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QUATRIÈME CHAMBRE
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Première section
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Arrêt n° S2021-1589
Audience publique du 2 juillet 2021
Prononcé du 29 juillet 2021
COMMUNE DE MOULINS
(ALLIER)
Appel d’un
jugement de la chambre
régionale des comptes Auvergne Rhône-
Alpes
Rapport n° R-2021-0546
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 17 septembre 2020 au greffe de la chambre régionale des
comptes Auvergne Rhône-Alpes, par laquelle le procureur financier près la chambre régionale,
a élevé appel du jugement n° 2020-003 du 24 juillet 2020 de la chambre régionale Auvergne-
Rhône-Alpes qui, après avoir constitué débitrice envers la commune de Moulins, Mme X
comptable de ladite commune au titre des exercices 2015 et 2016 (charge n° 2), a jugé que
cette dernière avait respecté les règles relatives au contrôle sélectif de la dépense ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance et notamment le réquisitoire du
procureur financier près la chambre régionale Auvergne Rhône-Alpes n°11-GP/2019 du
24 janvier 2019 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n°
63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu l’arrêté du 25 juillet 2013
portant application du premier alinéa de l'article 42 du décret
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et
encadrant le contrôle sélectif de la dépense ;
Vu le rapport de Mme Louise THIN, auditrice, chargée de l’instruction
;
Vu les conclusions de la Procureure générale n° 349 du 28 juin 2021 ;
Vu la décision du 2 juillet 2021 désignant M. Patrick BONNAUD, conseiller maître, pour
présenter le rapport en audience publique
;
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Entendu lors de l’audience publique du
2 juillet 2021, M. Patrick BONNAUD, conseiller maître,
en son rapport, M. Christophe LUPRICH, substitut général, en les conclusions du ministère
public, les autres parties,
informées de l’audience
,
n’étant ni présentes, ni représentées
;
Entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;
1. Attendu que par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-
Alpes a engagé la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X pour avoir payé, en 2015
et en 2016, des indemnités horaires pour travaux supplémentaires sans les pièces
justificatives nécessaires ; que la chambre régionale a jugé que ce manquement a causé un
préjudice financier à la commune ; qu
’
elle a estimé que les règles du contrôle sélectif de la
dépense avaient été respectées et que, dès lors, une remise gracieuse totale des débets
prononcés à son encontre pouvait être accordée à Mme X ;
2. Attendu que
l’appelant conteste que les règles du contrôle sélectif de la dépense ont été
respec
tées en arguant du fait qu’on ne saurait tirer de la circonstance que le plan de contrôle
applicable mentionne uniquement les « entrants
» s’agissant de la paie
, que les autres
dépenses ne devraient pas être contrôlées selon les règles de droit commun, soit
a priori
,
totalement et de manière exhaustive ;
3.
Attendu qu’avant d’effectuer un paiement les comptables publics sont tenus d’effectuer les
contrôles prévus aux articles 19 et 20 du décret susvisé du 7 novembre 2012
; qu’aux termes
de l’article 42 du
décret précité du 7 novembre 2012, «
Le comptable public peut opérer les
contrôles définis au 2° de l’article 19 et à l’article 20 de manière hiérarchisée, en fonction des
caractéristiques des opérations assignées sur sa caisse et de son appréciation des risques
afférents à celles-
ci. À cet effet, il adapte l’intensité, la périodicité et le périmètre de ses
contrôles en se conformant à un plan de contrôle établi suivant les règles fixées par arrêté du
ministre chargé du budget.
» ;
4.
Attendu que l’article 1
er
de l’arrêté
susvisé du 25 juillet 2013 précise : «
Le comptable public
établit un plan de contrôle hiérarchisé des ordres de payer qui distingue : \ 1° Les catégories
de dépenses soumises, a priori, à l’ensemble des contrôles définis par les articles 19
et 20 du
décret susvisé ; \ 2° Les catégories de dépenses soumises, a priori ou a posteriori, à tout ou
partie des contrôles définis par les articles 19 et 20 du décret susvisé
. » ;
5. Attendu qu
’il résulte des textes précités
que le contrôle sélectif constitue un mode
dérogatoire au contrôle exhaustif des dépenses, lequel demeure applicable pour toutes les
dépenses qui ne sont pas expressément mentionnées dans le plan de contrôle comme devant
faire l’objet d’un contrôle «
a posteriori
» ou «
par échantillon
» ou d’une «
partie
» seulement
des contrôles prévus par le décret du 7 novembre 2012 ;
6.
Attendu que, dans les plans de contrôle applicables à la commune, il n’est pas fait mention
du contrôle de la paie des agents déjà en fonction et que, partant, la comptable aurait dû les
contrôler selon les règles de droit commun ;
7. Attendu qu
’
en jugeant différemment, la chambre régionale des comptes a commis une
erreur de droit
et qu’
il y a lieu d
’infirmer le jugement en ce qu’il estime que les règles du contrôle
sélectif ont été respectées ;
8.
Attendu qu’en raison de l’effet dévolutif de l’appel, il
appartient au juge d’appel d’apprécier
le respect par la comptable constituée débitrice des deniers de la commune de Moulins des
règles du contrôle sélectif de la dépense telles que prévues au plan de contrôle hiérarchisé
applicable durant les exercices 2015 et 2016 ; que, compte tenu de ce qui précède, il apparaît
que les règles du plan de contrôle sélectif pour les exercices 2015 et 2016 n’ont pas été
respectées par Mme X en ce qui concerne les paiements incriminés ;
Par ces motifs,
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DÉCIDE :
Article 1
er
.
–
Le jugement n° 2020-003 du 24 juillet 2020 de la chambre régionale des comptes
Auvergne Rhône-Alpes est
infirmé en ce qu’il
a jugé que les règles du contrôle sélectif de la
dépense prévues pour les exercices 2015 et 2016 ont été respectées par Mme X (charge
n° 2).
Article 2.
–
Les paiements objets de la charge n°
2 à l’encontre de Mme
X effectués durant les
exercices 2015 et 2016
entraient dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles de
contrôle sélectif. Les règles prévoyaient que ces paiements devaient être contrôlés de façon
exhaustive.
Fait et jugé par : M. Jean-Yves BERTUCCI, président de section, président de la formation de
jugement ; Mme Sophie MOATI, présidente de chambre maintenue en activité,
MM. Denis BERTHOMIER et Yves ROLLAND, conseillers maîtres.
En présence de Mme Michelle OLLIER, greffière de séance.
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux judiciaires
d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de
la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par
Michelle OLLIER
Jean-Yves BERTUCCI
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt peut être
demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions
prévues au
I de l’article R. 142
-19 du même code.