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Le présent document, qui
a fait l’objet d’une contradiction avec
les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 28 juin 2018.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
Communauté intercommunale
du Nord de La Réunion (CINOR)
Les services délégués
Exercices 2012 et suivants
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
2
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
4
PROCÉDURE
............................................................................................................................
5
1
L’ASSAINISSEMENT COL
LECTIF
...................................................................................
6
1.1
Le réseau
.........................................................................................................................
6
1.1.1
L’état du
réseau et le pilotage des investissements
...........................................................
6
1.1.2
Les eaux usées d’origine non domestique
........................................................................
9
1.1.3
L’exploitation du réseau par le délégataire
.....................................................................
10
1.2
Les stations d’épuration
................................................................................................
11
1.2.1
La station d’épuration du Grand Prado
...........................................................................
11
1.2.2
La station d’épuration de Terre des Trois Frères
............................................................
14
1.3
La situation financière du budget annexe de l’assainissement
.....................................
17
1.3.1 La fiabilité des comptes et la qualité des prévisions budgétaires
...................................
17
1.3.2 Le financement des investissements
...............................................................................
18
2
LE TRANSPORT URBAIN
................................................................................................
20
2.1
Le service rendu par les délégataires successifs
...........................................................
20
2.1.1
L’offre et la qualité du service
........................................................................................
20
2.1.2 Les rapports annuels du délégataire
................................................................................
22
2.1.3 La passation de la nouvelle délégation de service public
...............................................
25
2.2
Le coût croissant du service
..........................................................................................
28
2.2.1 La situation financière des cotraitants
............................................................................
28
2.2.2 Le financement du service
..............................................................................................
30
2.3
Les marges de manœuvre
..............................................................................................
32
2.3.1 La lutte contre la fraude
..................................................................................................
32
2.3.2 La politique tarifaire
.......................................................................................................
33
2.3.3
L’adaptation du service
...................................................................................................
34
ANNEXES
...............................................................................................................................
35
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
2
SYNTHÈSE
La Communauté intercommunale du nord de La Réunion (CINOR)* exerce dans le
cadre de ses compétences, les services publics d’assainisse
ment collectif et de transport urbain.
Elle a fait le choix de les déléguer à des entreprises. Le contrôle des délégataires en matière
d’assainissement collectif apparait satisfaisant
; celui des titulaires successifs de la délégation
de transport urbain n
’a été
que récemment renforcé.
Le réseau d’assainissement de la CINOR présente des dysfonctionnements importants
connus depuis plusieurs années. Alors que le schéma directeur de l’assainissement révisé en
2015 donne la priorité à la réhabilitation du résea
u, les travaux mis en œuvre depuis consistent
en des extensions visant à augmenter le nombre de raccordements et optimiser les capacités des
stations d’épuration. Ces décisions sont contradictoires. La programmation des investissements,
qui n’a pas été dél
ibérée à la différence du schéma directeur, ne constitue pas une déclinaison
opérationnelle de la stratégie d’ensemble actée par le conseil communautaire. Ce choix est
également préjudiciable à l’efficacité globale du système d’assainissement collectif
: les risques
d’infiltrations d’eaux pluviales, de débordements et de rejets en milieu naturel en sont accrus.
Les concessions des stations d’épuration du Grand Prado et de Terre des Trois Frères
devaient permettre à l’agglomération de respecter, avec plus d’
une décennie de retard, les
normes nationales et européennes en matière d’assainissement. Cet objectif a été atteint
en 2014
et 2015, mais partiellement en 2016. Malgré la construction pour un coût de 97
M€ de ces
nouvelles stations d’épuration, utilisées en deçà de leurs capacités, des difficultés demeurent.
Des dysfonctionnements sont survenus au poste de relèvement de la Jamaïque. D’autres
difficultés sont encore à résoudre comme la dégradation accélérée de certains bétons à la station
d’épuration du Grand Prado. La maîtrise des déversements du site d’enfouissement des déchets
de Sainte-
Suzanne est un enjeu majeur pour la nouvelle station d’épuration
de cette commune.
En raison de l’action insuffisante de la CINOR, le réseau d’assainissement souffre enfin de
graves défectuosités.
La redevance d’assainissement est inférieure de l’ordre de 20
% à la moyenne nationale
évaluée à 1,93 € par m
3
. Une partie de la redevance revient à la CINOR qui demeure chargée
du financement et de la réalisation des travaux de réhabilitation et d’extension du réseau, l’autre
partie est perçue par les délégataires. L’intercommunalité est confrontée à un enjeu d’équilibre
économique des
contrats de délégation. Les consommations d’eau étant nettement inférieures
aux prévisions, les comptes d’exploitation des délégataires sont déficitaires. La part de
redevance d’assainissement perçue par la CINOR est elle aussi insuffisante pour assurer le
maintien en état et l’extension du réseau. Le délégant doit interroger les mécanismes financiers
des contrats, comme il a pu le faire par la révision des tarifs des abonnés rattachés à la station
du Grand Prado, afin de préserver la qualité du service rendu.
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
3
L’offre de transport public urbain sur le territoire intercommunal, déjà supérieure à la
moyenne nationale
1
, a été confortée avec la nouvelle délégation de service public signée en
janvier 2016. L’utilisation des transports urbains est plus répandue que dans les territoires
comparables en France : les habitants de la CINOR ont effectué en moyenne 113 voyages en
2017 contre 61 en moyenne nationale.
Le coût du transport urbain a progressé lors du renouvellement de la délégation du
réseau Citalis. Alors que l’augmentation des distances commerciales et des coûts d’exploitation
de 12 % ont été proportionnelles, les subventions versées par la communauté intercommunale
ont cru de 26 % passant de 104 € par habitant en 2013 à 147 € en 2016.
La communauté intercommunale
dispose de marges de manœuvre pour accroître la
performance du service et sa rentabilité. Certaines lignes sont très peu utilisées. Le réseau
pourrait être optimisé afin de réduire le nombre de lignes qui ne rencontrent par leur public. Les
tarifs n’ont pas été révisés depuis 2002
; leur alignement sur les tarifs moyens de La Réunion
représente 1,4 M€ de r
ecettes supplémentaires. La fraude est estimée selon des enquêtes à 18 %
des voyages et son coût annuel à 0,7 M€ mais seulement 1,9 % des personnes contrôlées sont
verbalisées. Les efforts récents en matière de lutte contre la fraude constituent un levier pour
améliorer la gestion du service.
La CINOR est confrontée à plusieurs difficultés dans la mise en œuvre de la nouvelle
délégation alors qu’elle les avait identifiées lors de la phase de passation sans pour autant les
prendre en compte. Le candidat pres
senti avait sollicité un délai d’un an pour faire évoluer le
réseau ; un délai de deux mois a été fixé par le contrat. En raison de manifestations d’usagers,
plusieurs lignes no
uvelles n’ont pas été ouvertes
;
d’autres ont été maintenues. Cette situation
représente un coût annuel supplémentaire compris entre 1 et
1,5 M€, soit 5
% des contributions
versées par l’agglomération au délégataire.
La situation financière de certains cotraitants est préoccupante. Au cours du précédent
contrat, deux cotraitants avaient déjà échoué à opérer les missions qui leur étaient confiées. Les
comptes de la première année de la nouvelle délégation ont été déficitaires de 0,7
M€. Si ce
déficit se confirmait, la soutenabilité de l’offre de services proposée aux usagers dans le ca
dre
de la délégation de service public pourrait être compromise.
La CINOR, qui avait initialement prévu que le contrat soit signé avec une société dédiée,
est revenue sur cette obligation, préservant en cela les intérêts de la Sodiparc, société
d’économie mixte titulaire de l’ancienne délégation et dont elle est actionnaire. Des
informations utiles à la préparation des offres, telles que les conventions de sous-
traitance, n’ont
pas été communiquée
s aux candidats, portant atteinte au principe de liberté d’ac
cès à la
commande publique.
1
Selon les données issues du rapport annuel du GART,
année 2013 des transports urbains
, édité en 2015.
*
La communauté intercommunale du nord de La Réunion (CINOR) est définie également dans le texte par
agglomération ou communauté d’agglomération.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
4
RECOMMANDATIONS
2
Régularité
Numéro
Domaine
Mis en
œuvre
Mise en
œuvre
en cours
Non mis
en
œuvre
Page
1
Comptabilité
Faire figurer à l’inventaire et au bilan
du budget annexe de l’assainissement
l’ensemble des biens de la CINOR en
application d
e l’instruction comptable
M 49 et des délégations de service
public de concession des stations
d’épuration.
X
17
Performance
Numéro
Domaine
Mis en
œuvre
Mise en
œuvre
en cours
Non mis
en
œuvre
Page
1
Situation
financière
Adopter
une
programmation
pluriannuelle des investissements en
matière
d
assainissement
collectif
conforme aux priorités définies par le
schéma
directeur,
soutenable
financièrement et compatible avec les
capacités techniques des services.
X
8
2
Situation
financière
Adopter un calendrier conduisant à une
révision progressive de la part de la
redevance
d’assainissement perçue par
la CINOR.
X
19
3
Achat
Définir et mettre en œuvre avec le
délégataire du transport urbain une
méthodologie propre à assurer la
transparence et la fiabilité des données
financières
et
comptables
pour
circonscrire les risques liés à leur
interprétation.
X
24
4
Situation
financière
Améliorer la gestion du service public
de transport urbain par des actions en
matière de lutte contre la fraude, de
politique tarifaire et
d’organisation
du
service.
X
35
2
Les recommandations sont classées sous la rubrique « régularité » lorsqu’elles ont pour objet de rappeler
la règle (lois et règlements) et sous la rubrique « performance » lorsqu’elles portent sur la qualité de la gestion,
sans qu
e l’application de la règle ne soit mise en cause.
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
5
PROCÉDURE
Le contrôle de la gestion et des comptes de la communauté intercommunale du nord de
La Réunion (CINOR) a été ouvert le 19 juin 2017 par lettre du président de la chambre à
l’ordonnateur en fonctions. Par lettre du président datée du même jour, ses prédéces
seurs en ont
également été informés.
En application de l
article L. 211-10 du code des juridictions financières, ce contrôle a
intégré celui des comptes de la délégation du service public de collecte des eaux usées, de la
concession de travaux et de service public pour l
épuration des eaux usées et de traitement de
boues de la station d
épuration de Terre des Trois Frères ainsi que ceux de la concession de
travaux et de service public pour l
épuration des eaux usées et de traitement des boues de la
station d
épuration du Grand Prado. Les représentants légaux des sociétés Grand Prado 360 et
CISE Réunion en ont été informés par courriers du 29 septembre 2017 ; celui de la société Terre
des Trois Frères par courrier du 12 octobre 2017. Le contrôle a également été étendu aux
comptes de la délégation de service public de transport urbain ; la société Sodiparc, mandataire
des deux groupements délégataires successifs en a été informée par courrier du 29 novembre
2017.
En application de l’
article L. 243-1 du code des juridictions financières, les entretiens
de fin de contrôle ont eu lieu le 12 février 2018 avec l’ordonnateur en fonctions
, les 9 et
12 février 2018 avec les ordonnateurs précédents.
Lors de sa séance du 1
er
mars 2018, la chambre a arrêté des observations définitives qui
ont été adressées le 26 mars 2018 au président de la CINOR, le 28 mars 2018 à ses
prédécesseurs. Le président a répondu par courrier enregistré à la chambre le 1
er
juin 2018. En
application de l’article R. 243
-5 du code précité, la chambre a transmis des extraits aux
représentants légaux de cinq sociétés titulaires de délégations de service public de la CINOR.
Chacune d’entre elles a apporté une répo
nse.
La chambre, dans sa séance du 28 juin 2018, a arrêté les observations définitives
suivantes.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
6
1
L’ASSAINISSEMENT COL
LECTIF
Parmi l’ensemble de ses compétences obligatoires, la CINOR a en charge la gestion du
réseau d’assainissement des eaux usées. Dans le cadre de l’assainissement collectif, elle assure
le contrôle des raccordements au rése
au public de collecte, la collecte, le transport et l’épuration
des eaux usées, ainsi que l’élimination des boues produites. L
a CINOR a révisé son schéma
d’assainissement collectif en juin 2015 établi en application de l’article L.
2224-8 du code
général des collectivités territoriales.
En 2013, la CINOR a changé de délégataire pour l’exploitation du réseau
d’assainissement lors du renouvellement du contrat d’affermage. Elle a mis à jour son règlement
du service de l’assainissement collectif en avril 2017.
La création et l’entretien des réseaux publics de collecte des eaux usées sont souvent
défaillants en outre-mer. La France a été condamnée en novembre 2013 par la Cour de justice
de l’Union européenne pour manquement en l’absence de mise aux normes du
traitement des
eaux résiduaires urbaines dans cinq agglomérations, dont celle de Saint-
Denis, avant l’échéance
de l’an 2000. Un rapport interministériel a émis des propositions pour un plan d’action pour
l’eau dans les départements et régions d’outre
-mer en juin 2015
3
.
La chambre observait dans son précédent rapport que les installations ne respectaient
pas les obligations résultant de la directive européenne du 21 mai 1991 modifiée relative au
traitement des eaux résiduaires urbaines. Les mises en service
des stations d’épuration du Grand
Prado à Sainte-Marie en avril 2013 et de Terre des Trois Frères à Sainte-Suzanne en juillet 2013
devaient permettre à la CINOR de se conformer à ses obligations avec néanmoins plusieurs
années de retard ; les mises en demeure initiales du préfet demandaient que les stations
d’épurations entrent en service la première en octobre 2010 et la seconde en juillet 2011.
Après
deux premières années satisfaisantes en 2014 et 2015, la police de l’eau a relevé des
non-conformités ; de
s mesures ont été prises par la CINOR pour permettre d’en obtenir la levée.
1.1
Le réseau
1.1.1
L’état du réseau et le pilotage des investissements
En 2016, le réseau était constitué de 426,5 km de canalisations et de 56 postes de
relèvement
4
. L’annexe n°
1 présente
le zonage d’assainissement des eaux usées qui dessert plus
de 70 300 abonnés. La croissance du réseau est soutenue avec 62 % de linéaire supplémentaire
et 126 % de nouveaux abonnés entre 1999 et 2016. Le réseau est exploité par la société CISE
Réunion sou
s la forme d’un contrat d’affermage
; il achemine les eaux usées vers deux stations
3
Conseil général de l’environnement et du développement durable, Conseil général de l’alimentation, de
l’agriculture et des espaces ruraux, Inspection générale de l’administration,
Propositions pour un
plan d’action
pour l’eu dans les départements et régions d’outre
-mer et à Saint-Martin
, juin 2015.
4
Un poste de relèvement est un équipement de pompage qui renvoie sous pression des eaux usées pour
franchir un obstacle (rivière, relief, contre-pente) et p
ermettre de les acheminer vers une station d’épuration.
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
7
d’épuration, le Grand
-Prado et Terre des Trois-Frères, concédées par des délégations de service
public.
Les dysfonctionnements du réseau d
assainissement
Le schéma d
assainissement collectif, notamment le diagnostic initial achevé en mars
2012, identifie les fragilités et défaillances du réseau. Celles-ci sont confirmées par les rapports
annuels des deux délégataires successifs du service de collecte des eaux usées. Selon le schéma
directeur de l
assainissement, l
état du réseau s
est globalement dégradé entre 1999 et 2011.
Les réseaux existants souffrent de problèmes d
accessibilité, de vétusté et de
sous-dimensionnement : 16 km de réseaux sont en amiante ciment et 35 km sont à faible
diamètre à Saint-Denis, une trentaine de zones sont inaccessibles sans démolition. Des
contre-pentes, des pentes trop faibles et des infiltrations d
eaux pluviales entraînent des points
noirs recensés par le délégataire.
Les postes de relèvement ne sont pas suffisamment sécurisés et étaient, en 2012, pour
un tiers d
entre eux vétustes. Une présence importante de sulfure d
hydrogène engendre des
dégradations des équipements et les pompages sont obstrués par des phénomènes
d
ensablement et la présence de graisse.
Sources
: Chambre régionale des comptes d’après le d
iagnostic des systèmes d
assainissement de la CINOR, les
rapports annuels des délégataires Véolia (2012) et CISE Réunion (2013 à 2016), le schéma directeur de
l
assainissement.
De 2010 à 2014, la programmation pluriannuelle des investissements n
a été réalisée
qu
à hauteur de 66 %. Les réhabilitations et renforcements de réseaux se sont élevés à 10,4
M€,
soit 45 % des crédits initialement ouverts. Les observations des délégataires successifs sur les
points sensibles ont été maintenues de manière récurrente dans les rapports annuels.
Le schéma directeur de l
assainissement couvrant la période 2016 à 2025 retient un
besoin élevé d’investissement.
Il donne la priorité dans un premier temps aux renforcements et
aux réhabilitations, soit 35,9 M€ sur la période, pour réaliser dans un second temps des
extensions estimées à 93 M€.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
8
Programmation des réhabilitations et extensions
dans le schéma directeur de l’assainissement
en millions d
euros
2016-2018
2019-2021
2022-2025
Total
Réhabilitation
29,7
5,7
0,5
35,9
Extension
9,7
33,2
50,1
93,0
Source
: Schéma directeur de l’assainissement 2016
-2025.
La programmation pluriannuelle des investissements (PPI) présentée à la commission
de l
environnement en juillet 2015 inverse l
ordre des priorités retenu dans le schéma directeur
adopté un mois auparavant par le conseil communautaire. La programmation procède à une
estimation des besoins de 47,7 M€ pour la période 2016
-2018 puis fixe un plafond
d’autorisations de dépenses de 40,4
M€.
Les extensions, 28,0
M€, représentent
le triple de celles
prévues dans le schéma directeur, 9,7
M€
; les réhabilitations sont prévues à hauteur de 12,4
M€
contre plus
du double dans le schéma directeur, 29,7 M€.
La programmation pluriannuelle qui
n’a pas été adoptée par le conseil communautaire révise à la baisse les objectifs initialement
retenus ; elle i
nverse l’ordre des priorités du
schéma directeur adopté par le conseil
communautaire après plusieurs année d
expertise technique.
Comparaison du schéma directeur et de la programmation pluriannuelle des
investissement (PPI) 2015-2018
Source : Chambre
régionale des comptes d’après le schéma directeur de l’assainissement 2016
-2025 adopté au
conseil communautaire du 25 juin 2015 et la programmation pluriannuelle des investissements en assainissement
présentée à la commission environnement du 9 juillet 2015.
29,7
18,5
12,4
9,7
29,2
28
0
10
20
30
40
50
60
Schéma directeur
Priorité 1 (2016-2018)
PPI 2015-2018
Estimation des besoins
2016-2018
PPI 2015-2018
autorisations 2016-
2018
en milliones d'euros
Extensions
Réhabilitations
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
9
La PPI n
’a été mise en œuvre qu’
au deux tiers en 2015 et pour moitié en 2016. Les
extensions de réseaux présentent des niveaux d
achèvement supérieurs aux réhabilitations. La
CINOR n
atteint pas les objectifs qu
elle se fixe en matière d
investissement sur les réseaux.
Alors que les défaillances de ces derniers sont connues et identifiées, les réhabilitations
sont retardées ; la programmation des investissements privilégie les extensions. Les opérations
d’extensions de réseaux sont à la fois moins longu
es et éligibles à certaines subventions, ce qui
n’incite pas la CINOR à réaliser les nécessaires réhabilitations.
Ce choix vise à augmenter le
nombre de raccordements au réseau d’assainissement et la base de calcul de la redevance. Il
permet d’amplifier la
quantité d’effluents traités par les stations d’épuration actuellement
utilisées en deçà de leurs capacités nominales. La priorité donnée aux extensions a pour
conséquence de remédier insuffisamment aux dysfonctionnements observés dans les parties
ancienn
es du réseau avec des risques accrus d’infiltration d’eaux pluviales, de débordements et
de rejets en milieu naturel.
La réalisation des investissements programmés est limitée par les capacités financières
du budget annexe et freinée par l
organisation interne des services de la CINOR. La répartition
des responsabilités entre les directions de l’assainissement, des infrastructures, des finances et
de la commande publique vise à sécuriser les procédures. Elle ralentit toutefois la capacité de
la CINOR à pour
suivre de manière simultanée un nombre important de chantiers. L’état
d’avancement des projets de rénovations et extensions n’est pas précisément connu de
l’ensemble des services concernés, ni leurs coûts réels.
La CINOR a indiqué son intention de suivre
la recommandation de la chambre d’adopter
et de réviser régulièrement la programmation pluriannuelle des investissements en matière
d’assainissement
en conformité avec les priorités définies par le schéma directeur
; l’ensemble
des opérations doit être soutenable financièrement et compatible avec les capacités techniques
des services.
1.1.2
Les eaux usées d’origine non domestique
Une part significative de eaux collectées est d
origine non domestique : seuls quatre
établissements susceptibles d
avoir un impact significatif sur le système de collecte tels que les
installations classées pour la protection de l
environnement, les établissements de soins ou les
garages et restaurants, étaient conventionnés avec la CINOR en 2016.
En application de l
article L. 1331-10 du code de la santé publique, tout déversement
d
eaux usées autres que domestiques dans le réseau public de collecte doit être préalablement
autorisé par la communauté intercommunale
; l’absence de réponse vaut rejet. L’article
L. 1337-2 sanctionne de 10
000 € d’amende les versements sans autorisation. L’article
L. 1331-7-
1 précise que le raccordement, à sa demande, d’un établissement dont les eaux usées
résultent d’utilisations de l’eau assimilable à un usage domestique est de droit dans la limite
des ca
pacités de transport et d’épuration des installations existantes ou en cours de réalisation.
Ces dispositions visent à veiller à la bonne compatibilité des effluents industriels avec le
système
d’assainissement
.
Elles sont reprises dans le règlement d’assa
inissement de la CINOR
avec des modalités différentes selon qu’il s’agisse d’eaux assimilables à des eaux domestiques
ou d’eaux usées non domestiques
. S
’agissant des eaux assimilables à des eaux domestiques, le
règlement prévoit que le propriétaire effectu
e sa demande à l’exploitant du service
; bien que le
raccordement soit de droit, la CINOR a fait le choix de maintenir des conventions. S
agissant
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
10
des eaux usées non domestiques, la plupart des établissements concernés ne disposent pas
d’autorisation.
La CINOR a établi un accord cadre pour confier à un prestataire privé le contrôle des
branchements au réseau d’eaux usées vis
-à-vis des professionnels concernés en avril 2017 pour
un nombre maximum de 200 à Saint-Denis, 50 à Sainte-Marie et 50 à Sainte-Suzanne. La
chambre invite la CINOR à réellement mettre en œuvre cette démarche
tardive, à la poursuivre
en prenant des mesures correctives à l’égard des établissements concernés et à conclure des
conventions avec chacun des établissements générant des eaux usées non domestiques.
1.1.3
L’exploitation du réseau par le délégataire
Le 24 décembre 2012, la CINOR a signé avec CISE Réunion, filiale du groupe Saur,
une délégation de service public
d’une durée de 7 ans pour l’exploitation des réseaux de collecte
des eaux usées sur le territoire des trois communes à compter du 1
er
janvier 2013. Il existait
auparavant deux délégations distinctes avec Véolia
: l’une couvrant Saint
-Denis, la seconde
couvrant Sainte-Marie et Sainte-
Suzanne. La délégation prend la forme d’un afferma
ge, contrat
par lequel un contractant s’engage à gérer un service public, à ses risques et périls, contre une
rémunération versée par les usagers. Le fermier supporte les frai
s d’exploitation et d’entretien
du réseau mais ne porte pas les investissements lourds.
L’équilibre prévisionnel du contrat n’a pas été atteint au cours des quatre premières
années du nouvel affermage mais les écarts avec les estimations initiales demeurent limités.
Comptes prévisionnels et comptes annuels 2013-2016 de CISE Réunion
Sources
: Chambre régionale des comptes d’après l’annexe 7 du contrat d’affermage et les rapports annuels du
délégataire.
-0,33
0,21
0,21
0,21
-0,46
-0,13
-0,25
0
-0,5
-0,4
-0,3
-0,2
-0,1
0
0,1
0,2
0,3
2013
2014
2015
2016
en millions d'euros
Résultat d'exploitation prévisionnel
Résultat d'exploitation réel
COMMUNAUTÉ INTERCOMMUNALE DU NORD DE LA RÉUNION
11
La rémunération du délégataire
n’a pas fait l’objet de révision contractuelle
. Ce dernier
sollicite dans son rapport annuel la réalisation de travaux urgents tels que le renforcement de
certains postes de relèvement et le renouvellement des conduites les plus vétustes en amiante
ciment.
L
exécution du contrat d
affermage a souffert de dysfonctionnements au poste de
relèvement de la Jamaïque. Ce poste est névralgique pour le réseau d
assainissement depuis
2013 : il assure le transfert des effluents du réseau d
assainissement de Saint-Denis vers la
station d
épuration du Grand Prado. Des dysfonctionnements sur le système de pompage ont
co
nduit en 2017 à une reprise des désordres pour un montant estimé à 1,2 M€. En
2015, les
débordements ont entraîné le rejet sans traitement en milieu naturel de 170 000 m
3
d
eaux usées.
Le délégataire a estimé à 162
000 € les surcoûts entraînés par les dysf
onctionnements de ce
poste de relèvement entre novembre 2015 et avril 2017 hors charges de personnel
supplémentaires
, soit 12 % des charges d’exploitation hors charges de personnel
. Une expertise
rendue en juillet 2017 conclut à une responsabilité partagée entre la conception et la réalisation
du poste de relèvement ; elle estime le coût des travaux à 800
000 €
. La défense des intérêts de
la CINOR
pourrait l’inciter à engager un contentieux
afin
d’établir
les responsabilités et fixer
le montant du préjudice subi.
1.2
Les stations d’épuration
La vétusté et les capacités des anciennes stations d’épuration de la Jamaïque
(Saint-Denis) et de la Marine (Sainte-Suzanne) ne permettaient pas de traiter efficacement les
effluents. Les résultats des analyses étaient en to
talité non conformes à la station d’épuration
de la Jamaïque et seules 12,5 % étaient conformes à Sainte-Suzanne. Ces stations ont été
fermées en 2013
lors de la mise en service des stations d’épuration du Grand Prado et de Terre
des Trois Frères.
1.2.1
La stati
on d’épuration du Grand Prado
Le 26 mai 2010, la CINOR a signé avec le groupement « Grand Prado 360° » dont le
mandataire est Véolia Eau un contrat de concession d
une durée de 20 ans pour la conception,
la construction et l
exploitation de la station d
épuration du Grand Prado sur la commune de
Sainte-Marie.
1.2.1.1
Le financement de l’ouvrage
Le coût de la station d’épuration avait été initialement
estimé
à 74,2 M€, les travaux de
rejet à la côte des eaux épurées à 3,9 M€ et les prestations d’assistance à 1,6 M€, soit un coût
total de 79,7 M€. Le
coût réel
a été de 84,1 M€. L’écart de 4,4 M€, soit 5,5 % de
l’investissement, a été supporté principalement par la CINOR. Les subventions obtenues de
l’Union européenne, de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, de l’Office de l’eau
de La Réunion et du département se sont élevées à 28,6 M€ contre 32,6 M€ selon le financement
prévisionnel adopté en juin 2010. Le financement a été supporté pour moitié par le
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
12
concessionnaire. Les subventions attendues ont permis à la CINOR de ne financer que 11,1 %,
de l’opération.
En contrepartie du financement d’une partie de l’investissement par le concessionnaire,
la délégation de service public l’autorise à percevoir une composante de la redevance
d’assainissement payée
par les usagers ; celle-ci correspond à un quart du prix facturé de
l’assainissement.
1.2.1.2
Le dimensionnement de la station d’épuration
La station d’épuration du Grand Prado a été dimensionnée pour une capacité de
dépollution de 170 000 équivalent habitant extensible à 235 000 équivalent habitant, soit un
triplement des capacités par rapport à l’ancienne station d’épuration de la Jamaïque
5
. L’analyse
de l’utilisation des capacités épuratoires présentée à l’annexe n°
2 montre que les capacités
théoriques ne sont
utilisées qu’à une hauteur moyenne de 56 % en 2015 et 2016. La charge
moyenne annuelle entrante s’élevait à 95
701 équivalent habitant en 2015 et à 94 887 équivalent
habitant en 2016 ; la charge maximale en entrée atteint toutefois 134 640 équivalent habitant
6
.
Cinq ans après son ouverture, la station d’épuration est utilisée en moyenne en deçà de
ses capacités sans perspective d’augmentation significative des effluents à traiter. La priorité
donnée à l’extension du réseau de collecte plutôt qu’à sa réhabi
litation vise à augmenter la
quantité d’effluents traités et l’assiette de la redevance. Les extensions de réseaux ne
compensent pas la diminution tendancielle de la consommation individuelle d’eau
7
. Selon la
programmation des travaux d’extensions 2015
-2018, les abonnés supplémentaires seraient de
3 800 en 2018 par rapport à 2014, soit 6,1 %. Ce rythme de progression est équivalent à celui
observé depuis 2013
; il n’apparait pas suffisant pour se rapprocher des capacités nominales de
la station d’épuration.
Dans les conditions actuelles de baisse de la consommation d’eau par les
ménages, à défaut d’amplifier les extensions de réseau, seule une augmentation significative de
la population engendrant une augmentation de la consommation d’eau par abonné permettr
ait
de se rapprocher à la fin de la durée de la concession des capacités nominales de l’ouvrage. La
tendance observée depuis 2008 est
celle d’
une
stabilité de la population de l’agglomération.
1.2.1.3
Les performances techniques
La station d’épuration du Grand Pr
ado repose sur des techniques nouvelles à La
Réunion. Les performances de la station d’épuration ont été conformes aux normes européennes
et nationales en 2014 et 2015. Les progrès attendus par rapport à l’ancienne station d’épuration
de la Jamaïque où les tests étaient en totalité non conformes ont ainsi été initialement atteints.
En 2016, les dysfonctionnements au poste de relèvement de la Jamaïque ont entraîné une
non-conformité des performances du réseau bien que les équipements soient conformes. La
CIN
OR a demandé à la police de l’eau de considérer qu’il s’agissait d’un dysfonctionnement
relevant de circonstances exceptionnelles non directement liées à un défaut de conception ou
d’entretien.
5
La
capacité d’épuration de
la stat
ion d’épuration de la Jamaïque
était de 61 667 équivalent habitant.
6
Source : www.assainissement.developpement-durable.gouv.fr
7
Le volume prélevé d’eau en 2015 s’
élève à 199,7 millions de m
3
dont 140 d’adduction d’eau potable
contre 227,2 millions de m
3
dont 142,6 d’adduction d’eau potable en 2011, soit une diminution de la consommation
d’eau de 1,9 % (Source
: Office de l’eau Réunion).