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DEUXIÈME CHAMBRE
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Quatrième section
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Arrêt n° S2019-3209
Audience publique du 6 décembre 2019
Prononcé du 17 janvier 2020
VOIES NAVIGABLES DE FRANCE
Exercice 2015
Rapport n° R-2019-1197-1
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2018-3 RQ-DB en date du 13 février 2018, par lequel le Procureur général
près la Cour des comptes a saisi la juridiction de charges
soulevées à l’encontre
de
M. X, agent comptable de Voies navigables de France (VNF), au titre de
l’exercice 2015,
notifié
le 23 février 2018 au comptable concerné ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de VNF par M. X, à compter du 31 août 2015
;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code des transports, notamment le livre troisième de sa quatrième partie ;
Vu l’article 60
modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu l’instruction comptable M91
;
Vu le rapport n° R-2019-1197-1
à fin d’arrêt
de M. Patrick BONNAUD, conseiller référendaire,
magistrat chargé de l’instruction
;
Vu les conclusions n° 757 de la Procureure générale en date du 27 novembre 2019 ;
Vu les pièces du dossier ;
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Entendu lors de l’audience publique du
6 décembre 2019, M. Patrick BONNAUD, conseiller
référendaire, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du
ministère public, M. X ayant eu la parole en dernier ;
Entendu en délibéré M. Louis VALLERNAUD, conseiller maître, réviseur, en ses
observations ;
Sur la charge unique
, soulevée à l’encontre de
M. X
au titre de l’exercice
2015
1. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la Cour des comptes
de la responsabilité encourue par M. X à raison du défaut de justification du solde débiteur au
31 décembre 2015 du compte 275-12
« Dépôts (autres banques) »
; qu’en effet, selon le
représentant du ministère public, ce solde non justifié de 43 040,27
€ est susceptible
de
constituer un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs de nature à fonder la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X ; que le Procureur général a estimé
que sa responsabilité était également susceptible d’être recherchée pour l’absence de
recouvrement ou à raison
d’un défaut
de contrôle de la mise en recouvrement de la recette
correspondante ;
Sur le droit applicable
2.
Attendu qu’en application du
premier aliéna du
I de l’article 60
susvisé de la loi du
23 février 1963, «
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables du recouvrement des recettes
(
…)
,
de la garde et de la conservation des fonds
et valeurs
appartenant ou confiés aux différentes personnes morales de droit public dotées
d’un comptable public
(…),
du maniement des fonds et des mouvements de comptes de
disponibilités, de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de
comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent
» ;
qu’aux termes du deuxième ali
néa du même paragraphe,
« les comptables publics sont
personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en
matière de recettes
(…)
dans les conditions prévues par le règlement général sur la
comptabilité publique »
;
3.
Attendu qu’aux termes de l’article
18 du décret susvisé du 7 novembre 2012,
« Dans le
poste comptable qu’il dirige, le comptable public est seul chargé
: 1°
De la tenue de la
comptabilité générale ;
(…)
5° Du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances
constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ;
(…)
9° De la
garde et de la conservation des fonds et valeurs
(…)
; 11° De la conservation des pièces
justificatives des opérations transmises par les ordonnateurs et des documents de
comptabilité »
;
que l’article
19 du même décret lui confie la responsabilité
«
d’exercer le
contrôle
: 1° S’agissant des ordre de recouvrer
:
(…)
b) Dans la limite des éléments dont il
dispose, de la mise en recouvrement des créances
(…)
;
Sur les faits
4. Attendu que, le 20 novembre 1998, une convention a été signée entre la Société de
cautionnement mutuel de la batellerie artisanale (SCMBA), la Chambre nationale de la
batellerie artisanale (CNBA) et Voies navigables de France (VNF) pour créer un fonds spécial
destiné à garantir les engagements accordés par la SCMBA lors d’opérations d’emprunts
réalisés par les sociétaires de la SCMBA auprès de banques autres que le CEPME
; qu’il y
était convenu que la Chambre nationale de la batellerie artisanale apportait 20/44
ème
et Voies
navigables de France 24/44
ème
du
fonds
qui
devait
être
déposé
auprès
d’un
organisme financier, chargé de le gérer, après reprise des engagements de la SCMBA ;
que le 7 janvier 1999, la CNBA, VNF, les banques intéressées et M. Y, caissier de la société
civile professionnelle « Guy Cuvillon, Armand Martinage, Pierre Ducrocq, Nicole Chêne, Pierre
Margolle et Sylvain Martinage, notaires », ont signé une convention désignant cette dernière
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comme tiers séquestre du fonds ainsi constitué ; que la Chambre nationale de la batellerie
artisanale et Voies navigables de France ont remis à ce tiers séquestre
les sommes de,
respectivement,
1
768
280,45
francs
(269
572,62
€)
et
2
121
936,55
francs
(323 487,14 €) ;
5. Attendu que le compte 275
« Dépôts et cautionnements versés »
de la Chambre nationale
de la batellerie artisanale présentait à la date du 31 décembre 2015 un solde débiteur de
39
163,77 €
; qu
’à la même date,
le solde du compte 275-12
« Dépôts (autres banques) »
de
Voies navigables de France était débiteur de 43
040,27 €
; que le dernier compte rendu produit
à la Chambre nationale de la batellerie artisanale par le tiers séquestre, qui se rapportait à
l’année 2004 et avait au demeurant été contesté par
la CNBA, datait du 10 juin 2005 ; que le
montant total des prêts garantis s’élevait alors à 84
846,47 €, soit 38
566,58 € garantis par la
CNBA et 46 279,89
€ garantis par
VNF ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
6. Attendu que, dans sa réponse au réquisitoire, le comptable a décrit le dispositif mis en place,
souligné les difficultés de son fonctionnement et fait valoir que le solde du compte 275-12
apparaissait suffisamment garanti par la part de Voies navigables de France dans le fonds
séquestr
e, tel qu’il subsiste ;
qu’au soutien de ce dernier point, il a produit des pièces attestant
que la valeur au 31
décembre 2015 du compte séquestre s’établissait à 109
882,61
€, à
laquelle il convenait d’
ajouter la somme de 526,68
€
détenue en caisse par le séquestre ;
S
ur l’existence d’un manquement
7.
Attendu qu’il
résulte de ces éléments que le solde du compte 275-12 correspond au fonds
de garantie mis en place conjointement par VNF et la CNBA,
qu’au titre de ce fonds de
garantie, un compte existe à la Caisse des dépôts et consignation et une encaisse auprès de
la SCP notariale « Chêne, Margollé, Martinage et Bertoux » et qu
’à la date du
31 décembre 2015, le montant total de ces compte et encaisse
s’élevait
à 110 409,29
€, soit
109
882,61 € pour le compte et 526,68 € pour l’encaisse
; qu’aux termes de la convention
constitutive du fonds, la part de VNF représentait 24/44
ème
de cette somme, soit 60 223,25
€
;
qu’ainsi l
e solde débiteur au 31 décembre 2015 du compte 275-12 est suffisamment justifié et
qu’il n’y a
donc pas lieu de mettre en jeu de ce chef la responsabilité personnelle et pécuniaire
de M. X;
8. Attendu
qu’aucun compte rendu n’ayant pe
rmis de constater la libération
de garanties, il n’y
a pas lieu non plus de rechercher la responsabilité du comptable pour un défaut de contrôle
de la mise en recouvrement de créances de VNF ou la réalisation de diligences insuffisantes
pour en assurer le recouvrement ;
9. Attendu que les soldes
à la clôture de l’e
xercice 2015 ont été exactement repris en balance
d’entrée de l’exercice 2016
;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
.
–
Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité
de M. X au titre de la charge
unique visée dans le réquisitoire.
Article 2.
–
M. X est déchargé de sa gestion pour la période du 31 août au
31 décembre 2015.
Fait et jugé en la Cour des comptes, deuxième chambre, quatrième section.
Présents : M. Louis VALLERNAUD, président de section, président de la formation,
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MM. Vincent FELLER, Gilles MILLER, Jacques BASSET et Paul de PUYLAROQUE,
conseillers maîtres.
En présence de Mme Stéphanie MARION, greffière de séance.
Stéphanie MARION
Louis VALLERNAUD
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un p
ourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions prévues au
I de l’article R. 142
-19 du même code.