ceux-ci sont déductibles du résultat. La direction
générale du Trésor a effectué une simulation du
surcroît d’IS qui découlerait mécaniquement d’une
absence d’impôts sur la production : selon cette
étude (2013), la France fait partie des États
européens où le surcroît d’IS serait le plus fort, à
1 point de PIB environ (cf. graphique suivant).
Graphique n° 7 : produit de l’impôt sur les bénéfices,
augmenté de l’impôt supplémentaire obtenu
mécaniquement en l’absence d’impôts sur la production (en
points de PIB 2012)
Source : Eurostat, Taxation trends in the European Union, 2013,
calculs DG Trésor
Ces chiffres sont cependant anciens et n’intègrent
pas la réduction de moitié des impôts de
production à partir de 2021
12
. Ils doivent donc être
regardés avec prudence. Il n’en demeure pas
moins que l’on peut considérer les impôts de
production comme l’une des causes de la faiblesse
de l’IS en France.
Ces causes structurelles qui amoindrissent le
rendement de l’IS en France appellent à une
certaine prudence concernant l’évolution de ses
paramètres dans les prochaines années. Dans un
contexte
de
finances
publiques
tendu,
le
rendement budgétaire de cet impôt reste l’un de
ses principaux objectifs. Il convient d’assurer que
l’évolution des taux et de l’assiette de l’IS seront
12
Il s’agit de la réduction de moitié de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la
taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour leurs établissements industriels évalués selon la méthode comptable. En outre, le taux de
plafonnement de la cotisation économique territoriale (CET) a été abaissé de 3 % à 2 % en fonction de la valeur ajoutée, pour éviter qu’une partie du
gain de la baisse de la CVAE et des impôts fonciers ne soit neutralisée par le plafonnement.
13
Source : Voies et moyens Tome II –Annexe au projet de loi de finances pour 2016.
14
Article 7 de la loi n°2000-1352 du 30 décembre 2000 de finances pour 2001.
15
Cf. exposé des motifs du projet de loi
bien
compatibles
avec
la
préservation
des
recettes budgétaires résultant de cet impôt.
4.2. Une trajectoire de taux qui doit prendre
en
compte
l’évolution
du
contexte
international
Un taux d’IS français qui converge vers la moyenne
des pays membres de l’OCDE
Après plusieurs décennies de baisse des taux
nominaux
de
l’IS,
la
convergence
semble
désormais se faire autour de 25 %. Quelques pays,
comme le Portugal, l’Australie ou le Mexique
demeurent dans une fourchette haute, à 30 %. Ils
pourraient être rejoints par les États-Unis qui ont
annoncé une hausse de leur taux à 28 % pour
financer
le
programme
d’investissement
en
infrastructures
présenté
par
l’administration
Biden. D’autres pays sont dans une fourchette
basse comme la Suisse (8,5 %), la Hongrie (9 %),
l’Irlande (12,5 %), la Lituanie (15 %), le Luxembourg
(18 %). La Belgique et l’Espagne affichent des taux
proches de la moyenne de l’OCDE, à 25 %. L’Italie
est à 24 % et l’Allemagne à 16 %, mais il faut
ajouter au taux allemand celui de l’imposition
locale sur les sociétés (
Gewerbesteuer
).
La trajectoire du taux de l’IS annoncée par la France
en 2018, qui visait à un taux de 25 % en 2022, est
donc de nature à permettre à notre pays de
retrouver un taux d’IS proche de la moyenne de
l’OCDE dès l’an prochain.
Un taux réduit en faveur des PME qui ne doit pas
être le principal instrument d’aide de cette
catégorie d’entreprises
En 2014, 670 000 petites et moyennes entreprises
bénéficiaient du taux réduit de 15 % (cf. I-B-3),
pour un coût global de 2,6 Md
€
13
. Les arguments
généralement avancés en faveur d’un taux réduit
pour les PME sont essentiellement les suivants :
- soutenir le financement parfois difficile de ces
entreprises en renforçant leurs fonds propres :
c’était l’objectif affiché par le législateur français
lors de l’instauration, dans la loi de finances pour
2001
14
, de ce dispositif
15
. La baisse de l’IS est en
0
1
2
3
4
5
6
7
Borne supérieure de la correction liée aux impôts sur la production
Impôts sur les bénéfices
10
|
Quel taux pour l’impôt sur les sociétés en France ?
effet une façon de réduire le coût des capitaux
propres, les bénéfices réinvestis dans l'entreprise
n’étant pas, contrairement aux intérêts de la dette,
déductibles du bénéfice imposable
16
. Toutefois, le
recours à l’outil fiscal n’apparaît pas le plus adapté
pour
soutenir
l’accès
au
financement
des
entreprises dans la mesure où il ne permet pas une
action ciblée contrairement à des dispositifs de
soutien direct comme les apports en capitaux,
prêts
et
garanties
désormais
offerts
par
Bpifrance
17
. Par ailleurs, comme le montrent les
études disponibles, le régime de taux réduit a
certes permis de réduire le montant d’IS payé par
un nombre important d’entreprises de petite taille,
mais n’a pas favorisé l’émergence d’entreprises de
taille intermédiaire capables de se développer
internationalement
18
;
- prendre en compte la capacité contributive
particulière et
les
charges
des
plus
petites
entreprises. C’est l’argument avancé dans les
annexes au projet de loi de finances pour 2016
pour justifier le maintien d’un taux réduit pour une
fraction des bénéfices des PME. Or le postulat
d’une moindre rentabilité des petites entreprises
n’est pas fondé. Quand bien même il existerait un
différentiel de profitabilité entre entreprises selon
leur taille, l’invocation de différences de « capacité
contributive » pour fonder l’application de taux
différenciés apparaît peu pertinente dans la
mesure où la matière imposée, le bénéfice, qui
résulte de la différence entre les produits et les
charges, intègre déjà cette notion. La situation est
différente pour l’imposition sur le revenu des
personnes physiques, qui porte sur le revenu
global et n’intègre que partiellement les charges
supportées,
ce
qui
peut
justifier
une
différenciation des taux applicables.
Aucun argument ne plaide donc aujourd’hui pour
une augmentation de l’écart de taxation des
bénéfices entre les PME et les autres entreprises.
En définitive, le CPO recommande de poursuivre
la stratégie visant à rapprocher le taux nominal
français de la moyenne de l’OCDE ou de la zone
euro, qui s’établissent aujourd’hui à un niveau
proche de 25%. Pour les PME, il ne paraît pas
souhaitable d’augmenter l’écart de taux de
16
Le taux réduit d'impôt sur les sociétés pour les PME, Trésor-Eco, novembre 2007 : « le taux réduit d'IS doit permettre [aux TPE et PME] d'améliorer
leurs capitaux propres et de consolider leur structure de bilan, et donc de leur faciliter in fine l'accès au crédit bancaire ».
17
Les investissements en capital de Bpifrance représentaient 1,4 Md
€
en 2014, et le montant des crédits bancaires garantis s’élevait à 7,8 Md
€
la
même année. Source : rapport annuel de Bpifrance, 2015.
18
Sources :
Le taux réduit d'impôt sur les sociétés pour les PME
, S. Raspiller, 2007, Lettre Trésor-Éco n° 23 ; « Entreprises et « niches » fiscales et
sociales, CPO, 2010.
19
France Stratégie,
L’impact du crédit d’impôt recherche
, Evaluation, mars 2019
taxation des bénéfices avec les autres entreprises,
mais
il
conviendrait
d’encourager
d’autres
dispositifs plus efficaces - fonds d’investissement
en fonds propres ou en prêts gérés pour le compte
de l’État par Bpifrance notamment - pour aider
ces dernières à investir ou à renforcer leurs fonds
propres.
4.3. Des dépenses fiscales qui doivent être
strictement limitées et mieux évaluées et
maîtrisées
Le rapport du CPO de 2010 sur les niches fiscales et
sociales des entreprises avait dressé le constat de
dispositifs coûteux, mal maîtrisés et trop rarement
évalués. Le tableau n’a que peu évolué dans ce
domaine, et les dépenses fiscales portant sur l’IS
ont continué à progresser tout au long de la
décennie écoulée. Or, malgré leur importance,
l’évaluation de l’efficacité de ces dispositifs reste
très lacunaire. Dans un rapport rendu en 2019
19
,
France Stratégie conclut ainsi à « un besoin
d’études complémentaires (sur le CIR) », car « les
études disponibles ne permettent pas de conclure
quant au degré d’efficacité du dispositif sur un
certain nombre de points importants. (...) Elles ne
permettent pas encore d’appréhender pleinement
l’impact
du
CIR
sous
l’angle
de
l’efficacité
économique, que ce soit en termes de créations
d’emplois,
de
croissance
économique,
ou
d’attractivité du territoire français pour les talents
et activités de recherche et de production ».
En définitive, les dépenses fiscales peuvent influer
sur les comportements des entreprises. Leur
utilisation
est
cependant
délicate,
car
leur
efficacité dépend de la qualité des incitations
mises en
œ
uvre et elles sont généralement
coûteuses pour les finances publiques. Mal
conçues, elle peuvent éloigner des objectifs
généraux poursuivis par les pouvoirs publics ou
présenter un rapport coût-efficacité défavorable.
L’ensemble de ces éléments plaident, comme
l’avait déjà recommandé le CPO en 2010, pour
une évaluation systématique et régulière des
dispositifs de dépenses fiscales.
RECOMMANDATIONS
L’ensemble
des
recommandations
présentées
ci-dessous sont sous-tendues par une orientation
générale défendue de longue date par le CPO, tendant
à renforcer la pertinence économique de l’IS en
diminuant son taux et en élargissant son assiette. Pour
cela, il est recommandé de :
1.
Poursuivre la stratégie visant à rapprocher le taux
nominal de l’IS français de la moyenne de nos
grands partenaires de l’UE et de l’OCDE, en tenant
compte du contexte des finances publiques ;
2.
Préserver le rendement budgétaire de l’IS, en
poursuivant les efforts de rationalisation de
l’assiette, en limitant strictement le recours à des
dépenses
fiscales
nouvelles
et
en
évaluant
systématiquement
les
mesures
les
plus
importantes,
telles
que
le
crédit
d’impôt
recherche ;
3.
Mieux accompagner les PME dans le contexte
économique de sortie de crise sanitaire et de
transformation numérique, en privilégiant les
mesures
d’aide
ciblées
en
faveur
de
l’investissement et de la capitalisation, tout en
maintenant à son niveau actuel de 15 % le taux
réduit en leur faveur.
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