Sort by *
FINANCES ET COMPTES PUBLICS
UNE STRATÉGIE
DE FINANCES
PUBLIQUES
POUR LA SORTIE
DE CRISE
Concilier soutien à l’activité
et soutenabilité
Communication au Premier ministre
Synthèse
Juin 2021
2
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
3
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
Sommaire
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Un impact durable de la crise sur l’économie
et les finances publiques
7
2
Une stratégie de croissance pour assurer
la soutenabilité des finances publiques
dans un cadre rénové
11
3
Renforcer l’équité, l’efficacité et l’efficience
des politiques et des administrations publiques
15
Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
5
Introduction
Comme les autres pays européens, la France a réagi à la crise sanitaire par des
mesures exceptionnelles destinées à lutter contre l’épidémie au plan sanitaire
et amortir le choc économique et ses effets sociaux en soutenant les revenus
et en préservant au maximum les capacités productives . Le recul de l’activité
économique a été exceptionnel et la dégradation des finances publiques très
importante . Même si, dans la phase de sortie de crise, un rebond important de
l’activité est attendu, les finances publiques resteront durablement marquées
par un déficit élevé et un niveau de dette en très forte augmentation .
Conformément à la demande du Premier ministre, la Cour présente dans ce
rapport une stratégie que la France pourrait retenir au cours des prochaines
années pour conserver une trajectoire soutenable de ses finances publiques . Les
analyses présentées dans ce rapport sur la situation des finances publiques en
2020 et 2021 seront complétées et approfondies dans le rapport sur la situation
et les perspectives de finances publiques que la Cour publie chaque année au
mois de juin afin de préparer le débat d’orientation sur les finances publiques .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
7
Au moment du déclenchement de
la crise, la France disposait de moins
de marges de manœuvre financières
que la plupart de ses partenaires
européens, avec un niveau de déficit
public égal à 3,1 % du PIB
1
et un
ratio de dette approchant 100  %
du  PIB . Elle était, avec l’Espagne, le
seul pays de la zone euro affichant un
déficit primaire, c’est-à-dire excluant
les dépenses d’intérêts . Seuls l’Italie,
la Grèce, le Portugal et la Belgique
avaient une dette mesurée en points
de PIB supérieure à celle de la France .
L’épidémie de Covid-19 a marqué la
France comme le reste du monde.
L’activité s’est contractée de 7,9 % en
2020, un repli inédit depuis 1945 . Elle
rebondirait de manière vigoureuse
mais encore partielle en 2021 (+5,0 %
selon le projet de loi de finances
rectificatif
de
juin
2021) .
Cette
contraction de l’activité a fortement
affecté les recettes publiques . Par
ailleurs,
pour
accompagner
les
particuliers
et
les
entreprises
et
préserver leurs revenus, des mesures
de
soutien
exceptionnelles
ont
été décidées et mises en œuvre
par l’État et d’autres collectivités
publiques à compter de mars 2020 .
En conséquence, le déficit public s’est
fortement creusé . Après avoir atteint
9,2 points de PIB en 2020, il resterait
encore très élevé en 2021, à environ
9,4 points de PIB . Parallèlement, la
dette publique augmenterait de près
de 20 points de PIB par rapport à 2019,
pour s’établir à un niveau proche de
117 points de PIB en 2021 .
Cette
dégradation
du
déficit
public s’explique, d’une part, par
l’amplification
des
baisses
de
prélèvements
déjà
programmées
avant crise et les mesures de nature
pérenne
prises
pendant
la
crise
avec notamment une hausse des
rémunérations dans le secteur de la
santé . Elle provient, d’autre part, des
effets négatifs durables de la crise
sur l’activité et la situation du marché
du travail, qui réduisent les recettes
publiques et rehaussent certaines
dépenses .
1
Un impact durable de la crise
sur l’économie et les finances
publiques
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
1 Dont 0,9 point de PIB au titre du surcoût ponctuel en 2019 de la transformation du CICE vers
des réductions de cotisations sociales .
8
Un impact durable de la crise sur l’économie
et les finances publiques
La dégradation des finances publiques
s’est
accompagnée
à
ce
stade
d’une hausse contenue des risques
financiers
2
, dans le contexte actuel
de taux d’intérêt historiquement bas
permis notamment par l’action de la
Banque centrale européenne.
Une économie durablement
affectée
La crise devrait marquer l’économie
de manière durable.
En éloignant des
personnes de l’emploi (ou en retardant
l’entrée sur le marché du travail des
jeunes
générations),
elle
devrait
conduire à une hausse du chômage
et à une baisse de la participation
au marché du travail . En outre, la
crise s’est accompagnée d’une forte
réduction
de
l’investissement
des
entreprises et pourrait peser sur leur
capacité d’innovation . Les capacités de
production et la productivité seraient
donc plus faibles en sortie de crise que
ce qui était anticipé en début 2020 .
Les estimations d’activité potentielle
3
permettent d’évaluer les pertes de
capacités de production de la France
à environ 2 points par rapport à la
trajectoire d’avant-crise en 2021.
Si
la croissance de l’activité potentielle
en sortie de crise reste entourée
d’une forte incertitude, un rebond très
marqué de celle-ci ne paraît pas le
scénario le plus probable .
Une trajectoire des finances
publiques à politique inchangée
fortement perturbée
Quelles que soient les incertitudes
et les risques qui entourent les
perspectives de croissance en sortie
de crise, celle-ci laissera des marques
durables sur les finances publiques
et notamment sur la dette publique .
Dans cette optique, la Cour s’est
attachée à éclairer les évolutions
qui peuvent être attendues dans la
décennie à venir, en s’appuyant sur
des scénarios à vocation illustrative,
qui diffèrent entre eux par la vigueur
du rebond de l’économie en sortie
de crise .
Ces scénarios montrent que, même
avec des hypothèses volontaristes,
la croissance économique, condition
indispensable du redressement des
finances publiques, ne permettrait
pas à elle seule une décrue durable
de la dette publique rapportée au PIB
et devrait être accompagnée d’une
politique
de
consolidation .
Cette
poursuite de la progression de la dette
pose de manière directe la question
de sa soutenabilité .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
2 Dans un contexte de rebond important de l’activité et de hausse générale des taux d’intérêt, la
prime de risque des obligations publiques entre la France et l’Allemagne est supérieure fin mai
2021 à celle observée au début de 2020 mais reste inférieure à celle de début 2019 .
3 Activité économique corrigée des fluctuations cycliques et reflétant les facteurs fondamentaux
de l’économie .
9
L’enjeu de la soutenabilité
des finances publiques
La hausse de la dette intervenue
pendant la crise a permis de protéger
les revenus des ménages et des
entreprises face aux conséquences
de la crise sanitaire dans le but de
faciliter le rebond de l’activité dans les
meilleures conditions possibles à la
sortie de la crise .
À plus long terme, la poursuite de
la hausse du ratio d’endettement
risquerait de fragiliser la confiance
des acteurs économiques dans la
capacité de la France à honorer
ses engagements passés et à venir.
Ce risque serait renforcé si ce ratio
s’écartait
encore
davantage
des
niveaux de pays comparables de la
zone euro . La crise de la dette de la
zone euro en 2010 et 2011 qui a suivi
la récession de 2008-2009 illustre les
risques qui s’attachent à une perte de
confiance . Ses manifestations peuvent
être rapides et brutales, conduisant
les pays concernés à rechercher dans
l’urgence
l’équilibre
des
comptes
publics par une forte hausse des
prélèvements ou une baisse abrupte
des dépenses .
Assurer la soutenabilité des finances
publiques
est
donc
un
enjeu
de
souveraineté.
C’est
une
condition
nécessaire pour faire face aux chocs
économiques,
mais
aussi
rester
en
mesure de financer les priorités d’action
pour le pays, ainsi que le fonctionnement
courant des administrations publiques .
Un impact durable de la crise sur l’économie
et les finances publiques
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
Ratio de dette sur PIB dans les scénarios alternatifs
de dépenses publiques
90 %
100 %
110 %
120 %
130 %
140 %
2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030
En points de PIB
Scénario de rattrapage
Scénario de perte limitée
Scénario de faiblesse persistante
Source : Cour des comptes
10
Un impact durable de la crise sur l’économie
et les finances publiques
Pour la France, les signaux sur
la
soutenabilité
des
finances
publiques ne sont pas univoques au
printemps 2021.
Le contexte actuel
de taux bas conduit à une baisse des
charges d’intérêts, mais il n’est pas
acquis, dans la mesure où il résulte
largement de l’action de la Banque
centrale européenne . En outre, le
niveau bas des taux d’intérêt doit
être analysé dans le contexte plus
large du ralentissement continu de
l’activité et de l’inflation, et d’une
compétitivité fragilisée .
Aussi, pour assurer la soutenabilité
de nos finances publiques, la Cour
estime souhaitable une stratégie
de finances publiques qui allierait
renforcement de la croissance et
réduction progressive du déficit
public.
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
11
Favoriser la croissance
dans la durée pour retrouver
l’équilibre des finances
publiques
La Cour estime nécessaire une action
publique
déterminée
en
vue
de
renforcer le niveau de la croissance
économique potentielle de la France.
Les finances publiques doivent être
mobilisées pour favoriser une telle
croissance dans la durée . À cette
fin, il convient de poursuivre quatre
objectifs complémentaires :
l
concentrer l’effort d’investissement
public
au
sens
large
d’une
intervention destinée à préparer
l’avenir – sur des priorités ciblées
afin d’en maximiser l’impact et de le
mesurer précisément, de renforcer
la qualité de la dépense publique, et
notamment de poursuivre les efforts
en vue de soutenir l’innovation,
la
recherche,
l’industrie
et
le
développement des compétences ;
l
soutenir la transition écologique  :
il
apparaît
essentiel
de
mieux
définir et mettre en cohérence les
investissements verts prioritaires,
et de mieux tirer parti des effets
démultiplicateurs de la transition
écologique ;
l
contribuer à l’accélération de la
transformation
numérique
en
accompagnant l’essor de techno-
logies numériques performantes,
inclusives et sécurisées, et en
amplifiant l’adaptation numérique
des services publics ;
l
renforcer les capacités de résilience
pour limiter les effets des chocs de
croissance : cela suppose de mieux
hiérarchiser, évaluer et prévenir
les risques de toute nature, et de
se préparer plus activement à
la gestion de crise afin d’être en
capacité de réagir rapidement et
de façon coordonnée .
Retrouver une trajectoire
soutenable reposant sur
la maîtrise de la dépense
publique
En complément de cette stratégie de
croissance, la stratégie de finances
publiques
devra,
quand
la
crise
sanitaire sera circonscrite et l’activité
aura suffisamment rebondi, viser à
réduire
progressivement
le
déficit
public pour permettre d’installer la
dette publique sur une trajectoire de
baisse durable .
Une stratégie de croissance
pour assurer la soutenabilité
des finances publiques
dans un cadre rénové
2
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
12
Cette
consolidation
progressive
pourrait débuter en 2023, une fois
retrouvé le PIB d’avant-crise, sous
l’hypothèse d’une fin de la crise
sanitaire d’ici la fin d’année 2021.
Il y a effectivement plus de risques à
retirer trop tôt les mesures de soutien
que trop tard .
La fin 2021 et l’année 2022 seraient
ainsi
mises
à
profit
pour
sortir
progressivement
des
principales
mesures de soutien au revenu des
ménages
et
des
entreprises.
Les
dispositifs d’aide d’urgence de grande
ampleur à destination des entreprises
et des salariés ont dans l’ensemble
atteint leurs objectifs, au prix d’un
coût élevé . Initialement mis en place
pour une durée courte, ils ont été
prorogés et adaptés et comportent,
dans une période de reprise, des
risques de frein à l’activité ainsi que
d’abus et de fraude qui doivent être
maîtrisés . Les scénarios de sortie
des mesures d’urgence doivent être
progressifs,
rechercher
une
plus
grande sélectivité et être axés sur
la
solvabilité
des
entreprises .
La
situation du bilan de ces dernières,
sensiblement dégradée à la suite de la
crise, doit faire l’objet d’une attention
particulière
et
pourra
nécessiter
des restructurations de dette et des
mesures favorisant le renforcement
de leurs fonds propres . De même, ces
deux années devraient être mises à
profit pour appliquer pleinement les
mesures du plan
France  Relance
et
l’ajuster si nécessaire .
Cette
consolidation
devrait
privilégier une réduction du rythme
d’augmentation
des
dépenses.
Les
comparaisons
internationales
montrent en effet que les efforts en
dépenses
sont
généralement
plus
efficaces pour réduire l’endettement
public . Il convient de concilier maintien
d’une croissance soutenue en sortie
de crise et réduction du déficit . Afin
de
ne
pas
accroître
encore trop
fortement les divergences entre pays
de la zone euro et notamment entre la
France et l’Allemagne, la Cour estime
que le rythme de progression des
dépenses devrait être fixé à un niveau
conduisant à une réduction du déficit
public suffisante pour permettre une
décrue de l’endettement public au
plus tard à compter de 2027 .
Cette stratégie devrait s’accompagner
d’une réflexion sur la dette issue de la
crise sanitaire.
La Cour considère que
le cantonnement de la dette issue de
la crise sanitaire ne permettrait pas
à lui seul de modifier la trajectoire de
dette des administrations publiques .
En revanche, identifier une dette Covid
pourrait
permettre
de
la
mesurer
précisément et de la faire figurer
clairement parmi les engagements
financiers que la France devra honorer .
La Cour note par ailleurs qu’une reprise
de dette de la sécurité sociale par la
Cades a été organisée à l’été 2020 sans
faire le départage entre ce qui relevait
spécifiquement de la crise et des
déficits structurels
4
passés et à venir,
et sans accompagner cette reprise
de dette d’une trajectoire de retour à
l’équilibre des comptes sociaux .
Une stratégie de croissance pour assurer
la soutenabilité des finances publiques
dans un cadre rénové
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
4 Les évolutions du solde public sont affectées par les fluctuations de l’activité économique .
Afin de mieux apprécier la situation des finances publiques, le solde « structurel » corrige le
solde « effectif » de cet effet conjoncturel ainsi que de facteurs exceptionnels .
13
Une stratégie de croissance pour assurer
la soutenabilité des finances publiques
dans un cadre rénové
La trajectoire de finances publiques
retenue devrait être inscrite dans
une
loi
de
programmation
des
finances publiques votée à l’automne
2022
et
portant
sur
l’ensemble
de
la
législature.
Ce
calendrier
permettrait par ailleurs de réaliser des
revues de dépenses permettant au
Gouvernement issu des élections du
printemps 2022 d’engager les réformes
qui lui paraîtraient nécessaires .
Un cadre de gouvernance
à rénover
Au regard des enjeux qui s’attachent
à la mise en œuvre et au succès sur
le temps long de cette stratégie, la
Cour, dans la continuité de son rapport
consacré à la gouvernance financière
des
administrations
publiques
de
novembre
2020,
recommande
de
renforcer la portée de la programmation
pluriannuelle et de mieux faire partager
les enjeux de soutenabilité . Il s’agirait
notamment de définir des trajectoires
de
moyen
terme
en
fixant
des
enveloppes pluriannuelles de dépenses
et de mesures nouvelles en recettes
et une provision pour faire face aux
aléas .
Un
compteur
permettant
d’expliciter les écarts à la trajectoire
serait mis en place . La portée des lois
financières serait également renforcée
par l’extension de leur champ .
La
surveillance des trajectoires serait
rendue plus effective en élargissant le
mandat du Haut Conseil des finances
publiques à :
l
l’appréciation
du
réalisme
des
prévisions de recettes et de dépenses
et à l’expertise de l’évaluation des
principales mesures ;
l
la mise en place d’un mécanisme
de pré-alerte pour identifier les
risques d’écart à la trajectoire ;
l
un
examen
plus
régulier
des
hypothèses
de
croissance
potentielle
5
Au niveau européen, afin d’assurer la
stabilité à la zone euro, les réflexions
engagées avant la crise pour une
rénovation des règles du pacte de
stabilité et de croissance mériteraient
d’être
poursuivies
pour
permettre
une évolution des règles avant la fin
de la « clause dérogatoire générale »
déclenchée
par
la
Commission
pendant la crise sanitaire .
Une réforme des règles du pacte de
stabilité et de croissance pourrait
s’articuler
autour
de
quelques
principes :
l
une règle simple permettant de
s’adapter à la situation des pays
et
notamment
à
leur
niveau
d’endettement 
et
portant
une
attention particulière à la qualité
de la dépense ;
l
une
règle
qui
ne
soit
pas
procyclique ;
l
une
règle
qui
permette
de
privilégier l’investissement au sein
de la dépense publique ;
l
une règle qui s’appuie davantage
qu’aujourd’hui
sur
l’expertise
des
institutions
budgétaires
indépendantes
nationales
pour
crédibiliser les scénarios et évaluer
les mesures prises par les États
membres .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
5 Estimation de la croissance du PIB corrigée des fluctuations cycliques .
15
Engager des revues
de la dépense publique
Le niveau de la dépense publique en
France est sensiblement plus élevé
que dans des pays dont le modèle
social est comparable au nôtre (écart
de 8,6 points de PIB avec la moyenne
de la zone euro en 2019).
Renforcer l’équité, l’efficacité
et l’efficience des politiques
et des administrations publiques
3
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
Comparaison du niveau de la dépense publique entre la France
et la moyenne de la zone euro
Source Eurostat/Cour des comptes
-1
0
1
2
Retraites
Affaires économiques
Logement et équipement collectifs
Santé et invalidité
Enseignement
Famille
Défense
Chômage
Exclusion sociale
Services généraux
Sécurité intérieure et justice
Écart 2001
Écart 2019
Écarts en points de PIB
16
Renforcer l’équité, l’efficacité et l’efficience
des politiques et des administrations publiques
Qui plus est, cet écart s’est fortement
creusé sur la période récente sans
que
les
indicateurs
économiques,
sociaux, de développement humain
ou en termes de qualité et d’efficacité
des services publics ne permettent
de justifier une telle évolution . Cela
affecte notamment les secteurs de la
protection sociale et de la santé .
Pour
infléchir
durablement
ces
tendances, il est essentiel d’identifier
les
causes
structurelles
de
la
dynamique de ces dépenses, et de s’y
atteler dans la durée .
Des réformes clés pour infléchir
le rythme et améliorer la qualité
de la dépense publique
Sans sous-estimer l’importance des
autres postes de dépenses, la Cour a
choisi d’analyser dans ce rapport cinq
secteurs clés de la dépense publique
que sont le système des retraites,
l’assurance maladie, la politique de
l’emploi, les minima sociaux et la
politique du logement.
Le système des retraites, malgré
des réformes qui ont eu un impact
positif, n’est toujours pas équilibré
de façon pérenne.
Une fois la crise
passée,
de
nouvelles
adaptations
seront
indispensables
pour
tenir
compte notamment des évolutions
démographiques et de l’allongement
de la durée de la vie . Les effets de ces
adaptations sur la situation des actifs
et des retraités devront être anticipés .
L’amélioration
de
la
qualité
des
dépenses
d’assurance
maladie
constitue une deuxième priorité.
À
cette fin, il apparaît nécessaire, tout en
confortant notre système de santé, et
en particulier l’hôpital, d’appliquer à
nouveau une norme de dépenses, de
mobiliser les marges d’efficience de
notre système de santé, de prévenir
plus activement les pathologies et
les accidents de santé ou encore
de
contenir
la
progression
des
dépenses d’indemnités journalières .
Ces réformes devront viser à assurer
le retour à l’équilibre de l’assurance
maladie et à stabiliser le poids de ces
dépenses dans le PIB .
Une troisième priorité concerne la
politique de l’emploi,
l’enjeu étant de
mieux ajuster les dépenses en faveur
de
l’emploi
et
de
l’indemnisation
du chômage en fonction des cycles
économiques
et
d’améliorer
leur
efficacité pour prévenir le chômage de
longue durée et favoriser une insertion
durable dans l’emploi, notamment des
publics fragiles (jeunes décrocheurs,
publics non qualifiés, seniors) .
Il convient par ailleurs d’assurer à
la fois l’efficacité et la soutenabilité
des minima sociaux et de la politique
du logement,
qu’il s’agit de mieux
cibler et simplifier afin d’accroître leur
efficacité, notamment en direction des
ménages les plus défavorisés .
La mise en œuvre de ces réformes
doit permettre tout à la fois de
mieux soutenir la croissance par des
politiques publiques plus efficientes,
de contribuer à la résorption des
fractures sociales et territoriales et
d’infléchir le rythme de progression
des dépenses publiques pour nous
rapprocher de la situation des autres
pays européens .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
17
Des administrations
et des collectivités territoriales
plus efficientes
Outre cette attention à porter sur
les principaux leviers de la dépense,
une action continue doit être dirigée
vers l’ensemble des administrations
publiques en vue de renforcer leur
efficience et d’améliorer la qualité des
services rendus aux citoyens . À cette fin,
quatre leviers doivent être mobilisés .
Il s’agit d’abord de procéder à une revue
des
missions
des
administrations.
Cela exige de savoir renoncer aux
missions que la sphère publique n’a
plus vocation à exercer, de rationaliser
systématiquement les missions exercées
par plusieurs niveaux d’administration
publique, de remettre en cause toute
mission qui pourrait être assurée plus
efficacement à un autre échelon ou
encore de réorienter l’action publique
vers les territoires fragilisés .
Le deuxième levier est de développer
la contractualisation en contrepartie
d’une
plus
grande
liberté
de
gestion et de moderniser la gestion
publique.
À cette fin, il est essentiel
de
responsabiliser
les
acteurs
en
développant
des
pratiques
de
contractualisation pluriannuelle sur
les objectifs et les moyens, y compris
envers les collectivités territoriales, de
moderniser la gestion des ressources
humaines
publiques,
ou
encore
d’optimiser les fonctions support et
les synergies .
Un
troisième
levier,
gage
d’une
meilleure lisibilité, consiste à simplifier
l’organisation
des
administrations
publiques et à alléger les procédures
administratives et le poids des normes,
en adoptant de nouvelles approches
tirant notamment profit des outils
numériques
et
des
simplifications
mises
en
place
pendant
la
crise
sanitaire .
Enfin, pour favoriser davantage la
transparence, la Cour propose, d’une
part, de développer les évaluations
de politiques publiques
et de mieux
prendre en compte leurs résultats et,
d’autre part, de mieux contrôler la
dépense et de lutter plus efficacement
contre la fraude, notamment en ce qui
concerne les dispositifs mis en place
pendant la crise sanitaire .
Renforcer l’équité, l’efficacité et l’efficience
des politiques et des administrations publiques
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
19
Recommandations
S’agissant du renforcement de la
croissance potentielle :
1.
Accorder la priorité aux dépenses
publiques et aux incitations fiscales
susceptibles de contribuer à soutenir
la croissance potentielle, en particulier
dans
l’innovation,
la
recherche,
l’industrie et le développement des
compétences .
2.
Accélérer la transition écologique
en
soutenant
les
investissements
verts prioritaires et en accompagnant,
notamment
par
des
dispositifs
fiscaux
adaptés,
l’évolution
des
comportements des ménages et des
entreprises .
3.
Soutenir la transformation numé-
rique des entreprises et accélérer
l’adaptation des services publics .
4.
Renforcer
les
capacités
de
résilience en recensant mieux les
risques de toute nature, en les
hiérarchisant et en se préparant plus
efficacement à la gestion de crise .
5.
Maintenir les dispositifs d’urgence
(fonds
de
solidarité
et
activité
partielle) pour les seuls secteurs
demeurant affectés par la crise,
en réduisant le montant des aides
accordées .
6.
Accélérer
la
transposition
en
cours de la directive européenne du
28 mars 2019 sur la restructuration
et l’insolvabilité en encourageant
les
procédures
préventives
et
confidentielles .
7.
Créer de nouveaux instruments
financiers d’un accès simple pour les
particuliers, susceptibles de drainer
l’épargne des ménages accumulée
pendant la crise pour renforcer les
fonds propres des entreprises .
S’agissant
de
la
stratégie
pour
assurer
la
soutenabilité
des
finances publiques dans des règles
de gouvernance rénovées :
8.
Dès que l’activité sera revenue
au moins au niveau d’avant-crise,
engager
une
consolidation
des
finances publiques, en privilégiant
des mesures portant sur la dépense
publique .
9.
Fixer
dans
une
loi
de
programmation
des
finances
publiques votée à l’automne 2022 et
couvrant la durée de la législature,
une
trajectoire
de
solde
public
permettant d’assurer la réduction
du poids de la dette dans le PIB au
plus tard à compter de 2027 .
10.
Agir pour permettre l’adaptation
du cadre européen des finances
publiques
au
nouveau
contexte
issu de la crise avant la levée de la
« clause dérogatoire générale » .
11.
Définir en loi de programmation
des
finances
publiques,
pour
chaque
année
et
en
milliards
d’euros
courants,
une
enveloppe
pluriannuelle
de
dépenses
des
administrations publiques, déclinée
en sous-objectifs et assortie d’une
provision de programmation, et une
enveloppe pluriannuelle de mesures
nouvelles en recettes (modification
de
la
LOPGFP,
recommandation
réitérée) .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
20
Recommandations
12.
Conforter
la
surveillance
de
la sincérité des lois financières et
de la trajectoire pluriannuelle en
élargissant
le
mandat
du
Haut
Conseil
des
finances
publiques
à l’appréciation du réalisme des
prévisions de recettes et de dépenses,
du chiffrage de certaines mesures
nouvelles et à l’identification des
risques
d’écart
à
la
trajectoire
(modification
de
la
LOPGFP,
recommandation réitérée) .
13.
Transformer la loi de financement
de la sécurité sociale en une loi de
la
protection
sociale
obligatoire
élargie
aux
régimes
de
retraite
complémentaire obligatoires et à
l’assurance chômage (modification
de
la
LOLFSS,
recommandation
réitérée) .
14.
Sur la base d’un rapport du
Gouvernement et d’une analyse du
Haut Conseil des finances publiques,
instituer un débat annuel sur la
dette publique et sa soutenabilité
permettant
d’ancrer
le
cadre
financier pluriannuel dans une vision
de long terme (modification de la
LOPGFP, recommandation modifiée) .
15.
Organiser
un
débat
national
associant
toutes
les
parties
prenantes
sur
les
enjeux
de
soutenabilité
en
amont
du
vote
des
lois
de
programmation
des
finances publiques (recommandation
nouvelle) .
16.
Créer
une
instance
pérenne
de
concertation,
constituée
de
représentants
de
l’État,
des
collectivités
territoriales,
des
administrations de sécurité sociale
et des partenaires sociaux, associant
toutes les administrations publiques
à la maîtrise des finances publiques
(modification
de
la
LOPGFP,
recommandation modifiée) .
S’agissant des réformes clés pour
infléchir le rythme et améliorer la
qualité de la dépense publique :
17.
Procéder, en début de législature,
à
une
revue
approfondie
des
dépenses publiques dont le niveau
et
la
dynamique
apparaissent
sensiblement supérieurs à ce qui
est observé chez nos partenaires
européens,
afin
d’identifier
les
réformes susceptibles d’en maîtriser
l’évolution et de renforcer l’efficacité
et
l’efficience
des
politiques
concernées .
18.
Poursuivre
l’adaptation
des
régimes de retraite afin de maîtriser
l’évolution des dépenses et d’en
accroître l’équité .
19.
Renforcer l’efficience de notre
système de santé, en coordonnant
plus étroitement les acteurs de ville
et hospitaliers, avec pour ambition
d’offrir des soins de qualité et de
stabiliser
la
part
des
dépenses
d’assurance maladie dans le PIB .
20.
Adapter
les
dispositifs
d’indemnisation
du
chômage
et
d’aides à l’emploi à l’évolution des
cycles
économiques
et
renforcer
l’insertion durable dans l’emploi des
publics fragiles et la prévention du
chômage de longue durée .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise
21
Recommandations
21.
Assurer une plus grande efficacité
et équité des minima sociaux, en
veillant
à
leur
soutenabilité
et
à leur contrôle, en procédant à
l’harmonisation et à la simplification
des
dispositifs
et
en
renforçant
l’incitation à l’activité .
22.
Simplifier
et
territorialiser
davantage les instruments de la
politique du logement en ciblant
prioritairement
les
ménages
les
plus défavorisés, et supprimer les
dispositifs, notamment fiscaux, dont
l’efficience est insuffisante .
S’agissant
du
renforcement
de
l’efficience les administrations dans
la mise en œuvre des politiques
publiques :
23.
Procéder à une revue des missions
des administrations publiques afin
de supprimer les missions que la
sphère publique n’a plus vocation
à
exercer,
de
rationaliser
celles
exercées par plusieurs entités, et de
favoriser la déconcentration ou la
décentralisation de l’action publique
au plus proche des territoires .
24.
Responsabiliser
les
acteurs
en développant les pratiques de
contractualisation pluriannuelle sur
les objectifs et les moyens, y compris
vis-à-vis des collectivités territoriales .
25.
Engager un chantier ambitieux
en vue de simplifier le paysage
des
administrations
publiques,
les procédures et les normes, en
tirant notamment profit des outils
numériques et des simplifications
mises en place pendant la crise
sanitaire .
26.
Développer les évaluations de
politiques et de dispositifs publics, et
mieux intégrer leurs résultats dans la
délibération démocratique et dans
l’action publique .
27.
Renforcer
la
lutte
contre
la
fraude aux prélèvements publics et
aux prestations sociales, y compris
en ce qui concerne les dispositifs mis
en place pendant la crise sanitaire .
Synthèse du rapport sur une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise