Compte de concours financiers
Avances à divers services de
l’État ou organismes gérant des
services publics
Note d’analyse
de l’exécution budgétaire
2020
2
COUR DES COMPTES
Compte de concours financiers
Avances à divers
services de l’État ou organismes gérant des
services publics
Programme 821 – Avances à l’Agence de services et de paiement
(ASP), au titre du préfinancement des aides communautaires de
la politique agricole commune (PAC)
Programme 823 – Avances à des organismes distincts de l’État
et gérant des services publics
Programme 824 – Avances à des services de l’État
Programme 825 – Avances à l’Office national d’indemnisation
des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des
infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation
des victimes du Benfluorex (« Médiator »)
Programme 826 - Avances aux exploitants d’aéroports touchés
par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité
Programme 827 - Avances remboursables destinées à soutenir
Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie
de la covid-19
Programme 828 - Avances remboursables destinées à soutenir
les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des
conséquences de l’épidémie de la covid-19
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
3
Graphique n° 1 : solde du compte de concours financiers
(CP, en M
€
)
Source : Cour des comptes d’après Chorus
4
COUR DES COMPTES
Synthèse
Les recettes et les dépenses du compte de concours financiers
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services
publics
ne sont pas des recettes et des dépenses publiques au sens de la
comptabilité nationale. Par conséquent, les opérations enregistrées n’ont
pas d’impact sur le déficit public au sens de la comptabilité nationale ; ce
constat ne s’applique néanmoins que dans la mesure où les créances sont
effectivement honorées, une admission en non-valeur de celles-ci grevant
le déficit public. En revanche, ces avances ont un effet sur le solde
budgétaire et l’endettement de l’État.
En 2020, ce compte a enregistré des dépenses à hauteur de
10 923 M
€
pour des recettes d’un montant de 8 303,5 M
€
, ce qui a conduit
à un solde négatif de 2 619,5 M
€
. Les dépenses comme les recettes sont en
nette hausse par rapport à l’exercice 2019. Le solde négatif enregistré en
2020 s’inscrit dans le cadre d’un solde cumulé déjà fortement déficitaire
en 2019 (- 1 800,6 M
€
), du fait d’avances accordées, par le passé, pour des
montants importants au fonds pour la société numérique (850 M
€
en attente
de remboursement) et au budget annexe
Contrôle et exploitation aériens
(667,4 M
€
en cours de remboursement), portant le déficit cumulé à
4 420,1 M
€
en 2020.
L’exercice 2020 a été marqué par la création de trois programmes,
qui visent à soutenir des acteurs du secteur des transports fragilisés par la
crise sanitaire, au sein du compte de concours financiers :
- le programme 826
Avances aux exploitants d’aéroports touchés
par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité
;
- le programme 827
Avances remboursables destinées à soutenir
Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la
covid-19
;
- le programme 828
Avances remboursables destinées à soutenir les
autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de
l’épidémie de la covid-19
). Ce programme en faveur des collectivités
territoriales compétentes a été créé par la quatrième loi de finances
rectificative pour 2020 et doté de 750 M
€
de crédits de paiement. Il n’a
cependant connu aucun mouvement de crédits du fait de sa création en fin
d’année.
L’exercice 2020 a aussi donné lieu à un soutien important du budget
annexe «
Contrôle et exploitation aériens »
(BACEA) qui a reçu 1 250 M
€
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
5
d’avances pour faire face à l’attrition marquée de ses recettes. En
conséquence, le BACEA a cessé de se désendetter vis-à-vis du compte de
concours financiers. Compte tenu des incertitudes sur les perspectives de
retour à la normale du trafic aérien, sur lequel est assis l’essentiel des
recettes du BACEA, la Cour ne renouvelle pas dans l’immédiat sa
recommandation de reprise du désendettement, tout en restant attentive à
ce que cet objectif reste pris en compte dans les trajectoires financières
associées au budget annexe et au compte spécial du Trésor.
Les échéanciers des avances accordées aux acteurs du secteur des
transports durant la crise sanitaire tiennent compte des situations
financières spécifiques de chaque bénéficiaire. La Cour relève qu’au regard
de leurs perspectives d’activité, dont ils tirent l’essentiel ou une large part
de leurs recettes, il existe un risque que les échéanciers convenus ne soient
pas respectés.
Les trois autres programmes du compte de concours financiers ont
connu une exécution budgétaire en ligne avec leur trajectoire budgétaire de
long terme.
6
COUR DES COMPTES
Sommaire
Introduction
.....................................................................................
7
1
LES RÉSULTATS DE L’ÉXERCICE
......................................
9
1.1
Un solde annuel fortement déficitaire, qui dégrade un solde
cumulé déjà très négatif
..........................................................
9
1.2
La crise sanitaire s’est répercutée sur le montant des avances
versées
via
le compte de concours financiers
.......................
13
1.3
Des recettes inférieures de près 19 % à la prévision initiale 16
2
LA GESTION DU COMPTE DE CONCOURS
FINANCIERS
............................................................................
18
2.1
Des avances du compte de concours financiers qui s’écartent
des dispositions de l’article 24 de la loi organique relative aux
lois de finances
.....................................................................
18
2.2
Une démarche de performance centrée sur la conformité
juridique du fonctionnement du compte
...............................
21
3
LES RECOMMANDATIONS DE LA COUR
........................
24
3.1
Le suivi des recommandations formulées au titre de 2019... 24
3.2
Récapitulatif des recommandations formulées au titre de la
gestion 2020
.........................................................................
24
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
7
Introduction
Le compte de concours financiers
Avances à divers services de
l’État ou organismes gérant des services publics
, créé par la loi de finances
pour 2006
1
, retrace les avances du Trésor accordées :
-
à l’Agence de services et de paiement (ASP), au titre du
préfinancement des aides communautaires de la politique agricole
commune (PAC) - programme 821.
Ces avances permettent de couvrir une
partie du besoin de trésorerie de l’ASP sur le 4
ème
trimestre de l’année pour
le paiement des aides de la PAC, dans l’attente des versements du montant
de ces aides par l’Union européenne (UE), au début de l’année suivante.
L’ASP rembourse au Trésor l’intégralité des avances au cours de l’exercice
où celles-ci lui sont versées ;
-
à des organismes distincts de l’État gérant des services publics -
programme 823.
Ce programme porte une enveloppe de crédits destinée à
répondre à des besoins urgents ou à permettre le financement de services
ou organismes qui ne peuvent recourir au marché bancaire. En effet, depuis
2012, la quasi-totalité des organismes divers d’administration centrale
2
(ODAC) ne peut recourir à l’emprunt pour une durée supérieure à un an
auprès d’un établissement de crédit
3
;
-
à d’autres services de l’État - programme 824.
Ce programme
porte chaque année un complément de financement au profit du budget
annexe «
Contrôle et exploitation aériens »
(BACEA) ;
-
à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des
affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de
l’indemnisation des victimes du Benfluorex (« Médiator ») - programme
825.
Ce programme porte le versement d’une avance éventuelle à
l’ONIAM pour le cas où cet organisme serait amené à venir en aide
1
Cf. article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006
modifié.
2
Cf. arrêté du 14 août 2017 fixant la liste des organismes divers d’administration
centrale ayant interdiction de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt
dont le terme est supérieur à douze mois ou d’émettre un titre de créance dont le terme
excède cette durée.
3
Cf. l’article 12 de la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des
finances publiques pour les années 2011 à 2014.
8
COUR DES COMPTES
financièrement aux victimes du Médiator que les laboratoires Servier
refuseraient d’indemniser.
Du fait de la crise sanitaire, ont été créés en 2020 trois nouveaux
programmes retraçant les avances du Trésor versées :
-
aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au
titre des dépenses de sûreté-sécurité
4
- programme 826.
Ce programme a
pour objet d’octroyer des avances aux exploitants d’aérodromes leur
permettant de faire face à leurs dépenses de sûreté et de sécurité, dans un
contexte de baisse drastique de leurs recettes du fait de la crise sanitaire ;
- à Île-de-France Mobilités (IDFM)
5
- programme 827.
L’objet de
ce programme est de permettre à l’État d’octroyer des avances
remboursables à IDFM, particulièrement touché par les conséquences de la
crise sanitaire résultant de la covid-19 ;
- aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à la suite des
conséquences de l’épidémie de la covid-19
6
- programme 828
. Ce
programme, dont la gestion est assurée par la direction générale des
finances publiques (DGFiP), est le support de versement des avances
remboursables de l’État aux AOM
7
autres qu’IDFM rencontrant une
situation financière difficile en raison des pertes de recettes liées à
l’épidémie de covid-19.
Conformément à l’article 24 de la loi organique relative aux lois de
finances (LOLF), si le montant de l’amortissement en capital des avances
est inscrit en recettes au compte de concours financiers, les intérêts sont,
pour leur part, des recettes inscrites au budget général.
Le directeur général du Trésor est responsable de tous les
programmes du compte de concours financiers, à l’exception du
programme 828 dont la responsabilité incombe au directeur général des
finances publiques.
4
Cf. article 29 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour
2020.
5
Cf. article 7 de la loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative
pour 2020.
6
Ibid
.
7
Ces AOM sont des collectivités territoriales.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
9
1
LES RÉSULTATS DE L’ÉXERCICE
1.1
Un solde annuel fortement déficitaire, qui
dégrade un solde cumulé déjà très négatif
Le solde du compte de concours financiers au terme de l’exécution
2020 (-2 619,5 M
€
) est nettement plus déficitaire que le solde prévu en loi
de finances initiale (-138,5 M
€
). Ce déficit fait suite à deux exercices
excédentaires (+ 95,8 M
€
en 2019 et + 103,1 M
€
en 2018).
Tableau n° 1 : soldes prévisionnels et réalisés en 2020
En M
€
Prog.
821
Prog.
823
Prog.
824
Prog.
825
Prog.
826
Prog.
827
Prog.
828
Compte
Recettes
LFI
8
10 000
109,542
121,993
15
-
-
-
10 246,535
Dépenses
LFI (CP)
9
10 000
320
50
15
-
-
-
10 385
Solde LFI
0
-210,458
+71,993
0
-
-
-
-138,465
Recettes
LFR
10
-
+34,736
-15,7
-
0
0
0
+19,036
Dépenses
LFR
-
+50
+1 400
-
+300
+1175
+750
+2 925
Recettes
enregistrées
8 108,2
89
106,3
0
0
0
0
8 303,5
Crédits
consommés
8 108,2
90
1 250
0
299,8
1 175
0
10 923,0
Solde
exécution
0
-1
-1 143,7
0
-299,8
-1 175
0
-2 619,5
Source : Cour des comptes d’après LFI et Chorus
8
LFI : loi de finances initiale.
9
CP : crédits de paiement.
10
LFR : lois de finances rectificatives 1, 2, 3 et 4.
10
COUR DES COMPTES
Les exercices excédentaires des dernières années résultaient
essentiellement du fait que le budget annexe
Contrôle et exploitation
aériens
(BACEA)
,
lourdement débiteur vis-à-vis du compte, se
désendettait depuis 2015.
L’exercice 2020 marque une rupture avec cette tendance, en raison
du soutien apporté par l’État,
via
le compte, au BACEA, aux exploitants
d’aéroport, ainsi qu’aux autorités organisatrices de la mobilité, très touchés
par les conséquences de la crise sanitaire.
La dégradation du solde entre la prévision et l’exécution procède
pour l’essentiel de la création, en cours d’exercice budgétaire, de trois
programmes (
i.e.
les programmes 826, 827 et 828) qui ont permis le
versement d’avances remboursables à hauteur de 1 474,8 M
€
11
et du
soutien au BACEA sous forme d’avance à hauteur de 1 250 M
€
contre
50 M
€
prévus en loi de finances initiale.
Compte tenu du solde 2020, le solde cumulé du compte se dégrade
très fortement, s’établissant à - 4 420,1 M
€
contre - 1 800,6 M
€
en 2019.
Graphique n° 2 : solde cumulé du compte depuis 2010 (en M
€
)
Source : Cour des comptes d’après lois de règlement et Chorus
Avant l’exercice 2020, le solde cumulé fortement déficitaire du
compte trouvait, pour une large part, son origine dans le versement, en
11
Le programme 828, créé en fin d’année budgétaire et doté de 750 M
€
de CP, n’a
cependant connu aucun mouvement de crédits.
-4500
-4000
-3500
-3000
-2500
-2000
-1500
-1000
-500
0
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
11
2010, d’une avance de 1,2 Md
€
à un fonds sans personnalité juridique
12
, le
fonds pour la société numérique (FSN)
13
prévu par le programme
d’investissements d’avenir, et dans le montant cumulé des avances
accordées au BACEA (cf.
infra
). Le FSN et le BACEA étaient en effet, au
31 décembre 2019, débiteurs du compte, respectivement à hauteur de
850 M
€
et 667,4 M
€
, soit un total de 1 517,4 M
€
, correspondant à 84,3 %
du déficit cumulé.
Initialement, l’avance au FSN devait être remboursée en totalité en
2020. En outre, le montant cumulé des avances au BACEA diminuait
régulièrement depuis un pic atteint en 2014 (cf.
infra
). Toutes choses égales
par ailleurs, le déficit cumulé du compte aurait donc dû se résorber
fortement sur l’exercice 2020.
Cependant, le remboursement de l’avance au FSN a été imputée sur
un autre programme budgétaire
14
et, en pratique, l’exercice 2020 a porté le
déficit cumulé du compte à un niveau inédit (cf. graphique n° 2) et pour
une période
a priori
assez longue.
En effet, les avances versées au BACEA (1 250 M
€
), aux
exploitants d’aéroport (299,9 M
€
), à Île-de-France mobilité (1 175 M
€
) ont
été consenties pour des durées comprises entre 10 et 12 ans (ce qui pose à
nouveau question au regard des dispositions de l’article 24 de la LOLF,
cf
.
2.1.1). Il en sera de même pour les avances aux autorités organisatrices
de la mobilité autres qu’Île-de-France Mobilités (750 M
€
de CP non
consommés en 2020 et reportés en 2021, le programme 828 ayant été créé
en fin d’année budgétaire par la quatrième loi de finances rectificative pour
2020).
12
Les fonds sans personnalité juridique sont des véhicules financiers contrôlés par
l’État ou d’autres personnes publiques et dont la gestion administrative et financière est
confiée à un tiers. Ces fonds permettent d’isoler comptablement des moyens
(subventions, taxes affectées) affectés à un objet particulier. Cet outil n’est toutefois ni
prévu par la LOLF ni par le décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire
et comptable publique.
13
Cette avance a été inscrite au programme 823 (services distincts de l’État) alors
qu’elle aurait dû l’être sur le programme 824 (services de l’État), ce fonds étant inscrit
au bilan de l’État.
14
Selon les indications données par la direction générale du Trésor,
« les services
travaillent pour proposer une solution à ce sujet »
.
12
COUR DES COMPTES
Tableau n° 2 : décomposition du solde cumulé au 31/12/2020 du
compte de concours financiers (en M
€
)
Programmes
Organismes bénéficiaires
Montant
résiduel en
capital à
rembourser au
31/12/2020
Date
prévisionnelle
de
remboursement
823
FSN
850,0
En cours de
traitement
823
Cité de la Musique
23,7
15/12/2027
15
823
AEFE
16
46,7
23/11/2029
823
CCI de Guyane
3,5
23/12/2030
823
FranceAgrimer
140,3
31/12/2021
823
France Télévisions
70,0
31/12/2024
824
BACEA
1 811,1
11/12/2030
826
86 exploitants d’aéroports
299,8
16/09/2030
827
Île-de-France Mobilités
1 175,0
31/12/2032
Total
4 420,1 M
€
Source : Cour des comptes d’après MEFR
Compte tenu du contexte auquel fait face le secteur aérien du fait de
la crise sanitaire
17
, la recommandation unique formulée en 2019, appelant
à la poursuite du désendettement du BACEA vis-à-vis du compte de
concours financiers n’est pas reconduite cette année. Pour autant, le
désendettement du BACEA à l’égard du compte de concours financiers
devra reprendre dès lors que le contexte économique sera revenu à une
situation d’avant-crise. La Cour s’assurera que cet objectif reste pris en
compte dans les trajectoires financières associées au budget annexe et au
compte spécial du Trésor.
15
En application de la décision du 3 mars 2020 rééchelonnant le reliquat de l’avance
consentie à la Cité de la musique - Philharmonie de Paris, la date de remboursement de
la dernière échéance a été fixée au 15 décembre 2027.
16
AEFE : Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
17
À cet égard, l’administration formule l’hypothèse d’une hausse de l’endettement du
BACEA de 838,7 M en 2021.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
13
1.2
La crise sanitaire s’est répercutée sur le
montant des avances versées
via
le compte de
concours financiers
Le fonctionnement du compte de concours financiers se caractérise
habituellement par une moindre consommation des crédits assez marquée
entre la prévision et l’exécution budgétaires en raison des modalités de
fonctionnement du programme 821 (cf.
infra
).
En 2020, le montant des crédits ouverts en loi de finances initiale,
au profit du compte de concours financiers
Avances à divers services de
l’État ou organismes gérant des services publics
s’est élevé à
10 246,535 M
€
pour une consommation de 10 923 M
€
, supérieure de
676,67 M
€
à l’autorisation parlementaire initiale, soit 6,6 % de plus, contre
28 % de moins en 2019.
Ce résultat procède de deux composantes principales qui jouent en
sens contraire.
Si le montant des avances versées à l’ASP (programme 821) a été
inférieur de 1 891,8 M
€
à la prévision de dépenses (le montant de
10 000 M
€
demandé en loi de finances initiale comprenait une marge de
sécurité pour garantir la continuité du paiement des aides agricoles
18
), de
nombreuses dépenses imprévues, directement liées à la crise sanitaire, sont
intervenues en cours d’exécution.
À cet égard, il convient de rappeler que l’écart à la prévision constaté
sur le programme 821 est sans conséquence sur le solde budgétaire. Il
s’inscrit, en outre, dans un contexte de variation prononcée des demandes
d’avances de l’ASP (6,5 Md
€
en 2015, 13,5 Md
€
en 2016, 14 Md
€
en
2017, 14,9 Md
€
en 2018, 8,08 Md
€
en 2019).
En revanche, un écart plus substantiel à la prévision résulte de la
création en cours d’exercice budgétaire des programmes 826 et 827,
lesquels ont versé des avances aux exploitants d’aéroports (299,8 M
€
),
ainsi qu’à Île-de-France Mobilités (1 175 M
€
), opérateurs publics dont
l’activité a fortement subi les conséquences de la crise sanitaire. Il en est
de même pour le programme 824
Avances à des services de l’État
. Alors
que la loi de finances initiale avait ouvert un montant de crédits de 50 M
€
,
le montant de l’avance octroyée au BACEA a été de 1 250 M
€
, ce dernier
18
Comme pour les exercices précédents.
14
COUR DES COMPTES
connaissant une forte attrition de ses recettes du fait des mesures sanitaires
conduisant à une réduction drastique du trafic aérien.
Sur le programme 823
Avances à des organismes distincts de l’État
et gérant des services publics
, la loi de finances initiale a ouvert un montant
de crédits de 320 M
€
, répartis en quatre enveloppes, consommés à hauteur
de 90 M
€
.
La première enveloppe de 100 M
€
, ouverte pour faire face à
d’éventuels besoins de financement urgents et imprévus d’entités
publiques, n’a pas été utilisée.
La seconde enveloppe de 150 M
€
a été ouverte pour faire face aux
besoins de trésorerie de FranceAgrimer afin de poursuivre la mise en
œ
uvre
du mécanisme communautaire de stockage public sur le marché du lait.
Cependant, en raison de l’évolution de la trésorerie de l’organisme,
l’avance n’a pas été utilisée.
La troisième enveloppe de 50 M
€
, consommée à hauteur de 20 M
€
,
a été ouverte par la troisième loi de finances rectificatives pour 2020 afin
de permettre à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE)
de venir en aide aux établissements d’enseignement mis en difficultés par
la crise sanitaire, quel que soit leur statut (établissements en gestion directe,
établissements conventionnés et établissements partenaires)
19
. Cette
avance est accordée pour une durée maximale d’un an.
La dernière enveloppe de 70 M
€
, entièrement consommée, a été
ouverte au profit de France Télévisions dans le cadre du financement de
son plan de transformation.
Alors qu’une enveloppe de crédit de 15 M
€
avait été allouée au
programme 825, aucune avance n’a été versée, ce dernier ayant de nouveau
été « inactif » en 2020
20
.
Au total, le montant des avances versées
via
le compte de concours
financiers en lien avec la crise sanitaire s’élève à 2 694,8 M
€
.
Le remboursement des avances versées à Ile-de-France Mobilités
s’étalera de 2023 à 2032, à raisons d’échéances annuelles de 117,5 M
€
. À
titre dérogatoire, si la situation financière de l’établissement le justifie, ce
dernier pourra, sur la période 2023-2028, ajuster à la baisse ses
19
Ces ouvertures sont complétées par 50 M
€
de crédits ouverts sur le Programme
n° 185
Diplomatie culturelle et d'influence
.
20
Depuis 2011, date de création du programme 825, les enveloppes prévues
(15 M
€
/ an) n’ont jamais été utilisées, les laboratoires Servier ayant indemnisé
l’ensemble des victimes. Si, en 2017, les laboratoires Servier ont refusé l’indemnisation
dans deux dossiers, les plaignants n’ont pas sollicité l’ONIAM.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
15
remboursements jusqu’aux seuils suivants : 30 M
€
en 2023 et 2024, 40 M
€
en 2025, 60 M
€
en 2026, 80 M
€
en 2027, 90 M
€
en 2028. Si tel était le cas,
le remboursement complet de l’avance s’étalerait de 2023 à 2036. Ces
échéances devront se combiner avec celles de sa dette préexistante liée à
sa politique d’investissement (1,93 Md
€
en 2018). Sur ce point, les
juridictions financières ont déjà pu souligner que si les emprunts souscrits
à cette fin étaient
« peu risqués, diversifiés (…) et contractés en période de
taux bas
.
La soutenabilité de la dette [restait] néanmoins sujette aux
variations de l’autofinancement qui sont sensibles à la conjoncture et à la
fréquentation des transports
. »
21
Le remboursement des avances versées, en 2020, au BACEA débute
dès 2021 pour se terminer en 2030. À l’instar, d’Île-de-France Mobilités,
il doit également se combiner avec le remboursement de la dette
préexistante (667,40 M
€
en 2020). Sur la base de l’échéancier actuel, les
remboursements annuels les plus importants en montant (221,92 M
€
)
interviendront entre 2021 et 2024, dans un contexte où le retour à la
normale du trafic aérien, qui génère l’essentiel des ressources du budget
annexe, reste incertain.
Le remboursement des avances versées à 86 exploitants d’aéroports
via
le programme 826 s’étalera de 2024 à 2030, à raison d’un montant
annuel global de 42,82 M
€
. Les capacités de remboursement des
exploitants d’aéroports, tout comme pour le BACEA, sont intrinsèquement
liées à un retour à la normale du trafic aérien.
Le remboursement des avances aux autorités organisatrices de la
mobilité, dont le versement est prévu en 2021, pour un montant total
maximal de 750 M
€
, repose sur des règles fixées par l’article 10 de la
LFR 4 pour 2020. En pratique, les collectivités bénéficiaires pourront
commencer à rembourser les avances reçues au moment où leurs recettes
tarifaires et le versement mobilité seront chacun revenus à un niveau
correspondant à leur moyenne des montants perçus en 2017, 2018 et 2019
(clause dite de retour à meilleure fortune). Ce remboursement ne pourra
être effectué sur une durée inférieure à six ans, sauf accord du débiteur, la
date limite du remboursement complet de l’avance ne pouvant être
ultérieure au 1
er
janvier 2031. Comme pour les cas précités, le mécanisme
de remboursement dépend du retour à la normale de l’activité.
21
Cf.
Syndicat des transports d’Ile-de-France, Ile-de-France Mobilités,
Chambre
régionales des comptes Ile-de-France, exercices 2013 et suivants, mai 2020. Disponible
sur www.ccomptes.fr.
16
COUR DES COMPTES
Le remboursement du capital dû au titre des avances accordées aux
exploitants d’aéroports est conditionné au rétablissement des recettes de la
taxe aéroport. Compte-tenu de l’incertitude sur la reprise du trafic aérien,
le retour à l’équilibre n’est prévu qu’à moyen terme. Les avances ont donc
été consenties pour une durée de dix ans, incluant un différé de
remboursement de trois ans afin de ne pas pénaliser à court terme la
situation financière des aéroports. Ainsi, les remboursements en capital ne
débuteront qu’à partir de l’année 2024. De même, le remboursement de
l’avance accordée à IDFM débutera en 2023, afin de préserver à court
terme le niveau de service, et à moyen et long termes le programme
d’investissement nécessaire à l’aménagement du territoire francilien.
Contrairement aux exploitants d’aéroports et à IDFM, le BACEA a
bénéficié d’avances avant 2020 (encours de 667 M
€
fin 2019). En cas de
report à 2023 ou 2024 du remboursement des avances accordées en 2020,
les échéances plus élevées que celles retenues se seraient ajoutées d’ici
trois ou quatre ans aux échéances des avances antérieures à 2020. La
solution retenue est de lisser les remboursements afin de préserver la
soutenabilité de la dette du BACEA à moyen terme. Par ailleurs, les
flexibilités de gestion des avances du BACEA introduites depuis 2016 ont
été reconduites en 2020, où les conventions signées prévoient une durée
d’amortissement flexible et des remboursements anticipés, envisageables
dès la reprise du trafic aérien.
1.3
Des recettes inférieures de près 19 % à la
prévision initiale
Le montant des recettes attendues en 2020 était de 10 246,535 M
€
pour des recettes réalisées de 8 303,5 M
€
, soit un écart de 19 %.
Sur le programme 821, les recettes en provenance de l’ASP ont été
nettement inférieures aux prévisions, à hauteur de la baisse du montant des
avances versées (le versement des avances à l’ASP et leur remboursement
intégral ayant lieu sur le même exercice budgétaire). L’écart de recettes du
programme 821 représente à lui seul 97,4 % de l’écart à la prévision, sans
que cet écart prête à conséquence.
Sur le programme 823, les recettes ont été inférieures de 20,6 M
€
,
essentiellement par l’effet de trois composantes.
Tout d’abord, la réserve d’urgence d’un montant de 100 M
€
,
destinée aux situations d’urgence, décaissée et remboursée dans l’année,
n’a pas été utilisée d’où une moindre recette de 100 M
€
par rapport à la
prévision budgétaire.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
17
En sens inverse, deux avances d’un montant total de 45 M
€
,
octroyées en novembre 2019 au Fonds d’assurance formation des chefs
d’entreprise artisanale (FAFCEA) et à CMA France (établissement
national du réseau des Chambres de métiers et de l'artisanat) n’étaient pas
connues lors de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2020. Par
conséquent leur remboursement courant 2020 n’était pas intégré dans la
prévision budgétaire, d’où une recette de 45 M
€
non programmée.
Pour finir, deux avances accordées à l’Institut Mines Télécom (IMT)
en 2018 et 2019, pour un total de 44,7 M
€
qui auraient dues être
remboursées en totalité en 2019 ne l’avaient été qu’au hauteur de 10 M
€
.
Le remboursement du reliquat en 2020, non intégré dans la prévision
budgétaire de 2020, a engendré une recette de 34,7 M
€
non prévue en loi
de finances initiale.
Sur le programme 824, les recettes issues du BACEA ont été
inférieures de 15,7 M
€
. La bonne situation de trésorerie du BACEA avait
en effet permis, en 2019, de procéder à 15,7 M
€
de remboursements
anticipés sur des échéances prévues en 2020. Ces remboursements
anticipés, qui avaient amélioré le solde du programme 824 de 15,7 M
€
en
2019, ont dégradé le solde du compte du même montant en 2020.
Sur le programme 825, l’inactivité du dispositif explique pour
15 M
€
l’écart négatif à la prévision.
18
COUR DES COMPTES
2 LA
GESTION
DU
COMPTE
DE
CONCOURS FINANCIERS
2.1
Des avances du compte de concours financiers
qui s’écartent des dispositions de l’article 24 de
la loi organique relative aux lois de finances
2.1.1 Des prêts accordés par l’État au moyen d’un compte
d’avances
L’article 46 de la loi de finances pour 2006, qui institue le compte
de concours financiers, prévoit que ce dernier permet l’octroi d’« avances »
sans mentionner la possibilité d’accorder de « prêts », à la différence, par
exemple, du compte de concours financiers
Prêts et avances à des
particuliers ou à des organismes privés
, qui évoque l’octroi de « prêts »,
conformément à la distinction opérée par l’article 24 de la LOLF.
Ni la LOLF, ni l’article 46 de la loi de finances pour 2006 ne
définissent les durées respectives des prêts et des avances. Toutefois, le
recueil des normes comptables de l’État
22
indique que
« les prêts sont
accordés pour une durée supérieure à quatre ans ; les avances sont
octroyées par l’État pour une durée de deux ans, renouvelable une fois sur
autorisation expresse. »
Dès lors, dans le silence de la LOLF et de la loi de finances, la
définition du recueil des normes comptables de l’État, postérieure à ces
deux textes, est opposable.
Or, dans le passé,
via
le compte, des « avances » ont été accordées
pour une durée très nettement supérieure à deux ans (10 ans initialement
pour le FSN, 12 ans pour le BACEA, 15 ans pour la chambre de commerce
et d’industrie de Guyane, par exemple), ce qui les classe dans la catégorie
des prêts selon la définition du recueil des normes comptables de l’État.
Au regard de ces éléments, la Cour rappelle depuis plusieurs années,
qu’il serait nécessaire soit d’ajuster le fonctionnement du compte au droit
en vigueur, et donc cesser d’accorder des avances d’une durée supérieure
à quatre ans, soit d’autoriser des prêts,
via
une disposition de loi de
finances, dans le cadre du compte de concours financiers. Sur ce point, les
avances accordées au FAFCEA et à CMA France en 2019 pour une durée
d’un an, celles accordées à l’AEFE pour une durée d’un an et à France
22
Dans sa dernière version, issue de l’arrêté ministériel du 24 juillet 2018.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
19
Télévisions pour une durée de quatre ans témoignent d’un ajustement du
fonctionnement du compte.
Dans le même temps, l’exercice 2020, certes atypique, conforte le
constat et cette exigence de mise en conformité des pratiques avec le droit
ou d’adaptation du cadre juridique. En effet, les avances accordées au
BACEA l’ont été pour une durée de 10 ans, celles accordées dans le cadre
des programmes 826, 827 et 828
23
ont des durées comprises entre 10 et 12
ans.
2.1.2 Un remboursement d’avances au moyen de nouvelles
avances, sans durée réellement déterminée
L’article 24 de la LOLF dispose que les prêts et avances sont
accordés pour une durée déterminée. À défaut de remboursement à
l’échéance, le remboursement doit être poursuivi, la dette rééchelonnée ou
la perte constatée.
Même si la direction générale du Trésor fait valoir que les avances
versée au BACEA ont toujours répondu à un besoin de trésorerie
précisément identifié et n’étaient accordées que si une ressource certaine
permettait leur remboursement, dans les faits, l’octroi d’une nouvelle
avance tous les ans au BACEA conduisait à repousser indéfiniment le
terme réel de remboursement du stock des avances.
Ces modalités de fonctionnement, qui ont longtemps caractérisées
les relations entre le compte de concours financiers et le BACEA,
contrevenaient aux dispositions précitées de l’article 24 de la LOLF, ce qui
avait conduit la Cour à recommander de proscrire ce mécanisme.
L’exercice 2018 a cependant marqué une inflexion positive :
l’avance de 87,2 M
€
prévue en LFI n’avait finalement pas été versée, tout
comme en 2019. Par conséquent, compte tenu des remboursements
effectués depuis 2014, le stock des avances octroyées au BACEA
connaissait une diminution soutenue bien qu’à un niveau encore élevé (cf
.
graphique ci-après).
L’exercice 2020 met fin au désendettement du BACEA, sa dette
atteignant 1 811,1 M
€
fin 2020, contre 667,4 M
€
fin 2019. Selon
l’administration, l’endettement pourrait encore croître de 838,7 M
€
en
2021.
23
On peut relever que le décret n° 2020-1528 du 7 décembre 2020 (cf.
infra
) permettant
d’accorder, à titre dérogatoire, une avance sans intérêts à Île-de-France Mobilités
qualifie celle-ci de « prêt ».
20
COUR DES COMPTES
L’endettement du BACEA vis-à-vis du compte du compte de
concours financiers
La dette du BACEA vis-à-vis du compte a atteint à niveau inédit en
2020.
Graphique n° 3 : Dette du BACEA (en M
€
)
Source : Cour des comptes, d’après AFT
L’endettement du BACEA est constitué depuis 2005 exclusivement
d’avances souscrites auprès de l’AFT, dont la durée initiale était de 12 ans.
Depuis 2017, elles sont plafonnées à 10 ans. Ces avances du Trésor sont
notamment mobilisées pour financer des insuffisances momentanées de
trésorerie. Le recours à des avances de long terme pour remédier à des
difficultés de trésorerie à court terme n'est pas satisfaisant. Le recours à
l’endettement de long terme devrait être limité au financement des
investissements et le niveau du plafond d’autorisation annuel d’emprunt
devrait être justifié dans les documents budgétaires par les programmes
d’investissement prévus.
0
200
400
600
800
1000
1200
1400
1600
1800
2000
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
21
2.2
Une démarche de performance centrée sur la
conformité juridique du fonctionnement du
compte
L’objectif
24
assigné au compte de concours financiers est de
respecter les règles d’emploi des avances découlant des dispositions de
l’article 24 de la LOLF.
La mise en
œ
uvre de cet objectif s’analyse au moyen de deux
indicateurs
25
mesurant la neutralité des avances pour le budget de l’État
d’une part, et le respect des conditions de durée des avances, d’autre part.
Ces deux indicateurs n’intègrent pas de dimension environnementale dans
leurs objectifs et calcul.
Le premier indicateur (intitulé « respect de la règle de neutralité
budgétaire des opérations, pour l’État »), identifie le nombre d’avances du
Trésor qui ont nécessité la prise d’un décret en Conseil d’État pour déroger
à la règle du taux d’intérêt neutre pour l’État.
Depuis 2013, en application des dispositions du décret n° 2013-909
du 10 octobre 2013 (ci-après le décret du 10 octobre 2013) exonérant
d’intérêts les avances de l’État à l’ONIAM au titre de l’indemnisation des
victimes du Médiator, les avances accordées à l’ONIAM ne donnent pas
lieu au paiement d’intérêts. Ainsi, entre 2013 et 2018, la cible a été fixée à
un, partant du constat des dispositions en vigueur du décret du 10 octobre
2013, sans possibilité pour l’administration de s’améliorer.
En 2019, cette cible avait été portée à deux car un projet de décret
prévoyait la possibilité d’appliquer un taux dérogatoire à l’avance du
programme 823 octroyée à la Cité de la Musique.
La cible a été maintenue à deux en 2020. Cependant, alors qu’il est
apparu que la dette de la Cité de la Musique pouvait être rééchelonnée sans
porter préjudice aux intérêts financiers de l’État, au regard de
l’environnement de taux, un décret a été nécessaire (cf. décret
n° 2020-1528 du 7 décembre 2020) pour l’avance sans intérêts accordée à
Île-de-France Mobilités, compte tenu du niveau de taux des titres d’État de
même horizon que l’avance (16 ans), entre 0,1 % et 0,2 %, quand a été
arrêté le principe de l’avance. Il est à relever que, lors du versement de
l’avance, le taux des titres d’État à 16 ans évoluant entre 0 % et -0,1 %, le
24
Tel que mentionné dans la documentation budgétaire.
25
Ce sont des indicateurs de mission.
22
COUR DES COMPTES
taux de l’avance octroyée à Île-de-France Mobilités ne portait finalement
pas un préjudice financier à l’État.
Tableau n° 3 : Résultats de l’indicateur « respect de la règle de
neutralité budgétaire des opérations, pour l’État » (2012-2020)
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Cible
0
1
1
1
1
1
1
2
26
2
Réalisation
0
1
1
1
1
1
1
1
2
Source : Cour des comptes d’après annexes budgétaires du compte de concours financiers
Le second indicateur (intitulé « respect des conditions de durée des
avances du Trésor ») mesure le nombre d’avances ayant donné lieu à
renouvellement, recouvrement immédiat ou poursuite à cette fin,
rééchelonnement, poursuites ou constatation de perte probable.
Cet indicateur, dès lors qu’il n’est pas combiné à un indicateur
rendant compte du coût des incidents de remboursement, traite de façon
équivalente, des défauts de paiement aux conséquences budgétaires
éventuellement très différentes. Il convient de relever au passage que la
situation du BACEA n’est pas comptabilisée, par l’administration, comme
contraire au respect des conditions de durée des avances du Trésor, ce qui
est contestable.
En 2020, la cible fixée à 0 n’a pas été atteinte, du fait du
rééchelonnement de l’avance accordée à la Cité de la musique, finalisé en
mars 2020.
Tableau n° 4 : Résultats de l’indicateur « respect des conditions de
durée des avances du Trésor » (2012-2020)
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Cible
1
1
1
1
3
2
1
1
27
0
Réalisation
0
1
1
1
1
0
0
1
1
Source : Cour des comptes d’après annexes budgétaires du compte de concours financiers
26
La cible a été actualisée en cours d’année, la cible initiale étant fixée à un.
27
La cible a été actualisée en cours d’année, la cible initiale étant fixée à zéro.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
23
Alors que fonctionnement du compte n’est pas exempt de critique
sur le plan juridique (cf. chapitre 2.1.1), les indicateurs utilisés visent à
rendre compte du respect des dispositions de l’article 24 de la LOLF. Ils ne
mesurent donc pas la performance telle qu’entendue par la loi organique.
Il convient cependant de relever que, à compter de 2021, deux
indicateurs de performance appariés au programme 828 s’ajouteront
aux indicateurs susmentionnés. Le premier mesurera la rapidité de mise
en
œ
uvre du mécanisme des avances remboursables au profit des AOM
(
i.e.
indicateur intitulé
taux de consommation des crédits au 31/12/2020
et au 30/06/2021
), le second rendra compte des conditions de leur
remboursement (
i.e.
indicateur intitulé
taux de remboursement des
crédits par les collectivités bénéficiaires au 31/12/2021 puis au 31/12
de chaque année
).
24
COUR DES COMPTES
3
LES RECOMMANDATIONS DE LA
COUR
3.1
Le suivi des recommandations formulées au
titre de 2019
1. Poursuivre et accélérer le désendettement du budget annexe Contrôle et
exploitation aériens à l’égard du compte de concours financiers
(recommandation 2018 reconduite).
Le BACEA a poursuivi une trajectoire de désendettement de
2015 à 2019. Il en est résulté une baisse de l’encours des avances au
bilan du BACEA, qui s’élevait en 2019 à 667,4 M
€
, contre 1 281 M
€
en 2014. Cette stratégie de désendettement était appelée à se poursuivre
en 2020 (cf
.
disposition de la loi de finances initiale pour 2020).
Cependant la crise sanitaire ayant fortement réduit les recettes du
BACEA provenant essentiellement du trafic aérien, 1 250 M
€
d’avances lui ont été versées, mettant fin au désendettement entamé en
2015. Il est à signaler que le niveau d’emprunt du BACEA devrait rester
important sur les exercices 2021 et 2022, compte tenu des prévisions de
trafic aérien.
La recommandation, qui n’a donc pas pu être mise en
œ
uvre en
2020 dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire, n’est pas
reconduite cette année. La Cour reste
néanmoins attentive à ce que cet
objectif demeure pris en compte dans les trajectoires financières associées
au budget annexe et au compte spécial du Trésor
.
3.2
Récapitulatif des recommandations formulées
au titre de la gestion 2020
Aucune recommandation n’est formulée au titre de l’exercice
2020.
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
25
Annexe n° 1 : Liste des publications récentes de la Cour
des comptes en lien avec les politiques publiques
concernées par la NEB (disponibles sur www.ccomptes.fr.)
Budget annexe publications officielles et information administrative,
résultats et gestion 2019 (avril 2020)
Rapport public annuel 2018 - La politique de prévention des infections
associées aux soins : une nouvelle étape à franchir (février 2020)
Les aides directes du Fonds européen agricole de garantie (janvier 2019)
La chaîne de paiement des aides agricoles (octobre 2018)
Rapport public annuel 2017 - L’indemnisation amiable des victimes
d’accidents médicaux : une mise en
œ
uvre dévoyée, une remise en ordre
impérative (février 2018)
Rapport public annuel 2017 - Le projet Paris-Saclay : le risque de dilution
d’une grande ambition (février 2018)
L’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (octobre 2017)
26
COUR DES COMPTES
Annexe n° 2 : Suivi de la recommandation formulée au
titre de l’exécution budgétaire 2018
N° 2018
Recommandation
formulée au sein
de la note
d’exécution
budgétaire 2019
Réponse de l’administration
Analyse de la Cour
Appréciation
par la Cour
du degré de
mise en
œ
uvre*
1
Poursuivre et
accélérer le
désendettement du
budget annexe
Contrôle et
exploitation aériens
à l’égard du compte
de concours
financiers
(recommandation
2018 reconduite).
Le Gouvernement rejoint la Cour sur l’objectif de
désendettement progressif du BACEA en dégageant
durablement une capacité d4autofinancement adéquate.
Au regard des risques sur le volume des recettes, cette
capacité repose donc avant tout sur la maîtrise des
charges HT2 et les efforts de productivités des dépenses
T2 dans un contexte où le niveau des investissements en
faveur de la navigation aérienne atteint un haut niveau.
À ce titre, le Gouvernement est attaché à la recherche
d'économies
structurelles
et
d’efforts
d’efficience
permettant d'améliorer la productivité du budget annexe
de l'aviation civile et de permettre son désendettement.
C'est d'ailleurs dans cet esprit que, devant un niveau
suffisant de recettes d’exploitation, aucune avance
n’avait été versée en 2018 et2019 alors que les montants
remboursés ont été respectivement de 172,8 M
€
et
137,7 M
€
. Le montant e l’encours de dette du budget
annexe fin 2019 a ainsi pu être réduit à 667,4 M
€
.
Le
BACEA
a
poursuivi
une
trajectoire
de
désendettement de 2015 à 2019. Le stock d’avances à
rembourser est passé de 1 281,5 M
€
en 2014 à 667,4 M
€
en 2019.
Le désendettement figurait parmi les priorités pour 2020.
Le montant de crédits (AE=CP) de remboursement
d’emprunt ouverts en LFI 2020 était de 122 M
€
alors que
les remboursements attendus s’élevaient finalement à
106,3 M
€
du fait de remboursement anticipés réduisant
la trajectoire contractuellement définie. La bonne santé
financière du BACEA avait permis fin 2019 de procéder
à 15,7 M
€
de remboursements anticipés sur des
échéances prévues en 2020 par redéploiement de crédits.
Symétriquement, le BACEA disposait d’une faculté
d’emprunt de 50 M
€
permettant un désendettement
minimal de 56,3 M
€
.
Si l’administration fait état de
sa volonté de désendetter le
BACEA vis-à-vis du compte
de
concours
financiers,
l’exercice 2020 a vu croître
fortement
l’endettement
du
BACEA en raison de l’impact
de la crise sanitaire sur le trafic
aérien et subséquemment sur
ses recettes.
Dans
ce
contexte
exceptionnel,
la
recommandation n’a pas été
mise en
œ
uvre.
Non mise en
œ
uvre
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS AVANCES À DIVERS SERVICES DE
L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
27
Les ressources du budget annexe sont dans leur quasi-
totalité fonction des vols (redevances de navigation
aérienne) et des passagers (taxe d’aviation civile). Ainsi
en 2020, la pandémie de covid-19 a entraîné une chute
du trafic aérien d’environ 70 % par rapport à son niveau
de 2019, engendrant un niveau de recettes exécutées
pour le BACEA s’élevant à 853 M
€
, soit une baisse de
1 212 M
€
(- 58 %) par rapport à la LFI 2020 (2 065 M
€
).
En conséquence, afin de permettre l’exécution en 2020
des dépenses du BACEA peu flexibles à court terme, un
montant cumulé de 1 250 M
€
d’avances a été octroyé sur
le programme 824 au profit du BACEA, portant son
endettement à 1 800 M
€
à fin 2020. Ce montant a été
autorisé en plusieurs étapes : une première avance de 50
M
€
a été permise par la loi de finances initiale pour 2020
; 500 M
€
supplémentaires ont été ajoutés en loi de
finances rectificative n°1 pour 2020, portant ainsi les
crédits totaux à 550 M
€
, dans l’attente d’ouvertures
complémentaires ultérieures une fois l’impact de la crise
sanitaire mieux chiffré. Enfin, 700 M
€
supplémentaires
ont été octroyés sur le P824, en loi de finances
rectificative
n° 2
pour
2020,
compte
tenu
de
l’aggravation du besoin de financement réévalué en juin
à 1 550 M
€
par la Direction générale de l’Aviation
civile. Les modalités de remboursement sont consignées
dans deux conventions d’avances, l’année limite de
remboursement étant fixée à 2030.
Enfin, ce montant d’avances a été octroyé en trois tirages
par
l’AFT :
en
avril
puis
juillet
pour
400 M
€
respectivement, et enfin en octobre pour 450 M
€
. Ainsi
au 31 décembre 2020, le niveau de trésorerie nette était
de 441,7 M
€
; à fin 2021, une trésorerie nette de 250 M
€
est ciblée.
La hausse de l'endettement du BACEA va se poursuivre
en 2021, compte tenu d’un trafic prévisionnel estimé à
ce stade à - 54 % par rapport au niveau de 2019, mais
faisant l’objet d’une très forte incertitude. Compte tenu
des trois tirages intervenus en 2020, le montant de
remboursements d’emprunt pour 2021 s’élève à 236 M
€
(221,9
€
de
capital
et
14,1
M
€
d’intérêts).
Symétriquement, le BACEA dispose d’une faculté
d’emprunt maximale de 1 060,6 M
€
en LFI 2021, ce qui
pourrait augmenter l’endettement de 838,7 M
€
. Le
montant de l’encours de dette du budget annexe fin 2021
28
COUR DES COMPTES
devrait ainsi être porté à 2 649,8 M
€
au maximum.
Cependant en tout état de cause, l’évolution de la
situation sanitaire nécessitera un réexamen en cours
d’année des besoins d’emprunt du budget annexe.
Au vu des prévisions de reprise progressive du trafic sur
les prochaines années, et d'un retour du trafic aérien à
son niveau de 2019 qui ne devrait pas advenir avant
2024,
le
niveau
d'emprunt
devrait
rester
exceptionnellement important sur les exercices 2021 et
2022.
Dans ce contexte de forte hausse de l’endettement du
budget annexe, le Gouvernement entend réduire ce
dernier en optimisant les dépenses du budget annexe et
affectant une part des produits de la reprise du trafic
aérien à cette fin. Afin d’éclairer cette problématique,
une
mission
d’inspection
IGF-CGEDD
prochaine
devrait permettre d’examiner les pistes à moyen terme
de retour à l’équilibre du budget annexe et de
remboursement de sa dette.
* Totalement mise en
œ
uvre, mise en
œ
uvre en cours, mise en
œ
uvre incomplète, non mise
en
œ
uvre, refus, devenue sans objet