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Chambre
AELO c/ Commune de La Trinité
(Département des Alpes-Maritimes)
Article L. 1612-15 du code général des
collectivités territoriales
Rapport n° 2021-0143
Saisine n° 2021-0198
Séance du 30 août 2021
AVIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur,
VU
le code général des collectivités territoriales (CGCT), notamment ses articles L. 1612-15,
L. 1612-19 ; L. 2123-12 à L. 2123-16, L. 2321-2, R. 1612-8 et R. 1612-9, R. 1612-11 à
R. 1612-14, R. 1612-32 à R. 1612-38 ;
VU
le code des juridictions financières, notamment son article L. 232-1 ;
VU
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
VU
les lois et règlements relatifs aux budgets des communes et des établissements publics
locaux ;
VU
l’arrêté du président de la chambre régionale des comptes fixant la composition des sections
et l’arrêté portant délégation de signature aux présidents de section ;
VU
la lettre du 7 juillet 2021 enregistrée au greffe le 13 juillet 2021 par laquelle
Me Frédéric Bonnet, dûment mandaté par l’association nationale des élus locaux d’opposition
(AELO), a saisi la chambre en application de l'article L. 1612-15 du CGCT, au motif qu’une
dépense obligatoire n’a pas été inscrite au budget 2021 de la commune de La Trinité ;
VU
la lettre du président de la chambre en date du 21 juillet 2021, informant le maire de la
commune de La Trinité de la date limite à laquelle il pouvait présenter ses observations ;
VU
la lettre en réponse du 23 juillet 2021, enregistrée au greffe le 30 juillet 2021 du maire de
La Trinité ;
VU
l'ensemble des pièces du dossier ;
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Sur le rapport de Mme Judith Ascher, première conseillère ;
VU
les conclusions du ministère public ;
Après avoir entendu la rapporteure, en ses observations ;
CONSIDÉRANT
que, par lettre du 7 juillet 2021 susvisée, le requérant a saisi la chambre
régionale des comptes au titre de l’article L. 1612-15 du CGCT au motif qu’une dépense
obligatoire n’a pas été inscrite au budget 2021 de la commune de La Trinité ;
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA SAISINE
CONSIDÉRANT
qu’aux termes de l'article L. 1612-15 du CGCT : «
Ne sont obligatoires pour
les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles
et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. / La chambre régionale des
comptes saisie, soit par le représentant de l'État dans le département, soit par le comptable
public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire
n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette
constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la
collectivité territoriale concernée. / Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas
suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'État d'inscrire
cette dépense au budget et propose, s'il y a lieu, la création de ressources ou la diminution de
dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire. Le représentant de l'État dans
le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. S'il s'écarte des
propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une
motivation explicite
» ;
CONSIDÉRANT
par ailleurs qu’aux termes de l'article R. 1612-34 du CGCT : «
La chambre
régionale des comptes se prononce sur la recevabilité de la demande. Elle constate notamment
la qualité du demandeur et, s'il y a lieu, l'intérêt qu'il a à agir
» ;
CONSIDÉRANT
que la chambre a été saisie par Me Frédéric Bonnet, agissant en sa qualité
d’avocat de l’AELO, dûment mandaté par la présidente de l’association, laquelle, «
représente
l’association dans tous les actes de la vie civile, et possède tous pouvoirs à l’effet de l’engager
»
d’après les statuts de l’association
; que la demande tend à faire inscrire au budget de la
commune de La Trinité une somme de 2 640 euros correspondant au règlement d’une prestation
de formation dispensée par l’AELO ;
qu’il résulte de ce qui précède que l’auteur de la saisine
présente la qualité et l’intérêt à agir requis par les dispositions réglementaires susvisées ;
CONSIDÉRANT
, qu’aux termes des articles R. 1612-32 et R. 1612-33 du CGCT : «
La saisine
de la chambre régionale des comptes prévue à l'article L. 1612-15 doit être motivée, chiffrée et
appuyée de toutes justifications utiles, et notamment du budget voté et, le cas échéant, des
décisions qui l'ont modifié. (…)
» et «
Lorsque l'auteur de la demande n'a pu obtenir les
documents budgétaires, le président de la chambre régionale des comptes se les fait
communiquer par le représentant de l'État
» ;
CONSIDÉRANT
, d’une part, que la saisine comporte les éléments permettant d’identifier les
fondements de la demande et le montant réclamé ; qu’elle apparaît ainsi dûment motivée et
chiffrée ;
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CONSIDÉRANT
, d’autre part, que la saisine n’était pas appuyée des décisions budgétaires
visées à l’article L. 1612-32 du CGCT ; que celles-ci ont toutefois été envoyées par la commune
à l’appui de sa réponse du 23 juillet 2021, enregistrée au greffe de la chambre le 30 juillet 2021;
qu’ainsi, pour l’application de l’article R. 1612-8 du même code, la saisine peut être regardée
comme complète et recevable à compter de cette dernière date ;
SUR LE CARACTÈRE OBLIGATOIRE DE LA DÉPENSE
CONSIDÉRANT
qu’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 1612-15 du CGCT et
de la jurisprudence administrative, d’une part, qu’une dépense ne peut être regardée comme
obligatoire que si elle correspond à une dette échue, certaine, liquide, non sérieusement
contestée dans son principe et son montant et découlant de la loi, d’un contrat, d’un délit, d’un
quasi-délit ou de toute autre source d’obligations et, d’autre part, qu’en cas de contestation
sérieuse, la chambre régionale des comptes ne peut que rejeter la demande sans qu’il y ait besoin
pour elle de s’interroger sur le bien-fondé de la contestation ;
CONSIDÉRANT
que la créance dont se prévaut l’AELO, organisme agréé par le ministre de
l’intérieur au sens de l’article L. 2123-16 du CGCT, procède d’une action de formation ayant
pour objet «
début de mandat : décrypter le fonctionnement et les subtilités du conseil
municipal
», que l’association a dispensée à quatre élus municipaux de la commune de
La Trinité ; que cette formation relève ainsi des dispositions de l’article L. 2123-12 du même
code qui ouvrent aux membres du conseil municipal un droit à une formation adaptée à leurs
fonctions ; que la dépense afférente est, par principe, au nombre des dépenses obligatoires
énumérées au 3° de l’article L. 2321-2 du code précité ;
CONSIDÉRANT
que le règlement de la facture n’étant soumis à aucune condition, la dépense
revêt un caractère échu,
CONSIDÉRANT
que le montant total à régler étant bien indiqué, et la facture portant toutes
les mentions nécessaires, la dépense est liquide ;
CONSIDÉRANT
que seuls le conseil municipal ou le maire par délégation de ce dernier dans
les conditions prévues par l’article L. 2122-22 du CGCT ont qualité pour engager la commune ;
qu’il résulte également des dispositions de l’article 30 du décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique que «
l'engagement est
l'acte juridique par lequel une personne morale […] crée ou constate à son encontre une
obligation de laquelle il résultera une dépense. L'engagement respecte l'objet et les limites de
l'autorisation budgétaire
» ; qu’enfin, l’article L. 2342-2 du CGCT dispose que «
le maire tient
la comptabilité de l'engagement des dépenses (…)
» ;
CONSIDÉRANT
que les prestations de formation ont été commandées directement à l’AELO
par les élus concernés en leurs noms propres, sans que la commune, au nom de laquelle la
facture a pourtant été émise, en ait été préalablement avisée, et ainsi mise en mesure de vérifier
que les limites de l’autorisation budgétaire instituées par les dispositions du 3
ème
alinéa de
l’article L. 2123-14 du même code étaient respectées ; que, dans la mesure où ces élus ne
disposaient pas de la capacité juridique à engager la commune, ils doivent être regardés comme
les débiteurs légaux de la somme réclamée par l’AELO ; qu’en l’absence d’engagement par une
personne habilitée, la dette ne peut être considérée comme revêtant un caractère certain pour la
commune ; que son paiement ne peut donc, en l’état du dossier, lui être réclamé ;
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CONSIDÉRANT
au surplus que la dépense est contestée de façon répétée par l’ordonnateur
aux motifs que la formation n’a fait l’objet d’aucune demande préalable des élus auprès de la
collectivité et qu’aucune convention préalable n’a été conclue entre l’organisme et la
commune ;
PAR CES MOTIFS,
Article 1
:
DÉCLARE
la chambre régionale des comptes compétente pour traiter la saisine,
Article 2
:
DÉCLARE
recevable la saisine de Me Frédéric Bonnet, en sa qualité d’avocat de
l’association nationale des élus locaux d’opposition ;
Article 3
:
DIT
que la dépense objet de la saisine n’a pas un caractère obligatoire pour la
commune de La Trinité ;
Article 4
:
DIT
qu’il n’y a pas lieu en conséquence de mettre en demeure la commune de
La Trinité d’inscrire cette dépense à son budget ;
Article 5
:
DIT
que le présent avis sera notifié au requérant, au maire de la commune de
La Trinité et au préfet du département des Alpes-Maritimes, ainsi qu’au comptable public de la
commune de La Trinité ;
Article 6
:
RAPPELLE
que le conseil municipal doit être tenu informé, dès sa plus proche
réunion, du présent avis, conformément aux dispositions de l’article L. 1612-19 du code général
des collectivités territoriales et que l’ordonnateur devra en assurer la publication, dès sa
réception, en application de l’article R. 1612-18 du même code.
Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur, le trente
août deux mille vingt-et-un.
Présents :
M. Nacer Meddah, président de la chambre, présidant la séance, Messieurs
Clément Contan, François Gajan, présidents de section, Mme Judith Ascher, première
conseillère rapporteure et Mme Fleur Giocanti, première conseillère.
Le Président de séance
Nacer MEDDAH
Voies et délais de recours (article R. 421-1 du code de justice administrative) : la présente décision peut être
attaquée devant le tribunal administratif territorialement compétent dans un délai de deux mois à compter de sa
notification.