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Rapport d’observations définitives
Département de Mayotte
Le port de Longoni
Exercices 2011 et suivants
Observations délibérées le 8 mars 2017
- 2/29 -
SOMMAIRE
S
YNTHÈSE
..................................................................................................................................................
3
R
APPELS A LA REGLEMENTATION
....................................................................................................
4
R
ECOMMANDATIONS
........................................................................................................................
4
I
-
L
ES INFRASTRUCTURES ET LA GOUVERNANCE DU PORT DE
L
ONGONI
........................................
5
A
-
P
RESENTATION DU PORT
.........................................................................................................
5
1 -
La construction du port par l’État et son transfert au département
................................
5
2 -
Une fréquentation stable depuis 2010
............................................................................
7
B
-
L
E RENOUVELLEMENT ET L
ENTRETIEN DES INFRASTRUCTURES
...........................................
8
1 -
L’état des infrastructures
...............................................................................................
8
2 -
Les engagements financiers
...........................................................................................
9
C
-
L
ES INSTANCES DE GOUVERNANCE
.........................................................................................
9
1 -
Le conseil portuaire
.......................................................................................................
9
2 -
Les comités de suivi de la délégation de service public
..............................................
10
II
-
L
ES DÉSACCORDS
...........................................................................................................................
10
A
-
L
A CLARIFICATION DES RESPONSABILITES DU DELEGANT ET DU DELEGATAIRE
..................
11
1 -
La répartition des responsabilités sur les infrastructures
.............................................
11
2 -
Les travaux d’infrastructure
.........................................................................................
11
3 -
L’activité de manutention
............................................................................................
12
B
-
L
ES OBLIGATIONS CONTRACTUELLES
...................................................................................
13
1
-
L’
INVENTAIRE DES BIENS
............................................................................................
13
2 -
Le rapport annuel
.........................................................................................................
13
3 -
La garantie à première demande
..................................................................................
14
4 -
Les autorisations d’occupation du domaine public
......................................................
14
C
-
D
ES CONTENTIEUX DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF
..........................................................
15
1 -
Le bilan d’ouverture de la délégation
..........................................................................
15
2 -
Le règlement d’exploitation
.........................................................................................
16
III
-
L
A SITUATION FINANCIÈRE DE LA DÉLÉGATION
.........................................................................
17
A
-
L’
EQUILIBRE FINANCIER
.......................................................................................................
17
1 -
La comptabilité propre à la délégation
........................................................................
17
2 -
La situation financière du délégataire
..........................................................................
17
B
-
L
ES INVESTISSEMENTS ET LEUR PROGRAMMATION
..............................................................
18
1 -
Les plans de développement stratégique et d’investissement
......................................
18
2 -
Les investissements
.....................................................................................................
19
3 -
Les conséquences financières des investissements pour le département
.....................
20
C
-
L
ES MODIFICATIONS APPORTEES A L
EQUILIBRE DES COMPTES DE LA CONVENTION
...........
21
1 -
Le montant de la redevance
.........................................................................................
21
2 -
Le droit de port
............................................................................................................
21
3 -
Les tarifs d’usage des outillages publics
.....................................................................
23
4 -
Les redevances d’occupation du domaine public
........................................................
25
5 -
Conclusion
...................................................................................................................
26
IV
-
P
ERSPECTIVES ET ENJEUX
............................................................................................................
26
Annexe 1 : Évolution des tarifs portuaires
.....................................................................................
28
Annexe 2 : Les tarifs de location des grues
....................................................................................
29
- 3/29 -
Synthèse
Le port de Longoni
est une infrastructure indispensable à la vie quotidienne de l’île de
Mayotte. Il pourrait devenir une plate-forme régionale pour le transport maritime grâce à son
positionnement géographique et au niveau de ses infrastructures. L’absence de dialogue entr
e le
département et son délégataire constitue un frein à son développement. Pour résoudre les
difficultés constatées par la chambre, une médiation a été initiée en février 2017.
Depuis novembre 2013, le département a délégué la gestion et l’exploitation du
port à la
société Mayotte Channel Gateway. L’exercice de l’activité de manutention est une première source
de différends : le délégataire veut
l’exercer pour rentabiliser l’acquisition d’équipements portuaires
onéreux ; le département estime que la manutention est exclue du champ de la délégation. Le
règlement d’exploitation du port ainsi que les conventions d’autorisations d’occupation du
domaine public en sont fragilisés.
Certaines obligations contractuelles ne sont pas respectées par les parties. Le département
n’a pas organisé le bilan d’ouverture de la délégation ; il n’a pas transféré la trésorerie
correspondante au délégataire. Ce dernier n’a transmis ni rapports annuels, ni comptes conformes
à la réglementation, ni plans d’investissement. Le nouveau
plan de développement stratégique n’a
pas été présenté au département.
Plusieurs hypothèses sur lesquelles s’appuyaient les comptes prévisionnels ont été
modifiées telles que les droits de port ou les redevances d’occupation du domaine public. Le calcul
d
e la redevance versée au département et les tarifs d’usage des outillages publics font l’objet de
désaccords.
L’acquisition des grues mobiles et des portiques a représenté un coût supérieur à celui
prévu. Outre l’incidence de ces opérations sur les comptes
de la délégation, il en résulte une
augmentation des coûts pour les usagers du port.
Le contrat souffre toujours des incohérences soulevées par la chambre en 2013. Des
critiques avaient porté sur les stipulations permettant de confier sans publicité ni mise en
concurrence des mandats de maîtrise d’ouvrage au concessionnaire. Les parties n’ont pas modifié
cette clause.
Un fonctionnement satisfaisant des instances de gouvernance pourrait permettre de
circonscrire les sources de tensions et limiter les conten
tieux engagés par les parties. L’ensemble
des différends et l’absence de dialogue sont de nature à porter atteinte au bon emploi des deniers
publics et à mettre en péril la viabilité du port.
Lors de l’achèvement de la construction du second quai, l’État a
transféré les infrastructures
et les équipements au département. Le premier quai, plus ancien, présente aujourd’hui des
dégradations telles qu’il n’est plus possible de l’utiliser selon ses réelles capacités. Il revient au
département de remettre en état
les infrastructures afin de garantir la continuité et l’accroissement
de son exploitation dans des conditions satisfaisantes de sécurité.
- 4/29 -
Rappels à la réglementation
Réalisé
En cours
de
réalisation
Non
réalisé
Page
1 -
Au département : Se conformer aux articles R. 5314-22 et
R. 5314-23 du code des transports qui encadrent le
fonctionnement et le rôle du conseil portuaire.
X
10
2 -
Au département et au délégataire : A l’occasion de la
passation d’un avenant, corriger le dernier alinéa de l’article 13
de la convention de délégation de service public afin de le
rendre conforme aux règles de la commande publique
X
12
3 -
Au
délégataire
:
Transmettre
un
rapport
annuel
conformément à l’article
52 de l’ordonnance n°
2016-65 du
29 janvier 2016 relative aux contrats de concession et
comportant
les
comptes
propres
de
la
délégation
conformément à l’article 33 du décret n° 2016
-86 du 1er février
2016 relatif aux contrats de concession (anciennement article
L. 1411-3 et R. 1411-7 du code général des collectivités
territoriales)
X
14
4 -
Au délégataire : Présenter les droits de port selon les
cadres types définis par les arrêtés du 15 octobre 2001 et du
10 décembre 2003 portant approbation des cadres types des
tarifs des droits de port
et des redevances d’équipement et les
porter à la connaissance des usagers du port dans les conditions
prévues par l’article R. 5321
-14 du code des transports
X
22
Recommandations
Réalisée
En cours
de
réalisation
Non
réalisée
Page
1 -
Au département : Réaliser les études préalables et
engager en 2017, selon un calendrier précis et public, les
travaux d’entretien et de mise aux normes de l’infrastructure
portuaire.
X
9
2 -
Au département : Adopter au cours du premier trimestre
2017 un règlement
d’exploitation.
X
17
3 -
Au département et au délégataire : Réexaminer au cours
de
l’exercice
2017
les
stipulations
relatives
à
la
programmation des investissements en précisant les renvois
aux annexes.
X
19
4 -
Au
département :
Provisionner
l’indemnité
compensatrice prévue par l’article 56.03 de la convention au
fur et à mesure de l’approbation par le département des plans
d’investissement annuels.
X
21
5 -
Au département et au délégataire : Recourir à une
médiation permettant d’assurer la continuité de l’exploitation
et de limiter les coûts engendrés par les désaccords entre le
département et le délégataire.
X
26
- 5/29 -
I. PROCÉDURE
L
examen de la gestion du département de Mayotte, inscrit au programme des travaux de
la chambre par arrêté du président de la chambre n° 16-141 du 12 juillet 2016, a été ouvert le
31 août 2016 par lettre du président de la chambre adressée à M. Soibahadine Ibrahim Ramadani,
ordonnateur en fonctions. Par lettre du président en date du 31 août 2016, M. Daniel Zaïdani, en
sa qualité d
ancien ordonnateur, a été informé de cet examen.
En application de l’article L. 241
-2 du code des juridictions financières, ce contrôle a été
étendu, pour la même période, à une vérification des conditions d’exécution de la d
élégation de
service public du Port de Longoni ainsi que des comptes produits au titre de ladite délégation par
la société Mayotte Channel Gateway. Mme Ida Nel, représentant légal de la société, en a été
informée par courrier du 31 août 2016.
En application de l
article L. 243-1 du code des juridictions financières, l
entretien
préalable a eu lieu le 17 novembre 2016 avec l
’ordonnateur en fonctions
et le 16 novembre avec
son prédécesseur en fonctions du 3 avril 2011
jusqu’au
1
er
avril 2015.
Lors de sa séance du 7 décembre 2016, la chambre a arrêté des observations provisoires
qui ont été adressées le 15 décembre 2016 à l’ordonnateur en fonctions et le 16 décembre 2016
à son prédécesseur.
Des extraits ont été communiqués aux personnes morales concernées que sont les sociétés
Mayotte Channel Gateway
et SMART ainsi que la chambre de commerce et d’industrie
.
Par courrier enregistré au greffe le 15 février 2017, M. Soibahidine Ibrahim Ramadani a
adressé ses réponses à la chambre. Mme Ida Nel a adressé sa réponse par courrier enregistré au
greffe le 21 février 2017, Mme Arlette Henry par courrier enregistré le 15 février 2017 et
M. Mohamed Ali Hamid par courrier du 16 février 2017.
À leurs demandes
, et conformément à l’article L. 243
-6 du code des juridictions
financières, Mme Arlette Henry, assistée de ses conseils, et Mme Ida Nel ont été auditionnées
par la chambre le 8 mars 2017.
Après avoir examiné les réponses reçues et entendu les parties, la chambre, dans sa séance
du 8 mars 2017, a arrêté les observations définitives suivantes :
II. OBSERVATIONS DÉFINITIVES
I -
LES INFRASTRUCTURES ET LA GOUVERNANCE DU PORT DE LONGONI
A -
Présentation du port
1 -
La construction du port par l’État et son transfert au département
Jusqu’en 1992 et la mise en service du premier quai du port de Longoni long de
178
mètres et d’un tirant d’eau de 10 mètres, le ravitaillement de Mayotte s’effectuait par des
boutres qui déchargeaient les bateaux longs courriers stationnés en rade de Dzaoudzi. Des
terminaux gaziers et à hydrocarbure ont été construits de 2006 à 2008. Le second quai, long de
223 mètres et d’un tirant d’eau de 14 mètres
, a été mis en service en 2010.
- 6/29 -
La collectivité territoriale de Mayotte, alors représentée par le Préfe
t, a concédé l’exploitation de
l’ensemble des infrastructures portuaires de Mayotte ainsi que la construction et le
renouvellement de ses outillages à la chambre de commerce et d’industrie de Mayotte dès 1992
pour une durée de 30 ans.
En 2009, en applica
tion de l’ordonnance 2007
-1801 du 21 décembre 2008 relative à
l’adaptation à Mayotte de diverses dispositions législatives, l’État a transféré à la collectivité
départementale de Mayotte la gestion des terrains, ouvrages d’infrastructures et équipements du
port.
Les arrêtés ne mentionnent pas de transfert de la propriété des infrastructures. Le III de
l'article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales
dispose qu’une convention conclue entre l’État et la co
llectivité territoriale, ou, à défaut, un arrêté
du ministre chargé des ports maritimes dresse un diagnostic de l’état du port, définit les modalités
du transfert et fixe sa date d’entrée en vigueur. Une telle convention ou un arrêté équivalent
n’ayant pas
été établis
, l’État demeure propriétaire du port.
Le département de Mayotte a maintenu la concession accordée antérieurement à la CCI.
L’exploitation du second quai n’étant pas prévue par cette concession, la collectivité a
décidé de recourir à une délégation de service public pour l’exploitation de l’ensemble de
l’infrastructure portuaire.
Après un premier appel d’offre infructueux en
2010, une nouvelle procédure a été lancée
en juin 2012. Le département a autorisé la résiliation pour
motif d’intérêt général de la concession
accordée à la CCI et a approuvé le choix de la société Mayotte Channel Gateway comme
délégataire de la nouvelle concession.
L’offre retenue v
isait à faire du port une plateforme régionale pour le transport maritime
en développant le transbordement mais aussi la pêche et le tourisme grâce à un partenariat avec
une société privée d’origine locale. Cette stratégie n
écessite des investissements importants en
outillage de manutention (grues, chariots-élévateurs, tracteurs portuaires) et en infrastructures
(terrain de stockage et de livraison et plateforme logistique) à même de contribuer au
développement de l’économie
mahoraise.
En application de l’article L. 1411
-6 du code général des collectivités territoriales et sur
saisine du Préfet de Mayotte, la chambre a rendu un avis le 31 octobre 2013 dans lequel elle a
examiné les modalités de passation, l’économie générale
de la convention ainsi que son incidence
financière sur la situation du département.
Le rapport de la Cour des comptes sur la départementalisation de Mayotte publié en
janvier 2016 estimait que le développement du port est un projet ambitieux mais risqué. Il
soulignait que la plus grande partie des biens de retour n’auront pas été amortis au terme du
contrat
; le département devrait être en mesure de verser une indemnité compensatrice de l’ordre
de 50 à 60 M€ au délégataire à la fin de la convention.
La Cour recommandait au département
de
suivre avec attention la délégation de service public du port, afin de mesurer et d’accompagner
les retombées économiques pour Mayotte, de maintenir une vigilance constante sur les risques et
d’être en mesure de reprendr
e les actifs du port au bout de 15 ans dans les conditions prévues par
la délégation.
- 7/29 -
2 -
Une fréquentation stable depuis 2010
Seul port de commerce de Mayotte, le port de Longoni joue un rôle névralgique dans
l’approvisionnement de l’île dont l’économie
est très dépendante des importations : en 2015, la
balance commerciale de Mayotte était déficitaire de 493,5 M€ avec 505,7 M€ d’importations et
12,2 M€ d’exportations. La croissance démographique rapide, de l’ordre de 2,7
% en 2015, ne
peut qu’accentuer cette dépendance et parallèlement l’augmentation de l’activité portuaire
1
.
Le port dispose également d’une position favorable dans le canal du Mozambique et offre
un des meilleurs tirants d’eau de la sous
-région (14 mètres). De par son appartenance à la France,
Mayotte bénéficie d’une plus forte stabilité institutionnelle que les autres territoires de la région.
Ces avantages comparatifs sont propices au développement du transbordement de conteneurs
depuis des navires long-courriers vers des caboteurs à dest
ination d’autres ports de la
sous-région.
S’agissant de la pêche, l’économie mahoraise ne profite pas de la fréquentation du canal
du Mozambique par les navires thoniers français ou espagnols. Faute d’infrastructures adaptées,
les thoniers sont basés au
Seychelles où ils débarquent leur pêche ainsi qu’à l’île Maurice.
Les paquebots croisiéristes sont de moins en moins nombreux : 4 en 2015 contre 36 en
2006 alors même que le secteur des croisières est en expansion au niveau mondial.
Comme l’illustre
le tableau suivant, la croissance de la fréquentation du port résulte
principalement depuis 2011 de la hausse des importations. Bien que le transbordement se soit
développé avec l’ouverture du second quai, cette activité stagne, voire s’érode
; le
transbordement revient toutefois en 2015 à un niveau proche de celui de 2011.
Tableau n° 1
Évolution du trafic maritime au port de Longoni
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Nb
d'escales commerciales
287
290
275
243
219
195
176
151
159
192
- dont pétroliers et gaziers
18
19
20
24
14
15
16
14
15
17
- dont paquebots croisiéristes
36
38
38
20
5
3
4
2
3
4
Trafic de marchandises
tonnage importé
242 814
294 977
309 260
276 584
276 583
267 928
289 620
308 429
381 043
369 779
tonnage exporté
33 323
35 686
39 932
37 929
41 613
42 062
44 763
41 535
45 816
10 187
tonnage transbordé
139 211
46 631
19 655
235 461
310 191
317 287
300 907
299 890
244 117
312 213
Total hors hydrocarbures
415 348
377 294
368 847
549 974
628 387
627 277
635 290
649 854
670 976
692 179
tonnage hydrocarbures
73 622
81 744
89 076
97 261
95 935
85 699
81 574
75 177
92 877
101 339
Total avec hydrocarbures
488 970
459 038
457 923
647 235
724 322
712 976
716 864
725 031
763 853
793 518
Nb total d'équivalents vingt pieds
35 841
34 035
35 401
45 125
52 316
52 737
53 620
52 795
56 338
61 689
Source : rapport annuel IEDOM pour les années 2006 à 2014 / données MCG pour 2015 avec suppression du décompte dans les tonnages
exportés des conteneurs vides
1
IEDOM, rapport annuel 2015, Mayotte.
- 8/29 -
B -
Le renouvellement et l’entretien des infrastructures
1 -
L’état
des infrastructures
Le maintien en un état d’usage satisfaisant des infrastructures portuaires relève de la
responsabilité du département qui, par
convention avec l’
État, dispose de la mise à disposition
des services de l’unité territoriale de Mayotte d
e la direction de la mer Sud Océan Indien (UTM
DMSOI) à des fins de conseil pour l’entretien et l’amélioration de l’ensemble des infrastructures
portuaires dont elle a la responsabilité.
L’UTM DMSOI établit un rapport d’activité annuel à l’attention du d
épartement. Ces
documents font état depuis plusieurs années des difficultés financières du département qui ne lui
permettent ni de disposer d’une ligne dédiée au suivi des infrastructures portuaires, ni même de
commander un état des lieux général auprès d’un bureau d’études. Ainsi, malgré l’appui de
l’UTM DMSOI qui a souligné le caractère urgent d’une telle étude dès 2013, le département n’a
pas pris les moyens suffisants pour suivre ces recommandations. Seuls certains des travaux les
plus urgents sont réalisés. Des travaux ont également été entrepris en 2015 afin de sécuriser et
renforcer les défenses d’accostage ainsi que deux pieux des fondations du quai n°
1 endommagés
en 2011 par un navire cimentier.
Au vu de cette situation, le délégataire a commandé en juillet 2015 une inspection des
installations du port. Le rapport d’expertise rendu en avril 2016 et
transmis au département
souligne que certaines infrastructures sont dégradées.
Diagnostic de l’état du port de Longoni
- Synthèse
Le quai n° 1 se trouve « dans un état de dégradation avancée et ne répond pas
aux normes en vigueur »
. Il est préconisé de réduire le tirant d’eau maximum
des navires à 5,6 mètres et leur longueur maximale à 89 mètres.
Les
coffres d’amarrage
nécessitent des travaux de remise en état selon les
normes en vigueur, voire, selon les coûts, leur remplacement complet.
Le terminal pétro-gazier
conserve des capacités d’accueil des navires conformes
au projet initial. Il est toutefois recommandé de réaliser des travaux d’entretien
sur les structures afin de les maintenir aux normes.
Le quai de servitude est en état et reste compatible avec les caractéristiques des
bateaux actuels. Des travaux d’entretien sont préconisés pour conserver
l’intégrité du quai.
Le quai n° 2 est dans un bon état de conservation et répond aux normes en
vigueur. Quelques travaux d’entretiens sont préconisés.
Source
: rapports d’inspection du groupement SEAMAR Engineering –
CESIM, 2016
Compte tenu de ces constats, en particulier s’agissant d
u quai n° 1 qui ne peut être utilisé
selon les capacités initialement prévues, le délégataire estime que la délégation de service public
est obérée d’un vice caché. Il en a informé le département.
- 9/29 -
Le préfet, autorité investie du pouvoir de police port
uaire, a également attiré l’attention
du président du département sur l’état de dégradation de nombreux ouvrages portuaires
susceptible de provoquer des accidents. Le représentant de l’État a autorisé une utilisation en
mode dégradé du quai n° 1 en mai 201
6 dans l’attente d’une contre
-expertise. Alors que le
président du département souhaitait initialement s’adjoindre les services d’un bureau d’études
spécialisé, il serait envisagé que la maîtrise d’ouvrage des travaux de rénovation du quai
n° 1 soit
confiée au délégataire.
La chambre observe que bien que le département ait été alerté, de longue date, à plusieurs
reprises et par plusieurs autorités ou experts de la dégradation des infrastructures portuaires
susceptible de porter atteinte à la sécurité
sur le port, il n’a entrepris ni investissements, ni études.
Elle invite la collectivité à ce que les travaux soient lancés et réalisés par ordre de priorité, en
concertation avec les partenaires institutionnels et l’État qui demeure propriétaire des
infrastructures. La chambre prend acte du fait que le président du département a pris contact avec
les services de
l’
État à cet effet.
2 -
Les engagements financiers
Des engagements en matière d’investissement pour les infrastructures portuaires ont été
pris par le département dans le contrat de projet État-Région et dans le plan pluriannuel
d’investissement
. Les montants des engagements divergent entre les deux documents.
Le montant des investissements a été estimé à 6 M€ à la charge du département dans le
contrat de projet État-Région 2015-2020
avec un engagement identique de l’État et une
valorisation des programmes régionaux des fonds européens de 6 M€. Le contrat de projet
État-Région 2015-2020 prévoit aussi 3
M€ à la charge du département pour la sécurisat
ion des
autres infrastructures portuaires et l’aménagement des quais des barges. Le département aurait à
sa charge une dépense de 9 M€.
Le
plan pluriannuel d’investissement
2016-2021 du département adopté en février 2016
prévoit des crédits moindres : un montant
de 4,5 M€
a été retenu pour la modernisation de
l’ensemble de
s capacités portuaires
qu’il s’agisse du port de Longoni et des
infrastructures
portuaires de Dzaoudzi et Mamoudzou. Cette baisse des crédits résulte de la contrainte budgétaire
qui pèse
sur le département. La chambre souligne qu’aucune étude n’a été réalisée permettant
d’estimer le coût des travaux. En outre, le plan pluriannuel d’investissement ne comporte pas de
déclinaison par année des investissements
; il n’a de caractère pluriannue
l que le nom.
Eu égard à la nécessité de disposer d’une infrastructure portuaire aux normes pour
permettre le développement du port, la chambre recommande au département de réaliser les
études préalables et d’engager en 2017, selon un calendrier précis
et public, les travaux
d’entretien et de mise aux normes du port dans un cadre financier cohérent avec le contrat de
plan État-Région.
C -
Les instances de gouvernance
1 -
Le conseil portuaire
L’organisation des conseils portuaires est fixée par le code des transports. Ils réunissent
les milieux professionnels, sociaux et associatifs ainsi que les collectivités territoriales où sont
situées les principales installations portuaires. Ils sont consultés sur le positionnement
stratégique, la prise en compte des questions environnementales et la politique de développement
des ports, notamment leur politique tarifaire et foncière. Le conseil portuaire est présidé par un
représentant du département et les services en assurent le secrétariat.
- 10/29 -
Bien que l’article L. 5314
-12 du code des transports le prévoie, aucune des commissions
chargées d’étudier l’exploitation, les tarifs ou le développement n’a été
instituée.
Selon l’article R. 5314
-23 du même code, le conseil portuaire se réunit au moins deux
fois par an. En l’espèce, il ne s’est pas réuni pendant plus de trois ans de février 2010 à juin 2013
ainsi qu’en 2015, année marquée par des conflits entre plusieurs acteurs du port.
À au moins une reprise en 2015, le délégataire a sollicité une réunion du conseil portuaire
sans que le président ne donne suite en contradiction avec l’article R. 5314
-23 du même code.
Le quorum n’a pas été atteint à trois reprises au cours des sept dernières réunions, néces
sitant
une seconde convocation. Les comptes rendus des réunions ne font plus l’objet d’une adoption
ou d’une approbation par les membres lors de la réunion suivante du conseil portuaire depuis
2010. Cette pratique déroge au règlement intérieur. Ce dernier a été adopté en juin 2004 avant
que la collectivité
n’
ait la responsabilité du port. Il mériterait pour le moins une actualisation.
Au vu de ces constats, la chambre rappelle au département
qu’il convient
de se conformer
aux articles R. 5314-22 et 5314-23 du code des transports qui encadrent le fonctionnement et le
rôle du conseil portuaire. En réunissant les acteurs concernés, le conseil portuaire pourrait être
un facilitateur pour organiser la concertation locale et rechercher des solutions aux différends.
2 -
Les comités de suivi de la délégation de service public
L’article 64 de la convention stipule la création d’un comité de pilotage ayant pour
mission de veiller au bon déroulement du contrat. Le comité de pilotage travaille notamment sur
les orientations de développement de la place portuaire et la stratégie de développement
économique et étudie les programmes prévisionnels d’investissements et leurs réalisations. Bien
que la convention prévoie deux réunions annuelles du comité de pilotage, celui-ci ne
s’est jamais
réuni.
Un comité technique de coordination assiste le comité de pilotage et doit se réunir
mensuellement afin de faire le point sur la gestion quotidienne de la délégation. Ce comité
s’est
réuni seulement deux fois
: l’une en novembre 2014, l’autre en octobre 2016. Cette dernière
réunion visait à relancer le travail du comité.
La chambre invite le département à rendre effectives ces stipulations contractuelles à
même de favoriser un dialogue régulier et suivi avec le délégataire.
II -
LES DESACCORDS
L’objet de la convention de délégation de service public est de confier à la société Mayotte
Channel Gateway (MCG) la gestion et l’exploitation du site de Longoni, du terminal pétrolier
des Badamiers et du terminal croisiériste de Mamoudzou.
Le contrat, signé le 3 septembre 2013, est entré en vigueur à compter du
1
er
novembre 2013. Chaque page est paraphée du président du département et de la présidente de
la société MCG à l’exception des annexes.
Bien que le paraphe ne soit une obligation que pour les actes authentiques devant notaire,
il atteste de l’accord des parties
et
permet d’éviter des modifications postérieures du contrat. Eu
égard aux désaccords entre délégataire et délégant, il conviendrait pour l’avenir de veiller à la
signature des annexes et à leur réalisation effective lorsque la convention le prévoit ; la chambre
prend acte de l’engagement du président à y procéder
.
- 11/29 -
A -
La clarification des responsabilités du délégant et du délégataire
1 -
La répartition des responsabilités sur les infrastructures
L’avis de la chambre du 31 octobre 2013
observait que les stipulations de la convention
ne permettent pas de déterminer avec précision les champs d’intervention respectifs du délégant
et du délégataire. En effet, aux termes de l’article 1
er
de la convention, le département assure le
renouvellement des infrastructures faisant l’objet de l’annexe 2
; cette annexe répartit l’inventaire
des biens mis à la disposition du délégataire en deux catégories : les infrastructures puis les
installations, ouvrages et outillages.
L’article 9 de la convention relatif à la répartition de la maîtrise d’ouvrage des travaux
prévoit qu’en ce qui concerne les infrastructures de l’annexe 2, le département réalise, sous sa
maîtrise d’ouvrage et à ses frais, les travaux d’investissement et les travaux d’entretien courant
sauf pour ce qui concerne les travaux neufs d’infrastructure dont la réalisation est expressément
prévue par le plan d’investissement de la responsabilité du concessionnaire.
L’annexe 2 inclue dans
les documents de la consultation ne faisait mention que de
superstructures et d’outillages sans mentionner les infrastructures. L’avis de la chambre
recommandait de clarifier ces éléments notamment à l’occasion du renouvellement de cette
annexe.
Un proje
t d’avenant n°
1, dont la signature a été autorisé par le département le
28 mai
2015 visait à préciser notamment les infrastructures dont les travaux d’investissement et
l’entretien courant était à la charge de la collectivité. Il n’a toutefois pas été sig
né par le
délégataire au motif qu’il n’avait pas fait l’objet de concertation préalable en particulier sur la
liste des travaux à effectuer sur les infrastructures. Le projet d’avenant n’a donc pu entrer en
vigueur.
Le procès-verbal formalisant la remise des biens a été établi de manière contradictoire et
signé le 9 juin 2014. Ce nouvel inventaire
se substitue à l’annexe 2 antérieure. Alors que la
délégation de service public prévoyait que l’inventaire distinguerait les installations, ouvrages et
outillag
es d’une part et les infrastructures d’autre part, le nouvel inventaire s’organise en
quatre parties. Il comprend la liste des biens (infrastructures, bâtiments et équipements), la
cartographie de la localisation des biens,
l’
état des voiries, terre-pleins, mobiliers bureautiques
et petits matériels
ainsi qu’
un ensemble de photographies des biens. Si la présentation diverge du
document initialement prévu, les infrastructures sont aisément identifiables à la différence de
l’annexe 2 antérieure. La corrosion
du quai n° 1 y est mentionnée.
La chambre observe que le nouvel inventaire corrige les insuffisances initialement
relevées. L’identification des infrastructures facilite l’interprétation de la convention et réduit les
incohérences entre les stipulations contractuelles.
2 -
Les travaux d’infrastructure
Les stipulations du dernier alinéa de l’article 13 de la convention prévoient que le
département se réserve la possibilité de transférer au délégataire, totalement ou non, la
responsabilité des travaux d’infr
astructures relevant de sa compétence. La chambre en 2013
observait que le département ne pouvait, après s’être réservé une partie des compétences de
maîtrise d’ouvrage sur le domaine public concédé et donc la responsabilité du financement des
travaux néce
ssaires, prévoir qu’il pourrait revenir sur cette répartition, remettant potentiellement
en cause l’équilibre général de la convention. Au surplus, dans la mesure où les mandats de
maîtrise d’ouvrage relevaient de la catégorie des marchés publics, le conce
ssionnaire ne pouvait
- 12/29 -
être désigné titulaire d’un tel marché qu’à l’issue d’une procédure de mise en concurrence
respectant les règles de la commande publique.
Depuis l’entrée en vigueur de la délégation de service public, le département n’a pas
transfér
é au délégataire la responsabilité de travaux d’infrastructure. Le projet d’avenant n°
1
prévoyait la suppression de l’alinéa incriminé. Cet avenant n’ayant pas été signé, la stipulation
de l’article 13 critiquée par la chambre demeure.
Les parties ont
envisagé de recourir à l’article 13 de la convention afin de confier au
délégataire la maîtrise d’ouvrage des travaux de rénovation du quai n° 1, des coffres d’amarrage
et des berges mais face aux risques juridiques soulignés par la chambre, le département envisage
désormais de ne confier que la maîtrise d’ouvrage des études préalables au délégataire sans
rémunération. A l’occasion de la passation d’un avenant, la chambre rappelle qu’il convient de
corriger le dernier alinéa de l’article 13 de la convention
de délégation de service public afin de
le rendre conforme aux règles de la commande publique.
3 -
L’activité de manutention
Après avoir acquis de nouveaux outillages portuaires tels que des grues mobiles, des
portiques sur pneumatiques et des tracteurs de
type stackers, le délégataire a considéré qu’il
pouvait exercer une activité de manutention afin
d’assurer l’exploitation du port. Les
agréments
fiscaux
de crédit d’impôt au titre des investissements réalisés outre
-
mer par l’entreprise disposent
que la société «
s’est engagée à exploiter directement et exclusivement, sans recourir à la location
sans opérateur, les investissements aidés pendant au minimum cinq ans pour les matériels dont
la durée de vie ne dépasse pas sept ans, et sept ans pour les matériels dont la durée de vie est
égale ou supérieure à sept ans à compter de leur mise en service ».
La société mahoraise d’ac
onage, de représentation et de transit (SMART)
exerce l’activité
de manutention sur le port depuis plus de 30 ans ; elle estime que le délégataire ne peut la réaliser
au regard des règles de la concurrence. Pour le département,
l’activité de manutention n’a pas été
intégrée dans le périmètre des missions de la délégation de service public.
En 2015, le litige entre le délégataire et la SMART
s’est traduit par des grèves et blocages
du port. La SMART ne disposant pas à cette période
d’autorisation d’occupation du domaine
public, MCG a obtenu par ordonnance en octobre 2015 que la société quitte les lieux dans un
délai de 30 jours et sous astreinte de 5
000 € par jour de retard. Cette ordonnance a été confirmée
par un arrêt du c
onseil d’État
. La poursuite des manifestations et l
’occupation de certaines parties
du port jusqu’en janvier 2016
ont amené le tribunal administratif à condamner la SMART au
versement à la société MCG de la somme de 335 000
€ en liquidation de l’astreinte.
Dans ce contexte, le département a demandé à la juridiction administrative par requête du
15 janvier 2016
d’interpréter les stipulations du contrat d
e délégation de service public en vue de
préciser les conditions d’exercice de l’activité de manutention. Il s’agit d’un des désaccords
majeurs entre les parties
qui retarde la mise en œuvre de la délégation de service public.
Selon la
société SMART, l’act
ivité de manutention portuaire doit être exercée exclusivement par des
ouvriers dockers ; elle
est incompatible avec l’exploitation d’un outillage portuaire.
Par
ordonnance du 1
er
décembre 2016, la requête précitée
a été rejetée au motif de l’absence de
tentative préalable de règlement amiable.
Le délégataire a proposé d’agréer une autre compagnie de manutention, la compagnie
Manu-Port, détenue principalement par la gérante de MCG. Après refus du conseil portuaire et
du département, le juge des référés saisi par la société Manu-Port a enjoint le 28 octobre 2016 le
président du département à délivrer, à titre provisoire, l’agrément sollicité.
- 13/29 -
Les décisions de la justice administrative jusqu’ici rendue
s, et pour lesquelles il a été
interjeté appel, ont co
nduit à agréer une nouvelle société d’aconage, ce qui peut permettre
davantage de
concurrence quant à l’exercice de cette activité
au port de Longoni.
B -
Les obligations contractuelles
1 -
L’inventaire des biens
En application de l’article 1 de la convention
de délégation de service public qui stipule
qu’un état des lieux détaillé et contradictoire des biens remis par le département sera réalisé, un
procès-
verbal de remise des biens a été signé en juin 2014. Le même article précise que l’état des
lieux indique
ra pour chaque bien inventorié sa description, ses détails et son état. L’article 34.04
stipule en outre que le premier inventaire classe les biens selon trois catégories : les biens de
retour appartenant au département à l’expiration du contrat, les biens
de reprise appartenant au
délégataire et sur lesquels le département peut exercer une faculté de rachat et les biens propres
qui appartiennent au délégataire et qui ne sont pas indispensables à la poursuite du service.
L’inventaire du 9 juin 2014
ne comporte pas de description des infrastructures, bâtiments
et équipements objet de la délégation. Ainsi ne précise-t-il ni la superficie, ni les dimensions ou
le nombre de pièces des bâtiments. Les caractéristiques des réseaux d’eau, d’électricité, de
télépho
nie, d’assainissement et d’éclairage n’y figurent pas
(longueur, puissance, description des
installations, etc.). Seules
une mention succincte de l’état général des biens et une date de mise
en service sont indiquées. Enfin, la totalité des biens sont considérés comme des biens de retour,
même lorsque leur état est mentionné comme dégradé ou à mettre au rebut pour des véhicules
par exemple. La distinction entre les biens de retour, les biens de reprise et les biens propres n’est
donc pas satisfaisante.
En
contradiction avec l’article 34.04 de la convention, aucune réactualisation annuelle de
l’inventaire des biens n’a été effectuée par les parties à la convention. La chambre
prend acte de
l’engagement d
e la collectivité de
préciser le contenu de l’inventai
re lors de sa mise à jour
annuelle.
2 -
Le rapport annuel
Conformément à l’article R. 1411
-7 du code général des collectivités territoriales en
vigueur lors de la signature du contrat, l’article 51.01 de la délégation stipule que le délégataire
fournira au département avant le 1
er
juin de l’année suivant la fin de chaque exercice un rapport
annuel. L’annexe 17 précise le contenu de ce rapport. Cette réglementation
, qui a été reprise à
l’article 52 de l’ordonnance
n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession
et à
l’article 33 du décret
n° 2016-86 du 1
er
février 2016 relatif aux contrats de concession, précise
le contenu du rapport.
Malgré la demande du département,
aucun rapport annuel n’avait été transmis
initialement par le délégataire pour les exercices 2014 et 2015. Des éléments statistiques et
financiers partiels en l’absence de bilan d’ouverture ont été transmis par bribes et la société MCG
a finalement adressé en juin 2016, pour les deux années, les rapports de gestion du conseil
d
’administration de la société, les
liasses fiscales et un
rapport d’activité
présentant les
statistiques de fréquentation du port. Ces documents qui concernent la société titulaire de la
délégation dans son ensemble, ne sont établis ni selon les modalités
prévues à l’article 50.01 et à
l’annexe 17 de la délégation de service public, ni conformément aux dispositions de l’article 33
du décret n° 2016-86. Le département a mis en demeure le délégataire le 7 juillet 2016 de
communiquer un rapport annuel établi dans les conditions prévues par la convention en se
- 14/29 -
réservant le droit de prononcer une pénalité de 500 € par jour de retard conformément à l’article
54 de la convention.
Cette mise en demeure a été réitérée courant
septembre 2016. En se référant à l’artic
le 54
de la convention qui précise les pénalités applicables en cas de non-respect des délais de
transmission et d’informations prévus par le contrat, le département considère qu’il s’agit d’une
violation grave des obligations du délégataire.
En novembre 2016, ce dernier a transmis un rapport annuel plus proche dans sa
présentation du modèle annexé à la convention. Ce document demeure, selon la chambre,
succinct et peu détaillé. Plusieurs éléments financiers ne sont pas renseignés tel que le détail
valorisé des dépenses de renouvellement/grosses réparations effectuées sur le dernier exercice,
l’état du programme d’investissement et de renouvellement des biens et immobilisations
nécessaires à l’exploitation du service public délégué, les dépenses de renouvellement, l’état
actualisé des financements externes et des conditions négociées (modalités de remboursement,
durée, taux).
La chambre prend acte de l’engagement du délégataire à se conformer à l’article 52 de
l’ordonnance n° 2016
-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession qui rend
obligatoire la production d’un rapport annuel dont le contenu est précisé par l’article 33 du décret
susmentionné.
3 -
La garantie à première demande
L’article 53.01 de la convention de délégation de service public stipule que le délégataire
s’engage à fournir dans les
trois mois suivant la signature du contrat une garantie bancaire à
première demande d’un montant d’1
M€. Cette garantie n’a pas été transmise par le délégataire
malgré plusieurs demandes et mises en demeure en ce sens du président du département. Le
délégataire a expliqué au département que la garantie serait en cours de finalisation avec un
établissement bancaire.
Alors que la garantie à première demande aurait dû être constituée au plus tard le
31 janvier 2014, celle-
ci n’a toujours pas été réalisée près de
trois ans après.
Dans l’attente de la
constitution de cette garantie, le délégataire envisage de faire consigner la somme auprès de la
Caisse des dépôts et consignation.
4 -
Les autorisations d’occupation du domaine public
L’article 52 de la convention de d
élégation de service public prévoit le transfert des
contrats du précédent exploitant au nouveau délégataire. L’annexe 18 établit la liste des contrats
concernés, notamment les autorisations d’occupation du domaine public.
L’article 35.02 stipule que le
délégataire soumettra au département un modèle type
d’autorisation d’occupation du domaine public dans les
six mois
suivant l’entrée en vigueur du
contrat. Les autorisations sont soumises à l’accord exprès et préalable du département. Le
délégataire doit
enfin adresser au département une copie de toutes les autorisations d’occupation
du domaine public qu’il accorde. L’annexe 18 mentionne 14 autorisations d’occupation du
domaine public dont la durée initiale fait qu’elles sont encore en vigueur.
Le délégataire
n’a pas transmis de modèle
-
type d’autorisation d’occupation du domaine
public malgré plusieurs relances du département depuis août 2014 et une mise en demeure en
février 2016. Il
a répondu à la chambre qu’un modèle avait été transmis lors de la final
isation de
la convention mais n’avait pas été inclus à l’annexe 18
. En revanche, il a transmis deux
- 15/29 -
autorisations d’occupation du domaine public signées depuis l’entrée en vigueur de la délégation
de service.
C -
Des contentieux devant le juge administratif
1 -
L
e bilan d’ouverture de la délégation
Aucun bilan d’ouverture n’a été formellement inséré au contrat bien qu’il soit prévu par
l’article 43 de la convention qui renvoyait également à l’annexe 16 devant être réalisée après
l’entrée en vigueur dudit contrat
. Rien ne précise si la réalisation de cette annexe relève de la
responsabilité du délégant ou du délégataire mais le département, en tant que délégant, pouvait
aisément solliciter les informations nécessaires de son précédent concessionnaire, la CCI de
Ma
yotte. La responsabilité première de la réalisation du bilan d’ouverture appartenait, selon la
chambre, au département.
La CCI a informé le département des éléments utiles pour établir le bilan d’ouverture en
juin 2014. Les versions certifiées par le com
missaire aux comptes n’ont été communiquées qu’en
juillet 2015, soit 22 mois après l’achèvement de la concession antérieure. Le département les a
aussitôt transmises au nouveau délégataire sans proposer de lui-
même un bilan d’ouverture.
Assisté de son expert-
comptable, le délégataire a réalisé un bilan d’ouverture pour ses
propres comptes et proposé en février 2016
un bilan d’ouverture faisant état d’un apport du
concédant de 10 066 000
€. Ce bilan d’ouverture ne fait pas l’objet d’un accord formel entre
les
parties.
Le bilan d’ouverture proposé par le délégataire contient des «
créances autres » pour un
montant de 6,9 M€ correspondant principalement aux
parts des redevances sur marchandises des
années 2008 à 2012 devant être reversées par le département à la CCI. Le délégataire estime que
ces créances lui ont été transférées dans la mesure où la convention stipule que sont transférées
au délégataire «
l’intégralité de l’actif et du passif circulant, ainsi que la trésorerie permettant de
régler les dettes courantes non couvertes par des actifs circulants ».
Selon le délégataire,
l’apport du département
devrait équilibrer
l’
actif et le passif dans la
mesure où la convention stipule qu’est transférée au délégataire «
la trésorerie qui devra
prioritairement être destinée au financement des investissements ».
Le précédent délégataire a procédé de son côté à la clôture des comptes de sa concession
et estimé qu’elle conduisait à une créance à l’encontre du
département pour un montant estimé à
11
503 657 € au
31 décembre 2014. En annexe des comptes, le commissaire aux comptes
explique qu’il a pour ce faire déterminé une partie de trésorerie
conservée par la CCI
correspondant à «
la disponibilité constatée majorée du montant de l’actif circulant déduction
faite du passif circulant ».
Le département, qui a contesté l’estimation de résiliation anticipée de la concession faite
par la CCI en juillet 2014
, n’a en revanche pas contesté le bilan de clôture de la concession bien
qu’il disposât d’une étude externe mett
ant en évidence les enjeux financiers qui en résultaient
pour le département.
Mis dans l’obligation de respecter la nouvelle convention de délégation de
service public, le département a mis en demeure la CCI de verser 10 066
000 € sans autre
explication qu
ant aux modalités de calcul de cette somme et sans contester notamment l’usage
fait par le précédent délégataire de la trésorerie de la concession antérieure.
La chambre observe que les stipulations relatives aux conditions d’ouverture du bilan de
la nouvelle délégation ne correspondent pas aux stipulations de clôture de la précédente
concession. L’article 49 du contrat de concession antérieur stipule en effet que «
un bilan de
- 16/29 -
clôture des comptes de la concession sera dressé dans un délai maximum de trois mois à dater
de l’expiration de la concession. Sur la base de ce bilan et
trois mois au plus tard après sa
transmission, le concédant reversera au concessionnaire le montant des fonds propres de ce
dernier qui seraient demeurés régulièrement investis dans le fonds de roulement de la
concession.
» Le département a pris des positions contradictoires. Il n’a pas défendu au mieux
ses intérêts
en s’abstenant de contester dès l’origine la créance du précédent délégataire.
La chambre observe que les conventi
ons de concession d’outillage public
portuaire ont été signées avec l’objectif que les ressources dégagées par l’activité portuaire soient
principalement réinvesties dans le développement et l’entretien des biens objet de la concession.
Bien que la CCI ait
précisé qu’elle a réalisé 5 M€ d’investissement sur la période 2007
-2013, elle
a alimenté chaque année son report à nouveau qui atteint 8 972 311
€ à la clôture des comptes
2013 auxquels s’ajoute
le résultat de l’exercice de 4
296 327
€. Les réserves qui ont été
conservées par la chambre consulaire auraient utilement pu être investies dans le développement
et l’entretien des biens
, objet de la concession. Le juge des référés a rejeté le 28 octobre 2016 la
requête du délégataire par laquelle il demandait que soit enjoint au département de lui transmettre
le bilan d’ouverture de la délégation de service public et d’émettre à l’encontre de la chambre de
commerce et d’industrie un titre de recette de 10 066 000 euros et de reverser à MC
G la somme
perçue en exécution du titre de recette au motif que la situation d’urgence n’était pas démontrée.
L’ordonnance mentionne que la société MCG «
est en droit de disposer enfin du bilan
d’ouverture prévu à l’article 43 de la convention de DSP et qu’elle
a vocation à obtenir, en sa
qualité de nouveau délégataire et à la faveur de ce bilan d’ouverture, le transfert de "l’intégralité
de l’actif et du passif circulant" et de "la trésorerie permettant de régler les dettes courantes non
couvertes par des actifs circulants" ». Par ordonnance du 20 janvier 2017, le juge des référés a
également rejeté la requête du délégataire par laquelle il demandait que le département de
Mayotte lui verse une provision de 10 066
000 € à valoir sur le transfert de l’actif et du
passif
circulant et la trésorerie. Le département envisage d’avoir recours aux services d’un cabinet de
conseil financier afin d’acter un bilan d’ouverture de la délégation.
2 -
Le règlement d’exploitation
L’article 23 de la convention de délégation de servi
ce public stipule que le délégataire
soumet au département un projet de règlement d’exploitation des installations concédées dans un
délai de six mois
suivant l’entrée en vigueur du contrat, soit avant le 30 avril 2014, et que le
département disposera d’un
délai de trois
mois pour en décider de l’adoption.
Le conseil portuaire devant émettre un avis sur le projet de règlement d’exploitation en
application de l’article R.
5314-22 du code des transports, le délégataire a formellement demandé
le 15 juillet 2015 et le 25 août 2015
que ce point soit mis à l’ordre
du jour.
Il n’a pas été donné suite à cette demande quand bien même l’article R. 5314
-23 du code
des transports l’obligeait. En
2016, après un avis défavorable du conseil portuaire et la
proposition d’un nouveau règlement intérieur
, celui-ci a reçu un avis favorable des membres le
22 juin. Malgré cet avis favorable, le règlement d’exploitation n’est toujours pas adopté
depuis
plus de 20 mois.
Si le délégataire avait initialement pris du retard dans l’élaboration du règlement
d’exploitation, l’absence d’adoption d’un règlement d’exploitation résulte d’une absence de
décision du département.
Le juge des référés a rejeté le 28 octobre 2016 la requête du délégataire par laquelle il
demande que soit enjoint au département d’approuver le règlement d’exploi
tation au motif que
la condition d’urgence n’est pas caractérisée. L’ordonnance mentionne toutefois que la société
- 17/29 -
MCG expose «
de manière pertinente que le département se doit, en vertu notamment de l’article
23 de la convention de DSP, de faire le nécessaire pour que soit adopté le nouveau règlement
d’exploitation du Port
(
) cet impératif étant accentué par la récente modernisation des
installations portuaires et par la perspective de la présence sur le site d’une pluralité d’entreprises
de manutention à compter du 1
er
janvier 2017
». Le tribunal administratif demeure saisi d’une
requête au fond.
La chambre prend acte de la volonté du département
de s’engager
à adopter au premier
semestre 2017 le règlement d’exploitation conformément à ses obligations c
ontractuelles et à la
recommandation de la chambre.
III -
LA SITUATION FINANCIERE DE LA DELEGATION
A -
L’équilibre financier
1 -
La comptabilité propre à la délégation
En contradiction avec l’article 33 du d
écret n° 2016-86 du 1
er
février 2016 relatif aux
contrats de concession
2
et avec les articles 44 et 51.02 de la convention, le délégataire n’a pas
transmis les comptes annuels de la concession. Comme précédemment expliqué, il a transmis les
comptes et les liasses fiscales de la société MCG lorsque le département a sollicité ceux de la
délégation de service public.
La chambre rappelle au délégataire que l’article 33 du décret 2016
-86 relatif aux contrats
de concession rend obligatoire la production de comptes propres à la délégation de service public
et en conséquence la tenue d’une comptabilité propre. L’article 33 du décret 2016
-86 relatif aux
contrats de concession précise les données comptables obligatoires
3
.
Les comptes de la société ne recoupent pas strictement ceux de la délégation elle-même.
Si les comptes de la société MCG sont encore proches de ceux de la convention, ils connaîtront
de plus en plus de différences. De manière complémentaire mais distincte de la délégation de
service public, la société projette a
insi des investissements en propre et a d’ores et déjà initié
certains d’entre eux en 2015 comme les études pour la réalisation d’un parc ethnoculturel ou des
études pour la construction d’un poste d’inspection frontalier. La société est également
susceptible de disposer de ressources autres que celles prévues par la délégation de service public
dans le cas où elle exercerait une activité d’aconage par exemple. Les comptes de la société MCG
donnent en conséquence une image qui ne peut être considérée comme strictement fidèle à ceux
de la délégation.
La chambre souligne que le délégataire se trouve confronté à la difficulté d’établir une
présentation bilancielle sans disposer du bilan d’ouverture établi avec le département tel que
stipulé à l’article 43 et à l’annexe 16 de la convention.
2 -
La situation financière du délégataire
Selon les comptes de la société MCG,
un déficit d’exploitation est enregistré en 2014 et
2015. Le différend avec le département sur les modalités de calcul de la redevance et qui a conduit
à une provision pour risque de 1,6 M€ sur chaque exercice pèse sur le résultat. Ce dernier est
2
Dispositions précédemment mentionnées à l’article
L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales.
3
Dispositions
précédemment prévues à l’article R. 1411
-7 du code général des collectivités territoriales.
- 18/29 -
positif en 2015 uniquement en raison d’un crédit d’impôt sur les investissements réalisés
outre-mer.
Le résultat net de la société MCG est fragile ; il ne reflète pas en 2015 le résultat de
l’activité réelle. Aucun élément comptable 2016 n’a été produit par MCG pour apporter une
information sur la tendance de l’année en cours.
Cette situation doit être pondérée par les prévisions initiales de la délégation. Les comptes
d’exploitation prévisionnels estimaient à 39,1 M€ le résultat cumulé sur la totalité de la
délégation après reversement au délégant des provisions constituées pour gros entretien et
réparation.
En l’absence de précision dans la convention d’une clause de répartition du résultat
cumulé, celui-
ci reviendrait en totalité à la société MCG. Bien qu’affaiblie par les premiers
résultats et sans prendre en compte les révisions des tarifs et des loyers récemment décidées,
l’équilibre général de la
délégation sur les quinze années demeure, selon les estimations de la
chambre, favorable au délégataire.
B -
Les investissements et leur programmation
1 -
Les plans de développement stratégique et d’investissement
La programmation des investissements repose sur un plan de développement stratégique
annexé au contrat
4
, un plan d’investissement sur la durée du contrat
5
, un plan d’investissement
quinquennal glissant détaillant les investissements et transmis annuellement au département, le
premier dans les six mois
suivant l’entrée en vigueur du contrat
6
,
un plan annuel d’investissement
qui reprend l’ensemble des éléments figurant dans le plan quinquennal et qualifiant chaque bien
en tant que bien de retour, bien de reprise ou bien propre
7
. L’article 11.04 stipule
que le
département donne son accord dans un délai de deux mois après la réception des plans
quinquennal glissant et annuel et en l’absence de réponse, les plans sont réputés validés.
En outre, il est prévu un plan quinquennal de développement et de promotion
commerciale du port
8
; pour la première période de cinq ans, la convention stipule que le plan de
référence sera celui figurant en annexe 10 mais il figure en réalité en annexe 9.
Bien que le
département l’ait sollicité à cette fin
, le délégataire
n’a réalisé ni plan
quinquennal ni plan annuel au motif que l’article 8 de la convention stipulerait que le plan de
référence pour la première période de cinq ans est celui annexé au contrat. La numérotation des
annexes est toutefois erronée à l’article 8
de la convention et les articles 11.02 et 11.03, qui ne
stipulent pas que l’annexe
concernée n° 10 vaut plan quinquennal et annuel, prévoient une
transmission annuelle des plans. Cette annexe est insuffisamment détaillée pour permettre au
département de connaître avec précision les investissements envisagés. Le délégataire estime
également que les avis de travaux adressés à la capitainerie du port (service de l’État) et aux
services du département sont une information suffisante. Ils sont toutefois adressés quelques
semaines avant les débuts des travaux sans qu’un service du département puisse effectuer un
contrôle adapté et cohérent. Enfin, en juin 2016, le délégataire a communiqué des plans annuels
de financement 2016 et 2017. Les tableaux sont succincts ; les opérations ne sont pas détaillées.
4
Article 8 alinéa 1 et annexe 8.
5
Article 11.01 et annexe 10.
6
Article 11.02.
7
Article 11.03.
8
Article 8, alinéa 7 et 8.
- 19/29 -
Aucune précision ne permet de savoir s’il s’agit de biens de retour, de biens de reprise ou de
biens propres.
Aucun investissement n’
a été prévu en 2016.
En se référant à l’article 54 de la convention qui précise
les pénalités applicables en cas
de non-
respect des stipulations relatives à la mise en œuvre du plan d’investissement annuel,
le
département
estime que l’absence de transmission d’un plan annuel d’investissement avec les
détails prévus par la convention constitue une violation de ses obligations par le délégataire ; il
l’a
mis en demeure de s’y conformer
le 16 septembre 2016.
La chambre prend acte de l’engagement du
département à revoir, conformément à la
recommandation de la chambre, les stipulations relatives à la programmation des investissements
en corrigeant les renvois aux annexes erronés à l’occasion de la passation d’un avenant au cours
de l’exercice 2017.
L’annexe 8 comprend des cartographies présentant les investissements pa
r zones du port
à horizon 2014, 2018, 2023 (achèvement de la convention) et même 2028 et 2043, soit bien après
l’achèvement de la convention. Une deuxième version du projet de développement du port a été
achevée en juillet 2016 dans le cadre de la programmation des fonds européens. Ce plan présente
des changements significatifs par rapport au plan de développement stratégique de l’annexe 8 de
la convention (déplacement de l’accès au port et des bâtiments administratifs sur une nouvelle
zone avec constructio
n d’un carrefour giratoire sur la voirie publique, déplacement de la zone de
dépotage C, abandon de la création d’une digue anti
-clapot et positionnement différent de
certains quais de débarquement par rapport au plan initial).
Ce nouveau plan n’a pas été transmis au département en contradiction avec l’article 8 de
la délégation qui stipule que le délégataire « peut proposer au département un nouveau plan de
développement stratégique ».
2 -
Les investissements
Les plans de développement stratégique et d’in
vestissement présentaient les opérations
prévues sur la durée totale de la délégation de service public.
Une première série d’investissement prévue par le plan annexé à la convention consistait
en l’acquisition de matériels portuaires
: deux portiques, deux cavaliers, une grue mobile, un
stacker, deux chariots et un tracteur pour un montant total de 18,97 M€ selon l’annexe 8. Le
délégataire a acquis au cours des exercices 2014 et 2015 trois grues mobiles, quatre portiques sur
pneumatiques, trois tracteurs de type stackers et cinq chariots-
tracteurs non munis d’un dispositif
de levage pour un montant total de 20,05
M€. L’acquisition d’équipements plus nombreux que
ceux prévus, avec l’accord du précédent président du département
, a conduit à un
surdimensionnement des équipements par rapport aux prévisions initiales.
Sollicité par le délégataire
après l’acquisition des équipements, le département a
refusé
d’exonérer les matériels de l’octroi de mer. En l’absence de stipulation de la convention sur le
taux
d’octroi de mer applicable au matériel portuaire, le montant total des investissements devait
s’entendre toutes taxes comprises afin que la totalité des coûts soient couverts par les comptes
d’exploitation prévisionnels du délégataire. Après imposition à l’octroi de mer à hauteur de
3,25
M€, le montant total de ces matériels portuaires s’est élevé à 23,3 M€, soit un surcoût de
23
% par rapport à l’estimation initiale.
Le refus d’exonérer les matériels de l’octroi de mer a eu pour conséquence de renchéri
r
le coût des investissements. D’un point de vue économique, l’imposition pèsera sur les tarifs des
outillages du port. La chambre relève qu’il était possible de recourir à l’exemption prévue par le
règlement d’exécution n°
1001/2013 de la commission du 4
octobre 2013 modifiant l’annexe I
- 20/29 -
du règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au
tarif douanier commun.
Au surplus, en raison des désaccords quant aux modalités d’exercice de l’activité
d’aconage sur le
port, les matériels sont sous-
utilisés à l’image des grues mobiles le plus souvent
positionnées en retrait du quai n° 2.
Une seconde série d’investissements est l’extension et l’aménagement de zones de
transbordement et de dépotage des conteneurs. Bien
que l’article 12.01 de la convention stipule
que pour toute opération qu’il projette, le délégataire, maître d’ouvrage des travaux, soumet pour
accord un avant-projet sommaire au département, le délégataire qui a demandé au département
l’attribution de su
bventions
FEDER, n’a pas sollicité l’accord du département sur un avant
-projet
sommaire s’agissant par exemple de l’extension du terre
-plein devant la direction du port. Trois
ans après le début de la délégation, plusieurs opérations présentent des retards comme la zone de
dépotage C, la zone de parking de conteneurs D, la création d’une digue anti
-clapot B1 et
l’extension de
la zone industrielle Vallée II.
Les prochains investissements consistent dans le développement de la desserte portuaire
au travers
de l’amélioration des zones de stockage et de dépotage, la mise aux normes du
dispositif de sécurité et de sûreté et la création d’une plateforme d’interface avec le réseau public.
D’un montant total de 25,5 M€ HT,
ils font
l’objet de demandes de subventio
ns à hauteur de
6
M€ au titre du FEDER et de 12 M€ au titre du contrat de plan État
-Région. Les financements
en fonds propres seraient de 7,5 M€.
3 -
Les conséquences financières des investissements pour le département
L’
article 42 de la convention stipule
que le délégataire doit obtenir l’approbation
préalable et expresse du département lorsqu’il établit un plan d’amortissement dépassant le terme
du contrat. Les articles 56.01 et 56.03 précisent que les biens de retour feront l’objet d’une
indemnité calculée à partir de la valeur nette comptable des biens. Dans le rapport public
thématique sur la départementalisation de Mayotte, cette indemnité compensatrice était estimée
à 50-60
M€ à la fin de la convention.
Selon
l’état des amortissements de la société M
CG
, trois immobilisations font l’objet d’un
plan d’amortissement dépassant le terme du contrat. Elles n’ont pas fait l’objet d’une approbation
préalable et expresse du département
; l’une d’entre elles est d’un montant plus significatif. La
chambre rappell
e au délégataire que l’article 42 de la convention l’oblige à solliciter
effectivement l’approbation du département lorsqu’il réalise des plans d’amortissement
dépassant le terme du contrat.
Des investissements prévus par la convention initiale sont amortis sur une durée
nettement plus courte que la durée envisagée lors de la signature de la convention, réduisant
d’autant le montant de l’indemnité compensatrice. L’exemple le plus notable est l’extension des
terre-pleins devant la direction du port. Les dépenses réalisées au cours des exercices 2014 et
2015, soit 4,5 M€, sont amorties sur une durée de 10 ans contre 50 ans initialement envisagé
e.
Les prochains investissements, notamment le développement de la desserte portuaire avec
le soutien de fonds eur
opéens, reposeront sur des durées d’amortissement supérieures à la durée
de la délégation.
Au 31 décembre 2016, les biens de retour qui n’auront pas été totalement amortis au terme
du contrat sont limités en l’absence d’investissements significatifs dépas
sant le terme du contrat.
Comme le recommandait le rapport sur la départementalisation de Mayotte, la chambre
rappelle la nécessité de provisionner l’indemnité compensatrice prévue par l’article 56.03 de la
- 21/29 -
convention au fur et à mesure des plans d’amorti
ssements que le département approuverait ; ce
dernier
a pris l’engagement
de s’y conformer
. À
titre d’exemple, les investissements pour le
développement de la desserte portuaire de 25,5
M€ doivent conduire à provisionner une
indemnité compensatrice après a
pprobation du plan d’investissement annuel et de l’avant
-projet
sommaire correspondants. Ces documents devront être transmis par le délégataire.
C -
Les modifications apportées à l’équilibre des comptes de la convention
1 -
Le montant de la redevance
Le premier facteur dont dépend l’équilibre financier de la délégation est
le mode de calcul
de la redevance
composée d’une part fixe et d’une part variable. L’article 33.01 stipule que «
en
vue d’assurer l’équilibre financier de la présente convention et c
ompte tenu des importants
investissements pris en charge par le délégataire, celui-ci sera exonéré du paiement de la part fixe
de la redevance domaniale durant les six premières années d’exploitation du Port, à compter de
la prise d’effet du contrat, si les subventions sollicitées auprès de l’État ou de l’Europe pour la
réalisation du projet sont accordés conformément à l’annexe 20.
»
Les modalités de calcul de la redevance sont précisées en annexe 11 de la délégation. La
redevance fixe s’élève à 1,625 M€
. La part variable qui a pour objectif de faire participer le
département au développement du niveau de l’activité portuaire représente 75
% des redevances
sur marchandises et des droits de port sur les navires.
Le département et le délégataire ont une interprétation divergente de ces stipulations. Pour
le délégataire, la part fixe est comprise dans la part variable et la redevance totale est de ce fait
plafonnée à 75 % des redevances sur marchandises et des droits de port tandis que le département
estime
que la part variable et la part fixe s’additionne
nt
. L’annexe 11 ainsi qu’un considérant du
jugement du 17 décembre 2015 du tribunal administratif de Mayotte relatif à la procédure de
passation de la délégation de service public confirment l’interprétatio
n du département. La
formule retenue dans les comptes d’exploitation prévisionnels de la délégation est celle évoquée
par le délégataire.
Le désaccord représente au total sur la durée de la délégation plus de 24
M€
, soit environ
un quart des investissements prévus. Selon la formule de calcul retenue par le département, le
montant de la redevance serait supérieur à 90 % du montant total des redevances sur
marchandises et des droits de port à partir de 2020. La chambre observe que la formule retenue
par le département modifie significativement les modalités de financement des investissements
par le délégataire et conduit à un déséquilibre des comptes des sept premiers exercices de la
délégation.
Le résultat net cumulé estimé à la fin de la délégation serait supérieur à 13
M€
. En
l’absence de clause de répartition dans la délégation, il serait conservé par le délégataire.
Par une requête en interprétation du délégataire, le désaccord a été porté devant le tribunal
administratif en juillet 2016.
2 -
Le droit de port
Les produits d’exploitation constitués principalement du droit de port, des tarifs
d’outillage et des redevances domaniales sont le second facteur dont dépend l’équilibre de la
délégation.
- 22/29 -
Le droit de port
Source : article R. 5321-1 du code des transports
Le droit de port comprend les redevances suivantes :
1° Pour les navires de commerce :
a) Une redevance sur le navire ;
b) Une redevance de stationnement ;
c) Une redevance sur les marchandises ;
d) Une redevance sur les passagers ;
e) Une redevance sur les déchets d'exploitation des navires ;
2° Pour les navires de pêche, une redevance d'équipement des ports de pêche ;
3° Pour les navires de plaisance ou de sport, une redevance d'équipement des ports de plaisance
et, pour ceux ayant un agrément délivré par l'autorité maritime pour le transport de plus de
douze passagers, une redevance sur les déchets d'exploitation des navires.
L’article R.
5321-
11 du même code des transports dispose qu’ils sont fixés par le
département sur proposition du concessionnaire après consultation des usagers par affichage, du
préfet, du service des douanes et du conseil portuaire.
L’arrêté du 15 octobre 2001 portant approbation des cadres types des tarifs des droits de
port et des
redevances d’équipement modifié par l’arrêté du 10 décembre 2003 fixe des cadres
types suivants lesquels sont présentés les tarifs définissant les dispositions particulières à chaque
port maritime pour l’institution des droits de port et la fixation des ta
ux correspondants. Ce cadre
type, rendu obligatoire par l’article R. 5321
-
10 du code des transports, n’est pas
repris et les taux
des redevances sont éparpillés dans plusieurs documents dont certains ne sont pas accessibles
aux usagers du port. La redevanc
e sur les déchets d’exploitation des navires et les redevances
d’équipement (port de pêche et de plaisance) sont mentionnées dans le barème des tarifs
d’outillage en contradiction avec l’arrêté du 15 octobre 2001.
La chambre rappelle au délégataire l’ob
ligation de présenter les droits de port selon les
cadres types définis par les arrêtés du 15 octobre 2001 et du 10 décembre 2003 et de les rendre
tous accessibles aux usagers conformément à l’article R. 5321
-14 du code des transports. Cet
article dispose également que les tarifs sont publiés dans deux journaux locaux au moins ainsi
qu’au recueil des actes administratifs du département.
L’article 39 de la convention reprend les dispositions réglementaires et stipule que les
tarifs de l’année 2014 sont ceu
x établis avec le précédent concessionnaire. Les comptes
d’exploitation prévisionnels reposent sur l’hypothèse de droits de ports identiques aux précédents
et d’une croissance du trafic de conteneurs de 4
% par an. Ces hypothèses ne sont toutefois pas
reprises contractuellement.
Les tarifs de la redevance sur les marchandises, joints en annexe 1, peuvent être différents
par type de produit selon un référentiel national. Ils ont été augmentés de 3 % à 6 % à compter
du 1
er
avril 2016.
La redevance sur le navire a été augmentée à partir du 15 novembre 2016 dans des
proportions de 5 % pour les navires au mouillage à 20 % pour les navires à quai.
- 23/29 -
La redevance de stationnement a également été augmentée. Les augmentations peuvent
atteindre un doublement de la redevance pour 2 000 m
3
compte tenu du changement des volumes.
La franchise précédemment appliquée au trois premiers jours l’est désormais au deux premiers
jours.
La redevance sur les passagers progresse également. Alors que la redevance sur les
passagers est une des composantes des droits de port, les produits sont enregistrés dans un compte
distinct de celui des droits de ports. Ils ne sont pas compris dans la base de la redevance
domaniale versée par le délégataire au département.
L’ensemble de ces
augmentations, non prévu par les hypothèses de calcul sous-jacentes
aux comptes d’exploitation prévisionnels de la délégation de service public, entraîne des recettes
supplémentaires et contreparties de coûts supportées par les usagers du port. Le département en
est le principal bénéficiaire dans la mesure où la formule de calcul de la redevance domaniale a
pour base les droits de port.
3 -
Les tarifs d’
usage des outillages publics
L’article 39 de la c
onvention renvoie aux articles R. 5314-8 et suivants
9
du code des ports
qui organisent la fixation et la perception des tarifs d’usage des outillages publics. Il stipule que
les tarifs de l’année 2014 sont ceux établis avec le précédent concessionnaire. Le
s comptes
d’exploitation prévisionnels reposent sur l’hypothèse d’une croissance du trafic de conteneurs de
4 % par an et de recettes tirées des nouveaux outillages.
Le délégataire a sollicité à plusieurs reprises une révision des tarifs d’outillage not
amment
en février et juin 2016 afin de tenir compte en particulier de l’acquisition de nouveaux
équipements.
Il ressort d’une comparaison entre les
tarifs pratiqués par le précédent concessionnaire et
ceux retenus en 2016 que les tarifs de livraison de conteneurs sur camions et mise à disposition
pour pesage n’ont pas été modifiés. Il en est de même de la redevance de magasinage des
conteneurs pleins en imports. Les redevances de stationnement des véhicules et matériels roulants
ont été réduites qu’il s’agisse d’imports ou de transbordement
s. Seul le tarif de la livraison des
conteneurs sur les aires de visite ou de dépotage a été quadruplé ; selon le délégataire, il est
consécutif à de nouveaux contrôles des services de l’État, notamment sur les produits
alimentaires, depuis que la réglementation européenne afférente est applicable sur le territoire de
Mayotte.
Le délégataire a proposé des tarifs d’usage pour les grues mobiles et les portiques sur
pneumatiques en dernière date en juin 2016. Le conseil portuaire réuni le 22 juin a émis un avis
favorable. Par courrier du 7 juillet 2016, le président du département
a précisé qu’il ne validait
pas les tarifs d’outillage des grues et des portiques mais a autorisé l’application immédiate
d’autres modifications
tarifaires complémentaires. Par arrêté du 2 septembre 2016, le président
a validé «
les tarifs d’ou
tillages publics proposés lors du conseil portuaire du 22 juin 2016 ». Cet
arrêté ne mentionne pas de réserves quant aux tarifs des grues et portiques. L’ar
ticle R. 5314-10
du code des transports ne prévoit pas qu’un tel arrêté soit pris mais dispose que «
les tarifs et
conditions d
usage projetés sont applicables trois semaines après la clôture de l
instruction, si
dans ce délai l'autorité compétente n
a pas fait connaître son opposition ».
9
Ces dispositions étaient précédemment mentionnées aux articles R. 612-1 et R 612-2 du code des ports. Elles ont été
codifiées au code des transports par le décret n° 2014-1670 du 30 décembre 2014 relatif aux dispositions du livre III
de la cinquième partie réglementaire du code des transports et à leur adaptation à l'outre-mer.
- 24/29 -
Le préfet a relevé que l’article 39 de la convention n’autorise pas une application
immédiate des tarifs qui doivent être proposés avant le 30 septembre de l’année N pour entrer en
vigueur l’année suivante N+1. Anticipa
nt cette difficulté, le département et le délégataire avaient
signé un avenant à la convention le 19 février 2016, reçu au contrôle de légalité seulement le
5 septembre 2016. Le préfet a relevé plusieurs incohérences rédactionnelles et incompatibilités
de
l’avenant avec une autre délibération du conseil départemental et a demandé qu’une nouvelle
procédure de fixation des tarifs soit engagée. Afin de donner suite, le président du département a
annulé le 3
novembre 2016 son précédent arrêté. En l’absence de b
ase tarifaire, le délégataire a
décidé
de les mettre en œuvre de manière unilatérale
; il a demandé au tribunal administratif le
18 novembre
2016 de suspendre l’arrêté du président du département
annulant les tarifs.
Les tarifs proposés en juin 2016 avaient été déterminés par le délégataire afin de couvrir
le remboursement en capital et intérêts des emprunts correspondants, les assurances, le carburant,
l’entretien et le personnel affecté. Les emprunts représentent 67
% des coûts à couvrir et ont été
contractés avec une durée de remboursement de sept ans.
Pour inciter à l’utilisation des grues et
des portiques, les tarifs prévoyaient une indemnité compensatoire des outillages portuaires
payable par les navires utilisant leurs propres moyens de manutention
; elle s’éleva
it
à 596 € par
heure et 4
172 € par jour. De plus,
bien que trois tracteurs de type stacker aient été acquis par le
délégataire, ils n
’étaient
pas proposés à la location. A titre de comparaison, ils étaient loués 160
de l’heure p
ar le précédent concessionnaire.
La chambre observe que les amortissements comptables des équipements sont prévus sur
une durée de 10 ans, soit une durée différente de la durée des emprunts (7 ans). La durée de vie
réelle des grues et des portiques n’est pas connue, dépendant notamment
de la qualité de leur
entretien ;
la durée d’amortissement envisagée dans les comptes prévisionnels de la convention
est de 15 ans. À
l’issue du remboursement des emp
runts, les tarifs proposés permettraient au
délégataire de dégager une marge. Dans ces conditions, le
délégataire n’exclut pas de revoir alors
à la baisse ses tarifs. Cette possibilité confirme que les tarifs initialement
proposés en l’état
étaient élevés par rapport à la durée des amortissements comptables.
Le délégataire a confirmé à la chambre que les formules de calcul ne tenaient pas compte
des crédits d’impôt de 4,1 M€ obtenus par agrément du ministère des finances et des comptes
publics au titre des investissements réalisés outre-mer par les entreprises ; aucun remboursement
n’avait été encore obtenu lors du calcul des tarifs.
Une comparaison avec les tarifs pratiqués dans d’autres ports outre
-mer conduit au
constat de tarifs d’usage des grues comparativement élevés selon l’annexe
2 ci-jointe. Le
délégataire explique cet écart
par la différence de volume et la durée d’utilisation annuelle des
grues dans les autres ports ainsi que l’amortissement déjà achevé des équipements.
Le niveau des tarifs
d’usage des grues mobiles et des portiques sur pneumatiques proposés
par le délégataire résultait
d’une part de modalités de calcul qui ne
tenaient compte ni de
l’amortissement
réel des équipements ni des crédits d’impôt sur les sociétés obtenus par le
dél
égataire sur ces investissements et d’autre part d’un surdimensionnement des équipements
tant par rapport aux prévisions initiales du plan de développement stratégique que par rapport au
trafic de conteneurs constaté.
- 25/29 -
Par une ordonnance du 29 décembre 2016, le juge des référés a rejeté une requête du
délégataire par laquelle il demandait la condamnation du département à lui verser la somme de
1 848 000
€ correspondant au préjudice subi en l’absence d’approbation du tarif de l’outillage
public entre le
1er janvier et le 20 mai 2016 au motif que la procédure d’établissement des tarifs
était en cours lors du dépôt de la requête et qu’il ne peut être établi une
attitude fautive du
département.
Des tarifs provisoires ont été arrêtés par le département le 13 décembre 2016. Le
délégataire et le délégant ont décidé de solliciter la commission de conciliation prévue par
l’article 68 de la délégation afin d’établir les tarifs d’utilisation des grues et RTG.
Par ordonnance
du 23 janvier 2017 et sur une requête initiale du département, le tribunal administratif de Mayotte
a désigné un expert afin qu’il donne son avis sur les tarifs à appliquer pour l’utilisation des grues
et portiques du port. Le délégataire a élaboré à cette fin de nouveaux tarifs qui sont en baisse par
rapport aux précédents.
4 -
Les redevances
d’occupation du domaine public
Les redevances d’occupation du domaine public sont perçues en contrepartie de la
location de terrains, hangars et bâtiments. Les estimations retenues dans les comptes
d’exploitation prévisionnels reposaient sur une hypothèse d’une augmentation des redevances
domaniales de 20 % en 2020 et 2021, puis 10 % en 2022 et 2023 et enfin 5 % les années
suivantes. Les recettes tirées des loyers étaient plus que doublées. Ces hypothèses ne sont
toutefois pas reprises contractuellement. L’article 35.01 de la convention dispose uniquement
que les autorisations d’occupation font l’objet d’un accord
exprès et préalable du département.
Lorsque les locations
sont situées dans la zone d’activité Vallée 2, les autorisations
d’occupation temporaire en vigueur prévoient une revalorisation annuelle selon l’indice du coût
de la construction. Le montant des loyers a toutefois été revalorisé en 2016 après avis du conseil
portuaire. Le délégataire explique cette demande par l’absence de revalorisation annuelle par le
précédent délégataire depuis 1992, la nécessité de financer des investissements tels que le
revêtement de la voirie et enfin des loyers très inférieurs à la moyenne des loyers dans les zones
d’activité à Mayotte. L’augm
entation des tarifs de 2016 est répartie sur quatre ans. A titre
d’exemple, 100 m² de terrain nu étaient auparavant loués 286 € par an
; en 2016 ils seront loués
105 € par mois soit 1
260 € par an et en 2019 ils seront loués 350 € par mois soit 4
200 € par an.
S’ajoutent en plus des charges de gestion administratives mensuelles
: elles sont prévues en 2016
à 180 € et en 2019 à 240 €. Alors que les loyers étaient auparavant majorés de 2
% pour les frais
annuels d’entretien courant et de 4
% pour les frais annuels de gros entretien, les majorations
seront désormais respectivement de 3 % et 5 %. Les augmentations de loyers, qui sont multipliés
par 4,4 pour les seuls terrains nus entre les anciens et les nouveaux tarifs, vont ensuite tripler en
quatre ans hors charge de gestion administrative.
La chambre observe que les augmentations
des loyers des autorisations d’occupation du
domaine public
sont favorables au délégataire qui percevra l’intégral
ité des recettes
supplémentaires.
- 26/29 -
5 -
Conclusion
Le délégataire est soumis à des charges non prévues dans les comptes d’exploitation
prévisionnels : la formule de calcul de la redevance est moins favorable que celle retenue dans
les comptes prévisionnels, le coût des nouveaux équipements portuaires a été plus élevé que
projeté et la durée de remboursement des emprunts est inférieure de moitié à la durée
d’amortissement initialement envisagée. Pour compenser ces charges, le délégataire a sollicité
des révis
ions des droits de ports, des tarifs d’outillage et des redevances domaniales. Les
augmentations de tarifs sont favorables au délégataire mais aussi au département qui en perçoit
une partie par le biais de la redevance domaniale. Ces augmentations risquent de peser sur les
coûts supportés par les usagers du port.
Si la situation financière du délégataire est aujourd’hui fragile, les prévisions lui
demeurent favorables en fin de délégation.
Les désaccords sur les tarifs des grues mobiles et des portiques sur pneumatiques
devraient être résolus par le biais d’une expertise ordonnée par le juge des référés.
IV -
PERSPECTIVES ET ENJEUX
Les sources de contentieux entre le département et le délégataire sont, au vu de ce qui
précède, nombreuses. Les responsabilité
s relèvent des deux parties de telle sorte que l’issue des
multiples requêtes devant la justice administrative rend l’exercice complexe en termes de bonne
administration.
Le coût de ces procédures, tant financier qu’économique avec un fonctionnement
dégradé du port, fragilise la viabilité économique du projet ambitieux de faire du port une
plateforme du transport maritime. Les multiples contentieux et appuis juridiques représentent
ainsi pour le département des dépenses d’avocat de 54
000 € en 2015 et d’au
moins 90
000 € en
2016.
L’article 68 de la convention stipule qu’en cas de contestation entre le département et le
délégataire résultant de l’application du contrat et de ses annexes, une tentative de conciliation
amiable sera réalisée.
Afin de limiter
les coûts financiers de leurs désaccords et de permettre la continuité d’un
service indispensable à la vie économique de l’île
, la chambre a recommandé au département et
au délégataire d’envisager la voie d’une médiation
qui conduirait à un avenant ne modifiant pas
l’équilibre général de la convention et qui porterait
notamment, par ordre de priorité, sur les
points suivants :
1.
Décider de l’exercice de l’activité de manutention et de ses conditions par MCG ou tout
autre filiale du même groupe.
2.
Acter un bilan
d’ouverture de la délégation et transférer, le cas échéant, la trésorerie en
résultant au délégataire.
3.
Définir les modalités de calcul de la redevance domaniale en tenant compte de l’économie
générale de la convention.
4.
Établir en conséquence des droits de
port et des tarifs d’outillage et de location permettant
une exécution équilibrée de la convention.
5.
Définir un calendrier pour la rénovation des infrastructures portuaires, en particulier
s’agissant du quai n°
1 et des coffres d’amarrage.
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6.
Présenter conjoi
ntement au conseil portuaire un règlement d’exploitation et élaborer le
plan de sûreté en résultant.
7.
Préciser les conditions de la programmation des investissements et de l’accord préalable
du département.
8.
Établir conjointement un modèle d’autorisation d’o
ccupation du domaine public et la
soumettre conjointement aux utilisateurs concernés du port.
Parallèlement à cette médiation, le département pourrait revoir l’organisation du conseil
portuaire à travers un règlement intérieur et des réunions régulières
de telle sorte qu’il devienne
un organe de gouvernance efficace ; le délégataire prendrait les dispositions internes nécessaires
pour présenter un rapport annuel et des comptes conformes à la convention de délégation de
service public et fournirait une garantie à première demande au département. Les réunions du
comité technique et du comité de pilotage joueraient le rôle qui leur appartient d’orientation et
de décision.
Le département pourrait solliciter auprès des services de l’État une convention de tra
nsfert
du port conformément au III
de l’article 30 de la loi n° 2004
-809 du 13 août 2004 relative aux
libertés et responsabilités locales.
Bien que le département ait fait état de plusieurs médiations proposées par lui et refusées
par le délégataire, une médiation a débuté au cours de la semaine du 27 février au 3 mars 2017.
Selon les termes du projet de relevé de conclusions, des avancées pourraient être constatées sur
quelques points. Elles participeraient au règlement des cinq premiers désaccords susmentionnés
mais reposeraient, selon la chambre, sur des conditions optimistes qui doivent encore être
confirmées. Les trois points suivants, notamment la programmation des investissements
essentielle au développement et à la viabilité à long terme du port, n
’ont pas été abordés.
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ANNEXES
Annexe 1 : Évolution des tarifs portuaires
1. La redevance sur les marchandises
Tableau n° 2
Évolution des tarifs de la redevance sur les marchandises
(en € / 100 m3)
ancien tarif
nouveau tarif
augmentation
7,62
8,00
5,0 %
10,67
11,00
3,1 %
15,24
16,00
5,0 %
45,3
48,00
6,0 %
Source : document présenté au conseil portuaire du 11 février 2016
2. La redevance sur le navire
Tableau n° 3
Évolution des tarifs de la redevance sur le navire
(en € / 100 m
3
)
ancien tarif
nouveau tarif
augmentation
navire à quai
15,00
18,00
20,0 %
navire au mouillage
7,60
8,00
5,3 %
Source : barème présenté au conseil portuaire du 22 juin 2016
3. La redevance de stationnement
Tableau n° 4
Évolution
des tarifs de la redevance de stationnement (en € / 100 m
3
)
Ancien tarif
nouveau tarif
jusqu'à 320 m
3
6,30 jusqu'à 1000 m
3
6,50
de 321 à 1600 m
3
4,10 de 1001 à 5000 m
3
4,30
de 1601 m3 à 4800 m
3
2,10
de 5001 à 10 000 m
3
2,50
au-delà de 4 800 m
3
1,50 au-delà de 10 000 m
3
1,80
Source : barème présenté au conseil portuaire du 22 juin 2016
4. La redevance sur passager
Tableau n° 5
Évolution
des tarifs de la redevance sur passager (en € par passager)
ancien tarif
nouveau tarif
moins de 2 ans exclus
exonération moins de 5 ans exclus
exonération
entre 2 et 12 ans exclus
1,50 entre 6 et 12 ans exclus
4,50
supérieur à 12 ans
3,50 supérieur à 12 ans
12,00
Source
: Nouveau tarifs d’outillage
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Annexe 2 : Les tarifs de location des grues
Tableau n° 6
Comparaison des tarifs de location des grues dans les ports des départements
d’outre
-mer
Port de Longoni
GPM Guadeloupe
GPM La Réunion
grues mobiles LHM 420
location grue avec
chauffeur
location grue LHM 400
sans accessoires
location grue LHM
400 avec accessoires
1 100 €
les 144 premières
heures puis dégressivité
jusqu’à 670 €
187,78 € de l'heure
278,49
€ de l’heure
556,98
€ de l’heure
Sources : barème des services des grands ports maritimes de la Guadeloupe et de La Réunion. Les ports de Guyane et de Martinique ne
proposent pas de grues en location dans leurs tarifs publics