Audience publique du 12 mars 2019
C
ommunauté d’agglomération Mulhouse Alsace
Agglomération
Jugement n° 2019-0005
N° de poste comptable : 068117986
Prononcé du 2 avril 2019
Centre des finances publiques de Mulhouse
Municipale
ANNULE ET REMPLACE LE PRECEDENT
Exercice 2015
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Chambre régionale des comptes Grand Est,
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu
l’article 60 de la loi de finances n°
63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale et notamment son article 88 ;
Vu les articles 19 et 20 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 modifié relatif à la gestion
budgétaire et comptable publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l’article 60 de la loi de
finances de 1963 ;
Vu le réquisitoire n° 2018-19 du 16 mai 2018 du procureur financier près la chambre régionale
des comptes Grand Est, notifié le 11 octobre 2018 à Mme X, comptable de la communauté
d’agglomération Mulhouse Alsace Agglomération
, et à M. Y, président de la communauté
d’agglomération Mulhouse Alsace Agglomération
;
Vu les observations de Mme X, en date du 11 décembre 2018, enregistrées au greffe de la
chambre le 13 décembre 2018 ;
Vu les observations et pièces complémentaires de Mme X, en date du 12 décembre 2018,
enregistrées au greffe de la chambre le même jour ;
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Vu les observations de M. Y, en date du 13 décembre 2018, enregistrées au greffe de la
chambre le même jour ;
Vu les observations de Mme X, en date du 20 décembre 2018, enregistrées au greffe de la
chambre le 21 janvier 2019 ;
Vu le rapport n° 2019-019 du 28 janvier 2019 de Mme Axelle TOUPET, premier conseiller,
magistrat
chargé de l’instruction
;
Vu le rapport complémentaire n° 2019-019-01 du 21 février 2019 de Mme Axelle TOUPET,
premier conseiller, magistrat
chargé de l’instruction
;
Vu les lettres du 25 février 2019
informant les parties de la clôture de l’instruction
;
Vu les conclusions n° 2019-0019 et 2019-0019-01 du procureur financier du 28 février 2019 ;
Vu les lettres du 26 février 2019, au comptable et
à l’ordonnateur, les informant de l’inscription
de l’affaire à l’audience publique
;
Vu les autres pièces du dossier ;
Entendu, lors de
l’audience publique du
12 mars 2019, Mme Axelle TOUPET, en son rapport,
puis M. Thierry FARENC, procureur financier, en ses conclusions, puis Mme X, comptable,
celle-ci ayant eu la parole en dernier ;
M. Y, ordonnateur,
dûment informé de la tenue de l’audience, n’étai
t ni présent, ni représenté;
Après avoir entendu en délibéré M. Thomas GROS, premier conseiller, réviseur, en ses
observations et avoir délibéré, hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
Sur l’uniqu
e charge portant sur le paie
ment d’ind
emnités
d’un montant total de
761
594,25 € en l’absence de délibérations
instituant ces régimes indemnitaires
–
exercice 2015
Sur le manquement présumé du comptable
1. Considérant que, par le réquisitoire du 16 mai 2018 susvisé, le ministère public a relevé
qu’au
cours de
l’exercice
2015, des indemnités intitulées « indemnité administrateur »,
« complément indemnitaire » et « jour du maire » avaient été versées aux agents de la
communauté d’agglomération Mulhouse Alsace Agglomération (m2A), pour
un montant total
de 761
594,25 €
,
en l’absence de
mention de ces indemnités dans les délibérations de 2003
et 2014
instaurant le régime indemnitaire de l’établissement
;
qu’une délibération fixant la
nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités, consti
tuant l’une
des
pièces justificatives requises par l’annexe I
au code général des collectivités territoriales, le
ministère public a conclu que Mme X, comptable
de la communauté d’agglomération m2A
,
n’a
vait pas assuré le contrôle de la validité de la dette dans les conditions énoncées à
l’article
20 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; que la responsabilité personnelle et
pécuniaire de Mme X
est susceptible d’être engagée
sur le fondement du
I de l’ar
ticle 60 de la
loi n° 63-156 du 23 février 1963 susvisée ;
2. Considérant que le I de
l’article 60
de la loi du 23 février 1963 susvisée dispose que « les
comptables sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils
sont
tenus d’assurer en matière
[
…
] de dépenses dans les conditions prévues par le règlement
général sur la comptabilité publique [
…
] » ; que cette responsabilité se trouve engagée « dès
lors [
…
]
qu’une dépense a été irrégulièrement payée
» ;
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3. Considérant
qu’en application de l’article 19 du décret du 7
novembre 2012 susvisé, « le
comptable public e
st tenu d’exercer le contrôle :
[
…
]
2° S’agissant des ordres de payer : […]
d) de la validité de la dette dans les conditions prévues à l’article 20
» ; qu’aux termes de
l’article 20 du même décret, «
le contrôle des comptables publics sur la validité de la dette
porte sur : […] 2° L’exactitude de la liquidation ; […]
5° La production des pièces
justificatives
[…]
» ;
4.
Considérant qu’aux termes de l’article D.
1617-19 du code général des collectivités
territoriales dans sa rédaction applicable au moment des paiements en cause : « avant de
procéder au paiement d’une dépense […], les comptables publics des collectivités t
erritoriales
[…] ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante
dans la liste définie à l’annexe I du présent code
»
; qu’en application de la rubrique 210223
de l’annexe
I au code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors applicable,
les comptables publics doivent exiger les pièces suivantes pour le paiement des primes et
indemnités : « 1. Décision de l'assemblée délibérante fixant la nature, les conditions
d'attribution et le taux moyen des indemnités ;
2. Décision de l’autorité investie du pouvoir de
nomination fixant le taux applicable à chaque agent. » ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que, pour apprécier la validité des dettes,
les comptables doivent notamment exercer leur contrôle sur la production des justifications ;
qu’à ce titre, il leur revient d’apprécier si les pièces fournies présentent un caractère suffisant
pour justifier la dépense engagée ; que pour établir ce caractère suffisant, il leur appartient de
vérifier, en premier lieu, si l’ensemble des pièces requises au titre de la nomenclature
comptable applicable leur ont été fournies et, en deuxième lieu, si ces pièces sont, d’une part,
complètes et précises, d’autre part, cohérentes au regar
d de la catégorie de la dépense définie
dans la nomenclature applicable,
de la nature et de l’objet de la dépense telle qu’elle a été
ordonnancée ; qu’enfin, lorsque les pièces justificatives fournies sont insuffisantes pour établir
la validité de la dette
, il appartient aux comptables de suspendre le paiement jusqu’à ce que
l’ordonnateur leur ait produit les justifications nécessaires ;
6.
Considérant que par délibération du 25 septembre 2003 la communauté d’agglomération
Mulhouse Sud Alsace (CAMSA) a instauré le régime indemnitaire de ses agents; que cet
établissement public de coopération intercommunale a été dissous et fusionné avec deux
communautés de communes, à compter du 1
er
janvier 2010, au sein de la communauté
d’agglomération
m
2A ; que par délibération du 24 janvier 2014 la communauté
d’agglomération m
2A a modifié le régime indemnitaire de ses agents de catégories A et B ;
En ce qui concerne le versement de «
l’indemnité administrateur
»
7. Considérant, en premier lieu,
qu’il ressort de l’examen des bulletins de paye que l
es agents
de la communauté d’agglomération m2A détenant le grade d’administrateur
ont perçu un
« complément indemnitaire » pour un montant cumulé de 167
421,84 €
à l’exclusion de tout
autre indemnité liée aux fonctions et à la manière de servir
; qu’il résulte de l’instruction qu’
en
dépit de l’imprécision de la formulation employée sur lesdits bulletins et de l’absence de
concordance avec les intitulés des indemnités mentionnées dans les délibérations en vigueur
dans l’établissement,
«
l’indemnité administrateur
» peut être regardée comme correspondant
à la prime de fonctions et de résultats instaurée par la délibération du 24 janvier 2014, laquelle
vient se substituer sur ce point aux dispositions de la délibération du 25 septembre 2003 ;
8. Considérant, en second lieu, que si le réquisitoire du 16 mai 2018 fait état de ce que dans
l’hypothèse où la
dite délibération du 24 janvier 2014 serait en rapport avec celle du
25
septembre 2003, il conviendrait de s’assurer qu’elle permettrait le contrôle de l’exactitude
des calculs de liquidation, son périmètre
n’inclut
pas, en tout état de cause, l
e constat d’une
absence de
décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination
fixant le taux applicable à
chaque agent, sans lequel le manquement du comptable ne peut être constitué au sens des
dispositions précitées ;
que dans ces conditions, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la
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responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable pour avoir versé ladite indemnité à
hauteur d’un montant de 167 421,84 €
au titre de l’exercice 2015
;
En ce qui concerne le versement du « complément indemnitaire » aux agents de catégorie A
9. Considérant, en premier lieu,
qu’il
ressort
de l’examen des bulletins de paye que les agents
de catégorie A de la communauté d’agglomération m2A ont perçu u
n « complément
indemnitaire » pour un montant total cumulé de 96
056, 65 € à l’exclusion de tout autre
indemnité liée aux fonctions et à la
manière de servir ; qu’il résulte de l’instruction qu’
en dépit
de l’imprécision de la formulation employée sur lesdits bulletins et de l’absence de
concordance avec les intitulés des indemnités mentionnées dans les délibérations en vigueur
dans l’établisse
ment, le « complément indemnitaire » peut être regardé comme correspondant
à la prime de fonctions et de résultats instaurée par la délibération du 24 janvier 2014, laquelle
vient se substituer sur ce point aux dispositions de la délibération du 25 septembre 2003 ;
10. Considérant, en second lieu, que si le réquisitoire du 16 mai 2018 fait état de ce que dans
l’hypothèse où ladite délibération du 24 janvier 2014 ser
ait en rapport avec celle du
25
septembre 2003, il conviendrait de s’assurer qu’elle permettrait le contrôle de l’exactitude
des calculs de liquidation, son périmètre
n’inclut pas, en tout état de cause, le constat d’une
absence de décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le t
aux applicable à
chaque agent, sans lequel le manquement du comptable ne peut être constitué au sens des
dispositions précitées ;
que dans ces conditions, il n’y a pas lieu de mettre en jeu la
responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable pour avoir versé cette indemnité aux
agents de catégorie A
à hauteur d’un montant de 96 056,65 €
au titre de l’exercice 2015
;
En ce qui concerne le versement du « complémentaire indemnitaire » aux agents de catégorie
B
11. Considérant, en premier lieu,
qu’il ressort de l’examen
des bulletins de paie que des agents
de catégorie B ont perçu le « complément indemnitaire » pour un montant total cumulé de
9 695,92
€ en 2015
; que pour cette ligne de paye, les
modalités d’attribution
de la part relative
au grade sont celles prévues par la délibération du 24 janvier 2014, laquelle retient une
indemnité liée au grade et une autre aux fonctions ; que cette délibération évoque par ailleurs
l’existence d’
un « complément indemnitaire tenant compte des particularités objectives liées à
la situation
administrative de l’agent »
modifiant le régime indemnitaire des agents de catégorie
B ;
qu’il résulte de l’instruction qu’
elle doit être regardée comme venant se substituer sur ce
point aux dispositions de la délibération du 25 septembre 2003 ;
qu’il suit de là que les
agents
de catégorie B ont été bénéficiaires
d’
un « complément indemnitaire »
sur le fondement d’une
décision de l'assemblée délibérante ;
12. Considérant, en second lieu, que si le réquisitoire du 16 mai 2018 fait état de ce que dans
l’hypothèse où ladite délibération du 24 janvier 2014 serait en rapport avec celle du 25
septembre 2003, il conviendrait de s’assurer qu’elle permettrait le contrôle de l’exactitude des
calculs de liquidation, son périmètre
n’inclut pas, en tout état de cause, le constat d’une
absence de décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le
taux applicable à
chaque agent, sans lequel le manquement du comptable ne peut être constitué ;
qu’au
demeurant la délibération du 24
janvier 2014 permet le contrôle de la liquidation de l’indemnité
liée au grade ; que dans ces conditions,
il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité
personnelle et pécuniaire du comptable pour avoir versé cette
indemnité, à hauteur d’un
montant de 9 695,92
€ au titre de l’exercice 2015 ;
En ce qui concerne le versement du « complément indemnitaire » versé aux agents de
catégorie C
13. Considérant
qu’il résulte de l’instruction
que les agents de catégorie C ont perçu un «
complément indemnitaire » pour un montant total cumulé de 384 223,02
€
en 2015 en
l’absence de toute délibération à la date du paiement
fixant sa nature, ses conditions
d'attribution et son taux moyen;
qu’ainsi que le reconnait l’ordonnateur,
la délibération
permettant l’attribution d’un
régime indemnitaire aux agents de catégorie C
n’a été adoptée
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que le 24 mars 2016 ; que cette délibération postérieure ne saurait être regardée comme
constituant, au sens
de la rubrique 210223 de l’annexe I au
CGCT, la décision de l'assemblée
délibérante fixant, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités
versées à ces agents en 2015 ;
qu’il suit de là qu’en payant aux agents bénéficiaires un
«
complément indemnitaire » sans disposer d’une
décision de l'assemblée délibérante, le
comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la production des justifications comme
à celles
de contrôle de l’exacte liquidation de la dépense ;
14. Considérant que, dès lors que le réquisitoire susvi
sé se fonde sur l’absence de délibération
fixant la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités litigieuses, Mme X
ne peut utilement soutenir que la co
mbinaison de la signature par l’ordonnateur des
bordereaux de mandats ainsi que la mention, sur les bulletins de paie, des indemnités versées
à chaque agent de la communauté d’agglomération
m2A,
peut s’analyser comme une décision
implicite d’attribution
desdites indemnités à leurs bénéficiaires ;
En ce qui concerne le versement de l’i
ndemnité « jour du maire »
15. Considérant que Mme X indique que les agents de m2A bénéficiaient de jours de congés
supplémentaires dits « jour du maire et du président » sur la base de quatre jours pour les
agents présents toute l’année
ou d’un
jour par trimestre entier de présence pour les agents
recrutés en cours d’année
; que les agents avaient la possibilité de racheter ces jours
supplémentaires selon un barème fixant le montant mensualisé, par catégorie de personnel et
par nombre de jours obtenus, permettant ainsi le contrôle d
e l’exacte liquidation de
l’
indemnité ; que
la législation sur le compte épargne temps semble avoir été appliquée et que
les jours de congés supplémentaires ont été repris dans la délibération du 18 décembre 2015
relative au temps de travail des agents de m2A, qui n'est cependant applicable qu'à compter
de 2016 ;
16. Considérant que des indemnités intitulées « jours du maire » ont été versées aux agents
de
la communauté d’agglomération m
2A
à hauteur de 92 238,47 €
au titre de l’exercice 2015
;
qu’il résulte de l’instruction que Mme
X ne disposait, à la date des paiements en cause,
d
’aucun
e délibération autorisant
l’indemnisation
de jours de congés supplémentaires « du
maire » ;
qu’en admettant même qu’en adoptant la délibération du 18 décembre 2015 relative
à l’évolution du temps de travail, le conseil communautaire ait entendu
régulariser
l’
indemnisation des « six jours de congés supplémentaires » évoqués, dès lors que le
manquement du comptable s’apprécie à la date du paiement, l’existence d’une délibération
postérieure au paiement et applicable à compter du 1
er
janvier 2016 ne saurait être regardée
comme constituant,
au sens de la rubrique 210223 de l’anne
xe I au CGCT, la décision de
l'assemblée délibérante fixant, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des
indemnités versées aux agents de m2A en 2015 ;
qu’il suit de là qu’en payant aux agents
bénéficiaires une indemnité dite « jour du maire
» sans disposer d’une décision de l'assemblée
délibérante, le comptable a manqué à ses obligations de contrôle de la production des
justifications comme à celles de contrôle de l’exacte liquidation de la dépense ;
17. Considérant
qu’il résulte
de
l’ensemble de
qui précède que
les pièces fournies à l’appui
des mandats de paiement du « complément indemnitaire » versé aux agents de catégorie C,
à hauteur de 384 223,02
€
et des indemnités « jour du maire » à hauteur de 92 238,47
€
, ne
permettaient
pas d’établir la validité de la dette de la communauté d’agglomération m2A
à
l’égard de
ses agents
au titre de l’exercice 2015
; qu’il appartenait dès lors au comptable de
suspendre le paiement desdites indemnités
jusqu’à ce que l’ordonnateur ait produit l
es
justifications nécessaires
; qu’en payant ces dépenses
pour un montant total cumulé de
476 461,49
€
au titre de l’exercice 2015
, Mme X a manqué à ses obligations de contrôle de la
production des justifications ;
Sur la force majeure
18. Considérant
qu’aux termes du V de l’article 60 de la loi n°
63-156 du 23 février 1963 de
finances pour 1963, « l
orsque […] le juge des comptes constate l'existence de circonstances
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constitutives de la force majeure, il ne met pas en jeu la responsabilité personnelle et
pécuniaire du comptable public » ; que la force majeure est constituée par un événement
imprévisible, irrésistible et extérieur ;
19. Considérant
qu’
aucune circonstance présentant un caractère de force majeure ne ressort
des pièces du dossier
; qu’en conséquence,
la responsabilité personnelle et pécuniaire de
Mme X
est engagée sur le fondement des dispositions précitées du I de l’article 60 de la loi du
23 février 1963 modifiée ;
Sur
l’existence d’un préjudice financier
20. Considérant
qu’aux termes du VI de l’article 60 de la loi n°
63-156 du 23 février 1963,
«
[…]
Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un
préjudice financier à l'organisme public concerné
[…]
, le comptable a l'obligation de verser
immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante » ;
21. Considérant
que, s’il est nécessaire que le service fait soit attesté pour qu’un
paiement soit
dû, une telle attestation ne suffit pas à écarter l’existence d’un
préjudice financier causé par
un manquement ; que, pour déterminer si le paiement irrégulier d'une dépense par un
comptable public a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné, il appartient au
juge des comptes d’apprécier si la dépense éta
it effectivement due et, à ce titre, de vérifier
notamment qu’elle n’était pas dépourvue de fondement juridique ;
qu’en particulier, lorsque la
volonté d’une collectivité publique, exprimée par l’assemblée délibérante compétente pour le
faire, ne s’est pas
manifestée
à l’endroit d
es bénéficiaire
d’indemnités
, les paiements effectués
au titre de celles-
ci doivent être considérés comme indus et, de ce fait, constitutifs d’un
préjudice financier pour la collectivité publique ;
En ce qui concerne le versement
de l’indemnité complémentaire aux agents de catégorie C
22.
Considérant qu’aux termes de l’article L. 5211
-4-1 du CGCT : «
[…]
Les agents transférés
(…)
conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable
ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de l'article
111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale
. […]
» ;
23. Considérant
qu’il ne résulte pas de l’instruction que les agents de catégorie C transférés
de la CAMSA vers m2A à compter du 1
er
janvier 2010 ne relevaient plus au moment du
paiement de la délibération du 25 septembre 2003 par laquelle la CAMSA avait instauré son
régime indemnitaire ; que, par suite, il n’est pas établi que
pour ces agents le versement du
complément indemnitaire en 2015 ait été dépourvu de tout fondement juridique
; qu’il résulte
de ce qui précède, qu’à défaut de disposer d’informations précises sur le montant global de
ladite prime perçue par ces agents transférés, la Chambre n’est, en tou
t état de cause, pas en
mesure de quantifier la réalité du préjudice subi par m2A
au titre de l’indemnité
complémentaire versée à l’ensemble des agents de catégorie C
;
24.
Considérant qu’il y a lieu dans ces conditions de mettre à la charge de Mm
e X la somme
non rémissible prévue à l’article 60
-VI de la loi du 23 février 1963 et par le décret n° 2012-
1386 du 10 décembre 2012 portant application de ces dispositions.
25.
Considérant que le montant du cautionnement du poste comptable pour l’
exercice 2015
est fixé à 243 000
€ et qu’aucune circonstance ne peut être retenue en l’espèce pour réduire
la somme susceptible d’être mise à la charge de
Mme X
; qu’ainsi le montant de cette somme
peut être fixé à 364
€ ;
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En ce qui concerne le versement
de l’indemnité «
jour du maire »
26. Considérant
qu’en se bornant à affirmer que la communauté d’agglomération m2A n’a pas
subi de préjudice,
l’ordonnateur
n’
établit pas que les sommes irrégulièrement payées étaient
dues et que la collectivité
n’aurait pas subi d’appauvrissement définitif
du fait du manquement
du comptable à ses obligations ;
27. Considérant que contrairemen
t à ce qu’allègue la comptable,
la signature réitérée par
l’ordonnateur des bordereaux de mandat n’est en aucun cas de nature à suppléer l’absence
de délibération préalable du conseil communautaire instaurant et délimitant le versement des
indemnités en cause ;
28. Considérant que la circonstance que le service ait été fait par les agents bénéficiaires des
indemnités litigieuses constitue une condition nécessaire mais pas suffisante pour que leur
paiement soit dû
; qu’elle
ne saurait exonérer Mme X de sa responsabilité, dès lors que le
manquement concerne l’insuffisance des pièces justificatives venant à l’appui des mandats de
paie e
t non l’absence de service fait
;
29. Considérant que le comptable de la communauté
d’agglomération m2A
ne disposait
d’aucune preuve de la volonté de l’assemblée délibérante
d’
autoriser l
’attribution
des
indemnités « jours du maire
» à l’ensemble du
personnel communautaire
au titre de l’exercice
2015 ;
30.
Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il
y a donc lieu de considérer le versement
de l’indemnité «
jours du maire » comme indu et de nature à causer un préjudice financier à
l’établissement
à hauteur de 92 238,47
€
;
31. Considérant que Mme X doit être déclarée débitrice de la
communauté d’agglomération
m2A
d’une somme de
92 238,47
€
;
qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi
du 23 février 1963, le débet porte intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise
en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
; qu’en
l’occurrence, le point de départ du calcul des intér
êts est fixé au 11 octobre 2018, date à
laquelle Mme X a accusé réception du réquisitoire du 16 mai 2018 ;
32. Considérant
qu’aux termes du IX de l’article 60 de la loi du 23
février 1963 modifié : « Les
comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans les
cas mentionnés au troisième alinéa du même VI peuvent obtenir du ministre chargé du budget
la remise gracieuse des sommes mises à leur charge. Hormis le cas du décès du comptable
ou de respect par celui-ci, sous l'appréciation du juge des comptes, des règles de contrôle
sélectif des dépenses, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée au comptable
public dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu par le juge des
comptes,
le ministre chargé du budget étant dans l’obligation de laisser à la charge du
comptable une somme au moins égale au double de la somme mentionnée au deuxième
alinéa dudit VI » ;
33. Considérant que l
’examen du plan de contrôle hiérarchisé de la d
épense pour 2015,
validé
par la direction départementale des finances publiques du Haut-Rhin le 26 janvier 2015,
montre que des règles de contrôle sélectif de la paie existaient
; qu’en particulier, le comptable
devait exercer le contrôle mensuel du mandatement de la paie, le contrôle trimestriel des
nouveaux entrants, ainsi que le contrôle des rappels de traitement ou indemnitaires ou autre
type de rappel versés au titre de novembre 2015, a posteriori
; qu’il résulte de l’instruction
que
le contrôle des rappels de traitement ou des rappels indemnitaires intervenant sur la paie de
novembre 2015 recouvre notamment des rappels de « complément indemnitaire » et
d’indemnités
« jours du maire »
; qu’
il résulte des dispositions précitées
qu’à
défaut d’avoir
correctement mis en œuvre le
plan de contrôle hiérarchisé de la dépense pour 2015, la somme
laissée à la charge de Mme X par le ministre chargé du budget ne pourra être inférieure à 3
‰
J 2019-0005-
Communauté d’agglomération Mulhouse Alsace Agglomération
8.
3-5 rue de la Citadelle
–
57000 METZ -T 03 54 22 30 49
–
E-mail : grandest@crtc.ccomptes.fr
du montant du cautionnement prévu pour le poste compta
ble, lequel s’élève à
243 000
€ pour
l’année 201
5 ;
Par ces motifs, décide :
Article 1
er
:
La responsabilité de Mme X est engagée à raison
du paiement d’une indemnité
complémentaire aux agents de catégorie C pour un montant de 384 223,02
€
.
Ce
manquement n’ayant p
as causé à
la communauté d’agglomération Mulhouse Alsace
Agglomération de préjudice financier dont la réalité a été quantifiée, Mme X
s’acquittera d’une
somme non rémissible de trois cent soixante-
quatre euros (364 €) au titre de l’exercice 2015.
Article 2 :
La responsabilité de Mme X est engagée à raison
du paiement d’une indemnité
« jours du maire » pour un montant de 92 238,47
€
.
Ce manquement ayant causé un préjudice financier à la commun
auté d’agglomération
Mulhouse Alsace Agglomération, Mme X est mise en débet pour la somme de quatre-vingt-
douze mille deux cent trente-huit euros et quarante-sept centimes (92 238,47
€
) au titre de
l’exercice
2015 ; cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date de notification
du réquisitoire, soit le 11 octobre 2018.
Article 3 :
Pour l’application des dispositions du second alinéa du paragraphe IX de l’article
60
de la loi du 23 février 1963 susvisée, le montant de la remise gracieuse qui pourra être
accordée à Mme X
au titre du débet prononcé ci-dessus, devra comporter un laissé à charge
qui ne pourra être inférieur à sept cent vingt-neuf euros (729
€) soit 3
‰ du montant du
cautionnement du post
e comptable pour l’exercice 201
5 fixé à 243 000
€.
Article 4 :
Il est sursis à statuer sur la décharge de Mme X pour sa gestion au titre de
l’exercice
2015
jusqu’à apurement
de la somme et du débet ci-dessus prononcés.
Article 5 :
Le présent jugement sera notifié à Mme X, comptable, à M. Y, président de la
communauté
d’agglomération Mulhouse Alsace Agglomération, ainsi qu’au ministère public
près la chambre.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Grand Est, hors la présence du rapporteur et
du procureur financier, le douze mars deux mille dix-neuf, par M. Luc Héritier, vice-président
de la chambre régionale des comptes Grand Est, président de séance, M. Christophe
Berthelot, président de section, MM. Bernard Gonzales et Thomas Gros, premiers conseillers
et M. Nacer Bernou, conseiller.
La greffière de séance,
Signé
Corinne GERTSCH
Le président de séance,
Signé
Luc HERITIER
J 2019-0005-
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9.
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–
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La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de
mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent jugement a été signé par le président de la chambre régionale des
comptes Grand Est et par le secrétaire général.
Le secrétaire général,
Signé
Patrick GRATESAC
Le président de la chambre,
Signé
Dominique ROGUEZ
En application des articles R. 242-19 à R. 242-21 du code des juridictions financières, les
jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel
devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de leur notification selon
les modalités prévues aux articles R. 242-22 à R. 242-24 du même code.
Collationné, certifié conforme à la minute déposée au greffe,
de la chambre régionale des comptes Grand Est, par moi
A Metz, le
Carine COUNOT, greffière