorie de revenus
Montant
Patrimoine
200
Activité et remplacement
(collectés par la CAFAT)
5 490
Valeurs mobilières
1 600
Foncier
305
Jeux
85
TOTAL
7 680
Source : CTC, d’après le budget prévisionnel de l’ASS pour 2020
36
L’imposition à la CCS des produits des valeurs mobilières au taux majoré de 5 % fait actuellement l’objet d’un
contentieux devant la juridiction administrative. Les requérants, constitués d’entreprises métropolitaines,
invoquent que l’application de la CCS aux dividendes qui leur sont versés serait contraire aux dispositions de la
convention fiscale franco-calédonienne, qui prévoit que les dividendes ou revenus distribués sont taxés dans le
territoire de résidence de leur bénéficiaire.
37
La CAFAT est rémunérée par l’ASS au titre de la prestation rendue à concurrence de 2,5 % des montants
recouvrés en 2015, puis de 1 % de la même base à compter de 2016.
38
DASS, note relative au plan d’action sur le RUAMM, 11 juin 2015.
39
La CCS collectée sur les revenus du travail et les revenus de remplacement ayant un taux d’un point.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
29
La taxe sur les produits sucrés
La création d’une taxe sur les produits sucrés prévue par le plan de santé « Do-Kamo »
40
et
susceptible d’être affectée directement à l’ASS pour le financement d’actions de santé publique,
reste à l’ordre du jour mais sa mise en œuvre peut sembler délicate dans le contexte
de
ralentissement économique.
2.1.1.3
Des produits d’imposition qui reposent sur une économie fragilisée
La capacité de la Nouvelle-Calédonie à recouvrer des produits d’imposition en progression est
limitée par une économie dont la croissance est de moins en moins forte.
Selon les données de l’Institut de la statistique et des études économiques (ISEE), la situation
économique se fragilise depuis plusieurs années. Le taux de croissance annuel moyen du produit
intérieur brut (PIB) calédonien qui était de 3 % entre 2005 et 2015, est descendu à 1,1 %
en 2017, puis 0,6 % en 2018. Le PIB qui s’établissait à 944 Md FCFP en 2015 était
de 1 028 Md F CFP en 2018, soit 3,64 M F CFP par habitant en moyenne en 2018
pour 3,49 M F CFP en 2015.
Dans une publication des comptes économiques rapides pour l’Outre-mer (CEROM) datant
de 2018 et disponible sur le site internet de l’ISEE, il est indiqué que « l’amélioration du solde
commercial constatée en 2018 (le déficit se réduit de 11,7 Md F CFP) ne génère finalement pas
de croissance réelle (contribution négative du commerce extérieur : -0,7 point). Le même
constat peut être tiré pour les entreprises de la mine et de la métallurgie, dont la valeur ajoutée
corrigée de l’évolution des prix de vente et d’achat recule d’environ 3 %. Le reste de l’économie
est peu dynamique, dans un contexte marqué par l’attentisme et les incertitudes liées à
l’échéance référendaire, des cours du nickel volatil ainsi que la mise en place de la taxe générale
sur la consommation. La demande intérieure résiste tout de même. L’investissement progresse
de 2,1 %, après 7 années consécutives de baisse et reprend le rôle de moteur de l’économie à la
consommation des ménages qui s’essouffle (+0,8 %), affectée notamment par un marché de
l’emploi morose.»
41
.
En outre, dans une note publiée en avril 2020, le CEROM indique que les mesures de
confinement de la population mises en œuvre entre le 23 mars et le 19 avril 2020 entraîneraient
une baisse du PIB néo-calédonien comprise entre 2,9 et 4,5 points, c’est-à-dire
entre 27,6 Md F CFP et 41,9 Md F CFP. L’activité de certains secteurs s’est interrompue
(transport aérien, tourisme, restauration, transports…) et a été fortement réduite pour d’autres
(industrie, bâtiment, commerce…). Selon les secteurs, l’économie néo-calédonienne a
fonctionné entre 35 % et 91 % de ses capacités normales.
40
La taxe serait applicable sur les boissons sucrées de type jus de fruits, sirops, eaux sucrées ou les bières sans
alcool, les boissons lactées sucrées, les préparations, concentrées ou déshydratées, permettant la reconstitution de
boissons contenant du sucre, les crèmes glacées et sorbets, les confiseries, le chocolat et les préparations à base de
cacao.
41
CEROM, 2018.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
30
Enfin, une note de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) d’octobre 2020
42
, indique que pour
les ménages « les comptes rémunérés, composés principalement des comptes sur livret et des
comptes à terme, affichent une forte contraction : -5 Md F CFP sur trois mois dont - 4,5 milliards
pour le seul mois de septembre. (…) Dans le même temps, la production de crédits aux
particuliers (crédit à la consommation et à l’habitat), qui était en baisse au cours du premier
semestre, repart à la hausse et retrouve son niveau pré-covid (production moyenne mensuelle
autour de 10 Md F CFP). ». Selon la même note, la situation des entreprises est exactement à
l’inverse avec une hausse de dépôt à vue, une diminution des montants sur les comptes
rémunérés et une baisse de la production de crédits en raison de « la réticence des entreprises à
s’endetter ».
2.1.2
Des facteurs d’augmentation des dépenses d’intervention
Les charges de la section de fonctionnement de l’agence ont progressé de 53,5 %
(16 Md F CFP) entre 2014 et 2019, année où elles s’élevaient à 46,1 Md F CFP. Le poids des
charges de la section de fonctionnement dans le budget de l’agence a progressé de 77,5 %
en 2014 à 98 % en 2019.
Ces charges sont marquées par la progression des financements aux établissements sanitaires
(+1 736 %) et à la protection sociale (+40,7 %) qui constituent des dépenses d’intervention
identifiées comptablement comme « charges de gestion courante ». Cette dénomination
comptable démontre que les interventions financières de l’agence constituent l’essentiel de sa
mission.
42
IEOM, note de conjoncture financière n°314, octobre 2020, « Impact de la crise de la covid-19 sur l’épargne et
l’endettement des ménages et des entreprises. Des ménages moins enclins à épargner et des entreprises qui limitent
leur endettement ».
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
31
Charges de fonctionnement entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation 2014-2019
Total général
30 062,7
34 931,5
38 031,6
42 639,3
47 190
46 145,1
16 082,4
53,5 %
Charges de
gestion courante
28 575,1
32 753,7
35 597,1
39 942,3
44 590,4
43 199,5
14 624,4
51,2 %
Dont
CAFAT
18 780,8
20 242,8
23 689,9
26 773,3
26 331
26 431
7 650,2
40,7 %
Dont Fond
Handicap
43
4 503
6 133,5
6 130,7
7 111
7 730,8
7 464,5
2 961,5
65,8 %
Dont
établissements de
santé
203
190
218,46
277,50
3 899,38
3 728,06
3 525,06
1 736 %
Dont fonds social
de l’habitat
1 902
2 616,9
2 672,6
2 714
2 240
2 136
234
12,3 %
Dont Prévention
1 365,02
1 438,4
1 204,9
1 392
1 747
1 420
55
4,03 %
Charges à
caractère général
736,5
946,8
843,9
870,9
771,7
1 121,6
385,1
52,3 %
Charges de
personnel
399,6
441,2
465
476,1
425,1
363,9
-35,7
- 8,9 %
Charges
financières
69,4
213,63
279,2
311,13
305,35
288
218,6
315 %
Dotations aux
amortissements
282,1
576
846,4
1 038,7
1 094,4
1 169,8
887,7
314 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
2.1.2.1
Le nouveau modèle de financement des établissements sanitaires publics
Le financement des établissements publics de santé, qui représentait en 2019 38,2 % des charges
du RUAMM (soit 27,6 Md F CFP), relève de la compétence du gouvernement. Celui-ci propose
chaque année au Congrès le montant de la dotation globale de financement (DGF) de ces
établissements et les tarifs des prestations externes qu’ils réalisent. Avant 2018, la DGF des
établissements publics de santé était financée à 80 % par le RUAMM, le solde était alors à la
charge des provinces.
Depuis 2018, en application de la délibération n°291 du 29 décembre 2017 du Congrès de la
Nouvelle-Calédonie, le solde de 20 % est financé à 12 % par l’ASS et à 8 % par les provinces.
Cette clé de répartition constituait alors une charge nouvelle dans le budget de l’ASS d’un
montant de 3,4 Md F CFP qui a été compensée par une hausse de la TAT3S.
43
Subventionnement du RHPA.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
32
Part de la dotation globale de fonctionnement versées par l’ASS aux hôpitaux
(M F CFP)
2018
2019
Centre hospitalier territorial (CHT)
2 617,55
2 617,55
Centre hospitalier spécialisé (CHS)
489,40
494,20
Centre hospitalier Nord (CHN)
332,44
356,92
TOTAL
3 439,38
3 468,66
Source : ASS
En sus de la part de financement distribuée aux hôpitaux pour leur fonctionnement depuis 2018,
l’ASS finance des actions qui donnent lieu à des subventions spécifiques. Ainsi, en 2019 ces
subventions ont concerné le financement des activités hors champs médico-social du
CHS (187 M F CFP), les activités de santé publique du CHT (55 M FCFP), la mise à
disposition d’un praticien hospitalier pour la mise en œuvre du plan de santé calédonien et le
financement des pratiques médicales avancées prévues par ce plan de santé (17,4 M F CFP). Le
montant total versé aux établissements sanitaires publics en 2019 s’est donc élevé
à 3 728 M F CFP.
2.1.2.2
Le financement de la caisse de protection sociale
Les principales charges d’exploitation de l’ASS sont relatives aux concours financiers versés à
la CAFAT ainsi qu’aux établissements sanitaires et aux structures médico-sociales.
Les contributions versées à la CAFAT sont organisées sur la base de conventions entre la
DASS, l’ASS et la CAFAT. Ce financement a représenté en moyenne 60 % des dépenses de
fonctionnement de l’ASS entre 2014 et 2019 et a progressé de 40,7 % sur la période.
Le financement attribué par l’ASS à la CAFAT couvre quatre types de dépenses : la
contribution du financement du minimum vieillesse et du complément retraite solidarité (CRS),
les compensations d’allègements ou d’exonérations de charges sociales pour différents régimes
(retraites, familles, maladie et accidents du travail), les subventions versées spécifiquement
au RUAMM et le financement du régime des allocations familiales de solidarité distribuées par
la CAFAT aux ménages à revenus modestes.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
33
Principales dotations et subventions à la CAFAT entre 2014 et 2019 (M FCFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation 2014-2019
Minimum
vieillesse
1 480
1 425,03
1 430
1 413
1 339
1 272
-208
-14,05 %
Compensations
de charges
11 960
9 873,85
8 850,2
8 270,3
8 200
10 235
-1 725
-14,42 %
Subvention
RUAMM
-
2 362,47
6 800
10 269,9
9 700
7 764
5 401,53
228,64 %
Allocations
familiales de
solidarité
2 150
2 936
2 838
2 800
2 956
2 883
733
34,09 %
CRS
3 088,47
3 362,01
3 574
3 760
3 921
4 119
1 030,53
33,37 %
Total
18 678,47 19 959,36
23 492,2
26 513,2
26 116
26 273
7 594,53
40,66 %
Total CAFAT
18 780,8
20 242,8
23 689,9
26 773,3
26 331
26 431
7 650,2
40,7 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
Entre 2014 et 2019, les compensations d’allègements enregistrées en produits par la CAFAT
ont diminué de 14,4 % et s’élevaient à 10,2 Md F CFP.
Les principales mesures d’allègements de cotisations instaurées par le gouvernement consistent
en des réductions des cotisations des employeurs sur les bas salaires (inférieurs ou égaux à 1,3
salaire minimum)
44
, des abattements sur les cotisations de secteurs aidés
45
et un taux réduit de
cotisation au RUAMM pour les travailleurs indépendants. La loi du pays n° 2019-6 du 7
février 2019 a prévu que le budget du territoire de la Nouvelle-Calédonie prend désormais à sa
charge la différence entre les taux effectifs de cotisation et les taux de droit commun au titre
des seules mesures de soutien à l’économie
46
, dont le coût est lui-même estimé de manière plus
stricte
47
.
L’ASS verse par ailleurs depuis 2015 une subvention annuelle d’équilibre à la CAFAT à
destination du RUAMM. Déficitaire de 0,6 Md F CFP dès l’année de sa mise en place en 2002,
ce régime a cumulé 1,2 Md F CFP de résultats négatifs entre 2002 et 2014. En 2015, il a
enregistré un important déficit (6,2 Md F CFP), qui a augmenté à nouveau en 2016
(7,2 Md F CFP). Cependant, si le RUAMM n’a pas enregistré des déficits plus élevés en 2017
(-346 M F CFP) et en 2018 (-670 M F CFP), c’est en raison des subventions versées par l’ASS,
44
La réduction est dégressive jusqu’à 1,3 salaire minimum garanti (156 568 F CFP en 2019) jusqu’à un taux
maximal de 60 % qui est porté à 75 % pour les entreprises de moins de 10 salariés ayant leur siège social et exerçant
principalement leur activité en dehors des communes de Nouméa, Dumbéa, Mont Dore et Païta.
45
Les entreprises hôtelières situées en dehors de la commune de Nouméa, les entreprises agricoles et assimilées
et les employeurs de personnel de maison peuvent bénéficier sous certaines conditions, d'un abattement de 75 %
sur les cotisations (parts patronale et salariale). De plus, les établissements d'accueil de la petite enfance et
périscolaire agréés sont exonérés des cotisations sociales jusqu'au 31 décembre 2021.
46
Certaines mesures de solidarité au bénéfice des étudiants ou aux titulaires d’une rente d’accident du travail ou
d’une pension d’invalidité sont désormais exclues de la compensation.
47
S’agissant des travailleurs indépendants, la compensation concerne uniquement ceux qui acquittent des
cotisations et acquièrent à ce titre des droits. Avant la loi précitée, la compensation des allègements de cotisations
reposait sur une convention du 17 août 2010 entre la Nouvelle-Calédonie, l’ASS et la CAFAT. Elle prévoyait
l’attribution de subventions à la CAFAT sur la base de justificatifs comptables fournis par cette dernière. En
pratique, le gouvernement compensait intégralement les pertes de cotisations du RUAMM, dont la situation était
la plus dégradée, mais seulement une part variable de celles des autres régimes.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
34
dont le montant cumulé a représenté plus de 36,9 Md F CFP entre 2015 et 2019. En 2019, le
montant du déficit s’est fortement aggravé et a atteint 7,1 Md F CFP, malgré une subvention
de 7, 7 Md F CFP.
Le montant de la subvention annuelle qui constitue une charge pour l’ASS est compensé
intégralement par les produits d’imposition. Le poids de l’assurance maladie dans les produits
fiscaux est alors croissant.
Résultats du RUAMM entre 2015 et 2019 (M F CFP)
Source : Cour des comptes, observations définitives relatives à la CAFAT, Novembre 2020.
2.1.2.3
Des dépenses de santé dont la progression va s’accentuer
L’activité du RUAMM progresse et cette tendance va s’accentuer sous l’effet notamment de
l’expansion de l’offre sanitaire et des pathologies chroniques. En ce sens, l’écart de dépense de
santé par rapport à la métropole tend à disparaître. Le vieillissement de la population
48
, le haut
niveau de socialisation des dépenses de santé permis par le RUAMM et l’évolution de l’offre
de soins concourent à réduire l’écart historique de dépenses de santé par habitant de la
Nouvelle-Calédonie par rapport à la métropole.
Selon les dernières données disponibles
49
, entre 2012 et 2017, la dépense courante de santé par
habitant a crû de 9,1 % en Nouvelle-Calédonie pour s’établir à 0, 38 M F CFP, contre 5,5 % en
métropole, ce qui traduit un phénomène de rattrapage partiel mais certain. Par ailleurs, en 2017,
la Consommation de soins et biens médicaux (CSBM) s’élevait à 94,9 Md F CFP, ce qui
représentait 9,4 % du PIB néo-calédonien, alors que ce taux était de 8,9 % du PIB de la France
métropolitaine (DROM compris).
En 2019, le RUAMM prenait en charge plus de 66 % des dépenses de santé. Les provinces en
prenaient en charge 20 % au titre de l’aide médicale des ménages aux revenus modestes et les
organismes complémentaires, composés notamment de quatre mutuelles locales, assuraient
environ 8 % du financement des dépenses de santé (pour 169 000 assurés sur 282 000 habitants).
Les dépenses de santé restant à la charge des ménages étaient estimées à environ 5 %.
48
L’âge constitue le principal facteur prédictif de la survenance de pathologies chroniques. Selon les projections
de l’Institut de la statistique et des études économiques (ISEE), en 2030, 62 400 personnes, soit un habitant sur
cinq, auront 60 ans ou plus et 16 500 personnes auront 75 ans et plus, soit près d’un habitant sur vingt. Ces
perspectives laissent présager une forte croissance des pathologies chroniques, qui appellent des soins continus et
donc coûteux.
49
DASS, rapport au Congrès sur le conventionnement des professionnels pour l’année 2019.
-6 260
-7 181
-346
-670
-7 064
-8 622
-13 981
-10 396
-10 370
-14 828
-20 000
-15 000
-10 000
-5 000
0
2015
2016
2017
2018
2019
Résultat
Résultat hors subvention
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
35
2.1.2.4
Des dépenses plus limitées en santé publique
Les charges liées aux actions de santé publique de l’ASS n’ont représenté en moyenne
que 3,7 % des charges de l’agence entre 2014 et 2019. Elles ont progressé de 4 % au cours de
cette période et s’établissaient à 1,4 Md F CFP en 2019.
Ces montants peu significatifs dans les comptes de l’agence, traduisent toute la difficulté de
confier à une même entité des missions de santé publique et un rôle de redistribution des
produits fiscaux sur le sanitaire et la protection sociale. L’analyse strictement budgétaire de
l’agence pourrait laisser penser que la mission de santé publique n’est qu’une mission annexe
de la structure.
Cette situation est régulièrement regrettée par le conseil d’administration de l’agence. C’est la
raison pour laquelle, depuis l’année 2017, le rapport annuel d’activité de l’ASS comprend une
présentation plus claire des réalisations de la mission de santé publique de l’ASS. Cette
présentation intervient en sus de la documentation comptable et budgétaire qui établit un état
des lieux du rôle de financeur de cet établissement.
Conformément à la première recommandation des observations définitives de la CTC
en 2014
50
, la présentation de l’information financière est désormais suffisamment précise et
transparente pour que le conseil d’administration puisse en connaître les enjeux. Par ailleurs,
les diaporamas diffusés en conseil d’administration fournissent des informations synthétiques
et claires de la situation financière de l’ASS pour permettre à cette instance de prendre des
décisions dans ce domaine.
2.1.3
Des charges de gestion qui restent modestes
Tandis que les « charges à caractère général » de l’agence ont progressé de 52 % entre 2014
et 2019, « les charges de personnel » ont diminué de 9 %. Ces deux catégories de charges
représentent les frais de gestion de l’agence.
La part que représente l’addition des charges à caractère général et des charges de personnel
dans les charges de fonctionnement reste modeste. Entre 2014 et 2019, elle a varié entre 2,54 %
et 3,97 % et s’établissait à 3,22 % cette dernière année, contre 3,78 % en 2014.
2.1.3.1
Une baisse conjoncturelle des dépenses de personnel
Les charges de personnel qui s’établissaient à 399,6 M F CFP en 2014 ont diminué de près
de 9 % pour atteindre 369,9 M F CFP en 2019 après s’être élevées à 476,1 M F CFP en 2017.
Suite à la première baisse engagée en 2018, la diminution observée en 2019 est liée au transfert
du centre de soins en addictologie géré par l’ASS au CHS ainsi qu’à l’annonce de la fermeture
de l’agence, qui a eu un effet négatif sur les recrutements sur postes vacants.
50
« Recommandation n°1. La chambre recommande à l’ASS de s’attacher à donner une lisibilité immédiate à ses
comptes et à renforcer le niveau de la qualité de l’information financière qu’elle diffuse à ses membres, à sa
collectivité de tutelle ou au public ».
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
36
Le nombre d’équivalents temps plein (ETP) de l’ASS a progressé de 48 à 52 effectifs entre 2014
et 2018 puis a diminué à 44,5 en 2019, ce qui représente 3,5 ETP de moins qu’en 2014. Cet
effectif comporte 21 personnels de catégorie A (47,2 % de l’effectif total), 16 agents de
catégorie B (5,9 %) et 7,5 personnes de catégorie C (16,9 %). Le personnel est à 84 % féminin
et sa moyenne d’âge est de 43 ans. Depuis 2014, la répartition entre les personnels de
catégorie A et B s’est inversée, cette deuxième catégorie était alors majoritaire. La structuration
et la montée en charge des actions de prévention, au cours de la période sous revue, a conduit
l’ASS à recruter plus de personnels d’encadrement et de spécialité en santé publique
notamment.
Charges de personnel entre 2014 et 2019 (M FCFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation 2014-
2019
ETP
48
48
50
50
52
44,5
-3,5
- 7,29 %
Charges
de
personnel
399,6
441,26
465,04
476,16
425,12
363,89 -35,71
- 8,94 %
Coût
moyen
annuel / agent
8,32
9,19
9,3
9,52
8,18
8,18
-
0,15
- 1,77 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
Le
coût
moyen
annuel
par
agent
a
cependant
légèrement
diminué
entre
2014
et 2019 (- 150 M F CFP) pour s’établir à 8,18 M F CFP, ce qui représentait une baisse de 1,8 %.
Cette diminution est essentiellement liée à des départs de personnel concernés par des
rémunérations importantes en 2018. La somme brute des 10 rémunérations les plus importantes
a ainsi baissé de plus de 15 % et s’élevait à 74 M F CFP en 2019 contre près de 88 M F CFP
en 2014.
Montant annuel brut des dix plus importantes rémunérations (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
87,87
87,65
98,69
108,42
91,96
74,32
-13,55
-15,42 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
En 2019, 80 % de l’effectif de l’agence relève de la fonction publique. Pour les personnels
concernés, la politique de rémunération mise en place par l’agence est conforme à la
règlementation applicable à la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie. Le régime appliqué
aux agents contractuels n’appelle pas d’observation : les contractuels à durée indéterminée et
déterminée sont rémunérés en application de la grille de rémunération de leur emploi applicable
dans la fonction publique. Les trois personnes en contrats à durée indéterminée sont ceux qui
étaient employés par l’association « prévention santé » lors de son transfert à l’ASS
51
.
51
En application de la délibération GNC n°361 du 18 janvier 2008.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
37
Bien qu’elles résultent de causes exogènes, les économies sur les charges de personnel réalisées
en 2018 et 2019 sont à poursuivre afin de réduire davantage le poids de ces dépenses et orienter
autant que possible la ressource fiscale sur les missions de l’agence en lieu et place de son
administration et sa gestion interne.
2.1.3.2
Des charges à caractère général affectées par le coût du recouvrement des
taxes
La progression des « charges à caractère général » s’élève à 52,3 % (385,1 M F CFP) entre
2014 et 2019, soit un taux de croissance annuel moyen de 8,8 %. Ces charges comprennent les
frais de gestion du recouvrement de l’impôt qui sont payés à la Nouvelle-Calédonie et à la
CAFAT
52
. Ces frais représentaient, à eux seuls, 74 % des charges à caractère général
(soit 827,7 M F CFP) en 2019 et 51 % (378,6 M F CFP) en 2014.
Charges à caractère général entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
736,5
946,8
843,9
870,9
771,7
1 121,6
385,1 52,3 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
L’évolution des autres charges générales n’appelle pas d’observation : les charges relatives au
fonctionnement courant de l’agence ne progressent pas de manière atypique. Il est à ce titre
relevé que les « frais de voyages, déplacements et missions » s’élevaient à 15,5 M F CFP
en 2014 et à 11,5 M F CFP en 2019, soit une baisse de 25 %, les frais de carburant ont diminué
de 42 % pour s’établir à 1,1 M F CFP, les fournitures administratives ont baissé de 63 % et
s’élevaient à 1,15 M F CFP et les frais de télécommunication ont baissé de 12 %, soit en valeur
une baisse de 5,4 M F CFP en 2014 à 4,7 M F CFP en 2019.
En matière immobilière, si l’agence ne s’est pas dotée d’un schéma directeur immobilier, elle
a réalisé un état précis de son patrimoine immobilier. L’ASS dispose d’une superficie
de 1635 m
2
dont 700 m
2
en propriété et 935 m
2
en location.
La propriété porte sur deux étages de l’immeuble Gallieni XVI, sis16 rue du Général Gallieni
à Nouméa
53
. L’ASS loue un étage supplémentaire dans le même bâtiment. Elle est par ailleurs
locataire de locaux sis 7ter avenue de la République dont le bail a été résilié au 31
décembre 2020 pour rassembler les services dans les surfaces occupées par l’agence dans
l’immeuble Gallieni.
Le coût des locations mobilières s’établissait à 39,1 M F CFP en 2014 et à 36,7 M F CFP
en 2019, soit une baisse de 6,3 % (2,4 M F CFP).
52
Des frais de gestion sont facturés par le gouvernement et la CAFAT (qui recouvre la CCS sur les revenus
d’activité) sur le montant des recettes fiscales distribuées à l’ASS. La progression de ces frais est liée à la hausse
des produits d’impositions redistribués à l’ASS.
53
L’agence est propriétaire du 3
ème
et du 4
ème
étage de cet immeuble ; le 4
ème
étage a été acquis le
13 décembre 2014. Aucune cession, ni acquisition n’a eu lieu postérieurement à cette date.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
38
2.2
Une situation financière qui se tend
2.2.1
Des investissements massifs qui pèsent dans l’endettement
L’ASS a participé au financement de deux opérations hospitalières : le médipôle de Koutio et
le sanitaire de Koné.
L’évolution de l’offre de soins en établissement de santé : regroupements, diversification et
rééquilibrage territorial.
Le « médipôle » de Koutio est entré en activité en décembre 2016. Le centre hospitalier territorial public
doté de 528 lits et places, regroupe sur ce site des activités auparavant réparties sur trois sites distincts.
Le « médipôle » avait précédemment accueilli en 2015 un centre privé de soins de suite et de
réadaptation (CSSR) et depuis 2016, un centre de radiothérapie privé.
Par ailleurs, depuis septembre 2018 et suite à ce mouvement de concentration de l’offre publique, la
clinique Kuindo-Magnin a regroupé sur un seul site nouméen les trois anciens établissements privés du
territoire. Elle est dotée de 219 lits et places de médecine, chirurgie et maternité et de 50 lits de soins de
suite et de réadaptation et propose des spécialités qui ne sont pas exercées dans les établissements
publics, telles que l’urologie.
En outre, pour rééquilibrer l’offre de soins sur le plan territorial, le centre hospitalier du nord regroupe
depuis décembre 2018 les trois sites hospitaliers publics du nord sur la commune de Koné. Les deux
anciens sites existants ont été reconvertis en sites d’aval pour les soins de suite et de réadaptation. Cet
ensemble a porté la capacité d’hospitalisation du nord à 150 lits, soit 50 de plus qu’en 2017.
Le plan de financement du médipôle de Koutio s’est élevé à 49,98 Md F CFP avec une
participation de l’ASS de 34,15 Md F CFP
54
et celui du pôle sanitaire de Koné à 6,7 Md F CFP
avec une participation de l’ASS de 3,74 Md F CFP
55
.
Pour la première opération l’ASS a contracté en 2014 un emprunt de 8,66 Md F CFP auprès de
la caisse des dépôts et consignations (CDC) sur 24 ans et un emprunt de 5,51 Md F CFP auprès
de l’Agence française de développement (AFD) sur 19 ans.
Pour la seconde opération l’ASS a contracté au cours de l’année 2016, un emprunt
de 1,70 Md F CFP sur 24 ans auprès de la CDC et de 1,71 Md F CFP sur 19 ans auprès de
l’AFD.
En 2019, les dépenses d’investissements qui se sont élevées à 926,2 M F CFP, ont
majoritairement été mobilisées par le remboursement de ces emprunts pour 753,5 M FCFP
(dont 608,9 M F CFP pour le médipôle et 144,6 M F CFP pour le pôle de Koné).
54
En sus, une participation de l’État de 5 Md F CFP, du CHT de 8,960 Md F CFP et de la Nouvelle-Calédonie
de 1,87 Md F CFP, ont été engagées.
55
En sus, une participation de l’État de 987 M F CFP, du CHT de 274 M F CFP et de la Nouvelle-Calédonie
de 1,78 M F CFP, ont été engagées.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
39
Cette même année, les autres dépenses d’investissement se sont élevées à 170,1 M F CFP et ont
principalement concerné le financement de l’opération immobilière de regroupement de
la DASS
56
et une subvention de 50,4 M F CFP au CHS pour un réaménagement immobilier
57
.
De plus, les investissements courants de l’ASS se sont élevés à 2,1 M F CFP.
Les charges annuelles d’investissement ont diminué de 90 % depuis l’année 2014, où elles
s’élevaient à 8,7 Md F CFP, en raison de l’incidence plus faible du remboursement des
emprunts contractualisés et de l’absence de nouvel emprunt depuis 2016
58
. L’encours de la dette
a quasiment doublé puisqu’il était de 7,6 Md F CFP en 2014 et qu’il atteignait 15 Md F CFP
en 2019 (cf. annexe n°2).
Le poids des dettes sur les fonds propres est passé de 55 % en 2014 à 114 % en 2018 et 104 %
en 2019.
Poids des dettes sur les fonds propres entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Dettes
7 600
14 138
15 712
16 986
16 585
15 831
Fonds propres
13 779
16 043
19 615
16 125
14 490
15 282
Ratio
55 %
88 %
80 %
105 %
114 %
104 %
Source : CTC, d’après les comptes de gestion
2.2.2
Une capacité d’autofinancement en baisse
La capacité d’autofinancement (CAF) de l’agence a diminué de 47 % pour l’épargne brute et
de 67 % pour l’épargne nette entre 2014 et 2019.
Le taux d’épargne brute qui s’établissait à 11 % en 2014 a été négatif en 2017 (-6,4 %) et 2018
(-1,2 %) et ne s’élevait plus qu’à 4,2 % en 2019.
Capacité d’autofinancement entre 2014 et 2019 (M F CFP)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Variation
2014-2019
CAF brute
3 696,87 2 838,79 4 418,83 -2 451,34 -540,46 1 961,14 -1 735,73 -46,95 %
Remb. du capital
-
-
125
426,38
401,14
753,48
628,48
502,79 %
CAF nette
3 696,87 2 838,79 4 293,83 -2 877,72 -941,6 1 207,66 -2 489,21 -67,33 %
Source : CTC, d’après les comptes administratifs
Le fonds de roulement exprimé en jours de fonctionnement de l’ASS a diminué de 59 jours
en 2014 à 29 jours en 2019. Cet indicateur s’est toutefois amélioré par rapport à l’année 2018
où il atteignait 20 jours. En valeur, le fonds de roulement s’élevait à 3,5 Md F CFP en 2019,
contre 2,5 Md F CFP un an plus tôt, mais il atteignait 4,4 Md F CFP en 2017.
56
Délibération n°4291/043/2019 du 14 janvier 2019 et convention modifiée du 31 mai 2018 relative aux travaux
de regroupement de la DASS entre le gouvernement et l’ASS.
57
Délibération n°4921/045/2019 du 14 janvier 2019.
58
L’emprunt de 8,6 Md F CFP contractualisé auprès de la CDC en 2014 pour le médipôle, a fait l’objet d’une
consolidation, c’est-à-dire du regroupement de quatre lignes de tirages différentes en une seule, en 2018.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
40
3
APPROFONDIR LES REALISATIONS DE L’AGENCE
Les importantes interventions financières de l’ASS au titre de la politique sanitaire et de la
protection sociale de la Nouvelle-Calédonie, devraient la conduire à participer au contrôle de
l’utilisation des crédits qu’elle redistribue.
Par ailleurs, la mise à jour de ses programmes de santé publique et de leurs modalités
d’évaluation est à engager pour les adapter, de manière continue, aux besoins de santé les plus
récents.
Enfin, l’agence devrait produire des données médico-économiques tirées de ses programmes de
santé publique, afin d’éclairer le gouvernement sur les coûts de fonctionnement des
programmes de santé publique et le bénéfice de ses actions sur la santé de la population.
3.1
Participer au contrôle des organismes bénéficiaires
En 2019, en sus des financements attribués à la CAFAT (26,4 Md F CFP) et aux établissements
de santé pour leur fonctionnement (3,7 Md F CFP), l’ASS a notamment redistribué les montants
suivants :
-
7,4 Md F CFP au régime handicap, dépendance et perte d’autonomie ;
-
2,1 Md F CFP au fonds social de l’habitat ;
-
415,7 M F CFP à la Nouvelle-Calédonie pour le soutien au plan de santé « Do
Kamo », le soutien à des activités de santé publique
59
et une participation financière
au plan territorial sécurité et délinquance
60
;
-
225,1 M F CFP au secteur associatif du handicap, des soins, de la dépendance et
de la prévention ;
-
206 M F CFP au groupement d’intérêt public (GIP) « Union pour le handicap »
61
(153 M F CFP)
et
au GIP
« Handicap,
dépendances et bien vieillir »
62
(0,53 M F CFP) ;
-
187 M F CFP au CHS ;
-
90 M F CFP à l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie.
59
Il s’agit notamment de financements apportés à des réseaux qui sont des associations de professionnels de santé
opérant autour d’un groupe cible de patients afin d’améliorer la prise en charge. Selon les années, les financements
sont versés aux réseaux qui interviennent en oncologie, maternité, santé mentale, soins palliatifs ou insuffisance
rénale chronique.
60
L’ASS participe à la mise en œuvre du plan territorial de sécurité et de prévention de la délinquance à travers le
programme de prévention des addictions, notamment au titre de la lutte contre les violences et des problématiques
sanitaires et sociales associées à l’alcool.
61
Le GIP « Union pout le handicap » a été constitué en 2010, il a pour objet d’apporter son concours à la mise en
œuvre du RHPA en intervenant sur l’ensemble du territoire auprès des professionnels, des patients et de leurs
proches (aide à la scolarisation des enfants, lutte contre l’isolement…).
62
Le GIP « Handicap, dépendances et bien vieillir » a été créé en 2013 pour apporter un soutien aux associations
du secteur du handicap et du bien vieillir et aux établissements de prise en charge des patients concernés.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
41
Cet ensemble de charges s’élevait ainsi à 10,6 Md F CFP en 2019 contre 8,2 Md F CFP en 2014.
La progression observée sur ces dépenses s’établissait donc à 30,5 % (2,5 Md F CFP).
Les statuts de l’ASS ne lui confèrent pas le pouvoir de contrôler l’utilisation des crédits qu’elle
redistribue aux établissements hospitaliers, à la CAFAT et aux acteurs du handicap et de la
dépendance.
Le contrôle budgétaire et financier de ces acteurs est confié au gouvernement qui l’exerce à
travers la direction des affaires budgétaires et financières et la DASS. En complément de
l’action de la DASS dans ce domaine, il serait de bonne administration que l’ASS participe au
contrôle budgétaire pour vérifier le bon usage des fonds qu’elle reverse.
Après modification des statuts de l’ASS, cette participation pourrait prendre des formes variées
telles que :
-
la participation à la conclusion des conventions pluriannuelles d’objectifs avec
les établissements de santé et les organismes qui bénéficient de ses concours
financiers
63
;
-
la
participation
aux
dialogues
annuels
de
gestion
organisé
par
le
gouvernement
avec les établissements de santé et les organismes bénéficiaires ou
encore le pilotage de dialogues de gestion autonomes lorsqu’ils ne sont pas
organisés par le gouvernement (par exemple avec les partenaires associatifs) ;
-
la réalisation d’audits ou de missions thématiques, notamment sur les opérations
immobilières hospitalières.
Le conseil d’administration de l’agence devrait arrêter un programme pluriannuel d’audits et
de contrôles afin d’en garantir la fréquence et leur évaluation.
Il est toutefois observé que les financements adressés aux associations font l’objet de
délibérations du conseil d’administration de l’ASS et d’un contrôle annuel des réalisations par
celui-ci. Depuis 2017, le rapport du compte administratif fait état de chaque subvention versée
aux associations au cours de l’année précédente. Le compte administratif 2019 comportait une
annexe détaillant l’identité et l’objet des associations subventionnées.
En 2019, 225,1 M F CFP ont été versés à des associations. Ces versements faisaient suite à des
requêtes et plus rarement à des appels à projets organisé par l’agence
64
. Sur ce montant 79 %
(177,1 M F CFP) ont été consacrés à celles intervenant dans le champ de la prévention et de
l’accompagnement des patients et 21 % (48 M F CFP) aux associations intervenant dans le
domaine du handicap et de la dépendance. L’accord de financement et le contrôle des
associations intervenant dans ce dernier champ est assuré par la DASS. L’agence établit un
bilan annuel des comptes des associations du handicap et de la dépendance à réception des
documents comptables.
63
Le terme « participation » est utilisé puisque que de telles conventions sont régulièrement conclues par le
gouvernement (via son secrétariat général ou la DASS) avec les établissements sanitaires et médico-sociaux et
avec les organismes bénéficiaires de crédits publics au premier rang desquels est identifiée la CAFAT.
64
Dans la grande majorité des cas les associations déposent librement une demande de subvention à l’ASS. Un
dossier type est à renseigner (objet de l’action, état financier précis de l’association, modalités de financement du
projet…).
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
42
Recommandation n° 3 : sous réserve de l’obtention de la compétence de contrôle des
organismes qui bénéficient de ses concours financiers, la chambre recommande à
l’ASS d’adopter un programme pluriannuel d’audits et de contrôles de ces
structures.
Le rapport d’observations définitives de la CTC relatif aux relations entre la Nouvelle-
Calédonie et l’agence sanitaire et sociale comporte une recommandation adressée au
gouvernement visant à la doter de la compétence de contrôle sur les organismes qu’elle finance.
3.2
Redéfinir et mieux évaluer les priorités de santé publique
Concernant l’exercice des actions de santé publique, la problématique concerne la mise à jour
des priorités gouvernementales pour mieux répondre à l’évolution régulière des besoins de
santé de la population.
3.2.1
Des priorités de santé publique inchangées depuis un quart de siècle
Les priorités de santé publique ont été déterminées par la délibération du Congrès
modifiée n° 490 du 11 août 1994 relative au « plan de promotion de la santé et de maîtrise des
dépenses de soins sur le territoire de Nouvelle-Calédonie ». Le troisième alinéa de l’article 1
er
de cette délibération, prévoit que « la promotion de la santé est favorisée par l’adoption de
programmes de santé publique, incluant des actions de prévention et d’éducation sanitaire,
visant à améliorer le bien-être physique, mental et social de la population ».
L’article 14 de cette délibération précise que « Les thèmes prioritaires de prévention suivants
sont approuvés :
- Lutte contre les abus d'alcool.
- Lutte contre l'infection par le VIH et le SIDA.
- Lutte contre la tuberculose active.
- Lutte contre le rhumatisme articulaire aigu.
- Dépistage et prise en charge du diabète sucré.
- Dépistage et prise en charge de l'hypertension artérielle.
- Protection contre les maladies infectieuses par les vaccinations et les revaccinations
obligatoires.
- Dépistage du cancer du col de l'utérus.
- Bon usage du médicament.
- Dépistage du cancer du sein. ».
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
43
Les axes des programmes de prévention et de promotion de la santé (
programmes de santé
publique
) conduits par l’ASS
65
ont donc été déterminés en application des priorités de santé
publique définies en 1994.
Les travaux d’élaboration du plan de santé calédonien « Do-Kamo » adopté le 24 mars 2016
par le congrès (cf. supra), ont été précédés « d’assises de la santé » organisées en 2015 par le
gouvernement
66
. L’ASS a pris part à ces réflexions en pilotant le groupe de travail « promotion
de la santé ». De nouvelles priorités de santé publique ont émergé au cours de ces travaux, en
particulier les thématiques du « bien vieillir », de l’activité physique en santé, de la santé
scolaire ou des 1 000 premiers jours de la vie. Pour autant, la délibération du 11 août 1994 n’a
pas été modifiée en conséquence.
3.2.2
Adapter les priorités à l’évolution des besoins de santé
Il ressort des échanges organisés au cours de la présente instruction avec les responsables des
programmes de santé publique de l’ASS et avec la DASS, la nécessité de mettre à jour les
priorités de santé publique pour tenir compte des changements intervenus en matière de santé
depuis 25 ans : démographie, organisation de l’offre de soins, évolution des maladies
chroniques, de la natalité, de la mortalité et des modes de vie (déplacements, habitudes
alimentaires, sédentarité, pratiques sexuelles…).
Seuls trois programmes complémentaires de prévention, qui entrent dans le champ des priorités
de 1994, ont été lancés par l’ASS : la prévention de la surcharge pondérale en 2008, l’extension
du programme VIH et SIDA aux maladies sexuellement transmissibles en 2011 puis la
promotion de l’équilibre affectif et sexuel en 2016 et la création du programme de la santé orale
en 2014.
À ce jour, le troisième axe du plan de santé « Do Kamo » intitulé « assurer une offre de santé
efficiente grâce à une offre de prévention renforcée et coordonnée avec l’offre de soins »,
prévoit, notamment à travers son objectif opérationnel n°15, la nécessité « d’actualiser et
développer la programmation des priorités de santé publique ». Dès lors, « les problématiques
prioritaires de santé publique pour la Nouvelle-Calédonie seront actualisées » tous les dix ans.
Par ailleurs, le plan de santé prévoit que les nouvelles priorités de santé publique qui ont émergé
des travaux d’élaboration du plan de santé, feront l’objet d’une mise en œuvre spécifique. La
mise en œuvre de ce plan n’est cependant que partielle et a pris du retard en raison de la crise
sanitaire de l’année 2020.
65
L’ASS met en œuvre l’ensemble des programmes de prévention cités à l’article 14 de la délibération du 11 août
1994 à l’exception du « bon usage du médicament » qui relève de la DASS.
66
La tenue d’« assises de la santé » était une commande de la Nouvelle-Calédonie inscrite dans le discours de
politique générale du président du gouvernement prononcé devant le Congrès le 13 avril 2015. Elles ont favorisé
un débat avec la société civile pour déterminer les pistes d’amélioration du système de santé. Des consultations et
des ateliers thématiques, groupes de travail et séminaires se sont tenus tout au long de l’année 2015. Source :
dossier de presse des assises de la santé 2015, gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, 2015.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
44
3.2.3
Rénover l’évaluation des programmes de santé publique
3.2.3.1
Accélérer la fréquence des évaluations
La majorité des programmes de santé publique de l’ASS sont organisés sur la base de plan
quinquennaux élaborés en concertation avec les collectivités de la Nouvelle-Calédonie et les
acteurs concernés (CAFAT, professionnels de santé, associations de patients ou d’usagers).
La DASS est règlementairement compétente pour exercer le contrôle et l’évaluation des
programmes prioritaires de prévention
67
. Elle n’a cependant conduit qu’une seule évaluation de
ce type en 2013 sur le dépistage des cancers féminins.
L’ASS s’est alors engagée dans des démarches d’évaluation des programmes pour en mesurer
leur efficacité. L’ensemble des programmes fait l’objet d’indicateurs permettant de rendre
compte du niveau d’accomplissement de leurs actions. Ces indicateurs sont d’ordre
épidémiologiques et administratifs.
Le suivi de ces programmes est cependant hétérogène. L’annexe n°1 au présent rapport fait état
des principaux constats tirés du suivi des programmes de santé publique.
Les évaluations des programmes sont réalisées en interne ou en externe selon les compétences
disponibles à l’agence. Le choix de faire appel à des intervenants externes résulte de la nécessité
d’organiser certaines actions de prévention dans les établissements d’enseignement et de la
nécessité de disposer de compétences médicales et paramédicales spécialisées.
Les programmes suivants ont fait appel à la sous-traitance :
- le programme de dépistage des cancers féminins ;
- le programme de rhumatisme articulaire aigu ;
- le programme d’hygiène bucco-dentaire et le programme addictologie.
La dernière évaluation externe du programme diabète date de 2011
68
, celle du programme santé
sexuelle de 2014, alors que le programme de prévention de la santé orale a fait l’objet d’une
évaluation en 2019 et que le
plan « mange mieux bouge plus 2013-2017 » a été évalué
entre 2017 (obésité infantile) et 2018
69
. Le dépistage organisé du cancer du sein a fait l’objet
d’une évaluation en 2019.
67
Arrêté n° 2006-435/GNC du 16 février 2006 fixant les attributions et l'organisation de la direction des affaires
sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie (article 1
er
).
68
En 2019, une évaluation externe dépistage itinérant de la rétinopathie diabétique a été réalisée dans le cadre d’un
stage de master d’une étudiante de l’Université de Lyon. La prévention des amputations était en cours en 2020 et
la conduite d’une étude de prévalence du diabète en population devrait être organisée en 2021 en lien avec la
DASS.
69
L’évaluation externe réalisée en 2018 a permis de constater les points forts du programme et de faire émerger
des pistes évolutives autour de la gouvernance de la politique globale de lutte contre l’obésité en Nouvelle-
Calédonie.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
45
Liste des évaluations externes des programmes de santé publique (2006-2019)
Programme
Objet de l’évaluation
Année
VIH/SIDA/infections
sexuellement transmissibles
Période 2001-2005
2006
Mi-parcours
2010
Période 2008-2013
2014
RAA
Programme
2017
Addictologie
Programme
2010
Dispositif addiction chez
les jeunes
2017
Diabète
Programme
2011
Rétinopathie
2019
Prévention des amputations
2020
Surcharge pondérale
Période 2008-2011
2012
Obésité infantile
2017
Période 2013-2017
2018
Cancer du sein
Programme
2019
Cancer du col de l’utérus
Vaccination
2016
Santé orale
Période 2014-2018
2019
Source : ASS, réponse au questionnaire (question n°50)
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
46
Il ressort des évaluations que les programmes sont appliqués en cohérence avec les objectifs du
plan de santé calédonien et qu’ils contribuent à l’amélioration des compétences des
professionnels
70
et des connaissances épidémiologiques. Plus généralement, les évaluations
font apparaitre que la qualité de l’expertise de l’ASS est reconnue par les acteurs de santé et
que ses actions contribuent à réduire les inégalités en santé. Les évaluations font, par ailleurs,
mention d’améliorations à engager pour favoriser l’action commune des différents
professionnels de santé qui interviennent sur une thématique ainsi que pour renforcer les actions
transversales entre les programmes.
Il ressort également que, les programmes n’ayant pas bénéficié d’une évaluation récente – au
cours des deux dernières années – fonctionnent avec des objectifs datés qui ne correspondent
pas nécessairement aux objectifs attendus initialement ou aux besoins en santé les plus
immédiats. Les incidences de l’absence de mise à jour des programmes concernés sur la santé
des populations qu’ils ciblent ne sont pas mesurées.
3.2.3.2
Retravailler les modalités d’évaluation
Il est observé, à travers le renforcement quantitatif et qualitatif des rapports d’activité de l’ASS,
que le suivi chiffré des actions s’est amélioré entre 2014 et 2019. Cette progression notable
participe à une meilleure communication des actions de l’agence et à une plus grande
accessibilité des professionnels et du grand public aux données d’activité des programmes de
santé publique.
En complément de la nécessité de procéder à des évaluations plus régulières des programmes
de santé publique qu’elle pilote, l’ASS doit rénover la méthode de ces évaluations. Le prochain
cycle d’évaluation devra ainsi permettre de mesurer pour chaque programme :
-
les moyens humains et techniques affectés ;
-
les données épidémiologiques
;
-
les dépenses annuelles ;
-
la cohérence du programme avec les besoins de santé ;
-
les résultats obtenus et l’atteinte ou l’analyse des écarts avec les cibles fixées.
Les indicateurs associés aux évaluations comprendront des objectifs ciblés et comparables dans
le temps, afin que l’ASS puisse mesurer les progrès accomplis d’un cycle d’évaluation à l’autre.
Au cours l’instruction, l’ASS a reconnu la nécessité d’engager en lien avec la DASS, une
démarche générale de rénovation des indicateurs. Elle a indiqué à cette fin, que le service
« baromètres et études » de l’agence sera le support de cette démarche. L’agence a précisé
qu’une fiche d’indicateur type élaborée sur le modèle des fiches produites par l’OMS est en
cours d’élaboration en 2020.
In fine, il serait nécessaire que le conseil d’administration de l’agence puisse délibérer sur un
plan
pluriannuel
d’évaluation
des
programmes
de santé
publique
afin
d’engager
progressivement une amélioration de leur contenu.
70
En particulier pour ce qui concerne les débats qui animent la santé publique sur la vaccination, le bien fondé des
dépistages, la nécessité de la prévention…
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
47
3.3
Contribuer à l’efficacité du système de santé et de protection sociale
Les évaluations des programmes de santé publique ont relevé le manque de données médico-
économiques et d’études d’impact portant sur le système de santé calédonien. Dans un objectif
de progression qualitative, chaque programme devrait ainsi fournir des données relatives aux
bénéfices de ses actions. La documentation des résultats s’accompagnerait d’un chiffrage des
économies induites par la prévention et les dépistages réalisés. Cette évolution permettrait à
l’ASS d’apporter une contribution à la mesure des coûts du système de santé et de protection
sociale calédonien. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Cette nouvelle dimension des programmes de santé publique semble indispensable dans la
situation de fragilité de l’économie calédonienne et devant les difficultés financières
persistantes du RUAMM à laquelle s’ajoute une augmentation prévisible de la demande de
soins et des coûts associés.
Dans ce contexte, la production par l’ASS de données médico-économiques constituerait une
aide à la décision : le gouvernement disposerait d’éléments pour arbitrer entre les différentes
stratégies de développement du système de santé. Cette comparaison serait réalisée par rapport
à un seuil au-delà duquel les charges engagées au titre d’une politique de santé publique seraient
trop importantes pour l’efficacité attendue sur l’état de santé de la population concernée
71
.
La justification d’engager l’ASS dans cette voie peut également être tirée de la troisième
recommandation adressée par la CTC dans ses observation définitives de 2014
72
qui relevait le
besoin de mieux comptabiliser les actions de prévention de l’ASS.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la directrice par intérim indique que « l’agence
s’est engagée dans une démarche de rénovation de ses indicateurs d’évaluation avec le
recrutement en juillet 2020 d’un médecin de santé publique en charge, notamment, de
l’évaluation interne.
Une fiche de procédure a été adressée à l’ensemble des personnels de l’ASS afin de normaliser
les indicateurs de suivi et d’évaluation des programmes, d’en définir une carte d’identité et une
périodicité qui permette leur reproductivité dans le temps. Les programmes de dépistage des
cancers féminins et de lutte contre le rhumatisme articulaire aigu ont déjà engagé cette
démarche.
71
« Il s’agit donc d’établir la « rentabilité » d’une intervention publique en santé, sans que celle-ci ne soit
considérée sous un angle exclusivement financier : les avantages peuvent s’exprimer sous la forme de bénéfices
non monétaires (diminution de la morbi-mortalité, augmentation de l’espérance de vie, de la qualité de vie, etc.)
et ces derniers incluent des dimensions comme l’accès aux soins ou l’équité. », Claude Le Pen et Pierre Lévy.
L’évaluation médico-économique concepts et méthodes.
LGM Sciences, p.7. Définition : « Une revue de morbidité
et de mortalité est une analyse collective, rétrospective et systémique de cas marqués par la survenue d'un décès,
d’une complication, ou d’un évènement qui aurait pu causer un dommage au patient, et qui a pour objectif la mise
en œuvre et le suivi d'actions pour améliorer la prise en charge des patients et la sécurité des soins. », source :
Haute autorité en santé (
)
72
« Recommandation n°3.
La chambre recommande à l’agence de poursuivre le développement de ses actions
de prévention, dont la comptabilisation devra obéir à davantage de rigueur afin de ne pas en altérer la réalité. »
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
48
Un ordre de priorité a également été défini pour la définition des indicateurs des programmes :
-
diabète ;
-
addictologie ;
-
santé sexuelle ;
-
rhumatisme articulaire aigu ;
-
dépistage des cancers féminins et vaccination HPV ;
-
santé bucco –dentaire ;
-
prévention des pathologies liées à la surcharge pondérale ;
-
tuberculose. »
Recommandation n° 4 : la chambre recommande à l’ASS d’adopter un plan rénové
d’évaluation des programmes de santé publique, contributif à la mesure des
bénéfices et des coûts du système de santé et de protection sociale.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
49
4
MAITRISER LES FINANCES ET CLARIFIER LE DEVENIR DE
L’AGENCE
Le plan de santé calédonien prévoit de supprimer l’ASS. Dans l’attente, l’amélioration de la
situation financière de l’agence reste un sujet important. Le faible poids des charges de gestion
interne (« charges générales ») impose d’orienter le rétablissement de la situation financière sur
d’autres leviers. La pérennité de l’équilibre financier de l’ASS n’est en effet envisageable qu’à
condition de renforcer la gestion comptable et de faire évoluer son mode de financement.
Le projet de suppression de l’agence tel qu’il a été élaboré en 2018 ne semble pas
nécessairement apporter la réponse la plus adaptée à l’amélioration de la gouvernance du
système de santé dans le contexte d’aujourd’hui. La transformation de l’ASS en une agence de
santé publique rénovée est une option à étudier puisqu’elle pourrait contribuer à améliorer la
réponse aux besoins de santé de la population.
4.1
Sécuriser la situation financière de l’établissement
Le rétablissement d’une situation financière saine impose une montée en compétence de la
comptabilité de l’ordonnateur et une diversification des produits.
L’exécution du budget de l’ASS est soumise à la nécessité de participer à l’équilibre des
comptes sociaux : l’article 1
er
de la loi du pays du 11 janvier 2002
73
dispose en effet que « la
Nouvelle-Calédonie, directement ou par l’intermédiaire de son agence sanitaire et sociale et la
CAFAT assurent chacune dans son domaine de compétence l’équilibre financier des différentes
branches du régime général ».
Cette situation fait peser un risque à la Nouvelle-Calédonie qui doit in fine assurer l’équilibre
des comptes de l’ASS pour que celle-ci puisse jouer pleinement son rôle de financeur du
système de santé et de protection sociale.
C’est au titre de cette disposition législative que le gouvernement a versé, par l’intermédiaire
de l’ASS, des subventions annuelles d’équilibre au RUAMM (cf. supra). L’instabilité
financière du régime d’assurance maladie a obligé le gouvernement à agir pour éviter la
cessation du paiement des prestations. Ces subventions qui se sont élevées à 36,9 Md F CFP
entre 2015 et 2019
74
, ont toujours été réévaluées à la hausse en cours d’exercice budgétaire et
donnent lieu à des versements parfois réalisés en urgence par l’agence.
73
Loi du pays n° 2001-016 du 11 janvier 2002 relative à la sécurité sociale en Nouvelle-Calédonie.
74
Aucune subvention n’a été versée au RUAMM au cours de l’exercice 2014.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
50
Montant annuel au budget primitif (BP) et au compte administratif (CA) de la
subvention au RUAMM (M F CFP)
Source : budgets primitifs, décisions modificatives et comptes administratifs de l’ASS
À titre d’exemple, le 19 novembre 2019, la situation de trésorerie du RUAMM ne permettait
plus le paiement des sommes dues aux professionnels de santé libéraux et aux établissements
privés
75
. Cette situation a été réglée à la mi-décembre 2019 par le versement d’une dotation
complémentaire de 5,2 Md F CFP de l’ASS au RUAMM, en dehors de toute prévision
budgétaire. C’est à la suite de cet évènement que, en complément des premières mesures
adoptées le 2 octobre 2019 par le conseil d’administration de la CAFAT, le président du
gouvernement a présenté un plan de redressement des comptes du RUAMM lors d’une séance
extraordinaire du conseil d’administration de la CAFAT le 29 novembre 2019
76
.
La trésorerie du RUAMM a également des incidences sur celles des établissements de santé
publics et des provinces. La CAFAT retarde régulièrement le versement des dotations aux
établissements publics de santé et le remboursement aux provinces de la part de l’aide médicale
prise en charge par le RUAMM
77
. Elle retarde aussi le remboursement des actes et consultations
des dispensaires qu’elle doit aux provinces.
Compte tenu de ces retards de paiement, les dettes
78
de la CAFAT vis-à-vis des établissements
publics de santé et des provinces atteignaient respectivement 21,8 Md F CFP et 5,8 Md F CFP
fin 2019, contre moins de 10 Md F CFP en 2014. En regard, les dettes des établissements
publics de santé à l’égard de la CAFAT, au titre des retards de versements de cotisations
sociales, sont passées de moins de 2 Md F CFP en 2014 à 7,7 Md F CFP fin 2019.
75
Par courrier en date du 19 novembre 2019, le directeur général de la CAFAT a informé les professionnels
libéraux de santé et les établissements de santé privés, que le bureau du conseil d’administration a « été contraint
de stopper dès aujourd'hui le paiement des sommes dues à l'ensemble des professionnels de santé libéraux et
établissements privés », précisant « espérer » pouvoir « reprendre progressivement les paiements » à compter de
la mi-décembre.
76
Ce plan a fait l’objet d’un communiqué de presse du gouvernement le 11 février 2020.
77
S’agissant des assurés pour lesquels l’aide médicale prend uniquement en charge le ticket modérateur.
78
Comptablement, pour la CAFAT, il s’agit de retards de paiement qui se traduisent par un gonflement des dettes
d’exploitation.
0
2362,4
3 000
6 800
7 600
10 296,90
6 200
9 700
2 000
7 765
0
2000
4000
6000
8000
10000
12000
BP
CA
BP
CA
BP
CA
BP
CA
BP
CA
2015
2016
2017
2018
2019
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
51
Face à cette situation d’endettement réciproque, le gouvernement a sollicité l’intervention de
l’ASS au cours de l’année 2019, pour le versement d’avances de trésorerie aux trois hôpitaux.
Ces avances, qui s’élevaient dans leur globalité à 3,5 Md F CFP, dont 2,9 Md F CFP au
CHT, 0,33 au CHN et 0,27 au CHS, ont été accordées par le conseil d’administration du 5
avril 2019.
Le CHN a mobilisé la totalité de cette trésorerie, le CHT 1,8 Md F CFP et le CHS
n’a réalisé aucun tirage.
L’élaboration du budget primitif de l’ASS pour l’année N+1 est conditionnée par l’état de
réalisation des comptes sociaux
79
de l’année N et par leurs prévisions de dépenses N+1. Or,
l’instabilité et les difficultés de trésorerie des comptes sociaux, compliquent toute prévision de
la part de l’ASS. Cette situation est d’autant plus complexe à gérer que les montants versés au
RUAMM pèsent lourdement dans les charges totales annuelles de l’ASS : de 6,8 % en 2015
à 16, 8 %, en 2019 avec un maximum de 24 % en 2017
80
.
Afin d’anticiper au mieux les problèmes de trésorerie du RUAMM, le gouvernement a instauré
une réunion bimensuelle sur l’état des comptes sociaux depuis le courant de l’année 2019. Cette
instance informelle est présidée par le président du gouvernement et associe la CAFAT, la
direction des affaires budgétaires et financières, la DASS, le membre du gouvernement en
charge de la santé et leurs cabinets. Son objet porte sur la trésorerie des comptes sociaux, en
particulier du RUAMM, et les moyens de l’équilibre.
La nécessité pour l’ASS de verser à la CAFAT des contributions qui dépassent
systématiquement les montants prévus au budget primitif de l’agence nécessite des
interventions urgentes du gouvernement. Bien que toutes les dépenses d’interventions donnent
lieu à une délibération du conseil d’administration, les écarts entre les prévisions et les
réalisations impliquent un renforcement du pilotage budgétaire de l’établissement.
La participation financière de l’agence à l’équilibre des comptes sociaux n’est pas compatible
avec l’existence d’incertitudes budgétaires telles qu’elles existent aujourd’hui. Le contexte
complexe dans lequel sont réalisées les interventions de l’ASS nécessite d’instaurer un pilotage
budgétaire plus précis.
Dans ce cadre, la mesure des risques financiers de l’ASS impose la création de cartographies
annuelles sur les cycles suivants : produits, charges et endettement. Un rapport annuel
établissant le bilan du dispositif de maîtrise des risques serait à présenter en conseil
d’administration.
Une démarche qualité serait donc à engager sur les processus des cycles visés, en vue de
prévenir la survenue de difficulté de trésorerie et d’améliorer la qualité des prévisions
budgétaires. La bonne perception des produits serait notamment un élément important de cette
démarche. Il a en effet été observé que le produit issu de la TGC, qui constitue la ressource
principale de l’ASS depuis 2019, est dépendant d’une délibération annuelle du congrès alors
que les produits tirés des autres taxes sont garantis par les textes fondateurs de celles-ci. La
compensation d’une diminution du produit de la TGC affecté à l’ASS par une dotation
79
Il s’agit des comptes des régimes d’assurance maladie, vieillesse, accidents du travail et famille, gérés par la
CAFAT.
80
Entre 2015 et 2019, les contributions publiques versées par le territoire de la Nouvelle Calédonie au RUAMM
ont représenté près de la moitié (47 %) de la hausse des produits de ce régime, c’est-à-dire 5,4 Md F CFP sur
11,6 Md F CFP. Les cotisations sociales, qui constituent le mode de financement de droit commun du régime, n’en
ont représenté qu’une part légèrement supérieure (5,9 M F CFP, soit 50 %).
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
52
gouvernementale, telle qu’elle fut organisée en 2019, ne relève ensuite que d’une option sur
laquelle l’agence ne peut durablement compter.
En complément, l’ASS pourrait se doter d’une comptabilité analytique dont les conclusions
devraient être présentées annuellement en conseil d’administration. Cet outil serait de nature à
mesurer l’efficience des actions de l’agence, notamment dans le domaine de la santé publique.
Recommandation n° 5 : la chambre recommande à l’ASS de mettre en œuvre dès
2021, un pilotage budgétaire plus précis.
4.2
Faire évoluer le pilotage des politiques sanitaires et sociales
La nécessité de définir un nouveau modèle de pilotage des politiques sanitaires et sociales a été
pris en compte dans le plan de santé calédonien. La réponse apportée consiste à remplacer l’ASS
par une autorité indépendante du gouvernement et disposant de compétences resserrées,
exclusivement centrées sur la gouvernance du système de santé et de protection sociale.
Ce schéma prévu depuis 2018, mais non mis en œuvre à ce jour, mérite d’être discuté afin de
préparer au mieux la nouvelle gouvernance du système de santé calédonien.
4.2.1
Le projet de suppression de l’ASS
Sollicitée par le gouvernement, l’IGAS réalise depuis 2017 des missions d’appui-conseil
relatives à l’organisation, la gouvernance, le pilotage et la régulation du système de santé et de
protection sociale. Une mission complémentaire devrait être conduite au cours du premier
trimestre 2021.
Dans son rapport remis en juin 2018
81
, la mission IGAS a émis 11 recommandations qui
concernent notamment le financement et la gouvernance de la protection sociale : compléter et
consolider la stratégie ; restructurer le financement de la protection sociale ; élaborer un objectif
d’évolution des dépenses maladie ; crédibiliser la collecte et le traitement des données
d’assurance maladie ; instaurer une autorité indépendante de régulation du système de santé et
d’assurance maladie ; adapter l’offre de soins et de services de santé ; développer la démocratie
sanitaire ; réformer la CAFAT ; créer une commission des comptes de la protection sociale ;
renforcer la direction des affaires sanitaires et sociale du gouvernement de la Nouvelle-
Calédonie.
81
IGAS, « Analyses et recommandations de la mission d’appui-conseil au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
relative à l’organisation, la gouvernance, le pilotage et la régulation du système de protection sociale et de santé »,
juin 2018.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
53
La dernière recommandation de ce rapport vise à supprimer l’agence sanitaire et sociale de
Nouvelle-Calédonie et à la remplacer par une autorité indépendante de régulation du système
de santé et d’assurance maladie (AIR). Modifié en conséquence en 2018, l’objectif numéro 7
82
du plan de santé calédonien comporte une action n°20 visant à la mise en place de l’AIR sous
la forme d’une autorité administrative indépendante (AAI)
83
.
Selon les termes du plan « Do Kamo », l’AIR « assurera les fonctions de régulation qualitative
des services de santé et des régimes de protection sociale et la régulation financière ».
Elle
interviendra dans les domaines suivants : autorisations et créations des établissements sanitaires
et médico-sociaux, allocations de ressources de ces établissements, tarifs des professionnels de
santé, prix des produits de santé, contractualisation avec les établissements et les professionnels
de santé, évaluation et nomination des directeurs de ces établissements et de la CAFAT.
En contrepartie de ces missions et en application de l’action n°21, la DASS disposera d’un pôle
« statistiques », d’un pôle « santé » (santé publique, tutelle et planification hospitalière,
inspection et contrôle
84
) et d’un pôle « social » (protection sociale, handicap et dépendance).
Au titre des compétences du pôle « santé », la DASS sera donc responsable du pilotage des
politiques de santé publique (promotion, prévention et dépistages)
85
.
Dans ce schéma, l’ASS n’aura plus de raison d’exister et les moyens humains et financiers
consacrés aux politiques de santé publique actuellement dévolus à l’ASS seront transférés à la
DASS.
Le plan santé précise que l’AIR exercera le pouvoir de « régulateur unique du système
d’assurance maladie ». Un comité de pilotage du RUAMM et un comité d’alerte des dépenses
maladies seront créés. Il est également prévu que l’AIR soit l’interlocuteur privilégié des acteurs
de santé et du gestionnaire de l’assurance maladie.
Le plan de santé comporte un schéma illustratif de la gouvernance envisagée (extrait du rapport
de la mission IGAS), dans lequel il peut notamment être observé la transformation de la CAFAT
en caisse de protection sociale.
82
« Mettre en place une gouvernance coordonnée de l’offre de prévention et de l’offre de soins ».
83
En application de la L.O n°2016-507 du 25 avril 2016 relative au statut des autorités administratives
indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie.
84
Par comparaison, ce rôle est exercé en métropole par les inspecteurs de l’action sanitaire et sociale, les médecins
de santé publique et les pharmaciens inspecteurs de santé publique formés, au titre de la fonction publique de
l’État, à l’école des hautes études en santé publique située à Rennes. La formation initiale (et principalement
continue) des directeurs d’établissements sanitaires (« directeurs d’hôpital »), médico-sociaux et sociaux
(« D3S »), étant également assurée dans cette école, au titre de la fonction publique hospitalière.
85
Selon les termes du rapport de l’IGAS « La mission de conduite des actions de prévention, de promotion et
d’éducation en santé sera transférée à la DASS, en plus grande proximité du gouvernement, en raison du caractère
interministériel, stratégique et de long terme de ces actions dont la mise en œuvre participera, notamment, à la
bonne déclinaison du plan Do Kamo. ».
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
54
Schéma de la gouvernance du système de santé prévu au plan « Do-Kamo »
Source : extrait du plan de santé, page 53
L’action n°20 du plan de santé, prévoyait une mise en œuvre effective de ce schéma en 2020.
Non réalisé à ce jour, ce projet a été reporté en 2021. Dans cette attente, le gouvernement s’est
donné pour objectif de poursuivre les réflexions sur la gouvernance du système de santé et de
protection sociale : une mission positionnée auprès du président du gouvernement et dont le
rôle sera de déterminer les orientations de la nouvelle gouvernance devrait être créée au premier
semestre 2021 pour une durée de deux ans
86
. Au cours de l’instruction, le président du
gouvernement a confirmé sa volonté d’installer l’AIR au centre du système.
Certaines dispositions de l’action n°20 ne seront pas mises en œuvre. Dans son rapport remis
en juin 2018, la mission IGAS préconisait en effet, la transformation de la CAFAT en un
établissement public administratif (EPA) pour lui affecter des produits d’impositions dans un
cadre juridique sécurisé. La constitutionnalité de l’affectation d’impositions à des personnes
morales de droit privé chargées d’une mission de service public est reconnue par le Conseil
constitutionnel depuis 1998
87
. Cette possibilité, confirmée pour la CAFAT par le Conseil d’État
dans un avis du 26 mars 2020
88
, ne rend ainsi pas indispensable sa transformation en un
86
Le financement de cette mission a été assuré par la contractualisation avec l’AFD d’un prêt de 50 M F CFP au
second semestre 2020.
87
Cf. Décision, n° 98-405 DC du 29 décembre 1998, Loi de finances pour 1999 : « Considérant qu'aucun principe
fondamental reconnu par les lois de la République n'interdit que le produit d'une imposition soit attribué à un
établissement public ou à une personne privée chargée d'une mission de service public ; que le législateur pouvait
en conséquence prévoir que le produit de la taxe d'aéroport serait perçu au profit des personnes publiques ou
privées exploitant des aérodromes ».
88
Dans un avis du 26 mars 2020 relatif au projet de modification de la loi du pays n° 2014-20 du 31 décembre 2014
instituant une contribution calédonienne de solidarité, le Conseil d’État a considéré que l’affectation d’une fraction
du produit de la contribution calédonienne de solidarité à la CAFAT, se rattachait aux « impôts droits et taxes
perçus au bénéfice de la Nouvelle-Calédonie » ainsi qu’à « la création ou l’affectation d’impôts et taxes au profit
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
55
établissement public à la seule fin de lui affecter des impositions. Cette option a donc été écartée
par le gouvernement.
Si le schéma prévu au plan de santé était mis en œuvre, il en résulterait :
-
une centralisation de l’observation, du pilotage des actions de santé publique et de
l’évolution de la réglementation à la DASS ;
-
un dialogue facilité avec les autres directions de la Nouvelle-Calédonie qui
résulterait de cette centralisation.
4.2.2
Une alternative à la suppression : la mutation
4.2.2.1
Les limites à la nouvelle gouvernance prévue par le plan de santé
Ce schéma comporte cependant l’inconvénient de proposer un modèle dans lequel la santé
publique ne serait plus exercée par une structure spécialisée, mais par la DASS.
En matière de santé, la rapidité de l’action et la possibilité d’adapter les objectifs aux réalités
du terrain tout en conservant un cap unique, constituent des fondamentaux. La spécialisation
d’une institution dans la gestion des politiques de santé publique permet de disposer de cette
agilité. Il pourrait être dommageable de ne pas le prévoir.
Le statut de l’ASS est un atout pour engager facilement des actions compatibles avec la diversité
calédonienne : la présence des provinces dans son conseil d’administration et la sécurisation
d’un budget consacré à la santé publique forment ses principaux avantages.
De surcroît, le schéma prévu au plan de santé, fait courir le risque d’une réquisition des moyens
consacrés à la prévention au profit du financement du fonctionnement du système de santé ou
d’autres missions de la DASS.
La crise sanitaire qui a débuté au cours de l’année 2020 illustre la nécessité de disposer d’une
administration rénovée et agile en santé publique. Ce contexte devrait conduire le
gouvernement à retravailler le schéma constitué en 2018 afin de tirer les leçons des réussites et
des difficultés rencontrées lors de la gestion de la crise.
4.2.2.2
Une option à étudier : la transformation de l’agence sanitaire et sociale
Afin d’améliorer la qualité du pilotage de la santé publique et l’efficacité de ces actions, l’ASS
– ou un établissement qui porterait une nouvelle dénomination - pourrait garantir la
centralisation des actions de promotion de la santé, de prévention et de dépistage. Cette option
ne remet pas en cause l’installation d’une autorité de régulation du système de santé qui
contribuera à une gestion plus efficiente de l’allocation des moyens financiers.
Le nouvel établissement de santé publique pourrait participer de manière plus efficace
qu’aujourd’hui à surveillance de l’état de santé de la population et à la veille sanitaire en mettant
fin à la superposition de compétences entre la DASS et l’ASS telle qu’elle existe aujourd’hui.
(….) d’établissements publics ou d’organismes chargés d’une mission de service public » mentionnés à l’article
22 de la loi organique du 19 mars 1999 « relative à la Nouvelle-Calédonie » Le Conseil d’État considère que la
CAFAT doit être regardée comme un organisme chargé d’une mission de service public et qu’une partie du produit
de la contribution calédonienne de solidarité peut dès lors lui être affecté directement.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
56
Le contrôle de l’établissement et l’évaluation de ses actions seraient assurés par la Nouvelle-
Calédonie (Direction du budget et des affaires financières et DASS).
De par les données dont il disposerait, le nouvel établissement pourrait exercer un rôle pivot
pour l’épidémiologie calédonienne. Les données ainsi publiées seraient de nature à éclairer la
définition des priorités de santé publique par le gouvernement.
Les actions de cet établissement pourraient être exercées au plus près des différents milieux de
vie du territoire. Dans ces conditions, il serait également un stimulateur d’échanges entre les
institutions, les professionnels de santé et les associations, autour de réflexions visant à adapter
la prévention et la promotion de la santé aux attentes de la population.
Cet établissement serait chargé de la planification en santé publique. Par sa spécialisation, il
disposerait de l’expertise suffisante pour garantir l’adaptation de la prévention aux
caractéristiques géographiques et populationnelles. Les propositions qui en résulteraient
permettraient une évolution régulière de la définition des priorités de santé publique par le
Congrès.
Le financement de cet établissement pourrait être assuré par l’affectation d’une part des taxes
fiscales comportementales (TAT3S et taxe sur les produits sucrés), conformément au plan de
santé qui prévoit leur affectation partielle à la prévention. Ces produits fiscaux seraient
complétés par une dotation annuelle de la Nouvelle-Calédonie.
Dans sa forme actuelle, l’ASS doit être une force de proposition pour les travaux qui seront
engagés par le Gouvernement en 2021 sur la gouvernance du système de santé afin de porter la
création d’un établissement spécialisé en santé publique.
Recommandation n° 6 : dans le cadre des travaux qui seront conduits par le
gouvernement à compter de l’année 2021 sur la gouvernance du système de santé et
de protection sociale, la chambre recommande à l’ASS de proposer des évolutions
statutaires et fonctionnelles la concernant, de nature à garantir l’adaptation rapide
des priorités de santé et des actions qui en résultent aux besoins de la population.
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
57
Glossaire
AAI
Autorité Administrative Indépendante
AFD
Agence Française de Développement
AIR
Autorité Indépendante de Régulation du système de santé
ASS
Agence Sanitaire et Sociale de Nouvelle-Calédonie
BP
Budget Primitif
CAF
Capacité d’Autofinancement
CAFAT
Caisse de compensation des prestations Familiales, des Accidents du travail et
de prévoyance des Travailleurs
CCS
Contribution Calédonienne de Solidarité
CDC
Caisse des Dépôts et Consignations
CEROM
Comptes Économiques Rapides pour l’Outre-Mer
CHN
Centre Hospitalier Nord
CHS
Centre Hospitalier Spécialisé
CHT
Centre Hospitalier territorial
COM
Convention d’Objectifs et de Moyens
CPS
Caisse de Protection Sociale
CRC
Cardiopathie Rhumatismale Chronique
CRS
Complément de Retraite de Solidarité
CSA
Contribution Sociale Additionnelle
CSG
Contribution Sociale Généralisée
CSBM
Consommation de soins et biens médicaux
DASS
Direction des Affaires Sanitaires et Sociales
DGF
Dotation Globale de Financement
EPA
Établissement Public Administratif
EPS
Établissement Public de Santé
ETP
Équivalent Temps Plein
FSH
Fonds Social de l’Habitat
GIP
Groupement d’Intérêt Public
IEOM
Institut d’Émission d’Outre-Mer
ISEE
Institut de la Statistique et des Études Économiques
LO
Loi Organique
LP
Loi du Pays
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
58
NC
Nouvelle-Calédonie
OCEAM
Objectif Calédonien d’Évolution des Dépenses Maladie
OCDS
Objectif Calédonien d’Évolution des Dépenses de Santé et de protection sociale
OMS
Organisation Mondiale de la Santé
ONDAM
Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie
PIB
Produit Intérieur Brut
RAA
Rhumatisme Articulaire Aigu
RHPA
Régime Handicap et des Personnes en perte d’Autonomie
RUAMM
Régime Unifié d’Assurance Maladie Maternité
TAT3S
Taxe sur les Alcools et Tabacs
TGC
Taxe Générale sur la Consommation
TSS
Taxe de Solidarité sur les Services
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
59
ANNEXES
Annexe n° 1. Analyse du suivi des indicateurs des programmes de santé publique
.............................
60
Annexe n° 2. État de la dette en 2019 (F CFP)
.....................................................................................
63
L’AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE CALEDONIE
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Annexe n° 1.
Analyse du suivi des indicateurs des programmes de santé publique
Programme
Évaluation
Cancer du sein
La communication autour du dépistage du
cancer du sein a connu un coup d’arrêt suite
aux polémiques autour des questions sur-
diagnostic
et
de
sur-traitement.
La
communication a pu reprendre en 2019 et
une hausse de l’activité a été constatée en
2019 et semble se confirmer en 2020. La
situation de la province Nord ne pourra
s’améliorer qu’en développant l’activité de
mammographie au centre hospitalier du
Nord
qui,
aujourd’hui,
dispose
de
l’ensemble des compétences humaines et des
installations nécessaires
Cancer du col de l’utérus
Le dépistage du cancer du col de l’utérus va
connaître d’importantes évolutions au regard
des nouvelles techniques et des nouvelles
recommandations. Toutefois, le programme
est confronté à une difficulté liée à la
coexistence de deux modalités d’accès au
dépistage offrant des prises en charge
quasiment identique (dépistage organisé vs.
dépistage opportuniste). Afin de permettre
une meilleure efficience, le frottis de
dépistage « hors campagne » ne devrait plus
profiter d’un remboursement, afin que la
majorité
des
patients
bénéficient
de
l’organisation
du
dépistage.
La
communication autour de l’importance du
suivi gynécologique annuel et du dépistage
doit être relancée. Une évaluation de la plus-
value de l’organisation et du dépistage doit
être menée afin de se préparer au mieux à
l’évolution des pratiques de dépistage.
Vaccination
anti papillomavirus en milieu
scolaire
L’adhésion
à
la
vaccination
anti
papillomavirus
reste
inégale.
Un
élargissement de la vaccination aux garçons
ainsi
qu’un
renforcement
de
la
communication
pourraient
permettre
d’améliorer le taux de couverture vaccinale.
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Programme
Évaluation
La participation des professionnels de santé,
notamment libéraux, doit être recherchée.
Diabète
Les objectifs cibles n’ont pas variés depuis
la rédaction du programme en 2012 et
pourraient être revus.
Santé orale
La pérennisation de l’action préventive en
milieu scolaire est indispensable à la réussite
de ce programme, elle porte sur une
redéfinition de son organisation, car nous
constatons que les actions piloter hors ASS
souffrent d’un manque d’homogénéité et de
moyens. L’évaluation de l’impact médico-
économique de la prévention bucco-dentaire
est possible, pour cela, il faut qu’un cahier
des charges commun de recensement d’un
certain nombre d’indicateurs soit rédigé et
que chaque partenaire s’engage à les
renseigner.
Pour
exemple,
l’évaluation
exhaustive du coût de l’action de scellement
des sillons a été tenté en 2017, 2018 et 2019.
Cependant,
cette
évaluation
n’est
que
partielle dans la mesure où l’ASS n’a pas
accès
aux
informations
du
coût
des
ressources humaines des provinces.
Addictologie
Néant.
Rhumatisme articulaire aigu
Revoir la liste des indicateurs pour définir
une
récurrence
dans
le
renseignement
(annuel ou une fois par plan quinquennal).
Définir des indicateurs médico-économiques
pour le dépistage en lien avec la Dass et les
provinces.
Définir des indicateurs médico-économiques
pour le coût du soin en lien avec la Dass, les
établissements hospitaliers, la caisse de
protection sociale et les provinces.
Prévention des pathologies liées à la
surcharge pondérale
Dans le cadre de la réécriture du plan
d’action en faveur de la prévention de la
surcharge pondérale qui s’inscrit dans le plan
stratégique
de
santé,
de
nouveaux
indicateurs de résultats et d’impact devront
être définis pour le suivi des actions menées.
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Programme
Évaluation
La tenue de ces indicateurs par l’ensemble
des structures impliquées est indispensable.
Santé sexuelle
La tenue des indicateurs du programme peut
être amélioré par la mise en place de
tableaux de bord de suivi. Ces indicateurs
devront
être validés
et partagés
avec
l’ensemble
des
acteurs
du
programme
(provinces,
structures
de
soins
associations…)
Tuberculose
Améliorer le suivi du taux de traitement
achevé qui est insuffisant du fait du non
renseignements des déclarations obligatoires
de
fin
de
traitement.
Améliorer
le
renseignement des déclarations obligatoires,
améliorer la recherche des co-infections et
analyser les données.
Source : CTC, d’après la réponse de l’ASS à la question n°49 du questionnaire
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Annexe n° 2.
État de la dette en 2019 (F CFP)
Année
d'origine
Durée Taux
Opération
Montant de
l'emprunt
Encours au
01/01/2019
Encours restant
dû au
31/12/2019
CDC
2014
(consolidé
en 2018)
24 ans
1,74
MEDIPOLE
KOUTIO
8 650 357 833
8 647 407 635
8 301 393 315
2016
24 ans
1,76
CHN KONE
1 709 520 000
1 496 000 086
1 428 000 086
AFD
2014
19 ans
2,2
MEDIPOLE
KOUTIO
2 386 634 800
2 099 919 086
2 036 731 386
2014
19 ans
1,44
3 120 000 000
2 753 024 656
2 646 138 998
2016
19 ans
2,05
CHN KONE
1 508 880 000
1 401 993 550
1 296 245 989
2016
20 ans
1,69
201 120 000
186 430 030
122 781 628
17 576 512 633
16 584 775 043
15 831 291 402
Source : ASS, compte administratif 2019
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1
REPONSE
1
Réponse de Mme Marie-Laure Mestre, directrice par intérim
de l’Agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie
En application de l’article L. 262-68 du code des juridictions financières, cette réponse
n’engage que la seule responsabilité de son signataire
3
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie
13 boulevard Vauban - BP 2392 – 98846 Nouméa Cedex
ctcnc@crtc.ccomptes.fr
www.ccomptes.fr