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QUATRIÈME CHAMBRE
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Première section
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Arrêt n° S2019-2386
Audience publique du 26 septembre 2019
Prononcé du 17 octobre 2019
COMMUNE DE RAMONVILLE
SAINT-AGNE
(HAUTE-GARONNE)
Appel d’un jugement de la
chambre
régionale des comptes Occitanie
Rapport n° R-2019-0824
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 26 février 2019 au greffe de la chambre régionale des comptes
Occitanie, par laquelle M. X, comptable de la commune de Ramonville Saint-Agne, a élevé
appel du jugement n° 2018-0012 du 7 décembre 2018 de ladite chambre régionale
qui l’a
constitué débiteur des sommes de 55
283,51 € et de 24
091,41 €, augmen
tées des intérêts
de droits à compter du 3 avril 2018, au titre de sa gestion
pour l’exercice 2015
;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance et notamment le réquisitoire du
procureur financier près la chambre régionale des comptes Occitanie n° 2018-0004 du
5 mars 2018 ;
Vu le code général des collectivités territoriales et notamment son article D. 1617-19 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n°
63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1988, et, notamment, son article 88 ;
Vu le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu le rapport de M. Patrick BONNAUD, conseiller référendaire
, chargé de l’instruction
;
Vu les conclusions de la Procureure générale n° 532 du 10 septembre 2019 ;
Entendu lors de l’audience publique du
26 septembre 2019, M. Patrick BONNAUD, conseiller
référendaire, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du
ministère public, les autres parties,
informées de l’audience
,
n’étant ni
présentes, ni
représentées ;
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Entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;
1. Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes Occitanie a jugé
que, à défaut de reposer sur des textes législatifs ou règlementaires, l’attribution par
délibérations des primes en cause aux agents de la commune de Ramonville
Saint-Agne méconnaissait le prime de parité des fonctions publiques auquel se réfère la
nomenclature ; que les délibérations ne pouvaient donc justifier les dépenses, à défaut de
viser lesdits textes législatifs ou règlementaires ;
qu’il y avait donc lieu
de constituer
M. X débiteur des sommes de 55
283,51 € et de 24
091,41 €, augmentées des intérêts de
droits à compter du 3 avril 2018, au titre de sa gestion
pour l’exercice 20
15 ;
2.
Attendu que l’appelant
demande,
d’une part,
à la Cour de dire que le jugement ne comportait
pas les références des mandats et des bordereaux incriminés, ce qui rend impossible la
connaissance du statut des mandats concernés au regard du CHD, donc le visa à exercer,
donc la responsabilité du comptable ; qu
e, d’autre part, en jugeant comme elle l’a fait, la
chambre régionale des comptes a mis à la charge du comptable un contrôle de légalité au
fond des pièces justificatives
; qu’il disposait, en effet, d’une délibération exécutoire,
dont le
contrôle de légalité de laquelle incombe au préfet et au juge administratif ; que, par ce fait, le
paiement n’a pu causer un préjudice financier à la commune
; qu’il sollicite de la Cour
l’annulation du
jugement susvisé ;
Sur la régularité du jugement
3. Attendu que le requérant fait valoir que le jugement ne comporte «
aucune indication
concernant les mandats incriminés : aucun numéro de mandats ni de bordereaux. Il est fait
seulement référence à des mandats collectifs. Cet état de fait rend impossible la connaissance
du statut des mandats concernés : CHD ou pas CHD, ce qui modifie le type de visa à exercer
et donc la responsabilité du comptable
» ;
4. Attendu que sont joints au réquisitoire des mandats collectifs, du mois de mai 2015, pour
la première présomption de charge, des mois de juillet, octobre et novembre 2015 pour la
seconde présomption de charge, les fiches de paie portant les sommes en cause, une fiche
récapitulative Hélios des mandats imputés au compte 64138
; qu’il ressort des réquisitions que
les montants en cause sont ceux qui figurent sur les fiches de paye jointes au dossier ; que
ces montants ne sont pas contestés et qu’il n’est pas non plus contesté qu’ils ont été payés
;
qu’il en résulte qu’en visant le réquisitoire et le rapport à fin d
e jugement, auxquels sont
annexées ces diverses pièces comptables, la chambre a suffisamment identifié les pièces
comptables qu’elle a contrôlées et au regard desquelles elle a mis M.
X en débet
; qu’ainsi le
caractère contradictoire de la procédure a été respecté ;
5. Attendu que le plan de contrôle pour 2015, joint au dossier, en ce qui concerne la paie,
prévoit le contrôle obligatoire exhaustif
a posteriori
des entrants, des indemnités des élus à
chaque indemnisation et au moins une fois par an en avril et un contrôle indicatif par sondage
a posteriori
des changements de grades et indices cinq dossiers (sous réserve
d’autres
contrôles qui n’apparaî
traient pas sur le document produit) ; que ces contrôles sont relatifs à
des événements affectant des agents pris individuellement,
qu’il s’ensuit que
les bulletins de
paie suffiraient à établir si
l’agent relevait ou non du CHD
;
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6.
Attendu, par ailleurs, que la chambre a jugé qu’il devait être présumé que les règles du
contrôle sélectif avaient été respectées ; que,
contrairement à ce qu’écrit le comptable, le
contrôle du respect du CHD est indifférent à la mise en jeu de la responsabilité personnelle et
pécuniaire du comptable ; que son respect permet
–
seulement
–
au ministre de faire remise
complète des débets prononcés ; que le moyen du comptable relatif au contrôle du CHD est
donc inopérant ;
Sur le fond
7. Attendu
que l’appelant fait valoir que
la chambre régionale des comptes a mis, par son
jugement, à sa charge, un contrôle de la légalité des pièces justificatives qui excède son office ;
qu’il disposait de la pièce justificative prévue par la nomenclature, exécutoire, et n’a
vait pas à
juger de sa légalité
; qu’il s’ensuit qu’il ne peut y avoir de préjudice financier
pour la commune ;
8. Attendu que, pour apprécier la validité des créances, les comptables doivent notamment
exercer leur contrôle sur la production des justifications
; qu’à
ce titre, il leur revient d'apprécier
si les pièces fournies présentent un caractère suffisant pour justifier la dépense engagée ; que
pour établir ce caractère suffisant, il leur appartient de vérifier, en premier lieu, si l'ensemble
des pièces requises au titre de la nomenclature comptable applicable leur ont été fournies et,
en deuxième lieu, si ces pièces sont, d'une part, complètes et précises, d'autre part,
cohérentes au regard de la catégorie de la dépense définie dans la nomenclature applicable
et de la nature et de l'objet de la dépense telle qu'elle a été ordonnancée ; que si ce contrôle
peut conduire les comptables à porter une appréciation juridique sur les actes administratifs à
l'origine de la créance et s'il leur appartient alors d'en donner une interprétation conforme à la
réglementation en vigueur, ils n'ont pas le pouvoir de se faire juges de leur légalité ;
9. Attendu que la nomenclature des pièces justificatives applicable aux paiements contestés
disposait alors que les primes et indemnités, entendu au sens de l'article 88 de la loi n° 84-53
du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale,
devaient être justifiées par une décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les
conditions d'attribution e
t le taux moyen des indemnités ainsi qu’
une décision de l'autorité
investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent ;
10. Attendu que la délibération du conseil municipal de la commune de Ramonville Saint-Agne
en date du 17 juin 2010 a entendu instaurer une prime de vacances et une prime de fin
d’année, au bénéfi
ce de tous les agents communaux ; que la délibération du même conseil,
en date du 16 mai 2013 a augmenté le montant de ces primes ; que ces dispositions ne
nécessitent pas
d’interprétation
et se suffisent à elles-mêmes ;
11. Attendu que si le comptable,
pour contrôler la liquidation d’une prime instaurée par une
délibération, doit donner à la délibération une interprétation conforme à la règlementation en
vigueur, ce qui le conduit, par exemple, à contrôler que les conditions mise par les textes,
applicables à ladite prime et portés en référence de la délibération, au décompte et au
versement de la prime sont remplies, ce devoir ne saurait s’étendre
à un contrôle de la
conformité de la délibération au cadre législatif et règlementaire en vigueur ;
12. Attendu
qu’en mettant à sa charge une telle obligation de contrôle
, la chambre régionale
des comptes a commis une erreur de droit
; qu’il y a lieu en conséquence d’infirmer son
jugement en ce qu’il a dit que le comptable avait manqué à ses obligations et que ce
manquement avait causé un préjudice financier à la commune de Ramonville Saint-Agne ;
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13.
Attendu qu’en raison de l’effet dévolutif de l’appel, il y a lieu de statuer sur
les deux griefs
du réquisitoire du procureur financier susvisé ; que, compte tenu de ce qui précède, il convient
de prononcer un non-lieu à charge
au bénéfice de l’appelant au
titre des deux présomptions
de charge dudit réquisitoire ;
Par ces motifs,
DÉCIDE
:
Article 1
er
.
–
Le jugement n° 2018-0012 du 7 décembre 2018 de la chambre régionale des
comptes Occitanie est infirmé en ce
qu’il
a constitué débiteur M. X des sommes de
55
283,51 € et de 24 091,41 € envers la commune de Ramonville Saint
-Agne, au titre de
l’exercice 2015
.
Article 2
.
–
Il n’y a pas lieu à charge à l’encontre de
M. X au titre des deux présomptions de
charge du réquisitoire n° 2018-0004 du 5 mars 2018 du procureur financier près la chambre
régionale des comptes Occitanie.
Fait
et
jugé
en
la
Cour
des
comptes, quatrième
chambre,
première
section.
Présents : M. Jean-Yves BERTUCCI, président de section, président de séance,
Mme Catherine DÉMIER conseillère maître, M. Yves ROLLAND, conseiller maître et
Mme Dominique DUJOLS, conseillère maître.
En présence de M. Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.
Aurélien LEFEBVRE
Jean-Yves BERTUCCI
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à to
us commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent f
aire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions prévues au
I de l’article R. 142
-19 du même code.