Sort by *
Jugement n° 2020-0019
page 1 sur 4
500, avenue des États du Languedoc
CS 70755
34064 MONTPELLIER CEDEX 2
T +33 4 67 20 73 00
occitanie@crtc.ccomptes.fr
Sections réunies
Jugement n° 2020-0019
Audience publique du 10 décembre 2020
Prononcé du 18 décembre 2020
CENTRE HOSPITALIER
DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE
Poste comptable : Centre des finances publiques de
Villefranche-de-Rouergue
N° codique : 012045 990
Exercice 2016
La République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
VU les comptes, rendus en qualité de comptable du centre hospitalier de Villefranche-de-Rouergue, par
M.
X…, pour l’exercice 2016
;
VU le réquisitoire n° 2020-0015, pris le 1
er
septembre 2020 et notifié le 7 septembre 2020, par lequel le
procureur financier près la chambre régionale des comptes a saisi la juridiction de charges présomptives
à l’encontre de M. X…
au titre d’opérations
relatives
à l’exercice
2016 ;
VU les justifications produites au soutien du compte ;
VU l’arrêté
du Premier Président
de la Cour des comptes du 12 décembre 2017 délégant compétence
aux chambres régionales des comptes pour le jugement des comptes des établissements publics de
santé ;
VU
l’article 60 modifié de la loi de finances
n° 63-156 du 23 février 1963 ;
VU le code des juridictions financières ;
VU les lois et règlements applicables aux établissements publics de santé ;
VU le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article
60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l'article 90 de la loi n° 2011-1978
du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
VU les observations écrites présentées par M.
X…
;
VU les observations écrites présentées par le directeur du centre hospitalier de Villefranche-de-
Rouergue ;
VU le rapport de M. Nicolas-Raphaël FOUQUE, premier conseiller, magistrat
chargé de l’instruction
;
Jugement n° 2020-0019
page 2 sur 4
500, avenue des États du Languedoc
CS 70755
34064 MONTPELLIER CEDEX 2
T +33 4 67 20 73 00
occitanie@crtc.ccomptes.fr
VU les conclusions de M. Denys ECHENE, procureur financier près la chambre ;
VU les autres pièces du dossier ;
EN
TENDU, lors de l’audience publique du
10 décembre 2020, M. Nicolas-Raphaël FOUQUE, premier
conseiller, en son rapport, et M. Denys ECHENE, en ses conclusions ;
ENTENDU, lors de l’audience publique du
10 décembre, M.
X…
, comptable du centre hospitalier de
Villefranche-de-Rouergue ;
Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier près la chambre, le directeur
du centre hospitalier de Villefranche-de-Rouergue
n’étant
ni présent ni représenté
à l’audience publique
;
Considérant ce qui suit :
Sur la présomption de charge unique,
soulevée à l’encontre de
M.
X…, au titre de l’exercice
2016 :
Sur le réquisitoire
1.
Le réquisitoire porte sur les trois titres ci-
dessous figurant sur l’état des restes à recouvrer
du compte
4111 du budget B0 (unité de soins de longue durée) du centre hospitalier de Villefranche-de-Rouergue au
31 décembre 2016 pour un montant total de 5 257,98
:
N° titre
Date de prise
en charge
Diligence(s)
Date
Prescription le
Montant
50008
24/02/2012
Mise en demeure
28/04/2012
28/04/2016
1
791,18 €
50106
16/03/2012
’’
’’
26/05/2012
26/05/2016
1
675,62 €
50203
13/04/2012
’’
’’
23/06/2012
23/06/2016
1
791,18 €
5
257,98 €
2.
En vertu
des dispositions de l’article L.
1617-5-3° du code général des collectivités territoriales
, l’action
en recouvrement de ces créances avait vocation à se prescrire dans un délai de quatre ans à compter de
leur prise en charge, sauf encaissement, reconnaissance de dette ou diligence(s) interruptive(s) relançant
le délai quadriennal.
3.
Pour chacun de ces titres, la seule diligence interruptive a consisté en une mise en demeure émise
en 2012
, c’est
-à-dire la même année que la prise en charge des titres. Aucune autre mesure de
recouvrement
n’a été enregistrée par la suite.
Il en résulte que tous les titres ont été atteints par la
prescription de l’action en recouvrement au cours de l’exe
rcice 2016.
4.
Compte tenu de ses obligations
prévues par l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et par l’article 18
du décret du 7 novembre 2012, le comptable
est tenu de mettre en œuvre des diligences adéquates,
complètes et rapides pour recouvrer les titres de recettes ; à défaut sa responsabilité peut être engagée.
5.
M.
X…
a été seul en charge du poste a
u cours de l’exercice 2016. I
l était également en fonctions lors
de la prise en charge des titres. La compromission du recouvrement est donc intervenue durant sa gestion
et sous sa responsabilité.
6.
L’épuisement du délai de prescription faute d’événement ou de diligence interruptifs compromet
gravement, si ce n’est irrémédiablement, le recouvrement d’un titre
. Cette prescription constitue donc,
pour le comptable sous la gestion duquel
elle intervient, le fait générateur d’un manquement présomptif
qui justifie la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire.
Jugement n° 2020-0019
page 3 sur 4
500, avenue des États du Languedoc
CS 70755
34064 MONTPELLIER CEDEX 2
T +33 4 67 20 73 00
occitanie@crtc.ccomptes.fr
7.
Ainsi, la responsabilité de M.
X…
pourrait être engagée au titre de l’exercice 2016 jusqu’à concurrence
d’une somme
de 5 257,98
€.
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
8.
A
ux termes des alinéas 1 à 3 de l’article 60
-I de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables
publics sont personnellement et pécuniairement responsables, entre autres, du recouvrement des
recettes,
et leur responsabilité se trouve engagée dès lors que, notamment, une recette n’a pas été
recouvrée.
9.
L’article 18 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique
dispose que les comptables sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de
recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs.
10. Au regard de ces obligations, et conformément à une jurisprudence constante, les comptables doivent
app
orter la preuve des diligences adéquates, complètes et rapides qu’ils ont engagées pour obtenir le
recouvrement des créances prises en charge. À défaut, leur responsabilité peut être engagée.
11. Aux termes
des dispositions de l’article
L. 1617-5-3° du code général des collectivités territoriales,
l’action des comptables publics chargés de recouvrer les créances se prescrit par quatre ans à
compter de la prise en charge du titre de recettes. Ce délai de quatre ans est interrompu par tous
actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de prescription.
Sur les faits et sur les éléments à la charge et à la décharge du comptable
12.
L’état
des restes à recouvrer au 31 décembre 2016 ne fai
t état que d’une seule
mesure interruptive
de prescription pour chacun des titres : une mise en demeure émise en 2012.
13. Le comptable mis en cause fait valoir les arguments suivants :
la débitrice était sous tutelle de l’UDAF,
ce qui ne lui a pas permis de réaliser de saisie-arrêt. Il a
demandé à l’hôpital de saisir le juge des affaires
familiales pour actionner les débiteurs alimentaires,
ce qui n’a pas été fait
. À la suite du décès de la
débitrice, il a adressé aux héritiers de celle-ci une mise en demeure, mais aucun de ceux résidant en
France n’a
accepté la succession. Des biens immobiliers existant au Portugal, le comptable a ensuite
transmis
les coordonnées de l’avocat à l’hôpital
afin que celui-ci fasse valoir sa créance. Il indique avoir
demandé l’admission de ce
s créances en non-valeur.
14. Le directeur du centre hospitalier de Villefranche-de-Rouergue, ordonnateur, a transmis des
documents selon lesquels la débitrice, sous tutelle, était hébergée au long séjour du centre hospitalier de
Villefranche-de-Rouergue depuis 2007. Une procédure devant le juge aux affaires familiales pour fixation
de l’obligation alimentaire des enfants a é
té introduite dès cette période mais n
’a pas abouti. Une
procédure d’e
xequatur a été engagée par le tuteur afin de lui permettre de vendre le patrimoine de la
débitrice au Portugal. La débitrice étant décédée le 24 juillet 2015, avant
l’aboutissement
de cette
procédure à la demande du centre hospitalier, le comptable a alors convoqué les ayants droits pour leur
signifier leur obligation d’ouvrir la succession au Portugal. Un seul d’entre eux s’est présenté. Le comptable
a conseillé à l’hôpital de diligenter un avocat afin de faire reconnaître le caractère exécutoire d
e la créance
par un tribunal puis de la signifier à la justice portugaise pour qu’il soit procédé à la liquidation de la
succession.
15.
L’ordonnateur
a indiqué en outre ne pas avoir retrouvé de demande de M.
X…
d’admettre en non
-
valeur les trois titres de recettes visés par le réquisitoire.
16. Dans ses conclusions, le procureur financier près la chambre fait valoir que les nouvelles pièces
justificatives et les éléments d’information produits après la notification du réquisitoire, notamment les
Jugement n° 2020-0019
page 4 sur 4
500, avenue des États du Languedoc
CS 70755
34064 MONTPELLIER CEDEX 2
T +33 4 67 20 73 00
occitanie@crtc.ccomptes.fr
mises en demeure de payer notifiées aux enfants de la débitrice, le double recours au juge aux affaires
familiales
, l’appel aux services d’avocats
pour les différentes procédures, témoignent du fait que ni le
comptable, ni le centre hospitalier ne sont res
tés inactifs. Il fait valoir qu’après le décès de la débitrice, le
renoncement des héritiers résidant en France à la succession et l’extrême difficulté à poursuivre à
l’étranger et selon un droit étranger les héritiers résidant au Portugal conduisent à con
sidérer que le
comptable a mis en œuvre les diligences auxquelles il était tenu et propose en conséquence un non
-lieu
à charge.
17.
De fait, et en dépit des difficultés induites par la tutelle de la débitrice par l’UDAF, par le fait que
l’obligation alimentaire n’ait pu être fixée et que le patrimoine portugais de l’intéressée soit resté
juridiquement inaccessible, des diligences postérieures à 2012 ont été conduites par le comptable (des
mises en demeure de payer ont été envoyées en recommandé avec accusé de réception aux enfants
connus de la débitrice, au titre de l’obligation alimentaire
)
et il ne peut lui être fait grief de n’avoir pas
engagé d’autres diligences interruptives après le décès de la débitrice, en l’absence de débiteur identifié
tant e
n France qu’au Portugal, et dans l’impossibilité
où il était de déterminer les diligences adéquates
dans le cadre d’un droit étranger.
18. L
e comptable n’a ainsi commis aucun manquement, au titre de l’exercice 2016, susceptible d’engager
sa responsabilité personnelle et pécuniaire.
DÉCIDE :
Article unique : Sur la présomption de charge unique au
titre de l’exercice
2016 ;
ll
n’y a pas lieu à charge à l’encontre de
M.
X…
au titre de sa gestion des comptes du centre hospitalier
de Villefranche-de-Rouergue
pour l’exercice 2016
.
Article final : M.
X…
est déclaré quitte et libéré de sa gestion terminée le 31 décembre 2016.
Mainlevée peut être donnée et radiation peut être faite de toutes oppositions et inscriptions mises ou prises
sur ses biens meubles ou immeubles ou sur ceux de ses ayants cause pour sûreté de ladite gestion et
son cautionnement peut être restitué ou ses cautions dégagées.
Délibéré le 10 décembre 2020 par Mme Valérie RENET, présidente de section, réviseure ;
M. Hervé BOURNOVILLE, président de section, Mmes Isabelle HOUVENAGHEL, Vanina DUWOYE et
Line MAZUIR, premières conseillères.
En présence de M. Richard GINESTE, greffier de séance.
Richard GINESTE,
greffier de séance
Valérie RENET,
présidente de séance
Jugement n° 2020-0019
500, avenue des États du Languedoc
CS 70755
34064 MONTPELLIER CEDEX 2
T +33 4 67 20 73 00
occitanie@crtc.ccomptes.fr
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la chambre régionale des comptes Occitanie,
et délivré par moi, secrétaire générale,
Pour la Secrétaire générale empêchée et par
délégation
Frédéric LACZKOWSKI
Greffier
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements
prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des
comptes dans un délai de deux mois à compter de leur notification, et ce selon les modalités prévues aux
articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Ce délai est prolongé de deux mois pour les personnes domiciliées à l’étranger.
La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et ce
dans les
conditions prévues à l’article R.
242-29 du même code.