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QUATRIÈME CHAMBRE
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Première section
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Arrêt n°S2021-0883
Audience publique du 8 avril 2021
Prononcé du 6 mai 2021
ETABLISSEMENT
D’HEBERGEMENT POUR
PERSONNES ÂGEES DEPENDANTES
« LES SIGNOLLES » À AJAIN (CREUSE)
Appel d
un jugement de la chambre régionale
des comptes Nouvelle-Aquitaine
Rapport n° R-2021-0295
République Française
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 31 juillet 2020 au greffe de la chambre régionale des comptes
Nouvelle Aquitaine, par laquelle le procureur financier près cette juridiction a élevé appel du
jugement n° 2020-004 du 28 février 2020 par lequel celle-ci a mis à la charge de M. X, agent
comptable de
l’établissement d’hébergement pour personnes âgées
dépendantes (EHPAD)
« Les Signolles » à Ajain
(Creuse), au titre de l’exercice 2015, une somme non rémissible
et
prononcé à son encontre deux débets pour avoir payé des dépenses sur le fondement de
pièces justificatives insuffisantes ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance, notamment le réquisitoire
n° 2019-0062 du 8 octobre 2019 du procureur financier près la chambre régionale des comptes
Nouvelle-Aquitaine ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article D. 1617-19 ;
Vu l
article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu l’ordonnance
n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus
pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même
période ;
Vu le décret n° 88-1083
du 30 novembre 1988 relatif à l’attribution d’
une prime spécifique à
certains agents ;
Vu le décret n° 88-1084 du 30
novembre 1988 relatif à l’
indemnité horaire pour travail normal
de nuit et à la majoration pour travail intensif ;
Vu le décret n° 90-693 du 1
er
août 1990 relatif à l’attribution d’une indemnité
de sujétion
spéciale aux personnels de la fonction publique hospitalière ;
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Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique, notamment son article 42 ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l
article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l
article 90 de
la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu
l’arrêté du
25 juillet 2013 portant app
lication du premier alinéa de l’
article 42 du décret
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et
encadrant le contrôle sélectif de la dépense, notamment ses articles 1
er
et 3 ;
Vu le rapport de M. Louis VALLERNAUD, conseiller maître, chargé de l
instruction ;
Vu les conclusions de la Procureure générale n° 142 du 1
er
avril 2021 ;
Entendu lors de l
audience publique du 8 avril 2021 M. VALLERNAUD, en son rapport,
Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public, les autres
parties, informées de l
audience n
étant ni présentes, ni représentées ;
Entendu en délibéré Mme Sophie MOATI, présidente de chambre maintenue en activité,
réviseure, en ses observations ;
1. Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes
Nouvelle-
Aquitaine a mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pour avoir, sur le
fondement du mandat collectif n° 5 du 20 janvier 2015, payé des indemnités de sujétions
spéciales à des agents titulaires pour un montant de 17 749,17
€ (charge
n° 1) et à des agents
contractuels pour un montant de 366,86
€ (charge
n° 2), des indemnités de travail intensif de
nuit à des agents titulaires pour un montant de 1
144,55€ (charge
n° 3) et à des agents
contractuels pour un montant de 563,98
€ (charge
n° 4) et des primes spécifiques à des
agents titulaires pour un montant de 738,92
€ (charge
n° 5) et à des agents contractuels pour
un montant de 320,16
€ (charge
n° 6),
alors qu’il ne dispo
sait pas de la décision individuelle
d’attribution et, pour les agents contractuels, d’un contrat mentionnant la prime ou l’indemnité
,
dont la rubrique 220223 de la liste des pièces justificatives des dépenses des collectivités
territoriales et des établissements public
s locaux mentionnée à l’article
D. 1617-19 et jointe en
annexe du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit la production pour le
paiement de primes et indemnités aux agents titulaires et contractuels des établissements
sociaux et médico-sociaux ;
2. Attendu que
la chambre a jugé qu’il résultait des dispositions de l’article
1
er
du décret
susvisé du 1
er
août 1990 relatif à l’attribution d’une indemnité de sujétion spéciale aux
personnels de la fonction publique hospitalière
qu’à l’exception des personnels de direction et
des pharmaciens, l’ensemble des agents titulaires et contractuels exerçant des fonctions
similaires pouvaient prétendre au versement de cette indemnité
; qu’elle a estimé qu’à la
lecture des bulletins de sala
ire, dont il disposait, le comptable pouvait s’assurer que les
fonctions des intéressés justifiaient qu’elle leur soit payée
; qu’elle en a conclu que les
manquements objets des charges n° 1 et 2 n’avaient pas causé de préjudice financier à
l’établissement
public ;
3. Attendu que la juridiction a fait
le même raisonnement s’agissant des primes spécifiques
payées à des agents titulaires (charge n° 5)
; qu’en effet, elle a constaté que l’article 1
er
du
décret susvisé du 30 novembre 1988 relatif à ce complément indemnitaire en prévoyait le
versement sans condition aux agents titulaires et stagiaires et que les bulletins de salaires
permettaient au comptable d’identifier ceux des personnels de la maison de retraite qui
relevaient de l’un ou l’autre de ces statuts, qu’en sens inverse, la chambre a jugé qu’étant
intervenu alors que leur contrat ne le prévoyait pas, le versement de la même prime à des
agents contractuels était dépourvu de fondement juridique et avait donc causé un préjudice
financier à l’établisseme
nt public (charge n° 6).
4. Attendu que d
e la même façon, après avoir relevé qu’en application de l’article
1
er
du décret
susvisé du 30
novembre 1988 relatif à l’indemnité horaire pour travail intensif de nuit, ce
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complément indemnitaire pouvait être versé aux agents titulaires et stagiaires, la juridiction a
distingué les paiements réalisés au bénéficie de ces deux catégories de personnel, dont le
comptable pouvait s’assurer qu’ils y avaient droit à l’examen de leurs bulletins de salaire, et
les versements
intervenus au bénéfice des agents contractuels, qui n’étaient pas
contractuellement prévus et présentaient donc un caractère indu
; qu’elle
en a tiré la
conclusion que si les premiers n’avaient pas causé de préjudice financier à l’EHPAD
(charge n° 3), il en était résulté un des seconds (charge n° 4) ;
5. Attendu
qu’en conséquence les premiers juges ont, d’une part,
constitué M. X en débet au
titre des charges n° 4 et 6, pour les sommes de 563,98
€ et 320,16
€ respectivement, avec
intérêts à compter du 22 octobre 2019, date de notification du réquisitoire
et, d’autre part,
sanctionné d’une unique somme non rémissible de 212
€ les versements irrégulièrement
intervenus au titre des charges n° 1, 2, 3 et 5, dont ils ont implicitement considé
ré qu’ils
participaient d’un même manquement au sens des dispositions figurant au deuxième alinéa
du VI de l’article
60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ;
6. Attendu que la chambre a également jugé que les versements objets des charges n° 4 et 6
étaient intervenus dans le respect des règles de contrôle sélectif des dépenses
; qu’e
lle a
fondé cet élément de sa décision sur l’analyse selon laquelle l’absence de mention de
l’indemnité pour travail intensif de nuit et de la prime spécifique, dans le plan de
contrôle de la
paie, ne signifiait pas que ces compléments indemnitaires devaient faire
l’objet d’un contrôle
exhaustif
; qu’en effet, selon la juridiction, il ressort des dispositions combinées de l’article
42
du décret susvisé du 7 novembre 2012, qui of
fre au comptable la faculté d’adapter l’intensité,
la périodicité et le périmètre de ses contrôles en se conformant à un plan de contrôle établi
suivant les règles fixées par arrêté du ministre chargé du budget, des articles
1 à 3 de l’arrêté
correspondant, en date du 25 juillet 2013, et du guide méthodologique du contrôle hiérarchisé
de la dépense établi en 2014 par la direction générale des finances publiques en application
de l’article
3 de l’arrêté du 25
juillet 2013, et plus particulièrement des fiches 9 à 14 de ce
guide, relatives à la paye, qu’
«
il appartient au comptable public d’établir un calendrier qui
constitue le plan de contrôle de la paye, qui est annuel et qui fixe, mois par mois, les éléments
ou les événements qui sont à contrôler »
; que la
chambre a estimé qu’il s’en déduisait que
« les autres éléments relatifs à la paye, non mentionnés par ce calendrier, ne
[devaient]
pas
obligatoirement donner lieu à un contrôle au titre du contrôle hiérarchisé des dépenses »
et
qu’ils ne relevaient d
onc
pas d’un contrôle exhaustif
;
7. Attendu que l
appelant demande à la Cour
d’annuler les dispositions du jugement relatives
à la fixation de la somme mise à la charge du comptable au titre des charges n° 1, 2, 3 et 5,
au motif que la chambre régionale des comptes n’aurait pas discuté l’analyse qu’il a faite des
circonstances de l
’espèce, qui devaient selon lui la conduire à retenir le montant maximal
de
la somme non rémissible correspondant à un millième et demi du cautionnement du poste
comptable ou, à défaut, de les infirmer
; qu’il lui demande également, s’agissant des
charges n°
4 et 6, d’infirmer le jugement en ce qu’il a constaté que les manquements seraient
intervenus dans le respect des règles de contrôle sélectif des dépenses ;
Sur la régularité de la procédure
8. Attendu que le procureur financier soutient, ce que la lecture de ses conclusions sur le
rapport à fin
de jugement des comptes pour l’exercice
2015 de l’EHPAD «
Les Signolles » à
Ajain confirme, qu’il avait invité la chambre à relever que M.
X
n’avait
« pas fait état de
circonstances de l’espèce à décharge sus
ceptibles de moduler à la baisse la somme non
rémissible »
, que la circonstance que les paiements en cause auraient dû faire l’objet d’un
contrôle exhaustif constituait
« un élément défavorable à
[une telle]
modulation »
et que
« la
récurrence et la répétition des paiements irréguliers, dans un contexte de défaut généralisé de
contrôle des indemnités, était une circonstance motivant l’application du plafond
»
;
9.
Attendu qu’aucune analyse des circonstances dont l’appréciation a conduit les premiers
juges à mettre à la charge de M. X une somme représentant 80 % du plafond applicable de
265,50
€ compte tenu du montant du cautionnement du poste comptable (177
000
€) ne figure
dans la motivation du jugement rendu par la chambre le 28 février 2020 ; que son dispositif
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précise seulement, à l’article
1
er
, qu’elle a été fixée à 212
« afin de tenir compte des
circonstances de l’espèce
»
; qu’en s’abstenant de discuter les arguments soulevés par le
procureur financier au soutien de sa proposition de fixer au plafond la somme mise à la charge
de M. X
d’une part, et d’expliciter d’autre part la raison pour laquelle il y avait lieu de la fixer à
un montant inférieur
, la chambre a entaché son jugement d’un
manquement aux règles du
contradictoire et d’un défaut
de motivation qui justifient son annulation ;
10.
Attendu que l’affaire est en état d’être jugée sur ce point ; qu’il y a donc lieu de l’évoquer
et de statuer sur le fondement du réquisitoire susvisé du procureur financier ;
Sur les circonstances dans lesquelles sont intervenus les manquements visés dans les
charges n° 1, 2, 3 et 5
11. Attendu que dans sa réponse au réquisitoire, transmise au greffe de la chambre régionale
par mèl du 28 novembre 2019, M. X a indiqué,
«
s’agissant des circonstances ayant entouré
le paiement du mandat n° 5,
[que]
la sélectivité des contrôles
[avait]
résult
[é]
du plan de
contrôle de la paye mis en place pour l’exercice
2015 »
; qu’il a précisé que
« ce plan
[avait
été]
interprété comme énonçant les contrôles à effectuer selon une fréquence et une intensité
définies et exclusifs de tout autre contrôle »
; qu’il a ajouté que, pour éliminer cette
« ambiguïté
d’interprétation
»
, les plans de contrôle ultérieurs avaient été complétés de la précision selon
laquelle
«
au regard de l’analyse des risques et enjeux effectuée par le comptable, les autres
éléments relatifs à la paye, non mentionnés dans le plan de contrôle, ne
[donneraient]
lieu à
aucun contrôle pour l’année en cause
»
;
12. Attendu
qu’a
près avoir relevé que
« le comptable
[n’avait]
fait état d’aucun fait susceptible
d’avoir pesé sur le fonctionnement du poste comptable dont il était titulaire
»
, le rapporteur a
observé que l’indemnité de sujétion spéciale, l’indemnité pour travail
intensif de nuit et la prime
spéciale étaient dues aux agents titulaires ou contractuels visés par les charges n° 1, 2, 3 et
5 qui en ont bénéficié et que le comptable disposait des pièces nécessaires pour en vérifier
l’exacte
liquidation
; qu’i
l a considéré que ces éléments étaient de nature à atténuer la gravité
des manquements constatés et proposé en conséquence
« de mettre à la charge du
comptable
(…)
une somme non rémissible fixée à
(…)
1,2 millième du montant du
cautionnement »
du poste comptable, soit 212
;
13. Attendu que dans ses conclusions sur le rapport à fin de jugement des comptes pour
l’exercice
2015 de l’EHPAD «
Les Signolles » à Ajain, le procureur financier a invoqué trois
arguments au soutien de sa proposition de mettre à la charge du comptable une somme non
rémissible d’un montant égal au plafond réglementaire
; qu’il a d’abord considéré que
« la
question des dispositifs de contrôle sélectifs et de leur ambiguïté d’interprétation
»
, évoquée
par M. X dans sa réponse au réquisitoire, ne constituait pas une circonstance susceptible
d’être prise en compte à décharge et qu’il fallait donc considérer que le comptable n’en avait
évoqué aucune
; qu’il a ensuite invoqué, comme des éléments circonstanciels justifiant
également la fixation au plafond de la somme non rémissible
, d’une part,
« la récurrence et la
répétition des paiements irréguliers, dans un contexte de défaut généralisé de contrôle des
indemnités »
et, d’autre part, le non
-respect du plan de contrôle hiérarchisé de la paye, qui
prévoyait un
« contrôle exhaustif des paiements en cause »
;
14. Attendu que contrairement à ce que soutient
l’appelant et à ce qu’a retenu la chambre,
M. X a manifestement entendu invoquer comme une circonstance atténuante la difficulté qui,
selon lui, s’attachait à l’interprétation du plan de contrôle hiérarchisé de la paye
; qu’il y a donc
bien lieu
d’y répond
re
; que l’ambiguïté alléguée par le comptable n’est
toutefois pas avérée ;
qu’il résulte en effet clairement des termes précités de l’article
42 du décret du 7 novembre
2012 et de l’article
1
er
de l’arrêté du 25
juillet 2013 que le principe d’un contrôle exhaustif des
dépenses demeure applicable à cel
les pour lesquelles aucun contrôle sélectif n’a été
expressément prévu, comme cela est mis en évidence pour les charges 4 et 6 ci-dessous ;
15. Attendu que
le non-respect des règles du contrôle hiérarchisé de la dépense en vigueur,
ainsi que la récurrence et la répétition des paiements irréguliers constituent des circonstances
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aggravantes qu’il revient au juge des comptes de prendre en considération pour arrêter la
somme non rémissible mise à la charge du comptable ;
.que, comme l’appelant y a invité la
chambre dans ses conclusions, il y a lieu de considérer que
les paiements irréguliers de
l’indemnité de sujétion spéciale, de l’indemnité pour travail intensif de nuit et de la prime
spécifique à des agents titulaires (charges n°
1, 3 et 5) et de l’indemn
ité de sujétion spéciale
à des agents contractuels (charge n° 2) constituent un même manquement au sens du
deuxième alinéa du VI de l’article
60 susvisé de la loi du 23 février 1963 ; que ces
considérations justifient de mettre à la charge de M. X, au titre des charges n° 1, 2, 3 et 5, une
unique somme non rémissible fixée au montant maximal de un millième et demi du montant
du cautionnement du poste comptable, ar
rondi à l’euro inférieur,
soit 265 euros ;
Sur la demande d’infirmation des dispositions du j
ugement concernant le respect des
règles de contrôle sélectif des dépenses (charges n° 4 et 6)
16.
Attendu qu’après avoir relevé que le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense
qu’appliquait en 2015 l’EHPAD «
Les Signolles » à Ajain ne comportait aucune mention de
l’indemnité pour travail intensif de nuit, ni de la prime spécifique, l’appelant
invoque trois
arguments au soutien de la thèse selon laquelle les paiements de ces compléments
indemnitaires devaient faire
l’objet d’un contr
ôle exhaustif ;
17.
Attendu qu’il souligne en premier lieu que
« le contrôle sélectif constitue un mode
dérogatoire au contrôle exhaustif des dépenses, lequel demeure applicable pour toutes les
dépenses qui ne sont pas expressément mentionnées dans le plan de contrôle comme devant
faire l’objet d’un contrôle «
a posteriori » ou « par échantillon
» ou d’une «
partie » seulement
des contrôles prévus par le décret du 7 novembre 2012 »
relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique ; que cette analyse se déduit selon lui des dispositions figurant à
l’article
1
er
de l’arrêté du 25
juillet 2013 pris pour l’application de l’article
42 du décret du
7 novembre 2012, qui prévoient que le comptable
« établit un plan de contrôle hiérarchisé des
ordres de payer q
ui distingue, d’une part, les catégories de dépenses soumises, a priori, à
l’ensemble des contrôles définis par les articles
19 et 20
[dudit décret]
et, d’autre part, les
catégories de dépenses soumises, a priori ou a posteriori, à tout ou partie des contrôles définis
par ces mêmes dispositions »
; qu’il soutient qu’en l’occurrence,
«
à défaut d’être mentionnées
dans la catégorie des dépenses devant faire l’objet, a priori ou a posteriori, de tout ou partie
des contrôles prévus par le décret du 7 novembre 2012, les ITIN et les primes spéciales
demeuraient, par construction, soumises à un contrôle exhaustif »
;
18.
Attendu que l’appelant fait valoir en deuxième lieu que, contrairement à ce qu’a jugé la
chambre, il n’est pas certain que l’instruction du direc
teur général des finances publiques
2014/05/4612 du 6 juin 2014 portant
« mesures de simplification du plancher du nombre de
mandats à contrôler et actualisation du guide méthodologique du contrôle hiérarchisé des
dépenses publiques locales et hospitalières »
ait été prise pour la mise en œuvre de l’article
3
de l’arrêté du 25
juillet 2013, qui dispose que
« le plan de contrôle hiérarchisé des dépenses
est élaboré par le comptable public assignataire selon une méthodologie définie par le
directeur général des finances publiques pour chaque catégorie de personnes morales
énumérées à l’article
1
er
du décret »
du 7 novembre 2012, dans la mesure où elle ne le vise
pas explicitement
; qu’en toute hypothèse, il conteste également la conclusion que la juridiction
a
tirée de l’analyse des fiches annexées à l’instruction, selon laquelle il n’y aurait pas lieu de
soumettre à un contrôle exhaustif les éléments de paye non mentionnés dans le plan de
contrôle
; qu’il observe en effet que les fiches en cause
« précisent que certaines sous-
catégories de dépenses propres à la paie peuvent faire l’objet
(…)
de contrôles aménagés,
mais n’indiquent pas explicitement que les autres sous
-catégories de dépenses
[sont]
dispensées du contrôle exhaustif prévalant par défaut »
;
19.
Attendu qu’au soutien de la même conclusion, l’appelant invoque en troisième et dernier
lieu le guide pratique de mise en œuvre des CHD du 20
décembre 2017, qui a certes été
produit postérieurement aux paiements litigieux mais
«
est susceptible d’éclairer
la lecture des
instructions précédentes »
de la DGFiP
; qu’il y est en effet indiqué que
«
l’absence de contrôle
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d’une catégorie de dépense (par exemple un type d’élément de rémunération au sein de la
paie) ne peut résulter de dispositions tacites »
mais
« devra être prévue par une formulation
explicite »
et qu’
«
à défaut d’une telle mention explicite et formelle, le contrôle sera supposé
demeurer exhaustif »
; que l
’appel
ant observe que la fiche n° 9 sur le référentiel national du
contrôle hiérarchisé pour la paye et les indemnités des élus locaux, jointe au guide
méthodologique du contrôle hiérarchisé de la dépense établi en 2014 par la DGFiP, comporte
le même avertissement, formulé dans les mêmes termes ;
20.
Attendu qu’il résulte des dispositions précitées de l’article 42 du décret du
7 novembre
2012 et de celles figurant à l’article 1
er
de l’arrêté du 25 juillet 2013 pris pour leur
application, selon lesquelles le comptable public établit un plan de contrôle hiérarchisé des
ordres de payer qui dis
tingue, d’une part, les catégories de dépenses soumises
, a priori
, à
l’ensemble des contrôles définis par les articles 19 et 20 du décret du 7
novembre 2012 et,
d’autre part, les catégories de dépenses soumises, a
priori
ou a
posteriori,
à tout ou partie des
contrôles définis par ces mêmes dispositions, que le contrôle sélectif constitue un mode
dérogatoire au contrôle exhaustif des dépenses, lequel demeure applicable pour toutes celles
qui ne sont pas expressément mentionnées dans le plan de contrôle ;
21.
Attendu que, contrairement à l’interprétation retenue par la chambre régionale des
comptes dans le jugement attaqué, il ne se déduit pas du guide méthodologique de contrôle
hiérarchisé de la dépense établi en 2014 par la direction générale des finances publiques, ni
des fiches jointes concernant spécifiquement la méthodologie du contrôle hiérarchisé de la
paye, qu’en contradiction avec cette analyse, les éléments de paye non expressément cités
dans le plan de CHD ne seraient pas soumis à un contrôle exhaustif ;
22.
Attendu qu’au surplus, ainsi que l’a relevé l’appelant, les termes, cités dans sa requête, du
guide pratique de mise en œuvre des CHD du 20
décembre 2017, élaboré et diffusé également
par la DGFiP, montrent que les intentions des auteurs du guid
e de 2014 n’étaient pas celles
que lui a prêtée la juridiction
; qu’il en ressort en effet, d’une part, que le plan de contrôle ne
peut qu’expressément prévoir que des éléments de la paye pourront n’être soumis à aucun
contrôle et, d’autre part, qu’en l’absence d’une telle mention, leur contrôle demeure exhaustif
;
23.
Attendu qu’en l’espèce, le volet relatif à la paye du plan de contrôle hiérarchisé de la
dépense applicable en 2015 à l’EHPAD «
Les Signolles » à Ajain, dénommé
« Calendrier de
contrôle de la paye »
, comportaient deux parties, se référant respectivement au
« référentiel
obligatoire »
et au
« référentiel indicatif »
du guide méthodologique de contrôle hiérarchisé de
la dépense
; qu’au titre du
« référentiel obligatoire »
, le plan prévoyait que le mandatement de
la paye et les nouveaux entrants feraient chaque mois l’objet d’un contrôle
a priori
; que les
contrôles prévus au titre du
« référentiel facultatif »
devaient être réalisés
a priori
, sur
échantillon
; qu’ils devaient être ciblés, en févr
ier et novembre, sur les variations de montants
de la paye de 5 % représentant au moins 200
€, en janvier et septembre, sur les coordonnées
bancaires des agents de l’établissement, en avril, sur l’indemnité d’administration et de
technicité (IAT) et, en octobre, sur les indemnités horaires pour travaux supplémentaires
(IHTS) ; que le document ne comportait pas de dispositions concernant les indemnités pour
travail intensif de nuit et les primes spécifiques versées aux agents de la maison de retraite,
dont le paiement restait donc subordonné à un contrôle exhaustif ;
24.
Attendu qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’infirmer les dispositions du jugement
entrepris relatives au respect des règles de contrôle sélectif des dépenses et de constater que,
pour les paiements irréguliers d’indemnités pour travail intensif de nuit et primes spécifiques
intervenus au bénéfice d’agents contractuels de l’EHPAD «
Les Signolles » à Ajain, objet des
charges n°
4 et 6, ces règles n’ont pas été respectées
;
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Par ces motifs,
DECIDE
:
Article 1
er
L’article 1
er du jugement de la chambre régionale des comptes Nouvelle-
Aquitaine n° 2020-0004 du 28 février 2020 est annulé.
Article 2
M. X
devra s’acquitter d’une somme de
265
€, au titre des charges
n° 1, 2, 3 et 5,
en
application
du
deuxième
alinéa
du
VI
de
l’article
60
de
la
loi
du
23 février 1963 susvisée
; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en vertu
du IX du même article .
Article 3
Les dispositions du jugement de la chambre régionale des comptes Nouvelle-
Aquitaine n° 2020-0004 du 28 février 2020
aux termes desquelles, s’agissant des débets
prononcés au titre des charges n° 4 et 6, les règles de contrôle sélectif des dépenses doivent
être considérées comme ayant été respectées par M. X, sont infirmées.
Article 4
Les paiements visés par les charges n° 4 et 6
n’entrai
ent pas dans une catégorie
de dépenses faisant l’objet de règles de contrôle sélectif.
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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents :
M.
Jean- Yves
BERTUCCI,
président
de
section,
président
de
la
formation,
Mme Sophie MOATI, présidente de chambre maintenue en activité, M. Yves ROLLAND,
conseiller maître et Mme Nathalie CASAS, conseillère maître.
En présence de Mme Michelle OLLIER, greffière de séance.
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de
la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par
Michelle OLLIER
Jean-Yves BERTUCCI
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt peut être
demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions
prévues au
I de l’article R. 142
-19 du même code.