Allocution de Didier Migaud,
Premier président de la Cour des comptes
Présentation du Rapport sur la sécurité sociale pour 2017
Conférence de presse
Mercredi 20 septembre 2017
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir ce matin à la Cour des comptes pour la présentation de
notre rapport 2017 sur la sécurité sociale.
Ce rapport est établi, comme chaque année, dans le cadre de la mission d’assistance de la
Cour au Parlement et au Gouvernement. Il est destiné à accompagner le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2018, qui sera prochainement déposé sur le bureau
des assemblées
, avant d’être présenté en conseil des ministres.
Je présenterai les constats et recommandations de la Cour devant la commission des
affaires so
ciales de l’Assemblée nationale le 27
septembre et le 10 octobre devant celle du
Sénat.
J’ai auprès de moi, pour vous présenter le travail de la Cour, Antoine Durrleman, président
de la sixième chambre chargée de sa préparation, Henri Paul, président de chambre et
rapporteur général de la Cour, Jean-Pierre Viola, conseiller maître, rapporteur général de ce
rapport, et Delphine Rouilleault, auditrice, rapporteure générale adjointe. Je veux saluer les
nombreux rapporteurs qui
ont contribué à l’élaboration de
ce rapport.
Dans le prolongement de son audit général des finances publiques de juin dernier, comme
de ses précédents rapports annuels sur la sécurité sociale, nous nous sommes attachés à
approfondir l’analyse de la trajectoire financière de la sécurité
sociale à l’horizon 2020 et de
ses déterminants.
De cette analyse, la Cour a tiré quatre constats principaux
:
Tout d’abord, la Cour constate que la réduction du déficit de la sécurité sociale et le
reflux de la dette sociale se sont poursuivis en 2016,
ce qui témoigne d’efforts
certains entrepris pour maîtriser les dépenses.
Toutefois
–
et c’est le deuxième constat
- la situation financière de la sécurité sociale
n’est pas encore assainie, comme l’illustre l’annonce par le gouvernement d’un
nouveau déca
lage, de 2019 à 2020, de l’objectif d’équilibre
.
Ensuite, le caractère incomplet et fragile du redressement financier appelle à engager
ou à amplifier des réformes structurelles qui, lorsqu’elles sont mises en œuvre, ont
des résultats importants.
Seul le prononcé fait foi
2
Enfin,
pour accélérer le retour à l’équilibre, il convient en particulier d’exploiter
beaucoup plus activement les marges considérables d’efficience que recèlent les
dépenses de santé prises en charge par l’assurance maladie. Cette année, la Cour
illustre ces marges dans deux domaines : le médicament et les soins médicaux.
De ces observations découle en définitive un message central et essentiel : si les progrès
que relève la Cour sont très lents et encore inaboutis, et si la persistance des déficits depuis
2002 continue de miner la solidité de cet instrument majeur de solidarité entre assurés
sociaux et entre générations qu’est la sécurité sociale, cette situation n’a rien d’inéluctable.
Revenir plus rapidement à l’équilibre financier, éteindre totalement la dett
e sociale, éviter par
la suite de retomber dans la spirale des déficits et de l’endettement est non seulement
indispensable, mais est, selon nous, possible.
Je vais à présent revenir sur le premier constat de la Cour.
En 2016, le déficit de la sécurité sociale a poursuivi le mouvement de baisse progressive
engagé depuis 2010, année où il avait atteint le niveau historiquement élevé de près de
30 M
d€, dans le contexte de la crise économique
.
Ainsi, le déficit agrégé de l’ensemble des régimes obligatoires de sécurité sociale et du
Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est établi en 2016 à 7
Md€, contre 10,3
Md€ en 2015.
Le déficit du régime gén
éral seul et du FSV, qui constitue l’essentiel des enjeux financiers, a
été ramené pour sa part à 7,8
Md€, contre 10,8
Md€ en 2015.
La Cour relève à cet égard cinq évolutions positives :
en premier lieu, le déficit est revenu, pour la première fois, à un niveau inférieur à
celui de l’avant
-crise financière ;
Seul le prononcé fait foi
3
ensuite, pour la première fois également, la baisse du déficit a été pour l’essentiel de
nature structurelle, indépendante de la conjoncture économique : le déficit structurel
s’est réduit de 0,1 poi
nt de PIB ;
par ailleurs, contrairement aux autres années, la réduction du déficit a été obtenue
sans mesures d’augmentation nette des recettes
;
pour la première fois encore, toutes les branches et le FSV ont vu leur solde
s’améliorer simultanément
;
enfin, grâce à la réduction des déficits, la dette sociale a confirmé le mouvement de
reflux engagé en 2015 : elle a baissé de 5,3
Md€ pour atteindre 151,1
Md€ fin 2016.
Vous le voyez : nous mettons
en lumière les progrès enregistrés en 2016, qui s’inscriv
ent
dans une trajectoire de r
etour progressif à l’équilibre.
Toutefois, la persistance de déficits importants a conduit le Gouvernement à repousser
l’horizon de ce retour à l’équilibre de 2019 à 2020. Cela témoigne du chemin qui demeure à
parcourir pour assainir la situation financière de la sécurité sociale. Celle-ci reste en effet
marquée par un déficit très élevé, dont la réduction est en réalité moins forte qu’affiché, et
qui est de plus en plus concentré sur l’assurance maladie et l’assurance vieillesse. C’est
notre deuxième constat.
En ce qui concerne l’année 2016 tout d’abord, la Cour a ainsi établi quatre observations
moins favorables que celles que j’évoquais à l’instant
:
tout d’abord, le déficit a été minoré par un produit exceptionnel de contr
ibution sociale
généralisée (CSG) de 740 M€, dépourvu de base juridique, qui n’aurait pas dû être
inscrit en recette de la branche maladie. Corrigé de cette écriture comptable, le déficit
atteint en réalité 8,5
Md€, soit une diminution de 2,3
Md€,
qui est finalement du
même ordre qu’en 2015
;
ensuite, le déficit conserve toujours une importante composante structurelle. Ainsi, il
aurait fallu environ 4
Md€ de mesures supplémentaires de redressement pour
parvenir en 2016 à l’équilibre structurel
;
en troisi
ème lieu, comme c’est le cas depuis 2014, la réduction du déficit repose pour
partie sur des recettes exceptionnelles, non reconductibles ;
enfin, si le montant total de la dette sociale se réduit, une partie de celle-
ci n’a pas été
transférée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) pour en assurer le
remboursement, mais demeure portée par l’Agence centrale des organismes de
sécurité sociale (Acoss). La répétition des déficits annuels conduit à faire grossir
cette composante de la dette, qu
i est exposée à la remontée des taux d’intérêt à
court terme et dont le remboursement n’est pas organisé.
Plus particulièrement, le retour de la sécurité sociale à l’équilibre se heurte aux déficits
persistants de l’assurance maladie et de l’assurance vie
illesse.
Seul le prononcé fait foi
4
La réduction du déficit de l’assurance maladie, corrigé du produit exceptionnel de CSG que
j’évoquais à l’instant, se
révèle marginale (-
5,5 Md€ en 2016 contre
-
5,8 Md€ en 2015, soit
une baisse de 300
M€).
Le déficit de l’assurance maladie
représente désormais les 2/3 du déficit total de la sécurité
sociale. Il y a deux ans, c’était moins de la moitié.
En 2016, la bran
che vieillesse du régime général est certes pour la première fois à l’équilibre
depuis 2004. Mais le Fonds de solidarité vieillesse, qui finance une partie de ses dépenses,
a toujours un lourd déficit. De ce fait, les retraites de base des salariés du secteur privé
connaissent encore un important déséquilibre global (-2,8
Md€ en 2016 après
-4,2
Md€ en
2015).
Pour ce qui concerne 2017, la réduction du déficit de la sécurité sociale va se poursuivre.
La loi de financement pour 2017 prévoyait un déficit du régime général et du FSV de 4,1
Md€. La commission des comptes de la
sécurité sociale a revu cette estimation en juillet
dernier dans le sens d’une aggravation. Néanmoins, selon les tendances les plus récentes,
la progression des recettes sera en définitive plus forte qu’attendu et le déficit effectif proche
de celui qui a pu être
prévu à l’origine
.
En tout état de cause, malgré d’importants transferts de recettes en provenance de la
branche vieillesse (1,7
Md€), le déficit de l’assurance maladie continuera de constituer
l’essentiel du déficit de la sécurité sociale. La dynamique des dépenses reste en effet forte.
En 2017, le taux de progression de l’objectif national des dépenses d'assurance maladie
(Ondam) a été relevé à +2,1 %, ce qui marque une rupture par rapport à la période récente
au cours de laquelle il avait continûment diminué (+1,75 % en 2016).
Seul le prononcé fait foi
5
En outre, la progression réelle des dépenses est pour partie masquée par les biais de plus
en plus mar
qués qui affectent la sincérité de l’
Ondam. Les cas de figure sont nombreux :
certaines dépenses sont rattachées à l’année suivante
: c’est par exemple le cas
d’une partie des dépenses des établissements de santé relatives aux molécules sous
ou post auto
risation temporaire d’utilisation (ATU), pour un montant de 180 M€
;
d’autres sont sorties de manière injustifiée du périmètre de l’
Ondam : la Cour fait ainsi
état du report d’une partie des dépenses de médicaments sur un nouveau fonds de
l’innovation pharmaceutique, à hauteur de 220 M€ en 2017;
en outre, les diminutions de charges liées à des contractions de dépenses avec des
recettes sont prises en compte en tant qu’économies alors qu’elles n’ont aucun effet
sur le déficit de l’assurance maladie, puisqu
e ses produits baissent aussi : je pense
en particulier à la part des cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux
conventionnés prise en charge par l’assurance maladie, pour 270 M€ en 2017
;
enfin, certaines dépenses sont reportées sur d’autres fin
anceurs publics, ce qui ne
réduit en rien le déficit des administrations publiques prises dans leur ensemble
–
le
rapport mentionne en particulier le transfert à d’autres opérateurs de la contribution
de l’assurance
-maladie au Fonds de modernisation des établissement de santé
publics et privés (FMESPP).
C’est une part croissante des dépenses qui échappe ainsi à l’
Ondam. En définitive, quand on
neutralise les effets de ces divers procédés, ce n’est
plus
de +1,8 % que l’
Ondam a
progressé en 2016, mais de +2,2
%. Pour 2017, son augmentation prévisionnelle n’est pas
de +2,1 %, comme affiché, mais en fait de +2,4 %.
Seul le prononcé fait foi
6
Dès lors, même si l’objectif a été respecté en 2016, pour la septième année consécutive, et
le sera très probablement à nouveau en 2017, ce résultat a de moins en moins de portée.
La Cour ne peut qu’appeler à mettre fin aux pratiques qui affectent ainsi la sincérité de
l’
Ondam. En particulier, toutes les dépenses de médicaments devraient être prises en
compte dans l’objectif, alors même qu’une partie d’entre elles en a été sortie par la création
de ce
fonds de financement de l’innovation pharmaceutique, doté par un simple jeu
d’écritures comptables, sans que lui soient apportées de véritables ressources.
Comme je l’ai évoqué, le gouvernement a repoussé de 2019 à 2020 l’horizon du retour à
l’équilibre des comptes sociaux dans le contexte d’une dégradation à la mi
-année 2017 des
prévisions d’évolution des recettes par rapport à celles de la loi de financement pour 2017
.
Par rapport aux prévisions
d’avant l’été, la trajectoire financière de la sécurité sociale
connaîtra cependant une amélioration, du fait d’une progression en définitive plus rapide de
la masse salariale.
Mais il serait dangereux de faire reposer sur une embellie de la conjoncture le rétablissement
pérenne de l’équilibre des comptes. De telles améliorations de la situation financière de la
sécurité sociale ont pu être constatées dans le passé mais elles n’ont jamais été durables,
faute que des réformes structurelles n’aient été alor
s entreprises.
Étant entendu que l
’évolution des recettes n’est en effet pas le seul risque qui pèse sur un
retour effectif à l’équilibre d’ici à 2020.
Tout d’abord, la progression des dépenses d’assurance maladie risque de s’accélérer en
raison non seulement des augmentations tarifaires accordées aux professionnels libéraux de
santé (médecins, pharmaciens, chirurgiens-
dentistes…) et des augmentations salariales
dans la fonction publique hospitalière, mais aussi d’un défaut persistant de maîtrise des
Seul le prononcé fait foi
7
dépenses de soins de ville. Les dépenses de dispositifs médicaux, de transports,
d’indemnités journalières et d’actes de spécialistes et d’auxiliaires médicaux augmentent à
des rythmes de moins en moins soutenables. Le seul poste de dépenses maîtrisé
aujourd’
hui est celui des médicaments.
J’y reviendrai
.
L’évolution des dépenses de retraites est un autre facteur de risque. Le Conseil d’orientation
des retraites, dans son rapport de juillet dernier, indique que l’augmentation des dépenses
va s’accélérer à partir de 2018 et qu’en raison d’évolutions démographiques et économiques
moins favorables, la situation des régimes de retraite va se dégrader beaucoup plus
rapidement et plus profondément qu’il ne l’avait estimé l’année dernière. Ces nouvelles
projections attestent du bien-fondé de la prudence à laquelle la Cour avait appelé dans son
rapport de l’an dernier s’agissant des perspectives financières du système de retraites. Elle
avait en effet estimé que les prévisions qui avaient alors été rendues publiques étaient
entachées de biais d’optimisme.
La Cour relève au surplus que la loi de financement pour 2017 a masqué la dégradation du
solde de l’assurance vieillesse des salariés du secteur privé à partir de 2018, en intégrant à
la prévision des transferts implicites de recettes des trois autres branches de la sécurité
sociale, qui n’ont pas été portés à la connaissance du Parlement
: les documents qui
accompagnaient le projet de loi de financement n’en faisaient en effet nullement état.
De manière générale au demeurant, les transferts incessants de recettes entre branches et
avec le FSV qui interviennent chaque année nuisent fortement à la clarté de la situation
financière de la sécurité sociale et de ses différentes branches.
*
*
*
Des économies supplémentaire
s sur les dépenses d’assurance maladie et d’assurance
vieillesse apparaissent ainsi nécessaires pour revenir plus tôt à l’équilibre de la sécurité
sociale, réduire au maximum l’accumulation de déficits laissés à l’
Acoss et faciliter ainsi le
remboursement de la dette sociale correspondante
Seul le prononcé fait foi
8
Revenir plus rapidement à l’équilibre financier de la sécurité sociale, mais aussi éteindre la
totalité de la dette sociale d’ici à 2024, date à laquelle est prévue l’extinction de la
Cades,
sont des objectifs essenti
els. Je voudrais souligner qu’en 2016, le paiement des intérêts et le
remboursement des emprunts contractés pour financer les dépenses sociales des années
passées ont nécessité pas moins de 15
Md€.
La Cour appelle ainsi les pouvoirs publics à fixer sans attendre une trajectoire de
remboursement de la dette sociale aujourd’hui laissée à l’
Acoss
, en l’accompagnant de
l’attribution des ressources nécessaires à la
Cades.
Le caractère incomplet et fragile du redressement financier de la sécurité sociale appelle à
engager ou à amplifier des réformes qui, lorsqu’elles sont mises en œuvre, produisent des
résultats importants. C’est le troisième des quatre constats du rapport.
On entend souvent dire que la France se réforme peu, dans le domaine de la sécurité
sociale comme dans les autres. Cette assertion n’est pas exacte. Des réformes importantes
et difficiles ont été faites. Elles obtiennent des résultats. Si j’ose dire, les efforts paient.
Dans
son rapport de l’année dernière, la Cour avait ainsi souligné que les retraites de base
et complémentaires des salariés du secteur privé avaient été réformées à plusieurs reprises
depuis la fin des années 1980 et que ces réformes avaient permis d’améliorer
très nettement
leurs perspectives financières, même si de nouveaux ajustements étaient à anticiper.
Ces nouveaux ajustements seront d’autant moins douloureux qu’ils auront été engagés sans
attendre et que la gestion des retraites sera assurée avec toute la rigueur requise.
À cet égard, l’analyse des conditions de versement des pensions aux assurés résidant à
l’étranger montre que cet enjeu important (6,5
Md€) est à mieux prendre en considération au
regard du risque de fraude. La Cour a relevé l’insuffis
ance générale des actions de contrôle
Seul le prononcé fait foi
9
et leur faible mutualisation entre les différents régimes de retraite. Des pensions peuvent être
versées à des centenaires particulièrement âgés, allant jusqu’à 117 ans, sur la base de
certificats d’existence dont la v
érification est plus que limitée. De rares contrôles sur place du
régime général ont conduit à interrompre le paiement des pensions aux assurés qui ne se
sont pas manifestés à la suite de l’envoi d’une convocation. Les régimes complémentaires
Agirc-Arrco n
’en n’ont pas été informés et ont continué pour leur part, dans une proportion
élevée de cas, à verser des pensions aux intéressés. La Cour recommande ainsi de
développer les échanges informatisés de données avec les régimes des pays représentant
les princ
ipaux enjeux, de mutualiser les certificats d’existence entre les régimes et de
développer des contrôles sur place, ciblés notamment sur les assurés les plus âgés.
Après les retraites, la Cour dresse cette année un premier bilan d’ensemble d’une autre sé
rie
de réformes de grande ampleur, celles des soutiens fiscaux et sociaux aux familles (près de
60 Md€ en 2015
), engagées entre 2012 et 2015
: baisse en deux étapes de l’avantage fiscal
du quotient familial, modulation des allocations familiales en fonction des revenus, sélectivité
accrue de la prestation d’accueil du jeune enfant et fortes revalorisations de l’allocation de
rentrée scolaire, du complément familial pour les familles nombreuses et de l
’allocation de
soutien familial pour les familles monoparentales.
À partir d’études pour la plupart inédites, la Cour éclaire de manière détaillée les effets des
réformes sur la situation des familles en fonction de leur revenu et de leur configuration.
Conformément aux objectifs poursuivis par les pouvoirs publics, des transferts massifs sont
intervenus dans le sens d’une redistribution nettement accrue entre familles aux deux
extrémités de la distribution des revenus.
Au total, 136 000 familles ont « perdu » plus de 5
000 € par an, dont 118 000 comptaient
3
enfants et plus. À l’inverse, 395
000 familles ont « gagné » plus de 2 000
€ par an, dont
248 000 de 3 enfants et plus.
Seul le prononcé fait foi
10
Notre système de prestations familiales a ainsi connu une mutation historique qui le
rapproche de celui de la plupart de nos voisins. La quasi-totalité des prestations est
désormais placée sous condition de ressources. Les aides fiscales et sociales aux familles
n’ont plus un caractère globalement croissant avec les revenus. La fameuse «
courbe en
U
», qui reflétait l’augmentation des
aides avec celle du revenu, principalement par le jeu du
quotient familial, est désormais aplanie, sans être pour autant parfaitement linéaire.
Notre
politique familiale n’est pas exempte de limites
toutefois, voire de contradictions,
même après les réformes. La Cour a procédé à une mise en perspective internationale des
aides aux familles qui montre que d’autres pays, au prix de choix plus affirmés, obtiennent
parfois de meilleurs résultats en matière de réduction de la pauvreté ou de conciliation entre
vie familiale et vie professionnelle.
À cet égard, l’objectif poursuivi dans le cadre des réformes de créer 275
000 nouvelles
solutions de garde entre 2013 et 2017 sera loin d’être atteint. La garde des enfants en bas
âge à l’extérieur du cadre familia
l, en crèche ou par une assistante maternelle, connaît des
disparités territoriales et sociales majeures
Seul le prononcé fait foi
11
Plus généralement, les comparaisons internationales auxquelles a procédé la Cour mettent
en lumière des questions essentielles pour les objectifs et les outils de notre propre politique
familiale :
faut-
il mettre l’accent sur les prestations monétaires ou sur les solutions d’accueil
pour permettre à un plus grand nombre de mères de travailler ?
faut-
il privilégier l’universalité des prestations ou
les cibler plus fortement ?
faut-
il continuer à apporter un soutien croissant en fonction du nombre d’enfants ou
mieux prendre en compte des charges liées à la venue d’un premier enfant
?
faut-il maintenir une dualité de la gestion des aides sociales et fiscales aux familles,
assurées respectivement par une branche de la sécurité sociale et par le budget de
l’État, singularité que nous
partageons seulement avec la Belgique ? Cette situation
demeure-t-
elle satisfaisante, alors que les caisses d’allocation
s familiales versent
désormais plus de prestations pour le compte de l’
État -
en particulier, l’ensemble des
aides au logement - que de prestations familiales proprement dites ?
La Cour appelle ainsi à mieux mettre en perspective les enjeux de la politique familiale, à
établir plus clairement ses priorités et à mieux articuler en conséquence ses outils.
Les réformes structurelles intervenues dans les domaines des retraites et de la famille
contrastent très fortement avec la forme d’attentisme qui prévaut
trop souvent en matière
d’assurance maladie, qui est en déficit continu depuis 25 ans, soit, je le rappelle, une
génération entière.
Bien entendu, l’enjeu financier n’est pas un objectif en soi. Si la Cour réitère ses
avertissements, c’est bien parce que
la persistance de ces déficits, qui alimentent la dette
Seul le prononcé fait foi
12
sociale dans les conditions coûteuses que j’évoquais à l’instant et alors même que
d’importantes marges d’efficience existent, risque de remettre en question l’efficacité
des
politiques publiques que porte la sécurité sociale et, à terme, le dispositif essentiel de
solidarité qu’elle constitue. Voilà pourquoi il s’agit d’un enjeu f
ondamental, bien au-delà de
toute considération étroitement comptable.
Or, l’assurance maladie peine à remplir sa mission
première, qui est d’assurer l’égal accès
de tous aux meilleurs soins, en intégrant en permanence tous les apports, souvent très
coûteux, du progrès médical.
La protection qu’elle assure tend à s’éroder, comme la Cour l’a montré l’année dernière en
analys
ant l’évolution générale des modalités de prise en charge des dépenses de santé et
les difficultés importantes qui en résultent dans certains domaines, comme les soins bucco-
dentaires.
C’est pourquoi
,
il convient d’exp
loiter beaucoup plus activement, selon nous, les importantes
marges d’efficience que recèlent les dépenses de santé prises en charge par l’assurance
maladie. C’est le quatrième et dernier constat sur lequel je souhaite revenir.
L’exemple du médicament, qui fait l’objet d’une partie du rapport, montre qu’il n’y a pas de
fatalité à la dérive des dépenses quand une action cohérente, résolue et continue est
conduite, et même si des gisements importants d’économies restent à mobiliser.
En 2015,
les dépenses de médicaments en ville remboursables pa
r l’assurance maladie se sont
élevées
à 29,8 Md€, dont 23,2 Md€ ont été pris en charge par cette dernière.
La Cour met en évidence l’importance des progrès intervenus dans la politique du
médicament par rapport à la situation qu’elle avait constatée dans une précédente enquête
en 2011. Ainsi, la loi a complété ou précisé le cadre juridique de la fixation du prix des
médicaments. Les ministres adressent à l’instance interministérielle qui négocie les prix avec
les entreprises - le CEPS -
des lettres d’orientation qui fixent des objectifs de plu
s en plus
exigeants. Une clause de sauvegarde plafonnant la dépense totale de médicaments et une
contribution spécifique aux médicaments très onéreux de traitement de l’hépatite C ont été
instaurées afin d’encadrer l’évolution des dépenses. Fait suffisamme
nt rare pour être
souligné, les dépenses de médicaments en ville remboursables par l’assurance maladie, à la
dynamique très vive et constante jusqu’en 2010, sont orientées aujourd’hui
à la baisse. En
2015, elles ont retrouvé leur niveau de 2008 (29,8
Md€)
.
Mais, avec l’arrivée sur le marché de nouveaux traitements dont les prix demandés
pourraient être très élevés, comme pour le cancer, l’assurance maladie est confrontée à un
défi de soutenabilité de la dépense de médicaments. Par ailleurs, même réduit par des
remises, le prix de nombreux médicaments reste imparfaitement corrélé à leur apport
thérapeutique réel. Des considérations de nature industrielle peuvent interférer et conduire
parfois à des prix anormalement élevés.
Des progrès importants restent nécessaires pour rééquilibrer la position de négociation des
pouvoirs publics face à des entreprises pharmaceutiques mondialisées et pour gérer plus
activement le stock des prix de médicaments anciens. La Cour recommande ainsi de
renforcer les moyens humains
et matériels de l’instance qui négocie les prix, qui sont très
insuffisants, de réviser des dispositions conventionnelles par trop favorables aux entreprises
pharmaceutiques comme la garantie de prix européen, de développer l’évaluation médico
-
économique, encore trop rare faute de données en vie réelle exploitables que fourniraient les
Seul le prononcé fait foi
13
entreprises, et enfin de rendre systématiques les révisions de prix et la transformation des
remises en des baisses de prix passé un certain délai.
Aborder la question du p
rix des médicaments, c’est aussi prendre toute la mesure de
l’importance du coût de leur distribution, qui y est intégré. Ce coût n’est pas suivi par les
pouvoirs publics. Il est pourtant très élevé. En 2015, il a ainsi atteint 8,3
Md€, soit le tiers de
la dépense totale de médicaments dispensés par les pharmacies. Sur ces 8,3
Md€, 7,4
Md€
ont été perçus par les pharmacies. En plus de leur rémunération réglementée de 5,4
Md€,
elles ont bénéficié de 2
Md€ de rémunérations supplémentaires versées sous diverses
formes par les fabricants et les grossistes-
répartiteurs. Sur ces 2 Md€, 0,5 Md€ proviennent
de la marge réglementée de la distribution en gros et 1,5 Md€ des avantages procurés par
les entreprises pharmaceutiques.
Dans ce contexte, le coût de distribution des génériques apparaît considérable : la moitié des
dépenses de génériques sert à rémunérer les pharmacies qui les dispensent. La diffusion
croissante des génériques favorise certes la maîtrise globale des dépenses de
médicaments, mais les nombreux avantages tarifaires et commerciaux que l’assurance
maladie, les grossistes et les fabricants accordent aux pharmacies contribuent à placer les
prix des génériques à un niveau nettement plus élevé que chez nos voisins.
Dans une large mesure, le niveau du coût de distribution des médicaments est corrélé avec
l’importance du nombre de pharmacies par rapport à la population à desservir. Avec 22
000
pharmacies, la France est après l’Espagne le pays d’E
urope occidentale où la densité de
pharmacies par habitant est la plus élevée : chaque pharmacie dessert en moyenne près de
3 000 habitants, contre 4 000 en Allemagne et 4 500 au Royaume-Uni.
Seul le prononcé fait foi
14
Si les critères encadrant en principe la répartition démo-géographique des pharmacies
étaient strictement appliqués, 40 % des pharmacies devraient disparaître.
La Cour recommande une refonte des modes de rémunération des pharmacies afin de les
désensibiliser complètement au nombre comme au prix des boîtes vendues, de permettre
une poursuite de la baisse des prix du médicament et de réduire les coûts de distribution, en
particulier en révisant les marges très élevées consenties pour la distribution des
génériques. Elle propose aussi de favoriser la rationalisation du réseau officinal, notamment
en encourageant le développement de modes de distribution alternatifs pour les
médicaments à prescription médicale facultative
: ventes sur internet et dans d’autres
réseaux de distribution.
Bien entendu, ces évolutions devr
aient s’inscrire dans un respect strict et rigoureusement
contrôlé par l’Ordre des pharmaciens des règles déontologiques qui s’appliquent à la
profession de pharmacien. Par ailleurs, un maillage territorial étroit des pharmacies doit être
préservé afin d’a
ssurer un accès de proximité au médicament, en ciblant des aides sur
celles, 400 à 500 environ, dont l’existence pourrait être menacée alors qu’elles jouent un rôle
essentiel.
Autre domaine sur lequel la Cour s’est penchée cette année
: l’organisation des
soins. Dans
ce secteur, la recherche de l’efficience est un objectif majeur qui doit être partagé par tous.
L’assurance maladie ne saurait s’exonérer à cet égard de l’effort demandé à l’ensemble des
acteurs.
La Cour a noté les actions qui visent à fai
re revenir à l’équilibre financier les établissements
sanitaires et sociaux dont elle assure la gestion. Mais elle souligne que ces actions sont
encore insuffisantes. Les questions de fond sont en effet esquivées : la pertinence de
Seul le prononcé fait foi
15
l’expansion d’une offre
médico-
sociale de l’assurance maladie dont les coûts salariaux sont
beaucoup plus élevés que ceux des autres opérateurs ; le caractère anormal des aides
qu’elle apporte à ses propres établissements, qui minorent co
nsidérablement leurs déficits
(-73 M
€ de déficits d’exploitation en cumul de 2012 à 2016, mais
-
165 M€ sans les aides)
; le
bien-
fondé même de la gestion d’établissements de soins par l’assurance maladie, sans
synergies véritables avec sa mission de gestion du risque maladie. La Cour recommande
d’aligner sur le droit commun les modalités de financement de ces établissements et
d’engager la transformation du cadre de leur gestion pour leur permettre d’acquérir à terme
leur autonomie.
Sur un plan plus général, mieux maîtriser les dépenses, amé
liorer l’accès aux soins et
renforcer leur qualité et leur sécurité ne s’opposent pas, mais doivent au contraire converger
pour une meilleure prise en charge des patients. Les exemples des soins de spécialité, des
activités chirurgicales et de la télémédecine le mettent clairement en évidence.
L’organisation de la médecine de spécialité (16
Md€ de dépenses de santé en 2015)
présente un paradoxe apparent. Les médecins spécialistes sont de plus en plus nombreux.
Mais, pour une part croissante de nos concitoyens, il est de plus en plus difficile de consulter
un médecin spécialiste en cabinet de ville. Les inégalités d’accès aux soins se creusent et
favorisent le report de la demande de soins sur les urgences hospitalières.
Ces inégalités sont de deux natures :
il s’agit, d’une part, d’inégalités territoriales, entre les zones urbaines sur
-dotées et les
zones péri-urbaines et rurales sous-dotées, entre certains départements, et dans un
même département entre certaines communes, qui se trouvent désertées par
certaines spécialités
Seul le prononcé fait foi
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i
l s’agit, d’autre part, d’inégalités financières, en raison de la croissance forte et
continue sur le long terme des dépassements d’honoraires pratiqués par les
spécialistes de secteur 2, de plus en plus nombreux. À l’inverse, l
es spécialistes de
secteur 1 à honoraires conventionnels sont de plus en plus minoritaires dans
certaines disciplines et, plus généralement, dans les zones urbaines sur-dotées.
L’assurance maladie a développé tardivement des incitations financières à l
a modération des
tarifs, qui ont favorisé un léger repli du taux moyen de dépassement d’honoraires des
spécialistes de secteur 2. Mais, dans le même temps, les possibilités d’accès au secteur
2
ont été élargies pour les spécialistes de secteur 1. Et là nous avons un véritable paradoxe.
L’assurance maladie ne dépense pas moins de 10 euros de fonds publics en incitations
financières pour éviter un euro supplémentaire de dépassement des honoraires
conventionnels !
Dans ce contexte, la Cour recommande de mettr
e en œuvre des instruments de régulation
plus contraignants. Ainsi, il convient de réviser les nomenclatures des actes médicaux, qui
sont obsolètes et déconnectées des coûts, et d’aller vers des forfaits de rémunération des
soins médicaux pour les patients affectés par des maladies chroniques, en remédiant ainsi
aux effets inflationnistes du paiement à l’acte. La mise en place d’un conventionnement
sélectif des médecins spécialistes apparaît aussi nécessaire. Ainsi, dans les zones sur-
dotées, seuls des spéc
ialistes de secteur 1 devraient pouvoir s’installer afin de permettre d’y
recréer une offre de soins financièrement abordable.
L’organisation des soins chirurgicaux (5,9
millions d’interventions et près de 16 Md€ de
dépenses d’assurance maladie en 2015) s
e modernise : les surcapacités de chirurgie
conventionnelle se réduisent et la chirurgie ambulatoire se développe, même si les objectifs
fixés dans ce domaine par les pouvoirs publics à horizon 2018 ne seront pas atteints. Mais
Seul le prononcé fait foi
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l’offre de soins demeure toujours éclatée entre un nombre très élevé d’établissements
publics et privés qui pratiquent une gamme étendue d’opérations.
Or, cette dispersion des sites et des activités est, selon de nombreuses études, de nature à
nuire à la qualité et la sécurité des soins. Cela est le cas quand les équipes opératoires sont
insuffisamment étoffées ou stables du fait de difficultés de recrutement de chirurgiens,
d’anesthésistes ou d’infirmières spécialisées, ou lorsque ces équipes pratiquent peu
d’opérations. Ainsi 29
établissements comportent des services de chirurgie qui ont enregistré
moins de 750 séjours en 2015. De fait, moins de 6 % des actes chirurgicaux sont encadrés
par des seuils d’autorisation par établissement. Encore ces seuils sont
-ils trop bas par
rapport aux critères jugés pertinents sur un plan international et leur respect, insuffisamment
contrôlé, n’est pas toujours assuré.
La Cour propose ainsi de concentrer plus fortement l’offre de soins chirurgicaux en fixant des
seuils d’activité par site géographique d’établissement, et à terme par chirurgien, et en les
faisant appliquer rigoureusement. Dans cette logique, il convient d’organiser dans le cadre
des nouveaux groupements hospitaliers de territoire une prise en charge chirurgicale
graduée des patients selon la complexité des interventions que requiert leur état. Par
ailleurs, l’outil tarifaire est à mobiliser beaucoup plus activement afin de favoriser une
meilleure pertinence des interventions chirurgicales et le développement de la chirurgie
ambulatoir
e par substitution à la chirurgie conventionnelle. C’est à ces conditions que les
prises en charge répondront aux enjeux grandissants de qualité, de sécurité et d’efficience.
La télémédecine peut apporter à cet égard, comme les exemples étrangers le démontrent,
une contribution majeure. Mais dans notre pays sa place demeure plus que marginale. Son
essor pâtit du manque de cohérence et de continuité de l’action des pouvoirs publics, qui
multiplient les expérimentations sans financement stable ni évaluation
: l’une d’entre elles,
qui n’a bénéficié qu’à deux patients pour une centaine d’actes de télémédecine, a
néanmoins été étendue à l’ensemble du territoire. L’assurance maladie avance de son côté,
de manière autonome.
Pour que la télémédecine se développe, des préalables juridiques et techniques restent à
lever. Après l’échec coûteux du dossier médical partagé, il faut désormais réussir la
généralisation du dossier médical personnel. Des modalités de rémunération innovantes,
s’éloignant de la rémunération classique à l’acte de chaque intervenant, sont à mettre en
place.
C’est à la condition d’une stratégie forte et cohérente que notre système de santé pourra
bénéficier des possibilités d’amélioration de la prise en charge des patients que recèlent les
différentes formes de télémédecine, notamment la télésurveillance des patients affectés par
des maladies chroniques. Celle-ci pourrai
t dégager, selon certaines études, jusqu’à 2,6 Md€
d’économies.
*
*
*
Mesdames et messieurs,
Je voudrais à présent conclure en quelques mots.
Comme je viens de l’illustrer, le retour à l’équilibre de la sécurité sociale est non seulement
indispensable, mais il est possible. Les déficits ne sont en rien une fatalité.
Seul le prononcé fait foi
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Encore faut-
il que le mode de pilotage financier de la sécurité sociale soit à même d’éviter la
spirale des déficits et de la dette. La Cour a cherché à cet égard à identifier les facteurs qui
peuvent expliquer la permanence des déficits depuis 2001 et la lenteur du retour à l’équilibre
de la sécurité sociale et à en dégager des enseignements pour l’avenir.
Depuis 2011, la sécurité sociale revient progressivement à l’équilibre, mais c’est au
prix de
37
Md€ de hausses de prélèvements obligatoires et d’importants transferts de l’É
tat : au-delà
de la seule compensation des allègements généraux de charges, ce dernier a apporté à la
sécurité sociale près de 4 Md€ de ressources, alors même que se c
reusait son propre déficit.
Alors que la croissance économique était relativement forte avant 2009, cette période n’a
pas été mise à profit pour remettre la sécurité sociale à l’équilibre. Elle est ainsi entrée dans
la crise avec de lourds déficits. Les 220
Md€ de déficits accumulés au total entre 2002 et
2016 ont ainsi une origine essentiellement structurelle, indépendante de la conjoncture
économique.
Afin d’éviter de reproduire à l’avenir une trajectoire de ce type, c’est un nouveau cadre de
responsa
bilité qu’il importe de définir pour créer les conditions d’un équilibre pérenne,
proscrire la formation de nouveaux déficits structurels et la résurgence d’un endettement
social dont l’extinction
reste pour partie à organiser.
La Cour propose les modalit
és de ce nouveau cadre de responsabilité, à partir d’une analyse
rétrospective des déterminants du déficit persistant de la sécurité sociale depuis 2001, des
limites des outils utilisés pour son redressement et des difficultés qui demeurent. Ainsi, il
conv
ient d’articuler
aussi précisément les lois de financement de la sécurité sociale avec les
lois de finances et les lois de programmation des finances publiques, en organisant en
particulier une discussion commune au Parlement du volet « recettes » des lois financières
afin de mieux éclairer ce dernier, de rendre plus transparents les transferts entre branches et
entre l’État et la sécurité sociale, d’interdire le financement de déficits structurels dans le
Seul le prononcé fait foi
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cadre de la gestion courante de la trésorerie de la
sécurité sociale par l’
Acoss et de mettre
en place des mécanismes de lissage conjoncturel des recettes, en les alimentant quand la
conjoncture est favorable et en utilisant les sommes ainsi mises en réserve quand elle se
détériore.
La situation de l’assu
rance maladie et celle des retraites appellent ainsi des mesures rapides
de redressement qui passent par l’engagement ou l’amplification de réformes structurelles.
Ces réformes, si difficiles soient-elles parfois, obtiennent des résultats probants. Mais il faut,
dans le même temps, aller au-
delà de l’objectif du seul retour à l’équilibre
pour reconstruire
une cohérence d’ensemble du pilotage de la sécurité sociale qui mette sous une contrainte
partagé
e l’ensemble des acteurs.
Les déficits vont encore reculer en 2017. De telles améliorations ont déjà été constatées
dans le passé sans être durables car l’effort s’est trop vite relâché. Faire des choix clairs,
s’attaquer méthodiquement et avec ténacité p
ar des réformes structurelles aux sources
d’inefficacité et d’inefficience et poursuivre ces actions avec détermination dans la durée,
sont autant de leviers pour préserver le haut degré de protection sociale de notre pays.
C’est
dans
ces
perspectives
que
s’inscrivent
les
constats,
les
analyses
et
les
recommandations de la Cour.
Je vous remercie pour votre attention et me tiens, avec les magistrats qui m’entourent, à
votre disposition pour répondre à vos questions.