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SECTIONS REUNIES
Jugement n°2019-0008
Audience publique du 30 avril 2019
Prononcé du 29 mai 2019
COMMUNE D'HERY
(Département de l’Yonne)
CENTRE DES FINANCES PUBLIQUES
D’
AUXERRE
Exercice 2013
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES BOURGOGNE-FRANCHE-COMTE,
VU
le code des juridictions financières ;
VU
le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 2311-7, R. 2342-1, D. 1617-19 et
l’annexe I
;
VU
l’article 60 de la loi de finances n° 63
-156 du 23 février 1963 modifiée ;
VU
la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations, notamment son article 10 ;
VU
le décret n° 2001-
495 du 6 juin 2001 pris pour l’application de l’article 10 de la loi n°
2000-321 du 12 avril
2000 et relatif à la transparence financière des aides octroyées par les personnes publiques ;
VU
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU
le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du VI 2
ème
alinéa de l’article 60, de la loi du
23 février 1963 susvisée ;
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VU
l
’arrêté du 25 juillet 2013 portant application du premier alinéa de l’article 42 du décret n°
2012-1246 du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique et encadrant le contrôle sélectif des
dépenses ;
VU
les lois et règlements relatifs à l’organisation, à la gestion et à la comptabilité des collectivités territoriales et
de leurs établissements publics ;
VU
l’arrêté de charge provisoire
n° PIAA031-2013-0890003-201-
04 pris à l’encontre de
Mme X ...,
comptable du centre des finances p
ubliques d’Auxerre
à compter du 2 avril 2013, concernant la commune
d'Hé
ry pour l’a
nnée 2013, et transmis le 8 février 2018 au représentant du ministère public près la chambre
régionale des comptes Bourgogne-Franche-Comté
par le chef du pôle interrégional d’apurement
administratif de Toulouse ;
VU
le réquisitoire n° 2018-01 en date du 8 février 2018, par lequel le procureur financier a saisi la juridiction en
vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X ..., comptable de la commune
d'Héry
, au titre d’opérations relatives à l’exercice 2013
;
VU
la décision n° 2018-02 du 22 février 2018 du président de la chambre régionale des comptes Bourgogne-
Franche-Comté désignant M. Guillaume Fournière, conseiller, pour instruire les suites à donner au réquisitoire
du ministère public ;
VU
la décision n° 2018-18 du 26 octobre 2018 par laquelle le président de la chambre a chargé Mme Milada
Pantic, première conseillère
, de l’instruction du réquisitoire susvisé
en remplacement de M. Guillaume Fournière ;
VU
les notifications dudit réquisitoire et du nom des magistrats chargés successivement
de l’instruction à
Mme
X
…
, et au Maire de la commune d'Héry, dont ils ont, respectivement accusé réception les 29 et 30 octobre 2018
;
VU
le rapport de Mme Milada Pantic, première conseillère ;
VU
les conclusions n° 19-034 du procureur financier en date du 29 mars 2019 ;
VU
l’ensemble les pièces à l’appui
du dossier ;
VU
les lettres du 10 avril 2019 informant l'ordonnateur et la comptable concernée de la clôture de l'instruction,
de la date fixée pour l'audience publique et les accusés de réception correspondants ;
APRES AVOIR ENTENDU
en audience publique, Mme Milada Pantic, première conseillère en son rapport et
M. Jérôme Dossi, procureur financier, en ses conclusions ; Mme Y ..., maire de
…
et Mme X ... informées de
l’audience publique n’étaient ni présentes
ni représentées ;
APRES AVOIR ENTENDU
en délibéré Mme Julie Maillard, première conseillère, réviseure, en ses observations et
après avoir délibéré hors la présence de la rapporteure et du procureur financier ;
Sur la présomption de charge unique
Sur la responsabilité du comptable
ATTENDU
que,
par le réquisitoire susvisé du 8 février 2018, le procureur financier a soulevé à l’encontre de
Mme
X ..., une charge
correspondant au paiement d’un mandat de 15 000 €
émis le 13 septembre 2013 et portant le
numéro 854 bordereau 71, pour une subvention versée au centre de loisirs sans hébergement « Les petits
Hérissons »
sans que l
es pièces justificatives exigées par la réglementation n’y soient jointes
;
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ATTENDU
, en premier lieu, qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, «
Les comptables
publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en
matière (…) de dépenses (…). La responsabil
ité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée
dès lors (…) qu’une dépense a été irrégulièrement payée (…)
» ; que l’article 12 du décret n° 62
-1587 du
29 décembre 1962 susvisé, alors en vigueur, et les articles 19 et 20 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
susvisé imposent au comptable de vérifier la validité des dettes dont le paiement est sollicité ;
ATTENDU
que, pour apprécier la validité des dettes, les comptables doivent notamment exercer leur contrôle
sur la production des justifications ; qu'à ce titre, il leur revient d'apprécier si les pièces fournies présentent un
caractère suffisant pour justifier la dépense engagée ; que pour établir ce caractère suffisant, il leur appartient
de vérifier, en premier lieu, si l'ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature comptable applicable
leur a été fourni et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d'une part, complètes et précises, d'autre part,
cohérentes au regard de la catégorie de la dépense définie dans la nomenclature applicable et de la nature et
de l'objet de la dépense telle qu'elle a été ordonnancée ; que lorsque les pièces justificatives fournies sont
insuffisantes pour établir la validité de la dette, il appartient aux comptables de suspendre le paiement jusqu'à ce
que l'ordonnateur leur ait produit les justifications nécessaires ;
ATTENDU
qu’il résulte des
rubriques 7211 et 7212
de l’annexe I à l’article D. 1617
-19 du code général des
collectivités territoriales que les comptables publics doivent notamment exiger, avant de procéder au paiement
d’une subvention de plus de 23 000 €, la décision d’attribution de subvention, la production d’une convention
passée entre le bénéficiaire et la collectivité ainsi que, pour les paiements suivants le premier en cas de paiement
par acomptes, un décompte portant récapitulation des sommes déjà versées ;
ATTENDU
que la convention du 30 septembre 2008 entre la commune d'Héry et le centre de loisirs « Les petits
hérissons » ne comporte pas de dispositions financières ;
ATTENDU
que par
délibération n° 2013-28 en date du 30 mai 2013, le conseil municipal de la commune d'Héry
a décidé
d’attribuer une subvention d’un montant de
35 000
€
en faveur du centre de loisirs précité au titre de
l’exercice 2013
;
ATTENDU
que le versement de la subvention 2013 au centre de loisirs précité a été réalisé par trois mandats ;
que dès lors, aurait dû être joint au troisième de ces mandats, soit le mandat n° 854 concerné par le réquisitoire,
le décompte portant récapitulation
des sommes déjà versées au centre de loisirs au titre de l’exercice 2013
,
prévu à la rubrique 7212 relative aux paiements par acomptes de l’article D
. 1617-19 du CGCT susvisé ;
ATTENDU
que le mandat n°
854 n’était pas accompagné
de ce décompte ; que par conséquent la comptable
ne disposait pas, au moment de prendre en charge le mandat n°
854, de l’ensemble des pièces justificatives
requises par la règlementation alors en vigueur ;
ATTENDU
que Mme X ... aurait donc dû, eu égard au caractère incomplet et imprécis des pièces justificatives
produites, suspendre le paiement en cause et demander à l’ordonnateur de produire les justifications
nécessaires ; que, par suite, en prenant en charge le mandat n° 854 émis le 13 septembre 2013, elle a manqué
à ses obligations de contrôle et a
engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire au titre de l’exercice 2013
;
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Sur le préjudice financier
ATTENDU
qu’il convient, en application de l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963 modifié par l’article
90 de la loi de finances rectificative pour 2011, de vérifier si le manquement du comptable a causé ou non un
préjudice financier à la collectivi
té ; qu’à défaut de définition légale et réglementaire, le préjudice financier peut
être défini comme étant un manquant constitutif d’un appauvrissement patrimonial définitif non recherché par la
collectivité ;
ATTENDU
qu’aux termes
de l
’article L.
2311-7 du code général des collectivités territoriales : «
L'attribution des
subventions donne lieu à une délibération distincte du vote du budget. Toutefois, pour les subventions dont
l'attribution n'est pas assortie de conditions d'octroi, le conseil municipal peut décider : 1° D'individualiser au
budget les crédits par bénéficiaire ; 2° Ou d'établir, dans un état annexé au budget, une liste des bénéficiaires
avec, pour chacun d'eux, l'objet et le montant de la subvention. L'individualisation des crédits ou la liste établie
conformément au 2° vaut décision d'attribution des subventions en cause
» ;
ATTENDU
que le conseil municipal d'Héry a inscrit 100 000
€
au budget 2013 au titre des subventions aux
associations de la commune ; qu’au surplus
la délibération en date du 30 mai 2013 attribue une subvention de
35 000
€
au centre de loisirs sans hébergement « Les petits Hérissons »
; qu’ainsi, en présence d’une décision
expresse de l’assemblée délibérante précisant le bénéficiaire de la subvention e
t le montant octroyé, le paiement
de la subvention ne peut être considéré comme indu et, par suite, constitutif d’un préjudi
ce financier pour la
commune d'Héry ;
Sur la somme non rémissible
ATTENDU
qu’en application des dispositions du 2
ème
alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, «
lorsque le manquement du comptable (…) n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public
concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour cha
que exercice, en tenant
compte des circonstances de l’espèce
» ; qu’aux termes du décret n°
2012-1386 du 10 décembre 2012 susvisé,
le montant maximal de cette somme est fixé à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le
poste comptable considéré, qui
s’établit à la date du paiement
litigieux à 177 000
€
, soit 265,50
€
;
ATTENDU
qu’il y a lieu
de limiter la somme mise à la charge du comptable
au vu des circonstances de l’espèce
;
qu’il est fait une juste appréciation
de celles-ci en fixant cette somme à 177,00
€
; qu’en application des
dispositions du premier alinéa du IX de l’article 60
de la loi du 23 février 1963, cette somme ne peut faire l’objet
d’aucune remise gracieuse
;
PAR CES MOTIFS,
DÉCIDE :
Article 1
er
: Il y a lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X ... au titre de la
charge soulevée à son encontre.
Article 2
: Mme X ...
devra s’acquitter d’une somme de
177,00
€
en application du deuxième alinéa du VI de
l’article 60 de l
a loi n° 63-156 du 23 février 1963.
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Article 3
: Mme X ... ne pourra être déchargée
de sa gestion au titre de l’année 2013 qu’après apurement de la
somme no
n rémissible fixée à l’article 2
ci-dessus.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Bourgogne-Franche-Comté, réunie en sections réunies.
Mme Dominique SAINT CYR, présidente de section, présidente de séance,
M. Pierre DOUCET, premier conseiller,
M. Nicolas BONNEAU, premier conseiller,
Mme Julie MAILLARD, première conseillère, réviseure,
Mme Valérie RHEIN-TALARD, première conseillère.
Signé : Mireille GREGOIRE, greffière et Dominique SAINT CYR, présidente de séance, présidente de section, à
la chambre régionale des comptes Bourgogne-Franche-Comté.
Collationné, certifié conforme à la minute déposée au greffe de la chambre régionale des comptes Bourgogne-
Franche-Comté.
Le secrétaire général,
Stéphane PELTIER
La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution,
aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de
grande instance d’y tenir la main, à tous
les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Voies et délais de recours
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les jugements prononcés par la chambre régionale des comptes
peuvent faire l’objet d’un appel devant la Cour des comptes, dans le délai de deux mois à compter de leur notification, selon
les modalités prévues aux
articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.