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SEPTIEME CHAMBRE
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Quatrième section
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Arrêt n° S 2017-1477
Audience publique du 3 mars 2017
Prononcé du 28 avril 2017
ECOLE NATIONALE DES TRAVAUX
PUBLICS DE L’ETAT
(ENTPE)
Exercices 2010 à 2012
Rapport R-2016-1568
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2015-68 RQ-DB en date du 18 septembre 2015, par lequel le Procureur
général près la Cour des comptes a saisi la septième chambre de la Cour des comptes de
présomptions de charges, en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et
pécuniaire de M. X, comptable de
l’école nationale des travaux publics de
l’Etat (ENTPE)
, au
titre d’opérations re
latives aux exercices 2010 à 2012, notifié le 2 octobre 2015 au comptable
concerné ;
Vu les comptes rendus en qualité de comptable de
l’ENTPE
par M. X, du 1
er
janvier 2010 au
31 décembre 2012 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63
-156 du 23 février 1963 ;
Vu les lois et règlements applicables à
l’organisme
et, notamment, le
code de l’éducation,
le décret n° 94-39 du 14 janvier 1994 relatif au budget et au régime financier des
établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité
publique alors en vigueur
;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifiée dans sa rédaction issue de l’article 90 de
la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le décret n° 56-585 du 12 juin 1956, portant fixation du système général de rétribution des
agents de l'Etat ou des personnels non fonctionnaires assurant à titre d'occupation accessoire
soit une tâche d'enseignement, soit le fonctionnement de jurys d'examens ou de concours,
ensemble les arrêtés des 19 février 1971, 29 juillet 1975, 29 août 1985, 5 septembre 2002 ;
le décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi de
vacataires pour l'enseignement supérieur ; le décret n° 2010-235 du 5 mars 2010 relatif à la
rémunération des agents publics participant, à titre d'activité accessoire, à des activités de
formation et de recrutement, ensemble les arrêtés des 4 octobre 2011 et 22 septembre 2012 ;
Vu les délibérations du conseil d’administration de l’ENTPE des 15 juin 2010, 27 septembre
2011 et 19 juin 2012 ;
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Vu le rapport de M. Patrick BONNAUD, conseiller référendaire, magistrat chargé de
l’instruction
;
Vu les conclusions n° 141 du 22 février 2017 du Procureur général ;
Vu la note produite par M. X, le 16 décembre 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du
3 mars 2017, M. Patrick BONNAUD, conseiller
référendaire, en son rapport, Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du
ministère public, et M. X, comptable, présent ayant eu la parole en dernier ;
Entendu en délibéré M. Jean GAUTIER, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la présomption de charge unique
, soulevée à l’encontre de
M. X, au titre des
exercices 2010, 2011 et 2012 :
Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la septième chambre de
la Cour des comptes de la responsabilité encourue par M. X pour avoir procédé, au cours des
exercices 2010, 2011 et 2012, au paiement de vacations d’enseignement
à des personnels de
l’école (compte 642100) ou extérieurs à l’école (compte
642200) sans disposer de décisions
ou lettres
d’engagement ; que les fiches de renseignements existantes ne mentionneraient
pas toutes les informations requises par la nomenclature ; que ni les fiches de renseignements,
ni les bordereaux de vacations effectuées mensuellement, ne feraient référence aux taux ou
barème de rémunération
; qu’il
en déduit que le comptable a payé lesdites vacations sans
vérifier si l’ensemble des pièces re
quises au titre de la nomenclature applicable avait été
produit, ni si ces pièces étaient complètes, précises et cohérentes au regard de la nature de
la dépense et notamment de la validité de la créance, consistant, notamment en un contrôle
de l’exactitude
des calculs de liquidation,
l’intervention des contrôles ré
glementaires et la
production des justifications ; que les
paiements en cause s’élèvent à
1 511 883,05
€ au titre
de l’exercice 2010, 1
561 507,15
€ au titre de l’exercice 2011 et 1
480 034,42
€ au titre de
l’exercice 2012
;
Attendu que le comptable en cause fait valoir qu’aucune nomenclature de pièces justificatives
de dépenses ne lui est opposable
; qu’il disposait de tous les éléments nécessaires au contrôle
de l’exactitude des calculs de l
a liquidation et de la certification du service fait ; que, eu égard
à la catégorie des prestataires, une lettre d’engagement n’était pas nécessaire
;
que
l’instruction n°
08-21-
M9 du 23 juillet 2008 dispense les salaires à la journée, à l’heure ou
à la vacation,
d’engagement préalable
;
qu’il invoque diverses circonstances de fait, relatives
au service ou aux contrôles précédents qui expliqueraient les éventuelles insuffisances
relevées par le Procureur général ;
Attendu que, lors de l'audience publique, le comptable a fait valoir, par ailleurs, que le conseil
d'administration de l'établissement avait adopté le barème de rémunération des personnels en
cause, que ce barème avait été introduit dans le logiciel servant à la paye, qu'il avait toujours
contrôlé la qualité de l'ordonnateur et la correcte imputation de la dépense, que divers
contrôles sur sa gestion avaient été favorables et que le label « haute qualité comptable »
avait été attribué à son établissement, que les personnels vacataires n'étaient pas dans une
situation de subordination au regard de la hiérarchie de l'établissement à la différence d'un
salarié contractuel, qu'il reconnaissait que le secrétaire général de l'établissement, par note
du 28 mars 2011 avait donné instruction d'établir des lettres d'engagement de ces personnels,
que, cependant, il avait considéré que la lettre d'engagement aurait fait double emploi avec la
fiche de renseignements, laquelle comportait des éléments relatifs au régime de rémunération
et à l'état civil des personnels concernés ;
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Attendu que les arguments avancés par le comptable relatifs à la décision du conseil
d'administration sur le barème de rémunération, su
r les contrôles qu’il
a pu effectivement
exercer, notamment sur les calculs de la liquidation grâce aux fiches de renseignements, sur
la situation juridique des personnels vacataires, sur les labels reçus pour la qualité de la
gestion comptable, sont sans effet dans la présente espèce puisque l'article 29 du décret n°
62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique prévoit
que «
l'engagement est l'acte par lequel un organisme public crée ou constate à son encontre
une obligation de laquelle résultera une charge. Il ne peut être pris que par le représentant
qualifié de l'organisme public agissant en vertu de ses pouvoirs
», que, en l'espèce, aucune
lettre d'engagement manifestant la volonté de l'ordonnateur d'engager un intervenant et
précisant l'objet de son intervention au sein de l'école, n'a été présentée au comptable ;
Attendu qu'en l'absence de nomenclature définissant les pièces justificatives, il revient
à l'agent comptable de déterminer quelles sont les pièces justificatives pertinentes et
nécessaires à son contrôle, notamment celles qui lui permettent de contrôler la qualité de
l'ordonnateur, la disponibilité des crédits et l'exacte imputation des dépenses ;
Attendu que l'instruction n° 08-021-M9 du 23 juillet 2008 relative aux procédures de dépenses
sans ordonnancement préalable dans des établissements publics prévoit au 3.2.1
que «
certaines dépenses urgentes
» peuvent être payées sans ordonnancement préalable
salaires à la journée, à l'heure ou à la vacation
»), que cette instruction ne pouvait introduire
une dérogation dans le cas d'espèce, les paiements en cause n'étant pas des dépenses
urgentes mais
des dépenses prévisibles et inscrites dans l'activité normale d'un établissement
d'enseignement ;
Attendu que la fiche de renseignements contenant des éléments relatifs à l'état civil et aux
modalités de rémunération des intervenants, ne pouvait tenir lieu de lettre d'engagement, dans
la mesure où elle ne contenait aucune manifestation de la volonté de l'ordonnateur d'engager
ces intervenants ;
Attendu cependant que, dans les circonstances particulières de l'espèce, les calculs de la
liquidation et les éléments relatifs au service fait ayant été effectivement justifiés, il apparaît
que le manquement du comptable résultant de l'analyse ci-dessus, n'a pas entraîné de
préjudice financier pour l'établissement ;
Attendu qu'aux termes du deuxième alinéa du VI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, «
lorsque le manquement du comptable…n’a pas causé de pré
judice financier à
l'organisme public conce
rné, le juge des comptes peut l’
obliger à s'acquitter d'une somme
arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l'espèce
» ; que le
décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette somme à un millième
et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré pour
l'exercice 2010 est fixé à 196 400
€ et
pour les exercices 2011 et suivants à 199 600
€,
qu'ainsi le montant maximum de la somme susceptible d'être mise à la charge de M. X
s’élève
à 294,60
€ pour l'exercice 2010
et à 299,40
€ pour les
exercices 2011 et suivants ;
Attendu que, eu égard aux circonstances, notamment au caractère répété du manquement, il
y a lieu d'arrêter cette somme à 294
€ pour chacun des
exercices 2010, 2011 et 2012 ;
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Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
: M. X devra s'acquitter d'une somme de 294
€ au titre de l'exercice
2010, de 294
au titre de l'exercice 2011 et de 294
€ au titre de l'exercice
2012, en application du deuxième
alinéa du VI de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire
l'objet d'une remise gracieuse en vertu du IX de l'article 60 précité.
Article 2 : La décharge de M. X ne pourra être donnée qu'après apurement des sommes à
acquitter fixées ci-dessus.
Fait et jugé par Mme Annie PODEUR, présidente de section, présidente de la formation ;
MM. Jean GAUTIER, Omar SENHAJI, Jacques BASSET et Mme Michèle COUDURIER,
conseillers maîtres.
En présence de M. Aurélien LEFEBVRE, greffier de séance.
Aurélien LEFEBVRE
Annie PODEUR
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de
la
République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront lé
galement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-16 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions prévues au I de
l’article R. 142
-15 du même code.