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Monsieur le Directeur général,
Par lettre du 8 mars 2002, le président du conseil d'administration a été informé que la Chambre
régionale des comptes d'Aquitaine allait procéder à l'examen des comptes et de la gestion de la
SEMIPER, de l'exercice 1996 jusqu'à la période la plus récente. A la suite de cette vérification,
l'entretien préalable avec le conseiller-rapporteur, prévu à l'article L 241-7 du Code des juridictions
financières, a eu lieu le 13 septembre 2002, avec le président du conseil d'administration.
Par lettre du 10 décembre 2002, les observations retenues à titre provisoire par la chambre lors
de sa séance du 3 octobre 2002, ont été adressées au président en exercice et à l'ancien
président du conseil d'administration ainsi qu'au président du Conseil général de la Dordogne,
principal actionnaire de la société.
Le président du conseil d'administration a répondu par courrier du 13 février 2003 et le président
du Conseil général de la Dordogne le 11 février 2003. La chambre a délibéré et a arrêté ses
observations définitives au cours de sa séance du 27 mars 2003. Elles vous sont adressées en
votre nouvelle qualité de représentant légal de la SEMIPER. Elles sont par ailleurs communiquées
au président du conseil d'administration de la SEMIPER, au président du Conseil général de la
Dordogne et aux Maires de Périgueux, Saint-Astier, Sarlat et Boulazac, en leur qualité
d'ordonnateur des collectivités locales actionnaires de la SEML. Elles sont ici ordonnées de
manière thématique : la situation financière (1) ; le système d'information (2) ; l'avenir de la société
(3).
I - La situation financière :
Le précédent contrôle avait mis en évidence une " situation financière relativement difficile "
caractérisée par des résultats nets négatifs pour les exercices 1991 à 1993, malgré un abandon
de créance de 0,21 MEuros (1,4 MF) de la part du département.
En 1994 et 1995, le résultat net redevenait positif à la faveur de l'encaissement d'une subvention
d'équilibre, versée par le département au titre d'une opération en concession.
La chambre soulignait que, depuis 1989, il existait une grande disproportion entre les capitaux
propres de la société et ses dettes vis à vis des établissements financiers. La situation était
notoirement dégradée puisqu'au 31 décembre 1995 la société se trouvait virtuellement dans
l'impossibilité de faire face à son passif disponible avec son actif disponible.
Au final, la chambre observait que la SEMIPER souffrait d'une insuffisance de fonds propres, par
rapport à la masse des opérations traitées. Il lui apparaissait que la nécessaire augmentation de
fonds propres ne pouvait provenir, à terme, que d'une augmentation substantielle du capital, ce
qui rejoignait au demeurant l'analyse faite par les instances dirigeantes de la société.
Sur la période la plus récente, couverte par le présent contrôle, force est de constater que ces
constats demeurent largement valables. En effet, loin de s'améliorer, la situation financière de la
SEMIPER a continué à se dégrader. Ce constat se trouve conforté tant par l'analyse du bilan que
par celle du compte de résultat.
1-1) L'approche par le bilan
L'approche par le bilan montre de manière évidente l'érosion des capitaux propres de la société
(constitués par le capital social, les réserves, le report à nouveau, le résultat de l'exercice et
les
subventions d'investissement), sur la période 1997-2001 : ils sont passés de 1 331 752,54 Euros
(8 735 724 F) en 1997 à 415 221,42 Euros (2 723 674 F) en 2001. Il apparaît donc qu'entre 1997
et 2001, soit sur seulement 5 exercices comptables, les capitaux propres ont été divisés par plus
de trois, ce qui témoigne des difficultés rencontrées.
L'autre constat tiré de l'analyse du bilan concerne le " fonds de roulement net global " de la
société. Le bilan fonctionnel au 31 décembre 2001 montre que la S.E.M.L. dispose d'un fonds de
roulement net global de 41 565 Euros (272 649 F) alors que le besoin en fonds de roulement
d'exploitation est de 1 957 957 Euros (12 843 356 F). Il en résulterait en conséquence une
trésorerie négative si la société ne bénéficiait pas d'avances de trésorerie substantielles provenant
essentiellement de l'opération en mandat du musée national des Eysies : 2 143 510 Euros (14
060 504 F). Or, cette opération s'achève en 2003 et avec elle va se tarir une importante ressource
de trésorerie de la S.E.M.L.. Comme les données disponibles sur la période 1997-2001 mettent
déjà en évidence une dégradation continue de la situation de la trésorerie, il est à craindre que ce
tarissement ne constitue une circonstance aggravante de nature à tendre encore davantage la
trésorerie, au point que la société pourrait commencer à éprouver des difficultés face à certaines
échéances de paiement, dès 2003.
1-2) Approche par le compte de résultat
L'examen du compte de résultat permet de souligner l'importance des résultats négatifs
enregistrés au cours de la période contrôlée :
L'évolution du résultat net est la suivante, au cours de la période :
*-1997 :
582,81 Euros (3 823 F) ;
*-1998 :
- 290 501,97 Euros (-1 905 568 F) ;
*-1999 :
- 258 792,57 Euros (-1 697 568 F) ;
*-2000 :
23 393,76 Euros (153 453 ) ;
*-2001 :
- 387 307,86 Euros
(-2 540 573 F).
Par conséquent, au 31 décembre 2001, le montant cumulé des pertes est de 0,91 millions d'euros
(5,98 MF), soit près du quadruple du capital social de la S.E.M.L., étant entendu que pour le seul
exercice 2001, la perte s'élève à 0,39 millions d'euros (2,54 MF), en nette progression par rapport
aux exercices précédents.
Cette situation est la conséquence d'une évolution plus rapide des charges (+ 31,8 %) que des
produits (+ 18,8 %). En effet, alors que le total des produits consolidés n'est passé que de 2 973
933,35 Euros (19 507 724 F) en 1997 à 3 531 840,96 Euros (23 167 358 F) en 2001, le total des
charges consolidées est, lui, passé de 2 973 432,86 Euros (19 504 441 F) en 1997 à 3 919 148,82
Euros (25 707 931 F) en 2001.
En ce qui concerne les produits, la chambre a noté une évolution peu favorable du chiffre
d'affaires. En effet, le chiffre d'affaires réalisé en 2001 (2,76 MEuros soit 18,10 MF) permet tout
juste de dépasser le niveau atteint en 1997 (2,65 MEuros soit 17,39 MF), ce dernier faisant suite à
une baisse importante par rapport à 1996. De surcroît, elle a aussi constaté que certaines
prestations demandées à la société, notamment par le département de la Dordogne, son
actionnaire majoritaire, ne donnaient pas toujours lieu à rémunération. C'est ainsi le cas de la
réalisation de l'usine Carlier (absence de convention passée). Il est évident que le manque à
gagner qui en résulte est préjudiciable à la société.
Les frais de personnel ont progressé de 53 %, entre 1997 et 2001, alors que l'activité de la société
retrouvait seulement en 2001 son niveau de 1997. Au lieu d'essayer de réduire ses charges, la
société a procédé à des recrutements sans définir préalablement ses besoins. Par ailleurs, il n'y a
pas toujours eu adéquation entre les compétences individuelles et les tâches qui ont été
initialement confiées à ces nouveaux salariés. Ainsi, les charges de fonctionnement se sont-elles
accrues sans que la valeur ajoutée apportée en contrepartie ne permette d'optimiser
l'investissement humain consenti.
La chambre a noté que le président du conseil d'administration de la société et le président du
conseil général de la Dordogne partagent largement ses analyses sur la dégradation financière de
la société.
II - Le système d'information
Dans ce contexte difficile et persistant, la société devrait attacher un grand prix à la connaissance
exacte de sa situation, tant financière que juridique. Or, la chambre a relevé plusieurs lacunes en
la matière :
*- le tableau annuel de trésorerie, établi par la société, ne dispose pas d'une structure comparable
à celle de l'état informatique de prévision des recettes et dépenses des comptes de disponibilités
bancaires. La fiabilité et la précision des prévisions de trésorerie sont pourtant nécessaires,
surtout en période de difficulté. Aussi, est-il recommandé d'harmoniser l'état annuel de trésorerie
et la situation informatique prévisionnelle des comptes bancaires, de façon à disposer d'un
document prévisionnel de trésorerie sur 12 mois glissants ;
*- les comptes de l'exercice 2001 n'étaient pas arrêtés au 1er septembre 2002. Certes, la société
a finalement obtenu du Président du Tribunal de Commerce une prorogation du délai légal
jusqu'au 30 octobre 2002. Cependant, l'arrêté et l'approbation tardive des comptes n'en restent
pas moins pénalisants pour la bonne information du conseil d'administration et de l'ensemble des
actionnaires de la S.E.M.L.. De plus, il est apparu qu'une grande partie du montant des en-cours
de production de services a été inscrite à l'actif du bilan de l'année 2000 sans respecter les
principes comptables applicables. Cette pratique a permis de dégager un résultat faiblement
positif pour l'exercice 2000 et de masquer la véritable situation de la société ;
*- l'absence de comptabilité analytique ne permettait pas à la société de connaître ses coûts. En
conséquence elle ne pouvait demander une rémunération conforme à ceux-ci. Toutefois, la
chambre prend acte de ce que le système d'information mis en place en 2002 est à présent
opérationnel, en ce qui concerne la comptabilité analytique ;
*- les statuts de la société méritaient d'être actualisés sur un certain nombre de leurs dispositions.
La chambre note que l'assemblée générale du 13 novembre 2002 a permis l'approbation de
nouveaux statuts, actualisés en plusieurs de leurs dispositions, notamment le libellé du capital
social en euro et le changement de l'adresse du siège social. Elle prend acte de ce que, à
compter du 1er janvier 2003, la SEMIPER a exercé son droit d'option, prévu par la loi n° 2001-420
du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques. En effet, la société est
maintenant dirigée par une structure duale, comprenant un président du conseil d'administration et
un directeur général, représentant légal de la société.
*- entre le 29 octobre 2001 et le 15 juillet 2002 (soit une période de près de 9 mois), il n'y a pas eu
de réunion du conseil d'administration. Encore convient-il de préciser que le conseil
d'administration du 15 juillet dernier n'a pu se réunir, faute de quorum. A l'heure où la SEMIPER
se trouve confrontée à des difficultés sérieuses, un tel déficit de vie sociétaire paraît regrettable.
De plus, la société n'adresse aux administrateurs les dossiers à examiner lors de chaque conseil
(convocation + ordre du jour) que 5 jours avant la réunion. Certes, ce délai respecte les
obligations statutaires mais il paraît relativement court, compte tenu de l'importance des décisions
à prendre.
Cependant, sur la période la plus récente, la chambre observe que la société a commencé à
remédier au déficit de vie sociétaire : outre l'assemblée générale précitée du 13 novembre 2002,
deux conseils d'administration se sont également tenus en fin d'année (28 octobre et 20 décembre
2002).
Elle rappelle que la constitution d'un système performant d'information de la société et de ses
actionnaires est nécessaire pour offrir plus de visibilité à ceux qui doivent décider de son avenir.
III - L'avenir de la société
La société est structurellement déficitaire, et ce depuis de nombreuses années. Si la S.E.M.L.,
consciente de ses difficultés, a bien essayé de proposer des solutions destinées à améliorer
notamment son volume d'activités, force est de constater que le précédent Plan à Moyen Terme
(PMT, adopté le 11 mai 2001 et couvrant en réalité la période 2000-2005) se trouve d'ores et déjà
remis en cause. Il ne permettra donc pas d'atteindre les objectifs fixés. La chambre prend
cependant note de la volonté de la SEMIPER de réaliser un nouveau P.M.T. plus réaliste que le
précédent.
Dans l'immédiat, la société ne peut plus se permettre d'avoir un train de vie supérieur à ses
moyens. La chambre a ainsi relevé l'acquisition de deux véhicules de haut de gamme et la
revente de l'un d'eux dans des conditions peu avantageuses, juste quelques mois après l'achat, et
ce pour des convenances personnelles (un autre véhicule a en effet été acquis et affecté à l'agent
concerné). Ayant pris conscience de cette situation, la SEMIPER a d'ores et déjà commencé à
réduire son train de vie, notamment en se séparant du véhicule de l'agent commercial licencié.
La chambre note la volonté affichée par le conseil d'administration de mettre fin, le plus
rapidement possible, aux opérations propres conduites par la société. Loin de redresser sa
situation financière, ces dernières l'ont en effet sensiblement aggravée puisqu'elles ont été
majoritairement déficitaires. Elle note que lors de sa réunion du 20 décembre 2002, le conseil
d'administration de la société a pris la décision de chercher à céder les immeubles en cause aux
communes concernées. La S.E.M.L. ne dispose pas, pour le moment, de la structure financière lui
permettant de se lancer dans d'autres opérations propres. Il semblerait que ses dirigeants en aient
pris récemment conscience, en décidant de se désengager de ce genre d'opération au profit des
opérations sous mandat. Le président du Conseil général a notamment écrit à ce propos que : "
L'examen des comptes montre que le déficit d'exploitation est alimenté par les pertes
d'exploitation des opérations propres de la société. La société s'est donc engagée à ne plus
réaliser d'opérations propres, mais de développer au contraire les opérations de mandats ".
En conséquence, la chambre prend acte des mesures d'ores et déjà arrêtées en vue du
redressement financier de la société :
*- un allégement substantiel des effectifs, ramenés de 18 à 11 salariés à l'issue des procédures de
licenciement en cours ;
*- un train de vie de la société revu à la baisse ;
*- une politique active de cession de patrimoine propre afin de reconstituer sa trésorerie ;
*- une politique commerciale plus dynamique, qui commencerait, selon le président du conseil
d'administration et le président du conseil général de la Dordogne, à porter ses fruits, grâce à des
opérations nouvelles confiées à la SEMIPER.
Enfin, il appartient aux dirigeants de la SEML ainsi qu'à ses actionnaires de prendre une décision
quant au devenir de la société. Il n'est pas possible de faire l'économie d'une réflexion stratégique
et prospective, seule à même de déboucher sur une solution durable. La chambre note que les
premiers éléments d'une telle réflexion ont été apportés par le président du conseil
d'administration de la SEML et par le président du Conseil général de la Dordogne, principal
actionnaire de la SEML.
*- M. Suchod, président du conseil d'administration de la SEMIPER écrit à ce propos que : " La
première action à mener concerne le comblement des pertes. Celles-ci s'élèvent à 0,91 M. d'euros
au 31 décembre 2001 et la solution la plus élégante consisterait à clôturer le dossier CAP de
Boulazac et d'en affecter le résultat à la SEMIPER. En effet, les produits découlant de cette
clôture permettraient de combler le passif de la société. C'est ce que j'a indiqué au conseil
d'administration du 20 décembre 2002, et la SEMIPER s'emploie activement depuis à clôturer
cette opération. Pourrait alors être entrepris le travail de recapitalisation qui doit engager au
premier chef le Conseil général et les autres collectivités locales du département " ;
*- M. Cazeau, président du Conseil général de la Dordogne écrit pour sa part que : " Si dans le
délai de 6 mois que j'ai fixé, la situation apparaît redressée, et les causes du déficit structurel
définitivement éliminées, je proposerai alors au Conseil général que le département, actionnaire
principal, reconstitue les fonds propres de la société, par le biais de la vente de l'usine C.E.P. à
Boulazac et des terrains d'implantation pour un montant de 910 000 Euros. Les fonds propres
ainsi reconstitués, une négociation avec nos partenaires financiers, et notamment la Caisse des
Dépôts et Consignations, sera engagée pour définir le niveau de l'augmentation du capital social ".
Enfin, la chambre prend acte de la démission de l'actuel président du conseil d'administration,
lequel continue néanmoins à expédier les affaires courantes jusqu'à la désignation de son
successeur.
En application des dispositions de l'article L. 241-11 du code des juridictions financières, les
présentes observations définitives de la chambre, accompagné de votre réponse, doit faire l'objet
d'une inscription à l'ordre du jour de la plus proche réunion de l'assemblée délibérante. Il doit être
joint à la convocation de chacun de ses membres et doit faire l'objet d'un débat.
La chambre vous serait obligée de lui faire connaître dans quelles conditions aura été réalisée
cette communication.
En outre, j'appelle votre attention sur le fait que ce rapport accompagné de votre réponse
deviendra communicable à tout tiers demandeur dès qu'aura eu lieu la réunion précitée.
Je vous informe que copie du présent rapport est transmise au préfet et au trésorier-payeur
général du département, en application de l'article R. 241-23 du code des juridictions financières.
Je vous prie de croire, Monsieur le Directeur général, à l'expression de ma considération
distinguée.
réponse de l'ordonnateur :
AQO24060301.pdf