Prélèvement sur recettes en
faveur de l’Union européenne
Note d’analyse
de l’exécution budgétaire
2020
2
COUR DES COMPTES
Prélèvement sur recettes en faveur de l’Union
européenne
Graphique n° 1 : le prélèvement sur recettes en faveur de l’Union
européenne en 2020 (en M
€
)
Source : direction du budget
20 000
20 500
21 000
21 500
22 000
22 500
23 000
23 500
24 000
LFI 2020
Exécution 2020
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
3
Synthèse
Le prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne (PSR-
UE) a atteint 23,7 Md
€
en 2020, soit 2,2 Md
€
de plus que la prévision en
LFI et 2,7 Md
€
de plus qu’en 2019. Il représente 9,5 % des recettes fiscales
nettes de l’État, soit deux points de plus qu’en 2019. En ajoutant les droits
de douane collectés par la France et reversés au budget de l’Union
européenne (UE), la contribution financière totale de la France à ce dernier
est de 25,3 Md
€
, niveau jamais connu dans le passé.
Après un accroissement modéré en 2018 et en 2019, l’exécution
2020 a été marquée par la situation sanitaire et économique exceptionnelle
et par son impact sur le budget de l’Union européenne.
L’exécution 2020 montre une fois de plus la difficulté de prendre en
compte, au stade de la prévision initiale, les aléas et contraintes qui
affectent le budget de l’UE. Celui-ci subit tout au long de l’année des
ajustements quasiment permanents qui ne peuvent être amortis que par un
ajustement symétrique des contributions fondées sur le revenu national brut
(RNB) supportées par les budgets des États membres. Le budget européen
a fait l’objet de dix budgets rectificatifs (dont neuf finalement adoptés) en
2020 qui ont modifié substantiellement les équilibres initiaux : d’une part,
pour ouvrir en urgence des crédits nécessaires afin de permettre à l’UE
d’apporter de premières réponses à la pandémie et venir en aide aux
économies européennes frappées de plein fouet ; d’autre part, pour
compenser les pertes de ressources propres et notamment de droits de
douane du fait de l’impact de la pandémie sur les flux commerciaux avec
les pays hors UE. Dans ce contexte, la hausse des paiements, phénomène
logique en fin de programmation financière, a joué un rôle secondaire dans
la gestion 2020.
Comme souvent, d’autres facteurs ont influé sur les recettes ou les
dépenses dans des sens parfois opposés mais qui se sont globalement
compensés : solde reporté de 2019 plus élevé que prévu, ce qui diminue les
appels de fonds adressés aux États membres, corrections sur exercices
antérieurs de la ressource RNB et de la ressource TVA, produit des
amendes supérieur aux prévisions, prise en compte en 2020 de
l’actualisation (à la baisse) des bases de contributions RNB, TVA, RPT et
de la correction britannique qui n’avait pu être intégrée en 2019 du fait de
la non adoption des deux derniers budgets rectificatifs de cet exercice.
4
COUR DES COMPTES
L’impact de la pandémie explique en fait la quasi-totalité de l’écart
de 2,2 Md
€
constaté entre la prévision initiale de PSR-UE et son exécution,
les autres facteurs se neutralisant globalement.
Alors que le PSR-UE avait diminué après le pic de 2013, dernière
année de la programmation financière pluriannuelle précédente, les années
2020 et 2021 marqueront une nette inflexion, mais à la hausse. Pour des
raisons structurelles, le PSR-UE va en effet s’accroître en moyenne de
8 Md
€
par an dans la nouvelle programmation 2021-2027
1
. Son poids par
rapport aux recettes fiscales nettes de l’État, qui se situait en moyenne à
6,9 % entre 2015 et la LFI 2020, a franchi en 2020 un premier palier et
devrait atteindre 10,5 % en 2021, soit une affectation supplémentaire de
recettes fiscales au profit du budget de l’UE de 3,6 points en une année qui
s’explique par l’augmentation du PSR-UE et la diminution des recettes
fiscales du fait de la crise.
Cette forte augmentation résulte principalement de deux facteurs :
d’une part, la sortie définitive du Royaume-Uni de l’UE qui fait passer la
quote-part de la France dans le financement du budget européen de 15,7 %
à 19 % ; d’autre part, la mise en
œ
uvre du nouveau cadre financier
pluriannuel (CFP) 2021-2027 qui implique un accroissement de dépenses
par rapport au CFP précédent (avec un plafond de dépenses relevé de 1,26
% à 1,46 % du RNB européen en engagements et de 1,20 % à 1,40 % en
paiements) et de nouvelles règles concernant les contributions nationales
des États membres. De plus, le niveau élevé du stock de restes à liquider
(RAL) sur les engagements du CFP 2014-2020 (303 Md
€
) engendrera pour
plusieurs années un besoin important de crédits de paiement (CP), ce qui
pèsera sur le PSR-UE.
Par ailleurs, le plan de relance européen, intitulé
Next Generation
EU
, a été adopté définitivement le 14 décembre 2020, en même temps que
le nouveau CFP. Ce plan est couvert par une capacité d’emprunt inédite à
hauteur de 750 Md
€
conférée à la Commission européenne, qui est
autorisée à intervenir au nom de l’Union sur les marchés de capitaux. Les
remboursements, lorsqu’ils interviendront, seront facilités par la création
de nouvelles ressources propres sur lesquelles la Commission est appelée
à faire des propositions en 2021. De plus, un relèvement temporaire des
plafonds de ressources propres de 0,6 point de RNB est institué pour
couvrir les engagements de l’Union résultant de ces emprunts. Le plan de
relance servira à financer des actions inscrites dans les politiques du CFP,
soit par des subventions, soit sous forme de prêts. Le total des moyens
financiers qui seront à la disposition de l’UE pour financer ses politiques
1
L’effort supplémentaire était initialement attendu à + 6 Md
€
par an (cf. NEB 2019).
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
5
dépasseront 1 800 Md
€
sur sept années, soit 1,84 % du produit intérieur
brut moyen
2
de l’UE à 27.
La nouvelle décision ressources propres (DRP) du 14 décembre 2020
prévoit pour ces emprunts d’un total de 750 Md
€
un mécanisme de partage
des risques engageant, selon l’exposé des motifs du projet de loi de
ratification
3
, l’ensemble des États membres à garantir en commun les
emprunts effectués par la Commission au nom de l’Union. Afin de garantir
que l’Union soit toujours en mesure de remplir ses obligations juridiques à
l’égard de tiers, des règles spéciales autorisent ainsi la Commission
européenne à appeler en dernier ressort les États membres à mettre
provisoirement à disposition des liquidités correspondantes. Les règles
prévues
4
se distinguent en cela du programme SURE
5
qui a été construit
avec l’octroi de garantie des États membres. La Cour recommande que la
nature et la portée financière de l’engagement pris par la France afin que
l’Union puisse remplir ses obligations de remboursement d’emprunts, ainsi
que son traitement budgétaire et comptable fassent l’objet d’une
clarification.
Par ailleurs, la crise née de la pandémie pourrait accroître
l’exposition du budget européen, et donc du PSR-UE, aux risques liés aux
nouveaux instruments financiers et notamment aux fonds de garantie qui
se développent depuis le CFP précédent. La mise en place de nouveaux
instruments, au travers notamment de nouveaux mandats confiés à la
Banque européenne d’investissement (BEI), et la probabilité d’une montée
des défauts de paiement sur ces instruments nécessiteront une meilleure
documentation du suivi des risques voire, le cas échéant, un relèvement des
2
Sur la base d’un PIB de l’UE-27 à 13 964 Md
€
en 2019 (source : Eurostat).
3
La loi n° 2021-127 du 8 février 2021 a autorisé l'approbation de la décision 2020/2053
du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système des ressources propres de l'Union
européenne.
4
Considérant 23 ; article 9-4.
5
En réaction à la crise, la Commission européenne a mis en place un dispositif de
réassurance chômage, appelé SURE (
Support to mitigate Unemployment Risks in an
Emergency
- Soutien pour atténuer les risques de chômage en cas d'urgence) afin
d’aider à financer le chômage partiel dans les États les plus touchés. Le mécanisme a
été activé pour la première fois le 22 septembre 2020, et les premières obligations
destinées à son financement ont été émises par la Commission européenne sur les
marchés financiers le 21 octobre 2020. D’un montant total de 17 Md
€
, ces obligations
ont permis à la Commission d’accorder des prêts à l’Italie, à l’Espagne et à la Pologne.
Le règlement (UE) 2020/672 du Conseil du 19 mai 2020 portant création d’un
instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en
situation d’urgence (SURE) engendrée par la propagation de la COVID-19 prévoit que
les États membres apportent des garanties irrévocables, inconditionnelles et à la
demande (article 11).
6
COUR DES COMPTES
taux de provisionnement, ce qui impliquerait des ressources budgétaires
supplémentaires.
Enfin, le règlement définitif de la sortie du Royaume-Uni ne remet
pas en cause le cadrage des relations financières entre ce dernier et l’UE à
partir de 2021 tel qu’il avait été arrêté en 2017. Le Royaume-Uni
continuera en particulier d’honorer ses engagements concernant les RAL
sur les engagements de la période 2014-2020, ce qui représente en 2021
une contribution de 6,9 Md
€
. Le PSR-UE ne devrait donc pas subir de
ressaut imprévu comme on pouvait le craindre si la sortie s’était faite sans
accord. Par ailleurs, la correction britannique est supprimée, ce qui allège
la contribution de la France d’environ 1,0 Md
€
par an selon la direction du
budget ; en revanche, le maintien de différentes corrections en faveur de
l’Allemagne, de l’Autriche, du Danemark, des Pays-Bas et de la Suède, et
le relèvement des frais de collecte des droits de douane de 20 à 25 %,
représente un coût supplémentaire non négligeable pour la France.
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
7
RECOMMANDATION
Recommandation
(
direction du budget ; direction générale du
Trésor
) : Clarifier la nature et la portée financière de
l’engagement pris par la France afin que l’Union puisse remplir
ses obligations de remboursement de l’emprunt destiné à faire
face aux conséquences de la crise de la COVID-19, ainsi que son
traitement budgétaire et comptable au regard de la loi organique
relative aux lois de finances
(recommandation nouvelle).
8
COUR DES COMPTES
Sommaire
1
L’exécution budgétaire du PSR-UE en 2020
...........................
10
1.1
Le budget de l’Union européenne et le système de ressources
propres
..................................................................................
10
1.2
La contribution de la France au budget de l’UE
...................
13
1.3
Les faits marquants de l’exécution 2020 du PSR-UE
..........
18
1.4
Une hausse imputable principalement à la crise sanitaire
....
22
1.5
Une nette inflexion avec la tendance de long terme
.............
25
2
Les points d’attention pour 2021 et l’impact des dispositifs
européens de sortie de crise
......................................................
27
2.1
L’évolution du PSR-UE : une programmation marquée par un
enjeu financier accru
............................................................
27
2.2
Le nouveau cadre financier pluriannuel 2021-2027 et le plan
de relance européen
..............................................................
29
2.3
Le risque lié au niveau des restes à liquider (RAL)
.............
36
2.4
Le règlement définitif du
Brexit
...........................................
38
2.5
L’impact encore mal connu de la montée en puissance des
instruments financiers
..........................................................
39
2.6
La réserve de la Commission sur le calcul par la France de
son RNB
...............................................................................
43
2.7
La qualité de la gestion du PSR-UE
.....................................
43
3
Les recommandations de la Cour
.............................................
44
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
9
Introduction
Le PSR-UE est composé d’une contribution de la France assise sur
son revenu national brut (contribution RNB), d’un prélèvement sur la TVA
de 0,30 % et de la correction britannique. Il ne s’agit pas d’une dépense
mais d’un prélèvement sur les recettes nettes du budget général ainsi que
l’autorise la LOLF
6
. Le PSR-UE ne figure plus dans la norme de dépense
pilotable depuis 2018.
Sa gestion incombe à la direction du budget qui assure la prévision
du montant à inscrire en loi de finances et donne l’ordre de versement en
réponse aux appels de fonds de la Commission européenne afin d’alimenter
ses crédits de paiement.
Le PSR-UE a représenté un montant moyen de 19,5 Md
€
entre 2007
et 2020 et de 20,0 Md
€
entre 2014 et 2020. Avec 23,7 Md
€
en 2020, le
PSR-UE dépasse désormais largement la moyenne des deux dernières
programmations financières pluriannuelles. Le PSR-UE est soumis à de
nombreux aléas exogènes qui se répercutent sur la contribution RNB des
États-membres. Les bases même du calcul de la contribution RNB sont
révisées chaque année. Contrairement à ce qui s’observait dans le passé à
la charnière de deux programmations financières pluriannuelles (en 2013-
2014 par exemple), le montant élevé de 2020 ne constitue pas un pic, mais
un palier.
La tendance à la hausse va en effet se poursuivre, la LFI 2021
prévoyant un montant de 27,2 Md
€
. Cette hausse structurelle, qui était
anticipée depuis l’an dernier mais pas avec une ampleur pareille, annonce
un relèvement durable du PSR-UE de 8 Md
€
en moyenne par an. Or, du
fait des nouvelles priorités, avec en particulier une régression nette en part
relative de la politique agricole commune (PAC), les retours financiers en
faveur de la France ne progresseront pas autant, de sorte que son solde
comptable passera de - 0,32 % à - 0,43 % de son RNB. La France devrait
par ailleurs recevoir au total 45,8 Md
€
au titre du plan de relance, soit 6,1
% des 750 Md
€
mobilisés par l’UE avec son instrument
Next Generation
EU
; sur cette enveloppe, 40 Md
€
provenant de la facilité pour la reprise et
la résilience (FRR) contribuera au financement de 40 % du plan de relance
national.
6
Le budget de l’UE est également financé par des « ressources propres traditionnelles
(RPT), constituées de droits de douane et assimilés (recouvrés en France par la
Direction générale des douanes et des droits indirects – DGDDI). Les montants ainsi
recouvrés pour le compte de l’UE sont directement versés au budget européen, après
un prélèvement correspondant, en théorie, aux frais de perception.
10
COUR DES COMPTES
1
L’exécution budgétaire du PSR-UE en
2020
L’analyse de l’exécution du PSR-UE en 2020 est présentée ici dans
une perspective de long terme pour mieux en comprendre les principales
évolutions. Il est apparu nécessaire, pour faciliter la lecture, de rappeler les
principes qui régissent la contribution de la France au budget de l’Union
européenne.
1.1
Le budget de l’Union européenne et le système
de ressources propres
Le budget de l’UE, son élaboration et son exécution s’inscrivent
dans un cadre financier pluriannuel (CFP) conformément à l’article 312 du
Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), le CFP actuel
ayant été approuvé par le règlement (UE, Euratom) n° 131/2013 du Conseil
du 2 décembre 2013 et par l’accord interinstitutionnel du 2 décembre 2013
entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission. Le CFP fixe les
montants des plafonds annuels des crédits d’engagement (CE) par rubrique
de dépenses et du plafond annuel des crédits de paiement (CP)
7
.
La décision relative au système des ressources propres de l’UE, dite
« DRP », relève uniquement de la compétence du Conseil (article 311 du
TFUE). La DRP actuelle, valable à compter du 1
er
janvier 2014, a été
approuvée le 26 mai 2014 et est entrée en vigueur rétroactivement le 1
er
octobre 2016.
1.1.1 Le cadre financier pluriannuel 2014-2020
L’accord final des chefs d’État et de gouvernement de 2013 prévoit
un plafond en CE de 960 Md
€
(en
€
2011) sur sept ans, soit 1 083 Md
€
en
€
courants, et un plafond en CP de 908 Md
€
2011
sur sept ans, soit
1 024 Md
€
en
€
courants. Le total des CE représente 1,00% du revenu
national brut (RNB) de l’UE. Le plafond des ressources propres a été fixé
à 1,23% du RNB pour la période 2014-2020.
7
Les crédits d’engagement (CE) correspondent aux autorisations d’engagement dans la
nomenclature française, et les crédits de paiement (CP) aux crédits de paiement en droit
budgétaire français
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
11
Le budget de l’UE est composé de six rubriques qui correspondent
aux grands domaines d’intervention de l’Union. La révision à mi-parcours
intervenue en 2017 a conduit à majorer globalement les CE de 3,5 Md
€
.
Graphique n° 2 : la structure du CFP 2014-2020
En CE – CFP 2014-2020 tel qu’adopté dans le règlement du 2 décembre 2013
1.1.2 Le système des ressources propres
Le système de ressources propres de l’Union européenne comprend
quatre types de ressources :
-
les ressources propres traditionnelles (RPT), constituées des droits
de douane pour lesquelles les administrations nationales agissent
en simples intermédiaires en assurant la perception des
ressources ;
-
la ressource fondée sur la TVA, calculée par l’application d’un
taux d’appel uniforme – sauf dérogation – de 0,30% à une assiette
harmonisée pour l’ensemble des États membres ;
-
la ressource fiscale fondée sur le Revenu national brut (RNB),
versée par les États membres au prorata de leur part dans le RNB
total de l’UE. Elle constitue la ressource d’équilibre, s’ajustant au
niveau requis pour maintenir l’équilibre du budget de l’UE. Son
sous-rubrique 1a :
compétitivité pour la
croissance et pour l'emploi
13%
sous-rubrique 1b : cohésion
économique, sociale et
territoriale
34%
Rubrique 2 : croissance
durable, ressources
naturelles (PAC)
39%
Rubrique 3 :
sécurité et
citoyenneté
2%
Rubrique 4 : L'Europe dans le monde
6%
Rubrique 5 : Administration
6%
12
COUR DES COMPTES
niveau varie donc chaque année non seulement en fonction des
besoins de couverture des paiements, mais aussi en fonction de
l’évolution des autres ressources. Elle est la principale ressource
de l’UE et par conséquent la principale composante de la
contribution française ;
-
les recettes diverses (solde reportable de l’exercice antérieur,
produit des amendes, contributions et remboursements des États,
etc.).
La ressource RNB représente plus de 71 % des ressources
budgétaires de l’UE, la ressource TVA et la RPT étant pratiquement à
égalité à un peu plus de 10 %.
Graphique n° 3 : structure des ressources de l’UE en 2020
Source : Commission européenne – Revenue table 2020 –
1
er
décembre 2020
Des mécanismes dérogatoires de compensation sont accordés à
certains États dont la contribution a été considérée comme excessive au
71,5%
10,2%
10,2%
4,7%
2,1%
0,4%
0,9%
Ressource RNB
Ressource TVA
Ressource propre traditionnelle
Contributions et remboursements
Reports
Amendes et intérêts de retard
Divers
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
13
regard de leur prospérité relative, conformément aux conclusions du
Conseil européen de Fontainebleau de juin 1984. Ces mécanismes sont
neutres globalement, mais modifient la répartition des contributions entre
les États membres.
Dans le cadre de la décision ressources propres (DRP) 2014-2020
du 26 mai 2014, les pays bénéficiaires de tels mécanismes sont le
Royaume-Uni, le Danemark, les Pays-Bas, la Suède, l’Allemagne,
l’Autriche. Ces quatre derniers États membres ont obtenu au Conseil
européen de Berlin (mars 1999) un « rabais » qui les conduit à ne
contribuer qu’à hauteur d’un quart du montant normal de la compensation
britannique ; ce sont les autres États membres, et au premier rang la France,
qui compensent ce deuxième rabais au prorata de la part de leur RNB dans
l’UE. Comme les années précédentes, mais pour la dernière fois, la France
est la première contributrice au rabais britannique dont elle paie 30 % soit
une contribution de 1,55 Md
€
en 2020 contre 1,29 Md
€
en 2019 et une
moyenne d’1,3 Md
€
entre 2010 et 2020). Ce niveau élevé de contribution
de la France s’explique par l’existence d’autres compensations dont
bénéficient certains États membres (les « rabais sur le rabais ») :
-
la réduction forfaitaire des versements annuels RNB des Pays-Bas
et de la Suède pour respectivement 605 et 150 M
€
, ainsi que de
ceux du Danemark (130 M
€
) et de l’Autriche (pour une durée de
trois ans seulement) ;
-
les taux d’appel réduits de TVA, en dérogation au taux normal de
0,30% (taux réduit à 0,15% pour l’Allemagne, les Pays-Bas et la
Suède) ;
-
le taux de retenue des ressources propres traditionnelles au titre
des frais de perception des droits de douane, qui a été réduit de
25 à 20% dans la DRP 2014-2020.
1.2
La contribution de la France au budget de
l’UE
La contribution totale de la France au budget de l’UE s’est élevé à
25,3 Md
€
en 2020, montant jamais atteint. Elle devrait être de 28,8 Md
€
en 2021 selon la loi de finances initiale (graphique n° 4).
14
COUR DES COMPTES
Graphique n° 4 : la contribution de la France au budget de l’UE de
2009 à 2021 (en M
€
)
Source : annexe au PLF 2021, LFI 2021 et direction du budget – budgets exécutés de 2009 à 2020
La contribution française provient essentiellement du PSR-UE qui
en constitue plus de 90 % (93 % en 2020). La ressource propre
traditionnelle (RPT), dont la part est montée jusqu’à 10 % en 2017 du fait
de l’ajustement à la baisse de la ressource RNB, véritable variable
d’équilibre budgétaire, est retombée à 7 % en 2020 et même 6 % en 2021.
Il faut rappeler que si la France contribue globalement (et avant prise en
compte des retours financiers) à hauteur de 15,7 % au budget européen en
2019, ce qui la place en deuxième position après l’Allemagne, sa part dans
le total de la RPT à l’échelle européenne n’est que de 8,3 %, derrière
l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Belgique et l’Italie. Cette
situation, qui s’explique probablement par une moindre ouverture
internationale et surtout par la place relative des ports français par rapport
aux grands ports européens de la Mer du Nord et de l’Italie, a pour
corollaire, d’une part, un niveau moindre de conservation de frais de
collecte sur les droits de douane et, d’autre part, une contribution plus
lourde financée par le contribuable national.
Depuis 2010, la RPT n’est plus intégrée dans le périmètre du PSR-
UE, suite à une recommandation de la Cour des comptes ; l’ensemble des
ressources propres mises à la disposition du budget de l’UE par la France
reste néanmoins présenté de manière exhaustive dans le jaune « Relations
financières avec l’Union européenne ». Le montant des droits de douane
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
30 000
35 000
2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
(LFI)
ressource propre traditionnelle (montant net)
PSR-UE
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
15
collectés et reversés par la France, qui avait globalement progressé
jusqu’en 2019, a enregistré une baisse sensible en 2020 (graphique n° 5).
Graphique n° 5 : montants de droits de douane collectés et reversés
par la France au budget de l’UE (en M
€
)
Source : annexe au PLF 2021 « Les relations financières entre la France et l’Union
européenne » ; direction du budget pour 2021 (pour 2021, les frais d’assiette et de perception ont
été calculés au nouveau taux de 25 %)
Les montants bruts collectés par les douanes françaises de novembre
2019 à octobre 2020 sont de 2 067 M
€
, en recul de près de 7 % par rapport
à 2019, la Commission européenne ayant inscrit dans le budget rectificatif
(BR) n° 7 adopté en octobre 2020 un montant inférieur (1 824 M
€
). Les
frais d’assiette et de perception conservés par la France sont de 413 M
€
(444 M
€
en 2019) ; les montants nets reversés au budget de l’UE de janvier
à décembre 2020 (hors mises à disposition tardive) sont de 1 654 M
€
, soit
un chiffre légèrement supérieur à la prévision du BR n° 7 (1 493 M
€
).
Le recul sensible des droits de douane en 2020 est imputable à la
diminution des importations de marchandises en provenance d’États non
européens du fait de la pandémie. Pour 2021, la prévision inscrite en LFI
anticipe une légère baisse (-3,9%) à 1 592 M
€
.
La différence entre ce qu’un État membre verse au budget européen
au titre des ressources propres et ce qu’il reçoit de ce dernier grâce aux
dépenses effectuées sur son territoire détermine le solde net. Trois
0
500
1 000
1 500
2 000
2 500
Montants bruts
Frais d'assiette et de perception (20 %)
Montants nets
16
COUR DES COMPTES
méthodes sont utilisées pour ce calcul, la méthode dite de la Commission
étant celle retenue dans la programmation 2014-2020
8
.
En 2019, la France était contributrice nette selon la méthode de la
Commission à hauteur de 6,8 Md
€
en volume, soit 0,27 % de son RNB.
Elle est troisième contributrice nette derrière l’Allemagne (-14,3 Md
€
) et
le Royaume-Uni (- 7,7 Md
€
)
9
, situation qui changera avec la sortie de ce
dernier de l’UE.
Institué en 1973, le PSR-UE a reçu une consécration juridique avec
les dispositions de l’article 6 de la LOLF
10
. Sa décomposition se présente
ainsi :
Tableau n° 1 : décomposition du PSR-UE – en %
2020
rappel 2019
Ressource TVA
13,7
16,0
Correction britannique
6,6
6,2
Ressource RNB
79,7
77,9
Autres
0,0
0,0
Total
100,0
100,0
Source : direction du budget – exécution 2018
En 2020, la part de la ressource RNB a continué de s’accroître et
s’approche de 80 % du total du PSR-UE.
Plusieurs
autres
États
membres
retracent
également
leurs
contributions au budget de l’UE dans un prélèvement sur recettes au lieu
de les considérer comme une dépense. La question du maintien d’un
prélèvement sur recettes a été posée par la Cour des comptes. Dans un
relevé d’observations définitives de 2020, elle a suggéré d’intégrer le
versement au budget de l’UE dans un nouveau programme (à créer) au sein
de la mission existante
Engagements financiers
, ou dans une nouvelle
mission budgétaire mono-programme (sous réserve toutefois d’une
8
Cette méthode consiste à faire la différence entre la contribution nette hors RPT
(celles-ci étant considérées comme des recettes de l’Union) et les dépenses réparties
pour chaque État membre, mais en excluant les dépenses administratives, ce qui a pour
effet de rendre contributeurs nets le Luxembourg et la Belgique, qui bénéficient
fortement de l’implantation des institutions européennes sur leur territoire
9
En 2016, la France était deuxième contributrice nette en 2016, derrière l’Allemagne
10
«
Un montant de recettes de l’État peut être rétrocédé directement au profit des
Communautés européennes
»
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
17
modification de la LOLF qui ne prévoit pas les missions mono-
programmes) ; dans les deux hypothèses, il s’agirait de crédits évaluatifs,
pour préserver une certaine souplesse dans les aléas de gestion
11
.
Sur longue période, l’exercice 2020 s’inscrit dans une tendance à la
hausse des dépenses qui s’observe généralement à chaque fin de
programmation financière pluriannuelle. Mais l’accélération des paiements
est loin d’expliquer le ressaut sensible observé qui est en fait lié
principalement à la conjoncture exceptionnelle de l’année engendrant des
dépenses d’urgence et des pertes de recettes. Il en résulte un niveau encore
jamais atteint par le PSR-UE (23,7 Md
€
contre 22,5 Md
€
en 2013, dernière
année de la programmation 2007-2013)
12
. Si la ressource TVA et la
correction britannique suivent une évolution plutôt régulière, la ressource
RNB s’ajuste à la hausse ou à la baisse en fonction du montant de
contribution appelé par l’UE.
Graphique n° 6 : le PSR-UE (exécution) de 2008 à 2020 (en M
€
)
Périmètre PSR-UE = périmètre de 2010 (excluant la ressource propre traditionnelle) –
source : jaune budgétaire Relations financières avec l’UE (PLF 2021) et direction du budget
11
Les prélèvements sur recettes, un mécanisme à reconsidérer
, relevé d’observations
définitives, 1
ère
chambre, avril 2020. Recommandation n° 2. Cf. également le rapport
public thématique précité
Les finances publiques : pour une réforme du cadre
organique et de la gouvernance
.
12
Toutefois, le PSR-UE 2020 représente 16,8 % du montant total de PSR-UE des
années 2014 à 2020, contre 17,3 % pour le PSR-UE 2013 comparé au montant total de
PSR-UE des années 2007 à 2013.
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
ressource TVA
correction britannique
ressource RNB
autres
18
COUR DES COMPTES
De 2015 à la LFI 2020, le PSR-UE représente en moyenne 6,9 %
des recettes fiscales nettes de l’État. Avec la quatrième LFR de 2020, ce
ratio passe à 9,5 % et devrait atteindre 10,5 % en 2021. En une année, du
fait de la conjonction de la crise économique et de la nouvelle
programmation financière pluriannuelle 2021-2027, le budget général de
l’État aura affecté 3,6 points de recettes fiscales nettes supplémentaires au
profit du budget européen.
Tableau n° 2 : part des recettes fiscales nettes de l’État transférée au
budget européen via le PSR-UE – en %
Source : lois de règlement 2015 à 2019, LFI 2020, PSR-UE exécuté 2020, recettes fiscales nettes
inscrites en LFR 2020, pour 2021, données du PLF 2021
Il faut rappeler que le PSR-UE ne fait plus partie de la norme de
dépense pilotable depuis 2018
13
.
1.3
Les faits marquants de l’exécution 2020 du
PSR-UE
1.3.1 Une prévision initiale bouleversée dès le printemps
Après des exercices 2015, 2016 et 2017 en retrait sensible par
rapport aux prévisions initiales, le PSR-UE est reparti à la hausse en 2018
et en 2019, ce retournement étant conforme à ce qui s’observe
13
Suite à une recommandation de la Cour.
0,0%
2,0%
4,0%
6,0%
8,0%
10,0%
12,0%
2015
2016
2017
2018
2019
2020
(LFI)
2020
(LFR4)
2021
(LFI)
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
19
habituellement à la fin de chaque cadre financier pluriannuel (CFP).
Toutefois, l’exécution 2019 (21,0 Md
€
) s’était révélée inférieure à la
prévision initiale (21,5 Md
€
).
La gestion 2020 a été profondément affectée par les conséquences
du déclenchement de la pandémie de Covid-19. Si la LFI prévoyait une
hausse modérée du PSR-UE en 2020 (21,5 Md
€
) par rapport à la gestion
2019, les nombreux budgets rectificatifs (BR) ont conduit à en ajuster le
montant tout au long de l’année au fil des lois de finances rectificatives.
La prévision initiale reposait sur les hypothèses suivantes :
-
un solde du budget européen 2019 reportable sur 2020 d’1 Md
€
;
-
aucune provision au titre des corrections sur exercices antérieurs
ou de l’actualisation attendue des bases du comité consultatif des
ressources propres (CCRP) ;
-
une provision de 25 M
€
au titre des «
opt-out
» britanniques,
danois et irlandais ;
-
une provision pour tenir compte des nouvelles bases CCRP
validées en mai 2019 qui n’avaient pu être actualisées dans le
budget 2019, entraînant un impact sur le PSR-UE de + 151 M
€
.
Dès le printemps, la deuxième loi de finances rectificative (LFR 2)
a conduit à réévaluer le PSR-UE de 1 944 M
€
pour le porter à 23 424 M
€
.
Cette forte réévaluation faisait suite à l’adoption des BR 1 et 2 prenant acte
des premiers impacts de la pandémie en anticipant une diminution des
droits de douane et une mobilisation exceptionnelle de dépenses d’urgence
(premières mesures dès le 27 mars, puis
Emergency support instrument
(
ESI)
doté de 3 Md
€
en AE et 1,5 Md
€
en CP). À l’inverse, le report du
budget 2019 s’est révélé plus élevé que prévu (3 Md
€
au lieu d’une
prévision d’1 Md
€
par la direction du budget)
14
.
Au total, le budget de l’UE a fait l’objet de dix projets de budgets
rectificatifs sur l’année 2020, dont neuf finalement adoptés. Si l’impact le
plus significatif sur les dépenses résulte du budget rectificatif n° 2 approuvé
en avril, les autres BR adoptés postérieurement à la LFR 2 ont également
affecté le montant du PSR-UE dans des proportions non négligeables :
-
le BR n° 6 révisant les prévisions de paiements de la politique de
cohésion (+ 5,1 Md
€
contre + 8,5 Md
€
provisionnés) et de
l’instrument d’aide d’urgence (vaccins : + 1,1 Md
€
). Une fois
prises en compte les provisions déjà intégrées en LFR 2, l’impact
14
Entraînant mécaniquement une réduction du PSR-UE de 165 M
€
.
20
COUR DES COMPTES
total de ce BR sur le PSR-UE est de – 345 M
€
par rapport à la LFR
2 ;
-
le BR n° 7 actualisant les ressources de l’UE (bases TVA, RNB,
RPT) à la suite du CCRP de mai 2020. L’impact de ces révisions
sur
le
PSR-UE
(+ 720 M
€
au total sur l’année en prenant en compte la provision
de 151 M
€
inscrite en LFI et celle de 288 M
€
inscrite en LFR 2)
provient principalement de la révision à la baisse de 16,5 % des
prévisions de ressources propres traditionnelles (RPT) pour 2020
du fait de la diminution des importations de marchandises suite à
la pandémie. S’y ajoutent des éléments non anticipés relatifs à la
correction dont bénéficie le Royaume-Uni, aux amendes et à
l’impact des taux de change des États hors zone euro ;
-
le BR n° 8 renforçant les moyens du fonds de solidarité de l’Union
européenne (FSUE) à hauteur de 820 M
€
(suite à un premier
relèvement de 272 M
€
en BR n° 4 en réponse à des catastrophes
naturelles au printemps) pour venir en aide à la Croatie touchée
par un tremblement de terre.
-
le BR n° 9 révisant à la hausse les prévisions de paiements des
politiques
de
développement
rural
et
d’asile/immigration/intégration (+1 569 M
€
au niveau UE). S’y
ajoutent des éléments non anticipés relatifs aux amendes et à
l’impact des taux de change des États hors zone euro (- 588 M
€
en
recettes totales au niveau UE). L’impact total cumulé de ce BR est
de + 322 M
€
sur le PSR-UE 2020.
1.3.2 Une exécution en forte hausse par rapport à la LFI
Attendu à 21,5 Md
€
en LFI puis à 23,4 Md
€
en LFR 2, le PSR-UE
est légèrement redescendu à 23,35 Md
€
dans la prévision indiquée au début
de l’automne lors de la présentation du PLF 2021, puis est remonté à 23,7
Md
€
en fin d’exercice (prévision affichée dans la LFR 4).
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
21
Graphique n° 7 : le PSR-UE 2020 : de la LFI à l’exécution (en M
€
)
Source : direction du budget
L’écart de + 2,2 Md
€
entre l’exécution et la prévision correspond à
un relèvement de la ressource RNB de plus de 2,3 Md
€
, alors que la
ressource TVA est légèrement moins élevée que prévu (- 126 M
€
et même
– 184 M
€
hors correction britannique). La ressource RNB a joué son rôle
de variable d’ajustement, et a donc absorbé la totalité de la hausse du PSR-
UE.
Graphique n° 8 : les composantes du PSR-UE en 2020 (en M
€
)
Source : direction du budget
20 000
20 500
21 000
21 500
22 000
22 500
23 000
23 500
24 000
LFI 2020
LFR 2
prévision
d'exécution (PLF
2021)
Exécution 2020
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
Ressource
TVA
dont
correction
britannique
Ressource
RNB
autres
Total
LFI 2020
exécution 2020
22
COUR DES COMPTES
1.4
Une hausse imputable principalement à la crise
sanitaire
Cette hausse inédite du PSR-UE en cours d’exécution, imprévisible
du fait des circonstances exceptionnelles, s’explique principalement par les
effets de la pandémie sur les recettes fiscales (RPT et TVA) et par les
décisions européennes visant à mobiliser en urgence des moyens
exceptionnels. L’impact de l’accélération des décaissements au titre des
politiques de l’UE, habituelle en fin de programmation pluriannuelle, a
finalement joué un rôle secondaire. Le graphique n° 9 suivant met en
évidence les différents facteurs à la hausse ou à la baisse intervenus tout au
long de l’année.
Comme chaque année, différents facteurs ont eu des impacts en sens
opposé et se sont en grande partie neutralisés. Par exemple, la variation à
la hausse résultant des corrections sur exercices antérieurs a été
globalement équilibrée par la variation à la baisse résultant d’un niveau de
report budgétaire supérieur aux prévisions. La correction sur exercices
antérieurs notifiée en janvier 2020 pour un montant total de 297 M
€
15
correspond à une meilleure performance économique de la France par
rapport aux prévisions pour l’exercice 2018 ainsi qu’à des corrections
opérées par l’INSEE sur les exercices 2010-2018
16
. En ce qui concerne le
report plus élevé que prévu, un premier ajustement a été effectué en LFR
II (-299 M
€
), complété par un ajustement de - 33 M
€
en PLF 2021 une fois
connu le montant définitif, soit un effet total sur le PSR-UE 2020 de – 332
M
€
. À l’inverse, la prise en compte de l’impact des variations de taux de
change, comptabilisé au sein du chapitre 3 de l’UE et intégré à ce titre dans
le calcul du solde n-1, a conduit à un ressaut de ressource RNB de
+ 1 116,6 M
€
au niveau européen, soit un impact sur le PSR-UE de
+ 167 M
€
. La contraction de l’impact de - 332 M
€
et de celui de + 167 M
€
aboutit à un effet report 2019 sur le PSR-UE de 2020 de - 165 M
€
comme
l’indique le graphique n° 9.
15
Impact cumulé des corrections RNB (+186 M
€
) et TVA (+112 M
€
).
16
Ces corrections ont été faites au titre :
- de Mayotte (pour les exercices 2010-2013 seulement) ;
- du nouveau calcul des services d’intermédiation financière indirectement mesurés
(SIFIM) ;
- des loyers imputés.
Elles sont disponibles en ligne en suivant le lien :
des révisions ainsi que résumé du tableau envoyé à Eurostat numéroté 1.116, en bas de
la page dans la rubrique « pour en savoir plus ».
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
23
En fait, comme l’illustre le graphique, trois facteurs principaux, liés
à la conjoncture exceptionnelle de 2020, ont joué dans des proportions
variables mais significatives.
Graphique n° 9 : les facteurs ayant influé sur la gestion 2020 – en
M
€
Source : direction du budget
La composante TVA du PSR-UE a connu une diminution de 184
M
€
, mais cette baisse s’est traduite mécaniquement par un rééquilibrage de
la composante RNB d’un montant légèrement supérieur (239 M
€
). L’effet
net sur le PSR-UE est donc globalement neutre. Par contre, la perte
importante de recettes provenant des droits de douane (les RPT) a entraîné
un besoin supplémentaire de ressource RNB, donc de PSR-UE, de 545 M
€
.
À l’effet conjoncturel s’ajoute la prise en compte en année pleine de
l’actualisation des bases RPT qui avait été décidée en 2019 mais n’avait pu
être prise en compte en gestion 2019 du fait de la non adoption du budget
24
COUR DES COMPTES
rectificatif n° 4, ce qui représente un impact de + 114 M
€
17
. L’impact de la
baisse de RPT proprement lié à la crise sanitaire peut donc être estimé à
+431 M
€
. Ce n’est pas la première fois qu’une variation importante de la
RPT provoque un effet sensible sur le PSR-UE. En 2018, la décision du
CCRP de revoir la méthode de prévision de la RPT avait conduit à
réévaluer le PSR-UE en cours d’année de 466 M
€
. Il faut rappeler par
ailleurs que la Cour des comptes européenne relève tous les ans des
anomalies dans la gestion du recouvrement et du contrôle des droits de
douane par certains États membres
18
. Même si la perte de recettes en 2020
provient avant tout de la baisse inopinée et momentanée du volume de
marchandises entrant sur le territoire de l’Union, il n’en demeure pas moins
que le risque que font peser des évolutions non anticipées de la RPT sur le
PSR-UE mériterait d’être davantage explicité et documenté.
Le premier facteur d’accroissement du PSR-UE en 2020 est en
définitive le règlement de dépenses non prévues dans le budget initial de
l’Union européenne. En ce qui concerne les dépenses engagées au titre des
différentes politiques du CFP, l’année 2020 n’est pourtant pas marquée par
une accélération des paiements comme on aurait pu s’y attendre s’agissant
de la dernière année de la programmation pluriannuelle. Si l’accélération
est réelle pour les dépenses de la politique de développement rural et des
politiques d’asile/immigration/intégration
19
, elle a en revanche été moins
forte que prévu pour la politique de cohésion, bien que celle-ci ait vu
s’accumuler les retards de paiements depuis plusieurs années
20
. En fait,
l’accroissement des dépenses correspond principalement à des dépenses
réellement nouvelles inscrites dans les budgets rectificatifs et destinées à
apporter un soutien financier d’urgence à l’activité économique des États
membres au travers des dispositifs CRII et CRII+
21
. L’effet de ces derniers
sur le PSR-UE s’élève à 760 M
€
. Il convient aussi de noter le renforcement
du fonds de solidarité de l’Union européenne pour apporter des secours
d’urgence à des États européens ayant subi des catastrophes naturelles
17
Même si, formellement, cet impact ne s’était pas encore traduit dans les appels de
fonds de l’UE, il était néanmoins connu et certain au moment de la LFI 2020, et aurait
pu être pris en compte dans la prévision de PSR-UE.
18
Pour la Cour des comptes européenne, « les contrôles effectués par les États membres
pour réduire le manque à gagner sur les droits de douane présentent des faiblesses
importantes nécessitant l'intervention de l'UE », cf. rapport annuel sur l’exécution du
budget de l’UE en 2019, p. 106.
19
+ 1 569 M
€
au niveau européen par rapport au budget initial.
20
+ 5,1 Md
€
contre une prévision initiale de + 8,5 Md
€
.
21
Coronavirus response investiment initiative
(CRII) et
Coronavirus response
investment initiative plus
(CRII+). Ces initiatives permettent aux États membres de
soutenir des investissements urgents en faveur notamment des systèmes de santé, du
marché du travail et des secteurs économiques jugés vulnérables.
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
25
(impact de 142 M
€
sur la PSR-UE), et, d’autre, part, la contribution à
l’instrument de financement des vaccins (accroissement de la provision de
1 090 M
€
au niveau européen, soit + 290 M
€
pour la France).
Au total, les facteurs directement liés à la crise sanitaire (dépenses
exceptionnelles votés au printemps, diminution de RPT et de la ressource
TVA, réévaluation de la provision pour les vaccins) expliquent l’essentiel
de l’écart entre la prévision de PSR-UE et son exécution (2,2 Md
€
), les
autres facteurs se neutralisant.
1.5
Une nette inflexion avec la tendance de long
terme
Pour des raisons totalement imprévisibles, l’exercice 2020 amplifie
le retournement de tendance du PSR-UE engagé en 2018 et se traduit par
une forte sur-exécution comparable dans son ampleur à celle observée en
2013, dernière année du CFP 2007-2013. Malgré cette similitude
apparente, la dernière année du CFP 2014-2020 n’a rien à voir et n’annonce
pas en particulier de retournement à la baisse pour les exercices à venir, au
contraire.
Graphique n° 10 : le PSR-UE prévu et exécuté de 2007 à 2020 (en
Md
€
)
Source : direction du budget
14,0
16,0
18,0
20,0
22,0
24,0
26,0
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
LFI
sur-exécution
sous-exécution
26
COUR DES COMPTES
À la différence de l’exercice 2019 où le PSR-UE en exécution avait
contribué à l’amélioration de l’équilibre final du budget général,
l’exécution du PSR-UE en 2020 a contribué à la dégradation du solde du
budget général, comme le montre le graphique n°11.
Graphique n° 11 : écart entre la loi de finances initiale et l’exécution
(en M
€
)
Source : Cour des comptes, rapports annuels sur le budget de l'État et direction du budget (pour 2020, le
montant correspond, pour le budget général, à la différence entre le solde de la LFI et celui de la LFR 4)
Si l’alourdissement du PSR-UE en cours d’exécution a atteint un
montant jamais atteint même en 2013, sa responsabilité dans la forte
dégradation du déficit du budget général est à relativiser compte tenu du
contexte exceptionnel de 2020 : le PSR-UE est responsable de seulement
1,7 % de la dégradation du solde budgétaire, contre 16 % en 2013.
Toutefois, comparée à la seule perte de recettes fiscales nettes (- 44 Md
€
entre la LFI et la LFR 4), il apparaît que cette dernière a été « aggravée »
par un prélèvement supplémentaire au profit du budget de l’UE à hauteur
de 5%.
- 140,0
- 120,0
- 100,0
- 80,0
- 60,0
- 40,0
- 20,0
0,0
20,0
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
solde général du budget de l'Etat
dont PSR-UE
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
27
2
Les points d’attention pour 2021 et
l’impact des dispositifs européens de sortie
de crise
Cette deuxième partie recense les points d’attention (c’est-à-dire les
risques potentiels) identifiés au cours de l’instruction et analyse les
conséquences pour le PSR-UE des dispositifs mis en
œ
uvre pour lutter
contre les effets de la crise. Il s’agira avant tout d’analyser les mesures
prises au niveau européen avec le plan de relance approuvé définitivement
lors du Conseil européen du 14 décembre 2020.
Il est utile au préalable de rappeler comment évolue la trajectoire de
long terme du PSR-UE.
2.1
L’évolution du PSR-UE : une programmation
marquée par un enjeu financier accru
Appréciée sur une longue période (graphique n° 12), l’exécution du
PSR-UE en 2020 indique une inflexion majeure par rapport au profil des
deux derniers CFP. Elle se situe en effet à un niveau nettement supérieur à
la moyenne des années 2007 à 2020 (19,5 Md
€
) et à celle très proche des
années 2014 à 2020 (20,0 Md
€
). Loin d’être un point haut avant une décrue
vers un point bas de 16-17 Md
€
comme cela fut constaté ensuite pour
chacun des deux CFP écoulés, le fort ressaut de 2020 annonce une période
nouvelle où le PSR-UE s’installera durablement à des niveaux jamais
atteints dans le passé, au-delà des 26-28 Md
€
par an.
28
COUR DES COMPTES
Graphique n° 12 : le PSR-UE de 2007 à 2021 (en Md
€
)
Source : direction du budget ; PSR UE exécutés sauf 2021 LFI
Cette situation est d’abord le résultat de la sortie du Royaume-Uni
de l’UE qui a eu pour conséquence mécanique pour la France de faire
passer sa quote-part dans le financement du budget européen de 16 à 19 %.
Elle est également la traduction du nouveau CFP 2021-2027 dont
l’accroissement par rapport au CFP précédent pèse directement sur les
budgets nationaux en attendant la mise en place éventuelle de nouvelles
ressources propres qui, après l’introduction de la ressource fondée sur les
déchets d’emballages en plastique non recyclés
22
, feront l’objet de
proposition de la Commission en 2021. Les développements qui suivent
présentent les grandes lignes du nouveau CFP et leur implication pour le
niveau de PSR-UE à attendre dans les prochains exercices. Ils pointent
également les risques persistants pesant sur la gestion du budget européen
– et donc sur le niveau du PSR-UE – en 2021 et au cours des exercices
suivants.
22
Cf. 2.2.2.
0,0
5,0
10,0
15,0
20,0
25,0
30,0
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
29
2.2
Le nouveau cadre financier pluriannuel 2021-
2027 et le plan de relance européen
À la suite de l’approbation du Parlement européen, le Conseil a
adopté, le 17 décembre 2020, le règlement fixant le cadre financier
pluriannuel (CFP) de l’UE pour la période 2021-2027.
2.2.1 Les grandes lignes du budget de l’UE
Ce règlement établit le budget à long terme à 1 074,3 Md
€
(en
€
2018, 1 210 Md
€
en
€
courants) pour l’UE à 27, y compris l’intégration du
Fonds européen de développement (FED), contre 960 Md
€
(en
€
2011) et
1 083 Md
€
(en
€
2018) pour le CFP 2014-2020. Conjugué à l’instrument
de relance
Next Generation EU
doté de 750 Md
€
, ce budget permettra à
l’UE d’accorder des financements pour un total plus de 1 800 Md
€
23
. La
plupart des programmes de financement sectoriels devraient être adoptés
au début de 2021 et s’appliqueront rétroactivement à partir du début de
2021. Pour la mise en
œ
uvre de
Next Generation EU
, la décision relative
aux ressources propres de l’UE devra être approuvée dans tous les États
membres conformément à leurs règles constitutionnelles.
Le prochain budget à long terme couvrira sept domaines de
dépenses. Il servira de cadre pour le financement de près de 40 programmes
de dépenses de l'UE au cours de la prochaine période de sept ans.
2014-2020
répartition
2021-2027
répartition
Compétitivité pour la croissance
et l'emploi
13%
Marché unique, innovation et
numérique
12%
Cohésion économique, sociale et
territoriale
34%
Cohésion, résilience et valeurs
35%
Ressources naturelles (PAC)
39%
Ressources naturelles et
environnement (PAC)
33%
Sécurité et citoyenneté
2%
Migration et gestion des
frontières
2%
L'Europe dans le monde
6%
Sécurité et défense
1%
Voisinage dans le monde
9%
Administration
6%
Administration
7%
Total
100%
100%
Source : Commission européenne
23
En
€
2018.
30
COUR DES COMPTES
La part de la PAC, dont la France est la première bénéficiaire,
baissera sensiblement (de 39 à 33 %), en grande partie au profit de celles
des politiques extérieures, de défense et de sécurité.
L’instrument de relance
Next Generation EU
appelle des
investissements publics et privés massifs au niveau européen, afin de créer
des emplois et de réparer les dommages immédiats causés par la pandémie
de Covid-19, tout en soutenant les priorités écologiques et numériques de
l’Union. Dans ce but, la Commission sera autorisée à emprunter 750 Md
€
au nom de l’Union sur les marchés des capitaux.
Les fonds ainsi collectés seront transférés vers les programmes de
l’UE suivant la répartition suivante :
-
Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) : 672,5 Md
€
(prêts:
360 Md
€
, subventions: 312,5 Md
€
) ;
-
React-EU
: 47,5 Md
€
(politiques de cohésion, mesures adoptées
depuis le 1
er
février 2020) ;
-
Horizon Europe: 5 Md
€
;
-
InvestEU
(suite du plan d’investissement pour l’Europe) : 5,6
Md
€
;
-
Développement rural: 7,5 Md
€
;
-
Fonds pour une transition juste (FTJ): 10 Md
€
;
-
RescEU
(mécanisme
d’intervention
renforcé
en
cas
de
catastrophe) : 1,9 Md
€
.
La France devrait bénéficier au titre du plan de relance
Next
Generation EU
d’une enveloppe d’environ 45,8 Md
€
, dont 40,0 Md
€
24
au
titre de la FRR contribuant ainsi à couvrir 40 % des dépenses du plan de
relance annoncé par le Gouvernement en septembre 2020.
L’accord du 14 décembre 2020 prévoit que 30 % des dépenses
totales de l’UE (CFP et
Next Generation EU
) seront destinées à des projets
liés au climat.
Afin de permettre le financement de dépenses imprévues spécifiques
qui ne pourraient pas être financées autrement, un dispositif de marge
unique a été mis en place. Le plafond annuel de ce dispositif est fixé à 772
M
€
(prix de 2018). Trois instruments spéciaux thématiques fourniront des
moyens financiers supplémentaires pour faire face à des événements
imprévus donnés :
-
une réserve d'ajustement au
Brexit
pour aider les États membres et
les secteurs économiques les plus durement touchés par le
Brexit
;
24
Selon les données de prévisions macroéconomiques disponibles à date.
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
31
-
le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation, pour venir en
aide aux travailleurs ayant perdu leur emploi dans le cadre de
restructurations liées à la mondialisation ;
-
une réserve de solidarité et d’aide d’urgence.
Enfin, l’accord prévoit un nouveau mécanisme de conditionnalité
budgétaire, appelé « régime général de conditionnalité », qui doit
s’appliquer lorsqu’il est établi que des violations des principes de l’état de
droit dans un État membre portent atteinte ou risquent fortement de porter
atteinte, de manière suffisamment directe, à la bonne gestion financière du
budget de l’UE ou à la protection des intérêts financiers de l'UE.
Les principales modifications issues des négociations avec le
Parlement européen et de l’accord interinstitutionnel du 10 novembre 2020
par rapport aux conclusions du Conseil européen des 20-21 juillet induisent
des facteurs d’accroissement de la dépense.
Il convient de signaler en particulier :
- l’augmentation (par le bais d’un mécanisme ad hoc de relèvement
annuel des plafonds de dépenses,) de 15 Md
€
du montant alloué aux
programmes phares identifiés par le Parlement ;
- l’augmentation de l’instrument de flexibilité de 1 Md
€
;
- le renforcement du rôle de l’autorité budgétaire
25
dans la
gouvernance des recettes affectées externes du plan de relance
Next
Generation EU
;
- l’ajout d’une référence au règlement État de droit à l’article 5 du
règlement du CFP prévoyant que les crédits suspendus dans le cadre de
cette règlementation soient reportés à l’année suivante.
Par ailleurs, le produit des amendes est désormais affecté au
financement des rehaussements consentis à hauteur de 11 Md
€
26
et se
trouve donc moins libre d’emploi.
2.2.2 La nouvelle décision relative aux ressources propres
La nouvelle décision relative aux ressources propres (DRP), qui
définit le mode de financement du budget de l’UE sur la période, a été
adoptée par le Conseil le 14 décembre 2020. Pour entrer en vigueur, la
25
L’autorité budgétaire étant composée de deux branches, le Conseil et le Parlement.
26
Le mécanisme est également financé par d’autres leviers : l’utilisation des marges
pour 2,5 Md
€
, la réutilisation des remboursements de la facilité d’investissement ACP
(Afrique Caraïbes Pacifique) pour 1 Md
€
et la réutilisation de crédits dégagés
d’Horizon Europe pour 0,5 Md
€
sur la période.
32
COUR DES COMPTES
décision doit être approuvée par l'ensemble des 27 États membres de l’UE
et s’appliquera rétrospectivement à partir du 1
er
janvier 2021. En France, la
loi du 8 février 2021 a autorisé l'approbation de la décision du Conseil
relative au système des ressources propres.
À partir du 1
er
janvier 2021, les plafonds de ressources propres sont
les suivants :
-
pour les engagements, à 1,46 % du RNB de l’ensemble des États
membres (1,23 % dans la programmation 2014-2020) ;
-
pour les paiements, à 1,40 % du RNB de l’ensemble des États
membres.
Ces plafonds seront exceptionnellement et temporairement relevés
de 0,6 point de pourcentage supplémentaire pour couvrir tous les
engagements de l’UE résultant de l’emprunt de 750 Md
€
, jusqu’à ce que
tous les fonds empruntés aient été remboursés.
Une nouvelle ressource propre fondée sur les déchets d’emballages
en plastique non recyclés est établie à partir du 1
er
janvier 2021. Le nouveau
prélèvement sera calculé sur la base du poids des déchets d'emballages en
plastique non recyclés dans chaque État membre, avec un taux d'appel de
0,80 euro par kilogramme. La nouvelle ressource propre comprend un
mécanisme visant à éviter un effet excessivement régressif sur les
contributions nationales que la direction du budget considère comme un
rabais, au même titre que ceux accordés aux cinq États membres du nord
de l’UE. En outre, celle-ci s’emploiera à introduire d'autres ressources
propres dans les années à venir. Ces nouvelles sources de financement
viennent s’ajouter aux ressources propres existantes.
Enfin, des corrections forfaitaires réduiront la contribution annuelle
fondée sur le revenu national brut (RNB) du Danemark (377 M
€
), de
l’Allemagne (3 671 M
€
), des Pays-Bas (1 921 M
€
), de l’Autriche (565 M
€
)
et de la Suède 1 069 M
€
) ; en revanche, les taux d’appels réduits de TVA
(0,15 % au lieu de 0,30 %) qui concernaient l’Allemagne, les Pays-Bas et
la Suède sont supprimés.
2.2.3 L’impact sur le PSR-UE
Le net ressaut du PSR-UE entre 2020 (23,7 Md
€
en exécution) et
2021 (27,2 Md
€
en LFI
27
) s’explique par quatre facteurs principaux :
27
Après une première évaluation à 26,8 Md
€
en PLF 2021, soit une réévaluation en
cours de discussion parlementaire de 0,4 Md
€
.
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
33
-
l’augmentation du niveau des crédits de paiement (166,1 Md
€
au
total en 2021, contre 153,6 Md
€
dans le budget initial (avant crise
Covid) 2020 et 164,1 Md
€
en exécution finale ;
-
la sortie définitive du Royaume-Uni qui fait passer la quote-part
de la France de 15,5 à 19 % ;
-
le changement des règles concernant les contributions nationales ;
-
l’impact de la crise de covid-19 sur le niveau des ressources
propres traditionnelles (cet impact ayant toutefois été largement
intégré déjà dans l’exécution 2020)
Ces facteurs, en particulier les trois premiers, resteront valables pour
les exercices suivants
28
, et il est donc probable que le PSR-UE ne
redescendra pas sensiblement sous le niveau historiquement élevé prévu en
2021.
Au total, l’accord budgétaire du 14 décembre 2020 entraîne un
ressaut historique du PSR-UE de + 8 Md
€
(en prix courants) par an en
moyenne sur le cadre 2021-2027 par rapport à 2014-20, la hausse étant
particulièrement prononcée en 2021 (+ 25% en LFI 2021 par rapport à la
LFI 2020)
29
. Le solde net comptable (ou contribution nette) de la France
passerait de - 0,32 % de son RNB (soit - 7,3 Md
€
par an en prix courants)
en moyenne sur 2014-2018 à - 0,43% (soit - 11,5 Md
€
par an) sur le
prochain cadre.
Par ailleurs, le coût total des rabais pour la France est de 1,6 Md
€
par an en prix courants (contre 2,0 Md
€
par an pour les rabais du CFP 2014-
2020 mais ce montant intégrait 1,5 Md
€
au titre de la correction britannique
qui a été supprimée
30
).
En ce qui concerne
Next Generation EU
, intégralement financé par
un emprunt de la Commission, son impact sur le PSR-UE devrait être nul
à condition que l’UE adopte de nouvelles ressources propres pour le
moment où les premiers remboursements interviendront.
28
Le niveau des CP devrait rester élevé compte tenu du niveau des restes à liquider
(voir
infra
). Les conséquences de la sortie du Royaume-Uni et des nouvelles règles sur
les contributions nationales sont durables.
29
La base de départ que constituait la proposition initiale de la Commission européenne
dévoilée le 4 mai 2018 conduisait, toutes choses égales par ailleurs, à un ressaut de la
contribution de la France estimé à 6 Md
€
par an (voir NEB 2019). La négociation finale
s’est donc traduite par une réévaluation de l’effort financier de la France de 2 Md
€
.
30
À structure constante, la France augmente donc sa contribution aux rabais allemand,
autrichien, danois, néerlandais et suédois de 1,1 Md
€
, tout en devenant la 2
e
contributrice nette du budget européen.
34
COUR DES COMPTES
2.2.4 Le mécanisme de financement « en dernier ressort » de
l’emprunt de 750 Md
€
de la Commission européenne
La décision ressources propres (DRP) 2021-2027 du 14 décembre
2020
31
dispose que le remboursement des fonds empruntés est financé par
le budget de l’Union (considérant 19). L’exposé des motifs du projet de loi
de ratification précise que des règles de remboursement et de partage du
risque engagent l’ensemble des États membres à garantir en commun
l’emprunt opéré par la Commission au nom de l’Union (article 9)
32
.
Afin de garantir que l’Union soit toujours en mesure de remplir ses
obligations juridiques à l’égard de tiers, des règles spéciales autorisent la
Commission européenne à appeler en dernier ressort les États membres à
mettre provisoirement à disposition des liquidités correspondantes
(considérant 23).
Les règles prévues
33
se distinguent en cela du programme SURE
34
qui a été construit avec l’octroi de garanties des États membres
: ces
derniers acceptent de donner leur garantie, mais la Commission est tenue,
avant de l’appeler le cas échéant, d’examiner la possibilité de tirer parti de
la marge en crédits de paiement disponible sous le plafond des ressources
propres. La garantie de la France pour SURE a été autorisée par l’article
31
Décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au
système des ressources propres de l’Union européenne et abrogeant la décision
2014/335 (UE, Euratom). Un projet de loi de ratification a été déposé (procédure
d’urgence) sur le bureau de l’Assemblée nationale le 13 janvier 2021. Comme précisé
supra, la loi a été promulguée le 8 février 2021.
32
Si l’exposé des motifs du projet de loi parle de garantie en commun de l’emprunt, les
dispositions du 4) de l’article 9 de la DRP n’utilisent pas le mot « garantie » mais
indiquent que les États membres, en dernier recours pour la Commission, mettent à la
disposition de celle-ci les ressources permettant à l’Union de se conformer à ses
obligations découlant de l’emprunt.
33
Considérant 23 ; article 9-4.
34
En réaction à la crise, la Commission européenne a mis en place un dispositif de
réassurance chômage, appelé SURE (
Support to mitigate Unemployment Risks in an
Emergency
- Soutien pour atténuer les risques de chômage en cas d'urgence) afin
d’aider à financer le chômage partiel dans les États les plus touchés. Le mécanisme a
été activé pour la première fois le 22 septembre 2020, et les premières obligations
destinées à son financement ont été émises par la Commission européenne sur les
marchés financiers le 21 octobre 2020. D’un montant total de 17 Md
€
, ces obligations
ont permis à la Commission d’accorder des prêts à l’Italie, à l’Espagne et à la Pologne.
Le règlement (UE) 2020/672 du Conseil du 19 mai 2020 portant création d’un
instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en
situation d’urgence (SURE) engendrée par la propagation de la COVID-19 prévoit que
les États membres apportent des garanties irrévocables, inconditionnelles et à la
demande (article 11).
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
35
32 de la loi n° 2020-935 de finances rectificative pour 2020 du 30 juillet
2020
35
.
La DRP prévoit par ailleurs que si un État membre n’honore pas à
temps un appel, la Commission est autorisée de manière provisoire à
effectuer des appels supplémentaires auprès d’autres États membres
(considérant 23 ; article 9-5). La direction du Budget reconnaît que le
mécanisme retenu ne va pas sans soulever des questions pratiques,
notamment de la part de l’agence France Trésor car il implique en théorie
de toujours conserver une réserve de trésorerie. Elle précise toutefois qu’il
a été conçu comme un mécanisme d’urgence absolue, dans un contexte de
stress de financement souverain
36
et que, à conditions de financement
normales, le risque d’appel des États membres est à peu près nul.
Il convient de noter par ailleurs que le projet de loi de ratification de la
décision ressources propres ne contenait pas d’éléments financiers qui
auraient permis d’éclairer la représentation nationale sur cette question
complexe. La Commission est tenue, selon des dispositions de la DRP, de
partager régulièrement ses projections de besoin de financement et son plan
de financement
37
et à établir un dialogue structuré avec les administrations
nationales
38
. Un suivi de l’emprunt et de ses échéances de remboursement
devrait donc être effectif pour les États membres. Il conviendra que toutes
les informations relatives aux emprunts de la Commission et aux
conséquences des engagements ainsi pris par la France soient présentées à
l’appui du projet de loi de finances et de l’examen de la prévision de PSR-
UE.
Dans ce contexte, une clarification apparaît nécessaire sur la nature
de l’engagement financier pris par la France:
35
«
Au titre de la quote-part de la France et dans la limite d’un plafond de 4,407
milliards d'euros, le ministre chargé de l'économie est autorisé à octroyer à titre gratuit
la garantie de l'État à l'Union européenne au titre des prêts que celle-ci accorde aux
États membres conformément aux dispositions du règlement (UE) 2020/672 du Conseil
du 19 mai 2020 portant création d'un instrument européen de soutien temporaire à
l'atténuation des risques de chômage en situation d'urgence (SURE) engendrée par la
propagation de la COVID-19. L'octroi de la garantie est subordonné à la conclusion
d'un accord avec la Commission européenne prévoyant notamment les conditions
d'ouverture de l'instrument, les règles prudentielles de gestion du portefeuille des prêts
bénéficiant de l'instrument et la date à laquelle celui-ci prend fin
».
36
Du type de la crise de la dette en zone euro de 2010-2011.
37
Cf. le considérant 18, repris au 3 de l’article 5.
38
Cf. le 5 de l’article 9.
36
COUR DES COMPTES
- s’il relève de la catégorie des garanties de l’État, l’article 34 de LOLF
dispose que la loi de finances autorise l’octroi des garanties de l’État et fixe
leur régime ;
- s’agissant d’engagements financiers de l’État, la LOLF prévoit dans
son article 54 qu’à l’appui du projet de loi de règlement le compte général
de l'État comprend une évaluation des engagements hors bilan de l'État.
La direction du Budget et la direction générale du Trésor soutiennent
dans son principe cette démarche qui vise à présenter de la manière la plus
fidèle possible les engagements de la France au niveau européen. Elles
s’interrogent néanmoins, au vu des spécificités qui s’y attachent et de
l’autorisation parlementaire déjà accordée dans le cadre de la loi portant
approbation de la nouvelle décision ressources propres, sur la nécessité
juridique de prévoir dans le cas présent la création d’un régime de garantie
dédié en loi de finances. Elles estiment que cette question nécessitera une
analyse plus approfondie.
En conséquence, la Cour fait la recommandation suivante :
Recommandation : (
direction du budget ; direction générale du
Trésor
) - Clarifier la nature et la portée financière de
l’engagement pris par la France afin que l’Union européenne
puisse remplir ses obligations de remboursement d’emprunts
destinés à faire face aux conséquences de la crise de la COVID-
19, ainsi que son traitement budgétaire et comptable au regard
de la loi organique relative aux lois de finances
(recommandation
nouvelle).
2.3
Le risque lié au niveau des restes à liquider
(RAL)
Les RAL correspondent aux engagements pris par l’Union
européenne matérialisés par des crédits d’engagements (CE) qui n’ont pas
encore donné lieu à des paiements nécessitant la mise en place de crédits
de paiement (CP). Il existe inévitablement un décalage temporel entre le
moment où une opération requiert une autorisation budgétaire traduite par
un CE et le moment où il est nécessaire de décaisser des fonds en
mobilisant des CP. À une date donnée, le stock de RAL mesure le besoin
de CP pour les années à venir, indépendamment des nouveaux
engagements qui pourraient être pris ultérieurement.
La nature du budget de l’UE explique cette situation normale
a
priori
mais susceptible d’entraîner, faute d’une maîtrise suffisante en
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
37
gestion, un gonflement des besoins de CP reportés d’année en année, ce
qui a un effet direct sur le PSR-UE. Ce dernier est en effet la traduction
chaque année en LFI des besoins de CP inscrits dans le budget de l’UE ; or
ces besoins ne sont connus que tardivement. La complexité des procédures
d’engagement des crédits européens dans chacun des États membres rend
délicat l’exercice de prévision du budget de l’UE et donc par ricochet du
PSR-UE.
Les RAL connaissent au niveau européen une progression sensible
soulignée chaque année par la Cour des comptes européenne (graphique n°
13). La Commission européenne estime de son côté que cette évolution est
normale, les besoins s’accroissant toujours en fin de programmation.
Graphique n° 13 : le stock de RAL de 2014 à 2021 - en M
€
S
ource : direction du budget pour les montants de restes à liquider, d’après données de la
Commission européenne ; pour CE, jaunes budgétaires 2020 et 2021
Après une forte progression de 2014 à 2019, le stock de RAL se
stabilise autour de 300 Md
€
. Le ratio de couverture des RAL par les CP de
l’année n’a cessé de diminuer pour atteindre 43 % en 2020. La situation est
cependant appelée à s’améliorer en 2021 grâce, d’une part, à une très légère
décrue du stock de RAL qui passerait de 303 à 301 Md
€
et, d’autre part et
surtout, à l’augmentation sensible des CP inscrits dans le budget 2021.
Il n’en demeure pas moins que les décalages de paiement accumulés
vont peser sur les premières années du nouveau CFP 2021-2027. La
Commission prévoit que 289 Md
€
du stock de RAL à fin 2020 seraient
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
0
50 000
100 000
150 000
200 000
250 000
300 000
350 000
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
RAL fin d'année(M
€
)
taux de couverture des RAL par les CP de l'exercice
38
COUR DES COMPTES
payés sur la période 2021-2027, ce qui représenterait 24% des CP du CFP
2021-2027 (c’est-à-dire la totalité du budget sur un an et huit mois).
2.4
Le règlement définitif du
Brexit
Conformément à l’accord de retrait entré en vigueur le 31 janvier
2020, le Royaume-Uni participe au-delà de 2020 au budget de l’UE au titre
de ses engagements passés (restes à liquider, retraites, passifs et passifs
éventuels). Le principal déterminant de cette contribution est le reste à
liquider (RAL) pré-2021. La part de contribution du Royaume-Uni dans ce
RAL est calculée selon un niveau historique en tenant compte de la
correction dont bénéficiait le Royaume-Uni ainsi que des autres montants
de corrections accordés.
Pour 2021, cette part est estimée de manière
provisoire par la Commission à 12,24% soit 6,9 Md
€
(93 % de la
contribution britannique totale au budget de l’UE pour 2021).
L’article 148 de l’accord de retrait prévoit néanmoins un décalage
dans les échéances de paiements. Celles-ci sont fixées de juin d’un exercice
à juin de l’exercice suivant, les versements devant être effectués le dernier
jour ouvrable de chaque mois. Ce différé de paiement entraîne une
déformation du profil de contribution du Royaume-Uni par rapport au
RAL, ce qui a une forte incidence sur les exercices 2021 et 2022.
Graphique n° 14 : Relations financières au titre du RAL entre l’UE
et le Royaume-Uni – en Md
€
Source : exécution du budget de l’UE pour les exercices 2014-2019, prévisions de paiements de
la Commission pour la période 2021-2027, calculs : direction du budget
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
39
L’accord trouvé fin décembre 2020 entre le Royaume-Uni et
l’Union européenne ne change pas le cadre du règlement financier prévu
par l’accord de retrait. Par ailleurs, la Commission a publié le 25 décembre
2020, dans la foulée de l’accord, un projet de règlement relatif à la nouvelle
réserve d’ajustement au
Brexit
dont la négociation au niveau européen est
en cours
39
.
2.5
L’impact encore mal connu de la montée en
puissance des instruments financiers
Le recours croissant de l’Union européenne (UE) aux instruments
financiers non strictement budgétaires entraîne une exposition croissante
du budget européen et donc des budgets nationaux à des risques financiers
qu’il est important d’évaluer le mieux possible. Cette situation devrait
s’accentuer avec la crise née de la pandémie de Covid-19 qui a conduit à
créer de nouveaux instruments financiers pour soutenir les secteurs les plus
en difficulté.
Ce point d’attention, régulièrement souligné par la Cour des
comptes européenne, a également donné lieu à des observations de la Cour
des comptes à l’occasion de différents travaux dont la NEB 2019 sur le
PSR-UE
40
. Sans pouvoir se livrer à une instruction approfondie de cette
importante question, la présente NEB rappelle les principaux enjeux
financiers de ces nouveaux modes d’intervention.
Les instruments financiers dits en gestion partagée, en premier lieu,
peuvent prendre la forme de prêts, de garanties et de participations en fonds
propres, au profit de bénéficiaires finals et pour des actions correspondant
aux objectifs des politiques de l’UE. Ils sont utilisés en particulier au titre
des fonds européens structurels et d’investissement (les « fonds
structurels »). S'ils sont mis en
œ
uvre correctement, les instruments
financiers en gestion partagée peuvent présenter des avantages spécifiques
39
La Commission a proposé à la mi-janvier 2021 que 80 % des fonds de la « réserve
d’ajustement » - soit 4,24 Md
€
- soient déboursés sous forme de préfinancements en
2021, pour une utilisation par les États jusqu’en 2023. Le 1,4 Md
€
restant serait
distribué en 2024. Selon la répartition par pays mise sur la table par la Commission, la
France serait le quatrième bénéficiaire de la réserve. Elle recevrait 421 M
€
soit 10 %
de l’enveloppe distribuée en 2021. L’Irlande recevrait à elle seule 25 % du fonds, suivie
par les Pays-Bas (757,4 M
€
) et l’Allemagne (455,4 M
€
). La clé de répartition tient
compte du « volume de la pêche » en eaux britanniques et du volume commercial avec
le Royaume-Uni, explique la Commission.
40
Cf. également le référé de la Cour des comptes sur
La mise en
œ
uvre en France du
plan d’investissement pour l’Europe
, 2019.
40
COUR DES COMPTES
par rapport aux subventions. Ils peuvent notamment servir à mobiliser des
fonds publics et privés supplémentaires pour compléter le financement
public initial. De plus, leur dotation en capital est renouvelable grâce aux
remboursements par les bénéficiaires finals (sauf en cas de sinistralité), de
sorte que les mêmes fonds peuvent être réutilisés plusieurs fois.
S’agissant des fonds structurels, le CFP 2014-2020 avait engagé
16,9 Md
€
au travers des instruments en gestion partagée, mais seulement
7 Md
€
étaient versés au début de 2019 et 2,8 Md
€
effectivement payés au
bénéficiaires finals, soit 17 %
41
. Il apparaît que ces instruments en gestion
partagée ne sont pas plus rapides que les instruments classiques
(subventions).
Le budget de l’UE est par ailleurs exposé à des opérations
financières prenant la forme de prêts couverts soit directement
42
soit
indirectement via un fonds de garantie
43
. Les garanties ont augmenté ces
dernières années, essentiellement en raison de l’ajout de celles du Fonds
européen pour les investissements stratégiques (FEIS)
44
et du Fonds
européen pour le développement durable (FEDD). Ces garanties visent à
mobiliser des fonds extérieurs afin d’augmenter l’impact potentiel du
budget de l’UE. Les autres garanties provisionnées par le budget de l’Union
comportent les garanties du mandat de prêt extérieur données à la BEI ainsi
que les garanties octroyées par l’UE pour soutenir des activités de prêt et
d’emprunt, qui sont essentiellement des prêts accordés à des États membres
et qui existent depuis de nombreuses années à un niveau relativement
constant. Toutefois, cette augmentation des garanties expose le budget de
l’UE à des risques, qui, estime la CCE, doivent faire l’objet d’un suivi
permanent pour ne pas devenir excessifs
45
. Selon la CCE, le risque total
supporté par le budget de l’UE au 31 décembre 2019 atteindrait 90,5 Md
€
,
41
Cour des comptes européenne,
Rapport annuel sur l’exécution du budget relatif à
l’exercice 2019
, p. 72 et suivantes, novembre 2020.
42
Par exemple, les prêts au titre du Mécanisme européen de stabilisation financière
(MESF), les prêts de soutien des balances des paiements, les prêts Euratom.
43
Les prêts d’assistance macro-financière à des États tiers, les prêts Euratom à des États
tiers, les opérations du fonds européen d’investissements stratégiques (FEIS) géré par
la Banque européenne d’investissement (BEI).
44
Concernant le fonds de garantie du FEIS, le taux de provisionnement (pourcentage
des fonds mis en réserve dans le fonds de garantie pour couvrir les futurs appels à la
garantie) est actuellement de 35 % (il était de 50 % en 2015). En 2019, aucun appel n’a
été payé à partir du fonds de garantie.
45
Cf. Cour des comptes européenne,
Rapport sur la gestion 2018
, point 2.25.
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
41
dont 48,6 Md
€
couverts directement par le budget de l’UE et 41,8 Md
€
via
un fonds de garantie
46
.
La CCE estime qu’il faut réévaluer les futures expositions du budget
de l’UE. La crise de la COVID-19 risque en effet d’entraîner un recours
accru à ce type d’instruments de garantie, mais aussi de porter atteinte à la
capacité de remboursement des bénéficiaires finals ce qui pourrait
nécessiter de réévaluer les taux de provisionnement et de mobiliser par
conséquent des moyens budgétaires supplémentaires
47
. À ce stade, la
direction du budget et la direction générale du Trésor (DGT) indiquent que
les appels en garantie sont restés limités sur le FEIS, et que la Commission
européenne n’a pas communiqué ses prévisions de sinistralité pour la
période 2021-2027.
46
Cf. Cour des comptes européenne,
Rapport sur la gestion 2019
, point 2.26, p. 77.
47
Ibid
.
42
COUR DES COMPTES
La mobilisation de nouveaux instruments financiers pour faire
face à la pandémie
Le groupe BEI a été sollicité pour contribuer à la réaction de l’UE à
la pandémie de COVID-19. À la suite d’une recommandation faite par
l’Eurogroupe le 9 avril 2020, le groupe BEI a créé un fonds de garantie
paneuropéen d’un montant maximal de 25 Md
€
axé sur les petites et
moyennes entreprises (PME) dans l’ensemble de l’UE. Précédemment, il
avait annoncé une série de mesures destinées à mobiliser 5 Md
€
pour des
investissements dans le secteur des soins de santé, ainsi que jusqu’à 28 Md
€
pour répondre aux besoins de financement à court terme des PME
concernées, dont un soutien d’un montant maximal de 8 Md
€
fournis par
l’intermédiaire du fonds européen d’investissement (FEI) et couverts par
une garantie de l’UE de 1 Md
€
. Forte du soutien des financements octroyés
par l’UE, y compris les garanties données par celle-ci, la BEI a aussi
annoncé qu’elle fournirait jusqu'à 6,5 Md
€
au cours des prochains mois à
des partenaires situés dans des pays tiers.
Dans le cadre du plan de relance européen, le législateur a autorisé
le ministre de l’économie, des finances et de la relance à apporter la garantie
de la France à la BEI
48
. La LFI 2021 a prévu un crédit de 731 M
€
pour
couvrir la sinistralité de la BEI. Ceci est toutefois sans impact sur le PSR-
UE.
D’une façon plus générale, la CCE estime qu’il importe de disposer
d’une image complète du « risque total » auquel le budget de l’UE est
exposé, y compris du risque engendré par les garanties budgétaires telles
que le FEIS.
48
Aux termes de l’article 33 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances
rectificative pour 2020 (LFR 3) : « Le ministre chargé de l’économie est autorisé à
octroyer à titre gratuit la garantie de l’État au groupe Banque européenne
d'investissement, au titre de la quote-part de la France dans le fonds paneuropéen de
garantie en réponse à la covid-19, approuvé par la décision du conseil d'administration
de la banque en date du 26 mai 2020. Cette garantie est autorisée dans la limite d'un
plafond de 4,7 milliards d’euros ».
PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES EN FAVEUR DE L’UNION EUROPÉENNE
43
2.6
La réserve de la Commission sur le calcul par
la France de son RNB
La NEB 2019 avait relevé que la Commission européenne avait émis
une réserve générale concernant l’estimation par la France de son Revenu
national brut (RNB) à compter de 2010
49
. Selon les informations
communiquées par la direction du budget, cette réserve n’a pas encore été
levée, l’inventaire révisé transmis par l’INSEE en mars 2020 étant toujours
en cours d’examen par les services de la Commission. Il convient de
rappeler qu’elle avait trait à la documentation de l’inventaire et non au
calcul du RNB français, ce qui, selon l’INSEE, devrait conduire à limiter
l’impact des révisions attendues sur le calcul de la contribution RNB au
budget de l’Union européenne.
2.7
La qualité de la gestion du PSR-UE
La gestion 2020 du PSR-UE n’appelle pas d’observation du point
de vue de la régularité.
La question de l’exclusion préalable des mises à disposition tardives
de droits de douanes et d’intérêts de retard afférents est désormais tranchée
et l’imputation de ces versements sur le programme P302 est en cours de
finalisation technique. Le projet de décret est finalisé et doit être
prochainement transmis au Conseil d’État.
49
Cour des comptes,
note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019 du prélèvement sur
recettes en faveur de l’Union européenne
, 2020.
44
COUR DES COMPTES
3
Les recommandations de la Cour
La Cour n’a formulé aucune recommandation au titre de 2019.
Au titre de la gestion 2020, la Cour recommande de clarifier la
nature de l’engagement pris par la France afin de garantir que l’Union
puisse remplir ses obligations de remboursement de l’emprunt destiné à
faire face aux conséquences de la crise de la COVID-19, ainsi que son
traitement budgétaire et comptable au regard de la loi organique relative
aux lois de finances.
Il est rappelé par ailleurs que, dans ses observations définitives de
mars 2020, la Cour a formulé une recommandation sur les prélèvements
sur recettes visant à transformer le PSR-UE en une mission budgétaire
mono-programme
Contribution au financement de l’Union européenne
, ou
en un nouveau programme budgétaire du même nom (avec des crédits à
caractère évaluatif) au sein de la mission existante
Engagements financiers
de l’État
.