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Première section
Jugement n° 2020-0012
Commune de La Bouilladisse
Département des Bouches-du-Rhône
Exercices 2014 à 2017
Rapport n° 2020-0085
Audience publique du 2 octobre 2020
Délibéré du 2 octobre 2020
Prononcé le 3 novembre 2020
JUGEMENT
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d
Azur,
VU
le code des juridictions financières ;
VU
l'article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU
l’article
D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales ;
VU
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
VU
le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du
paragraphe
VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 modifié, dans sa rédaction issue de
l’article
90 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 ;
VU
l’arrêté
n° 2019-16 du 18 décembre 20
19 du président de la chambre modifiant l’organisation
des formations de délibéré et leurs compétences pour 2020 ;
VU
le réquisitoire n° 2020-0002 du 6 janvier 2020 par lequel le procureur financier près la
chambre régionale des comptes a relevé une présomption de deux charges
à l’encontre de M
me X
en sa qualité de comptable de la commune de La Bouilladisse ;
VU
la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de
l’instruction à Mme
X, le 15 janvier 2020 et à M. le maire de la commune de La Bouilladisse le 17
janvier 2020 ;
2/9
VU
les comptes de la commune de La Bouilladisse pour les exercices 2014 à 2017 ;
VU
le questionnaire adressé le 5 février 2020 par le rapporteur à Mme X et à
M. Y, ordonnateur en fonctions ;
VU
les réponses transmises par Mme X et M. Y, enregistrées au greffe les 15 avril 2020 et 3 mars
2020 ;
VU
le rapport n° 2020-0085 à fin de jugement des comptes déposé le 29 juin 2020 par
M. Kerwin Spire, conseiller ;
VU
les conclusions du procureur financier ;
Après avoir entendu en audience publique le rapporteur, les conclusions orales de
M. Marc Larue, procureur financier ;
Mme X, comptable, et M. Z, ordonnateur en fonctions,
dûment informés de l’audience, n’étant ni
présents, ni représentés ;
Après en avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier et après avoir
entendu M. Frédéric Terras, premier conseiller, réviseur, en ses observations ;
Sur les circonstances de force majeure
ATTENDU
qu’aux termes du V de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 :
«
Lorsque le ministre dont relève le comptable public, le ministre chargé du budget ou le juge des
comptes constate l'existence de circonstances constitutives de la force majeure, il ne met pas en
jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public
» ;
ATTENDU
que l’existence de circonstances constitutives de la force majeure doit résulter
d’événements extérieurs, imprévisibles et irrésistibles en lien avec les griefs formulés
par le
réquisitoire ;
qu’en l’espèce aucune circonstance constitutive de la force majeure n’a été établie
ni même alléguée ;
Charge n° 1 : Règlement de frais de carburant à la société A
Exercice 2017
Mandats
n
os
111 et 112 du 1
er
janvier 2017, n
os
805, 806, 807 et 808 du 3 mars 2017 pour un montant
total de 9 960,85
TTC ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU
que le procureur financier a relevé que par les mandats n
os
111 et 112 du
1
er
janvier 2017, n
os
805, 806, 807 et 808 du 3 mars 2017, la comptable de La Bouilladisse a réglé
des frais de carburant à la société A, pour un montant de 9 960,85
TTC ; que si le montant des
prestations fournies n’exigeait pas la passation d’un contrat écrit, la nomenclature des pièces
justificatives imposait des factures mentionnant le nom ou la raison sociale du créancier, la date
de livraison des fournitures, la dénomination précise et le prix unitaire et la quantité pour chaque
prestation fournie et le montant et le taux de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu
e les factures à l’appui
de ces dépenses étaient insuffisamment justifiées ; que, dès lors,
sans pouvoir s’assurer de la
validité de la dette, en l’absence des pièces justificatives requises par la réglementation
, la
comptable est susceptible d’avoir engag
é sa responsabilité ;
3/9
Sur les réponses des parties
ATTENDU
que dans sa réponse, l’ordonnateur indique
que «
la collectivité n’a pas conservé, ni
fourni à l’appui du mandatement, le détail des consommations qui à l’époque était un simple
relevé manuel lors du passage à la pompe
» ; en conséquence, estime-t-il, les charges soulevées
n’ont fait subir «
aucun préjudice à la collectivité
» ;
ATTENDU
que dans sa réponse, Mme X estime que ces dépenses étant «
dues et les prestations
réalisées »,
elles n’ont
« pas fait subir de préjudice financier à la commune
» ;
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU
que par les mandats visés dans le réquisitoire du procureur financier, la comptable a réglé
des frais de carburant à la société A pour un montant total de 9 960,85
TTC ;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée :
«
1- Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont
personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des
dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux
différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, désignées ci-après par
le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de
disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de
comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. Les
comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont
tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues
par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et pécuniaire
prévue ci-
dessus se trouve engagée dès lors (…), qu'une dépense a été irrégulièreme
nt payée (
)
» ;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 19 du décret susvisé
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : «
Le comptable public est tenu d'exercer le
contrôle :
(…) 2° S'agissant des ordres de payer
:
(…) d) De la validité de la dette dans les
conditions prévues à l'article 20 ;
(…)
» ;
qu’aux termes de l’article 20 du même décret
: «
Le
contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur :
(…) 2° L'exactitude de la
liquidation ;
(…) 5° La production des pièces justificatives (…)
» ;
ATTENDU
que pour payer les mandats précités, la comptable était en possession de factures
émises par le fournisseur ; que de telles pièces pouvaient suffire à justifier les paiements ; que
toutefois l’annexe 1 du code général des collectivités territoriales fixant la liste des pièces
justificatives des dépenses visée à l’article D.
1617-19 dudit code général des collectivités
territoriales prévoit en son annexe C que les factures ou les mémoires des fournisseurs doivent
comporter les énonciation suivantes : «
1. Le nom ou la raison sociale du créancier (…) 4. Date
d’exécution des services ou de livraison des fournitures et désignation de la collectivité débitrice.
5. Pour chacune des prestations rendues, la dénomination précise, selon le cas les prix unitaires
et les quantités ou bien les prix forfaitaires. 6. Le montant et le taux de taxe sur la valeur ajoutée
légalement applicable (…)
» ; que les factures jointes aux mandats en cause permettaient bien
d’identifier le créancier et mentionnaient le montant et le taux de la
taxe sur la valeur ajoutée
appliqué ;
qu’en revanche, s’agissant probablement de factures récapitulatives établies par le
prestataire en fin de mois, elles ne précisaient pas la date de livraison des fournitures, mention
pourtant exigée au point 4
de l’annexe C précitée; que ces factures ne donnaient par ailleurs
aucune indication sur la décomposition du prix au regard de la nature de la dépense concernée,
sur la quantité de carburant fournie
et sur le prix au litre facturé, comme l’exige pourtant le point
5
de l’annexe
;
que ces éléments n’ont pu être fournis par la comptable
;
4/9
ATTENDU
qu’ainsi les pièces justificatives produites ne répondaient pas aux exigences posées
par la nomenclature des pièces justificatives ; que de ce fait, elles ne permettaient pas à la
comptable d’exercer les contrôles qui lui incombaient et notamment de s’assurer de la validité de
la créance et en particulier de son exacte liquidation ;
ATTENDU
que la responsabilité de la comptable s’apprécie au moment du paiement
; que la
comptable aurait dû, en l’absence des pièces justificatives exigées par la réglementation,
suspendre les paiements en application de l’article 38 du décret
n° 2016-1246 du 7 novembre 2012
susvisé ;
qu’elle a donc manqué à ses obligations de contrôle en réglant les mandats susvisés en
ce qui concerne le paiement de ces frais de carburant ;
ATTENDU
qu’il résulte de ce qui précède que Mme
X a engagé sa responsabilité personnelle et
pécuniaire ;
En ce qui concerne le préjudice financier
ATTENDU
qu’aux termes du troisième alinéa du paragraphe
VI de l’article
60 de la loi du
23 février 1963 susvisé, «
lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au
I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger
à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de
l’espèce
(…)
. Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un
préjudice financier à l’organisme public concerné
(…)
, le comptable a l’obligation de verser
immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
(…)
» ;
ATTENDU
que dans leurs réponses à la c
hambre, la comptable comme l’ordonnateur estiment
que la commune de La Bouilladisse
n’a pas subi de préjudice au motif que l
es dépenses étaient
dues et les prestations réalisées ;
ATTENDU
que l’appréciation du préjudice financier relève de la seule respons
abilité du juge des
comptes ;
ATTENDU
que pour déterminer l’existence d’un
préjudice financier pour la commune, il
appartient au juge des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à
laquelle il statue, si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait
permis d’éviter que soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due
; que lorsque le
manquement du comptable porte sur la production des pièces justificatives requises ou la
certification du ser
vice fait, il doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice
financier à l’organisme public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris
d’éléments postérieurs aux manquements en cause, que la dépense repose sur les fon
dements
juridiques dont il appartenait au comptable de vérifier l’existence au regard de la nomenclature,
que l’ordonnateur a voulu l’exposer, et, le cas échéant, que le service a été fait
;
ATTENDU
qu’au cas d’espèce,
la comptable ne disposait pas des pièces suffisantes lui
permettant de contrôler la validité de la créance, et en particulier du service fait matérialisé par la
nature et les quantités de carburant livrées à la commune ; que la dépense présentait ainsi un
caractère indu dont a résulté un préjudice financier pour la collectivité ;
qu’il y a lieu
, dès lors, de
constituer Mme X débitrice envers la commune de La Bouilladisse de la somme de
9 960,85
TTC au titre
de l’exercice 2017
;
5/9
ATTENDU
qu’aux termes du paragraphe
VIII de l’article
60 de la loi du 23 février 1963 susvisé,
«
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la
responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; que le premier acte de la mise
en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue
en l’espèce le
15 janvier 2020 ;
Sur le respect des règles du contrôle sélectif des dépenses
ATTENDU
que les dispositions du IX de l
’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963
prévoient que
«
Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise
en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé
du budg
et la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. (…) Hormis les cas (…) de respect
par [le comptable], sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des
dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée (…)
»
;
qu’il appartient donc à la
chambre de se prononcer sur le respect des règles de contrôle sélectif de la dépense ;
ATTENDU
que la comptable a transmis le plan de contrôle hiérarchisé de la dépense (CHD),
valant pour l’exercice 2017
; que ce document détaillait les contrôles exhaustifs relevant du
référentiel obligatoire qui ne concernait pas les dépenses de charges courantes telles que les frais
de carburant ;
qu’en conséquence, ces dépenses relevaient de la «
méthodologie aménagée » et
faisaient l’objet d’
un tirage aléatoire pour contrôle a priori des mandats marqués
automatiquement ; que les mandats n
os
111 et 112 du 1
er
janvier 2017 ne sont pas marqués et ne
devaient donc pas être visés avant paiement ;
qu’en revanche les mandats
n
os
805, 806, 807 et 808
du 3 mars 2017
sont marqués automatiquement et devaient faire l’objet d’un visa détaillé avant
prise en charge et paiement ; que, dès lors, il y a lieu de considérer que les règles de contrôle
sélectif de la dépense n’ont pas
été respectées ;
Charge n° 2 : Paiement de travaux sans contrat écrit
Exercice 2015
Mandat n° 1105 du
29 avril 2015 pour un montant de 106 925,68
TTC ;
En ce qui concerne le réquisitoire
ATTENDU
que le procureur financier a relevé que par le mandat n° 1105 du 29 avril 2015, la
comptable de La Bouilladisse a payé des travaux à la société B, pour un montant de
106 925,68
TTC,
sans pouvoir s’assurer de la validité de la dette, en l’absence de
contrat écrit
et/ou des pièces justificatives requises par la réglementation ; que par suite, la comptable est
susceptible d’avoir engagé sa responsabilité
;
Sur les réponses des parties
ATTENDU
que dans sa réponse, l’ordonnateur indique
que les «
travaux sans contrat écrit (…)
ont bien été commandés par nos soins et réalisés par l’entreprise
» ; en conséquence, estime-t-il,
les charges soulevées n’ont fait subir «
aucun préjudice à la collectivité » ;
ATTENDU
que dans sa réponse, Mme X estime que ces dépenses étant «
dues et les prestations
réalisées
», elles n’ont «
pas fait subir de préjudice financier à la commune
» ;
6/9
Sur le manquement du comptable à ses obligations
ATTENDU
que par le mandat n° 1105 du 29 avril 2015, la comptable a réglé des travaux
d’aménagement du parvis de l’église à la société
B, pour un montant de 106 925,68
;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée :
«
1- Outre la responsabilité attachée à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont
personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des
dépenses, de la garde et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux
différentes personnes morales de droit public dotées d'un comptable public, désignées ci-après par
le terme d'organismes publics, du maniement des fonds et des mouvements de comptes de
disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de
comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent. Les
comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont
tenus d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues
par le règlement général sur la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et pécuniaire
prévue ci-
dessus se trouve engagée dès lors (…), qu'une dépense a été irrégulièrement payée (…)
» ;
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 19 du décret susvisé
n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : «
Le comptable public est tenu d'exercer le
contrôle :
(…) 2° S'agissant des ordres de payer
:
(…) d) De la validité de la dette dans les
conditions prévues à l'article 20 ;
(…)
» ;
qu’aux termes de l’article 20 du même décret
:
«
Le
contrôle des comptables publics sur la validité de la dette porte sur :
(…) 2° L'exactitude de la
liquidation ;
(…) 5° La production des pièces justificatives (…)
» ;
ATTENDU
qu’en application de l’article 11 du code des marchés publics approuvé par un décret
n° 2011-1853 du 9
décembre 2011, en vigueur jusqu’au 1
er
octobre 2015, «
les marchés et
accords-
cadres d’un montant égal ou supérieur à 15
000
HT sont passés sous forme écrite
» ;
ATTENDU
que pour le paiement d’un telle dépense, les pièces justificatives que l
a comptable
devait exiger étaient fixées à la rubrique 423 « Prestations fixées par contrat »
de l’annexe I
du
code général des collectivités territoriales qui, dans sa version issue du décret n° 2007-450 du
25 mars 2007 modifiant le code général des collectivités territoriales (partie réglementaire),
prévoyait la production de : «
1. Contrat et, le cas échéant, avenant, 2. Mémoire ou facture (...)
» ;
ATTENDU
qu’en l’absence de contrat écrit, l
a
comptable pouvait s’appuyer sur un certificat de
l’ordonnateur par leque
l ce dernier déclarait avoir conclu un contrat oral ;
ATTENDU
qu’en l’espèce l
a
comptable a payé la dépense en cause au vu d’une facture établie
par le fournisseur mais qu’aucun contrat écrit, ni certificat de l’ordonnateur ou document
matérialisant un ac
cord entre les parties sur le contenu et le prix de la prestation, n’a été joint au
mandat ;
qu’eu égard au montant des prestations fournies, la comptable aurait dû exiger la
production d’une telle pièce
justificative ;
ATTENDU
que la responsabilité de la comptable s’apprécie au moment du paiement
; que la
comptable aurait dû, en l’absence des pièces justificatives exigées par la réglementation,
suspendre le paiement en application de l’article 38 du décret
n° 2016-1246 du 7 novembre 2012
susvisé ;
qu’elle a donc manqué à ses obligations de contrôle en
en mettant en paiement le mandat
visé dans le réquisitoire du procureur financier ;
ATTENDU
qu’il résulte de ce qui précède que Mme
X a engagé sa responsabilité personnelle et
pécuniaire ;
7/9
En ce qui concerne le préjudice financier
ATTENDU
qu’aux termes du troisième alinéa du paragraphe
VI de l’article
60 de la loi du
23 février 1963 susvisé
, « lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I
n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme concerné, le juge des comptes peut l’obliger à
s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de
l’espèce (…). Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I
a causé un
préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le comptable a l’obligation de verser
immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante (…)
» ;
ATTENDU
que dans leurs réponses à la chambre, la comptable comme l’ordonnateur e
stiment
que la commune de La Bouilladisse
n’a pas subi de préjudice au motif que l
es travaux étaient
commandés et réalisés ;
ATTENDU
que l’appréciation du préjudice financier relève de la seule responsabilité du juge des
comptes ;
ATTENDU
que pour détermin
er l’existence préjudice financier pour la commune, il appartient
au juge des comptes de vérifier, au vu des éléments qui lui sont soumis à la date à laquelle il statue,
si la correcte exécution, par le comptable, des contrôles lui incombant aurait permis
d’éviter que
soit payée une dépense qui n’était pas effectivement due
; que lorsque le manquement du
comptable porte sur la production des pièces justificatives requises ou la certification du service
fait, il doit être regardé comme n’ayant, en principe, pas causé un préjudice financier à l’organisme
public concerné lorsqu’il ressort des pièces du dossier, y compris d’éléments postérieurs aux
manquements en cause, que la dépense repose sur les fondements juridiques dont il appartenait
au comptable de vérif
ier l’existence au regard de la nomenclature, que l’ordonnateur a voulu
l’exposer, et, le cas échéant, que le service a été fait
;
ATTENDU
qu’au cas d’espèce, si les prestations facturées ont été réalisées ainsi que l’affirme
l’ordonnateur, l
a
comptable ne disposait au moment du paiement du mandat précité, d’aucune
pièce attestant de la volonté de l’ordonnateur de commander la prestation et en particulier du
contrat exigé par la règlementation ;
qu’un tel document n’a pu être produit ni au cour
s de la phase
administrative d’examen des comptes, ni après la notification du réquisitoire du procureur
financier ;
qu’ainsi l
a comptable ne disposait pas de pièces suffisantes pour fonder juridiquement
la dépense qui se trouve, dès lors, indue ; que par suite, il a résulté de son paiement un préjudice
financier pour la commune ;
qu’il y a lieu dès lors de constituer Mme
X débitrice envers la
commune de La Bouilladisse de la somme de 106 925,68
TTC
au titre de l’exercice 2015
;
ATTENDU
qu’aux termes du
paragraphe
VIII de l’article
60 de la loi du 23 février 1963 susvisé,
«
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la
responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; que le premier acte de la mise
en jeu de la responsabilité des comptables correspond à la notification du réquisitoire, intervenue
en l’espèce le
15 janvier 2020 ;
8/9
Sur le respect des règles du contrôle sélectif des dépenses
ATTENDU
que les dispositions du IX de l’article 60 de l
a loi de finances du 23 février 1963
prévoient que
«
Les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise
en jeu dans les cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé
du budget la remise gra
cieuse des sommes mises à leur charge. (…) Hormis les cas (…) de respect
par [le comptable], sous l’appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle sélectif des
dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée (…)
»
;
qu’il appartien
t donc à la
chambre de se prononcer sur le respect des règles de contrôle sélectif de la dépense ;
ATTENDU
que la comptable a transmis un plan de contrôle hiérarchisé de la dépense (CHD),
valant pour l’exercice 2013, qui n’était donc pas applicable à la
date du paiement du mandat en
cause ; que dans ces conditions elle était tenue à procéder à un contrôle exhaustif des dépenses ;
qu’il y a lieu de considérer dès lors, que les règles de contrôle de la dépense n’ont pas été respectées
;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
:
Au titre de la charge n° 1, Mme X est constituée débitrice de la commune de
La Bouilladisse
, au titre de l’exercice 2017,
de la somme de 9 960,85
(neuf mille neuf cent
soixante euros et quatre-vingt-cinq centimes), augmentée des intérêts de droit à compter du
15 janvier 2020.
Les règles de contrôle sélectif de la dépense n’ont pas été respectées.
Article 2
:
Au titre de la charge n° 2, Mme X est constituée débitrice de la commune de
La Bouilladisse, au titre de
l’exercice 201
5, de la somme de 106 925,68
(cent six mille neuf cent
vingt-cinq euros et soixante-huit centimes) augmentée des intérêts de droit à compter du
15 janvier 2020.
Les règles de contrôle sélectif de la dépense n’ont pas été respectées.
Article 3
:
Il est sursis à la décharge de Mme X pour sa gestion du 1
er
janvier 2014 au
31 décembre 2017
dans l’attente des débets mentionnés
à l’article 1
er
et à l’article 2.
Présents : M. Patrick Caiani, président de section, président de séance, MM. Patrice Chazal et
Frédéric Terras, premiers conseillers.
9/9
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d'Azur, le deux octobre
deux mille vingt.
La greffière de séance,
Patricia GUZZETTA
Le président de séance,
Patrick CAIANI
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux
procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à
tous les
commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre
régionale des
comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de leur
notification, et ce selon les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois
pour les perso
nnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après expiration des délais d’appel, et
ce dans les conditions prévues à l’article R.
242-29 du même code.